M. Alain Vasselle. Je présente cet amendement, mais j'accéderai ensuite à la demande de M. le président de la commission des finances en le retirant pour le redéposer en deuxième partie.

Cet amendement a un double objectif.

Tout d'abord, il s'agit de donner la possibilité aux collectivités de pouvoir décider elles-mêmes s'il y a lieu de prélever une taxe pour les transports, dans le cadre d'un schéma de transport mis en place par un département.

Ensuite, cet amendement vise à adapter l'assiette de cette taxe aux services effectivement rendus aux entreprises qui en justifient le paiement.

Je souligne - mais je développerai ce point lors de l'examen de l'amendement en deuxième partie - qu'il paraît tout à fait anormal de prévoir la contribution des entreprises dont le siège social se trouve situé dans des communes rurales, alors que le service des transports collectifs, nous le savons pertinemment, ne desservira pas ces communes.

Dans le département de l'Oise, le conseil général a institué cette taxe. Or, autant on peut comprendre que ce prélèvement de 0,4 % soit prévu dans les communautés d'agglomération, autant c'est aller un peu trop loin que de l'étendre à la totalité des communes du département, notamment aux communes rurales, dont les entreprises ne bénéficieront jamais du service en question.

Telle est la raison pour laquelle j'avais déposé cet amendement. Mais nous y reviendrons lors de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances et j'attendrai les explications que pourra alors m'apporter le Gouvernement sur ce sujet.

J'en profiterai également pour rectifier cet amendement, en en supprimant le I ou en modifiant sa rédaction, puisque la commission des finances m'a fait savoir que, dans ce cas, elle serait prête à l'examiner d'un oeil attentif.

M. le président. L'amendement n° I-225 rectifié est retiré.

Articles additionnels après l'article 18
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Débat sur les effectifs de la fonction publique

Article 11 quater (précédemment réservé)

L'article 279 du code général des impôts est complété par un l ainsi rédigé :

« l) Les remboursements et les rémunérations versés par les communes ou leurs groupements aux exploitants assurant les prestations de déneigement des voies publiques lorsqu'elles se rattachent à un service public de voirie communale. »

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° I-276, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

L'amendement n° I-159, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

I. - Rédiger comme suit le deuxième alinéa de cet article :

l) Les remboursements et les rémunérations versés par les départements, les communes ou leurs groupements aux exploitants assurant les prestations de déneigement des voies publiques lorsqu'elles se rattachent à un service public de voirie départementale ou communale.

II. - La perte de recette pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L'amendement n° I-50, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. Dans le second alinéa de cet article après les mots :

versés par

insérer les mots :

les départements,

et après les mots :

voirie communale

ajouter les mots :

ou départementale

II. - La perte de recettes pour l'État résultant de l'application du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L'amendement n° I-116 rectifié, présenté par MM. de Broissia, du Luart, Leroy, Doligé, Fouché, Richert, Vial, Bailly, Jarlier, de Raincourt, Puech, Cléach, Huré, Dériot et Dubois, Mme Procaccia et MM. J. Gautier, Detcheverry et J. Blanc, est ainsi libellé :

I. Dans le second alinéa de cet article, après les mots :

versés par

insérer les mots :

les départements,

II. Compléter le second alinéa de cet article par les mots :

ou départementale

III. Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'extension aux départements du remboursement par le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée des frais de déneigement des voiries départementales est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.

Je rappelle que, sur l'article 11 quater relatif au taux réduit de TVA pour les activités de déneigement de la voirie, trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune avaient été déposés : les amendements nos I-159, I-50 et I-116 rectifié.

Ces trois amendements quasiment identiques avaient été exposés par leurs auteurs. La commission avait demandé l'avis du Gouvernement, qui s'était déclaré défavorable. Nous en étions parvenus aux explications de vote, qui avaient permis à plusieurs sénateurs de s'exprimer. Il avait alors été décidé de réserver cet article pour le rattacher à notre débat sur les collectivités territoriales.

Lors d'une réunion qui s'est tenue hier, la commission des finances a adopté l'amendement n° I-276 de suppression de l'article 11 quater.

La parole est à M. le rapporteur général pour le présenter.

