Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est bien entendu franchement hostile à ces cinq amendements.
M. Josselin de Rohan. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous considérons qu'ils sont gesticulatoires et reflètent un état d'esprit tout à fait archaïque, pardonnez-moi de devoir le dire.
M. Christian Cambon. Voilà !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons aujourd'hui une compagnie pétrolière d'ampleur mondiale ayant son siège en France, et une seule.
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Pour combien de temps ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Espérons-le, pour très longtemps !
Or les dispositifs que l'on nous propose ont deux défauts majeurs.
D'une part, ils contreviennent, au moins pour une large part, au principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques, puisqu'ils sont décrits très précisément ad hominem, c'est-à-dire pour faire payer une compagnie en particulier.
D'autre part, il faut se souvenir que nous sommes dans un monde ouvert : les profits que vous dénoncez, mes chers collègues, sont réalisés dans le monde entier...
M. Christian Cambon. A 90 % !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument ! M. Cambon a d'excellentes sources d'information, et je l'en complimente !
Une très faible part seulement de ces profits concerne le territoire national.
Par ailleurs, il faut rappeler que la compagnie que vous stigmatisez prépare depuis longtemps sa diversification dans des énergies renouvelables : cela nécessite des provisions, des investissements importants, la création de filiales, des rachats d'entreprises, des actions de diverse nature dans des domaines comme les biocarburants, le solaire, l'éolien et l'énergie des courants marins.
Ce n'est pas en taxant plus que l'on obtiendra des comportements plus vertueux. Encore une fois, on conduirait une telle compagnie à s'interroger un jour ou l'autre sur la localisation à Paris de son siège social, donc de son centre de décision. On porterait préjudice à ce que l'on prétend vouloir valoriser : la capacité à anticiper, à mieux préparer les évolutions technologiques futures et à diversifier les sources d'énergie.
Pour l'ensemble de ces raisons, mes chers collègues, nous ne pouvons qu'émettre un avis très défavorable, je le répète, tout en déplorant que l'on ne soit pas en mesure de faire preuve de plus d'imagination et que l'on désigne ainsi à la vindicte une compagnie qui serait chargée de tous les maux et qui aurait les poches suffisamment profondes pour résoudre tous les problèmes qui se posent dans notre société. Cette démarche est totalement irréaliste et, par maints aspects, fleure, permettez-moi de le dire de façon très modérée, une certaine démagogie.
M. Josselin de Rohan. C'est vraiment manquer d'imagination !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement est évidemment opposé à l'ensemble de ces amendements en raison de leur caractère de grande brutalité, même si la question du pouvoir d'achat et celle du prix de l'essence se posent effectivement et sont au coeur des préoccupations du Gouvernement, qui y est très attentif.
Christine Lagarde a réuni, voilà peu, les entreprises pétrolières, qui ont pris certains engagements. Ainsi, l'entreprise Total veut participer sur le territoire français à l'effort de recherche sur les énergies renouvelables de même qu'à un effort de concentration et de consolidation de l'industrie du raffinage. Elle a pris l'engagement d'investir d'ici à 2012 plus de 3 milliards d'euros, et elle est en bonne voie de le tenir puisqu'elle a déjà mis plus de 1 milliard d'euros sur le tapis, comme Christine Lagarde a pu le vérifier voilà une quinzaine de jours. Bien sûr, le Gouvernement va maintenir la pression !
S'il faut aller plus loin, s'il faut réfléchir autrement pour compléter les dispositifs de ce type, nous le ferons. Pour l'heure, ces amendements sont en réalité tout à fait contraires à la compétitivité française et, d'une certaine façon, revêtent un caractère de brutalité qui n'est pas de mise.
Compte tenu des engagements des entreprises pétrolières, compte tenu de ce qui a été négocié avec elles, compte tenu du fait que le Gouvernement continue bien évidemment de réfléchir au sujet, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à rejeter ces amendements, à moins qu'ils ne soient retirés.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° I-63 rectifié.
M. Thierry Repentin. Monsieur le rapporteur général, en vous entendant évoquer « une certaine démagogie », je me faisais la réflexion que, visiblement, les émanations de pétrole sont quelquefois enivrantes : vous vous laissez aller à des jugements que l'on ne vous connaît pas habituellement ! Je souhaite que ces propos soient compris de la façon la plus mesurée possible.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai été très modéré !
