M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, dans le cadre de l'examen de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », je voudrais solliciter l'indulgence du Sénat et m'interroger quelques instants sur ce qu'est cet État dont nous parlons tant.
Sur l'État, Jacques Donnedieu de Vabres, le père de notre précédent ministre de la culture, a écrit un jour dans un ancien et excellent Que sais-je ? : « L'État moderne ressemble au cercle de Pascal dont le centre est partout et la circonférence nulle part. Il n'y a pas de problème politique en soi, il n'y a que des problèmes d'organisation sociale dont l'opinion s'empare et auxquels elle subordonne l'exercice du Gouvernement ». Selon les époques et les mouvements d'opinion, en effet, on voit tour à tour la justice, l'Église, l'enseignement, l'industrie lourde, les transports, resserrer ou détendre leurs rapports avec l'État. Jacques Donnedieu de Vabres ajoutait : « L'entretien des cathédrales, la culture des fleurs, la production des parfums ou les dessins de mode sont ou peuvent être des services publics, aidés au nom de l'intérêt général. »
Cette conception opérationnelle et utilitariste de l'État, exposée avec un scepticisme élégant en 1954, n'a rien à voir avec le cri d'alarme passionné poussé par Michel Debré, sept ans auparavant, dans son célèbre ouvrage La mort de l'État républicain : « Notre État est incohérent. Notre État est ruineux. Notre État est inefficace. Notre État est inhumain. Avons-nous même un État ? »
Aujourd'hui, où en sommes-nous ? Les pouvoirs publics, que ce soit l'exécutif ou le législatif, oeuvrent dans le cadre de la LOLF et de la RGPP, la révision générale des politiques publiques.
Nous ne sommes pas au lendemain de la guerre de 1870, quand le vieil Ernest Renan appelait à une « réforme intellectuelle et morale ». Nous n'avons pas à construire une Ve République, parce que celle-ci existe et que c'est elle que nous servons.
Plus modestement, et plus difficilement peut-être, il s'agit, après des années sans doute trop aisées, de réparer, comme dans un chantier archéologique, les trous et les dégâts qui enlaidissent le domaine de cette « pauvre petite fille riche » qu'est devenue la France.
Dans ce chantier multiforme, nos rapporteurs, MM. Henri de Raincourt, José Balarello et - à propos d'une mission voisine de celle-ci, la semaine dernière - Paul Girod s'interrogent et dégagent un certain nombre de points nodaux.
À la question angoissée et sans doute excessive, même à cette époque, posée par Michel Debré, ils répondent : « Oui, nous avons un État, mais il mérite d'être mieux géré ». Cet État, comme l'avait entrevu Jacques Donnedieu de Vabres, ne saurait se désintéresser d'aucune activité, d'aucun sujet, quand brusquement l'opinion s'en entiche.
Seule différence avec les années cinquante, ce n'est pas l'extension des services publics qui constitue aujourd'hui la réponse à cette inquiétude, mais plutôt l'inverse : non pas forcément la privatisation, au plein sens du terme, mais en tout cas l'emprunt d'un modèle entrepreneurial, inspiré des expériences étrangères.
Oui, l'État à l'ancienne recule. Dans son rapport écrit, notre collègue Henri de Raincourt relève avec intérêt l'expérimentation tendant à fusionner l'ensemble des services de l'État sous l'autorité du préfet, mais il s'interroge aussitôt sur le rôle et la pérennité de nos sous-préfectures, présageant peut-être une réforme qui, si elle était mise en oeuvre, ne serait pas moins lourde de conséquences dans nos départements que celle de la justice.
Tout aussi frappant - peut-être même plus, dans l'ordre du symbole - est le constat que faisait notre collège Paul Girod dans son rapport sur le compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». La distinction entre l'État propriétaire et les administrations occupantes ouvre une brèche déroutante dans nos habitudes. La transformation des services des domaines en une entité appelée « France Domaine » et la création du Conseil de l'immobilier de l'État modifieront en profondeur le visage de notre administration. De telles innovations ne sont pas sans risques, comme le montre le cas de l'Imprimerie nationale.
Mes chers collègues, je ne vous cacherai pas le sentiment de mélancolie qui m'envahit quand j'apprends que tel hôtel au nom prestigieux ou poétique a été vendu à une société étrangère ou à une ambassade.