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un amendement de conséquence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-276.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 11 quater est supprimé, et les amendements nos I-159, I-50 et I-116 rectifié n'ont plus d'objet.

titre II

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

M. le président. Mes chers collègues, nous abordons l'examen de l'article 32, article d'équilibre, et de l'état A annexé.

Dans ce cadre, nous allons successivement procéder aux deux débats décidés par la conférence des présidents, le débat sur les effectifs de la fonction publique et le débat sur l'évolution de la dette.

Débat sur les effectifs de la fonction publique

Article 11 quater (précédemment réservé)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Débat sur l'évolution de la dette (début)

M. le président. Nous allons tout d'abord débattre des effectifs de la fonction publique.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais vous livrer quelques indications constituant une mise en perspective des questions de main-d'oeuvre, de politique salariale et de masse salariale au sein du budget de l'État.

Notre vote tout à l'heure portera sur le plafond d'emploi. Ce dernier est fixé, à l'article d'équilibre qui nous est proposé, à 2 219 035 équivalents temps plein.

Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur trois enjeux.

En premier lieu, il importe de raisonner moins en termes d'effectifs que de masse salariale, à l'échelle de l'ensemble des administrations publiques.

En second lieu, il convient de rompre résolument avec une logique qui a longtemps privilégié les effectifs et la réduction du temps de travail, au détriment du pouvoir d'achat des agents publics.

En troisième lieu, il faut revoir la fonction « ressources humaines de l'État », si l'on veut réussir la révision générale des politiques publiques.

Les ordres de grandeur sont plus que préoccupants, mes chers collègues.

La masse salariale de l'ensemble des administrations publiques représentait 13,1 % du produit intérieur brut, en 2006, soit 234,7 milliards d'euros. Ces dépenses correspondent au financement de 5,2 millions d'agents publics en activité, soit 4,8 millions d'équivalents temps plein et 2,9 millions de pensionnés.

Ces chiffres, monsieur le ministre, sont à rapprocher des 2 219 035 équivalents temps plein figurant dans le projet de loi de finances pour 2008, que j'évoquais tout à l'heure.

L'enjeu global de l'emploi public a progressé depuis dix ans, de 1995 à 2005, au rythme de 3,6 % par an, soit deux fois l'inflation.

Mes chers collègues, je vous demande de méditer ces chiffres que je me permets de répéter : en dix ans, quel que soit le gouvernement en place, le nombre des agents publics et des pensionnés concernés a augmenté au rythme de 3,6 % par an, soit deux fois l'inflation !

La masse salariale est aujourd'hui un singulier facteur de contrainte pour les dépenses publiques. L'État employeur, contrairement aux employeurs privés, doit supporter ses propres engagements de retraite.

Vous nous en avez d'ailleurs donné une illustration complète tout à l'heure, avec l'amendement « compensation », à hauteur de  100 millions d'euros, si ma mémoire est bonne.

La totalité des engagements de retraite est passée de 9 % des dépenses primaires du budget général en 1991 à 14 % en 2006.

Cette tendance est cohérente avec le vieillissement de la fonction publique. La part des cinquante ans et plus est de 21 % dans le secteur privé et de 28 % dans le secteur public.

Les dépenses de personnel représentent une part croissante et déterminante du budget de l'État, c'est-à-dire 52 % des dépenses primaires, ou hors dette, du budget général en 2006, contre 45 % en 1991.

Sur la dernière décennie, plus de 85 % de l'augmentation des dépenses primaires a été consacrée aux dépenses de personnel, sans que les agents aient le sentiment d'une augmentation de leur pouvoir d'achat - et c'est là une question très actuelle, monsieur le ministre !

C'est tout de même un singulier paradoxe. Alors que, sur dix ans, je le répète, plus de 85 % de l'augmentation des dépenses hors dette a été consacrée à la fonction publique, les relations paraissent difficiles, dans certains contextes, avec le personnel de la fonction publique, qui exprime souvent le sentiment, justifié ou non par les chiffres, de voir plafonner son pouvoir d'achat.

M. Jacques Mahéas. C'est vrai !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce sentiment d'un côté et, de l'autre, la réalité des efforts pour alimenter sans cesse davantage le poste personnel forment un singulier contraste.

