M. le président. L'amendement n° 28, présenté par MM. Sueur et Badinter, Mme M. André, MM. Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le garde des sceaux présente chaque année au Parlement, un rapport sur la situation dans les établissements pénitentiaires. Il rend compte du nombre des détenus au regard des places disponibles, de l'état des locaux, des conditions d'encellulement et de la situation sanitaire des détenus. Il rend compte également des mesures prises pour que les peines remplissent leurs missions : favoriser, dans le respect de la société et des droits des victimes, l'insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Après les arguments développés par M. Louis Mermaz voilà un instant et par M. Robert Badinter ce matin, cet amendement se justifie par son texte même.
Nos collègues ont fort bien exprimé - vous l'avez vous-même souligné, madame le garde des sceaux - combien les conditions de détention, d'incarcération, souvent déplorables, contribuent en fait à la récidive.
Si nous voulons lutter efficacement contre la récidive, il faut en effet s'assurer que la détention se fasse dans d'autres conditions et surtout que les moyens existent afin que le séjour en détention soit l'occasion de préparer la sortie de prison. Si l'on ne se soucie pas de réinsertion sociale et professionnelle, on favorise la récidive.
Par cet amendement d'appel, nous vous proposons, madame le garde des sceaux, de présenter chaque année au Parlement un rapport sur la situation dans les établissements pénitentiaires rendant compte des évolutions quant à un certain nombre de données précises, tout particulièrement « des mesures prises pour que les peines remplissent leurs missions », à savoir « favoriser, dans le respect de la société et des droits des victimes, l'insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive »..
Nous aurions souhaité, comme nous vous l'avons dit en commission, que les choses soient prises dans le bon ordre : d'abord un texte sur la situation pénitentiaire, puis sur les moyens de la justice, avant d'éventuelles mesures spécifiques.
À défaut, nous espérons pour le moins que vous souscrirez à cet amendement.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. M. Sueur propose que le garde des sceaux présente chaque année au Parlement un rapport sur la situation dans les établissements pénitentiaires. Sur le fond, c'est une bonne idée, mais qui trouvera davantage sa place dans le cadre de la loi pénitentiaire annoncée pour l'automne par Mme le garde des sceaux.
En attendant ce prochain débat, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Je suis d'accord avec vous, monsieur le sénateur, sur la nécessité de rendre compte de l'état des prisons. Ce sera la mission du futur contrôleur indépendant, qui contrôlera les lieux privatifs de liberté et rendra compte publiquement de ses observations. Nous pourrons donc examiner cet amendement dans le cadre du futur projet de loi pénitentiaire.
Je rappelle au passage que, contrairement aux gouvernements de gauche, le dernier gouvernement a consenti un effort sans précédent en matière de création de places. Depuis 2002, la construction de 13 200 places nouvelles a ainsi été lancée.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il ne s'agit pas de cela !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Près de 420 places seront ainsi créées dans les établissements pour mineurs et 500 places dans les centres éducatifs fermés, dont nous savons qu'ils favorisent la baisse de la récidive.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 28.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je voterai cet amendement qui, selon moi, à toute sa place dans ce projet de loi. On nous demande de légiférer en urgence sur la sanction de la récidive, mesure qui aura pour première conséquence - peut-être y en aura-t-il d'autres ? - d'augmenter le nombre de personnes incarcérées.
Madame le garde des sceaux, vous nous avez annoncé une grande loi pénitentiaire. Tant de ministres de la justice ont déjà évoqué un tel texte, depuis la publication, en 2000, des premiers rapports d'enquête parlementaires sur les prisons, que nous sommes désormais prudents !
Un sénateur socialiste. Dubitatifs !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous sommes échaudés.
Ces rapports de 2000 décrivaient la situation pénitentiaire dans ses aspects les plus divers et préconisaient diverses mesures, et pas uniquement une augmentation du nombre de places en prison, laquelle correspond à la progression du nombre des personnes incarcérées.
Qu'en est-il des résultats de la hausse permanente du nombre de personnes incarcérées, des conditions de détention, de la question oubliée de la réinsertion ?
Ce qui est urgent, c'est que nous puissions disposer d'une information régulière permettant de rendre compte de la situation dans les établissements pénitentiaires. Les dernières enquêtes sur les prisons datent de 2000 : sept ans ont passé !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. On s'est amélioré depuis !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous avons connu, depuis lors, plusieurs gardes des sceaux, plusieurs gouvernements, plusieurs premiers ministres, et même plusieurs présidents de la République ! Or les parlementaires ne disposent toujours pas d'un état précis des facteurs d'amélioration des conditions de vie dans les lieux de privation de liberté, pas plus que d'informations sur la réinsertion, facteur important justifiant une augmentation du nombre des incarcérations. Il est sous-entendu que le rôle de la prison est de sanctionner mais aussi de permettre, à terme, la réduction du nombre de crimes et de délits.
Il est donc important que cet amendement soit adopté afin que les parlementaires soient informés de ce travail.
M. le président. La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote.
M. Louis Mermaz. Je m'étonne, monsieur le rapporteur, que cet amendement puisse poser problème. En évoquant la nécessité de « favoriser, dans le respect de la société et des droits des victimes, l'insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive », il est pourtant au coeur du sujet. Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras !
En quoi le fait d'insérer cet article additionnel peut-il gêner la suite des opérations ? Nous attendons avec impatience le projet de loi pénitentiaire. Le texte présenté sur ce sujet par Mme Lebranchu n'avait malheureusement pas pu aboutir.
Nous attendons également la création du contrôleur général des prisons.
J'avais interpellé votre prédécesseur, M. Pascal Clément, sur l'état de la prison Saint-Paul-Saint-Joseph de Lyon. Lors d'une visite de cet établissement, nous avions croisé, avec Mme la sénatrice Christiane Demontès, des cohortes de rats. Ce n'est pas Victor Hugo, c'est le Moyen Âge ! Une horreur !
J'avais donc demandé par courrier à M. Clément de se rendre dans cette prison. Il m'avait répondu lors du débat budgétaire, à la tribune du Sénat : « C'est tellement horrible que je n'ose pas y aller ! »
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Qu'il y aille un peu, pour voir !
M. Louis Mermaz. Il faut regarder les choses en face, et le vote de cet amendement serait une bonne chose.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Nous souhaitons ardemment avoir des informations sur la récidive.
L'OND, l'Observatoire national de la délinquance, dont je suis membre, devrait normalement disposer de telles informations, puisque tel était le voeu de M. Sarkozy. Or quelle n'est pas ma surprise de constater qu'il n'en a aucune !
Nombre d'autres informations, assez mineures, sont transmises à cet observatoire, au sein duquel siègent seulement deux sénateurs et deux députés, aux côtés des plus hautes autorités du ministère de l'intérieur, d'un représentant du maire, etc.
Pour travailler avec impartialité - qualité qui n'a pas caractérisé son président pendant la campagne présidentielle -, cet organisme doit disposer de rapports d'information. Que ces derniers soient transmis directement ou par l'intermédiaire des parlementaires siégeant au sein de l'OND, peu importe.
Constatant cette carence d'informations, vous m'avez apporté personnellement, madame le garde des sceaux, des précisions concernant l'évolution de la récidive, et je vous en remercie.
Si tous les parlementaires pouvaient disposer de ces indications, ils pourraient prendre connaissance, s'agissant des crimes et des délits, non seulement des pourcentages mais aussi du nombre de cas. Or, si les pourcentages peuvent impressionner, le nombre de cas est infime : si l'on cite des pourcentages pour 250 à 300 cas, le chiffre des délits paraît important ; sur 500 000 délits, en revanche, c'est finalement peu de chose. En citant des chiffres tronqués, chacun peut donc avoir raison !
Par ailleurs, s'agissant des crimes, la récidive n'a concerné que deux mineurs en quatre ans.
Il est absolument nécessaire que le Parlement dispose de ces informations, comme l'avait promis le Président de la République. Votre premier geste dans cet hémicycle sera-t-il, madame le garde des sceaux, de ne pas répondre à notre attente ?
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Chacun convient ici que les conditions pénitentiaires doivent être améliorées. L'amendement n° 28 de M. Sueur devra cependant, comme l'a dit notre éminent rapporteur, être examiné dans le cadre de la loi pénitentiaire qui sera présentée avant la fin de l'année.
