M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Je souhaite compléter les éléments de réponse apportés par M. le rapporteur sur cet amendement, qui vise à la distribution d'un livret d'information à l'ensemble des salariés.
L'information des salariés passe actuellement par le biais, notamment, du document unique d'évaluation des risques professionnels, d'une obligation de formation des salariés à la sécurité, qui est imposée aux employeurs, et des fiches d'exposition pour les risques les plus importants. En outre, d'autres acteurs concourent à cette information, comme le médecin du travail, qui réalise des fiches d'entreprise, et le CHSCT
Par conséquent, nous ne souhaitons pas prévoir un document supplémentaire, alors que toute une procédure est d'ores et déjà mise en place pour assurer cette information.
M. le président. L'amendement n° 363, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Avant l'article 54, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 236-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « L'inspection du travail impose la création d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail lorsque cette mesure est nécessaire, notamment en raison de la nature des risques tels qu'évalués dans le document unique prévu au II de l'article L. 230-2, de l'agencement ou de l'équipement des locaux. ».
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Avec votre accord, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 363, 364 et 366, me réservant la possibilité de défendre séparément l'amendement n° 365, qui peut être considéré comme un amendement de repli, au cas - hautement improbable ! - où les trois autres amendements ne seraient pas adoptés. (Sourires.)
Ces amendements concernent les CHSCT, qui, vous le savez, mes chers collègues, sont institués dans tous les établissements regroupant au moins cinquante salariés et auxquels les organisations syndicales comme, tout simplement, les salariés sont très attachés.
La condition de masse salariale de cinquante salariés au moins interdit la création d'une telle instance dans des entreprises de moins de cinquante salariés, y compris dans celles qui, en raison de leur spécificité et de leur objet, exposent potentiellement leurs salariés à des risques ou facteurs de risque importants. Cette situation est particulièrement fréquente dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.
L'amendement n° 363 vise à corriger le dispositif existant en rendant possible la création d'un CHSCT sur demande de l'inspection du travail, dès lors que celle-ci l'estime nécessaire pour la protection de la santé des travailleurs.
L'amendement n° 364 a pour objet de permettre à l'inspection du travail d'imposer, lorsqu'une chaîne de sous-traitance ou des risques propres à une zone d'activité existent, la création d'un CHSCT. Il s'agit là d'une adaptation légitime au marché du travail, s'agissant notamment de la sous-traitance.
Enfin, l'amendement n° 366, qui s'inscrit également dans une logique de prévention et de protection des travailleurs, tend à créer de plein droit des CHSCT interentreprises lorsque les différentes entreprises sont situées dans une même zone géographique et n'emploient pas plus de cinquante salariés chacune.
Sachant, monsieur le rapporteur, madame le secrétaire d'État, que vous aviez toutes chances d'émettre un avis défavorable sur ces trois amendements, nous avons donc déposé un amendement de repli, l'amendement n° 366, qui vise à créer des représentants de salariés spécifiquement compétents en matière de prévention et de santé au travail dans les entreprises de moins de cinquante salariés.
En effet, vous en conviendrez avec moi, ce n'est pas parce que l'entreprise emploie moins de cinquante salariés que ces derniers sont pour autant moins exposés aux accidents du travail ou aux maladies professionnelles. En la matière, le risque n'est pas strictement proportionnel au nombre de salariés de l'entreprise.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Dériot, rapporteur. L'amendement n° 363 est, à nos yeux, redondant avec les dispositions figurant déjà au troisième alinéa de l'article L. 236-1 du code du travail ; la commission a donc émis un avis défavorable.
L'adoption de la mesure proposée par l'amendement n° 364 aboutirait à ce qu'un CHSCT élu par les salariés d'une entreprise soit également compétent pour les salariés d'autres entreprises. Il paraît plus logique et cohérent de permettre à des petites entreprises, comme le prévoit le code du travail, de s'associer pour former un CHSCT. La commission est donc également défavorable à cet amendement.
L'amendement n° 366 vise à contraindre toutes les petites entreprises à se regrouper pour former des CHSCT interentreprises. Cette exigence paraît excessivement lourde au regard de l'objectif poursuivi ; la commission y est donc défavorable.
J'en viens enfin à l'amendement n° 365. Dans les petites entreprises, les compétences du CHSCT sont dévolues aux représentants du personnel. À notre avis, il n'est donc pas raisonnable d'y imposer la présence d'autres élus. La commission a donc également émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. À l'issue de la conférence sociale sur les conditions de travail, Xavier Bertrand a annoncé qu'il renvoyait à la négociation, dans le cadre de la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social, deux aspects importants qui correspondent à vos préoccupations, monsieur Autain.
