Article 12
Le II de l'article 90 de la loi de finances rectificative pour 1992 (n° 92-1476 du 31 décembre 1992) est abrogé. - (Adopté.)
Article 13
Les dispositions prévues au dernier alinéa de l'article L. 533-3 du code de l'environnement entrent en vigueur au 1erjanvier 2009.
Les autorisations de dissémination volontaire à toute autre fin que la mise sur le marché délivrées avant le 1erjanvier 2009 pour des organismes présentant les caractéristiques énoncées au dernier alinéa de l'article L. 533-3 du même code prennent fin à cette date. - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 13
M. le président. L'amendement n° 245, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 13, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Les critères de classement des organismes génétiquement modifiés en vigueur à la date de la publication de la présente loi s'appliquent jusqu'à leur modification par le décret prévu au dernier alinéa de l'article L. 532-1 du code de l'environnement dans sa rédaction issue de l'article 8 de la présente loi.
La parole est à M. le ministre d'État.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Cet amendement a pour objet d'assurer la validité juridique des décisions d'agrément qui seront prises avant la mise en place de l'ensemble du dispositif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Je suis très favorable à cet amendement.
Je partage totalement le souci du Gouvernement de sécuriser la validité des décisions d'agrément d'utilisations confinées jusqu'à l'adoption d'un nouveau décret, qui sera pris en application du présent projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Je comprends très bien l'intérêt de cet amendement, à savoir sécuriser les autorisations.
Cela étant, le Gouvernement a été capable de mettre en place une Haute autorité sur les OGM, dans une phase de préfiguration ; je ne comprends pas qu'il ne soit pas capable de mettre définitivement ce Haut conseil en place.
Je sais que la navette parlementaire prendra un certain temps, mais pourquoi ne pas en profiter pour poursuivre ce travail de préfiguration ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Ayant commis l'erreur de ne pas vous donner suffisamment de précisions, je vais donc compléter mon avis.
L'amendement n° 245 a le mérite de soulever une autre question, celle du traitement des dossiers de demandes d'essais en champs, qui sont aujourd'hui pendants devant la commission du génie biomoléculaire.
M. Daniel Raoul. Eh oui !
M. Jean Bizet, rapporteur. Or cette commission n'a pas été renouvelée et reste une coquille vide depuis juillet 2007. Ce n'est pas le cas de la commission du génie génétique, dont les membres sont encore en fonction jusqu'en 2009, donc jusqu'au vote définitif de ce projet de loi.
En revanche, il est urgent de prendre un décret renouvelant la commission du génie biomoléculaire. Je souhaite donc entendre M. le ministre d'État pour savoir s'il peut s'engager à le prendre sans délai. C'est une mesure d'évidence visant à mettre en cohérence le ministère de l'écologie et celui de l'agriculture. (M. le ministre d'État fait un signe d'acquiescement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole est à M. le ministre d'État.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux d'abord remercier M. le rapporteur et la commission des affaires économiques dans son ensemble, dont les travaux ont permis de proposer à la représentation nationale un débat fouillé, approfondi, allant au fond des choses.
Je remercie également son président, M. Jean-Paul Émorine, ainsi que les sénatrices et les sénateurs qui, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, ont été nombreux à apporter à ce débat leurs connaissances sur un sujet que chacun porte au plus profond de lui. Leur contribution a permis d'éviter les approximations. Je salue leur capacité d'expertise, leur franchise et je les remercie d'avoir accepté que, sur un certain nombre de points, des interrogations demeurent.
Permettez-moi de formuler quelques observations.
J'avais entendu dire, ici ou là, que le débat au Sénat allait être extrêmement chahuté ; il n'en a rien été.
Mme Isabelle Debré. Mais non, jamais au Sénat !
M. Jean-Marc Pastor. Nous sommes des gens sérieux !
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Je suis navré de dire à ceux qui essaieraient de mettre en scène des conflits majeurs que je n'ai rien trouvé d'autres que des interrogations et, sur certains points, quelques différences d'appréciation, argumentées de part et d'autre.