Je trouve cette idée de rapport excellente et je souhaite, pour ma part, qu'il concerne aussi les décennies précédentes - à partir des années quatre-vingt -, afin que l'on sache quelle fut l'action des uns et des autres.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les commissions n'existent que depuis 2000 !
M. Dominique Braye. Je souhaite également, rendre hommage au Gouvernement qui a fait, comme l'a rappelé Mme la ministre, un effort sans précédent.
La communauté d'agglomération de Mantes-en-Yvelines, que je préside, ouvre actuellement un établissement pour mineurs au sein duquel les plus jeunes seront séparés des adultes. C'est en effet là que réside le problème.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Séparer les majeurs des mineurs est une obligation !
M. Dominique Braye. Un rapport d'information pourrait servir d'aiguillon au Gouvernement et lui permettre de rester vigilant sur ce problème urgent de la récidive.
Considérant cette idée d'un très bon oeil, je ne voterai pourtant pas cet amendement qui, pour le sérieux de nos débats, devra être examiné en même temps que le texte sur l'administration pénitentiaire.
M. Jacques Mahéas. M. Sarkozy ne va pas être content !
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je soutiens également cet amendement.
Si une légère augmentation du nombre de places de prison a bien eu lieu, une nette progression du nombre de prisonniers - de l'ordre de 20 % - s'est également produite.
Jusqu'où veut-on aller ? Si cet effort sans précédent consiste à produire plus de prisonniers que de places de prison, faut-il s'en féliciter ? Le nombre de pensionnaires des prisons est également sans précédent !
M. Dominique Braye. Laissons les délinquants en liberté !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er
Après l'article 132-18 du code pénal, il est inséré un article 132-18-1 ainsi rédigé :
« Art. 132-18-1. - Pour les crimes commis en état de récidive légale, la peine d'emprisonnement, de réclusion ou de détention ne peut être inférieure aux seuils suivants :
« 1° Cinq ans, si le crime est puni de quinze ans de réclusion ou de détention ;
« 2° Sept ans, si le crime est puni de vingt ans de réclusion ou de détention ;
« 3° Dix ans, si le crime est puni de trente ans de réclusion ou de détention ;
« 4° Quinze ans, si le crime est puni de la réclusion ou de la détention à perpétuité.
« Toutefois, la juridiction peut prononcer une peine inférieure à ces seuils en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
« Lorsqu'un crime est commis une nouvelle fois en état de récidive légale, la juridiction ne peut prononcer une peine inférieure à ces seuils que si l'accusé présente des garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion. »
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, sur l'article.
M. Charles Gautier. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, les professionnels concernés par un projet de loi sont sans doute les mieux placés pour nous éclairer sur ses conséquences futures. Or, sur ce sujet, ils sont unanimes.
Lors d'une conférence sur les peines planchers, les premiers présidents de cours d'appel ont rappelé « l'attachement des juges à l'individualisation des peines, principe confirmé par l'expérience et partagé par la plupart des pays démocratiques » et ont indiqué que « toute limitation du pouvoir d'appréciation du juge crée un risque d'inadéquation de la décision judiciaire sans pour autant garantir une meilleure efficacité de la politique pénale ».
Magistrats et avocats s'entendent pour dire que ce texte est au mieux inutile, au pire dangereux.
Inutile ? L'article 1er du projet de loi que nous examinons instaure des peines dites « planchers ». Ce durcissement des peines, présenté par le Gouvernement comme une mesure dissuasive, nous paraît tout à fait illusoire.
Une étude réalisée par le Sénat en septembre 2006 établit une comparaison entre les législations de divers pays ayant opté pour ce système. Aucun de ces huit États n'a pu démontrer l'efficacité des peines minimales. Pis, l'Australie a même conclu, après six ans d'exercice, à l'inefficacité du système et a décidé d'y renoncer.
En outre, cette étude rappelle que les peines minimales ont été abandonnées lors de la rédaction du nouveau code pénal.
L'effet dissuasif de la sanction pénale est compliqué à évaluer, mais personne n'a aujourd'hui réussi à établir un véritable parallèle entre durcissement de la peine encourue et baisse de la délinquance. C'est d'ailleurs un argument qui nous a permis, en son temps, d'obtenir l'abolition de la peine capitale.
Enfin, j'aimerais rappeler qu'en matière criminelle le taux de récidive est de 2,8 %, soit 84 personnes ! A-t-on besoin de réformer les principes fondamentaux du droit pénal pour un nombre aussi faible de délinquants concernés ?
M. Jean-Pierre Sueur. Tout à fait !
M. Charles Gautier. De plus, cet article semble constituer la plus belle mesure d'affichage du projet de loi puisque, dans les faits, les peines prononcées par les cours d'assises françaises en cas de récidive de majeurs sont très proches de ce qu'il prévoit. Par conséquent, l'effet de ce texte en matière criminelle des majeurs sera proche de zéro.
Par ailleurs, cet article est dangereux en ce sens qu'il constitue une mesure de défiance à l'égard des magistrats, considérés comme trop laxistes, comme systématiquement du côté des délinquants et, surtout, des récidivistes. Or toutes les études montrent que, au contraire, l'évolution actuelle tend vers un alourdissement des peines prononcées.
Pour nous, cet article est donc trompeur et inutile. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l'article.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la ministre, mes chers collègues, cette affaire pose une question vraiment fondamentale, que vient d'évoquer mon collègue Charles Gautier : peut-on démontrer l'existence d'un lien entre la durée de l'emprisonnement et la récidive ou la non-récidive ?
Il se trouve que la commission des lois a auditionné longuement M. Tournier, directeur de recherches au CNRS. Ce dernier nous a présenté ses études, lesquelles montrent qu'« il n'y a pas de relation évidente entre quantum de la peine prononcée et taux de recondamnation ».
L'un de ses articles datant du 30 mai 2007 montre que « les taux de recondamnation sont plus faibles pour les libérés conditionnels que pour les sortants fin de peine : 26 % contre 29 % pour les homicides, 24 % contre 31 % pour les agressions sexuelles et 50 % contre 59 % pour les vols de nature criminelle. »
Une autre étude, dirigée par le même chercheur, réalisée avec l'université de Lille II et la direction de l'administration pénitentiaire, a pris en compte un très grand nombre de situations. Portant sur 5 234 dossiers répartis sur 32 catégories, cette étude, dont l'ampleur me paraît la plus considérable sur ce sujet, vient à conclure : « À une exception près, les taux de nouvelle condamnation ou les taux plus restrictifs de nouvelle condamnation à l'emprisonnement ferme sont plus élevés après la prison qu'après le prononcé d'une peine alternative. »
Madame la ministre, nous avons également pris connaissance des chiffres de votre ministère. Ils ne contredisent pas ceux des chercheurs du CNRS.
Cela m'amène à conclure qu'il n'y a pas de corrélation entre le nombre d'années passées en prison et la récidive ou la non-récidive. En revanche, d'une part, il y a moins de récidive quand il y a libération conditionnelle ; d'autre part, il y a moins de récidive quand il y a mesure alternative à l'emprisonnement.
Madame la ministre, je vous pose une question très précise à laquelle j'espère que vous allez me répondre : êtes-vous d'accord avec ces constats ou contestez-vous ces études scientifiques ?
Si vous êtes d'accord avec ces constats, comment pouvez-vous instaurer ces peines planchers et considérer que celles-ci feront baisser la récidive?
Mais ces études montrent aussi tout l'intérêt qu'il y aurait à travailler sur la libération conditionnelle, sur des alternatives à l'emprisonnement, sur la condition pénitentiaire pour favoriser la réinsertion sociale et professionnelle, tout l'intérêt qu'il y aurait à accompagner ceux qui sortent de prison afin d'éviter une sortie « sèche ».
Il n'y a pas, dans cet hémicycle, certains qui seraient pour ou contre la lutte contre la récidive, certains qui seraient pour ou contre le fait de prendre en considération les victimes. Tous, nous les prenons en compte, mais nous vous demandons, compte tenu des faits que nous citons, comment vous pouvez justifier les propositions que vous nous faites et comment vous pouvez assurer qu'elles sont fondées en termes d'efficacité.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le postulat de départ est que la justice ne serait pas assez sévère à l'encontre des récidivistes. Par conséquent, des réponses « fermes et hiérarchisées » doivent leur être données.
