sommaire
présidence de M. M. Roland du Luart.
2. Dépôt d'un rapport du Gouvernement
3. Candidature à un organisme extraparlementaire
4. Accord avec la Russie relatif à une coopération en matière de destruction des stocks d'armes chimiques. - Adoption d'un projet loi en procédure d'examen simplifiée.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
5. Convention pénale sur la corruption. - Adoption d'un projet de loi.
Discussion générale : MM. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative ; André Rouvière, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
6. Convention internationale contre le dopage dans le sport. - Adoption définitive d'un projet de loi.
Discussion générale : M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative ; Mme Hélène Luc, rapporteur de la commission des affaires étrangères ; MM. Alain Dufaut, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Jean-François Voguet.
Clôture de la discussion générale du projet de loi.
M. le ministre.
Adoption de l'article unique.
7. Candidatures à des commissions mixtes paritaires
8. Nomination d'un membre d'un organisme parlementaire
9. Communication relative à des questions orales
Suspension et reprise de la séance
Présidence de M. philippe richert
10. Questions d'actualité au Gouvernement
M. Robert Del Picchia, Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie.
MM. Jacques Mahéas, Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.
MM. Philippe Nogrix, Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
MM. Ivan Renar, Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
MM. François Fortassin, Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales.
MM. Jean-Luc Miraux, Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Les enquêtes des renseignements généraux
MM. Jean-Luc Mélenchon, Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales.
Conférence internationale de l'environnement
M. René Beaumont, Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie.
Déficit 2006 du budget de l'ÉTat
Mme Adeline Gousseau, M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement.
MM. Robert Tropeano, Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche.
12. Souhaits de bienvenue à une délégation de l'Assemblée nationale de la République de Corée
Suspension et reprise de la séance
MM. Bernard Frimat, le président.
14. Nomination de membres de commissions mixtes paritaires
15. Candidatures à une commission mixte paritaire
16. Installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation. - Adoption d'une proposition de loi.
Discussion générale : MM. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement, René Beaumont, rapporteur de la commission des affaires économiques ; MM. Jean-Claude Danglot, Roger Madec, André Dulait.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre délégué.
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Amendement n° 2 de la commission - MM. le rapporteur, le ministre délégué, Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 3 et 3 bis. - Adoption
Amendement n° 3 de la commission - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Mme Lucienne Malovry.
Adoption de la proposition de loi.
17. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire.
18. Dépôt d'un projet de loi organique
20. Dépôt d'une proposition de loi
22. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 67 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi de programme du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des affaires économiques et sera disponible au bureau de la distribution.
3
CANDIDATURE À UN organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein de la Commission permanente pour l'emploi et la formation professionnelle des Français de l'étranger.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose la candidature de Mme Christiane Kammermann pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
4
Accord avec la Russie relatif à une coopération en matière de destruction des stocks d'armes chimiques
Adoption d'un projet de loi en procédure d'examen simplifiée
M. le président. L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à une coopération en matière de destruction des stocks d'armes chimiques en Fédération de Russie (nos87, 144).
Pour ce projet de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure simplifiée.
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à une coopération en matière de destruction des stocks d'armes chimiques en Fédération de Russie, signé à Moscou le 14 février 2006 et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l'article unique constituant l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté à l'unanimité.)
5
Convention pénale sur la corruption
Adoption d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention pénale sur la corruption (n° 450, 2004-2005, n° 23).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la corruption est un véritable cancer, contre lequel il faut ardemment lutter.
En effet, selon les estimations habituellement faites, plus de 1 000 milliards de dollars seraient dépensés chaque année dans le monde en versements de pots-de-vin.
Il convient de le rappeler, les années quatre-vingt-dix ont vu se renforcer la prise de conscience, par les opinions publiques et les dirigeants, de l'impérieuse nécessité de lutter contre le fléau de la corruption, qui met en danger la stabilité des institutions démocratiques, les fondations morales de la société et l'économie de marché.
À cet égard, dès 1999, le Conseil de l'Europe avait fait de la lutte contre la corruption l'une de ses priorités, en adoptant deux conventions relatives, pour l'une, aux aspects civils de la lutte contre la corruption, et, pour l'autre, aux aspects pénaux de celle-ci.
La ratification de ces deux instruments a été autorisée par le Parlement par la loi du 11 février 2005 autorisant la ratification de la convention civile sur la corruption et par la loi du 11 février 2005 autorisant la ratification de la convention pénale sur la corruption.
La principale caractéristique de la convention pénale sur la corruption, signée à Strasbourg le 27 janvier 1999, résidait dans son large champ d'application et dans son approche globale du phénomène, ce qui la différenciait des instruments internationaux précédemment adoptés dans ce domaine.
Sur le plan des incriminations, cette convention permettait de progresser dans la voie du rapprochement des législations pénales en étendant les infractions de corruption active et passive à de nombreuses catégories professionnelles, ainsi qu'au secteur privé, et d'incriminer le trafic d'influence, le blanchiment du produit des délits de la corruption et les infractions comptables.
Toutefois, certaines questions n'avaient pu être utilement abordées lors de l'élaboration de la convention, parmi lesquelles la corruption des jurés et des arbitres. Le protocole additionnel adopté à Strasbourg le 15 mai 2003, dont j'ai l'honneur de présenter devant vous le projet de loi de ratification, a pour objet de combler cette lacune en complétant la convention pénale sur la corruption par des dispositions relatives à la corruption des jurés et des arbitres, tant nationaux qu'étrangers, dans la mesure où les décisions prises par ces personnes présentent, par leur nature et les conséquences qui s'y attachent, de très grandes similitudes avec celles qui sont prises par les autorités judiciaires.
La tentation d'obtenir une décision favorable de la part de jurés ou d'arbitres contre le versement d'une rémunération n'est donc pas moins grande que quand il s'agit de juges.
Au même titre que celle de la convention, la ratification de ce protocole additionnel entraînera, pour la France, une adaptation du droit interne, et le Gouvernement prépare actuellement un projet de loi visant à introduire les modifications législatives liées à la ratification de ces deux instruments.
En effet, s'agissant du protocole additionnel, la convention fait obligation d'incriminer des comportements non prévus ou couverts partiellement par notre législation, tels que la corruption active et passive des jurés et arbitres étrangers et le trafic d'influence commis à l'égard de jurés et d'arbitres nationaux ou étrangers.
L'approbation de ce protocole viendra confirmer la volonté de notre pays de lutter fermement contre la corruption, volonté que la France a exprimée en étant le premier État membre du G 8 à ratifier la convention des Nations unies contre la corruption, dont la première conférence des parties s'est tenue voilà quelques semaines en Jordanie.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle le protocole additionnel à la convention pénale sur la corruption, dont l'approbation fait l'objet du projet de loi qui vous est aujourd'hui soumis. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Rouvière, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, adoptée en 1999 sous l'égide du Conseil de l'Europe, la convention pénale sur la corruption est particulièrement ambitieuse et importante.
En effet, comme vous l'avez indiqué, monsieur le ministre, elle vise à incriminer de façon coordonnée à l'échelle internationale un large éventail de conduites de corruption et à améliorer la coopération entre les États, ce qui est de plus en plus indispensable.
Un protocole additionnel à cette convention a été signé le 15 mai 2003. Il étend le champ d'application de la convention à la corruption des arbitres, notamment en matière commerciale ou civile, et des jurés, complétant ainsi les dispositions de la convention visant à protéger les juridictions contre la corruption. Ce protocole est entré en vigueur le 1er février 2005 et fait l'objet du projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Sur le fond, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a approuvé le dispositif tendant à compléter un texte qu'elle avait approuvé deux ans auparavant, le protocole étant d'ores et déjà largement applicable à notre pays s'agissant des arbitres et des jurés nationaux.
Pour autant, sans émettre aucune réserve sur le fond, la commission a voulu obtenir du Gouvernement des précisions sur plusieurs points. Pour cette raison, elle n'a pas souhaité avoir recours à la procédure simplifiée d'examen en séance publique.
La première des interrogations porte sur le calendrier de ratification de cet ensemble d'instruments internationaux de lutte contre la corruption.
La « convention mère » est entrée en vigueur le 1er juillet 2002, après avoir été ratifiée par les quatorze États requis.
Alors qu'elle a figuré parmi les tout premiers signataires, alors qu'elle prévoit de formuler certaines réserves sur les points qu'elle juge incompatibles avec son droit, alors que les textes relatifs à la justice n'ont pas fait défaut dans les années récentes, alors que le Parlement français a, par la loi du 11 février 2005, autorisé la ratification de la convention pénale sur la corruption, la France n'a toujours pas, à ma connaissance, déposé ses instruments de ratification auprès du Conseil de l'Europe. L'étude d'impact associée à la convention indiquait la nécessité d'adaptations législatives préalables.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, si des modifications législatives préalables au dépôt des instruments de ratification par notre pays sont encore nécessaires, nous préciser, le cas échéant, leur nature et nous indiquer, éventuellement, quels obstacles ont empêché leur adoption dans un délai raisonnable, alors que la ratification française du texte apparaissait déjà comme tardive ?
Notre deuxième interrogation porte sur les conséquences d'une ratification tardive de ce texte par notre pays pour le processus d'évaluation auquel se livre le Conseil de l'Europe au cours de cycles portant sur différents principes fondamentaux. La France pourra-t-elle participer, dans les meilleures conditions, aux prochains cycles d'évaluation de sa législation sur la corruption ?
En outre, d'une façon plus générale, la commission des affaires étrangères s'interroge sur les relations et la coopération entre les deux espaces de droit que sont le Conseil de l'Europe et l'Union européenne, pour ne citer que deux organisations productrices d'instruments relatifs à la lutte contre la corruption, aux côtés des Nations unies et de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE. Une coopération plus étroite entre les deux organisations et le renforcement de leur complémentarité, un temps envisagés, ne semblent plus être recherchés. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quel est l'état d'avancement de ce dossier, et nous préciser la position actuelle de la France ?
Enfin, à la lumière de l'exemple de la convention pénale sur la corruption, la commission des affaires étrangères souhaite que puisse lui être communiqué un état des lieux précis concernant les textes internationaux signés par la France et ayant nécessité une autorisation de ratification par le Parlement. Pouvez-vous nous donner quelques indications à cet égard, monsieur le ministre ?
