M. Roger Madec. Cet amendement tend à prévoir que tout chien circulant librement dans une propriété privée, hors des habitations, soit gardé dans un périmètre d'où il ne peut sortir. La nécessité de protéger les personnes des attaques possibles de certains chiens impose d'adopter des mesures, telles que les dispositifs de clôture sécurisée.
S'inspirant de la rédaction de l'amendement n° 20 de la commission des affaires économiques, cette mesure concerne non pas tous les chiens mais seulement ceux qui correspondent à des critères de poids définis par voie réglementaire.
Par ailleurs, cet amendement se veut pragmatique puisque son application est subordonnée à la rédaction d'un décret.
Il ne faudrait pas sous-estimer l'importance de cet amendement. La disposition proposée répond en effet à la préoccupation des nombreuses victimes mordues par des chiens qui se sont échappés de leur lieu de résidence parce que les clôtures n'étaient pas adaptées au gabarit de l'animal.
Cet amendement emprunte une démarche qui n'est pas originale en soi. Souvenons-nous de la proposition de loi de M. Raffarin relative à la sécurité des piscines qui a abouti à la loi du 3 janvier 2003. Chaque année, en effet, de nombreux enfants mouraient noyés ou étaient atteints de séquelles irréversibles à la suite d'un accident de noyade.
Aujourd'hui, nous nous trouvons dans le même cas de figure, toutes proportions gardées, avec les agressions de chiens non contrôlés. Certes, le risque zéro n'existe pas, mais la gravité, le caractère sensible et souvent dramatique de ce sujet exigent bien un traitement prioritaire. Si les récents accidents dramatiques qui ont conduit à l'examen, ce soir, de ce projet de loi ne sont pas liés à des chiens qui se seraient échappés, j'ai en mémoire des accidents mortels qui se sont produits ces dernières années parce que des chiens dangereux ou de grosse taille s'étaient enfuis de la propriété de leur maître.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Je vois mal la portée pratique de cet amendement, qui fait référence aux chiens pouvant « circuler librement dans une propriété privée ». L'obligation pour un agriculteur possédant une ferme d'une centaine d'hectares de grillager sa propriété afin d'empêcher son chien de s'échapper se traduirait par une dépense relativement importante. Je rappelle qu'aux termes du code rural la divagation des animaux est interdite. Cet amendement me paraît donc superfétatoire. C'est la raison pour laquelle la commission des lois en demande le retrait. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Cette disposition, qui peut paraître satisfaisante sur le papier, me semble la pire des choses, car les accidents se produisent toujours lorsque les portails sont laissés ouverts. Personne ne peut être garant de la fermeture permanente et définitive d'une clôture. La solution ne se trouve pas là ; elle est dans le dressage du chien et l'habitude de ce dernier. Il faut avoir de gros chiens qui ne soient pas dangereux et, s'ils le sont, ils doivent être attachés dans des lieux très sécurisés. Le fait de mettre des barrières partout et d'enfermer les chiens est le meilleur moyen de les rendre agressifs.
Ainsi que Mme le ministre le soulignait tout à l'heure, un spécialiste canin peut, en deux mois, transformer les chiots les plus gentils en véritables monstres en les mettant dans des caves. Si, à chaque fois qu'il leur apporte à manger, il leur donne en plus un bon coup de pied dans la tête de façon qu'ils aient une perception très négative de l'homme, il est certain que, une fois la porte ouverte, ils sauteront à la gorge de tous ceux qui passeront !
Le dressage doit avoir pour but de rendre de gros chiens gentils et sociables. Le chien est en effet la meilleure ou la pire des choses suivant ce que l'on en fait.