Des peines planchers apporteraient donc la clarté manquant aujourd'hui à la politique pénale - vous l'avez dit ce matin, madame le garde des sceaux - et le projet de loi adresserait ainsi, selon les propos de M. le rapporteur, un « indicateur » à ceux qui sont tentés d'enfreindre la loi, comme à ceux qui sont chargés de veiller à son application, autrement dit délinquants et magistrats.
Par conséquent, il faut bien constater que le projet de loi entend faire de l'emprisonnement la peine de principe pour les récidivistes.
On ne peut pas prendre ces arguments à la légère parce notre conception de la justice est en cause. Je m'en tiens au constat, au fait que les récidivistes sont punis plus sévèrement que les primo délinquants - cela, tout le monde le sait - et se voient déjà condamnés à des peines d'emprisonnement, ce que nul n'ignore non plus. Il suffit de regarder les chiffres : lorsque le juge relève des cas de récidive, il prononce une peine plus sévère - d'ailleurs, nul ne le conteste -, plus sévère même que les peines planchers que l'on nous propose, en tout cas pour les crimes et délits graves. À cet égard, je vous renvoie au quantum moyen des peines d'emprisonnement prononcées.
Historiquement, dans la période contemporaine, et sans remonter jusqu'au XIXème siècle, la durée moyenne des peines ne cesse d'augmenter, ce qui pose quelques problèmes !
L'élément fondateur tant du projet de loi que de cet article, c'est le sous-entendu selon lequel les juges prononcent des peines trop légères. Non seulement c'est faux, mais en plus, au fil du temps, les peines sont de plus en plus lourdes.
En outre, s'il s'agit de faire les choses correctement, peut-on dire que ces peines de plus en plus lourdes font barrage à la récidive ? La réponse est négative bien que la matière soit sujette à caution. En tout cas, la récidive serait en augmentation croissante, ce qui est évidemment ennuyeux pour qui voudrait adhérer à votre projet.
En revanche, ce que nous savons, c'est que les aménagements de peine sont les véritables facteurs de prévention de la récidive. D'une manière générale, le taux de recondamnation paraît plus faible pour les condamnés ayant bénéficié d'une libération conditionnelle que pour ceux qui ont profité d'une sortie sèche.
Je n'ai pas inventé les arguments que je viens de citer : des magistrats, des professionnels, des travailleurs sociaux et des chercheurs les ont avancés. Notre rapporteur lui-même les a repris.
Pourtant, que constate-t-on dans la période contemporaine ? Qu'il y a de moins en moins de libérations conditionnelles et que les moyens du suivi socio-judiciaire, des peines alternatives, de l'éducation, sont en général en baisse.
Pour toutes ces raisons, il paraît normal de s'interroger sur l'efficacité éventuelle de cet article 1er.
M. le président. Sur l'article 1er, je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements identiques.
L'amendement n° 29 est présenté par M. Badinter, Mme M. André, MM. Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 53 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Robert Badinter, pour défendre l'amendement n° 29.
M. Robert Badinter. Pourquoi proposer la suppression de cet article ? Pour deux raisons.
Tout d'abord, cet article est totalement inutile. Visant la récidive criminelle, il se borne en effet à indiquer que l'on prononcera des peines dont le minimum est fixé par la loi.
Grâce aux travaux conduits par la commission des lois et aux renseignements que nous avons obtenus de la direction des affaires criminelles, il ressort d'une façon irréfutable que les cours d'assises en France prononcent des verdicts de culpabilité et, ensuite, des peines très supérieures aux peines planchers figurant dans le texte. Par conséquent, la disposition prévue ne servira à rien.
M. Dominique Braye. C'est le verdict du peuple !
M. Robert Badinter. Par ailleurs, une autre raison de supprimer cet article tient à l'« efficacité » des dispositions proposées.
Après les travaux d'une commission parlementaire présidée par M. Clément, ce dernier, devenu garde des sceaux, a élaboré un projet de loi entier consacré à la lutte contre la récidive. C'était en décembre 2005 - hier donc ! Or, depuis, les choses n'ont pas changé ! On peut donc s'étonner de ce que la même majorité - un peu réduite à l'Assemblée nationale, mais peu importe - considère les dispositions qu'elle a adoptées dix-huit mois plus tôt comme très insuffisantes. Voilà un exemple d'une rare autocritique d'une majorité ! Mais je préfère laisser cet aspect de côté !
Qu'une commission d'analyse et de suivi de la récidive ait été créée, on ne pouvait que s'en féliciter. En effet, il est bon de savoir comment les choses évoluent. Nous nous plaignons suffisamment et à juste titre de ne jamais disposer du bilan des lois que nous votons, pas plus que d'études d'impact.
Cette commission, dont les membres ont été choisis par M. Clément, a rendu le 8 juin 2007 un avis sur le projet dont nous débattons, avis dont je regrette que la commission des lois n'ait, semble-t-il, pas eu connaissance. Je tiens à en lire les premiers paragraphes tant ils sont éclairants.
« La commission observe que ce projet vise à favoriser l'emprisonnement comme réponse à la récidive simple ou multiple et qu'il aura nécessairement comme conséquence l'augmentation de la population carcérale des majeurs et des mineurs. » On ne saurait être plus clair !
« À cet égard, elle souhaite rappeler que, en France, les peines minimales ont existé et ont été abandonnées sous la pression de la pratique par étapes successives entre 1832 et 1994. »
Cette commission de spécialistes objectifs ajoute ceci : « À l'étranger, elles ont trouvé un nouvel essor aux États-Unis et au Canada à compter de 1978 avant de décliner également ces dernières années, étant observé que le taux d'incarcération aux États-Unis est aujourd'hui sept fois supérieur à celui de la France. »
Si nous suivions la voie ouverte par les Américains, nous devrions avoir dans les prisons françaises environ 420 000 détenus, prélevés sur une population mâle de vingt à quarante ans. Je laisse à penser ce que serait alors la désertification de certains quartiers...
Mais le plus important, c'est la suite de l'avis : « Depuis 1978, des études scientifiques ont été publiées dans les revues les plus réputées aux États-Unis et au Canada pour mesurer l'efficacité de ces conséquences sur la récidive et notamment celle des mineurs. Il n'existe pas de travaux qui aient démontré l'effet attendu de diminution de la récidive. Plusieurs études enregistrent même une augmentation de la récidive, en particulier celle des mineurs ayant commis des faits de violence grave.
« Le résultat de ces recherches, les pratiques des magistrats américains et le poids budgétaire des incarcérations expliquent en partie l'inversion de tendance dans le sens d'une moindre automaticité de la réponse carcérale. »
Enfin, « La commission ne dispose pas d'informations équivalentes sur l'évaluation de la pertinence de ces systèmes dans les pays européens qui ont adapté les mêmes principes. »
Quelle éclatante illustration ! On a voulu des peines planchers aux États-Unis et au Canada, où elles ont été largement pratiquées depuis onze ans, et le constat est celui d'un échec : une augmentation de la population carcérale avec la conséquence qu'elle emporte nécessairement, les prisons étant ce qu'elles sont, à savoir les foyers de la récidive et du crime : une récidive accrue, particulièrement des mineurs.
On ne saurait dire plus objectivement que l'inspiration de ce texte, à mes yeux directement emprunté aux États-Unis, va à l'inverse de tout ce que nous souhaitons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 53.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. J'ai donné les raisons qui motivent cet amendement de suppression en m'exprimant sur l'article et je ne voudrais pas lasser nos collègues de la majorité (Mais non ! sur les travées de l'UMP)...Mais je suis sûre qu'ils sont eux aussi sensibles au grave problème auquel, en tant que législateurs, nous sommes confrontés et sur lequel je veux tout de même m'arrêter un instant.
D'une part, l'impact éventuel du projet de loi n'est pas évident du tout : la seule chose certaine est que nous allons envoyer plus de gens en prison ! L'impact - inconnu - sur le coût est peut-être secondaire, mais l'impact positif sur la récidive n'est absolument pas prouvé. Il semble même que l'on puisse plutôt s'attendre à un impact négatif !
D'autre part, l'évaluation de la loi de 2005 est impossible.