L'effort réalisé par le Gouvernement pour maîtriser les effectifs ne suffit pas à stabiliser la masse salariale en 2008.

Dans le budget pour 2008, les effectifs de l'État diminuent de 1 %. C'est une baisse significative par rapport aux années antérieures, mais encore très faible en valeur absolue compte tenu des enjeux.

Les économies réalisées - nous l'avons montré dans la discussion générale - sont plus que compensées par l'augmentation des pensions, à hauteur de plus de 2 milliards d'euros. La masse salariale de l'État, nette des pensions et des suppressions d'effectifs, progressera encore de 1,3 milliard d'euros en 2008.

Ayant rappelé cette réalité, je poserai la question : comment en est-on arrivé là ?

En premier lieu, les effectifs des administrations publiques ont crû de 21 % entre 1982 et 2003, soit en un peu plus de vingt ans. En équivalents temps plein, l'emploi public dans son ensemble aura progressé deux fois plus que l'emploi global en France, et cet écart correspond à 800 000 équivalents temps plein supplémentaires.

Par ailleurs, 75 % de la hausse totale des effectifs sur cette période de vingt années a été réalisée entre 1992 et 2003. L'évolution est somme toute modérée pour l'État - plus 11 % -, mais elle doit être mise en relation avec l'évolution des effectifs de la fonction publique territoriale - plus 41,5 % - et les transferts d'emplois aux agences de l'État.

S'agissant de l'augmentation des effectifs de l'État, le principal facteur d'explications est, à mon sens, la progression des effectifs de l'éducation nationale.

En effet, les 11 % de hausse des effectifs de l'État sur vingt ans se concentrent sur le ministère de l'éducation nationale : la quasi-totalité des 197 000 agents supplémentaires recrutés sur la période ont en effet rejoint l'éducation nationale, ce qui est assez paradoxal par rapport à l'évolution de la démographie scolaire.

Hors éducation nationale, les effectifs de l'État sont stables sur la même période, avec des évolutions contrastées selon les ministères.

Les ministères de la justice, de l'intérieur, de la culture, de l'outre-mer connaissent de fortes progressions.

À l'inverse, toujours sur vingt ans, le ministère de la défense perd 8 % de ses effectifs, en raison notamment de baisses importantes qui n'ont pas été complètement compensées par les embauches consécutives à la professionnalisation des armées intervenue en 1995.

En dehors de la défense, d'autres ministères ont connu une décroissance de leurs effectifs sur la période : le ministère des affaires étrangères et de la coopération, mais surtout le ministère de l'équipement et le ministère de l'économie, des finances, du budget et de l'industrie, quel que soit le périmètre de ce dernier. Depuis le milieu des années quatre-vingt, ces deux ministères ont vu leurs effectifs baisser respectivement de 6 % et de 5 %.

La hausse en apparence modérée des effectifs de l'État devrait en outre mieux prendre en compte les opérateurs de l'État.

Force est de constater que, sur onze ans, entre 1994 et 2005, les effectifs des établissements publics administratifs ont progressé de 46,7 %, tandis que ceux des ministères n'ont augmenté que de 4,5 %. (M. Henri de Raincourt s'exclame.) Les opérateurs ont contribué pour 38 % à la croissance des effectifs de la fonction publique de l'État.

Comme je l'ai souligné dans mon rapport écrit, l'année 2008 traduit la même tendance préoccupante.

Il est donc indispensable, monsieur le ministre, d'obtenir l'engagement clair et net du Gouvernement d'appliquer dans les meilleurs délais aux opérateurs la règle de non-remplacement d'un départ en retraite sur deux - c'est même un minimum.

J'ajoute parmi les facteurs explicatifs de l'augmentation des effectifs de l'État que tout se passe comme si nous avions fait collectivement un choix politique en faveur des effectifs, au détriment de la rémunération.

M. Éric Woerth, ministre. C'est vrai ! Les 35 heures !

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est ainsi que je lis sur le long terme cette politique du personnel.

Selon l'INSEE, sur la période 1998-2004, le salaire des fonctionnaires a crû de 1,9 % en moyenne annuelle, alors que l'inflation s'est élevée à 1,7 % sur la même période. En euros constants et en moyenne annuelle, l'augmentation des salaires aurait été, selon l'INSEE, de 0,2 %. On peut donc parler de stabilité.