En effet, ce n'est pas la première fois que je pose cette question : nous autorisons la ratification de textes internationaux mais nous ne savons pas, ensuite, quel sort leur est réservé, s'ils sont appliqués en totalité, partiellement ou pas du tout. La commission des affaires étrangères aimerait qu'un bilan lui soit transmis au moins une fois par an. Chaque fois que j'ai exprimé ce désir d'information au nom de la commission, les ministres, quels qu'ils soient, ont donné leur accord verbal, sans qu'il y ait jamais aucune suite.
Monsieur le ministre, j'espère donc que vous me donnerez une réponse favorable, mais surtout que votre accord sera suivi d'effet ! Tel est le voeu de la commission, qui souhaite simplement être informée du devenir des textes dont nous approuvons la ratification.
Sous le bénéfice de ces observations et des précisions que vous voudrez bien nous apporter, monsieur le ministre, la commission des affaires étrangères recommande l'adoption du présent projet de loi.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Lamour, ministre. Monsieur le président, je souhaiterais apporter quelques précisions à M. le rapporteur et répondre ainsi à ses questions.
En ce qui concerne le calendrier de ratification des instruments internationaux, les modifications législatives liées à la ratification du protocole additionnel à la convention pénale sur la corruption sont indiquées dans l'étude d'impact annexée au projet de loi d'approbation.
Afin d'appréhender la corruption des arbitres nationaux et étrangers dans les conditions exigées par l'instrument, il nous faudra introduire dans les textes d'incrimination du code pénal une référence à la loi de procédure en vertu de laquelle l'arbitre exerce sa mission. Nous devrons également introduire l'incrimination de trafic d'influence concernant des jurés et des arbitres nationaux, comme je le disais tout à l'heure.
Afin d'assurer le respect de ses engagements internationaux en matière de lutte contre la corruption, le Gouvernement a choisi d'intégrer l'ensemble des adaptations législatives nécessaires dans un seul projet de loi. Le texte en cours d'élaboration ne se limite donc pas aux modifications liées à la ratification du présent protocole, mais vise également à mettre notre droit en conformité avec la convention pénale du Conseil de l'Europe et la convention des Nations unies contre la corruption.
Comme vous le savez, la législation française en matière de lutte contre la corruption a été modifiée par la loi n° 2000-595 du 30 juin 2000 modifiant le code pénal et le code de procédure pénale relative à la lutte contre la corruption, adoptée à l'occasion de la ratification de la convention de l'OCDE sur la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales et de la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes.
Alors que cette loi tendait à procéder à une adaptation de notre droit « ciblée » sur les exigences posées par les deux instruments précités, le Gouvernement a été amené, dans le cas présent, à réexaminer la cohérence d'ensemble des incriminations en matière de corruption, selon qu'elles concernent un agent public national ou un agent exerçant ses fonctions au sein d'un autre État membre de l'Union européenne ou dans un État tiers à l'Union européenne.
Cette volonté de cohérence, l'ampleur des modifications législatives nécessaires et le fait que la lutte contre la corruption intéresse de nombreux départements ministériels et requiert donc une large concertation expliquent que ce projet de loi de transposition n'ait pu, à ce jour, être soumis au Parlement. Je puis cependant vous indiquer, monsieur le rapporteur, que les travaux d'élaboration de ce texte sont en voie d'achèvement ; il devrait pouvoir être soumis prochainement au Conseil d'État.
En ce qui concerne votre question sur les conséquences d'une ratification « tardive » par la France, sachez que notre pays participe activement à la mise en oeuvre des différents mécanismes d'évaluation de la lutte contre la corruption mis en place dans différentes enceintes, en particulier le groupe d'États contre la corruption, le GRECO, s'agissant du Conseil de l'Europe, et le groupe de travail de l'OCDE.
À cet égard, l'année 2006 a été marquée, pour notre pays, par l'achèvement de son évaluation dans le cadre de l'OCDE. Cette évaluation s'est déroulée de manière particulièrement satisfaisante puisque, sur les treize recommandations adressées par le groupe de travail, une seule a été considérée comme devant encore faire l'objet d'un suivi spécifique.
La France, qui a ratifié la convention des Nations unies contre la corruption, a également joué un rôle actif lors de la première réunion de la conférence des États parties, qui s'est tenue en Jordanie en décembre 2006.
Par ailleurs, dans le cadre du GRECO, la France vient d'achever son premier cycle d'évaluation et rendra compte prochainement des mesures prises pour se conformer aux recommandations formulées au titre du deuxième cycle d'évaluation. Un troisième cycle est d'ores et déjà programmé pour les années 2007 et 2008 : il portera notamment sur la mise en oeuvre des incriminations prévues par la convention pénale sur la corruption et le présent protocole.
Enfin, le Gouvernement a indiqué au GRECO qu'il souhaitait que l'évaluation de la France ait lieu dans le courant de l'année 2008, afin de lui permettre de disposer du temps nécessaire à l'achèvement des travaux de transposition des textes internationaux. Cette position, qui ne remet bien sûr pas en cause l'intérêt attaché par notre pays aux travaux de ce groupe, vise à permettre à la France de participer à cet exercice d'évaluation dans des conditions favorables.
M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique.
Article unique
Est autorisée l'approbation du protocole additionnel à la convention pénale sur la corruption, fait à Strasbourg le 15 mai 2003, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut, pour explication de vote.
M. Alain Dufaut. Le groupe de l'UMP votera bien entendu en faveur de l'autorisation de l'approbation de ce protocole additionnel à la convention pénale sur la corruption. La corruption, comme le dopage, que nous allons évoquer dans un instant, est un véritable fléau pour le monde du sport. Il est tout à fait normal que nous protégions ce dernier grâce à un tel texte, de portée internationale.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique constituant l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté à l'unanimité.)
6
Convention internationale contre le dopage dans le sport
Adoption définitive d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport (nos 153, 164, 167).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, de la corruption au dopage, il n'y a qu'un pas : c'est en quelque sorte le même principe délétère qui dégrade l'image du sport, pas seulement en France, mais partout dans le monde.
Vous êtes réunis aujourd'hui pour examiner, après les députés, le projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport.
Cette convention avait été adoptée le 19 octobre 2005, à l'unanimité, par les délégués à la trente-troisième conférence générale de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture, l'UNESCO. La France, qui, je le rappelle, est à l'origine de cette proposition de convention, devrait être ainsi le quarante-deuxième pays à la ratifier, après l'Albanie qui l'a fait le 29 décembre dernier, ce qui permet à ce texte d'entrer en vigueur.
Comme vous le savez, cette convention est un instrument nécessaire pour définir et assurer une approche mondiale cohérente de la lutte contre le dopage dans le sport. Le dispositif, que les États ont vocation à adopter, permettra aux sportifs d'évoluer dans un environnement juridique cohérent et équitable, quel que soit le lieu de la compétition ou de la pratique. C'est l'achèvement d'un processus qui permet aux États de converger avec le mouvement sportif international, processus engagé dès 1999, un an après l'affaire Festina.
Depuis 2003, les fédérations internationales, les comités nationaux olympiques et le Comité international olympique ont tour à tour transposé dans leur ordre juridique le code mondial antidopage et les standards internationaux qui y sont annexés.
Cette convention doit conduire l'ensemble de la communauté internationale à adopter, comme nous l'avons déjà fait pour l'essentiel, des mesures spécifiques visant à réduire la possibilité de se procurer et d'utiliser des substances interdites et, à cette fin, à actualiser une liste de référence de substances interdites. Un groupe de suivi, spécialement constitué à cet effet, devra réexaminer périodiquement cette liste et suivre l'application de la convention.
Ces mesures spécifiques doivent également tendre à établir un lien entre l'application stricte de la réglementation antidopage et l'octroi d'aides aux organisations sportives ainsi qu'aux sportifs - en résumé, il s'agit de frapper les tricheurs potentiels au portefeuille -, à instaurer des contrôles antidopage réguliers, tant au cours qu'en dehors des compétitions - ce sont les contrôles inopinés -, à soutenir, concevoir ou mettre en oeuvre des programmes d'éducation et de formation à la lutte contre le dopage pour sensibiliser le public aux effets négatifs du dopage sur la santé et aux valeurs éthiques du sport, et, enfin, à informer le sportif sur ses droits et ses devoirs, en particulier sur les procédures de contrôle.
L'adoption de cette convention viendra ainsi compléter votre action législative dans le domaine particulier de l'éthique sportive et de la préservation de la santé des sportifs, dont la manifestation la plus récente est la loi du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs, qui a notamment conduit à la création de l'Agence française de lutte contre le dopage, l'AFLD.
Cette loi a notamment pour objet de clarifier les responsabilités des acteurs internationaux et nationaux, en s'appuyant sur un principe clair, conforme aux principes du code mondial antidopage.
En premier lieu, le contrôle de la loyauté des compétitions internationales doit relever des instances internationales qui ont autorité sur leur organisation.
En second lieu, le contrôle de la loyauté des compétitions nationales relève des autorités nationales, c'est-à-dire, pour notre pays, des fédérations nationales et de l'Agence française de lutte contre le dopage.
Ces dispositions sont compatibles et cohérentes avec les principes généraux que la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport nous fait obligation d'intégrer dans notre droit interne.
Cette répartition des compétences entre les autorités sportives internationales et les autorités nationales a été comprise, admise, et n'a soulevé, à l'occasion des procédures consultatives préalables à l'adoption de la loi du 5 avril 2006, aucune objection juridique.
Je précise ce point car, préalablement à la saisine de la représentation nationale, la question de la compatibilité avec notre droit d'une des dispositions du code mondial antidopage relative à l'appel d'une sanction disciplinaire devant le tribunal arbitral du sport, le TAS, a été débattue.
L'interrogation a porté sur la situation des sportifs de niveau international : les sanctions qui les concerneraient, même infligées par une autorité nationale, à l'occasion d'une compétition nationale, ne pourraient faire l'objet d'un appel que devant le TAS. Il convient de rejeter cette interprétation.
Pour lever toute ambiguïté, il faut donc, mesdames, messieurs les sénateurs, préciser la portée et le sens de cette disposition.
D'abord, la convention ne prévoit pas la transposition littérale du code mondial antidopage, puisque ce texte n'est pas juridiquement intégré, mais seulement annexé, à la convention. Celle-ci précise que les États parties s'engagent à respecter les « principes » de ce code, ce qui exclut toute notion d'applicabilité automatique de ses dispositions en droit interne et laisse ainsi aux États une marge d'interprétation et de transposition. Cela a été clairement rappelé par le Conseil d'État lors de son examen du projet de loi.