Comme vient de le dire M. Badinter, les travaux réalisés par la commission d'analyse et de suivi de la récidive ne sont pas pris en compte par le Gouvernement. Le législateur pouvait espérer, à l'annonce de la création de cette commission, être éclairé par les travaux de celle-ci : il n'en est rien !
Dans ces conditions, il est vraiment inopportun de légiférer en urgence en ce mois de juillet 2007 sans être en mesure d'apprécier ce qui est efficace en matière de prévention de la récidive, aspect tout de même le plus important pour la société.
Les facteurs dont on sait qu'ils jouent dans le recul de la récidive, par exemple la libération conditionnelle ou le suivi socio-judiciaire, ne sont pas pris en compte ou ne font en tout cas pas actuellement l'objet de l'attention du Gouvernement ; ce dernier déclare que l'on s'en occupera « plus tard », étant sous-entendu que, plus tard, nous aurons les moyens de le faire. Mais, dès lors, pourquoi se précipiter pour légiférer en urgence et à nouveau sur la récidive ?
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Badinter, Mme M. André, MM. Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Seules les sanctions pénales prononcées par le tribunal pour enfants ou la cour d'assises des mineurs sont prises en compte pour l'établissement de l'état de récidive des mineurs.
La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. Cet amendement relatif aux sanctions pénales prononcées par le tribunal pour enfants ou par la cour d'assises des mineurs vise à préciser que seules les sanctions pénales, et non pas les mesures éducatives, sont prises en compte par le projet de loi.
Cette précision va de soi, mais, en l'état actuel des choses, il est important qu'elle soit inscrite dans le texte.
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement de repli vise à supprimer un alinéa qui encadre le pouvoir d'individualisation de la peine par un juge.
Le pouvoir d'individualisation de la peine est un principe général du droit pénal qui s'impose même dans le silence de la loi. Il n'a donc pas à être détaillé ou encadré par une disposition législative. En tout état de cause, il est déjà repris par l'article 132-24 du code pénal, et les critères visés par cet article suffisent à établir les conditions d'exercice par le juge de son pouvoir d'appréciation.
Les critères détaillés qui encadrent le pouvoir d'appréciation du juge pour fixer des peines inférieures aux peines minimales prévues dans l'alinéa dont nous demandons la suppression vont au-delà des exigences de l'article 132-24 du code pénal.
Ils sont en outre contraires à l'article VIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires [...].»
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Badinter, Mme M. André, MM. Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans les deux derniers alinéas du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal :
après les mots :
inférieure à ces seuils
insérer (à deux reprises) les mots :
, ou pour les mineurs, une mesure éducative,
La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. Il s'agit d'une nécessaire précision. Je développerai cependant un peu le propos, car nous sommes en présence d'une mesure concernant les mineurs et nous touchons là à l'ordonnance de 1945.
Les articles 2 et 20 de l'ordonnance de 1945 prévoient que, en principe, le juge prononce à l'égard d'un mineur une mesure éducative, la sanction pénale devant demeurer exceptionnelle, selon le choix délibéré de la juridiction, et toujours par une décision motivée.
Ces deux articles s'inscrivent directement dans le cadre de la convention de New York relative aux droits de l'enfant, laquelle rappelle que l'enfant, en raison de son manque de maturité physique et intellectuelle, a besoin d'une protection juridique appropriée.
Par ailleurs, dans une de ses recommandations, le comité des ministres du Conseil de l'Europe souligne que les mineurs sont des « êtres en devenir » - c'est bien là le coeur du problème dont nous sommes saisis aujourd'hui - « et que, par conséquent, toutes les mesures prises à leur égard devraient avoir un caractère éducatif ».
Le projet de loi qui nous est soumis ne modifie pas les articles que je viens de citer. J'en déduis que ses dispositions sur les peines planchers, lorsqu'elles sont appliquées aux mineurs, doivent être lues à la lumière des dispositions de l'ordonnance de 1945. Ce n'est qu'un rappel de principe, mais il est important : cette ordonnance constituant la loi spéciale applicable aux mineurs - chacun connaît l'axiome juridique sur la valeur des dispositions spéciales par rapport à celle des dispositions générales -, toutes ses dispositions spéciales doivent prévaloir sur les dispositions générales du code pénal.
On doit en déduire - et c'est la raison d'être de l'amendement - que le juge doit d'abord s'interroger sur la nécessité de prononcer une sanction pénale ; il ne doit prononcer une peine d'emprisonnement que par exception, et en motivant sa décision.
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après les mots :
des circonstances de l'infraction
rédiger comme suit la fin de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal :
ou de la personnalité de son auteur
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai les amendements nos 13 et 15 en même temps car ils se ressemblent.
Le projet de loi précise que le juge ne peut déroger à l'obligation de prononcer les peines minimales qu'en considération « des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion » présentées par le multirécidiviste.
Ces deux amendements visent à supprimer ces critères, dont la pertinence est mise en cause par au moins cinq notions, pour préserver tant la clarté de la loi que le principe de l'individualisation de la peine.
La première notion est empruntée au code de procédure pénale. Le juge de l'application des peines apprécie les possibilités d'amendement des peines. Rien à voir avec le prononcé d'une condamnation !
Deuxième notion, la marge d'appréciation du juge serait à géométrie variable ! Quelle est en effet l'étendue de ces critères ? Que recouvrent-ils ? Est-il possible d'apprécier des garanties dans le cadre d'une condamnation alors même que les enquêtes de personnalité sont souvent bâclées par manque de temps et de moyens ?
La troisième notion est l'inutilité. Ces dispositions ne présentent en effet aucun intérêt dans la mesure où le juge est libre d'adapter la peine, en vertu du principe de l'individualisation de celle-ci, en fonction des autres critères déjà connus.
La quatrième notion est l'impossibilité à apprécier, au moment de la condamnation, que ces critères sont remplis, puisque cette appréciation suppose un suivi de l'individu, comme celui qu'exerce le juge d'application des peines. Le juge pénal qui prononce la condamnation ne peut raisonnablement pas connaître les garanties d'insertion de l'individu puisqu'il n'en assure pas le suivi !
Enfin, comme je l'ai déjà dit lors de la discussion générale, c'est la notion de justice à deux vitesses qui s'oppose à ces critères. En effet, selon que le prévenu est riche ou pauvre, instruit ou non, les garanties d'insertion et de réinsertion varieront et la peine risque donc de s'appliquer de manière différente.
Je demande par conséquent la suppression de ces « garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion », d'une part, pour que le principe de l'individualisation de la peine continue à être mis en oeuvre par le juge et, d'autre part, au nom du principe de l'égalité de tous devant la justice.
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après les mots :
la juridiction
rédiger comme suit la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal :
peut prononcer une peine inférieure à ces seuils en considération des circonstances de l'infraction ou de la personnalité de son auteur. »
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 30, présenté par M. Badinter, Mme M. André, MM. Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
« inférieure à ces seuils »
rédiger comme suit la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal :
qu'en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties suffisantes d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. Cet amendement rejoint pour l'essentiel celui qu'a déposé la commission des lois. Peut-être cette dernière souhaite-t-elle défendre tout de suite son texte ?
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
« inférieure à ces seuils
rédiger comme suit la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal :
qu'à titre exceptionnel, en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
La parole est à M le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement fait suite à l'audition par la commission de magistrats : ces derniers ont fait part de leurs préoccupations concernant la situation des multirécidivistes dans la mesure où, pour écarter la peine minimale dans les cas de multirécidives, on ne pourrait viser, si le texte présenté par le Gouvernement était retenu, que les seules « garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion ».
Certains magistrats ont appelé notre attention sur le fait que, pour certains crimes ou délits, le fait de ne retenir que les garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion pourrait entraîner un caractère étonnant voir inique des jugements prononcés.
En effet, il semble que les garanties exceptionnelles d'insertion et de réinsertion ne soient pas faciles à appréhender pour les magistrats, et la commission n'a pas réussi, au terme de ses travaux, à déterminer ce que l'on pouvait entendre par les termes « garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion ».
Aussi a-t-il paru souhaitable à la commission, au moment où elle a statué, de prendre en compte deux autres composantes permettant d'écarter la peine minimale tout en motivant, bien sûr, la décision : il s'agit de tenir compte, d'une part, des circonstances de l'infraction et, d'autre part, de la personnalité de l'auteur.