Il a tout d'abord évoqué l'examen des modalités d'amélioration du fonctionnement et du rôle du CHSCT et de la formation de ses membres.
Il s'agit ensuite de la définition du cadre du dialogue social relatif à la santé et à la sécurité dans les PME et les TPE.
Le document d'orientation de ces deux négociations, qui ont été acceptées par les partenaires sociaux, leur sera envoyé dans les jours qui viennent.
Bien entendu, monsieur le sénateur, le CHSCT est au coeur du dispositif de prévention et d'alerte dans l'entreprise, et nous partageons votre point de vue sur ce sujet. Cependant, dans la mesure où un travail important est actuellement en cours avec les partenaires sociaux, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
M. le président. L'amendement n° 364, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Avant l'article 54, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 236-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas d'existence d'une chaîne de sous-traitance ou de risques propres à une zone d'activité, il décide de l'extension de la compétence d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail à d'autres entreprises. »
Cet amendement a déjà été présenté.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 365, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Avant l'article 54, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au quatrième alinéa de l'article L. 236-1 du code du travail, après les mots : « moins de cinquante salariés » sont insérés les mots : « à défaut d'existence de représentants de salariés spécifiquement compétents en matière de santé au travail dans la branche d'activité de l'entreprise ou dans un cadre interprofessionnel, ».
Cet amendement a déjà été présenté.
Je le mets aux voix l'amendement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 366, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Avant l'article 54, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au cinquième alinéa de l'article L. 236-1 du code du travail, le mot : « peuvent » est remplacé par le mot : « doivent ».
Cet amendement a déjà été présenté.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 54
L'avant-dernier alinéa de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le montant de la rente afférente au dernier accident ne peut dépasser le montant du salaire servant de base au calcul de la rente. »
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, sur l'article.
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous me permettrez de débuter cette courte intervention en faisant un rapide retour en arrière.
Pour ce qui concerne la branche accidents du travail et maladies professionnelles, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ne contenait aucune mesure structurelle et prévoyait un retour à l'équilibre de la branche grâce au « dynamisme des cotisations, du fait de l'amélioration du marché de l'emploi, ainsi qu'à la faible évolution des charges, hors dotation aux fonds amiante ».
Voilà un an, j'avais contesté ces prévisions bien optimistes : aujourd'hui, force est de constater l'erreur d'analyse faite par le gouvernement, le ministre, mais aussi le rapporteur de l'époque, puisque, comme l'indique la commission des comptes de la sécurité sociale, le déficit s'est aggravé en 2007, pour revenir au niveau de 2005.
Au cours de la discussion générale, M. Gérard Dériot, s'exprimant au nom de la commission, a reconnu cette situation de fait. J'attends toujours que le Gouvernement en fasse autant.
Loin de tirer les leçons de l'année 2007, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 est à peine plus consistant. Si le Gouvernement prévoit encore le retour à l'équilibre de la branche en 2008, c'est principalement grâce à l'apport des nouvelles recettes résultant de la suppression des exonérations de cotisations AT-MP des employeurs dans le cadre d'allégements ciblés.
Au-delà de cette mesure, qui est importante, j'en conviens, il n'y a rien, ou presque, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale qui permette d'améliorer vraiment la situation des victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles.
En fait, face à l'évolution des formes de dangerosité au travail, la réponse du Gouvernement, depuis quelques années, pourrait étonner par son indigence si les implications juridiques et financières d'une correction efficace n'étaient pas aussi désagréables pour les employeurs.
Depuis l'accord du 13 septembre 2000 sur la santé au travail et la prévention des risques professionnels, peu de progrès réels ont été accomplis. En 2005, le gouvernement d'alors a mis en place un plan Santé au travail, mais sans qu'on puisse observer des résultats concrets à ce jour. Il faut bien constater un certain défaut d'implication des employeurs sur ce sujet, ce qu'illustre parfaitement l'enlisement délibéré de la négociation sur la pénibilité du travail, prévue par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, et par la résistance des employeurs lors des travaux préparatoires de la conférence sociale sur les conditions de travail.
Je regrette que le Gouvernement soit bien moins diligent sur ces questions qu'il ne peut l'être dans d'autres circonstances, ce qui donne souvent, et à juste titre, le sentiment d'une politique du type « deux poids deux mesures ». À cet égard, il suffit de se reporter à l'ensemble des débats que nous avons depuis le début de la semaine !