Ma deuxième observation va chagriner encore plus un certain nombre de commentateurs.
Je rappelle que le Grenelle de l'environnement n'est pas la propriété d'un des collèges ; c'est un accord, un compromis positif et constructif entre les cinq collèges qui y ont travaillé. Il appartient d'évaluer la qualité du travail accompli dans le cadre du Grenelle, non pas à un seul collège, mais aux cinq collèges en même temps.
À la page 19 des délibérations du Grenelle, je lis : « renforcer la recherche autour des biotechnologies et des OGM ; renforcer les disciplines suivantes : toxicologie, écologie, épidémiologie, agronomie, écologie microbienne, etc. »
En matière de renforcement de la recherche, nous sommes allés au-delà de ce qui avait été évoqué lors du Grenelle, y compris sur le plan budgétaire.
Un débat a eu lieu sur les expressions « Haute autorité » et « Haut conseil ». Votre assemblée, à l'unanimité des sénateurs présents, j'y insiste, a considéré que l'expression « Haute autorité » pouvait entraîner une confusion par rapport à d'autres autorités administratives, alors qu'il est précisé clairement, dans les conclusions du Grenelle, que cette Haute autorité ne doit pas se substituer à la décision politique, mais qu'elle doit l'éclairer. C'est donc bien dans l'esprit du Grenelle que cette évolution sémantique a eu lieu.
Ce Haut conseil doit être mis en place dans le courant de l'année 2008, nous y serons. Il doit disposer des moyens humains, financiers, de l'expertise scientifique pluridisciplinaire, nous y sommes. Il devra adopter des avis transparents en public sur chaque OGM végétal et animal, sans se substituer à l'échelon politique de la décision, nous y sommes. Il doit couvrir par ses avis la mise en culture, l'importation, la consommation animale, nous y sommes. Il devait être préfiguré en 2007, nous l'avons fait - d'ailleurs, la préfiguration permet d'adapter, de voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
Une loi sur les biotechnologies doit être adoptée avant l'été 2008, nous y sommes. Cette loi reposera sur différents principes, que je vais énumérer.
Responsabilité : y a-t-il aujourd'hui plus de responsabilité qu'hier ? On peut en débattre, mais il est clair qu'il s'agira d'une loi de responsabilité.
Précaution : à l'évidence, le principe de précaution sera présent dans cette loi.
Transparence et participation : nous répondons à la demande de transparence sur la parcelle.
Non-brevetabilité du vivant : nous nous sommes engagés à ce qu'ait lieu un grand débat national et international, en tout cas européen, au cours du deuxième semestre 2008. Nous tiendrons parole.
Enfin, traitement à court terme des variétés autorisées et de l'activation de la clause de sauvegarde sur le maïs Monsanto : cela a été fait aujourd'hui même et fera, demain, l'objet d'une publication au Journal officiel.
On peut ensuite discuter sur tel ou tel point particulier. Pour ma part, j'aurais préféré que l'on aille un peu plus loin dans un certain nombre de domaines, mais je respecte le débat parlementaire ; au final, c'est au Parlement qu'il revient de traiter de ces questions.
En tout cas, je considère que ce texte de loi représente une gigantesque avancée, qui clarifie les choses, qui favorise la recherche, la transparence, qui permet la mise en oeuvre des principes de précaution et de responsabilité, et la mise en cause de cette responsabilité.
De toute façon, le débat continue. Il va se poursuivre à l'Assemblée nationale, puis ici même, pour une deuxième lecture. Je suis persuadé que la navette permettra encore d'améliorer le texte.
Enfin, je ferai une dernière observation à l'intention de ceux qui sont absolument convaincus que tout ce qui n'est pas OGM relève de l'obscurantisme. Je les mets en garde !