La commission souhaite toutefois que soit établie une différence nette entre les cas de première récidive et les cas de multirécidives. C'est dans cette optique, pour bien marquer cette gradation, qu'elle a proposé l'utilisation en facteur commun des mots « à titre exceptionnel », tout en ayant l'impression que cette gradation était peut-être insuffisante et que le résultat obtenu ne donnerait pas forcément satisfaction aux magistrats qui nous ont interrogés sur ce sujet.
Dès lors, le problème qui se pose, madame le garde des sceaux, est le suivant : premièrement, qu'entend-on par « garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion » et cette terminologie permet-elle de ménager la liberté d'appréciation des juges, même dans les cas de multirécidives ? Deuxièmement, quelle peut être l'appréciation de la Cour de cassation sur les décisions qui seraient prononcées par les juges du fond, autrement dit par les juges de cours d'appel, si l'on applique le texte dans la version telle qu'elle nous est transmise par le Gouvernement ?
Pour parler plus simplement, les juges du fond, c'est-à-dire les juges de la cour d'appel, seront-ils souverains lorsqu'ils prononceront une motivation sur les garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion ?
Je me permets de poser la question, car la jurisprudence de la Cour de cassation dont j'ai pris connaissance ces derniers jours m'incite à penser que celle-ci ne statuera pas sur ces questions et que, dès lors, les juges du fond seront souverains, auquel cas cela changerait évidemment l'appréciation que l'on peut porter sur ce texte et relativiserait considérablement l'amendement que je défends au nom de la commission.
Par conséquent, madame le garde des sceaux, je serais très intéressé, comme sans doute le Sénat tout entier, d'entendre les précisions que vous voudrez bien nous apporter sur ce sujet.
M. le président. L'amendement n° 54, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal, remplacer les mots :
« garanties exceptionnelles »
par les mots :
« gages sérieux »
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je ne défendrai pas cet amendement de repli tel qu'il est rédigé, car j'ai omis de le rectifier. Or les mots : « gages sérieux » ne me paraissent pas appropriés.
En revanche, je voudrais dire que la raison pour laquelle nous souhaitons modifier l'article 1er reste valable, étant donné que les garanties exceptionnelles ne constituent pas une notion juridique.
C'est la raison pour laquelle je me rallie à l'amendement du groupe socialiste qui, à mon avis, correspond mieux à ce que je souhaitais proposer moi-même et qui me paraît préférable à celui de la commission des lois. En effet, les termes « qu'à titre exceptionnel, en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci » semblent se suffire à eux-mêmes. Il est donc inutile de répéter « à titre exceptionnel », cela étant sous-entendu dans la philosophie même de l'article 1er.
En revanche, l'expression « garanties suffisantes » est judicieuse, la moindre des choses étant que le juge puisse apprécier de telles garanties.
Compte tenu de ces observations, je retire l'amendement n° 54.
M. le président. L'amendement n° 54 est retiré.
L'amendement n° 33, présenté par M. Badinter, Mme M. André, MM. Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 132-18-1 du code pénal par une phrase ainsi rédigée :
Toutefois lorsque le crime est commis en état de récidive légale par un mineur, la juridiction ne peut prononcer une peine inférieure à ces seuils qu'en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. Je profiterai de cette intervention pour revenir sur l'amendement n° 30 que je n'ai en définitive pas exposé.
La question qui est ici posée est importante, puisqu'elle concerne le cas du récidiviste qui réitère ou qui récidive - il ne s'agit en effet pas toujours d'un multirécidiviste. Or, dans ce cas, selon le principe de la loi, la peine plancher est applicable et il n'est prévu qu'une dérogation, à savoir « les garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion » ; je souligne que nous sommes ici en matière criminelle.
Je tiens à rappeler que le principe de l'individualisation des peines est un principe fondamental, constitutionnel : on doit juger en considération des circonstances de l'affaire, de la gravité de celle-ci, de la personnalité de celui qui est condamné et, ainsi que cela a été ajouté à juste titre, de la prise en compte des intérêts de la victime.
En l'occurrence, pour ouvrir une fenêtre sur l'automaticité de la peine plancher et assurer le respect a minima de l'exigence constitutionnelle, à savoir l'individualisation de la peine - c'est aussi une condition de bonne justice -, le principe inscrit dans la loi est la prise en compte par une décision motivée des caractères que j'ai évoqués tout à l'heure - gravité, circonstances, personnalité de l'accusé - auxquels sont ajoutées les « garanties de réinsertion ».
Or, dans le texte que j'évoque, les deux premières conditions ont disparu. Ainsi, la personnalité de l'accusé n'importe plus ; c'est absolument contraire à l'individualisation des peines, et on l'évacue donc. Quant aux circonstances, qui sont celles que le juge apprécie, on les évacue également, quelles qu'elles soient. Elles ne sont plus de nature à empêcher d'échapper à la mise en oeuvre quasi automatique de la peine plancher. Seule la garantie de réinsertion subsiste.
Dès lors, je voudrais poser une question, car j'ai rarement vu pareil escamotage dans un texte !
Comment voulez-vous que les magistrats et les jurés, au moment où ils vont prononcer une peine criminelle très lourde, puissent déterminer s'il y aura à la sortie de prison - six, sept, dix ou quinze ans plus tard - des garanties exceptionnelles d'insertion ? C'est impossible ! Aucun jury de cour d'assises n'est en mesure de le savoir.
Il est un seul cas dans lequel une telle affirmation pourra être avancée, et j'attire l'attention de la Haute Assemblée à cet égard tant je le trouve profondément injuste. Jadis, du temps de ma jeunesse, on débattait beaucoup de l'existence d'une justice de classes.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela n'a pas changé !
M. Robert Badinter. En fait, les seuls qui pourront justifier de garanties exceptionnelles de réinsertion à leur sortie - cela se voit en particulier aux États-Unis, mais cela pourrait également se produire chez nous -ce sont les fils de famille, ceux dont les parents peuvent affirmer devant la cour d'assises que, dans dix ans, ils assureront à leur fils, au moment de sa sortie de prison - on pense à certains crimes qui ont défrayé dans le temps la chronique -, les garanties d'une réinsertion grâce aux moyens dont ils disposent et parce qu'ils auront pu produire au préalable des contrats indiquant que leur fils sera, à ce moment-là, apte à entrer dans telle ou telle entreprise étrangère.
Mais croyez-vous que les autres pourront justifier de telles garanties ? Ce sera toujours, et seulement, le fils du banquier ou de la grande avocate qui pourra en bénéficier.
Par conséquent, en ne retenant que cette disposition, on crée, à l'intérieur d'une disposition pénale d'exception, un véritable clivage social en permettant à certains, en fonction de leur situation sociale ou de celle de leurs parents, de pouvoir, remplir les conditions qu'il sera impossible aux justiciables des banlieues de jamais réunir !
Voilà pourquoi il faut absolument en revenir au principe général que j'ai mentionné : les circonstances, la personnalité de l'accusé.
C'est la raison pour laquelle nous soutenons l'amendement de la commission des lois.
Comme d'autres, je me suis, moi aussi, demandé si la mention « à titre exceptionnel » ne voulait pas dire « garanties exceptionnelles ».
Nous proposons une formule que je crois plus satisfaisante, à savoir les circonstances de l'infraction, la personnalité de son auteur, des garanties suffisantes d'insertion ou de réinsertion, et nous supprimons l'expression « à titre exceptionnel ».
Quoi qu'il en soit, sur le principe et en dehors de ces mentions de texte, il ne fait aucun doute qu'on ne peut laisser figurer seulement la garantie de réinsertion tant il est vrai que cela revient à nier le principe de l'individualisation des peines et, pis encore, à effectuer une sélection entre des accusés en fonction de leur situation sociale ou de celle de leur famille.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. En fait, il y a trois séries d'amendements.
En premier lieu, viennent des amendements de suppression. À cet égard, la discussion générale a mis en évidence deux points de vue tout à fait différents.
