Mme la présidente. La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, une nouvelle fois, nous nous retrouvons - quasiment les mêmes ! -, comme chaque année, pour débattre de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Cela doit faire une bonne quinzaine de fois que j'interviens au Sénat à propos de ce budget, et, chaque fois, je déplore qu'il soit examiné en fin de semaine, comme s'il s'agissait d'un budget annexe.
Mme la présidente. D'habitude, c'est la nuit !
M. Ivan Renar. Ou le samedi !
M. Alain Dufaut. Cette fois, c'est vrai, nous nous en tirons un peu mieux !
Pourtant, à mes yeux, malgré la modestie qu'il affiche par rapport à l'ensemble du budget de l'État, nous considérons qu'il est essentiel eu égard à tout ce que peut apporter de positif et d'enrichissant la pratique sportive.
Cette année, la nouveauté vient du changement de ministre ; c'est vrai que nous commencions à nous habituer à Jean-François Lamour, qui, incontestablement, restera un grand ministre des sports. Outre sa personnalité et son charisme, il aura en particulier eu le mérite de faire bouger les choses, dans des domaines aussi variés que la lutte contre le dopage, la lutte contre la violence dans les stades ou la réhabilitation plus que nécessaire de l'INSEP, à laquelle, dans le projet de budget de cette année, sont encore consacrés 25 millions ou 26 millions d'euros.
Monsieur le secrétaire d'État, comme l'a fait Bernard Murat et avant d'aborder véritablement les crédits de cette mission, le sportif polyvalent et assidu que je suis se doit de vous remercier pour cette belle Coupe du monde de rugby que nous venons de vivre en France. Même si nous l'avons évoquée lors de l'audition du président de la fédération française de rugby, Bernard Lapasset, devant la commission des affaires culturelles, on ne peut passer sous silence le rôle prépondérant que vous avez joué à la tête de l'équipe de France, avec votre complice Jo Maso. Même si le résultat de l'équipe de France n'est pas tout à fait celui que nous espérions, nous savons bien que, dans ce type de compétition, le pays organisateur ne peut pas toujours gagner ! Ce serait trop beau ! (Sourires.)
M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Alain Dufaut. Notre consolation restera ce fabuleux match de quart de finale entre la France et les All Blacks. Pour tous les passionnés de rugby, il demeurera le match de référence de cette Coupe du monde.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Absolument !
M. Alain Dufaut. On peut, tout au plus, regretter que ce n'ait pas été le match de la finale ! Mais je m'égare...
J'en viens donc à l'analyse du budget qui nous réunit ce matin. Les valeurs du sport qu'ont défendues avec ardeur les joueurs français lors de la Coupe du monde de rugby sont parfois battues en brèche par l'inadmissible volonté de certains de s'arroger des victoires indues en s'aidant de produits illégaux, car dopants.
Ici, au Sénat, nous considérons que la lutte contre le dopage doit toujours rester une priorité pour les instances sportives nationales et internationales. À ce sujet, le rapporteur de la loi sur le dopage que je fus souhaiterait, monsieur le secrétaire d'État, vous faire part de sa crainte de voir l'action de l'Agence mondiale antidopage, l'AMA, freinée par la tendance naturelle des Anglo-Saxons à privilégier les résultats au détriment des valeurs sportives.
La récente élection de M. John Fahey à la présidence de l'AMA, dans les conditions que nous connaissons, doit nous inciter à être particulièrement vigilants quant à l'action future de cette instance, à l'application du nouveau code de l'agence et aux sanctions qui seront appliquées aux sportifs convaincus de dopage.
Bien que certains de la volonté de M. Fahey de remplir au mieux la charge qui est désormais la sienne, nous devons, nous qui, en France, sommes à la pointe du combat contre ce fléau, rester les gardiens de l'esprit sportif et les véritables leaders de la lutte antidopage. En effet, nous savons très bien que la conception de ce combat n'est pas tout à fait la même dans notre pays et dans certains pays anglo-saxons. Je crois que la France doit exiger la tolérance zéro et dénoncer toute forme de permissivité.