Un rapport international va être prochainement publié, qui fait suite à une étude lancée après Johannesburg, pilotée par l'Organisation des Nations unies, avec le concours de soixante-cinq gouvernements et de quatre mille experts ; la prudence, y compris dans les positions publiques et politiques, s'impose, car les clients et les producteurs ne sont pas tous parfaitement convenables, ou ne l'ont pas toujours été. J'invite donc à l'extrême prudence dans l'expression ceux qui considèrent que, quoi qu'il arrive, cette forme de modernité doit toujours l'emporter sur la raison et la précaution. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Gérard César, pour explication de vote.
M. Gérard César. Monsieur le président, en cette dernière séance avant les élections municipales et cantonales, je voudrais, au nom du président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Émorine, vous remercier.
Je remercie également nos collègues présidents de séance, l'ensemble du personnel du Sénat, notamment les administrateurs de la commission des affaires économiques, qui ont fait un excellent travail.
Monsieur le ministre d'État, je tiens également à vous remercier pour les propos que vous venez de tenir ainsi que pour ceux que vous avez exprimés à l'occasion du Grenelle de l'environnement.
Mes remerciements vont également à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, ainsi qu'à Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie, qui nous a fait le plaisir d'être avec nous pendant de longues heures.
Je tiens aussi à saluer tous les collaborateurs de M. le ministre d'État, pour leur grande efficacité lors des débats sur ce projet de loi, qui est très important pour le futur.
Si, d'aventure, j'ai oublié quelques personnes, je les prie de bien vouloir m'en excuser ! (Sourires.)
M'exprimant maintenant au nom du groupe UMP, je me félicite des débats denses, difficiles que nous avons eus et qui ont permis à chacun d'exprimer ses convictions sur un sujet complexe et aux enjeux multiples.
Comme mes collègues Dominique Mortemousque et Gérard Larcher l'ont souligné dans la discussion générale, le dialogue, l'échange raisonné d'arguments, fondé sur des faits scientifiquement établis, est la seule voie possible.
C'est pourquoi, tout au long de nos travaux, le groupe UMP a toujours plaidé pour plus de débat, plus de transparence, plus de recherche.
Aujourd'hui, nous voterons ce texte, premièrement, parce qu'il répond pleinement aux décisions arrêtées lors du Grenelle de l'environnement, monsieur le ministre d'État. Il définit un cadre rigoureux et transparent pour les OGM, qui se décline à travers deux moyens : le renforcement de la recherche, d'une part - à ce titre, nous sommes très satisfaits de l'annonce de 45 millions d'euros supplémentaires qui lui seront consacrés - et la création d'un Haut conseil des biotechnologies, d'autre part.
Deuxièmement, nous voterons ce texte parce qu'il applique les principes que nous avons toujours défendus en la matière, tels que le principe de précaution, l'information de nos concitoyens, la transparence, la responsabilité et le libre choix de produire et de consommer avec ou sans OGM.
Troisièmement, nous voterons ce texte parce qu'il garantit la coexistence de toutes les cultures, comme l'a voulu notre rapporteur, qu'elles soient biologiques, conventionnelles ou OGM, dans le respect des principes de transparence et, surtout, de précaution.
Enfin, nous voterons ce texte parce que nous sommes attachés à la recherche d'une connaissance la plus certaine possible. Nous souhaitons que les essais puissent continuer dans des conditions sécurisées, dès cette année, et dans l'attente du vote définitif du présent projet de loi.
En conclusion, monsieur le ministre d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes convaincus que ce projet de loi, en particulier grâce aux propositions de notre excellent rapporteur, Jean Bizet, dont nous avons tous apprécié la compétence, l'intelligence et la courtoisie (Applaudissements sur les travées de l'UMP.), est un texte équilibré, qui va permettre d'engager un dialogue constructif avec nos collègues de l'Assemblée nationale au cours de la navette, que nous souhaitons la plus rapide possible. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. La parole à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le ministre d'État, je ne vous cacherai pas que j'ai plus apprécié les dernières phrases de votre intervention que son début, même si vous avez su, avec le brio que l'on vous connaît, lui donner des accents très fédérateurs. (M. Jean Desessard applaudit.)
Les débats sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés n'ont pas été un combat, comme on voudrait le faire croire, entre pro-OGM et anti-OGM.