Ensuite, il résulte des dispositions mêmes du code mondial antidopage que ces dernières respectent les prérogatives des autorités nationales lorsqu'elles existent. Ainsi, lorsqu'une sanction nationale aura été prononcée contre un sportif français, que ce soit par une fédération nationale ou par l'AFLD, ce sportif pourra épuiser toutes les procédures nationales d'appel et de contestation juridique, devant le juge administratif français dans le cas d'espèce, de la décision disciplinaire. La sanction qu'il encourt n'a alors de portée que pour ce qui concerne les compétitions nationales.
S'agissant des sportifs de niveau international, les fédérations internationales tirent, en ce qui les concerne, toutes les conséquences des sanctions nationales, implicitement ou explicitement. Ces décisions de transposition, dont les conséquences ne concernent que le champ sportif international, ne sont, quant à elles, susceptibles d'appel que devant le tribunal arbitral du sport.
En somme, le principe « à compétitions nationales, compétences nationales, et à compétitions internationales, compétences internationales » sera appliqué.
De ce fait, les portées respectives des sanctions nationales et internationales et leurs procédures d'appel sont respectées et demeurent conformes aux dispositions de notre droit interne, sans que l'on puisse craindre une atteinte à la souveraineté nationale. Telle est l'interprétation, respectueuse des principes du code, qu'il convient de donner à cette disposition.
Sur le fondement de ce principe, la loi du 5 avril 2006 a défini les compétences respectives, en matière de contrôles antidopage, des fédérations et de l'AFLD, compétences qui ont été explicitées par les décrets d'application.
Enfin, certains ont pu prétendre que les sanctions, telles qu'elles sont inscrites dans le code mondial antidopage, seraient automatiques, privant les sportifs de la possibilité d'invoquer la Constitution ou la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Comme je l'ai indiqué, les dispositions du code mondial antidopage sont compatibles avec notre droit interne et nos principes constitutionnels. Ainsi, le Conseil d'État a explicitement considéré que le projet de loi de ratification ne contrevenait ni aux principes constitutionnels ni aux obligations résultant de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en matière de nécessité et de proportionnalité des peines. Les sportifs peuvent être entendus et faire valoir, dans l'examen de leur dossier, les circonstances de la faute qui leur est reprochée. Dès lors, les sportifs bénéficient bien, au travers de cette ratification, de l'ensemble des garanties constitutionnelles et internationales applicables à tout citoyen.
L'interprétation des dispositions du code mondial antidopage que je viens d'évoquer sera d'ailleurs explicitée à l'occasion des travaux du groupe de réflexion ayant vocation à actualiser ce dernier, dans la perspective de la conférence mondiale sur le dopage dans le sport qui se tiendra à Madrid en novembre prochain. En effet, c'est lors de cette conférence que les dispositions du code pourront évoluer. Durant cette période, j'aurai l'occasion de m'exprimer sur ce sujet, au titre de mes responsabilités au sein de l'Agence mondiale antidopage, l'AMA.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la ratification de cette convention va confirmer la détermination de notre pays à lutter contre le dopage dans une dynamique internationale. Le dopage nie les principes moraux et éthiques qui sont à la base du sport, ruine la santé des athlètes et crée des dommages irréparables à la nécessaire exemplarité de l'exploit sportif. Seules une prise de conscience collective et une action internationale peuvent permettre de lutter efficacement contre ce phénomène dont les effets de plus en plus insidieux n'affectent pas uniquement les sportifs concernés ou le sport lui-même, mais touchent toute la société.
Voilà résumé, mesdames, messieurs les sénateurs, l'essentiel de cette convention qu'il est temps d'introduire, eu égard à sa nature et à sa portée, dans notre édifice normatif. Je remercie le Sénat qui, aux cotés de l'Assemblée nationale, n'a cessé d'apporter un soutien indéfectible à la lutte contre le dopage, soutien qui s'était notamment manifesté par l'adoption à l'unanimité, le 19 octobre 2005, du projet de loi relatif à la lutte contre le dopage. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Hélène Luc, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'utilisation de produits divers censés améliorer les performances sportives n'est pas nouvelle. Ainsi, dans les premières années du XXe siècle, plusieurs marques de vin se sont réclamées de leur utilisation par des coureurs du Tour de France pour vanter leurs qualités fortifiantes. (Sourires.) Cet exemple, passé de mode, illustre l'aspect « psychologique » de certains produits dopants, qui agissent plus par la croyance des utilisateurs à leurs vertus stimulantes que par leurs effets concrets.
Les très grands progrès accomplis, depuis la Seconde Guerre mondiale, par la biologie et la médecine ont eu pour conséquence néfaste l'utilisation scientifique et rationnelle de produits dopants pour améliorer les performances sportives. Cette utilisation s'est effectuée sans égards pour les effets secondaires touchant la santé des personnes ayant, plus ou moins volontairement, recours à ces produits.
Chacun se souvient, par exemple, de la mort soudaine et inexpliquée du Britannique Tom Simpson lors de l'ascension du mont Ventoux, à l'occasion du Tour de France de 1967.
Depuis, les cas de dopage se sont multipliés, comme en attestent divers procès en cours. Aussi la cécité, plus ou moins marquée, des instances sportives et des pouvoirs publics devant ce phénomène, qui semble ne plus épargner aucune discipline sportive, a-t-elle fini par faire place à une attitude en général beaucoup plus volontariste.
Ainsi, notre pays a élaboré une législation complète réprimant le dopage dans le sport, effort marqué par les lois « Buffet » de 1999 et « Lamour » de 2006. Cependant, le caractère international inhérent aux compétitions sportives réclamait la mise en place d'un instrument juridique incontestable.
C'est pourquoi le Comité international olympique a organisé à Lausanne, en février 1999, une conférence mondiale sur le dopage dans le sport, qui a réuni des représentants du mouvement sportif et des gouvernements. Cette conférence a rapidement conduit à la mise en place, en novembre 1999, de l'Agence mondiale antidopage, qui a le statut de fondation de droit privé suisse.
Cette agence est notamment chargée d'établir une liste de référence des produits considérés comme dopants, périodiquement mise à jour. Elle a également défini un cadre pour les politiques et règlements antidopage élaborés par les organisations sportives et les autorités publiques. Ce code, entré en vigueur le 1er janvier 2004, avait fait l'objet d'une résolution à Copenhague, en 2003, par laquelle 163 États le reconnaissaient comme texte de référence à l'échelon mondial. En juin 2006, selon les derniers chiffres disponibles sur le site Internet de l'AMA, ces États étaient au nombre de 186, ce qui montre l'engagement d'un nombre croissant de pays dans cette lutte contre le dopage.
Pour produire des effets, cette résolution devait être confortée par un instrument juridique de nature à engager formellement les États. L'UNESCO a ainsi été chargée d'élaborer une convention internationale contre le dopage dans le sport, adoptée le 19 novembre 2005. C'est ce texte que nous examinons aujourd'hui.
Cette convention a pour objet principal de conférer un socle juridique incontestable à l'Agence mondiale antidopage. La convention dispose qu'elle entrera en vigueur lorsque trente États l'auront ratifiée, approuvée, acceptée ou y auront adhéré, selon les procédures en vigueur dans chaque pays. C'est d'ores et déjà le cas, et la convention entrera donc en vigueur le 1er février 2007.
Cette rapidité s'explique par deux raisons principales.
D'une part, les États premiers signataires feront partie du comité de suivi de la convention, qui sera mis en place au début du mois de février 2007, lors d'une réunion qui se tiendra à Paris, à l'UNESCO. J'espère fermement, monsieur le ministre, que vous siégerez au sein de ce comité au nom de la France.
D'autre part, il a été décidé par tous les acteurs représentés au sein de l'AMA que les États qui n'appliqueront pas les principes du code ne pourront plus organiser de compétitions internationales sur leur sol.
Mme Hélène Luc, rapporteur. Vous venez, monsieur le ministre, de faire une analyse très complète du contenu de cette convention et de ses mécanismes juridiques. Je me bornerai donc à en souligner les principales dispositions.
La première d'entre elles est qu'un sportif français participant à une compétition nationale sur le sol français sera, en cas de contrôle positif révélé par l'Agence française de lutte contre le dopage, sanctionné par la fédération nationale compétente, sous réserve du rejet d'un éventuel appel de sa part auprès des juridictions administratives. Cette fédération nationale avisera la fédération internationale correspondante de cette sanction. À son tour, cette dernière pourra prendre des sanctions, qui seront elles-mêmes susceptibles d'appel devant le tribunal arbitral international.
Par ailleurs, le code mondial antidopage prévoit une automaticité des peines qui peut sembler étrangère aux principes généraux du droit français. Cependant, le Conseil d'État a accepté cette disposition parce que ces peines sont instaurées non par la convention elle-même, mais par les décrets portant réglementations disciplinaires des fédérations sportives, qui sont délégataires de service public.
Le sportif incriminé pourra ainsi contester son éventuelle sanction, ainsi que les analyses médicales qui la fondent, devant les juridictions administratives. Encore faut-il s'assurer que les échantillons soient durablement conservés, dans des conditions permettant un nouveau contrôle, c'est-à-dire à très basse température - à moins trente degrés, me semble-t-il -, comme peut le faire le laboratoire de Châtenay-Malabry, connu pour ses techniques de pointe. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer quelles mesures, y compris d'ordre financier, vous comptez prendre en ce sens ?
De plus, le code mondial antidopage prévoit la possibilité de moduler les peines automatiques en fonction de « circonstances exceptionnelles ».
Nos principes juridiques sont donc respectés. L'automaticité des peines a été retenue pour éviter que, sous des influences diverses, les fédérations nationales ou internationales ne prennent des sanctions purement symboliques, ce qui ruinerait leur autorité morale et compromettrait le caractère effectif de la répression.
Quoi qu'il en soit, la lutte contre le dopage, je tiens à le souligner, a toujours été longue et difficile et elle le restera, comme en témoignent les derniers développements intervenus dans ce domaine.
À cet égard, j'ai en mémoire la persévérance de Mme Marie-George Buffet pour imposer son projet de loi, qui a d'ailleurs été adopté à l'unanimité en première lecture au Sénat, de même que le vôtre en 2005, monsieur le ministre. Ayant participé à l'élaboration de la loi de 1999 en concertation avec le mouvement sportif, représenté notamment par M. Henri Sérandour, président du Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, je puis témoigner de l'engagement actif de ce dernier et de la contribution qu'il a apportée.