Mais la hausse des effectifs a été considérable et, je le répète, tout se passe comme si l'on avait choisi cette hausse au détriment de celle des salaires.

L'application des 35 heures dans la fonction publique a conduit ensuite à ne pas réduire autant qu'il aurait été possible les effectifs sous le gouvernement de M. Lionel Jospin. Les gains de productivité réalisés sur la période ont été absorbés non par des hausses de salaires, mais par une diminution du temps de travail.

Ce choix aboutit à un résultat sous-optimal en termes d'administration et de gestion de l'État. Le nombre d'agents publics pour 100 habitants varie de 7,1 à 10,2 agents selon les régions, soit un écart de 25 %. On ne peut pas dire que ce soit optimal ! Il en est de même pour les enseignants, rapportés aux effectifs scolaires, dont le nombre varie, pour 100 personnes scolarisées, de 6,7 à 8,2, soit un écart de 15 %, qui n'est pas toujours justifié par les missions à accomplir.

En conclusion, que peut-on faire au titre de la révision des politiques publiques ?

Les effectifs sont au coeur de cette revue générale. Où porter l'effort ? Bien entendu, il faut viser les départs à la retraite, mais ils ne concernent qu'un petit nombre de ministères. En effet, en 2008, quatre ministères concentrent 89 % des départs à la retraite : l'enseignement scolaire pour 57 %, la défense pour 17 %, l'intérieur pour 8 % et les finances pour 7 %.

L'enjeu central est bien celui de la réforme du ministère de l'éducation nationale, en termes tant quantitatifs que qualitatifs, compte tenu de tout ce qui s'attache à l'enseignement, de la nécessité pour lui de progresser, d'améliorer son bilan, d'atteindre ses objectifs, que ces derniers se mesurent à ses performances ou à la satisfaction des usagers du système éducatif.

Il faudra certainement mener des réformes ambitieuses, sur lesquelles nous reviendrons.

Le ministère de la défense, avec la question du format des armées, ne peut lui aussi que contribuer activement à la politique de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux.

Ce scénario de réduction des effectifs est au coeur de la révision générale des politiques publiques, en lien avec les gains de productivité, avec la réflexion sur les implantations territoriales de l'administration, avec la recherche des meilleures modalités d'exécution du service public, en lien, en d'autres termes, avec la recherche des voies les meilleures pour moderniser le service aux usagers, afin que l'Etat soit plus efficace et mieux respecté.

Ne faut-il pas associer certains départs volontaires au non-remplacement de départs à la retraite ? C'est toute la question, monsieur le ministre, des primes d'incitation au départ. Ces dernières se justifient lorsqu'une compétence est complètement externalisée à la sphère privée ou lorsque l'informatisation d'un processus administratif peut conduire de manière rapide à une réduction de la dimension d'un service.

Certains sujets sont désormais abordés - c'est un progrès -, notamment la réduction du nombre de corps de fonctionnaires de l'État. En la matière, il convient de rendre hommage aux efforts du secrétaire d'État chargé de la fonction publique.

En outre, compte tenu de la pyramide démographique, un certain nombre de carrières se trouvent aujourd'hui fortement « embouteillées ». Cela nécessite de réexaminer filière par filière chaque situation qualitative.

Dernière question : ne faut-il pas arbitrer entre recrutements et temps de travail supplémentaire ?

L'enjeu d'une meilleure gestion des ressources humaines de l'État consiste à rechercher les moyens de nouveaux arbitrages entre recrutements et temps de travail supplémentaire, évidemment rémunéré. Cet arbitrage, cette recherche au plus près de la réalité et des métiers, représente à mon sens un enjeu significatif.

Mes chers collègues, nous avons une certitude, au sein de la commission des finances,...

M. Jacques Mahéas. Au sein de sa majorité !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas seulement, mon cher collègue !

La commission des finances, disais-je, est convaincue que la politique de rémunération doit évoluer, car le saupoudrage du point « fonction publique » est un système manifestement à bout de souffle. Une hausse de un point coûte à l'État 800 millions d'euros, le double si l'on considère l'ensemble des administrations publiques. C'est un instrument archaïque aux conséquences budgétaires très lourdes, pour un effet extrêmement limité sur la feuille de paie des agents.