Sans doute s'agit-il d'une déformation due à de trop longues années passées au service de ce que l'on appelait alors, et que l'on n'appelle plus, la haute fonction publique.
Je souhaite donc que la réforme de l'État et de ses services publics continue, qu'elle s'approfondisse, mais qu'elle ne ternisse pas ce reflet lumineux qui accompagnait jadis le service de l'État. Après tout, nous sommes également au service de l'État, nous, les parlementaires.
Toutefois, je me veux rassuré quand je lis le discours prononcé par le chef de l'État à l'IRA, l'Institut régional d'administration, de Nantes, là où se forment justement les meilleurs éléments de notre administration générale et territoriale - je laisse volontairement l'ÉNA de côté. (Sourires.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Vous pourriez la citer !
M. Yann Gaillard. Je relève, en effet : « En France le service public ce n'est pas seulement une profession, ce n'est pas seulement un métier, c'est une vocation [...] Dans le développement, le non-marchand est aussi important que le marchand, la qualité aussi décisive que la quantité, l'immatériel aussi crucial que le matériel ». Mes chers collègues, c'est signé Nicolas Sarkozy. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour la première fois, un rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale, présenté le mardi 30 octobre dernier, établit un classement national en matière de délais de traitement des documents administratifs. On peut y constater que les écarts de performances établis en 2006 sont, dans certains cas, particulièrement importants.
À titre d'exemple, pour obtenir une carte nationale d'identité, il faut compter un jour et des poussières dans le territoire de Belfort et un peu plus de trente-sept jours en Seine-Saint-Denis. Pour le passeport électronique, si le délai moyen de traitement des demandes n'excède pas une journée dans une douzaine de départements, les habitants des Pyrénées-Orientales doivent, eux, patienter vingt-trois jours en moyenne.
Les dotations attribuées à chaque département connaissent également des variations importantes. À une extrémité du classement, on trouve la préfecture du Nord, un département comptant 2 576 000 habitants, qui est dotée de 16,63 euros par habitant, et celle du Pas-de-Calais, laquelle bénéficie, pour chacun des 1 456 000 habitants de ce département, de 17,14 euros. À l'inverse, la Lozère, avec 77 000 habitants et 77,43 euros par habitant et la Corse du Sud, avec 128 000 habitants et 79,47 euros par habitant sont les départements les mieux lotis, semble-t-il.
De plus, il règne une certaine opacité dans l'affectation des budgets. En effet, l'exécution du budget du ministère de l'intérieur en 2006 fait apparaître d'importantes anomalies.
Les crédits votés par le Parlement dans le cadre de la mission « Administration territoriale de l'État », qui recouvre l'ensemble des missions des préfectures et des sous-préfectures, soit 1,6 milliard d'euros - une somme à peu équivalente à celle qui est prévue pour cette année également - ont certes été utilisés dans leur quasi-totalité. Cependant, en fonction des différentes actions, les montants consommés sont tous très éloignés des dotations initiales.
Malgré les constantes dénégations de M. Claude Guéant, ancien directeur du cabinet de M. Sarkozy au ministère de l'intérieur, à présent secrétaire général de l'Élysée, les parlementaires sont en droit de connaître la manière dont sont affectés les budgets qu'ils ont votés.
Il existe donc d'importantes inégalités territoriales entre les préfectures, ainsi qu'une certaine opacité, en ce qui concerne leurs activités comme leurs ressources.
Or, au moment même où la réorganisation de la carte judiciaire suscite une polémique sans précédent, on voit se dessiner un projet de réorganisation du réseau des sous-préfectures dont tout indique qu'il réduira encore plus les moyens alloués à l'administration territoriale. Le « grand chantier de la réorganisation des services publics » lancé par le président de la République risque bien, à terme, de faire disparaître un nombre indéterminé - pour l'instant du moins - de sous-préfectures.
En somme, après la carte judiciaire, nous allons assister au « resserrement » des postes de gendarmerie, des commissariats et sans doute, demain, des sous-préfectures.
La note s'alourdit sérieusement pour des collectivités locales déjà désertées par les agences de la Banque de France et par les tribunaux, sans compter la « modernisation » des services publics de La Poste, de la sécurité sociale et du Trésor public. En bref, la fermeture de sous-préfectures est dommageable pour les élus locaux, qui se trouvent privés des services de l'État, mais aussi pour les usagers.