Tous les jours, l'actualité nous rappelle l'ampleur de ce fléau du dopage, qui bafoue totalement l'éthique sportive.
Hier, c'était l'annonce de l'arrêt de la carrière d'Alexandre Vinokourov, pris dans le Tour de France.
Ce matin, dans l'avion, monsieur le secrétaire d'État, parcourant Paris Match, j'ai lu avec stupeur cette phrase prononcée par Jean-François Lamour : « L'AMA ne prend pas le chemin pour être un gendarme. Ce sont plutôt des prestataires de service que l'on sonne pour venir à des colloques. »
Autre constat, dans le même article : « Aucun contrôle positif lors de la dernière Coupe du monde de rugby », et l'on sait que des contrôles sanguins ont été effectués.
La déclaration suivante est de vous, monsieur le secrétaire d'État, mais je ne sais pas si vous l'avez faite en qualité de membre du Gouvernement ou de sélectionneur de l'équipe de France : « En France, il y a un suivi longitudinal, le joueur ne peut pas se doper. Mais que se passe-t-il en Nouvelle-Zélande ou en Angleterre ? On n'est sûr de rien ! ».
De tels propos dans la bouche de nos ministres doivent nous inquiéter profondément, mais vous avez raison, monsieur le secrétaire d'État, de parler ainsi et de ne pas pratiquer sur ce sujet très important la « langue de bois ».
M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Alain Dufaut. Aussi, je souhaite que vous puissiez, comme l'avait fait Jean-François Lamour avant vous, mettre toute votre détermination et votre engagement dans ce combat fondamental qu'est la lutte contre le dopage. Modestement, ici, au Sénat, nous vous y aiderons.
À cet égard, je tiens à saluer l'amendement déposé par le rapporteur pour avis Bernard Murat et dont l'objet est de majorer de 300 000 euros le budget de l'Agence française de lutte contre le dopage, ce montant venant logiquement s'ajouter à la dotation de 7,31 millions d'euros prévue pour 2008.
En effet, cet organisme, présidé par Pierre Bordry, que nous auditionnons régulièrement, doit être doté de moyens dignes de lui permettre d'assurer au mieux son action de lutte antidopage. Cette tête de pont du savoir-faire français, avec le laboratoire de Châtenay-Malabry, que nous avons visité, doit être valorisée et favorisée, afin de nous permettre de poursuivre notre action et pour que la France le pays le plus actif en matière de lutte antidopage.
Il faut, en particulier, augmenter le nombre de contrôles inopinés, hors compétitions - ce sont les plus efficaces - et durcir le contrôle des autorisations d'usage à des fins thérapeutiques, les AUT, dont certaines, de complaisance, sont de nature à « masquer » l'usage dopant et à remettre en cause la fiabilité des contrôles. Comment peut-on admettre que, sur des courses cyclistes internationales, parfois 50 % des coureurs soient asthmatiques ? Ce n'est pas sérieux ! (Signes d'approbation sur le banc des commissions.)
Par ailleurs, pour assurer véritablement le développement de la pratique sportive dans notre pays, nous devons réaliser l'engagement du Président de la République de porter effectivement les crédits du sport à 3 % du budget global de la France à l'horizon 2012.
Même si, aujourd'hui, on en est encore loin puisque ces crédits n'en représentent que 0,38 %, cet objectif n'est pas ambitieux. Je suis convaincu qu'il suffit d'une véritable volonté politique. Soyez convaincu qu'un tel projet permettrait de dégager beaucoup d'économies dans d'autres catégories budgétaires de l'État, ne serait-ce que sur le budget de la santé ou de la sécurité sociale, et ce n'est pas Roselyne Bachelot qui me contredirait !
La hausse de 2,7 % des moyens financiers accordés par l'État au sport, à la jeunesse et à la vie associative dans ce projet de loi de finances pour 2008 est, il est vrai, surtout lié à la hausse des fonds du CNDS. Cette dernière hausse est essentiellement constituée par l'apport de 20 millions d'euros au Plan national du développement du sport, créé en 2006.