M. Éric Woerth, ministre. Tout à fait !

M. Philippe Marini, rapporteur général. L'uniformité nie la très grande variété des exigences et des métiers.

Quelles sont les solutions ? L'intéressement des agents aux gains de productivité de leur administration et une quote-part de rémunération individualisée ou collectivement liée aux résultats d'un service, d'une mission ou d'un programme sont sans doute des voies qu'il convient d'explorer.

M. Jacques Mahéas. Vos propositions ne sont pas archaïques, elles sont rétrogrades !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce sont des questions que l'on ne peut pas ne pas poser, car la part des primes modulables dans l'actuelle politique de rémunération de l'État est beaucoup trop limitée.

En 2007, la part de l'encadrement concernée par un dispositif de rémunération à la performance est, quant à elle, limitée à 18 % des effectifs correspondants.

Ainsi, les gains de productivité seront d'autant plus importants que les réductions d'effectifs seront fortes. Il doit donc y avoir un lien vertueux entre la baisse du nombre des fonctionnaires et l'amélioration du pouvoir d'achat de ces derniers.

Comme pour la dépense, la question des effectifs ne peut s'envisager qu'à l'échelle de l'ensemble des administrations publiques. À cet égard, sans doute faut-il faire évoluer la loi organique relative aux lois de finances pour qu'elle aborde aussi bien les opérateurs publics que les services de l'État au sens strict. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat annuel sur le plafond d'autorisation des emplois rémunérés par l'État est l'occasion, pour la commission des lois, d'évoquer plus largement les évolutions de l'emploi public et les réformes dont ce dernier fait l'objet.

L'évolution de l'emploi public se caractérise par une progression globale des effectifs, tirée il est vrai par la fonction publique territoriale, par une diversité encore faible des agents et, enfin, par un effort de maîtrise des effectifs et des dépenses de personnel de l'État.

À la date du 31 décembre 2005, les trois fonctions publiques employaient 5,2 millions de personnes hors emplois aidés, soit un salarié sur cinq.

Près de la moitié d'entre elles - 49 % - appartenaient à la fonction publique de l'État, 31 % à la fonction publique territoriale et 20 % à la fonction publique hospitalière.

On comptait 81 % de titulaires ou militaires, 15 % de non-titulaires, les 4 % restants regroupant les ouvriers de l'État, les médecins des hôpitaux publics et les assistantes maternelles des collectivités territoriales.

En outre, 125 000 personnes bénéficiaient d'un emploi aidé.

Entre 1996 et 2005, l'emploi public a augmenté de 15 %, hors emplois aidés. Dans le même temps, l'emploi salarié total augmentait de 12 %. Cette différence a été soulignée à l'instant par M. le rapporteur général.

Cette croissance a été tirée par celle de la fonction publique territoriale, dont le nombre des agents a augmenté de 2,8 % en moyenne annuelle, alors que celui des agents de l'État progressait de 0,6 %. S'il est logique que, du fait de la décentralisation, les effectifs des collectivités territoriales aient augmenté, il semble a contrario plus difficile de comprendre la progression de ceux de l'État.

Dans son dernier rapport, l'Observatoire de l'emploi public met en exergue la faible diversité des agents publics.

Il apparaît, en premier lieu, que la fonction publique est largement féminisée, sauf dans les emplois de direction. Ainsi, en 2005, les femmes n'occupaient que 15 % des quelque 7 500 emplois supérieurs, alors qu'elles comptaient pour 59 % du total des emplois.

En second lieu, le rapport montre que les enfants de fonctionnaires sont surreprésentés dans la fonction publique, alors que les enfants d'immigrés y sont sous-représentés, comme dans le secteur privé d'ailleurs.

Plusieurs actions ont été menées en faveur d'une plus grande diversité sociale des recrutements dans la fonction publique.

On peut citer le développement de voies de recrutement adaptées, à l'instar du parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et de l'État, le PACTE, dont M. André Santini nous a toutefois confié, lors de son audition par la commission des lois, qu'il ne rencontrait pas le succès escompté.