Pourtant, nombreux sont les domaines, comme l'emploi et la cohésion sociale, les territoires ruraux fragiles, l'environnement et les risques de toute nature, dans lesquels l'intervention de la sous-préfecture est utile.
Dès lors, pourquoi vouloir exiler ces services autour de la préfecture du département ? Ce n'est pas la moindre contradiction de cette modernisation de l'État, qui devrait concerner mille emplois dans les préfectures et les sous-préfectures - mais peut-être, madame la ministre, me donnerez-vous les informations que je vous demande. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, s'agissant de la mission « Administration générale et territoriale de l'État, ce projet de budget soumis à votre approbation répond à deux idées fortes : le respect des objectifs de la mission et la modernisation de l'action de l'État en vue de sa plus grande efficacité.
Je commencerai par le respect des objectifs qui sont fixés dans cette mission.
Ces objectifs découlent naturellement des nouveaux périmètres ministériels tels qu'ils ont été définis au printemps dernier. Je n'y reviendrai que brièvement.
Je rappelle simplement quelques adaptations qui s'imposent à la mission.
La première est la création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Une partie des attributions, et donc des personnels, du ministère de l'intérieur seront mis à disposition du nouveau ministère. Ce rattachement n'entraîne pas de modification statutaire pour ces agents. Une convention de gestion réglera les relations entre les deux ministères.
La seconde adaptation est le rattachement de l'outre-mer à l'intérieur, qui devient ainsi le responsable gouvernemental unique en charge de tous les territoires français, qu'ils soient métropolitains ou non. Ce rattachement va conduire à une réorganisation des services pour lesquels, avec Christian Estrosi, j'ai demandé à la secrétaire générale de l'administration d'affiner le nouvel organigramme administratif.
En ce qui concerne les actions à mener au sein du périmètre, deux objectifs principaux méritent d'être soulignés : d'une part, la délivrance des titres sécurisés et, d'autre part, certaines modalités d'exercice de la vie démocratique. Vous y avez, les uns et les autres, fait référence. Je reviendrai sur les autres objectifs par la suite.
S'agissant de la délivrance des titres sécurisés, M. Balarello m'a interrogée sur le calendrier. Le 17 décembre, j'installerai le conseil d'administration de l'Agence nationale des titres sécurisés à Charleville-Mézières. L'agence porte une responsabilité majeure, puisqu'il s'agit de délivrer, conformément à nos engagements internationaux, les passeports biométriques d'ici à l'été 2009.
D'autres titres sécurisés s'ajouteront aux passeports. Je pense notamment à la carte d'identité et au nouveau système d'immatriculation à vie des véhicules, dont l'entrée en application est prévue le 1er janvier 2009.
Monsieur Sueur, j'ai bien noté vos remarques et vos suggestions. Je suis prête à prendre un certain nombre d'initiatives en direction des entreprises qui travailleront dans ce domaine. Ce pourrait être une belle illustration de la véritable politique que nous pourrions mener en matière d'intelligence économique afin de défendre des entreprises et des secteurs sensibles. Nous avons là une vraie possibilité de travailler.
Pour le contentieux indemnitaire, que M. le rapporteur spécial a évoqué, je tiens à indiquer à la Haute Assemblée que je suis actuellement en train de rechercher le bon texte et le bon support pour proposer au Parlement un article qui donnera une base légale aux prestations des communes et qui permettra de régler, d'une façon équitable et définitive, la question financière.
Le second objectif majeur de cette mission concerne les modalités d'exercice de la vie démocratique.
Je n'évoquerai pas aujourd'hui le redécoupage des circonscriptions législatives, qui débutera au printemps prochain, après les élections municipales pour ne pas créer de perturbations. Naturellement, le Sénat sera soigneusement associé à ce travail.
Pour l'heure, je soulignerai deux aspects.
Le premier concerne l'évolution des dépenses liées aux élections. Dans le cadre actuel de la réglementation, le problème est d'abord financier. Il faut bien noter que les besoins de financement en 2007, cela a été dit, ont dépassé d'environ 65 millions d'euros l'enveloppe budgétaire. L'augmentation du nombre des votants, du vote par procuration, et le coût de l'acheminement de la propagande peuvent expliquer ce phénomène, mais ce ne sont pas les seules raisons.