Si ce sujet me passionne, madame le ministre, c'est parce que, au cours de ma carrière professionnelle, je me suis occupé de l'insertion d'enfants handicapés, en particulier autistes, à travers le contact avec les animaux, notamment les chiens. À cette occasion, j'ai constaté les progrès remarquables accomplis par ces enfants handicapés par rapport à d'autres enfants également handicapés mais qui n'étaient pas en contact avec des animaux. Par conséquent, je le répète, l'animal peut être le meilleur serviteur de l'homme, mais il peut aussi, si l'homme ne fait pas ce qu'il faut, être la pire des choses.
C'est pourquoi, monsieur Madec, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. Il faut tout mettre en oeuvre pour avoir des chiens socialisés, gentils et, dans certains cas très particuliers, tels que la garde d'usines la nuit, il faut prévoir, s'agissant de chiens dressés à cet usage, des conditions précises non pas de détention, mais de surveillance.
Je suis convaincu que, plutôt que d'enfermer un chien, il faut l'éduquer. Ceux qui connaissent le milieu rural savent que, dans les fermes, bien que le portail soit ouvert - l'agriculteur, à chaque fois qu'il sort avec son tracteur, ne va pas ouvrir puis refermer la porte ! -, un chien bien dressé ne le franchit pas. À l'inverse, un chien qui n'est pas dressé sortira chaque fois que l'on ouvrira la porte.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5
Au I de l'article L. 211-15 du code rural, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La détention des chiens de la première catégorie mentionnée à l'article L. 211-12 nés postérieurement au 7 janvier 2000 est interdite. »
M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, sur l'article.
M. Jacques Muller. Comme je l'ai dit dans la discussion générale, les pays qui ont enclenché un réel processus de diminution du nombre des morsures sont ceux qui ont su mettre en oeuvre des campagnes de sensibilisation et de formation systématiques, ciblant toute la chaîne d'interaction entre l'homme et le chien : les professionnels du domaine cynophile, les propriétaires des chiens, le grand public, et surtout les enfants. La Suisse, le Canada et l'Australie sont des exemples qui permettent d'étayer cette réalité.
Pour ce type de sujet, il convient de marcher sur les deux jambes, à savoir la répression et la prévention.
Je ne suis pas dogmatiquement opposé à la répression du moment que celle-ci ne repose pas sur la stigmatisation de certaines catégories de chiens.
S'agissant de la prévention, j'avais proposé, par le biais d'un amendement, que soient instaurées des campagnes de sensibilisation et de formation aux relations de l'homme et du chien sur l'ensemble du territoire national. J'avais prévu que ces campagnes seraient élaborées et coordonnées par l'observatoire national du comportement canin que je vous ai proposé.
Ces campagnes avaient pour but de sensibiliser et de former les praticiens exerçant dans le domaine cynophile, et ce en vue de leur rappeler leurs obligations, les propriétaires de chiens et les membres de leur entourage immédiat, les membres de services publics régulièrement amenés à être en contact avec des chiens, le grand public, les enfants mineurs et leurs parents.
Cet amendement prévoyait un financement par une taxe dite de responsabilité-sociabilité canine. Il disposait que cette taxe canine était fondée sur les bénéfices de l'industrie agro-alimentaire canine. En effet, faute de financements publics pour ces campagnes, le poids de ces dernières reposait exclusivement sur les particuliers, et nos concitoyens les moins aisés se trouvaient pénalisés dans une telle politique de prévention.
L'industrie agro-alimentaire canine génère un chiffre d'affaires considérable. Selon les sources mêmes de cette industrie, il s'élève à 776,3 millions d'euros pour un volume de 749 000 tonnes d'aliments canins. Cela représente donc une bonne base de financement avec un taux très réduit.