Dans la logique que vous avez exposée les uns après les autres à la tribune, vous proposez, mes chers collègues, la suppression de chaque article. Pour ma part, j'ai défendu, au nom de la commission, un point de vue différent, et vous ne serez donc pas étonnés que j'émette un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
La deuxième série d'amendements correspond en fait à un seul d'entre eux : je veux parler de l'amendement n° 31. Or ce dernier m'intéresse particulièrement, puisque, dans mon rapport, j'ai pris la liberté d'écrire que le premier terme de la récidive au sens légal ne pouvait être constitué par une mesure éducative. En effet, il apparaît très clairement - je crois d'ailleurs que cet avis est partagé par la quasi-totalité des membres de la commission des lois - que seule une sanction pénale peut constituer le premier élément de la récidive. Cet élément revêt toute son importance en matière de justice des mineurs.
Cet avis de la commission s'appuie sur la doctrine. D'excellents auteurs considèrent en effet que « La condamnation doit être pénale pour constituer le premier terme de la récidive. Ainsi, les condamnations à des sanctions autres que pénales telles que les mesures éducatives, les sanctions fiscales, administratives ou disciplinaires, notamment, ne peuvent donc davantage constituer le premier terme de la récidive ».
Madame le garde des sceaux, une telle profession de foi nous semble aller de soi. C'est pourquoi nous vous serions reconnaissants de bien vouloir confirmer ce point de vue en séance publique devant le Sénat. Si tel n'était pas le cas, nous préciserions alors ce point à travers l'amendement n° 31. Mais peut-être pourrions-nous faire l'économie de dispositions supplémentaires et inutiles dans le code pénal ou dans le code de procédure pénale ?
Enfin, les amendements nos 14, 32, 15, 13 et 33 visent la façon dont le juge pourra écarter la peine minimale en se référant, ou non, aux garanties d'insertion et de réinsertion, en déterminant si elles comportent un caractère exceptionnel et en invoquant éventuellement la personnalité de l'accusé.
Mes chers collègues, je le rappelle, notre discussion porte sur la matière criminelle, mais nous aurons tout à l'heure exactement le même débat s'agissant des délits. Or, le juge pourra-t-il retenir également les circonstances de l'infraction ? Pour ma part, je vous renvoie à l'amendement n° 1 que j'ai présenté au nom de la commission, et j'émets par conséquent un avis défavorable sur les amendements nos 14, 32, 15, 13 et 33.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. S'agissant des amendements de suppression nos 29 et 53, et compte tenu des explications fournies lors de la discussion générale, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Monsieur Badinter, nous sommes ouverts à toutes les propositions formulées par les groupes de l'opposition, et je suis donc favorable à l'amendement n° 31.
M. le président. Quel est en définitive l'avis de la commission sur l'amendement n° 31 ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Puisque Mme le garde des sceaux suggère que cet amendement peut être adopté, j'émets un avis favorable, au nom de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les autres amendements en discussion commune ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. S'agissant de l'amendement n° 14, le Gouvernement émet un avis défavorable : la faculté laissée aux juridictions de prononcer une peine inférieure aux peines minimales reviendrait à créer des peines automatiques. Comme nous sommes défavorables à la création de telles peines, nous le sommes également à cet amendement.
L'amendement n° 32 est inutile, car le projet de loi ne modifie pas l'article 2 de l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante. Le dispositif proposé par cet amendement existe déjà dans le texte du projet de loi comme dans l'ordonnance, et nous sommes donc évidemment défavorables à cet amendement.
En ce qui concerne les amendements nos 15 et 13, le Gouvernement émet un avis défavorable, pour les mêmes raisons qui l'ont conduit à demander le rejet de l'amendement n° 14.
S'agissant des amendements nos 30 et 1, je rappelle que le présent projet de loi créé un régime pénal adapté à la récidive.
La première récidive est constituée par deux faits de même nature ou assimilés et qui sont qualifiés de délits ou de crimes graves, d'atteintes aux personnes ou de troubles graves à l'ordre public.
Pour la première récidive - deux faits graves -, nous instituons un régime spécifique avec des peines planchers. Le juge pourra y déroger dans une décision motivée et prononcer des sanctions inférieures aux peines minimales, en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité de l'auteur, et des garanties d'insertion et de réinsertion qu'il présente.
Nous prévoyons également un second régime, qui concerne la deuxième récidive, c'est-à-dire trois faits de même nature ou assimilés commis dans un délai très court, car leur auteur doit se trouver en état de récidive. Dans un tel cas, il faut en outre que le troisième fait commis soit une atteinte aux personnes, comporte un élément de violence ou constitue un trouble grave à l'ordre public, tel qu'un trafic de stupéfiants.
Or si les critères permettant de déroger aux peines minimales étaient les mêmes pour les deux régimes, le traitement de la première récidive ne se distinguerait plus de celui de la deuxième, troisième, quatrième ou cinquième récidive !
Nous considérons donc que le critère de la personnalité de l'auteur est intégré de facto dans l'infraction qu'il a commise. Pour pouvoir déroger aux peines planchers, le juge devra démontrer que le récidiviste présente des garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion. Ce sont les garanties exigées - et non la décision du magistrat - qui seront exceptionnelles.
Par exemple, un trafiquant de stupéfiants ne devra pas seulement apporter un bail ou une attestation de travail, il devra démontrer qu'il est prêt à mettre fin à la spirale de délinquance et de récidive dans laquelle il se trouve entraîné.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Et comment fera-t-il concrètement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Il devra présenter des garanties exceptionnelles d'insertion et de réinsertion, madame Mathon-Poinat ! Je fais totalement confiance aux magistrats pour apprécier ce genre de situation, car ils savent le faire.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 30 et 1.
De même, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 33.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout d'abord, s'agissant de l'amendement n° 31, je précise que nous avions hésité, lors de nos débats en commission, à proposer une disposition similaire, à laquelle nous avons renoncé car elle nous semblait aller de soi. Comme Mme le garde des sceaux se déclare favorable à cet amendement, nous nous rallions naturellement à son avis, d'autant que nous avions eu la même idée au départ.
Toutefois, dès lors que nous distinguons dans le projet de loi les mesures éducatives des sanctions pénales, il faudrait pouvoir coordonner cette disposition avec les autres textes en vigueur, ce que nous ne sommes pas en mesure de faire ; il s'agit d'un problème récurrent, et lorsque nous rencontrons certains textes par la suite, nous nous demandons pourquoi ils n'ont pas été mieux coordonnés !
En ce qui concerne les amendements visant les multirécidivistes, je sais bien que certains ici ne veulent pas même entendre parler de peine minimale en cas de récidive ; mais à partir du moment où nous entrons dans le système proposé par le Gouvernement, que nous soutenons quant à nous, il nous faut être cohérents.
D'ailleurs, si le droit pénal prévoit l'individualisation des peines, il existe également un principe de légalité des peines, et vous savez, mes chers collègues, que nos ancêtres révolutionnaires (Sourires.) y étaient extrêmement attachés, au point d'en faire une obligation.
Je rappelle également que, jusqu'en 1994, et pour tous les crimes et délits, le code pénal fixait des peines minimales, qui ne constituent donc pas une monstruosité juridique !
Ces peines ne sont pas non plus, monsieur Badinter, une invention récente, comme le soutient, avec des arguments très peu fondés, la commission d'analyse et de suivi de la récidive dans l'avis que vous avez lu. Quant à l'amendement n° 31 que vous avez présenté, il est tout de même assez différent de l'amendement n° 1 défendu par la commission. En effet, vous souhaitez aligner complètement le régime de la multirécidive sur celui de la récidive, alors que nous voulons individualiser la peine encourue seulement à titre exceptionnel.
En effet, madame le garde des sceaux, nous reconnaissons qu'il s'agit tout de même de crimes, d'atteintes particulièrement graves commis contre des personnes ou de troubles à l'ordre public - les délits, nous en discuterons tout à l'heure. Par exemple, nous pouvons tenir compte des circonstances de l'infraction pour un dealer qui récidive pour la première fois, mais pas pour la deuxième ou la troisième fois !
Le législateur et même, me semble-t-il, le peuple que nous représentons ont affirmé clairement qu'ils en avaient assez de telles infractions et qu'il fallait sanctionner plus lourdement la récidive, en maintenant une hiérarchie par rapport à la multirécidive, sinon la justice ne serait plus compréhensible.