En effet, une réalité s'impose : les prestations qui ont été fournies par certains opérateurs obligés dans le processus de distribution des documents coûtent cher, beaucoup plus cher, peut-être beaucoup trop cher. Ce constat m'a d'ailleurs conduit à saisir Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi pour qu'elle interroge le Conseil de la concurrence sur les suites éventuelles qu'il convient d'envisager dans ce domaine.
Le second aspect que je souhaitais évoquer, ce sont les machines à voter. Lors des dernières élections, au printemps, un certain nombre de questions ont été posées. J'en ai d'ailleurs parlé directement avec quelques-uns d'entre vous. Je n'ai pas de réponse immédiate à vous apporter, mais j'ai constitué un groupe de travail afin qu'il examine, point par point, la nature exacte des questions et qu'il imagine, le cas échéant, les solutions, en liaison étroite avec l'Association des maires de France et le Conseil d'État.
Les conclusions doivent m'être rendues le 15 décembre, ce qui nous permettra de mettre en oeuvre les recommandations pour les prochains scrutins du mois de mars.
La deuxième idée forte de ce budget, c'est la modernisation et l'efficacité de l'État dans sa présence territoriale.
Yann Gaillard nous a parlé, dans un très beau développement, de l'évolution de la conception et de l'action de l'État. Face à des collectivités territoriales puissantes et bien ancrées dans les territoires, l'État doit parler d'une voix forte et unique. Nos concitoyens, comme les collectivités, ont besoin de l'autorité de l'État, une autorité légitime, forte et objective.
Cette voix forte doit aussi aider et conseiller les communes les plus faibles. Le préfet a un rôle important, notamment pour les petites communes ou les communes fragiles. Il est donc important qu'il apparaisse, notamment pour les communes souvent confrontées à des positions ou à des réglementations différentes des administrations, comme le patron - sauf exception - des services territoriaux de l'État, un patron qui sait être à l'écoute de ses interlocuteurs.
Monsieur le rapporteur spécial, mon point de vue sur la carte des arrondissements est très clair - je rejoins là une préoccupation de Mme Josiane Mathon-Poinat. Appliquer le seul critère démographique, si l'on veut modifier la situation, c'est ignorer totalement la réalité de terrain. Personnellement, je connais cette réalité. Ce que nos concitoyens attendent de l'État, c'est qu'il apporte une réponse, et une réponse utile, aux besoins. Cette réponse est plus utile dans des vallées de montagne que dans les banlieues des grandes villes, où existent les services nécessaires et où s'exerce toute la force d'une grande préfecture.
Certes, des ajustements sont nécessaires, parce que la situation n'est pas la même qu'il y a un siècle et demi. Mais ils peuvent heurter l'opinion de certains. Selon moi, la présence de l'État est encore plus utile dans les territoires ruraux, peu habités, ou en zone de montagne que dans les secteurs urbains où la population est très dense et où un certain nombre de structures, notamment préfectorales, existent déjà.
Il est évident que cette réponse et cette présence de l'État doivent être adaptées aux attentes et aux méthodes d'aujourd'hui. Sans attendre les décisions que prendra dans quelques semaines le chef de l'État en présidant le Comité de modernisation, le projet de budget que je vous présente s'inscrit dans cette perspective de modernisation et d'efficacité que j'appelle de mes voeux.
Cela se traduit de différentes façons.
D'une part, le regroupement au niveau départemental des crédits de fonctionnement de l'ensemble des services déconcentrés sera expérimenté dans plusieurs départements. J'attends de cette expérience une meilleure mutualisation des moyens et une gestion évitant les doublons.
D'autre part, je généraliserai la régionalisation des budgets opérationnels des préfectures dans toute la métropole, à l'exception de l'Île-de-France. Il s'agit d'une réforme ambitieuse, et lorsqu'on s'y engage, il est important de s'assurer qu'elle soit intégrée par tous, notamment par les personnels concernés, du directeur au collaborateur représentant l'échelon administratif de base.