La dérive du dopage n'est malheureusement toujours pas écartée, et les progrès de la biotechnologie contribuent à rendre celui-ci encore plus difficile à détecter. Les éléments d'information très complets que vous m'avez présentés, monsieur le ministre, lors de notre rencontre au Sénat le 19 décembre dernier, m'ont permis d'apprécier la force de votre engagement dans la lutte contre le dopage.
Toutefois, ce phénomène condamnable du dopage ne doit pas nous faire oublier les milliers, pour ne pas dire les centaines de milliers de sportifs qui s'épanouissent, physiquement et moralement, par la pratique du sport. Il ne doit pas non plus nous faire oublier le dévouement de tous les bénévoles, auxquels nous ne rendrons jamais assez hommage.
Cette lutte est difficile, mais nous devons cependant inlassablement rappeler que la dignité du sport réside dans la volonté de se mesurer aux autres compétiteurs et qu'il importe de garder toute sa noblesse à cette joute.
C'est pourquoi il est si important de développer la pratique du sport dès l'école, en particulier dans le cadre des associations sportives regroupées au sein de l'Union nationale du sport scolaire, l'UNSS, car c'est très jeune que s'acquiert la notion de respect mutuel.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous invite, mes chers collègues, à adopter le projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport, qu'il était utile de discuter en séance plénière sans recourir à la procédure d'examen simplifiée. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M. le président de la commission des affaires culturelles applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Dufaut, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le baron Pierre de Coubertin déclarait que « le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre ». En effet, si nous supprimons la peur, la fatigue et la difficulté, le sport n'existe plus ! L'enjeu de la lutte contre le dopage est précisément de préserver ces aspects, qui sont l'essence même du sport.
Il est pourtant vrai, monsieur le ministre, que l' « omerta » a longtemps prévalu dans le milieu sportif s'agissant du dopage, notamment dans les compétitions internationales. Certaines nations organisaient même le dopage collectif de leurs sportifs à des fins de gloire nationale ! Des sportifs admettaient d'ailleurs le principe du dopage. À titre d'exemple, Jacques Anquetil avait déclaré, en 1967 : « Il faut être un imbécile ou sacrément faux jeton pour s'imaginer qu'un cycliste professionnel qui court 235 jours par an, par toutes les températures et dans toutes les conditions, peut tenir le coup sans stimulants. »
Après plusieurs scandales médiatiques, notamment l'affaire Festina lors du Tour de France de 1998, plusieurs États, au premier rang desquels la France, ont fait de la lutte antidopage un enjeu primordial. Jouer franc jeu est donc devenu un objectif.
Cependant, la presse et les médias, comme l'a indiqué Mme Luc, nous rappellent au quotidien que le dopage est tristement au coeur de l'actualité sportive : la semaine dernière, c'était le verdict du procès Cofidis, puis la révélation du contrôle positif au salbutamol d'Oscar Pereiro, deuxième du Tour de France de 2006, remporté par Floyd Landis, lui aussi accusé de dopage. Je n'évoquerai pas tous les coureurs, de plus en plus nombreux, qui, sous couvert d'autorisations d'usage à des fins thérapeutiques pour des problèmes d'asthme d'effort, prennent des médicaments interdits.
Devant cet amoncellement de problèmes qui touchent le cyclisme, je me demande ce que sera le Tour de France de 2007. En effet, c'est au moins la huitième année consécutive que le vainqueur est suspecté de dopage, et l'on envisage de remettre dans le circuit Ivan Basso et Jan Ullrich ! Ce matin encore, L'Équipe a publié un article sur les aveux du champion flamand Johan Museeuw. La Grande Boucle, qui est pourtant l'événement sportif le plus populaire en France, est bien malade. C'est dommage !
Cela étant, il ne faut pas se focaliser sur le cyclisme, même si l'année 2006 a été assez noire dans cette discipline, car, hélas ! tous les sports sont touchés, pas seulement l'univers professionnel d'ailleurs : même le monde amateur est frappé par le fléau du dopage. En athlétisme, sport de base par excellence, Hind Dehiba, détentrice du record de France du 1 500 mètres, a été arrêtée à la douane voilà trois jours, ainsi que son mari, en possession d'hormones de croissance.
Ce qui se passe actuellement est dramatique. Or qu'a-t-on fait, depuis dix ans, pour lutter contre le dopage ?
Après la loi de 1999, qu'il faut saluer, la présente législature a permis de donner une ampleur nouvelle à la lutte contre le dopage. En octobre 2005, le Sénat adoptait le projet de loi relatif au dopage et à la protection de la santé des sportifs, qui modernisait considérablement les outils juridiques en matière de lutte antidopage. J'avais d'ailleurs eu l'honneur d'être désigné rapporteur de ce texte par la commission des affaires culturelles.
Quelques mois après la promulgation de la loi, le 5 avril 2006, la présente convention internationale permet d'harmoniser les législations. Je me félicite de ce que la commission des affaires culturelles se soit saisie pour avis du présent projet de loi.
À l'échelon international, c'est en mars 2003 que près de quatre-vingts gouvernements, dont celui de la France, ont témoigné, en signant la résolution de Copenhague, de leur volonté d'appuyer un processus conduisant à la mise en place d'une convention internationale de lutte contre le dopage, devant être exécutée au moyen d'instruments propres aux États. C'est sur cette base qu'a été engagée, sous l'égide de l'UNESCO, l'élaboration de la présente convention internationale contre le dopage dans le sport, finalement adoptée en 2005. Cette convention devait être applicable au premier jour des jeux Olympiques d'hiver de Turin, ce qui n'a malheureusement pas pu être le cas, mais elle le sera pour les jeux Olympiques d'été de Pékin.
Parallèlement à cette coopération interétatique, le Comité international olympique a mené une consultation transnationale sur la question, qui a abouti à la création de l'Agence mondiale antidopage en 1999 et à l'adoption du code mondial antidopage en 2003.
Ce code détermine les compétences et fixe les règles en matière d'organisation des contrôles antidopage, d'analyse des échantillons, de mise en oeuvre des procédures disciplinaires, de régime des sanctions, de prévention et de recherche scientifique dans le domaine de la lutte contre le dopage. Émanant d'une fondation de droit privé, il n'a cependant pas de valeur juridique s'imposant aux États.
Par conséquent, si l'ensemble des fédérations internationales des sports olympiques ont souscrit au code mondial antidopage avant les jeux Olympiques d'Athènes de 2004 - il s'agissait de l'une des conditions de participation à ces derniers -, les fédérations nationales obéissent, en revanche, aux règles fixées par la loi du pays. L'un des objectifs visés au travers de la loi du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs était précisément d'aligner la législation française sur certaines dispositions du code mondial antidopage.
Toutefois, dans un contexte de sport mondialisé, pour assurer une égalité de tous les sportifs, sur tous les terrains de jeu, c'est bien le droit international qu'il fallait « doper », si j'ose dire ! selon deux impératifs : harmoniser les règles et essayer de les rendre contraignantes, ce qui n'est pas le plus facile.
La convention internationale contre le dopage dans le sport, élaborée sous l'égide de l'UNESCO et adoptée par les États membres à l'unanimité en octobre 2005, répond pleinement à ces exigences.
En effet, la convention a pour objet, d'une part, de fournir un cadre juridique reconnu à l'échelon international, afin de garantir que les gouvernements agissent contre le dopage dans le sport, en coopération avec le mouvement sportif, par des actions antidopage, nationales et internationales, notamment dans les domaines de l'éducation, de la formation et de la recherche, et, d'autre part, d'étayer le code mondial antidopage et les normes internationales définies par l'Agence mondiale antidopage, en reconnaissant l'importance de ces documents dans l'harmonisation des politiques et des pratiques dans le mouvement sportif international.
Cette convention, mes chers collègues, est donc nécessaire pour que les gouvernements appliquent les principes fixés dans le code mondial antidopage et pour faciliter l'alignement des réglementations nationales et internationales. Il y a en outre des mesures que seuls les gouvernements peuvent prendre pour combattre le dopage dans le sport, s'agissant par exemple de la disponibilité des substances interdites et des méthodes ou encore de l'étiquetage des suppléments alimentaires.
Cette harmonisation des différentes normes en matière de dopage se manifeste sur plusieurs points.
Est ainsi considérée comme une violation des règles antidopage, aux termes de l'article 2 de la présente convention, mais aussi de l'article 2 du code mondial antidopage, la présence dans le corps d'un sportif d'une substance interdite, de ses métabolites ou de ses marqueurs. Il s'agit du cas le plus courant. Ainsi, Floyd Landis fut déclaré positif à la testostérone à l'occasion du Tour de France de 2006.
Par ailleurs, la convention reprend la règle de la responsabilité objective existant dans le code mondial antidopage et en droit français : il y a violation lorsque le sportif a, intentionnellement ou non, fait usage d'une substance interdite, a fait preuve de négligence ou lorsqu'un autre manquement est survenu. Lorsqu'un échantillon a été déclaré positif à la suite d'une compétition, les résultats du sportif sont alors automatiquement annulés.
Le refus de se soumettre à un prélèvement d'échantillon, le non-respect des exigences posées en matière de disponibilité des sportifs pour les contrôles hors compétition, la falsification d'un élément du processus de contrôle du dopage, le trafic ou l'administration de toute substance interdite constituent une autre forme de violation des règles antidopage. Les sportifs ne sont pas seuls à être concernés : les entraîneurs et les médecins le sont également, comme c'est le cas dans les affaires Balco et Puerto.
Les articles 3 et 4 de la convention affirment clairement que le code mondial antidopage est le texte de référence en matière de lutte contre le dopage. Les États parties doivent « adopter des mesures appropriées aux niveaux national et international qui soient conformes aux principes énoncés dans le Code » et « s'engagent à respecter les principes énoncés dans le Code ». Ainsi, la convention ne réinvente pas le droit en matière de lutte contre le dopage, ce qui est heureux, mais elle promeut des principes et des règles déjà existants.
Il est toutefois précisé que le texte du code ne fait pas partie intégrante de la convention. En clair, une réelle marge est laissée aux États signataires de la convention, entre la mise en oeuvre à la lettre du code et l'application des principes qu'il pose.