L'un de nos collègues a affirmé que de tels récidivistes étaient peu nombreux. Certes, mais il s'agit des cas les plus graves ! Il est heureux que des viols aggravés ne soient pas commis tous les jours, qu'ils ne se comptent pas par centaines ou par milliers chaque année ! Mais quand bien même il n'y en aurait que cent ou cinquante, la récidive doit être sanctionnée plus lourdement !
Il faut exiger que les magistrats qui souhaitent prononcer une peine inférieure aux planchers prescrits par la loi fournissent des éléments de plus en plus probants.
M. Jacques Mahéas. Les juges ne sont pas si sots !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce n'est pas la question, monsieur Mahéas ! C'est à nous de leur donner des indications, parce que c'est nous qui faisons la loi !
Or il existe de telles différences de jurisprudence selon les juridictions en matière de récidive et de multirécidive - certes moins pour les crimes, qui sont sanctionnés par des jurys populaires, que pour les délits - qu'il y a tout de même quelque chose à tenter, me semble-t-il.
Madame le garde des sceaux, M. le rapporteur vous a interrogée sur l'amendement n° 1 de la commission. Nous avons pensé que les circonstances de l'infraction et la personnalité de l'auteur devaient pouvoir être prises en compte, mais nous avons bien précisé que ce serait seulement « à titre exceptionnel », avec une gradation dans les décisions du juge.
Madame le garde des sceaux, je répète la question de M. le rapporteur : la Cour de cassation contrôlera-t-elle les garanties d'insertion ou de réinsertion ou laissera-t-elle les juges du fond les apprécier ? Il s'agit d'un point important, car, si nous laissons au juge une liberté d'appréciation souveraine, l'amendement n° 1 de la commission ne sera plus aussi indispensable.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. La Cour de cassation ne contrôlera pas les garanties exceptionnelles d'insertion et de réinsertion. Ce rôle incombera au juge du fond. La gradation entre la récidive et la multirécidive résidera donc dans les garanties qui seront fournies par le récidiviste.
Je le répète, ce sont les garanties exigées qui doivent être exceptionnelles, et non la décision prise par le juge. Il s'agit d'ailleurs d'une jurisprudence constante.
M. le président. L'amendement n° 1 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous ne pouvons pas retirer un amendement voté par la commission, monsieur le président.
M. Jacques Mahéas. S'il y avait eu une seconde lecture, peut-être ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mes chers collègues, je suis tout à fait respectueux des décisions de la commission, mais j'ai le droit de donner mon opinion à titre personnel. Or, compte tenu des explications apportées par Mme le garde des sceaux, et sans préjuger l'avis de M. le rapporteur, il me semble que l'amendement n° 1 n'est plus indispensable, même s'il est formellement maintenu.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je n'ai pas d'autres commentaires à faire. Pour ma part, en ma qualité de rapporteur, je maintiens l'amendement n° 1 élaboré par la commission. Le Sénat statuera à la lumière des explications apportées par les uns et les autres.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 29 et 53.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame le garde des sceaux, à ce stade de notre débat, je dresserai un certain nombre de constats.
Premièrement, on comprend mal pourquoi, sur un sujet qui est aussi sensible et complexe, comme la preuve vient d'en être apportée, le Gouvernement a déclaré l'urgence. Il s'agit d'une question difficile, et les moyens de la mise en oeuvre du projet de loi, comme l'injonction thérapeutique, dont nous discuterons tout à l'heure, n'existent pas dans un nombre non négligeable de cas. Pourtant, il nous faut adopter ce texte dans les huit jours, tout simplement parce que l'affichage politique doit être le plus rapide possible !
Madame le garde des sceaux, déclarer l'urgence sur un texte comme celui-ci pose à mon avis quelques difficultés. À l'évidence, la navette parlementaire serait très profitable à ce projet de loi.
Deuxièmement, je ne comprends pas pourquoi vous n'avez apporté aucune réponse, à ce stade, aux constatations qu'un certain nombre d'entre nous ont rappelées, s'agissant de l'absence de corrélation entre le quantum des peines, le nombre d'années de détention et l'existence ou non d'une récidive.
Libre à vous, madame le garde des sceaux, de contester tous les chiffres qui ont été apportés, tous les faits qui ont été établis par les chercheurs, mais il faut alors fournir des arguments ! Dans le cas contraire, nous ne comprenons pas pourquoi vous persistez à considérer que les dispositions de ce texte auront une quelconque efficacité en matière de lutte contre la récidive.
Troisièmement, la discussion qui vient d'avoir lieu sur l'amendement n° 30 est tout à fait instructive. En effet, la mise en cause de l'individualisation des peines suscite un grand débat dans ce pays et une vive inquiétude chez nombre de magistrats.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !
M. Jean-Pierre Sueur. Dans le dispositif prévu à l'article 1er, la peine plancher devient la règle. Elle est donc automatique, sauf si une considération exceptionnelle est reconnue, auquel cas il y a alors individualisation de la peine.
Or, dans notre droit, selon la Constitution, l'individualisation des peines est la règle.
Je me suis replongé dans le rapport tout à fait intéressant qu'avait rédigé M. le rapporteur au mois de février 2005. Il contenait de bonnes pages ! (Sourires.)
M. François Zocchetto, rapporteur. Merci !
M. Dominique Braye. Elles sont toutes bonnes !
M. Jean-Pierre Sueur. On y trouve cette question : « Quel intérêt y aurait-il à revenir à un système supprimé il y a plus de douze ans ? ».
M. Jean-Pierre Sueur. C'est le Zocchetto d'avant, mais il avait du bon !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Le Zocchetto nouveau est arrivé ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur. Ce rapport citait un certain nombre de bons auteurs qui insistaient, à juste titre, sur l'individualisation des peines.
Madame le garde des sceaux, je n'ai pas compris pourquoi vous considériez que, en cas de première récidive, il serait légitime de prendre en compte et les circonstances et la personnalité de l'auteur de l'infraction, alors que, en cas de deuxième récidive, pour une affaire de stupéfiants, par exemple, il ne faudrait prendre en compte que « les garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion », à propos desquelles notre collègue Robert Badinter a très bien montré que cela engendrerait toutes sortes de discriminations. En effet, le juge ne pourrait plus prendre en compte la personnalité de l'auteur ni les circonstances de l'infraction.
Vous mettez ainsi en oeuvre un système de décision automatique, mécanique, avec des gradations. Mais comment pouvez-vous justifier auprès des magistrats le fait qu'à un certain moment de la procédure la personnalité de l'individu n'est plus digne d'être prise en considération ? C'est un système totalement théorique,...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est vous qui êtes un théoricien !
M. Jean-Pierre Sueur.... contraire aux principes de l'individualisation des peines, et ce pour des raisons d'affichage politique.
Nous regrettons que soient de ce fait altérés notre droit et, surtout, la confiance qu'accordent aux magistrats nos concitoyens et leurs élus.
M. Charles Pasqua. Et les délinquants ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Madame la ministre, sans doute vous êtes-vous interrogée comme nous sur les récidivistes. Qui sont-ils et pourquoi récidivent-ils ? À ces questions, vous n'apportez qu'une seule réponse : c'est parce que les peines qu'ils encourent ne sont pas assez fortes ; il suffit donc de les alourdir pour améliorer la situation.
J'ai cru un instant que vous alliez faire d'autres propositions lorsque vous avez évoqué les centres éducatifs fermés. En Île-de-France, si mes renseignements sont exacts, un seul établissement existe actuellement ; ils seront peut-être bientôt deux. Ils se développent donc à dose homéopathique, mais ce serait une voie à suivre...
Notre approche est différente de la vôtre. Nous nous interrogeons sur la récidive. Pourquoi y a-t-il récidive ? Pourquoi les peines de prison entraînent-elles plus de récidives que les peines alternatives ?
Nous nous intéressons plus particulièrement au « noyau dur » des récidivistes, qui est constitué essentiellement de personnes mal insérées et de toxicomanes. Nous nous sommes aperçus qu'à leur sortie de prison ils n'avaient bénéficié d'aucune aide - pas de RMI, par exemple -, d'aucun soin.
Notre attention s'est portée également sur les circonstances qui entourent les cas de récidive : le chômage, la ghettoïsation, la crise du logement, le surpeuplement des maisons d'arrêt. Le juge en tiendra-t-il compte ? Ces éléments pourront-ils entraîner une diminution de la peine ?