C'est pourquoi, afin d'établir ce lien, j'ai tout particulièrement tenu à respecter les engagements pris par mes prédécesseurs en matière de situation des personnels : requalification des emplois, fusion des corps techniques, revalorisation du régime indemnitaire. En tant que juriste - j'étais même au départ professeur de droit -, j'estime que celui qui ne possède pas de formation juridique peut parfaitement assimiler ces connaissances, d'autant que dans la qualification juridique requise dans les préfectures et sous-préfectures il y a tous les niveaux. La formation, y compris la formation permanente, est un élément important, je le disais tout à l'heure, de la promotion professionnelle et sociale.
Tout en respectant la règle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, j'ai revendiqué le respect de la règle concernant le taux de retour des économies de masse salariale en mesure indemnitaires et catégorielles.
Monsieur Sueur, je ne peux pas être totalement en désaccord avec vous lorsque vous dites que l'on impose toujours plus de charges à certains tandis que l'on réduit le nombre de personnels, ce qui est exact puisque, je viens de vous le dire, la règle est le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux. Il y a là un beau sujet pour la révision générale des politiques publiques, la RGPP.
Comme je l'ai constaté sur place dans un certain nombre de préfectures, l'utilisation de technologies nouvelles, notamment la nette dématérialisation de certaines procédures et de certains TIP, est aussi une source d'économie de travaux sans grand intérêt, purement matériels, effectués par des personnels. Là réside une partie de la réponse.
J'ai voulu associer les personnels des préfectures et des sous-préfectures en recueillant, par voie de questionnaires individuels, leurs propres suggestions sur l'amélioration concrète du service au public. En discutant avec eux, un certain nombre de mesures de bon sens extrêmement intéressantes me sont apparues. J'ai souhaité que ce soit aussi leur réforme.
Par ailleurs, s'agissant des cultes et de l'application des recommandations de la commission Machelon, je dirai tout d'abord que je ne souhaite pas rouvrir la discussion sur la loi de 1905.
MM. Michel Mercier et Jean-Pierre Sueur. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Néanmoins, un certain nombre de propositions très intéressantes figurant dans le rapport Machelon pourront être prises. Nous sommes en train de les étudier. J'en ai discuté, y compris avec les intéressés, et nous devrions mettre en oeuvre un certain nombre de ces mesures dans le courant de l'année 2008, c'est-à-dire pendant l'application de ce budget.
Concernant la sécheresse de 2003, je plaide coupable : j'avais dit « le 1er décembre ». Le retard n'a pas été totalement rattrapé. Je serai en état de vous fournir les informations souhaitées seulement la semaine prochaine, mais comme le mois de décembre vient juste de commencer, j'espère que je suis à moitié pardonnée.
M. Jean-Pierre Sueur. Si c'est la semaine prochaine, c'est bien !
M. le président. Avoir la bénédiction de M. Sueur, c'est parfait ! (Sourires.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Par ailleurs, je viens d'obtenir l'accord de Bercy pour répondre au problème posé. Une disposition vous sera donc soumise lors de l'examen du prochain projet de loi de finances rectificative, qui devrait permettre un règlement au début de 2008. Ainsi, dans un délai assez court, sera résolu un problème qui se posait depuis longtemps.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, nous avons des rendez-vous, à terme relativement proche, dans le cadre de la mission « Administration générale et territoriale ». L'année 2008 sera donc une année pleine.
Les crédits de cette mission correspondant aux besoins que j'ai évoqués, je vous demande de bien vouloir les adopter. Ce sera une façon de répondre au professionnalisme, au sens des responsabilités, à l'engagement des personnels, qui est un atout que je veux saluer une nouvelle fois, car c'est lui qui permet à l'État d'exercer ses responsabilités sur tout notre territoire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » figurant à l'état B.
État B
(En euros) |
||
Administration générale et territoriale de l'État |
2 761 004 704 |
2 639 224 424 |
Administration territoriale |
1 767 334 574 |
1 652 862 574 |
Dont titre 2 |
1 298 563 088 |
1 298 563 088 |
Administration territoriale : expérimentations Chorus |
105 179 746 |
105 179 746 |
Dont titre 2 |
89 551 275 |
89 551 275 |
Vie politique, cultuelle et associative |
358 392 249 |
358 392 249 |
Dont titre 2 |
80 665 000 |
80 665 000 |
Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur |
530 098 135 |
522 789 855 |
Dont titre 2 |
240 759 311 |
240 759 311 |
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de cette mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».