Ces débats ont été l'expression de deux visions politiques opposées : l'une prête à faire de l'argent au-delà de toute considération éthique, humanitaire et environnementale ; l'autre qui souhaite voir avancer la recherche dans le respect de la santé publique et de la biodiversité, en encourageant la mise au point d'OGM de deuxième génération socialement utiles.
La majorité parlementaire est restée muette, s'alignant systématiquement sur la commission. Ce silence en dit long !
Ce texte pourrait être intitulé : « projet de loi Monsanto ». (Mme Marie-Christine Blandin applaudit.) Même s'il traite de manière plus générale l'ensemble des OGM, sa logique est sous-tendue par le problème du maïs MON 810.
La coexistence entre les cultures OGM et non-OGM est impossible et les risques de dissémination présentent le double inconvénient d'être incontrôlables et irrémédiables. Pourtant, tout est en mis en oeuvre pour multiplier la présence d'OGM sur le territoire.
Ce projet de loi constitue, n'en déplaise au Gouvernement, une véritable négation des objectifs du Grenelle de l'environnement.
Quand aux conséquences sur la santé de nos concitoyens, si la communauté scientifique est encore partagée, nous pensons que les politiques doivent prendre leurs responsabilités et éviter au maximum d'exposer les personnes à des dangers même minimes.
Nous avons tenté d'encadrer ce texte en y introduisant certaines précautions, en renforçant les garanties de transparence. Mais, là encore, les accepter aurait sans doute représenté une trop grande contrainte pour la filière OGM.
Vous avez refusé l'étiquetage des semences et des produits alimentaires. L'opinion publique a été particulièrement méprisée dans ce débat.
Ce projet de loi n'améliorera pas non plus le revenu de nos paysans. Au contraire, la promotion des OGM va renforcer leur dépendance à l'égard des semenciers. Le débat sur les semences de ferme, toujours repoussé à plus tard, montre à quel point les parlementaires font peu de cas des dangers inhérents à la brevetabilité du vivant, qui est une aberration philosophique, éthique et économique.
Nous avons eu l'occasion, dans cet hémicycle, de dénoncer ensemble les dangers de l'uniformisation des saveurs, des produits et des pratiques agricoles imposée par l'OMC et l'Union européenne, qui sont deux cordes au cou de notre agriculture. Cette fois-ci - et c'est fort dommage ! -, la majorité sénatoriale n'a pas été sensible à ces dangers.
En réalité, ce projet de loi tend à imiter, sans en avoir les moyens, l'exemple des pays les plus productivistes du monde - qui ne s'encombrent pas, il est vrai, de considérations philanthropiques, environnementales ou humanitaires - ainsi qu'à asseoir définitivement le pouvoir de grandes multinationales et de grands États sur la souveraineté alimentaire des pays, qui devrait rester une priorité pour tous.
En l'état actuel des connaissances, comme nous n'avons cessé de le dire au cours des débats, le bilan coûts-avantages des OGM joue en leur défaveur.
Le Sénat s'apprête donc à voter un texte qui permettra, certes, de mettre notre législation en conformité avec les directives européennes, mais également de favoriser l'extension des cultures OGM. La France évitera une amende de 168 000 euros, mais à quel prix !
Au regard de l'importance et de la diversité des enjeux que présente le dossier des OGM, nous pensons qu'il serait essentiel de consulter nos concitoyens sur ce sujet. Puisque notre collègue Dominique Braye dénonçait le caractère peu représentatif des participants au Grenelle de l'environnement, nous sommes surpris qu'il n'ait pas voté notre amendement !
Pour conclure, comme l'a cyniquement résumé en une seule phrase le président de la Canadian seed growers' association : « Partout dans le monde, il y a une telle résistance contre l'arrivée de n'importe quelle plante génétiquement modifiée, que le seul moyen de progresser, c'est de pratiquer la contamination. »
Avec ce projet de loi, cette logique a désormais officiellement traversé l'Atlantique ? C'est pourquoi nous ne le voterons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier l'ensemble des acteurs qui ont permis que ce débat puisse se dérouler correctement pendant ces trois journées : le rapporteur, les ministres et tous ceux qui ont contribué à nous éclairer et à donner une touche plus raisonnable à nos propos.