Cette précision est d'autant plus utile que le code mondial antidopage est un texte évolutif, comme l'a rappelé M. le ministre. Aux termes de l'article 4, rien n'empêche les États d'adopter des mesures additionnelles ou complémentaires au code. À cet égard, je me félicite de ce que la France ait mis en place un dispositif spécifique de lutte contre le dopage animal en 2005.
En outre, la convention précise que ses dispositions ne s'opposent pas aux textes européens en vigueur.
Je tiens par ailleurs à souligner que la législation et la pratique françaises répondent pleinement aux exigences de la convention, grâce notamment à l'adoption de la loi du 5 avril dernier.
En effet, cette loi a mis en place, en particulier, l'organisation antidopage évoquée à l'article 7 de la convention, qui prend la forme de l'Agence française de lutte contre le dopage, présidée par Pierre Bordry, qui n'est pas un inconnu dans notre maison. Cette agence dispose d'une compétence générale à l'échelon national. Elle bénéficie en outre d'une indépendance et de pouvoirs accrus, s'agissant des contrôles et des sanctions.
En ce qui concerne les règles de territorialité, la loi a repris le principe issu de l'article 15.1 du code mondial antidopage : toutes les compétitions ou manifestations sportives de niveau international, quel que soit le lieu où elles sont organisées, relèvent du pouvoir de contrôle et de sanction des institutions internationales.
C'est ainsi que lors de la prochaine Coupe du monde de rugby, qui se déroulera en France, les sportifs contrôlés seront soumis aux procédures disciplinaires de l'International Rugby Board, l'IRB, et non à celles de la Fédération française de rugby ou de l'Agence française de lutte contre le dopage. Cette dernière n'aura comme pouvoirs de contrôle que ceux que lui aura délégués l'IRB.
Le droit français prévoit aussi, comme la Convention dans son article 8 ainsi que le Code mondial antidopage, la délivrance d'autorisations à usage thérapeutique, les fameuses AUT. L'ensemble des acteurs a choisi de n'utiliser comme liste des substances et procédés dont l'usage peut être autorisé que celle de l'Agence mondiale antidopage, qui devient donc un standard international.
La Convention comprend, par ailleurs, des prescriptions relatives à l'éducation et à la formation en matière de lutte antidopage, que la France met pour la plupart déjà en oeuvre, grâce aux différentes actions menées par le ministère des sports. Ces mesures concourent à la prévention.
La politique de recherche est également encouragée, ce qui ne peut qu'être salué. Je rappelle à ce titre que l'Agence française de lutte contre le dopage mène différents projets de recherche, en partenariat avec des instituts de recherche, des laboratoires ainsi que des universités.
C'est le fameux Laboratoire national de dépistage du dopage de Châtenay-Malabry, que notre commission avait visité voilà trois ans, qui a mis au point la méthode permettant de détecter la présence de l'EPO dans les urines. Je suis particulièrement attaché au renforcement des capacités du laboratoire d'analyses, afin de pallier les quelques insuffisances que nous avions relevées à l'époque.
Je voudrais faire une remarque à propos du bilan de l'Agence pour l'année 2005. Le nombre de contrôles réalisés par l'Agence augmente tandis que le nombre de sportifs déclarés positifs diminue. Il me paraît nécessaire de clarifier les causes de ce phénomène paradoxal, en améliorant en permanence la pertinence et la qualité des contrôles.
La récente mise en place de l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport au sein de l'INSEP par M. le ministre des sports répond également aux attentes exprimées dans la Convention.
À travers ces exemples, il est clair que la législation et la pratique administrative françaises répondent de manière efficace aux exigences de la présente convention, notamment depuis l'adoption de la loi du 5 avril 2006.
On peut toutefois regretter, monsieur le ministre, que trois des cinq décrets d'application de cette loi n'aient toujours pas été publiés, ce qui nuit à l'efficacité de la lutte antidopage menée par votre ministère et par l'AFLD. Nous en avions discuté à l'occasion de votre audition devant notre commission des affaires culturelles : il me paraît fondamental d'accélérer la publication de ces décrets.
Enfin, pour mettre en valeur un apport original de la Convention, citons l'article 17 qui prévoit la création d'un « Fonds pour l'élimination du dopage dans le sport », financé par des contributions volontaires et utilisé pour l'application de la Convention. Le fait que le mécénat ou les sponsors puissent aider à la lutte contre le dopage me semble une bonne chose. Les sociétés qui s'impliqueront financièrement dans cette lutte pourront ainsi valoriser leur image.
En dépit des nombreuses convergences constatées, la question de la compatibilité entre le Code mondial antidopage, largement repris par la Convention, et le droit français a été posée, notamment par la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale. Dans son propos introductif, le ministre a rappelé avec précision les points de compatibilité avec notre droit et il a présenté quelques garanties ; je n'y reviens pas.
Il est vrai que la fixation de sanctions automatiques, la procédure d'appel, ainsi que le cas des sportifs internationaux posaient problème. Tout est clair désormais et, pour reprendre les propos employés par le ministre à l'Assemblée nationale, « chacun est maître chez soi » ; les décisions des fédérations internationales et du Tribunal arbitral du sport, le TAS, ne s'appliqueront que pour les compétitions internationales.
La commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a finalement adopté ce projet de loi, suivie à l'unanimité en séance publique par nos collègues députés.
Bien évidemment, j'estime que ce débat juridique ne doit pas nous amener à repousser l'adoption de ce projet de loi, dans la mesure où je suis pleinement favorable à la ratification de la Convention, surtout dès lors que quarante-deux pays ont déjà ratifiée en seulement deux ans, ce qui constitue presque un record en la matière.
C'est d'autant plus urgent que la Convention entre en vigueur le 1er février prochain, à la suite de sa ratification par le Luxembourg le 11 décembre dernier.
La ratification permettra de plus à la France de continuer à jouer un rôle moteur en matière de lutte antidopage et, plus prosaïquement, de participer aux travaux du comité de suivi de la convention, qui auront lieu les 5, 6 et 7 février prochains à Paris.
Notre commission des affaires culturelles a donc donné à l'unanimité un avis favorable à l'adoption du présent projet de loi, le 17 janvier dernier.
Il serait toutefois utile, monsieur le ministre, que l'interprétation des dispositions quelque peu litigieuses soit clarifiée à l'occasion de l'actualisation du Code mondial antidopage, lors de la conférence qui se tiendra au mois de novembre prochain à Madrid.
Permettez-moi pour conclure de dire combien nous apprécions l'implication totale et déterminée de M. le ministre dans le combat contre le dopage. Il a fait de la lutte contre ce fléau qui dénature le sport l'une des priorités de son ministère. Il vient également d'accepter la responsabilité de la vice-présidence de l'Agence mondiale antidopage, l'AMA.
Personnellement, pour avoir eu le privilège, au nom de la commission des affaires culturelles, de suivre le dossier du dopage depuis 2004, je ne peux que rendre hommage à l'action de Jean-François Lamour et lui assurer que, dans cette lutte antidopage, le Sénat sera toujours à ses côtés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.- Mme le rapporteur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, avec la ratification de cette convention internationale contre le dopage dans le sport, nous arrivons au terme d'un long processus. Nous nous félicitons que la France y ait joué un rôle très important.
Depuis des décennies, notre pays a mis en place des procédures antidopage pour tenter d'éradiquer ces pratiques contraires à l'éthique sportive et qui mettent en danger la santé des sportifs. Force est de constater que notre pays a longtemps été isolé, internationalement, dans ce combat.
Dans ce contexte, cette volonté aujourd'hui affichée par l'ensemble des fédérations sportives internationales et de très nombreux pays de respecter les règles édictées par l'Agence mondiale antidopage constitue une avancée importante, que nous saluons.
Pour donner force de loi à ces dispositifs réglementaires au sein du mouvement sportif, il fallait une convention internationale qui engage les États dans la mise en oeuvre des lois nécessaires à l'application du code antidopage. C'est maintenant chose faite, et nous nous en félicitons.
À cette occasion, qu'il me soit permis de rendre hommage à votre prédécesseur, monsieur le ministre, mon amie Marie-George Buffet. Comme ministre des sports, elle a participé activement à la prise de conscience européenne et mondiale de la nécessité de combattre ce fléau. Chacun se souvient encore de ses déclarations et de son action contre le dopage.
Au cours de son mandat, des pas décisifs ont été franchis, en particulier avec la loi de 1999. Pourtant, ce ne fut pas toujours facile. Ici même, des voix s'élevaient pour craindre que la France ne s'isole du fait de cette volonté farouche d'endiguer ce phénomène. Malgré cela, elle a maintenue le cap en France et a particulièrement soutenu les forces qui, au sein du Comité international olympique, souhaitaient la tenue d'une conférence internationale sur ce problème. Finalement, cette conférence se déroula à Lausanne en 1999 et s'est traduite par la mise en place de l'Agence mondiale antidopage.
Ainsi donc, la fin des années quatre-vingt-dix, sous l'impulsion de Marie-George Buffet, aura été décisive dans la prise de conscience et l'action contre le dopage.
La Convention internationale que notre pays va ratifier est le résultat de cette volonté politique d'origine, mais aussi, évidemment, de votre intervention continue sur cette question, monsieur le ministre.
Si cette convention est un aboutissement, il ne faut pas qu'elle soit une fin. Au contraire, elle doit marquer le début d'une nouvelle étape dans l'action contre le dopage. C'est pourquoi la France doit rester à la pointe dans ce combat. Il reste de nouvelles actions à mener.
Il faudra agir pour que les règles édictées deviennent intangibles pour tous, en confortant le rôle de l'AMA, mais aussi en faisant de la France un levier, un soutien à l'action de nombreuses autres nations qui sont prêtes à s'engager bien qu'elles n'aient ni l'expérience ni les moyens de notre pays.
Cette coopération internationale doit devenir un axe de développement de nos politiques de coopération. Tout en confortant l'AMA, il faudra poursuivre notre action pour y faire progresser les réglementations.
Ainsi, il sera nécessaire de réviser encore la liste des produits et des pratiques interdites, tant l'on sait que les tricheurs et les trafiquants ont bien souvent un coup d'avance sur les réglementations.
Dans le même temps, il faudra mieux encadrer et contrôler les autorisations à usage thérapeutique qui, si l'on n'y prend pas assez garde, deviendront des autorisations au dopage.
Or cela nécessite des moyens qui ne sont pas encore mis en place, y compris dans notre pays. D'ailleurs, au moment où nous adoptons cette convention, l'actualité nous rappelle qu'il ne faut pas baisser les bras devant ces pratiques.