Incontestablement, la question des accidents du travail et des maladies professionnelles ne fait pas partie des priorités du Gouvernement, qui, au cours des cinq dernières années, s'est caché derrière le paritarisme et le dialogue social pour justifier son immobilisme.
Il est temps que cela change ! Il faut investir sérieusement ce champ important des politiques publiques. Vous devez notamment, madame le secrétaire d'État, tirer les conséquences de l'échec des négociations engagées par les partenaires sociaux sur la gouvernance de la branche AT-MP, ainsi que sur la prévention, la tarification et la réparation des risques professionnels. Un échec dont vous ne pouvez d'ailleurs que convenir puisque vous avez vous-même renoncé à transposer dans ce projet de loi les accords de février 2006 et mars 2007, qui, il est vrai, sont loin de faire l'unanimité et proposent bien peu d'avancées.
J'avais, avec mon groupe, déposé sur cet article un certain nombre d'amendements : la quasi-totalité d'entre eux ont été déclarés irrecevables en vertu de l'article 40 de la Constitution. C'est particulièrement regrettable pour les victimes des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui attendent une amélioration de leur situation sur un certain nombre de sujets.
Au demeurant, je souhaite faire remarquer que, si nous ne pouvons plus faire de propositions d'engagement de dépenses ou de recettes lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale concernant, notamment, les accidents du travail et les maladies professionnelles, je ne sais pas à quel moment nous pourrons les soumettre, sauf à faire passer nos amendements en prenant au préalable contact avec le Gouvernement, pour qu'il les présente lui-même !
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Le 13 octobre dernier, les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, leurs familles, les associations de défense et les syndicats se sont massivement mobilisés pour une meilleure prévention et une meilleure réparation des risques professionnels.
Je ne reviens pas ici sur l'attitude du Gouvernement, qui continue obstinément de nier le droit à la gratuité totale des soins des victimes du travail en maintenant la franchise de 1 euro par acte médical et en prévoyant d'en ajouter d'autres, qui conduisent à faire payer aux victimes la réparation de leurs préjudices imputables à l'employeur.
Je profite du seul article de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale qui approche, mais de façon restrictive, la question de la réparation des victimes du travail pour rappeler au Gouvernement qu'il est profondément injuste et scandaleux de sa part de bloquer ou de refuser de proposer des solutions ouvrant droit à une réparation intégrale des préjudices supportés par les personnes victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles.
Les inégalités de traitement entre tous les salariés victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ne sont plus supportables.
Le Gouvernement doit construire un système de solidarité, à l'image de celui qui existe pour les victimes de l'amiante.
Sont tout autant insupportables les écarts d'indemnisation d'une juridiction à l'autre pour des personnes souffrant d'une même pathologie, victimes des mêmes atteintes fonctionnelles, parfois contaminées dans la même entreprise. Tel est, en substance, le message que le président de l'association nationale de défense des victimes de l'amiante, l'ANDEVA, a adressé au Président de la République dans une lettre ouverte.
Madame la secrétaire d'État, comment pouvez-vous justifier plus longtemps de traiter différemment les victimes de risques chimiques et celles de l'amiante ? Comment accepter que le « ticket amiante n'ait pas qu'un seul tarif », comme le déplore la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, la FNATH, ou qu'un tribunal des affaires sociales, celui de Lille en l'occurrence, décide, en l'absence de conférence de consensus, de ne plus indemniser les plaques pleurales parce qu'elles n'entraîneraient pas forcément de problèmes fonctionnels ou de difficultés respiratoires ? Quand allons-nous pouvoir enfin débattre sereinement de toutes ces questions ?
En 2002, la Cour de cassation a consacré l'obligation de résultats à la charge de l'employeur. Cela a eu une double conséquence, et d'abord celle de faire peser, en cas de manquement à cette obligation de résultat, une faute inexcusable sur l'employeur, ce qui permet à la victime d'obtenir un supplément d'indemnisation couvrant l'ensemble des préjudices subis.
L'autre conséquence, plus regrettable, a marqué la fin de la cohérence d'ensemble du dispositif de réparation des accidentés du travail : ainsi, les victimes de l'amiante et leurs ayants droit voient leurs préjudices intégralement réparés par le biais du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, tandis que les autres victimes d'AT-MP n'obtiennent qu'une réparation forfaitaire, excepté en cas de faute inexcusable de l'employeur.
Le MEDEF et certains députés et sénateurs UMP prennent prétexte de cette incohérence pour dénoncer l'existence d'un dispositif d'exception favorable aux victimes de l'amiante et exiger l'abandon de la notion de faute inexcusable ainsi qu'un alignement vers le bas des indemnisations.