On peut encore évoquer la mise en place d'un soutien spécifique à la préparation aux concours et aux examens, sous forme d'allocations, ou la prise en compte de l'expérience professionnelle.

Quelque 29 % des fonctionnaires civils de l'État, 22 % des fonctionnaires territoriaux et 26 % des fonctionnaires hospitaliers devraient quitter leurs fonctions d'ici à 2015.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cela fera beaucoup de retraités !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. Ces départs à la retraite massifs constituent à la fois un défi et une chance ; ils offrent aux employeurs publics l'occasion de développer une gestion prévisionnelle des emplois en tenant compte de l'évolution de leurs compétences et de l'apparition de nouveaux besoins. C'est toujours la répartition du nombre de fonctionnaires qui est à considérer.

De fait, poursuivant l'effort de maîtrise des effectifs et des dépenses de personnel de l'État engagé au cours de la précédente législature, le Président de la République et le Gouvernement se sont assigné pour objectif le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux au cours des cinq prochaines années.

En 2008, 68 000 départs à la retraite sont prévus, et un agent sur trois ne sera pas remplacé. Ce ratio global masque toutefois d'importantes disparités selon les ministères.

Si 30 % des agents du ministère de l'éducation nationale partant à la retraite ne seront pas remplacés, ce taux devrait atteindre 50 % au ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, au ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, au ministère de la défense ou encore au ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, et 80 % au ministère de l'agriculture et de la pêche ainsi qu'au ministère de la santé, de la jeunesse et des sports.

À l'inverse, certains ministères, comme celui de la justice, bénéficieront d'une augmentation nette de leurs effectifs.

Il me semble important de souligner cette diversité des situations.

Cet effort de maîtrise des effectifs de l'État s'appuie sur les réformes et les gains de productivité réalisés par les ministères pour améliorer la performance et la qualité des services publics, dans le prolongement, notamment, des stratégies ministérielles de réforme et des conclusions des audits de modernisation de l'État lancés en septembre 2005.

La réflexion sur les missions et le format des administrations se poursuit désormais dans le cadre de la révision générale des politiques publiques lancée cet été par le Premier ministre.

Cette démarche paraît aller dans le sens des recommandations de la commission des lois : la suppression d'emplois ne doit pas constituer une fin en soi, et la maîtrise des effectifs doit s'accompagner d'une réflexion approfondie sur les missions devant être exercées par l'État.

Quant aux dépenses de personnel, elles s'élèveront à 119,9 milliards d'euros en 2008, en progression de 1,1 % à périmètre courant, et représenteront 44,1 % des recettes fiscales nettes.

Le non-remplacement d'un agent sur deux permettra de réaliser une économie de 458 millions d'euros en 2008 et représentera 716 millions d'euros d'économies en année pleine.

Il est prévu de consacrer 400 millions d'euros au financement des mesures catégorielles. En outre, M. André Santini a indiqué devant la commission des lois que les agents de l'État retireraient de la détaxation des heures supplémentaires un gain salarial de l'ordre de 150 millions d'euros en 2008, hors effet de l'exonération fiscale.

Toutefois, les représentants des organisations syndicales que j'ai reçus déplorent l'absence d'accord salarial dans la fonction publique depuis plus de dix ans ; ils dénoncent la faiblesse des rémunérations, notamment celles des agents de catégorie C, et manifestent leur attachement à la revalorisation de la valeur du point d'indice.

Je rappelle que, en l'absence d'un tel accord, le Gouvernement a décidé d'augmenter de 0,8 % la valeur du point le 1er février 2007, puis de revaloriser l'indice brut minimal dans la fonction publique à la suite de la hausse du SMIC intervenue le 1er juillet 2007.

J'en viens à l'indispensable modernisation de l'emploi public, pour formuler trois observations.

En premier lieu, la précédente législature aura été marquée par l'adoption de trois lois importantes intéressant la fonction publique en 2005 et en 2007.

La loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique a ainsi prévu, conformément à une directive communautaire, la reconduction automatique de certains contrats à durée déterminée, au-delà d'une durée de six ans, en contrats à durée indéterminée. L'objectif - je le rappelle, car cette question avait été très discutée - était de lutter contre la précarité des agents non titulaires.