Je comprends parfaitement, monsieur le secrétaire d'État, que vous revendiquiez - comme l'a d'ailleurs fait, Roselyne Bachelot devant la commission des affaires culturelles - ces 20 millions supplémentaires comme faisant partie intégrante de votre budget : vous avez raison. Il reste que ces recettes exceptionnelles peuvent évoluer et que leur pérennité n'est aucunement garantie.
Certes, notre pays doit faire face à une situation budgétaire délicate et le passage de la part des crédits en faveur du sport de 0,38 % à 3 % du budget total de l'État, même en tenant compte de l'évolution du CNDS, sera un exercice difficile à réaliser.
Étant personnellement attaché à cet engagement du Président de la République, il me serait agréable que vous puissiez m'indiquer les moyens que vous comptez mettre en oeuvre pour le réaliser avant la fin du quinquennat.
Je souhaiterais en particulier savoir si, à partir du rapport de notre excellent collègue Pierre Martin, qui a effectué le recensement des équipements sportifs existant il y a deux ans sur l'ensemble du territoire national, vous avez réfléchi à des solutions pour corriger les anomalies qu'il a mises en évidence. Allez-vous établir un véritable projet national de développement de ces équipements sportifs en liaison, bien sûr, avec les collectivités territoriales ?
Enfin, je tiens à rappeler que, si la pratique sportive se développe parmi la population française, il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de nos compatriotes en sont parfois privés par manque de moyens. Je pense notamment aux jeunes habitants des quartiers défavorisés, tout particulièrement aux jeunes filles, surtout celles qui sont d'origine maghrébine.
J'ai constaté sur le terrain, en ma qualité d'adjoint aux sports d'une grande ville, que le sport constitue pour elles un outil d'émancipation non négligeable, leur permettant de s'épanouir, sans avoir à se soumettre à des règles qui, parfois, leur sont imposées par leur propre famille.
L'État a donc décidé d'attribuer, à juste raison, des crédits supplémentaires à ce dossier de la pratique sportive dans les quartiers défavorisés. Soyez-en félicité, monsieur le secrétaire d'État.
J'aimerais, si cela est possible, connaître la répartition prévue par vos services de ces crédits et savoir si des actions avec les grandes fédérations sportives ont été envisagées pour favoriser la pratique sportive des jeunes filles de ces quartiers dans des clubs de sport collectif, dans chacune des villes de notre territoire, comme je l'avais fait moi-même à la fédération française de volley-ball.
Vous avez compris quelles étaient, pour beaucoup d'entre nous, les priorités : une politique sans aucune complaisance dans la lutte contre le dopage ; un véritable plan national de diversification de nos équipements sportifs, en relation avec les collectivités territoriales et, en particulier, les EPCI, car c'est l'avenir ; un effort tout particulier pour favoriser la pratique sportive dans les quartiers défavorisés, surtout en direction des jeunes filles.
Il s'agit, bien sûr, globalement, de respecter l'engagement du Président de la République de voir, durant son quinquennat, le sport devenir une véritable priorité nationale.
En conclusion, soyez assuré, monsieur le secrétaire d'État, que vous trouverez au Sénat des parlementaires déterminés à vous soutenir afin de réaliser cette légitime ambition.
Le groupe UMP auquel j'appartiens votera bien sûr votre budget, plein de promesses pour l'avenir du sport français. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté aujourd'hui comporte certainement des aspects très satisfaisants mais, globalement, les 782 millions d'euros que l'État consacre au sport sont évidemment très éloignés des promesses faites par le Président de la République au cours de la campagne pour l'élection présidentielle.
Nous ne sommes cependant qu'au début du mandat et il nous reste à espérer que les crédits destinés au sport, à défaut de parvenir immédiatement aux 8 milliards d'euros promis, augmenteront au cours des années suivantes dans des proportions substantielles. À vos côtés, monsieur le ministre, nous ferons ce qu'il faut pour y parvenir.