Malheureusement, mon amendement ne sera pas débattu en séance, puisqu'il a été jugé irrecevable en vertu de l'article 40 de la Constitution. Je tenais néanmoins à évoquer cette proposition constructive et réaliste qui, du fait de nos institutions décidément obsolètes qui affaiblissent le pouvoir législatif par rapport au pouvoir exécutif, ne franchira pas le stade de l'ébauche, ce que je regrette.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par M. Courtois, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 21 est présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 51 est présenté par MM. Madec, Muller et Peyronnet, Mme Schillinger et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'article 5 vise à interdire la détention des chiens de première catégorie nés après le 7 janvier 2000. Or, comme les représentants des vétérinaires et les associations en ont fait part lors des diverses auditions que nous avons organisées, il s'avère que cette interdiction semble difficile à appliquer, car les chiens de deuxième catégorie qui, eux, n'ont pas besoin d'être stérilisés, mais également les croisements de certaines races de chiens non classés comme dangereux, à l'instar d'un croisement d'un labrador et d'un boxer, peuvent engendrer des chiens de première catégorie.
En outre, cette interdiction frapperait indifféremment les personnes qui, en violation de la loi du 6 janvier 1999, ont fait se reproduire des chiens de première catégorie non stérilisés ou ont procédé à des importations illégales, et les personnes qui, elles, seraient de bonne foi, possédant sans le savoir des chiens de première catégorie issus d'animaux qui ne sont pas soumis à l'obligation de stérilisation.
Aussi, je vous propose de supprimer l'article 5. Mais je peux d'ores et déjà dire que l'amendement n° 33 rectifié bis portant article additionnel après l'article 5 permettra de trouver un compromis satisfaisant sur ce point.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 21.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. La plupart des chiens de première catégorie, vous l'avez bien compris, sont nés légalement, mais l'on ne s'aperçoit qu'ils appartiennent à cette catégorie que six, huit ou dix mois après qu'ils sont entrés dans un foyer. Comment dire à une famille qui a un chien depuis six à dix mois, lequel n'a posé aucun problème et est bien intégré dans son milieu familial, qu'il faut le supprimer parce qu'il est né après une certaine date ? Qui plus est, le flux des chiens de première catégorie ne peut pas s'arrêter. Il faudrait pour cela, ainsi que nous l'avions observé, supprimer plus d'une quarantaine de races. C'est absolument impossible ! Il faut donc trouver une solution, mais je crois qu'elle a été trouvée.
Pour revenir sur ce disait Mme le ministre à propos de la SPA, la présidente de cet organisme, Caroline Lanty, lors de son audition par la commission, s'est déclarée globalement favorable à ce projet de loi. Le seul article qui lui posait véritablement problème concernait l'euthanasie de tous les chiens de première catégorie nés après le 7 janvier 2000.
Comme l'indiquait Mme le ministre, une fois que cet article aura été supprimé et qu'on aura trouvé une solution plus satisfaisante, je ne vois pas comment la SPA pourrait s'opposer à un projet de loi aussi éminemment constructif. En effet, tous les acteurs du monde canin que nous avons entendus, qu'il s'agisse des représentants des vétérinaires, des comportementalistes - notamment le Dr Bedossa, cité par M. Muller - ou de M. Varlet, que je connais bien, qui représentait la Société centrale canine évoquée par Mme Assassi, reconnaissent que ce texte va dans le bon sens.
Toutes ces personnes sont satisfaites et admettent que les dispositions présentées par le Gouvernement sont extrêmement novatrices. L'extension de ces dernières à tous les chiens potentiellement dangereux représente la seule solution susceptible d'améliorer la situation.
M. le président. La parole est à M. Roger Madec pour présenter l'amendement n°51.
M. Roger Madec. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 35, présenté par M. Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La détention des chiens de la deuxième catégorie mentionnée à l'article L. 211-12 nés postérieurement au 1er janvier 2008 est interdite ».
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Cet amendement déposé par notre collègue Yves Pozzo di Borgo avait pour objet d'appliquer aux chiens de deuxième catégorie la disposition initialement prévue pour les chiens de première catégorie. Si j'ai bien compris nos collègues Jean-Patrick Courtois et Dominique Braye, il y a de fortes chances pour que cette disposition soit supprimée pour la première catégorie, et donc a fortiori pour la deuxième catégorie. Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 5, 21 et 51 ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je suis sensible aux arguments des deux rapporteurs : ils ne souhaitent pas pénaliser les personnes qui seraient propriétaires ou détentrices de bonne foi de chiens de première catégorie nés après le 7 janvier 2000, dont bon nombre d'ailleurs ont déjà été déclarés.