En conclusion, si nous tenons à nous féliciter une nouvelle fois du contenu de cette convention, notre soutien se double d'un appel à la vigilance et à l'action. Restons à l'offensive, ne baissons pas la garde ! (Applaudissements sur le banc des commissions.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Lamour, ministre. Madame Hélène Luc, vous avez évoqué l'Union nationale du sport scolaire, l'UNSS ; elle fait partie de nos priorités. En tant que ministre des sports, j'entretiens d'excellentes relations avec son directeur délégué, M. Jean-Louis Goujon, en particulier sur l'opération « jeunes officiels », qui constitue une très bonne passerelle entre le monde scolaire et celui des clubs classiques.
Simplement, comme l'a rappelé Gilles de Robien, parmi les 35 000 professeurs d'éducation physique et sportive, il en est qui n'exercent aucune activité dans le cadre d'associations sportives. Ceux-là pourraient utiliser les trois heures ainsi libérées pour des cours d'éducation physique et sportive. Tel est le sens des propos de M. de Robien. Il n'a en aucun cas remis en cause l'activité de l'UNSS. Il est persuadé, comme moi, qu'elle est un excellent complément en matière d'éducation.
Vous citiez des marques de vins qui vantaient le supplément de force que leur produit offrait aux cyclistes. Un expert en matière de lutte antidopage m'avait fait remarquer que le fameux dictionnaire Vidal, dans une édition datant d'avant 1910, faisant référence à un produit contenant de la strychnine, indiquait : « bon pour les cyclistes » ! Vous le voyez, la pharmacopée était hélas ! déjà aux côtés de ces malheureux sportifs.
Mais revenons à l'essentiel. Madame Luc, vous avez évoqué l'allongement de la conservation des prélèvements, en particulier des flacons d'urine. Aujourd'hui, ils sont conservés huit ans pour les contrôles effectués par le CIO dans le cadre des jeux Olympiques, mais trois mois pour les autres compétitions.
Je rappelle quelques éléments techniques : la conservation nécessite une température de moins vingt degrés pour les prélèvements d'urine, de moins quatre-vingts degrés pour le sérum et de quatre degrés pour le sang. On se souvient du cas Hamilton aux Jeux d'Athènes : les prélèvements de sang, conservés en dessous de zéro degré, étaient malheureusement devenus inutilisables.
Mme Hélène Luc, rapporteur. C'est vrai !
M. Jean-François Lamour, ministre. Heureusement, le dopage a pu être révélé autrement.
Il est effectivement envisagé, dans le Code mondial antidopage, de prolonger jusqu'à huit ans la période de conservation. C'est une excellente initiative, que j'ai d'ailleurs soutenue en tant que membre de la commission exécutive. Il s'agit en effet d'une véritable épée de Damoclès pour les tricheurs qui se croient protégés parce que leurs produits ne sont pas détectés aujourd'hui. Eh bien non ! Huit ans plus tard, nous pourrons chercher des produits que nous aurons appris à détecter. Nous mettons ainsi un filet supplémentaire au service de la lutte antidopage.
Lorsque le Code aura adopté ce principe, déjà retenu par le CIO, il sera de la responsabilité de l'AFLD - qui exerce maintenant la tutelle sur le Laboratoire, lequel externalise une partie de cette conservation - de présenter un programme de conservation lié aux décisions communes de l'Agence mondiale antidopage et des fédérations internationales ou nationales.
Des sports, populations et compétitions cibles seront certainement définis, voire certaines périodes cibles en dehors des compétitions, pour lesquels il sera décidé d'un commun accord de garder les flacons.
Il ne s'agit donc pas de conserver neuf milles flacons par an, mais beaucoup moins, sur des populations ou des sports ciblés. Lorsque cette mesure sera en vigueur, il reviendra à l'AFLD de présenter un budget prévisionnel. Je rappelle simplement que cette agence est aujourd'hui dotée d'un budget de 7,18 millions d'euros, dont 4,1 millions d'euros sont destinés au fonctionnement du laboratoire.
J'en profite pour répondre à M. Voguet, qui a évoqué la coopération internationale, en particulier avec des pays en voie de développement. Sachez, monsieur le sénateur, que l'Agence mondiale antidopage a créé un bureau régional en Afrique du Sud afin de couvrir l'ensemble du continent africain et commence à travailler à l'installation de points de lutte antidopage, à la formation de médecins préleveurs et d'éducateurs.
Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez indiqué que le nombre de contrôles antidopage pendant les compétitions ou en dehors était en forte augmentation. C'est vrai qu'ils sont passés d'un peu plus de 6 000 en 2002 à 9 000 cette année. Paradoxalement, le nombre de cas positifs stagne ou est en légère diminution. Peut-être la peur du gendarme rend-elle les sportifs beaucoup plus prudents sur notre sol. Quoi qu'il en soit, vous l'avez fort justement rappelé, plusieurs affaires très médiatisées nous rappellent qu'il s'agit là d'un combat permanent et que nous ne devons en aucun cas relâcher notre effort.
Par ailleurs, vous avez regretté que trois des cinq décrets d'application de la loi du 5 avril 2006 n'aient pas été publiés. En fait, il ne s'agit que de deux décrets. En 2006, ont été publiés le décret relatif aux procédures et sanctions disciplinaires en matière de lutte contre le dopage humain, le décret relatif aux conditions d'agrément et de fonctionnement des antennes médicales de prévention du dopage - ces antennes médicales sont très importantes, car elles favorisent la prévention, notamment grâce au numéro vert « Écoute dopage » - et le décret relatif à la lutte contre le dopage des animaux participant à des compétitions organisées ou autorisées par les fédérations sportives, domaine où, là aussi, des problèmes existent.
Comme je viens de l'indiquer, il reste deux décrets à publier : le décret relatif aux prélèvements et contrôles et le décret relatif aux autorisations d'usage à des fins thérapeutiques. À cet égard, il faudra certainement revoir les critères de ces fameuses AUT sur le plan tant national qu'international. C'est l'un des enjeux de l'actualisation du code. En tout cas, nous nous y employons.
Pour illustrer ce sujet, vous avez évoqué l'actualité avec le cas Pereiro. Il convient d'être précis. Oscar Pereiro Sio n'a pas été contrôlé positif, il est simplement soupçonné de dopage. Un produit interdit a en effet été détecté dans ses urines, et il a un peu traîné pour envoyer les documents justificatifs à l'AFLD. Maintenant qu'il semble les avoir fournis, attendons d'en connaître le contenu. Je rejoins donc mon homologue, le ministre espagnol des sports, Jaime Lissavetzky Diez, pour dire que l'AFLD doit statuer le plus vite possible afin de savoir si oui ou non l'AUT est valable. Il semble que l'UCI ait décidé que tel était le cas.
Pour en revenir aux deux décrets, le Conseil d'État en a été saisi en décembre. Avant d'émettre son avis, il doit au préalable procéder à plusieurs consultations, dont celle de l'AFLD, ce qui explique le laps de temps qui précède leur publication. En outre, le président de l'AFLD, M. Bordry, avait demandé que le décret relatif aux AUT ne soit pas publié avant janvier 2007 pour des raisons pratiques tenant à sa mise en oeuvre. Nous avons donc, en quelque sorte, respecté cette demande.
Toutefois, vous avez entièrement raison, ces impératifs doivent se concilier avec la charge très importante en ce moment du Conseil d'État. Comme vous le savez, M. Bordry est lui-même conseiller d'État, membre de la section de l'intérieur. Je ne doute pas un instant qu'il fera tout afin que ces décrets soient examinés le plus rapidement possible par les rapporteurs et ceux qui sont conduits à émettre cet avis.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Hélène Luc, rapporteur. Je prends acte de la réponse que vous m'avez faite, monsieur le ministre, au sujet de l'UNSS, et je m'en réjouis. S'il s'agit d'appeler les professeurs d'éducation physique à développer les associations sportives, on ne peut en effet qu'être d'accord. De la même façon, j'espère que l'éducation physique et sportive continuera à être présente à l'école. D'ailleurs, c'est un point sur lequel vous ne m'avez pas répondu. Les professeurs d'éducation physique sont très inquiets, et je voulais vous en faire part.
S'agissant des laboratoires, ma question ne portait pas seulement sur la France, elle avait également un aspect international. Mais je suis sûre que vous me confirmerez que la possibilité de conservation sera bien la même dans tous les laboratoires.
Mme Hélène Luc, rapporteur. Merci, monsieur le ministre, de la clarté de votre réponse.
Tout ce que nous avons dit aujourd'hui montre combien nous devons être vigilants dans la lutte contre le dopage, que nous sommes bien décidés à mener tous ensemble. Par exemple, j'ai à l'esprit ce qui vient d'arriver à cette sportive, Hind Dehiba, championne de France du 1 500 mètres. On ne sait pas encore exactement ce qu'il en est, mais je dois dire que je souffre quand j'apprends de telles nouvelles.
M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique.
Article unique
Est autorisée la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport (ensemble deux annexes), adoptée à Paris le 19 octobre 2005, dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
M. le président. J'observe que ce texte a également été adopté à l'unanimité des présents.
Belle matinée où tous les textes ont été adoptés à l'unanimité. Monsieur le ministre, vous devriez venir plus souvent. (Sourires.)
7
candidatures à des COMMISSIONs MIXTEs PARITAIREs
M. le président. J'informe le Sénat que la commission des lois m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique et du projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.
Cette liste a été affichée conformément à l'article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.
8
nomination d'un membre d'un ORGANISME extraPARLEMENTAIRE
M. le président. Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame Mme Christiane Kammermann membre de la commission permanente pour l'emploi et la formation professionnelle des Français de l'étranger.
9
Communication relative à des questions orales
M. le président. J'informe le Sénat que pourraient être inscrites à l'ordre du jour de la séance du mardi 6 février 2007 les questions orales suivantes :
- n° 1227 de Mme Alima Boumediene-Thiery,
- n° 1234 de Mme Jacqueline Alquier,
- n° 1239 de Mme Claire-Lise Campion,
- et n° 1240 de Mme Adeline Gousseau.
Il n'y a pas d'opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Philippe Richert.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
10
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l'auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente. Je serais heureux que les uns et les autres respectent le temps de parole imparti.
situation du liban
M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Robert Del Picchia. Madame la ministre déléguée, cette question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères, mais je suis très heureux de vous la poser.
La conférence des donateurs pour le Liban, qui se tient en ce moment même à Paris, semble être la dernière chance offerte à ce pays pour surmonter la crise financière qui le frappe.