Selon une enquête réalisée par la direction de l'administration générale et de la fonction publique, sur 9 321 agents contractuels travaillant dans les services centraux et déconcentrés de la fonction publique d'État, à l'exclusion des établissements publics administratifs, et ayant plus de six ans d'ancienneté au 1er octobre 2006, 8 932 avaient obtenu la transformation de leur contrat de travail en un contrat à durée indéterminée. Le succès de cette mesure montre son efficience et la forte attente des agents dans ce domaine.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. Je suis heureuse de le préciser, parce que nous en avions beaucoup parlé.

Je ne reviendrai pas sur les lois du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique et du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, si ce n'est pour inviter le Gouvernement à publier rapidement les nombreux décrets d'application manquants.

En deuxième lieu, plusieurs mesures statutaires ont été adoptées, concernant aussi bien la fusion des trop nombreux corps de la fonction publique que la mise en place d'une rémunération à la performance.

La fusion des corps constitue un facteur essentiel de mobilité des agents et de souplesse pour la gestion des ressources humaines.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. Leur nombre a été réduit, passant de 700 au 1er janvier 2005 à 500 actuellement, compte non tenu des corps en voie d'extinction. Cette mesure est satisfaisante, comme est positive la volonté du Gouvernement de mettre en place, à l'avenir, un nouveau cadre statutaire pour la fonction publique de l'État, plus souple et moins segmenté, privilégiant un regroupement par métiers et par compétences des agents sur le modèle de la fonction publique territoriale.

En 2008, la rémunération à la performance devrait être étendue aux sous-directeurs et aux chefs de service. À cet égard, je rappellerai simplement la nécessité et la difficulté d'établir des critères suffisamment objectifs pour garantir une juste évaluation du mérite de chacun.

Enfin, je n'insisterai pas sur les réformes annoncées par le Président de la République et le Premier ministre, puisqu'elles sont connues et sont actuellement en discussion dans le cadre du débat national sur la fonction publique engagé au mois d'octobre.

J'observe cependant que des mesures telles que la possibilité pour des agents déjà recrutés de quitter la fonction publique contre un pécule, et pour les nouveaux entrants d'opter entre le statut de fonctionnaire et un contrat de droit privé, sont très loin d'être anodines. Elles constitueraient un bouleversement des cadres traditionnels de la fonction publique. Cela méritait d'être signalé. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le temps programmé pour le Gouvernement est prévu au maximum pour trente-cinq minutes.

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu des propos de M. Marini et des événements récents, je m'éloignerai quelque peu de l'intervention que j'avais préparée, pour réfléchir, à partir d'un exemple, à l'impact d'une véritable fonction publique.

Actuellement, monsieur le ministre, vous gérez un budget difficile dans des conditions délicates, et Villiers-le-Bel, après Clichy-sous-Bois, montre combien nous avons besoin, dans les quartiers, d'une fonction publique importante. Hier soir, 1 000 policiers étaient déployés à Villiers-le-Bel. À cet égard, je voudrais manifester ma solidarité à l'égard des familles endeuillées et des policiers blessés.

À partir de l'exemple de ma propre commune, je me suis interrogé sur l'évolution de la fonction publique dans deux grands domaines qui me paraissent essentiels pour l'équilibre de ces quartiers : l'éducation nationale et la sécurité.

En ce qui concerne l'éducation nationale, vous avez supprimé les emplois-jeunes au cours des dernières années, ainsi que la scolarisation des enfants de deux à trois ans, si bien que nous sommes passés de 50 % à 25 % d'une classe d'âge scolarisée à Neuilly-sur-Marne.

Vous voulez supprimer la carte scolaire pour économiser du personnel et réduire à la portion congrue les zones d'éducation prioritaires, qui ont pourtant donné d'excellents résultats.

M. Alain Lambert. C'est une caricature !

M. Jean-Jacques Hyest. Oui, mais c'est habituel !

M. Jacques Mahéas. C'est ainsi que les choses se passent à Neuilly-sur-Marne, mais peut-être en est-il autrement chez vous ! Dans ce cas, vous êtes favorisé, et je vous inviterai volontiers, mon cher collègue, afin que vous constatiez vous-même cette réalité sur le terrain.

M. Alain Lambert. Je vous inviterai chez moi aussi !