J'émets donc un avis favorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 5, 21 et 51.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 33 rectifié bis, présenté par Mme Debré, MM. Milon, P. Blanc, Dallier et J. Gautier, Mmes Henneron et Kammermann, M. Portelli, Mmes Sittler, Troendle et Procaccia et M. Dériot, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 211-13 du code rural, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Sans préjudice de l'article L. 211-15, les propriétaires ou détenteurs de chiens de la première catégorie mentionnée à l'article L. 211-12 du code rural doivent soumettre l'animal à l'évaluation comportementale prévue à l'article L. 211-14-1 du code rural.
« Les résultats de cette évaluation sont communiqués au maire de la commune du lieu de résidence du propriétaire ou du détenteur.
« Le maire peut, au vu des résultats de l'évaluation comportementale, soit délivrer le récépissé prévu à l'article L. 211-14 du code rural si l'ensemble des autres conditions prévues à cet article sont remplies, soit placer l'animal dans un lieu de dépôt adapté à l'accueil et à la garde de celui-ci, à la charge du propriétaire. Dans ce cas, l'euthanasie de l'animal, à la charge du propriétaire, peut intervenir sans délai. »
La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. J'ai déjà eu l'occasion d'exposer l'objet de cet amendement lors de mon intervention dans la discussion générale. Il résulte de la décision que nous venons de prendre et permet de trouver une solution intermédiaire, en soumettant l'animal à une étude comportementale préalable. En fonction des résultats de cette dernière, le maire décidera soit de délivrer un récépissé, soit de placer l'animal dans un lieu de dépôt avant de le faire euthanasier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il s'agit d'un amendement de compromis qui me paraît aller tout à fait dans le bon sens. La commission émet donc un avis très favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par M. Courtois, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 22 est présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 211-17 du code rural, il est inséré un article L. 211-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 211-17-1. - Les personnels des entreprises exerçant les activités mentionnées à l'article 1er de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité ainsi que les personnels mentionnés à l'article 11 de la même loi qui, sans être tenus de détenir le certificat de capacité prévu à l'article L. 211-17, utilisent des chiens dans le cadre d'une activité de surveillance ou de gardiennage doivent suivre la formation et obtenir l'attestation d'aptitude mentionnées à l'article L. 211-13-1.
« Les frais afférents à leur formation sont à la charge de leur employeur. »
II. - Après l'article L. 215-3-1 du même code, Il est inséré un article L. 215-3-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 215-3-1-1. - I. - Est puni de trois mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende le fait d'employer, pour exercer les activités définies au premier alinéa de l'article L. 211-17-1, toute personne non titulaire de l'attestation d'aptitude mentionnée à l'article L. 211-13-1.
« II. - Les personnes physiques coupables de l'infraction définie au I encourent également la peine complémentaire prévue au 11° de l'article 131-6 du code pénal.
« III. - Les personnes morales reconnues pénalement responsables dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal de l'infraction prévue au I encourent les peines suivantes :
« 1° L'amende, dans les conditions prévues à l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer directement ou indirectement une des activités mentionnées au 1° de l'article 1er de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à imposer aux agents de surveillance et de gardiennage utilisant des chiens de suivre la formation prévue pour les maîtres de chiens dangereux ou mordeurs et d'être titulaires de l'attestation d'aptitude.
En effet, les spécialistes que nous avons entendus lors des auditions ont déploré que nombre de chiens de garde devenus dangereux à la suite de leurs conditions de détention provoquent des accidents. On peut citer à cet égard l'exemple des chiens laissés dans un coffre de voiture pendant toute une journée.