M. Thierry Repentin. Je souhaite expliquer pourquoi ces amendements sont importants à nos yeux.
Il va nous falloir, dans les mois qui viennent, trouver des solutions de financement pour l'AFITF. Nous ne pourrons alors compter ni sur les services de Bercy, dont l'aversion à l'égard de structures alimentées par des fonds en quelque sorte pré-affectés est une constante, ni sur les sociétés autoroutières, puisque, par une décision prise à la va-vite, nous nous sommes privés d'une ressource régulière qui nous aurait pourtant été bien nécessaire pour les années à venir.
Nous ne pourrons pas non plus compter sur la compréhension des parlementaires de la région parisienne lorsque nous leur rappellerons qu'en 2003, - et sans doute le fera-t-il de nouveau en 2008 -, lors du Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, l'État avait pris certains engagements pour le désenclavement des régions en matière de routes, de canaux, de voies ferrées, d'aéroports.
L'AFITF n'aura donc pas les 2 milliards d'euros nécessaires pour répondre à ces engagements. Nous aurions pourtant pu éviter de nous placer dans cette situation qui nous conduit à nous demander qui peut contribuer à la sauvegarde d'un outil dont nous avons grandement besoin, comme le reconnaît d'ailleurs le Gouvernement lui-même : n'a-t-il pas très récemment chargé le Sénat d'une mission d'information ayant pour tâche de se montrer imaginative dans la recherche de ressources nouvelles destinées à une structure qui vient d'être dépouillée de celles qui étaient les siennes jusqu'à l'an dernier ? J'espère que, en la circonstance, tous les parlementaires ne seront pas « archaïques » !
Pour notre part, il ne nous semblait pas tout à fait illégitime qu'une société dont le développement des infrastructures fait progresser son chiffre d'affaires, puisqu'elle vend des carburants, contribue à un système auquel elle a intérêt.
Voilà pourquoi, bien évidemment, nous voterons ces amendements, qui visent à une contribution la plus juste possible de tous ceux qui souhaitent le développement des infrastructures de transport dans notre pays, en regrettant que, si nous devions ne pas trouver de nouvelles ressources, l'AFITF meure de sa belle mort en 2009, avec l'assentiment de Bercy.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. M. le rapporteur général vient de parler de démagogie : il faut reconnaître que, si la France compte énormément de démagogues, il n'en fait pas partie ! Lui, au moins, affiche la couleur : rien sur la taxation des profits ou des bénéfices réalisés, notamment par Total, qui sont de l'ordre de 12 milliards d'euros par an - 3 milliards d'euros pour les trois derniers mois -, et rien sur la diminution du prix du fioul ou de l'essence.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne confondons pas tous les débats !
M. Thierry Foucaud. Ce n'est pas ce que je fais, monsieur le rapporteur général ! L'essence est chère, le fioul est cher.
Et pour un peu, il nous ferait pleurer, de concert avec le Gouvernement, sur le sort de Total - on les félicite ! -, qui participe à la recherche sur les énergies renouvelables. Encore heureux !
En fin de compte, ce débat me permet de faire l'économie d'une démonstration : d'un côté, on favorise toujours ceux qui ont le plus...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le mur de l'argent...
M. Thierry Foucaud. Oui, le mur de l'argent, bien sûr, monsieur le rapporteur général !
... et l'on soutient les profits réalisés par Total ; de l'autre côté, pour l'ensemble des Français, le fioul, l'essence, sont très chers aujourd'hui.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-111 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-199.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 8
Mme la présidente. L'amendement n° I-196, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 2 du tableau B du 1 de l'article 265 du code des douanes est ainsi complété :
« d) Lorsque le cours moyen du pétrole dénommé ?brent daté? varie de plus de 10 % dans les conditions précisées au deuxième alinéa, les tarifs prévus au 1 pour les supercaburants mentionnés aux indices 11 et 11 bis, le gazole mentionné à l'indice 22 et le fioul domestique mentionné à l'indice 20 sont corrigés d'un montant égal au produit de la variation en valeur absolue de la moyenne des prix hors taxe de ces produits pétroliers et du taux de 16,388 %. Cette correction est effectuée à la baisse en cas de hausse des prix hors taxe et à la hausse dans le cas contraire.