Les ressources extrabudgétaires du CNDS, l'ancien Fonds national de développement du sport, ou FNDS, s'élèvent à 266 millions d'euros, soit 30 millions d'euros de plus qu'en 2007. L'avenir du CNDS pourrait cependant être quelque peu assombri par la perspective de l'inévitable ouverture à la concurrence des jeux et paris sportifs. Or le CNDS joue un rôle non négligeable dans le financement de la construction d'équipements sportifs réalisés par les collectivités territoriales.
Cela fait en effet bien longtemps que l'État ne finance plus directement ce type d'investissements : les clubs et associations sportifs ne peuvent finalement plus compter que sur la générosité des communes - et les petites communes, notamment, n'ont guère les moyens d'être prodigues -, de leurs groupements, voire des départements ainsi que, c'est vrai, du CNDS. Mais force est de reconnaître que l'effort consacré par cet organisme aux clubs et associations de province est insuffisant, comparé à celui qui réalisé en faveur du sport de haut niveau.
Ce problème n'est pas nouveau mais, là comme ailleurs, on a le sentiment que s'est instaurée une aide au sport à deux vitesses : une vitesse marathonienne pour les petits clubs et une vitesse de sprint pour les grands. Cette situation ne sera pas éternellement supportable.
S'agissant à présent des crédits de fonctionnement, la baisse continue de ceux qui sont consacrés à la promotion du sport pour le plus grand nombre est inquiétante : elle atteindra 46% en 2008 par rapport à 2007, même si, semble-t-il, une compensation est attendue grâce au CNDS, encore une fois. Les sportifs sont là pour participer- vous nous l'avez démontré -, pour gagner aussi - pourquoi pas ? C'est leur rôle -, mais les collectivités locales doivent les accompagner le mieux possible, c'est-à-dire les aider à préparer leurs succès futurs en assurant le confort qui doit régner autour de chacun d'entre eux.
Comment, dans ces conditions, continuer à faire vivre des clubs de province qui ont déjà bien du mal à « joindre les deux bouts » ? Je citerai comme exemple un club que j'ai la chance - ou l'honneur - de côtoyer dans ma propre commune, qui compte moins de 600 habitants. Il s'agit d'un club de triathlon qui évolue en division nationale et qui vient de terminer la saison vice-champion de France. Comment ce club pourra-t-il poursuivre son parcours alors que ses dirigeants sont venus me trouver récemment pour me dire qu'il leur manquait de 50 000 à 80 000 euros pour la saison prochaine, faute de quoi ils devront se résigner à une rétrogradation ?
J'avoue que je me suis senti dans une position délicate. Je leur ai promis de faire le nécessaire et je pense que nous trouverons, au moins pour une année, les moyens qui leur permettront de continuer. Il demeure regrettable, dans de telles conditions, que le sport dépende d'impératifs financiers, face auxquels nous nous trouvons parfois impuissants.
Si les collectivités locales veulent maintenir ce niveau de performance sportive, c'est en entourant les sportifs qu'elles y parviendront. Malgré les efforts fournis par de rares bénévoles qui portent les clubs à bout de bras, j'espère que le degré de richesse des clubs ne déterminera pas, à terme, la valeur sportive de ses membres.
Si nous voulons maintenir des sportifs de haut niveau au sein de ce club, nous devrons dégager des moyens pour y parvenir, tâche difficile pour une petite collectivité. Pouvons-nous espérer une aide ponctuelle de votre ministère ou du CNDS, ou par toute autre voie ? Il est sûr que nous ne pourrons pas tenir longtemps dans ces conditions ; c'est actuellement une question de survie qui est posée. J'ajoute que des investissements importants doivent être réalisés pour autoriser ce club à persévérer.
Les crédits consacrés par l'État à la jeunesse et à la vie associative, d'un montant de 132 millions d'euros, diminuent de 2,6% par rapport à 2007. Suffiront-ils au secteur associatif, qui compte 12 millions de bénévoles et 1,6 million de salariés, pour un total de 20 millions de membres ?