Relations avec les collectivités territoriales
Compte spécial : avances aux collectivités territoriales
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 48 à 48 septies) et du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons déjà abordé l'essentiel des relations financières entre l'État et les collectivités locales lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, au cours de discussions longues et fouillées. Aussi, la discussion sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » apparaît quelque peu superfétatoire.
Cette mission ne représente que 3 % des dotations de l'État aux collectivités territoriales, soit 2,2 milliards d'euros sur un total de 70 milliards d'euros.
Faut-il maintenir cette mission en l'état ? Son faible montant nous invite en effet à nous interroger.
Les prélèvements sur recettes, technique qui permet de prélever les sommes destinées aux collectivités territoriales avant de discuter de la répartition des crédits budgétaires, apportent une meilleure garantie aux collectivités territoriales.
Par ailleurs, le fonctionnement non « lolfien », si vous me permettez ce barbarisme à la mode, des crédits de la mission nous conduit également à nous interroger.
En effet, sur les 2,2 milliards d'euros de crédits de cette mission, seuls 576 millions d'euros font l'objet d'une vraie décision. C'est sur ce montant que le Gouvernement et le Parlement ont un petit pouvoir de décision.
Pour le reste des crédits, soit plus 1,5 milliard d'euros, l'État n'a aucun pouvoir de décision, la répartition des dotations entre collectivités territoriales découlant mécaniquement de l'application de la loi, à l'exclusion de tout pouvoir particulier du Parlement.
Aussi, je propose de supprimer cette mission et de faire en sorte que les crédits sur lesquels l'État a un vrai pouvoir de décision soient intégrés dans un programme qui pourrait faire partie de la mission que notre collègue M. Henri de Raincourt a excellemment présentée voilà quelques instants.
En d'autre termes, la mission « Administration générale et territoriale de l'État » comprendrait un programme supplémentaire de 576 millions d'euros et les quelque 1,6 milliard d'euros restants pourraient faire l'objet d'un prélèvement sur recettes.
En supprimant la mission, on ne supprimerait pour autant le rôle du rapporteur. (Mme la ministre sourit.) Et je me suis déjà trouvé un nouveau rôle, madame la ministre. (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes rassurés !
M. Adrien Gouteyron. Il rebondit toujours !
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Je vous remercie de le souligner, monsieur Gouteyron,...
M. Adrien Gouteyron. C'était un compliment !
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. ...et grâce à votre soutien, je ferai tout ce que je peux pour continuer. (Nouveaux sourires.)
Parler des relations entre l'État et les collectivités territoriales, c'est bien entendu parler des recettes que l'État accorde à ces collectivités, mais ce serait une grave erreur de s'en tenir à cela. Il est bien d'autres sujets à aborder.
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Tout à fait !
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Ainsi, le Gouvernement a décidé - et nous en sommes d'accord - de soumettre les crédits destinés aux collectivités territoriales à la règle générale de limitation des dépenses au taux de l'inflation. Eu égard à l'état de nos finances publiques, il est en effet nécessaire que cette discipline s'impose à tous.
Je considère donc que l'on pourrait utilement remplacer la présente mission par une mission de contrôle des dépenses des collectivités territoriales décidées par l'État. (M. Henri de Raincourt sourit.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce serait très intéressant !
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Il s'agit d'un domaine où le Parlement pourrait pleinement jouer son rôle. Ce n'est peut-être pas dans le cadre strict de la loi de finances que cela devrait être fait.
Madame la ministre, je vous ai entendu avec beaucoup d'intérêt dire que votre ministère devait être celui de toutes les collectivités locales. Nous souscrivons sans réserve à une telle vision.
Cependant, il faudrait en tirer toutes les conséquences. Or, les dépenses que l'État assigne aux collectivités territoriales sont décidées par tout le monde. Ainsi, au sein de votre ministère, il y a des spécialistes en la matière, je pense notamment à la Direction de la sécurité civile, qui décide allégrement du régime applicable aux sapeurs-pompiers, de l'implantation d'un poteau, de l'acquisition d'un équipement. Bref, on fonctionne au rythme d'au moins une décision par mois. (Mme la ministre est dubitative.) Je pourrais citer d'autres exemples. J'avais répertorié plus de quatre-vingt-douze mesures en trois ans ! Et je suis persuadé que je peux sans difficulté en trouver une bonne centaine pour ces dernières années.