Une autre possibilité consiste à sortir par le haut des incohérences actuelles en ouvrant à toutes les victimes, sans distinction, le droit à la réparation intégrale de leurs préjudices.
C'est cette seconde option que nous défendons. Nous l'avions matérialisée sous forme d'amendements. Malheureusement, ils n'ont pas résisté au couperet de l'article 40 ! Ainsi, nos propositions sur ce point sont censées n'avoir jamais existé. Exit l'ajout à la rente d'incapacité de l'indemnisation des souffrances physiques et morales, des préjudices esthétiques et d'agrément, de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle ! Exit également l'alignement du taux de la rente sur le taux d'incapacité permanente médicalement reconnu par expertise !
Il est donc interdit d'aller au-delà des limites actuelles de la réparation forfaitaire, au-delà de la réparation des préjudices professionnels, qui sont en outre sous-estimés.
Dans tous les cas, sauf pour les victimes dont le taux d'incapacité est de 100 %, la rente calculée en fonction du salaire indemnise partiellement la perte de revenus au prorata de l'incapacité reconnue.
Mais le Gouvernement laisse faire. Non seulement il n'agit pas pour améliorer substantiellement la réparation, mais, de surcroît, il grignote les droits des victimes !
J'en veux pour preuve l'article 54, qui plafonne le montant des rentes en cas d'accidents successifs et conduit à gommer l'indemnisation du dernier accident.
Vous comprendrez que nous ne puissions que voter contre cet article.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 100 est présenté par MM. Godefroy et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger et Alquier, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 371 est présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour défendre l'amendement n° 100.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 54 vise à plafonner le montant de la rente d'indemnisation en cas d'accidents du travail successifs au montant du dernier salaire.
Lors du débat à l'Assemblée nationale, M. le ministre Xavier Bertrand a déclaré que cette disposition se justifiait par le fait que des sommes importantes étaient en jeu et que deux cents personnes étaient concernées. Ces deux arguments sont a priori contradictoires, à moins que les intéressés ne perçoivent chacun une véritable fortune - mais cela se saurait !
Cette disposition appelle de notre part une question et une observation.
Tout d'abord, quel est le nombre exact de personnes concernées par la rente en cas d'accidents du travail successifs, pour quel montant global et pour quel montant par personne ? Il serait bon que ces précisions soient apportées en séance publique afin que nous soyons tous éclairés.
Ensuite, il convient de rappeler que les accidentés du travail sont avant tout des victimes, et nous n'insisterons jamais assez sur ce point. L'accident du travail n'est pas le virus de la grippe ! II ne s'attrape pas en se promenant dans la rue !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si, quand on va au boulot !
M. Jean-Pierre Godefroy. Oui, monsieur le président, mais cela n'exclut pas que l'accident du travail soit le résultat d'un défaut de sécurité, à quelque moment que ce soit, dans l'exécution de sa tâche par le salarié.
II est donc logique que l'indemnisation pérenne du salarié victime de deux accidents, constituée en l'espèce par la rente, soit déconnectée du niveau de son dernier salaire, d'autant que le revenu du salarié après le premier accident est le plus souvent inférieur au salaire auquel il pouvait prétendre initialement.
De plus, l'accident peut aussi avoir des conséquences financières négatives pour la victime lorsqu'il entraîne des frais quotidiens, auxquels s'ajoutera la franchise, qui a été adoptée dans cet hémicycle pas plus tard qu'hier !
Par ailleurs, n'oublions pas qu'un accident génère une incapacité qui, par définition, affaiblit les aptitudes de la personne : après un premier accident ayant provoqué une incapacité, elle gagne généralement moins qu'avant l'accident.
Par conséquent, caler la rente sur le dernier salaire, c'est imposer une forme de double peine à quelqu'un qui, ne l'oublions pas, est une victime, qui n'en peut mais !
C'est pour cette raison que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 - sous un gouvernement de gauche, il est vrai ! - prévoyait de fixer le taux de la rente en considération du taux global d'incapacité, et non pas accident par accident, comme antérieurement.
Que le montant de la rente servie à la victime puisse être supérieur à celui du dernier salaire n'a rien de choquant si l'on veut faire prévaloir le statut de victime d'accident et l'obligation d'une juste indemnisation sur des préoccupations purement financières.
Je souhaite que notre assemblée adopte cet amendement de pure justice.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour présenter l'amendement n° 371.
M. François Autain. À la suite de l'application des dispositions adoptées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, les accidents du travail donnent droit, à l'heure actuelle, à un cumul des taux d'invalidité permanente partielle, ou IPP, pour chacun des accidents survenus.