Je ferai trois remarques portant, respectivement, sur l'atmosphère des débats, sur le fond et sur la forme.
S'agissant de l'atmosphère des débats, je me souviendrai longtemps du carton jaune - qui a peut-être viré au rouge, je ne sais pas - adressé à l'un de nos collègues. Ce n'est quand même pas rien ! En tant que parlementaires de l'opposition, nous avons été observateurs, pas acteurs, puisque nous avons refusé de participer au vote. Mais nous avons senti une certaine tension.
Toujours en rapport avec l'atmosphère de cette discussion, j'ai noté, à neuf reprises très exactement, des désaccords entre la commission, le groupe majoritaire et le Gouvernement. Cette situation n'est pas complètement aberrante et tient à la nature même du débat parlementaire. Cependant, en tant que membres de l'opposition, nous sommes en droit de nous interroger lorsque ces divergences portent sur des questions de fond. S'il ne s'agissait que de détails, ce serait différent !
Sur le fond, notre société refuse les OGM ; je n'y reviendrai pas, c'est une réalité. La question est de savoir comment, au travers d'un projet de loi, réaliser la synthèse qui rassurera la société. Comment adopter une approche plus ouverte, plus pédagogique, plus participative ? Telle est la question essentielle posée par ce texte.
Le Grenelle de l'environnement a rendu ses conclusions il y a quelques semaines. Cette démarche s'inspirait justement d'un souci d'ouverture, d'information et de participation. Au bout du compte, à quel résultat sommes-nous parvenus ?
Nous avions préparé, de notre côté, un certain nombre de propositions. Je veux notamment revenir sur celle qui visait à assurer l'information du citoyen. Sur le fond, cette information ne change pas grand-chose, si ce n'est qu'elle répond à une attente. Or nous constatons aujourd'hui que l'on refuse d'accomplir un certain nombre de démarches. Dès lors, les élus et les scientifiques n'ont pas la possibilité d'expliquer aux citoyens, au niveau local, ce qui doit être fait.
Cela est tout à fait regrettable, alors même que vient de s'achever le Grenelle de l'environnement. Tout le monde sait que le blocage dont souffre notre société résulte de l'incapacité où nous nous trouvons d'aller à la rencontre du citoyen pour discuter de ces questions.
À l'issue de ce débat de trois jours, l'ambiguïté persiste, résultat de cette attitude incroyablement frileuse. Nous le déplorons vivement !
Ce n'est pas un problème de droite ou de gauche ! Diffuser l'information, aller à la rencontre des gens, leur expliquer la situation est un acte citoyen, qui correspond à une nouvelle façon de faire de la politique, si nous voulons que notre société accepte le politique.
Sans entrer dans le détail, je reviendrai sur plusieurs points forts qui nous tenaient à coeur.
Que fait-on des OGM qui entrent sur le territoire national alors que rien ne permet de les maîtriser ? Nous légiférons sur nos productions nationales, mais nous n'exerçons aucun contrôle sur ce que nous importons. Comment voulez-vous rassurer les citoyens ?
La brevetabilité du vivant est l'un des autres sujets de préoccupation. Il faut réaffirmer en permanence l'importance du triptyque organisme-gène-fonction : il doit rester sous la maîtrise publique afin que l'on sache bien que n'importe qui ne peut pas faire n'importe quoi dans ce domaine.
Enfin, il faut mettre l'accent sur la recherche, en lui accordant les moyens nécessaires. Les premières étapes de la réflexion doivent porter sur la recherche en milieu confiné. Il importe de conforter les chercheurs dans cette approche en leur délivrant, par l'intermédiaire d'un acteur public, des lettres de commande qui expriment bien une demande de la société. En fonction de l'évolution des choses, s'il faut en savoir plus, nous ne sommes pas hostiles à la mise en place de protocoles permettant de passer de la recherche en milieu confiné à la recherche en plein champ. Pourquoi pas ? Toutes ces questions relèvent bien du débat.