Cette formation devrait évidemment être prise en charge par l'employeur, et le fait d'employer un agent de surveillance ou de gardiennage qui ne serait pas titulaire de l'attestation d'aptitude serait désormais constitutif d'un délit.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 22.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Sur le fond, j'approuve tout à fait la création de cette obligation. Ces dispositions seront sans doute revues lorsque nous traiterons des rapports avec les sociétés de gardiennage ou de sécurité.
Je me demande seulement si le code rural est bien le meilleur support législatif pour aborder cette question. Quoi qu'il en soit, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Je voudrais saisir l'occasion de l'examen de ces deux amendements pour revenir sur quelques points importants déjà abordés par plusieurs intervenants lors de la discussion générale.
Le dramatique accident survenu à Bobigny a mis en lumière les pratiques d'agents de sécurité qui utilisent un chien dans le cadre de leur activité et rentrent ensuite à leur domicile avec l'animal. Les amendements présentés par les deux rapporteurs tendent à imposer une formation à ces agents de sécurité. Je l'ai dit et je le répète, je souscris à cette proposition.
Cela dit, rien n'est prévu par le projet de loi pour améliorer les conditions de garde de ces chiens en dehors des heures de travail. Je sais bien, madame la ministre, que les propriétaires de chiens devraient adopter une attitude responsable, mais force est de constater que ce n'est malheureusement pas toujours le cas, d'où le dépôt de ce projet de loi.
Récemment, un reportage à la télévision montrait un squat, lieu insalubre où des agents de sécurité s'entassaient avec leurs chiens et leur famille, dont des enfants en très bas âge. Les conditions de détention des chiens étaient vraiment catastrophiques, puisque ces derniers étaient gardés dans des caisses ; je vous épargne les détails concernant l'hygiène et la sécurité !
Je tiens à le souligner parce que c'est assez rare, je souscris entièrement aux propos de M. Braye sur les conditions de détention des chiens et les conséquences qui peuvent en résulter.
Le fait est que le recours à des agents de surveillance accompagnés de chiens a tendance à se développer. Auparavant, les entreprises disposaient souvent de leur propre personnel de surveillance ; aujourd'hui, elles sous-traitent généralement cette activité, faisant de plus en plus appel à des sociétés de surveillance extérieures qu'elles mettent en concurrence afin de réduire leurs coûts. Elles n'ont aucun droit de regard sur les conditions de travail de ces personnels, qu'il s'agisse des horaires ou des salaires.
Il s'avère que ces agents de sécurité, en raison de la pénurie de logements, du coût des loyers et, oserai-je ajouter, de leur faible salaire, ont tendance à habiter dans certaines villes plutôt que dans d'autres, ce qui peut poser un problème de concentration de molosses non loin de familles et d'enfants. Tout le monde s'accordera pour dire qu'une telle promiscuité n'est pas souhaitable.
Permettez-moi de poser une question : pourquoi les sociétés de surveillance ne disposent-elles pas toutes d'un chenil pour assurer la garde des chiens dans des conditions satisfaisantes ? Cela permettrait de mieux contrôler l'utilisation et l'entretien de ces chiens, et éviterait aux agents de sécurité de rentrer chez eux avec leur animal, en empruntant d'ailleurs souvent les transports en commun.
M. le président. Je salue cette convergence exceptionnelle. (Sourires.)
Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 et 22.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
L'amendement n° 23 rectifié bis, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 211-18 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes exerçant les activités mentionnées au premier alinéa du IV de l'article L. 214-6 ne sont pas tenues d'être titulaires de l'attestation d'aptitude mentionnée au I de l'article L. 211-13-1. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. L'obligation de formation imposée aux détenteurs de chiens de première et de deuxième catégorie par le projet de loi est rédigée en termes très généraux et pourrait dès lors être comprise comme s'imposant non seulement aux particuliers détenteurs de chiens mais aussi à tous les professionnels ou bénévoles pouvant, à un titre ou à un autre, assurer la garde de ces animaux.