Pour nous, comme pour de nombreuses associations, notamment la FNATH, le fait que le montant des indemnisations perçues dépasse quelque peu la rémunération initiale des accidentés du travail n'est pas choquant.
Vous le savez, les accidentés du travail ne bénéficient pas d'une indemnisation intégrale, et nous le regrettons. Aucune indemnisation n'est prévue pour les préjudices de vie, d'esthétique, d'agrément, voire d'établissement. Seule la perte ou la diminution de la rémunération est indemnisée. Pourtant, les accidentés de la vie demandent depuis longtemps une juste indemnité afin de compenser, au bout du compte, tout ce qu'ils ont perdu, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle, loin s'en faut !
Le cumul des taux d'IPP est d'autant moins critiquable qu'un ensemble de frais vient amoindrir les revenus des accidentés du travail, notamment les éventuelles prises en charge psychologiques, les dépassements, le reste à charge, les franchises, tous les aménagements spécifiques auxquels ils doivent parfois faire face.
Au-delà de cette baisse des revenus, les accidentés du travail sont privés d'un déroulement de carrière qui aurait pu permettre une évolution de leur revenu.
Enfin, votre projet porte atteinte à un principe fondamental en droit : la réparation de tout préjudice. En mettant fin à ce cumul, vous supprimez de facto l'indemnisation du dernier accident survenu, ce qui, vous en conviendrez, n'incitera pas les employeurs à la prévention.
C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Dériot, rapporteur. L'article 54, dont la commission propose l'adoption en l'état, a pour effet de réduire le montant des rentes versées à certaines victimes. Deux cents personnes étant concernées chaque année, la mesure représente 800 000 euros.
Aucun accident ne pouvant, à lui seul, occasionner une incapacité supérieure à 100 %, il est logique de plafonner le montant de la rente au niveau du dernier salaire de la victime.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le Gouvernement ne conteste pas le principe de la réforme de 2000, qui permet de mieux indemniser les victimes en cas d'accidents successifs.
Toutefois, la finalité de la rente AT-MP étant avant tout d'indemniser la perte de capacité de gain, il est anormal que la rente du seul dernier accident dépasse le salaire antérieur, d'où la disposition qui vous est soumise.
Il s'agit donc de plafonner l'indemnisation du dernier accident et non pas de la remettre en cause.
Mais le salarié victime de deux accidents pourra être indemnisé pour chacun des deux accidents. Par exemple, il pourra tout de même avoir un taux d'incapacité de 150 % dans le cas où il a eu un premier accident à 50 % et un second plafonné à 100 %, puisque les deux taux s'additionneront.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est très clair !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 100 et 371.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 54.
(L'article 54 est adopté.)
Article 55
L'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 (n° 2001-1246 du 21 décembre 2001) est ainsi modifié :
1° Dans le II et le premier alinéa du III, le mot : « accidents » est remplacé par le mot : « décès » ;
2° Dans le troisième alinéa du III, les mots : « de l'accident » sont remplacés par les mots : « du décès ».
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, sur l'article.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 55 modifie la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 afin que toutes les rentes d'ayants droit liquidées à la suite de décès postérieurs au 1er septembre 2001 bénéficient des taux en vigueur actuellement.
Il répond à une revendication ancienne et permet de résoudre une difficulté de traitement des différentes caisses, qui conduisait à des incohérences dans le montant des rentes viagères versées aux ayants droit de personnes décédées dans des accidents du travail, selon la date du décès.
Si cette mesure constitue une amélioration indéniable pour les ayants droit des personnes décédées après le 1er septembre 2001, il n'en reste pas moins qu'elle n'est pas complètement satisfaisante en ce qu'elle introduit une discrimination incompréhensible entre les ayants droit selon que le décès du proche a eu lieu avant ou après le 1er septembre 2001.
C'est pourquoi nous avions déposé un amendement qui permettait d'aller plus loin et de rétablir l'égalité de traitement entre les ayants droit des victimes décédées en supprimant la référence à la date de l'accident ou de la maladie professionnelle à l'origine du décès. Il nous semblait juste que les taux majorés s'appliquent aux rentes perçues par les veuves et orphelins quelle que soit la date du décès.
Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur ce point. Bien entendu, je n'attends pas une réponse aujourd'hui, puisque vous n'étiez pas prévenue de ma demande. Mais je suis obligé d'intervenir sur l'article pour vous interroger puisque, une fois de plus, notre amendement a été frappé du cachet « article 40 » !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. le président. Ce sont les prises de parole « article 40 » !
Je mets aux voix l'article 55.
(L'article 55 est adopté.)