Force est de reconnaître que tous nos amendements qui abordaient ces sujets ont été rejetés. Je le regrette en raison de l'engagement de mon groupe politique depuis le rapport de 2003 et la discussion, dans cet hémicycle, en 2006, du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifié : nous avions tous ensemble voté le rapport, où l'on retrouve l'essentiel de ces propos. Comment peut-on, en quelques années, je ne dirai pas changer d'avis, mais oublier les engagements pris ?
M. Jean-Marc Pastor. Je parlais du rapport de 2003, qui comportait onze ou douze propositions ! Nous avons voté contre le projet de loi de 2006 parce que les points que j'ai évoqués n'y figuraient pas. Ils ne sont pas non plus dans l'actuel projet de loi, et nous le déplorons vivement, monsieur le ministre d'État ! Nous constatons, avec regret, l'impossibilité où nous sommes de mettre en application les conclusions d'un rapport que nous sommes allés présenter à la France entière.
Je conclurai en évoquant la rigidité qui a caractérisé ce débat. En 2006, nous avions dû quitter l'hémicycle parce qu'il était impossible de discuter : alors que l'on prétendait vouloir parler de ce sujet, il n'était pas possible de s'exprimer ! Nous étions à la limite de faire de même, mais nous sommes restés jusqu'au bout. Nous avons tout accepté : nous avons retiré des amendements quand le Gouvernement nous le proposait en prenant des engagements ; cela n'a posé aucun problème !
Il est vrai que nous sommes minoritaires, mais quand même ! Sur des questions de fond, nous devrions pouvoir partager des positions communes sur un tel sujet ; nous en avons fait la preuve dans le passé et nous sommes prêts à le refaire.
L'exigence d'une avancée scientifique permanente montre que, parfois, la réalité dépasse la fiction et, dans le domaine des OGM, notamment, rien ne montre aujourd'hui que c'est la raison qui gouverne le monde... en dehors de la raison du plus fort. Vous nous avez prouvé, une fois de plus, que la raison du plus grand nombre était la plus forte !
Sans revenir sur nos engagements passés, ni sur les votes que nous avons émis avec l'ensemble de la majorité, nous regrettons que la nouvelle relation avec la société prônée par M. le ministre d'État lors du Grenelle de l'environnement, que nous partageons pleinement, n'ait pas été mise en oeuvre à l'occasion de ce projet de loi
Pour cette raison, nous ne voterons pas ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je ne suis pas spécialiste en la matière mais, au cours de ce débat, nous avons assisté à la naissance de deux dispositifs génétiquement modifiés. Tout d'abord, l'urgence a été déclarée sur le projet de loi ; puis le Gouvernement nous a assurés qu'il ferait l'objet d'une navette. Ensuite, après trois jours de débats, nous avons assisté avec plaisir à la naissance d'un « amendement de navette ». Je suis certaine qu'il va contaminer nos collègues de l'Assemblée nationale, ce qui serait une très bonne chose ! (Sourires.)
Plus sérieusement, nous avions bien compris que les marges de manoeuvre étaient faibles s'agissant de la transposition de directives européennes.
En ce qui concerne les consommateurs, la réponse de Mme Kosciusko-Morizet sur l'étiquetage nous a donné quelques garanties. Mme la secrétaire d'État nous a en effet indiqué qu'elle ferait sûrement de ce sujet l'une des priorités de la présidence française de l'Union européenne, de façon à assurer l'information complète des consommateurs.
J'en viens au sujet majeur de mon intervention. Pierre Laffitte, qui soutient, comme vous le savez, toutes les dispositions relatives à la recherche scientifique, avait souhaité approuver le projet de loi présenté par Jean-Louis Borloo. Cependant, il considère que le travail mené par la commission des affaires économiques a trop dénaturé les ambitions du ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables (M. Jacques Muller applaudit.) et s'est trop écarté d'une démarche rigoureuse, scientifique et rationnelle.