Depuis plusieurs années déjà, on observe un essoufflement du bénévolat, qui ne semble pas spécialement intéresser les jeunes générations, ce qui est tout de même très inquiétant ! De plus, les élus sont parfois harcelés par l'administration, voire la justice - je suis bien placé pour le savoir - qui assimile un peu trop facilement le bénévolat sportif à du travail clandestin. Or, dans notre société bien trop individualiste, je pense qu'il faut sensibiliser par tous les moyens les jeunes au don de soi, à la générosité d'un engagement sportif et associatif au service des autres.
Pour ma part, j'ai appuyé l'idée d'un service civique obligatoire pour tous les jeunes gens et jeunes filles qui pourraient consacrer ce temps à des missions d'intérêt général, au service des associations sportives, de jeunesse ou d'éducation populaire, par exemple, ce qui constituerait pour eux une expérience très intéressante de brassage social. Je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d'État, où en est la réflexion du Gouvernement sur ce sujet.
Le dernier point que j'évoquerai est la lutte contre le dopage : j'ai déjà eu l'occasion, voilà quelques années, de livrer mon point de vue à votre prédécesseur sur ce sujet. J'ai été effaré, en lisant les résultats d'une étude, d'apprendre que l'utilisation des produits dopants concernait également les collégiens et lycéens qui s'adonnent à la pratique sportive et que ce phénomène n'était absolument pas circonscrit à certains sports comme le cyclisme. Monsieur le secrétaire d'État, où allons-nous ? Les sportifs concernés, au-delà de l'aspect de tricherie, savent-ils qu'ils risquent d'abréger leur vie ?
À cet égard, la stagnation des crédits destinés à la prévention et à la protection de la santé des sportifs ainsi que la baisse de ceux consacrés à leur suivi longitudinal me préoccupent : la lutte contre le dopage ne constituerait-elle plus une priorité nationale ? Franchement, je ne peux pas le croire et je compte sur vous, monsieur le secrétaire d'État, pour me rassurer sur ce point.
Enfin, j'ai été heureux de constater que nos collègues députés ont actualisé l'assiette de la taxe sur les droits de télédiffusion des manifestations sportives qui alimente le CNDS et qui constitue un excellent outil de solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur. Espérons que les nouvelles ressources ainsi dégagées permettront d'augmenter l'aide apportée aux « petits » clubs sportifs de province !
Malgré les insuffisances que j'ai pu signaler et les difficultés que j'ai soulignées, mais en nourrissant l'espoir de voir les promesses effectivement tenues, c'est avec plaisir, monsieur le secrétaire d'État, que je soutiendrai et voterai votre budget. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je partirai tout d'abord d'un constat, car certains éléments de ce projet de loi de finances non relevés par mon collègue Bernard Murat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, méritent d'être soulignés.
Je veux parler, par exemple, de la diminution de près de 50 % des crédits inscrits à l'action « Promotion du sport pour le plus grand nombre », qui passent de 41 millions d'euros à 22 millions d'euros. Faut-il comprendre que le Gouvernement abandonne la quasi-totalité de ce secteur au profit du CNDS ? Nous constatons aussi que l'intervention de l'État ne représente que 2 % de la dépense sportive nationale et se décline en une stratification de dispositifs parcellaires accumulés au fil des années ! De leur côté, les collectivités territoriales investissent quinze fois plus au profit du sport pour le plus grand nombre.
Il faut également parler des crédits budgétaires destinés au développement de la pratique sportive des jeunes en âge scolaire et des habitants des quartiers défavorisés, financés dans le cadre du Programme national de développement du sport, par une enveloppe de 73 millions d'euros, contre 120 millions d'euros en 2007, provenant de crédits temporairement prélevés sur les fonds du CNDS. Cette situation est très préoccupante, car le PNDS n'est financé que pour trois ans par un prélèvement complémentaire exceptionnel sur les recettes de la Française des Jeux et par l'augmentation du produit de la taxe de 5 % sur les cessions de droits de diffusion télévisuelle des compétitions et manifestations sportives.