Le Liban est confronté à une crise non seulement politique - nous allons y revenir -, mais aussi économique et financière.
La dette publique était de 2,3 milliards d'euros en 1992. Elle n'a cessé de croître et elle s'élève aujourd'hui à plus de 40 milliards de dollars.
Beyrouth doit rembourser plus de 5 milliards d'euros cette année et 7 milliards d'euros l'année prochaine.
La reprise de l'économie est retombée à cause des conflits. Celui de l'été dernier a coûté 2 milliards d'euros en pertes directes. Le pays court à la banqueroute.
Cette conférence de Paris, organisée sur l'initiative du Président de la République, est donc une bouée de sauvetage. Pourtant, à la veille de cette conférence, l'opposition libanaise a lancé un appel à la grève, bloqué les principaux axes routiers, et des affrontements violents ont fait trois morts et plus de 140 blessés ! À l'instant, des bagarres ont éclaté à l'université arabe de Beyrouth et la police est intervenue.
Les compagnies d'aviation ont interrompu leurs vols, des centaines de personnes ont été bloquées, les magasins, les écoles et les entreprises sont restés fermés.
Bref, on a retrouvé le Liban des mauvais jours !
Les mouvements chiites Hezbollah et Amal, mais aussi une partie de la communauté chrétienne divisée, exigent la démission du gouvernement de Fouad Siniora. Ce dernier réaffirme ne pas se laisser intimider. L'opposition veut des élections anticipées.
Se gardant d'intervenir dans la politique du Liban, le Président de la République craignait que ces manifestations ne découragent les donateurs qui veulent aider le Liban à survivre. Il a lancé un appel, et il a été entendu.
Mes chers collègues, le Président de la République vient d'annoncer que l'aide récoltée s'élève à 7,6 milliards de dollars, soit 5,8 milliards d'euros.
Madame la ministre déléguée, cette conférence, qui est placée sous le signe de la solidarité et de l'espoir, est donc très perturbée par le contexte politique et par la situation sur le terrain.
Malgré tout ce qui se passe, l'aide est au rendez-vous : la France et l'Union européenne sont intervenues.
Madame la ministre déléguée, comment la diplomatie française considère-t-elle cette situation et comment la France envisage-t-elle son action en faveur d'un pays qui, je le rappelle, mes chers collègues, est très proche de nous et dans lequel résident un grand nombre de nos compatriotes ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, le Liban, pays très cher à la France, traverse en effet une période de grande instabilité et de crise profonde.
Le conflit de l'été dernier a causé des dégâts massifs sur la plupart des infrastructures et a aggravé la situation économique et financière du pays.
De plus, depuis le mois de novembre dernier, le gouvernement de Fouad Siniora doit faire face à une crise politique.
Dans ce contexte, le gouvernement libanais a élaboré un programme de réformes économiques sur cinq ans, programme ambitieux et crédible qui exige le soutien de la communauté internationale.
Pour apporter un soutien concret à la reconstruction du Liban, le Président de la République a invité à Paris les représentants d'une quarantaine d'États et d'institutions financières, régionales et internationales.
Nous ne ménageons évidemment aucun effort, puisque, dans ce cadre, la France, comme l'a annoncé le Président de la République, mobilisera 500 millions d'euros sous forme de prêts à des conditions très avantageuses.
Au-delà, nous souhaitons voir se consolider les avancées de ces derniers mois, que je rappelle : retrait des troupes syriennes, organisation d'élections libres, constitution d'un gouvernement démocratique, adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies de la résolution 1701 sur l'initiative de la France, qui a permis la cessation des hostilités.
Sur l'initiative du Président de la République et sous son impulsion - nous connaissons tous son attachement profond pour le Liban et son implication personnelle auprès de tous les Libanais -, les amis du Liban se réunissent aujourd'hui et tentent d'apporter au gouvernement libanais un soutien pour le retour de la confiance et de la croissance économique.
Nous espérons tous que les contributions seront à la hauteur des enjeux de la reconstruction économique et politique du Liban. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, à la mi-journée, plus de 5 milliards d'euros étaient déjà mobilisés. Au-delà, bien sûr, de la reconstruction du Liban, c'est toute la stabilité de la région qui est en jeu.
Nous voulons croire que l'esprit de dialogue l'emportera, car, au Liban comme ailleurs, rien ne peut se régler dans la violence. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
logement social
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Le 22 janvier dernier disparaissait l'abbé Pierre.
Sa première construction, la maison du Pont, a été réalisée en 1950 dans ma commune, Neuilly-sur-Marne, en Seine-Saint-Denis.
Pour loger les sans-abri, l'abbé Pierre défiait alors souvent la loi en se passant de permis de construire.
Aujourd'hui, certains maires défient la loi en ne l'appliquant pas, mais cette fois pour ne pas construire de logements sociaux ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Récupération !
M. Jacques Mahéas. Vous nous proposez d'instituer le droit au logement opposable. C'est un point positif.
M. Alain Gournac. Ah ! Tout de même !
M. Jacques Mahéas. Mais, d'après l'idée que vous en avez, le préfet n'aura pas le choix : il devra puiser dans son contingent de logements sociaux, c'est-à-dire ajouter de la pauvreté dans des villes où l'équilibre est souvent fragile.
On touche donc là du doigt les limites de votre conception de la mixité sociale. Cette loi risque de n'être qu'une occasion de jeter de la poudre aux yeux !
Le vrai problème, c'est le manque criant de logements sociaux. Or il suffit d'appliquer la loi, et non de tâcher de l'abroger ou de la détourner.
L'abbé Pierre lui-même, en janvier 2006, dénonçait la volonté de certains élus de droite (Vives protestations sur les travées de l'UMP.) de remettre en cause l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, article qui prévoit 20 % de logements sociaux dans les communes.
M. Charles Gautier. C'est vrai !
M. Jacques Mahéas. Il est vrai que le sujet gêne plus à droite qu'à gauche !
Mme Christiane Hummel. Mentitude !
M. Jacques Mahéas. Ainsi, Neuilly-sur-Seine, ville de Nicolas Sarkozy, détient un triste record avec 2,6 % seulement de logements sociaux. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) À titre de comparaison, Neuilly-sur-Marne en compte 46 % !
Mme Christiane Hummel. Mentitude !
M. Jacques Mahéas. Comment croire le ministre de l'intérieur quand il affirme qu'en deux ans il résoudra le problème des personnes sans domicile fixe ? Il les mettra chez les autres, sans doute !
M. Charles Revet. Scandaleux !
M. Jacques Mahéas. Et ne m'opposez pas l'argument de l'absence de terrains constructibles. L'Indicateur Bertrand, que j'ai ici (M. Jacques Mahéas brandit la revue.), en trouve à foison ! Les maires de droite, principalement, seraient-ils moins doués pour dénicher ces terrains que les promoteurs privés ?
M. Alain Gournac. Nul !
M. Jacques Mahéas. Quant aux constructions réalisées, ne brandissez pas non plus des chiffres prétendument inégalés. Dans bien des cas, il s'agit d'opérations de démolition-reconstruction qui déplacent les populations en difficulté d'une zone urbaine sensible à une autre.
M. Alain Gournac. La question !
Mme Christiane Hummel. Oui, la question !
M. Jacques Mahéas. Nous l'avons démontré : en 2006, vous avez construit moins de logements très sociaux qu'en 2000 !
Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, il est tout à fait scandaleux que certaines communes n'aient strictement rien entrepris pour rattraper leur retard en matière de logements sociaux, ...
M. Alain Gournac. C'est long, monsieur le président !
M. Jacques Mahéas. ...et qu'elles préfèrent l'amende à la solidarité. Arrêtons de verser des larmes de crocodile !
M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Mahéas. Je constate que les élus de droite sont vraiment gênés !
M. le président. Non, vous avez simplement épuisé votre temps de parole, monsieur Mahéas !
M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour assurer une véritable mixité sociale, condition nécessaire à l'instauration d'un droit au logement opposable ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le sénateur de la Seine-Saint-Denis, je pensais très sincèrement que vous alliez vous féliciter de la signature ce matin du contrat territorial de rénovation urbaine entre Plaine Commune, le département de Seine-Saint-Denis et l'État. (M. Jacques Mahéas proteste.)
Mme Christiane Hummel. Bravo !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. C'est un programme de 4,2 milliards d'euros, sur les 35 milliards d'euros qui sont destinés, au titre du programme de rénovation urbaine, à transformer l'habitat, malheureusement assez indigne, dans un certain nombre de nos quartiers !
M. David Assouline. Pas à Neuilly-sur-Seine !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dites-nous surtout ce que vous allez faire !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Quoi qu'il en soit, monsieur le sénateur, vous n'avez pas l'air d'être informé de la signature de ce contrat.
M. Alain Gournac. Ils ont oublié ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Charles Revet. Ils n'étaient pas au courant !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. En matière de logement, monsieur Mahéas, permettez-moi de vous dire franchement ce que je pense.
Monsieur le sénateur, de 1981, année où François Mitterrand a été élu Président de la République, à 2002, année du départ de M. Jospin, ...
M. David Assouline. Remontez plus loin encore !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...soit sur plus de vingt ans, la gauche a en moyenne construit deux fois moins de logements sociaux que nous n'en construisons cette année ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les logements sociaux ? Vous en avez à vous seul supprimé plus que vous n'en avez construit !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Vous n'avez d'ailleurs pas plus construit de logements en général, puisque la France a enregistré en moyenne 270 000 permis de construire quand, dans la même période, nos amis Espagnols en comptaient 650 000 !
M. Guy Fischer. En Espagne, c'est de la spéculation !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Parlons-en, du modèle espagnol ! Ce sont des fonds de retraite : voulez-vous ruiner les petits retraités ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Avec la gauche au pouvoir, nous avons connu vingt ans de crise du logement !
M. Jacques Mahéas. Avec les municipalités de droite !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Monsieur Mahéas, j'en suis navré, mais je dois vous le dire, quand on a soutenu un gouvernement qui a à son palmarès l'année la plus noire depuis la guerre en matière de logements sociaux et qui, en plus, a raclé les fonds de tiroir du « 1 % logement » géré par les partenaires sociaux pour le logement social, on ne donne pas de leçons !