Nous avions d'abord pensé aux gestionnaires de fourrières et de refuges, mais bien d'autres activités sont concernées : l'élevage, bien sûr, la vente, le dressage, l'éducation ou la garde d'animaux de compagnie. Ces professionnels assument une responsabilité particulière parce qu'ils fournissent ou gardent les chiens, et exercent une action directe sur l'animal.
Je rappelle que les personnes exerçant ces activités sont tenues d'être titulaires d'un certificat de capacité délivré sur titre ou sur dossier. Le ministère de l'agriculture et de la pêche souhaite d'ailleurs compléter et renforcer la formation des titulaires de ce certificat, en organisant en particulier des formations continues, ce qui nous semble très souhaitable.
Il nous paraît nécessaire de distinguer clairement la formation nécessairement poussée et la certification des professionnels de ce qui est exigé des particuliers pour l'obtention d'une attestation d'aptitude à détenir un ou deux chiens.
Nous souhaitons donc insister sur cette distinction et préciser que les professionnels ne seront pas tenus d'être titulaires de l'attestation d'aptitude. S'il apparaissait que leur formation est insuffisante, il conviendrait bien évidemment de prendre les mesures nécessaires pour la compléter. Mais ces mesures devraient être prises dans le cadre du certificat de capacité et en fonction de la nature et des exigences de l'activité exercée.
La qualification requise d'un vendeur ou d'un éleveur de chiens ne peut être exigée d'un simple gardien, et la formation doit être déterminée en fonction de l'activité exercée : c'est d'autant plus important que l'existence d'êtres vivants est en jeu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Article 6
1° Au I de l'article L. 214-8 du code rural, il est ajouté, après le 2°, un 3° ainsi rédigé :
« 3° Dans le cas des chiens, d'un certificat vétérinaire attestant de la régularité de l'identification de l'animal, dressant un bilan sanitaire et comportant un ensemble de recommandations touchant aux modalités de sa garde dans les espaces publics et privés ainsi qu'aux règles de sécurité applicables à sa détention, compte tenu des caractéristiques de l'animal. » ;
2° Au IV du même article, les mots : « d'un chien ou » sont supprimés ;
3° Il est ajouté, au IV du même article, un alinéa ainsi rédigé :
« Toute cession à titre gratuit ou onéreux d'un chien, faite par une personne autre que celles pratiquant les activités mentionnées au IV de l'article L. 214-6, est subordonnée à la délivrance d'un certificat vétérinaire attestant de la régularité de l'identification de l'animal, dressant un bilan sanitaire et comportant un ensemble de recommandations touchant aux modalités de sa garde dans les espaces publics et privés ainsi qu'aux règles de sécurité applicables à sa détention, compte tenu des caractéristiques de l'animal. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article L. 214-8 du code rural est ainsi modifié :
1° Après le troisième alinéa (2°) du I, il est inséré un 3° ainsi rédigé :
« 3° Pour les ventes de chiens, d'un certificat vétérinaire dans des conditions définies par décret. » ;
2° Au IV, les mots : « d'un chien ou » sont supprimés ;
3° Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute cession à titre gratuit ou onéreux d'un chien, faite par une personne autre que celles pratiquant les activités mentionnées au IV de l'article L. 214-6, est subordonnée à la délivrance du certificat mentionné au 3° du I du présent article »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'article 6 prévoit que, lors de la vente d'un chien par un professionnel ou de la cession à titre gratuit ou onéreux d'un chien par un particulier, un certificat vétérinaire doit attester de la régularité de l'identification de l'animal, dresser un bilan et préciser certaines recommandations, notamment en matière de sécurité.
Or, les recommandations que le vétérinaire doit effectuer pour conseiller le propriétaire sur les bonnes pratiques de garde et de détention d'un chien ne relèvent pas de la loi.
Cet amendement tend donc à supprimer un certain nombre de dispositions de l'article 6.