« Cette modification est effectuée le 1er janvier 2008 pour la période du 1er octobre au 30 novembre 2008 si la variation cumulée du cours moyen du pétrole ?brent daté? constatée sur la période du 1er au 15 septembre 2007 est supérieure de 10 % au cours moyen du mois de janvier 2007. La modification est effectuée le 1er mars 2008 si la variation cumulée du cours moyen du pétrole ?brent daté? constatée sur la période du 1er octobre au 9 novembre 2007 est supérieure de 10 % au cours de la période du mois de septembre 2007. La modification est effectuée le 21 mars 2008 pour la période du 21 janvier au 20 mars 2008 si la variation cumulée du cours moyen du pétrole ?brent daté? constatée sur la période du 10 novembre au 31 décembre 2007 est supérieure de 10 % au cours moyen de la période du 1er octobre au 9 novembre 2007. Elle est effectuée pour les périodes ultérieures, lorsque la variation cumulée constatée au cours des bimestres suivants est supérieure de 10 % à la moyenne des prix du ?brent daté? qui a entraîné la modification précédente.
« Ces modifications s'appliquent à compter du 21 du premier mois du bimestre suivant celui au titre duquel une variation de 10 % du cours du ?brent daté? a été constatée.
« Les cours moyens du pétrole ?brent daté? et les prix moyens hors taxe des supercarburants, du gazole et du fioul domestique sont calculés, pour chacune des périodes mentionnées au présent d, par l'autorité administrative compétente.
« Les modifications prévues au premier alinéa ne peuvent pas avoir pour effet de porter les tarifs à un niveau supérieur à celui fixé par la loi de finances au tableau B du 1. Ces modifications ne sont plus appliquées lorsque le cours moyen bimestriel du ?brent daté? est redevenu inférieur à la moyenne constatée au cours du mois de janvier 2007.
« Le ministre chargé du budget constate par arrêté les modifications de tarifs de la taxe intérieure de consommation résultant des alinéas précédents.
« Un décret fixe les modalités d'application de ces dispositions. »
II. - Pour compenser les éventuelles pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus, le taux prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. L'amendement que je présente maintenant va certainement faire bondir M. le rapporteur général et M. le ministre ! (Sourires.)
Il vise en effet à remettre en place le système de la TIPP flottante qui avait été adopté durant la législature 1997-2002 pour faire face aux contraintes que faisait peser sur les consommateurs la hausse du prix des carburants et des produits pétroliers de manière générale.
Nous sommes confrontés depuis quelque temps à une situation très similaire, puisque les cours du pétrole connaissent une véritable envolée ; d'aucuns l'expliquent par la croissance de la consommation asiatique, mais elle est certainement beaucoup plus liée au développement du caractère spéculatif des marchés à terme ainsi qu'aux choix de régulation de la production amont et de la production de produits raffinés, choix qui appartiennent de manière presque exclusive aux grandes compagnies pétrolières transnationales.
Toujours est-il qu'un prix peut souvent augmenter, s'agissant d'une matière première, du fait même de l'organisation d'une raréfaction de la ressource disponible, au-delà des caractères assez particuliers de l'exploitation des gisements ouverts.
Le prix du baril de pétrole bat ces derniers temps des records. Cela pèse, bien sûr, en bout de chaîne, sur le consommateur final, notamment les particuliers qui ne peuvent le plus souvent pas répercuter les effets d'une telle hausse, à la différence des entreprises qui peuvent toujours imputer les achats de produits pétroliers sur leur TVA déductible ou sur l'ensemble de leurs charges d'exploitation.
La hausse du prix des carburants à la pompe doit donc être maîtrisée autant que faire se peut.
L'objet du présent amendement est de faciliter une sorte de gel de la masse fiscale constituée par la TIPP et la TVA dans le prix des carburants et des produits pétroliers.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Là encore, mes chers collègues, permettez-moi de revenir à la réalité. Plusieurs années de suite, les ministres de l'économie et des finances successifs ont installé une commission indépendante pour faire le point sur les effets fiscaux de la hausse des prix du pétrole.
Or l'on constate que deux effets se conjuguent : un premier effet au niveau de la TIPP, dont le rendement baisse, et un second effet au niveau de la TVA, qui augmente. En effet, la hausse des prix se traduit par une consommation globalement plus faible et donc par une baisse des rentrées de TIPP.
M. Josselin de Rohan. Voilà !
M. Philippe Marini, rapporteur général. La démonstration en a été faite à deux reprises par cette commission indépendante, et nous avons appris, la semaine dernière, qu'elle était réactivée en cette fin d'année 2007. Il est très vraisemblable que les mêmes causes vont produire les mêmes effets et que nous aurons plus de « pertes » au niveau de la TIPP que de « gains » au niveau de la TVA.