Et s'il n'y avait que cela ! Il en va de même au ministère de l'éducation nationale. Quant au ministère des affaires sociales, il décide tous les jours de dépenses pour les collectivités locales. Dans quelques semaines, les minima sociaux seront probablement revalorisés, et on peut le comprendre, mais nous connaîtrons le montant de nos dépenses en lisant le Journal officiel le 1er janvier prochain ! Il y a là un vrai problème.
Madame la ministre, vous pouvez demander aux collectivités territoriales de faire preuve de discipline, de se mettre au même taquet que les services de l'État, mais à la seule condition que les collectivités territoriales décident elles-mêmes de leurs dépenses, et donc que l'État ne décide plus chaque jour pour elles.
Nous avons l'impression que les ministres ayant vu réduite leur possibilité de dépenser pour l'État, ils dépensent pour les autres. Ce n'est pas une bonne méthode.
Madame la ministre, vous voulez limiter l'augmentation des dotations des collectivités locales au taux de l'inflation. Cette démarche n'appelle pas d'opposition de notre part. Nous la comprenons et nous sommes prêts à vous soutenir, mais encore faut-il que l'État cesse de décider des dépenses des collectivités territoriales. C'est essentiel !
Les dotations que l'État accorde aux collectivités territoriales ont, pour la plupart, des effets multiples et ne peuvent correctement fonctionner que si le taux de leur augmentation est, chaque année, bien supérieur à l'inflation.
Cette année, vous avez voulu préserver la DGF.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Vous devez être content !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mais il y a les variables d'ajustement.
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Je le serais davantage, madame la ministre, si vous me disiez comment vous allez faire l'année prochaine.
M. Philippe Dallier. À chaque jour suffit sa peine !
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Certes, nous l'avons tous compris : 2009 n'est pas 2008.
On est au bout d'un système...
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Et même au bout du bout !
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. ... et il va falloir repenser l'ensemble des relations financières entre l'État et les collectivités locales.
Cette année, le Sénat va s'efforcer de mettre un peu d'équité dans les sacrifices demandés. C'est, pour une assemblée parlementaire, une lourde tâche qui demande un grand courage. En effet, améliorer l'équité, c'est donner un peu moins à certains que ce que vous leur aviez accordé afin d'octroyer un peu plus à d'autres. Certains des amendements qui seront présentés tout à l'heure vont dans ce sens. Il s'agit d'éviter que certains ne soient préservés alors que d'autres voient les augmentations auxquelles ils pouvaient prétendre réduites en raison de la limitation de l'augmentation des crédits au taux de l'inflation. J'espère, madame la ministre, que vous entendrez les propositions du Sénat sur ce point.
J'en viens aux articles rattachés pour leur examen aux crédits de la mission.
L'article 48 vise à instituer un fonds de solidarité en faveur des communes de métropole et de leurs groupements ainsi que des départements de métropole afin de contribuer à la réparation des dégâts causés à leurs biens par des catastrophes naturelles.
Cette disposition n'appelle aucune opposition de principe de la part de la commission à la condition que l'on inclue les régions. Certes, celles-ci ne bénéficieront pas de ce fonds puisqu'elles n'ont pas de biens concernés, mais cela évitera des oppositions stériles entre les collectivités. Cet ajout, qui n'entraînera donc aucune dépense supplémentaire, est souhaitable pour l'image de cette disposition. Je présenterai donc un amendement à cette fin.
Il est prévu que ce fonds sera financé par un prélèvement sur la DCTP. Or, celle-ci étant appelée à disparaître, il faudra trouver une autre source de financement pour les années à venir. Mais, comme vous l'avez dit, madame la ministre, nous verrons l'année prochaine.
M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Cette année, nous ferons avec ce que nous avons.
Les autres articles rattachés, qui résultent d'amendements adoptés à l'Assemblée nationale, visent à revenir sur des situations injustes ou à remédier à un certain nombre d'oublis. Le Sénat est favorable à leur adoption.
Enfin, je dirai quelques mots sur le compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ». Avec 80 milliards d'euros, il représente la plus grosse mission de ce budget. Il s'agit des avances que l'État est amené à faire aux collectivités territoriales dans l'attente de la perception des impôts.
La commission des finances m'avait chargé d'effectuer un contrôle sur ce compte d'avances. Le rapport a été publié aujourd'hui même.