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après les mots :
et comportant
rédiger comme suit la fin du texte proposé par le 1° de cet article pour le 3° du I de l'article L. 214-8 du code rural :
des recommandations relatives aux modalités de sa garde.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Cet amendement est manifestement très proche de l'amendement n° 7 rectifié de la commission des lois. Je le retire donc au profit de ce dernier.
M. le président. L'amendement n° 24 est retiré.
L'amendement n° 53 rectifié, présenté par MM. Madec, Muller et Peyronnet, Mme Schillinger et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Au II du même article, les mots : « les chiens et » sont supprimés ;
...° Il est ajouté au II du même article, un alinéa ainsi rédigé :
« Seuls les chiens âgés de plus de 10 semaines et qui n'ont pas été séparés précocement de leur mère peuvent faire l'objet d'une cession à titre onéreux. »
La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Cet amendement tend à prévenir autant que possible la répétition de drames tels que ceux qui sont survenus encore récemment, en encadrant plus strictement les conditions d'élevage et, surtout, de placement des chiens.
Le déplacement d'un chiot âgé de huit semaines, période sensible de sa croissance, est susceptible de porter atteinte au développement de la bonne sociabilité de l'animal. En effet, pendant cette période, le chiot adopte des comportements de repli, ses activités exploratoires sont réduites. À cet âge, la soustraction du chiot à son environnement habituel peut créer des phobies perturbatrices du développement de sa sociabilité. Ces phobies risquent d'évoluer ultérieurement en agressivité, voire en agressions, les milieux changeants étant perçus par l'animal comme dangereux. Le maintien d'un chiot dans son environnement jusqu'à la dixième semaine nous semble donc une condition préalable avant d'envisager toute cession.
Mais il ne s'agit pas d'une condition suffisante, notamment si la qualité d'élevage ne permet pas de maintenir une sociabilité constante. En effet, l'étape de socialisation du chiot est déterminante pour l'équilibre futur de l'animal. Séparer précocement des chiots de leur mère, très souvent dès la cinquième semaine, interdit à celle-ci de pratiquer les apprentissages sociaux. Or, les carences dans les autocontrôles, comme celui de la morsure, déterminent l'animal potentiellement dangereux ou pour le moins très instable. C'est en respectant les étapes de l'évolution du comportement canin que nous pourrons conduire des politiques efficaces de prévention.
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après les mots :
subordonnée à la délivrance
rédiger comme suit la fin du texte proposé par le 3° de cet article pour compléter le IV de l'article L. 214-8 du code rural :
du certificat vétérinaire mentionné au 3° du I du présent article. Ce certificat est communiqué au cessionnaire.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 25 est retiré.
L'amendement n° 31, présenté par M. Barraux, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
... °Le IV du même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les structures juridictionnelles judiciaires ou administratives constituées exclusivement de magistrats professionnels seront seules compétentes pour les litiges notamment vétérinaires impliquant des chiens dangereux. »
La parole est à M. Bernard Barraux.
M. Bernard Barraux. La détermination de la dangerosité d'un chien donnera certainement lieu à des litiges fréquents et importants. Les vétérinaires ne peuvent pas être juges et parties, et il serait à mon avis plus sage de confier le règlement de ce style de litige à des magistrats professionnels.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 53 rectifié tend à interdire la vente de chiots âgés de moins de dix semaines « et qui n'ont pas été séparés précocement de leur mère ». Malheureusement, on ne voit pas comment cette seconde condition pourra être vérifiée. Les modalités d'application de cette disposition semblent très problématiques, et c'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
L'amendement n° 31 vise à éviter que les litiges impliquant des chiens dangereux ne puissent être résolus par les seules instances de l'ordre des vétérinaires. Je tiens à rassurer son auteur : comme il s'agira de délits, c'est la justice pénale qui sera amenée à se prononcer. La commission invite donc M. Barraux à retirer son amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.