Par conséquent, laisser imaginer au public qu'il y a une marge dont se gorgeraient les pétroliers, les distributeurs et tous les acteurs de cette filière, c'est techniquement mentir car, finalement, l'État ne tire aucun profit de ces évolutions. En tout cas, on a pu observer deux années de suite, sur la base des estimations de la commission indépendante, que le budget de l'État n'était pas le gagnant de la hausse des consommations de produits pétroliers.
Dès lors, vouloir rétablir une TIPP flottante, qui a été un montage complètement imaginaire et qui ne pouvait pas, si j'ose dire, « tourner » - les spécialistes des finances budgétaires me comprendront -, un montage d'une excessive complexité, une véritable usine à gaz sinon à pétrole, vouloir entretenir une nouvelle fois l'illusion que, par la magie de cette TIPP flottante, on pourrait rendre au malheureux consommateur ce à quoi il aurait droit, constitue une démarche quelque peu irréelle et sans doute archaïque.
M. Josselin de Rohan. On se moque de lui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En tout état de cause, la commission ne peut émettre un avis favorable sur une démarche de cette nature.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. À l'évidence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Comme l'a très bien fait M. le rapporteur général, il faut tordre le cou à cette idée que le Gouvernement gagnerait de l'argent à voir augmenter les prix de l'essence. C'est le contraire !
La commission à laquelle M. le rapporteur général faisait référence, et qui est présidée par Bruno Durieux, a chaque fois bien montré - c'est le cas notamment pour cette année - que l'État perd de l'argent quand le prix du pétrole augmente, parce que l'augmentation de la TVA ne compense pas la diminution de la TIPP.
L'État ne joue pas de double jeu ; il n'a aucun intérêt à voir augmenter le prix du pétrole ! C'est un désavantage à la fois en termes de finances publiques et en matière de pouvoir d'achat.
Le mécanisme de la TIPP flottante a déjà été utilisé et il ne permet pas de répondre à ce problème. On a toujours tendance à vouloir bien faire et, en réalité, on crée des mécanismes extrêmement compliqués. M. le rapporteur général a parlé d' « usine à pétrole » ; c'est exactement le cas ! Cela a coûté plus de 2,5 milliards d'euros aux finances publiques pour une réduction à la pompe de quelques centimes d'euro...
M. Josselin de Rohan. Trois centimes !
M. Éric Woerth, ministre. La diminution a effectivement été inférieure à 3 centimes d'euro les années où le mécanisme a été appliqué.
Il faut donc raisonner autrement : la TIPP flottante ne permet pas de répondre à cette problématique de l'augmentation des prix du pétrole.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-196.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 8
I. - Le a quater du I de l'article 219 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, le régime des plus ou moins-values à long terme s'applique à la plus ou moins-value résultant de la cession d'un brevet, d'une invention brevetable ou d'un procédé de fabrication industriel qui satisfait aux conditions prévues aux a, b et c du 1 de l'article 39 terdecies, sous réserve qu'il n'existe pas de liens de dépendance entre l'entreprise cédante et l'entreprise cessionnaire au sens du 12 de l'article 39. »
II. - Le I ter de l'article 93 quater du même code est ainsi rédigé :
« I ter. - L'imposition de la plus-value constatée lors de l'apport, par un inventeur personne physique, d'un brevet, d'une invention brevetable, ou d'un procédé de fabrication industriel qui satisfait aux conditions mentionnées aux a, b et c du 1 de l'article 39 terdecies, à une société chargée de l'exploiter peut, sur demande expresse du contribuable, faire l'objet d'un report jusqu'à la cession, au rachat, à l'annulation ou à la transmission à titre gratuit des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport ou, si elle intervient antérieurement, jusqu'à la cession par la société bénéficiaire de l'apport du brevet, de l'invention brevetable ou du procédé de fabrication industriel. La plus-value en report d'imposition est réduite d'un abattement d'un tiers pour chaque année de détention échue des droits reçus en rémunération de l'apport au-delà de la cinquième.
« Le report d'imposition prévu au premier alinéa est maintenu en cas d'échange de droits sociaux mentionnés au même alinéa résultant d'une fusion ou d'une scission jusqu'à la cession, au rachat, à l'annulation ou à la transmission à titre gratuit des droits sociaux reçus lors de l'échange.
« En cas de transmission à titre gratuit à une personne physique des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport ou reçus lors de l'échange mentionné au deuxième alinéa, le report d'imposition est maintenu si le bénéficiaire de la transmission prend l'engagement d'acquitter l'impôt sur la plus-value lors de la cession, du rachat, de l'annulation ou de la transmission à titre gratuit des droits sociaux.