Il a par ailleurs apprécié la détermination de notre collègue Jean-François Le Grand et regretté qu'il ait dû retirer la totalité de ses amendements.
Pour l'ensemble de ces raisons, Pierre Laffitte, tout en saluant le mérite de la Haute Assemblée, a souhaité ne pas prendre part au vote.
Le groupe RDSE, comme à son habitude, adoptera une position partagée sur ce texte.
M. le président. La parole est à M. Daniel Soulage.
M. Daniel Soulage. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je me félicite des améliorations apportées à ce projet de loi au cours de nos débats.
Je tiens avant tout à remercier le Gouvernement ainsi que le rapporteur de leur capacité d'écoute et de leur volonté conjointe de faire avancer le débat. Je tiens aussi à saluer l'effort financier important réalisé par le Gouvernement en faveur de la recherche.
À l'issue de nos débats, il me semble que nous avons réussi à concilier, avec succès, l'esprit du Grenelle de l'environnement et le respect de la réglementation européenne.
Pour notre agriculture, il est important de progresser rapidement sur le dossier des OGM. En termes de rendement, d'utilisation d'intrants, de gestion de l'eau ou d'économie d'azote, par exemple, les OGM pourront certainement apporter des réponses dans l'avenir, au même titre que les semences hybrides dans le passé.
Nous devons préserver une agriculture compétitive et augmenter nos rendements pour développer pleinement la chimie verte, objectif inaccessible sans OGM.
C'est pourquoi la très grande majorité des sénateurs de l'UC-UDF, au nom desquels je m'exprime, est favorable aux OGM.
Toutefois, il est nécessaire de préserver la liberté des agriculteurs de choisir leur mode de culture. C'était la position défendue lors du Grenelle de l'environnement et, grâce à l'adoption de l'amendement n° 227, c'est également la position du Sénat.
Je m'en félicite à plusieurs titres. Cette mesure constitue en effet une véritable avancée en matière de liberté de cultiver. Elle permet de rassurer les agriculteurs biologiques, qui craignaient pour leur survie. En outre, elle rassurera les Français, en leur montrant que nous prenons toutes les dispositions nécessaires propres à garantir la sécurité sanitaire. Il faudra bien sûr accompagner cette mesure d'un plan de communication et d'explication des progrès et des bienfaits permis par les OGM, qui, pour l'instant, sont vraiment diabolisés par l'opinion publique.
Pour toutes ces raisons, la plupart des sénateurs de l'UC-UDF voteront en faveur de l'adoption de ce texte.
Il me reste, à cet instant, à féliciter la présidence de la tenue de ces débats et de son autorité. Je souhaite remercier l'ensemble de la commission des affaires économiques, notamment son président, M. Jean-Paul Émorine, ainsi que MM. Gérard César et Jean Bizet. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Muller.
M. Jacques Muller. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, Mme Kosciusko-Morizet saluait ce matin, sur les ondes de Radio-France, une avancée obtenue lors du Grenelle de l'environnement, à savoir la prise en compte spécifique des abeilles. Cela est vrai.
La veille, vous déclariez, monsieur le ministre d'État, que ce débat au Sénat sur les OGM se déroulait bien, et vous nous avez encore expliqué à l'instant que tout s'était bien passé.
M. Charles Pasqua. Oui !
M. Jacques Muller. Eh bien non ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
Sur le fond, tout d'abord, vous avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre d'État, qu'il fallait être extrêmement prudent dans cette affaire.
Or je dois déplorer trois choses à cet égard.
En premier lieu, le texte, tel qu'il vient d'être adopté,...
M. Charles Pasqua. Il n'est pas adopté !
M. Jacques Muller. Le vote est acquis, nous le savons bien ! J'aimerais ne pas être interrompu, monsieur le président ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Cela n'arrivera plus, mon cher collègue !