L'année 2008 sera la dernière année de mise en oeuvre de ce plan et on constate que, sur trois ans, l'État a relevé par deux fois le montant du prélèvement : 20 millions d'euros en 2007 auxquels s'ajoutent encore 20 millions d'euros en 2008, pour atteindre un total de 160 millions d'euros. On peut légitimement s'interroger sur les conditions de financement de ces politiques au-delà de 2009.
S'agissant du développement du sport de haut niveau, pour l'année olympique à venir, les moyens demandés semblent croître significativement : 152 millions d'euros, soit 70 % du programme, en augmentation de 13 % par rapport à 2007 et de 35 % par rapport à 2006.
Mais, à périmètre constant, la dotation budgétaire diminue de 11 % puisqu'elle intègre, en 2008, la compensation des exonérations des charges sociales accordées au titre de la rémunération du droit d'image de plus de mille sportifs professionnels, soit 32 millions d'euros de remboursement à l'ACOSS, en augmentation de 113 % par rapport à l'année dernière.
Parallèlement, les crédits de développement des pratiques sportives pour tous, qui permettent notamment l'accueil des jeunes dans les écoles de sport en dehors du temps scolaire, enregistrent une baisse de 4,5 %, atteignant 3,59 millions d'euros en 2008, contre 3,76 millions d'euros en 2007 et 7,58 millions d'euros en 2006.
De même, les crédits pour l'accès des publics particuliers à la pratique sportive et pour les actions éducatives et sociales de sport enregistrent une baisse de près de 17 %.
Enfin, nous constatons que 45 % de l'enveloppe des dépenses d'intervention concernant le soutien à l'activité et au fonctionnement du mouvement sportif national sont affectées aux fédérations olympiques, ce qui ne laisse pas grand-chose aux petits clubs.
Ce budget souligne le démentiel effort consenti pour une minorité, en l'occurrence mille personnes, par rapport à la diminution dramatique des moyens destinés au plus grand nombre !
La stagnation, à hauteur de 15,6 millions d'euros, des crédits de l'action « Prévention par le sport et protection des sportifs », suscite également des inquiétudes majeures. Le budget prévisionnel de l'Agence française de lutte contre le dopage, l'AFLD, est évalué à 7,8 millions d'euros, contre 7,6 millions d'euros l'année dernière. La faible augmentation des moyens octroyés ne permettra guère à l'agence de procéder à des investissements, notamment dans le secteur de la recherche, et fait douter, face à l'ampleur du dopage, de sa capacité à remplir ses missions de manière crédible et efficace.
De plus, l'érosion se poursuit concernant le poste « Médecine et prévention du dopage », avec une baisse de 17,2 %, ses crédits atteignant 6 millions d'euros en 2008 contre 7,25 millions d'euros en 2007.
Au moment où votre prédécesseur, M. Jean-François Lamour, vient de renoncer à briguer la présidence de l'Agence mondiale antidopage, au moment où le directeur de l'Agence française de lutte contre le dopage, M. Pierre Bordry, déplore publiquement le manque de coopération de votre ministère et la pénurie de moyens financiers et humains dont souffre son agence, pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous assurer de votre détermination à lutter énergiquement contre le fléau du dopage ?
Avec ce budget, comment pouvons-nous croire que le combat pour l'intégrité physique et morale des sportifs sera poursuivi et amplifié ? Il faut développer les efforts de prévention, agir sans faiblesse dans la lutte contre le dopage, agir dans l'urgence afin que l'Agence mondiale antidopage, conserve des objectifs ambitieux - et rien n'est acquis d'avance.
L'évidence de ce combat est telle que la commission des affaires culturelles a souhaité renforcer les moyens de l'Agence française de lutte contre le dopage en lui attribuant 300 000 euros, mais cette somme serait, hélas ! prélevée sur les crédits destinés à la promotion des actions en faveur de la jeunesse, qui baissent de 1,5 % en euros constants. J'y reviendrai au moment de la discussion de cet amendement.