Madame le garde des sceaux, vous ne vous êtes pas posé toutes ces questions.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Si !
M. Jacques Mahéas. J'ose espérer que, plus tard, nous y reviendrons.
Pis encore, s'agissant des mineurs, votre texte contrevient à l'esprit de la Convention internationale des droits de l'enfant, ratifiée par la France. Est-il donc bien adapté aux mineurs ?
Bref, madame le garde des sceaux, vous êtes en service commandé : vous nous avez présenté ce texte beaucoup trop rapidement, sans avoir suffisamment réfléchi, un mauvais texte sur lequel l'urgence ne s'imposait pas.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Un certain nombre de nos collègues veulent nous faire croire - sans doute pour s'en persuader eux-mêmes ! - qu'il faut choisir entre les délinquants et les victimes.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Eh oui !
M. Pierre-Yves Collombat. Or toutes les études, qu'elles soient étrangères ou françaises, montrent que ce type de disposition est non seulement inefficace, mais contreproductif : il engendre plus de délinquance, donc plus de victimes. En d'autres termes, avec ce texte, le nombre de victimes augmentera.
Vos raisonnements ne tiennent pas et, en votre for intérieur, vous savez bien que ce texte est mauvais. Vous êtes en service commandé.
M. Dominique Braye. S'il-vous-plaît, nous ne sommes pas en service commandé ! Nous ne sommes pas socialistes !
M. Charles Gautier. On l'avait remarqué !
M. Pierre-Yves Collombat. Cela viendra peut-être ! Des passerelles sont lancées en ce moment ! (Sourires.)
En fait, vous savez bien que ce texte ne sert à rien et même qu'il produira des effets contraires à ceux qui sont recherchés. Vous serez ainsi confrontés demain - et nous aussi ! - à des problèmes encore plus grands qu'aujourd'hui.
Dans ces conditions, je ne vois pas pourquoi nous voterions ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La discussion est difficile : cela augure mal de la revalorisation du débat parlementaire...
M. Dominique Braye. Pas du tout !
M. Charles Pasqua. Pour qu'il y ait débat, il faut opposer des arguments !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.... et des rapports entre l'exécutif et le législatif, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
Mes collègues et moi réclamons des informations sur l'efficacité supposée des peines planchers en cas de récidive. Mais vous n'apportez aucune réponse ! En fait, il n'existe aucune corrélation entre le quantum des peines et la récidive. Les exemples étrangers où sont appliquées des peines planchers ou des peines automatiques confirment cette absence de corrélation. Dès lors, le débat tourne court.
Puisqu'il n'y a pas de corrélation et puisque vous avez déjà aggravé les peines en cas de récidive, pourquoi vouloir ajouter des peines planchers, qui, en plus, modifient totalement le travail de la justice ? Vous répondez que c'est nécessaire pour la seule raison que le Président de la République l'a annoncé...
Ce qui intéresse nos concitoyens, ce sont les mesures qui empêchent la récidive et qui font baisser la délinquance. Le débat se révèle alors beaucoup plus vaste. Or les dispositions dont l'efficacité contre la récidive est reconnue sont totalement occultées. Nous constatons même qu'elles diminuent de plus en plus et sont de moins en moins utilisées : je pense à la libération conditionnelle, aux peines alternatives, au suivi socio-judiciaire.
La méthode Coué ne nous a pas convaincus pendant cinq ans, elle ne nous convainc pas davantage aujourd'hui.
Le peuple attend des résultats. En tant que législateur, nous nous demandons comment les obtenir, et l'on nous fait toujours la même réponse : alourdissons les peines ; les résultats suivront. Hélas ! il n'en est rien.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.
Mme Alima Boumediene-Thiery. J'avoue ne pas avoir très bien compris les explications de Mme le garde des sceaux. Il n'était absolument pas dans nos intentions de demander des peines automatiques, au contraire !
Nous voulons réaffirmer le pouvoir d'appréciation du juge, ainsi que le principe d'individualisation des peines, principe général qui est reconnu puisqu'il figure déjà dans un article du code pénal. Nous souhaitons donc réaffirmer ce principe, mais nous n'entendons pas du tout l'encadrer ou le limiter par la fixation de critères pas plus que nous sommes pour la fixation de peines planchers ou de peines automatiques.
Lorsque l'on examine dans le détail les critères que vous prévoyez, madame le garde des sceaux, on s'aperçoit qu'ils vont au-delà des exigences. C'est là le danger. En effet, il importe de rappeler que le pouvoir d'appréciation du juge ne peut exister sans le principe d'individualisation des peines.
Vous affirmiez tout à l'heure vouloir être concrète. Peut-être, mais l'exemple du dealer que vous avez pris n'était pas convaincant. En effet, quelles garanties peut-on apporter en dehors du logement, du travail ? En outre, seules les familles qui ont des connaissances pourront fournir des garanties pour leurs enfants. Ce ne sera certainement pas le cas de celles qui connaissent la discrimination, l'exclusion ou la précarité.
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. L'écoute des différentes interventions me conduit à penser que nous sommes très loin des préoccupations de nos concitoyens qui se trouvent sur le terrain.
Par ailleurs, je regrette que notre collègue M. Mahéas ait quitté l'hémicycle. En effet, nous avons tous deux fait partie de la commission qui a étudié les conséquences des événements qui se sont produits dans les banlieues à l'automne 2005.
M. Jean-Pierre Sueur. Il a dû se rendre à une réunion de conseil municipal !
M. Dominique Braye. Les élus et les citoyens, quelle que soit leur sensibilité politique, formulaient à l'époque unanimement la même demande, y compris les élus du 9-3 que vous évoquiez et dont M. Mahéas fait partie. Or il me semble qu'il a oublié leur message. Ainsi, tous les maires nous demandaient d'adopter des mesures applicables aux multirécidivistes, qui ne représentent en fait qu'un faible pourcentage de la population demeurant dans les quartiers frappés par les incidents susvisés.
En cet instant, nous répondons donc non pas aux désirs de quelques personnes qui s'appuient sur telle ou telle statistique...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous ne faites absolument rien !
M. Dominique Braye.... mais à un vrai problème qui se pose sur le terrain. Monsieur Badinter, nous essayons surtout de protéger les plus modestes de nos concitoyens qui sont les premières victimes de ces multirécidivistes.
Par ailleurs, les éducateurs spécialisés nous ont fait remarquer à nous, politiques, que, s'il y a tant de multirécidivistes actuellement, c'est parce que nous n'avons pas adopté, en temps utile, les bonnes dispositions...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On parle des majeurs !
M. Dominique Braye. Ils ont récidivé en raison de l'impunité dans laquelle ils ont été laissés. L'impunité est la pire des choses.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il s'agit des majeurs ! Vous vous trompez de débat !
M. Dominique Braye. Je me souviens qu'un prêtre polytechnicien éducateur de rues, célèbre à Argenteuil, qui a aussi travaillé à Chanteloup-les-Vignes, nous disait : « Messieurs les politiques, n'oubliez jamais que la répression est la première marche de la prévention ! » (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Mes chers collègues, tous les élus des quartiers sensibles - vous vous en êtes peut-être quelque peu éloignés - formulent la même requête.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On traite des majeurs ! Vous êtes hors sujet !
M. Dominique Braye. Je terminerai mon intervention en rendant hommage à Mme le garde des sceaux, qui s'est sûrement posé toutes les questions, contrairement à ce qu'a affirmé M. Mahéas. Notre collègue ayant, lui, oublié de s'interroger sur certains points, c'est probablement la raison pour laquelle il n'arrive pas à la même conclusion que nous.
Je veux également rendre hommage au travail de M. le rapporteur. Au vu des conclusions des groupes de travail qui se sont réunis après les événements qui ont eu lieu à l'automne 2005, il sait bien sûr que la société évolue et que les moyens juridiques à notre disposition doivent faire de même. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il s'agit des majeurs ! Vous ne savez pas lire !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 29 et 53.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. Jean-Pierre Sueur. La commission est désavouée !
M. Dominique Braye. C'est le débat !
MM. Charles Pasqua et Dominique Braye. Le Sénat est souverain !
M. Pierre-Yves Collombat. Le souverain est à l'Élysée !