M. Jacques Muller. Ce texte est une transcription minimaliste de la directive 2001/18/CE, qui tend à demander aux États membres de l'Union européenne d'éviter la présence d'OGM dans les produits ayant été élaborés à partir de végétaux « classiques ».
Nous disposions donc d'une marge de manoeuvre pour faire en sorte que l'agriculture ne recourant pas aux OGM soit effectivement préservée. Or nous ne l'avons pas utilisée, confondant délibérément seuil de détection et seuil d'étiquetage, ce dernier représentant, en fait, un « droit à polluer » accepté à l'échelon européen.
En deuxième lieu, s'agissant du Grenelle de l'environnement, j'ai beau être dans l'opposition, monsieur le ministre d'État, je suis beau joueur. Je me réjouissais profondément des avancées qu'il a permises. Je les ai saluées sans états d'âme, mais je dois constater aujourd'hui à regret que le compte n'y est pas.
En termes d'engagements, le Grenelle de l'environnement avait affirmé - et gravé dans le marbre, espérais-je ! - la liberté de consommer et de produire sans recourir aux OGM. Or cette liberté est devenue celle de consommer et de produire avec ou sans OGM. Nous nions ainsi un aspect essentiel du problème, à savoir la dissymétrie liée à l'introduction d'OGM dans l'environnement, à l'introduction d'éléments génétiques nouveaux, dont nous ne connaissons pas toutes les conséquences sur le long terme.
En matière de prudence, nous n'avons donc pas été fidèles aux conclusions du Grenelle de l'environnement. S'il fallait donner un exemple emblématique de cette réalité, j'évoquerais la manière dont a été instauré le fameux « délit de fauchage » : faucher illégalement un champ de maïs « bio » sera nettement moins sévèrement sanctionné par la loi que faucher un champ de maïs OGM. La loi protège le faible...
S'agissant toujours du Grenelle de l'environnement, il s'était passé quelque chose de formidable : l'émergence annoncée, à l'échelon national, de ce que le chercheur Jean Masson avait expérimenté pendant deux ans sur un site de l'INRA, sous l'égide d'une haute autorité qui ferait véritablement une place à la société civile.
Or le texte que nous allons adopter sur les conseils pressants, pour dire les choses directement, de la présidente en partance de l'INRA, Mme Marion Guillou, créera la situation suivante : deux avis seront formulés par le Haut conseil, émanant l'un de scientifiques, l'autre de représentants de la société civile, le second pouvant être pris en compte ou servir simplement de faire-valoir...
En troisième lieu, je voudrais vous rendre attentifs, mes chers collègues, à la veille des élections municipales, au fait que le texte que nous allons adopter nous place complètement en porte-à-faux, une fois de plus, avec les attentes de l'opinion publique. En effet, un sondage, dont les résultats ont été publiés cette semaine, nous apprend que 71 % des Français estiment qu'un produit étiqueté « sans OGM » doit contenir 0 % d'OGM et rejettent donc l'idée d'un « seuil de pollution » acceptable.
Pourquoi en est-on arrivé là ?
Maire d'un petit village, Wattwiller, je mène depuis trois ou quatre ans avec des gens de tous bords, issus de la gauche, de la droite, du centre ou sans étiquette, une réflexion et une action sur les OGM, dans un esprit de consensus. Nous essayons de protéger une exploitation pratiquant l'agriculture biologique par la voie réglementaire, mais ce n'est pas ici le lieu de développer ce point. J'attendais qu'au Sénat, sur un tel sujet, les clivages politiques soient transcendés et que l'on puisse vraiment discuter du fond, en toute sérénité. Je le dis clairement, cela n'a pas été possible, pour deux raisons.
Premièrement, je dois déplorer que le rapporteur, M. Jean Bizet, soit resté campé, je dirais même prostré, dans une posture idéologique. (Protestations sur les travées de l'UMP.) En témoigne la manière dont nous avons débattu de l'amendement n° 48. Je crois que c'est révélateur. Je regrette en outre que son rapport contienne des présentations partielles ou partisanes des problèmes, s'agissant notamment du marché du maïs. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)