Laissez-moi également vous interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur les défis que doit relever le monde du sport. De nombreux acteurs du monde économique et financier ont la volonté de faire du sport une activité marchande comme les autres. Qu'en pensez-vous ? Quelle réaction suscite chez vous le souhait exprimé par certains grands clubs de créer des ligues professionnelles sur le modèle franchisé américain, qui entreraient en concurrence avec les compétitions européennes existantes ?
Loin de cette marchandisation à outrance, loin du « sport business », des millions de Français, de tous âges et de toutes conditions, le plus souvent des bénévoles désintéressés, s'adonnent chaque semaine à leur discipline sportive favorite. Vous comprendrez qu'ils souhaitent à présent vous entendre parler de votre conception du sport et de vos projets, alors même que votre budget semble favoriser une minorité de professionnels au détriment du plus grand nombre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, récemment, Mme Bachelot a accueilli une délégation syndicale en se présentant comme « la ministre de la jeunesse et de la santé ». La formule n'était pas anodine : la composition du gouvernement Fillon est en effet marquée par la disparition du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative, au profit d'un regroupement un peu curieux, manifestant une conception sanitaire, que l'on connaît bien, de l'action publique en faveur de la jeunesse et du sport.
Les acteurs du mouvement associatif et de l'éducation populaire n'ont d'ailleurs guère été rassurés par la nomination d'un proche du Président de la République - mais là n'est pas le problème - au Gouvernement en tant que secrétaire d'État chargé uniquement des sports.
Certes, monsieur le secrétaire d'État, cette proximité avec le chef de l'État ne nuit pas, semble-t-il, au budget dédié au sport, dont les crédits, en intégrant ceux qui sont alloués au Centre national pour le développement du sport, progressent de plus de 6 %, en euros constants entre la loi de finances initiale de 2007 et le projet de loi de finances pour 2008.
Toutefois, cette hausse significative profite en fait seulement au développement du sport de haut niveau : les moyens que l'État prévoit d'y consacrer en 2008 augmentent de plus de 13 % par rapport à 2007. Ce mouvement signe le retrait de plus en plus marqué du ministère chargé de la jeunesse et des sports du soutien à la pratique amateur du sport.
Cette tendance structurelle, qui se lit dans les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2008, participe en fait fondamentalement de la politique conduite par la droite au pouvoir depuis 2002. L'action publique en faveur de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative est la grande perdante de cette politique.
Déjà, l'une des premières décisions du gouvernement Raffarin avait consisté à supprimer 350 000 emplois-jeunes déployés dans 37 000 associations. Déjà, les crédits en faveur de la jeunesse et de la vie associative avaient connu des coupes claires dans la loi de finances de 2005, avant que le gouvernement d'alors, confronté aux émeutes urbaines de l'automne, ne réinjecte un peu d'argent dans le tissu associatif en 2006.
Depuis, le désengagement de l'État a repris, et il se poursuivra en 2008, comme le montre d'ailleurs le rapport sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » rédigé au nom de la commission des finances par notre collègue Michel Sergent. C'est ce que montre aussi la comparaison de la prévision budgétaire pour 2008 avec l'exécution du budget de 2006.
La loi de finances initiale de 2006 avait porté à 134,4 millions d'euros l'effort de l'État en faveur du programme « Jeunesse et vie associative », à la suite de l'inscription, lors des débats parlementaires, de 8,3 millions d'euros supplémentaires dédiés au plan d'urgence pour les banlieues. Cet effort n'est plus que de 132,1 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2008. Il est toujours intéressant de mettre en perspective la réduction structurelle des engagements financiers.
Alors que le Gouvernement se vante de développer l'accompagnement éducatif après la classe, le financement des projets éducatifs locaux bénéficie de seulement 200 000 euros de plus que la somme consommée à ce titre en 2006, ce qui représente une baisse non négligeable en euros constants.