« L'article 151 septies ne s'applique pas en cas d'exercice de l'option prévue au premier alinéa.
« Les dispositions du sixième alinéa du II de l'article 151 octies sont applicables aux plus-values dont l'imposition est reportée en application du premier alinéa ou dont le report est maintenu en application des deuxième ou troisième alinéas. »
III. - Dans le premier alinéa du I et le II de l'article 210-0 A du même code, avant la référence : « au V de l'article 93 quater » sont insérés les mots : « au I ter et ».
IV. - Le I s'applique aux plus ou moins-values réalisées au titre des exercices ouverts à compter du 26 septembre 2007.
Les II et III s'appliquent aux apports réalisés à compter du 26 septembre 2007.
Mme la présidente. L'amendement n° I-197, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement visant à réécrire l'article 8 du présent projet de loi porte sur une question d'une grande importance.
Au détour d'un article assez nettement amendé lors de la discussion parlementaire, la loi de finances rectificative pour 2005 a procédé à une réforme profonde du mode de taxation des plus-values.
Pour aller vite, les conditions de l'exonération intégrale des revenus concernés ont été créées par adjonction dans le code général des impôts des deux articles dont nous demandons aujourd'hui la suppression.
Dans les faits, le revenu concerné bénéficie depuis le 1er janvier 2006 de règles d'abattement sur le montant de la base imposable qui laissent rêveur.
Au bout de huit années de détention d'un actif quelconque, la plus-value tirée de sa cession devient, en effet, non imposable.
Cette situation a trouvé, assez étonnamment, sans doute, à s'appliquer dans le cadre du plan de cession d'actions EADS mis en place par les dirigeants du groupe Lagardère.
Je rappellerai les propos que nous avions tenus à l'époque, lors de la discussion de l'article 19.
« Il organise très concrètement les conditions de l'exemption totale d'imposition des plus-values de cession de titres mobiliers pour les particuliers.
« Une telle démarche est parfaitement scandaleuse au regard de la réalité de notre fiscalité de l'épargne. En effet, la liste est longue des mesures qui corrigent l'imposition des revenus de capitaux mobiliers dans la législation de l'impôt sur le revenu. Qu'il s'agisse du taux privilégié d'imposition - 16 %, même majoré des 11 % de prélèvements sociaux -, des prélèvements libératoires, des exonérations de produits de cession de faible montant annuel, de la large exonération des plans d'épargne en actions ou des plans d'épargne d'entreprise, tout concourt à exempter largement les revenus de capitaux d'une juste imposition. »
Nous indiquions également : « En effet, la valorisation des actifs cédés, sur la durée, n'est pas la récompense de la patience des détenteurs, mais le plus souvent l'effet de la progression du cours en bourse des valeurs détenues.
« Ce n'est pas l'épargnant qui valorise ses biens, ce sont plutôt les décisions stratégiques de l'entreprise concernée qui motivent cette valorisation. Par exemple, une entreprise qui n'augmente pas ses salaires, qui compresse la part de la valeur ajoutée qu'elle consacre à l'emploi et qui distribue de généreux dividendes est bien souvent une entreprise dont les titres se valorisent.
« La non-imposition des plus-values de cession qui nous est proposée dans cet article est en quelque sorte la validation des choix de financiarisation de l'activité économique réelle.
« Les dividendes et la progression des cours de bourse sont un hold-up permanent sur le travail des salariés !
« Ce sont les plans sociaux, les investissements non réalisés et la modération salariale qui motivent la progression des cours de bourse. »
M. Jean-François Copé, alors ministre délégué au budget, nous avait fait la réponse suivante.
« Le dispositif comporte deux volets.
« Le premier volet est en faveur de tous les actionnaires, personnes physiques ou sociétés, et a pour objet de prendre en compte la durée de détention des titres pour le calcul de leurs gains nets de cession de titres. Il s'agit de récompenser la fidélité des actionnaires et d'encourager ainsi, monsieur Foucaud, la détention d'actions longue. C'est très important, parce que cela permet de stabiliser l'actionnariat et de protéger le capital de nos entreprises. Il n'y a donc en réalité aucun effet d'aubaine.
« Le second volet est lui centré sur les dirigeants de sociétés ayant atteint ou dépassé l'âge de départ en retraite et souhaitant céder leurs entreprises. Pour eux, la mesure sera d'application immédiate. C'est dans l'intérêt de l'emploi et de la pérennité des PME, puisque les transmissions d'entreprises ne seront pas ainsi gelées. »
Le rappel de l'affaire EADS, qui a commencé de se nouer dans le courant du premier trimestre 2006, montre avec quel éclat l'absence d'effet d'aubaine s'est fait sentir dans le cas qui nous préoccupe.
C'est bel et bien parce que le dispositif voté en décembre 2005 a permis au groupe Lagardère de réaliser une opération de 472 millions d'euros, peut-être doublée d'un délit d'initié, que nous ne pouvons que proposer la suppression de ces dispositions.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les dispositions dont il s'agit sont très récentes : elles ont été votées dans le cadre du collectif budgétaire de décembre 2005. Pour une large part, ces mesures étaient dues à une initiative de la commission des finances.
Quels sont nos principaux objectifs dans ce domaine ? Ils sont toujours les mêmes : l'attractivité et la compétitivité. Nous voulons valoriser la place de Paris, attirer les sièges sociaux des grandes entreprises et les transactions financières importantes.
Vous faites référence à une transaction particulière pour discréditer toute une évolution vers plus de compétitivité. L'affaire que vous avez évoquée, celle des conditions de cession d'une participation dans EADS, doit être analysée en tant que telle, comme l'a d'ailleurs fait de manière extrêmement précise la commission des finances dans le cadre des différentes auditions publiques qu'elle a organisées. Au terme de ces auditions, le président de la commission, en accord avec le bureau, a prévu la publication d'un rapport qui présentera nos conclusions et nos préconisations en matière de contrôle par l'État des participations qu'il détient ou dont il est proche.
L'amendement n° I-197 ne peut pas être accepté, car il irait totalement à rebours de nos intérêts économiques et de notre compétitivité.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Vous faites coup double dans votre amendement : d'une part, vous proposez de supprimer le dispositif très important sur les brevets, qui permet de consolider la recherche et d'aider les propriétaires de brevets ; d'autre part, vous suggérez d'abroger les dispositifs récents sur la conservation des titres. C'est tout à fait contraire à la compétitivité !
Ce sont des dispositifs efficaces. Auparavant, un propriétaire de PME ou un actionnaire majoritaire de PME qui décidait de partir à la retraite quittait le territoire français et partait en Belgique, par exemple. En 2006, 1 700 dirigeants de PME ont bénéficié de ce dispositif. Ils ont vendu leur entreprise en France en lui permettant de perdurer et ils n'ont pas quitté le territoire national.
Nous avons tout intérêt à mettre en place des mécanismes fiscaux qui incitent les uns et les autres à transmettre le patrimoine économique de la meilleure façon possible, à le consolider, et c'est ce que nous faisons au travers de cet article.
Je ne peux donc qu'inciter le Sénat à rejeter vigoureusement cette proposition.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Je voudrais revenir sur ce qu'a dit M. le rapporteur général à la fin de son intervention, en évoquant les auditions qui ont eu lieu dans le cadre de l'affaire EADS. Je rappelle que nous demandons toujours la création d'une commission d'enquête parlementaire sur ce sujet.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elle n'ajouterait rien !
M. Thierry Foucaud. L'effet d'aubaine est évident, avec 472 millions d'euros.
Qu'il s'agisse de la progressivité de l'impôt ou de toutes les autres mesures mises en place par le Gouvernement pour faire plaisir, allais-je dire, aux plus riches, ou pour les favoriser, on nous invoque à chaque fois l'attractivité, la compétitivité. Mais, on le voit bien, cela ne marche pas.
Tous les ans, on nous annonce une croissance comprise entre 2,2 % et 2,5 %, et, tous les ans, elle est inférieure à 2 % ! Cette année, elle sera certainement de 1,8 %. En outre, le mois dernier, le taux de consommation des Françaises et des Français a été le plus bas de l'année.
Pour ma part, j'estime qu'il faut prendre garde à de telles mesures et essayer, autant que faire se peut, de les abroger. En effet, celles-ci permettent surtout aux entreprises de ne pas augmenter les salaires et de valoriser leurs titres. Ainsi, le cours des titres croît, tandis que les salariés connaissent des difficultés.
Telles sont les observations que je souhaitais ajouter, madame la présidente. Les dispositions qui nous ont été proposées en 2005 ne participent ni à l'attractivité ni à la compétitivité des entreprises ! Ça se saurait et ça se verrait !