Alors que le Gouvernement se prévaut d'encourager la mobilité internationale des jeunes, les subventions à l'Office franco-allemand pour la jeunesse et à l'Office franco-québécois pour la jeunesse ne devraient atteindre que 13,25 millions d'euros en 2008, contre 13,9 millions d'euros versés en 2006. Encore une baisse !
Quant aux actions en faveur de l'éducation populaire, elles subissent de plein fouet l'effort de prétendue maîtrise des dépenses publiques, que le Gouvernement fait porter uniquement sur les politiques de solidarité et de protection sociale. On a vu, avec l'instauration du bouclier fiscal, que d'autres domaines étaient épargnés !
Ainsi, le soutien à l'emploi associatif par l'intermédiaire du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire, le FONJEP, devrait mobiliser 26,45 millions d'euros en 2008, soit une augmentation de ces crédits de 1 % en euros courants, c'est-à-dire une évolution négative en euros constants. Tout cela n'est que de l'affichage...
Il faut aussi noter qu'il est difficile de mesurer les résultats de la mise en oeuvre du dispositif lancé en 2006 pour inciter des jeunes à devenir animateur ou éducateur - le « parcours animation sport », le PAS -, qui doit bénéficier de 2,8 millions d'euros en 2008.
L'enveloppe budgétaire allouée au financement d'actions de formation à la conduite de projets associatifs, par l'intermédiaire du Conseil du développement de la vie associative, baissera également, en euros constants, entre 2007 et 2008. Quant aux crédits mis à disposition des directions régionales et départementales de la jeunesse et des sports pour soutenir le mouvement associatif local, ils sont en diminution de 14 % par rapport à ceux qui étaient inscrits dans la loi de finances initiale de 2007.
Enfin, présenté dans les documents officiels comme un « axe prioritaire de l'action du ministère », le soutien aux associations nationales agréées de l'éducation populaire devrait mobiliser, en 2008, des crédits à peine égaux, en euros courants, à ceux qui ont été consommés en 2006, et inférieurs de plus de 14 % à ceux qui étaient prévus dans la loi de finances initiale de 2007 ! Où est la priorité ?
À la lecture de ces chiffres, on ne peut que s'inquiéter : alors que les politiques en faveur de la jeunesse et de la vie associative contribuent, de manière décisive, à créer et à entretenir le lien social, tant dans les quartiers urbains en difficulté qu'entre les générations, le Gouvernement confirme, dans son projet de budget pour 2008, la tendance, observée depuis 2002, au désengagement systématique de l'État du soutien à l'éducation populaire et au mouvement associatif.
Dans ce contexte, on ne peut que soutenir l'amendement présenté par le rapporteur spécial, Michel Sergent, tendant à transférer 3 millions d'euros du programme « Sport » vers les crédits alloués à la « promotion des actions en faveur de la jeunesse » et à la « promotion des actions en faveur de l'éducation populaire », et on ne peut qu'afficher son scepticisme quant à la portée réelle de la déclaration du secrétaire d'État chargé des sports faite le 5 décembre dernier, dans la presse locale, en faveur de la création d'un service civique obligatoire pour les jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans.
En effet, pour avoir beaucoup travaillé sur ce projet avec les associations et les acteurs concernés afin d'essayer d'en chiffrer le coût, en vue de le mettre en oeuvre si nous arrivions au pouvoir (M. Alain Dufaut rit), je connais le caractère très « budgétivore » d'un tel dispositif, qui est néanmoins intéressant et nécessaire.
En tout état de cause, les effets d'annonce ne suffisent pas. Quand ce chantier sera-t-il ouvert, alors que rien n'est prévu dans le projet de budget ? J'espère que l'on n'ira pas prélever des crédits déjà affectés pour financer la mise en place de ce dispositif. Souhaitons que ce débat budgétaire nous apporte quelques éclaircissements sur ces points, monsieur Laporte ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)