J'espère très franchement, alors que nous avons triplé le nombre des logements sociaux, que, dans les semaines à venir, sur le projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, vous essaierez, comme nous, d'avoir un débat républicain et de penser à l'avenir ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
les aides aux entreprises
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
Monsieur le ministre délégué, les aides publiques aux entreprises ont fait, au cours de ces derniers mois, l'objet d'une littérature aussi abondante qu'inspirée.
Ainsi, l'an passé, le rapport du Conseil d'orientation pour l'emploi constatait déjà l'absence de gouvernance d'ensemble et confirmait par ses chiffres et ses analyses ce que les destinataires des dispositifs pouvaient déjà constater par eux-mêmes : faiblesse des évaluations, opacité, technicité, poids de la procédure...
À titre d'exemple, je mentionnerai toute la difficulté pour une entreprise, aujourd'hui, de prouver qu'elle remplit bien les critères d'éligibilité à un statut comme celui de « jeune entreprise innovante ».
La presse d'hier a rendu compte de l'étude réalisée à la demande du Premier ministre. Les diagnostics chiffrés sont à l'avenant : les aides publiques aux entreprises, toutes origines cumulées - État, collectivités locales, Union européenne - ont représenté, en 2005, 65 milliards d'euros.
M. Roland Muzeau. Ils n'ont en jamais assez !
M. Philippe Nogrix. L'État y consacre, entre dépenses budgétaires, coups de pouce fiscaux et allégements de charges, pas moins de 57 milliards d'euros.
Ce n'est pas le montant qui nous pose problème. Les aides aux entreprises constituent autant de leviers qui relaient les priorités publiques en matière d'emploi, d'innovation, d'exportation, d'aménagement du territoire. Ce qui pose problème et suscite nos interrogations, c'est la cohérence, la lisibilité, l'efficacité et l'effectivité de ces aides.
L'étude en question ne recense pas moins de 6 000 dispositifs, sans gouvernance globale ni concertation, éparpillés, éclatés, selon les ministères ou les territoires.
Les « redondances » ou même les « contradictions » pointées par le rapport, de ce point de vue, n'étonneront personne. Sont, par exemple, recensés 120 dispositifs d'aide à la création d'entreprise.
Dans les faits, les auteurs soulignent que 10 % seulement de celles qui se créent en bénéficient. Il ne faut pas s'étonner, alors, que 80 % du montant total des aides soient de fait affectés aux grandes entreprises. Or, s'il est bien un objet à assigner à l'aide publique en ce domaine, c'est d'encourager et de promouvoir l'essor des PME, qui donnent au capitalisme son meilleur visage : création d'emplois, irrigation du territoire, responsabilité sociale...
Après les structures, les rapports, les études, il faut à présent agir. L'occasion vous en sera donnée, dès la prochaine conférence nationale des finances publiques, en créant, au sein du conseil d'orientation des finances publiques, un comité permanent pour la régulation et l'évaluation des aides aux entreprises, comme le préconise cette étude.
Au-delà, bien au-delà, comment comptez-vous faire, monsieur le ministre délégué, pour rationaliser le système actuel et le rendre plus lisible pour ses destinataires ? Quelle doit être l'articulation des rôles et des tâches entre une politique nationale et l'ensemble des niveaux de décision existants ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Nogrix, le Premier ministre a souhaité, il y a quelques mois, savoir quel était le montant exact de l'aide publique apportée à l'emploi, à la recherche et à l'innovation ainsi qu'aux actions visant à renforcer l'attractivité du territoire.
M. Roland Muzeau. Et surtout la spéculation !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Sa préoccupation était notamment de connaître l'effet de ces aides publiques sur l'emploi mais également sur les petites et moyennes entreprises. Le Gouvernement a en effet le sentiment que, aujourd'hui, les petites et moyennes entreprises, qui créent l'essentiel de l'emploi dans notre pays, ne sont pas toujours les bénéficiaires de la dynamique suscitée par l'aide publique.
S'agissant de l'emploi, le Conseil d'orientation pour l'emploi a souligné, dans son rapport, que beaucoup d'exonérations sur les bas salaires sont les conséquences de la loi sur les 35 heures et qu'elles ont pour objet de préserver la compétitivité de nos entreprises, qu'elles résultent également de la convergence des SMIC, qui eux-mêmes sont la conséquence des 35 heures. Le Conseil d'orientation pour l'emploi conclut que, si ces aides venaient à disparaître, 800 000 emplois seraient alors menacés.
S'agissant du deuxième sujet majeur, celui de la compétitivité, de l'investissement dans la recherche et dans l'innovation, afin de relever le défi de la globalisation, ont été mis en place des pôles de compétitivité, l'Agence de l'innovation industrielle, le crédit d'impôt recherche, autant de dispositifs qui répondent à des nécessités et qui sont à la croisée de financements publics et de financements privés.
Le troisième sujet est l'attractivité du territoire, rural mais aussi urbain, dont tient compte la politique des zones franches urbaines, qui a notamment été évaluée dans le rapport de votre collègue sénateur Pierre André.
Telles sont les orientations qui guident notre politique.
Nous avons la volonté d'y voir clair, afin que, lors de la conférence des finances publiques qui se tiendra à la mi-février et qui sera ciblée naturellement sur l'emploi et sur l'innovation, l'accent puisse être mis sur l'aide aux petites et moyennes entreprises de ce pays. Voilà les objectifs du Gouvernement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
les suppressions d'emploi
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
Monsieur le ministre délégué, lors du comité central d'entreprise du 18 janvier dernier, ...
M. Rémy Pointereau. Ça commence bien !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Attendez la suite, vous allez moins rire !
M. Ivan Renar. ... les 157 ouvrières du site d'ECCE, de Poix-du-Nord, ont brutalement appris la fermeture prochaine de leur usine. LVMH, qui est le principal client de cette entreprise, vient en effet de prendre une décision qui signe la fin de ces emplois.
Bien qu'ayant renouvelé son contrat de licence de fabrication avec ECCE pour la période 2008-2012, LVMH a exigé de pouvoir librement choisir les sites de production. Les costumes de la marque Kenzo, jusqu'alors fabriqués à Poix-du-Nord, seront désormais produits en Europe de l'Est.
Cette délocalisation entraînera la perte de 95 % des commandes de l'usine de Poix-du-Nord. L'activité d'un site déjà touché par de nombreuses restructurations devrait ainsi cesser dans quelques mois. La mort annoncée de cette usine risque également d'entraîner la disparition du site logistique d'ECCE à Prouvy, qui emploie 100 salariés.
Mme Christiane Hummel. À qui la faute ?
M. Ivan Renar. Au-delà du drame humain - un de plus ! - la fermeture du site de Poix-du-Nord marquerait la disparition d'un savoir-faire unique en France. Ces femmes, ces « petites mains », comme on les appelle dans le métier, faisaient en effet vivre la dernière usine française de prêt-à-porter masculin haut de gamme.
Avec une moyenne d'âge de quarante-cinq ans environ, elles désespèrent de leur avenir et de celui de leur famille, d'autant que l'Avesnois atteint déjà des taux de chômage records.
Les élus locaux se sont fortement mobilisés aux côtés de ces ouvrières et ont alerté le Gouvernement de la menace qui pesait sur le site. À la fin du mois de décembre, MM. Breton et Loos ont annoncé la reconduction du contrat entre LVMH et ECCE, laissant entendre que la fabrication serait poursuivie à Poix-du-Nord, alors que le groupe LVMH ne vise qu'à externaliser la production des costumes Kenzo.
Monsieur le ministre délégué, il n'y a pas de fatalité. On peut faire autrement, ces ouvrières ne sont pas prédestinées à subir la loi d'airain d'un marché sans conscience ni miséricorde.
Face à la logique arrogante et glacée des actionnaires, quelles mesures énergiques le Gouvernement entend-il prendre pour défendre ces emplois ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Aucune !
M. Ivan Renar. Il faudra bien, un jour, messieurs les ministres, interdire tout licenciement pour les entreprises réalisant ainsi des bénéfices.
M. Ivan Renar. Il faudra bien un jour, messieurs les ministres, instaurer un prélèvement sur les importations afin de contrarier les tentations de dumping social et fiscal et d'aller vers une harmonisation progressive des législations européennes et mondiales.
M. Rémy Pointereau. C'est de l'idéologie !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous nous faites honte !
M. Ivan Renar. En attendant, et dans l'immédiat, face à ce gâchis économique, social et humain, quelles mesures comptez-vous prendre pour préserver l'emploi des 157 ouvrières de Poix-du-Nord ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Renar, vous nous annoncez la fermeture de l'usine de Poix-du-Nord ; cette information ne correspond pas à celle qui a été transmise par la secrétaire du comité d'établissement de l'usine au directeur départemental du travail et de l'emploi.
Comme vous l'avez dit, le 26 décembre dernier, Thierry Breton et François Loos informaient les élus du Nord que le groupe LVMH avait reconduit le contrat passé avec le groupe Kenzo et que, par conséquent, l'activité devait se poursuivre selon un plan de charge jusqu'en 2012.
Afin de faire suite à votre question, je vais moi-même demander confirmation au groupe LVMH de ce qui a été dit à Thierry Breton et à François Loos au mois de décembre dernier et je tiendrai informés à la fois les élus du département mais aussi les salariés de cette entreprise.
Je comprends naturellement leur angoisse comme je comprends celle que peuvent également éprouver les salariés d'entreprises textiles situées dans d'autres régions de notre pays et pour lesquels, jour après jour, nous essayons de négocier des conditions de poursuite d'activité, des plans de sauvegarde de l'emploi. À chaque fois, nous sommes confrontés à des cas humains, souvent de femmes qui n'ont pas d'autre formation. Je pense ici à ce que nous avons connu l'an dernier dans les Vosges, ...
M. Jean-Pierre Bel. Pas seulement dans les Vosges !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...ainsi que le président Poncelet le sait.
Face à cela, quelles sont les mesures engagées par le Gouvernement ?
Au début de 2006, nous avons signé, avec l'ensemble des partenaires sociaux et les huit fédérations professionnelles de l'Union des industries textiles, un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences portant sur la formation de 6 500 salariés.
Dans le département du Nord, portés par le FORTHAC, l'organe paritaire collecteur agréé pour la formation dans le textile, l'habillement, le cuir et les secteurs connexes, ont été mis en place des plans de formation permettant la préparation à des métiers nouveaux. Cette année, 500 salariés du textile vont en bénéficier - Jean-Louis Borloo y a veillé personnellement -, c'est-à-dire que la moitié des capacités seront concentrées sur cette région.
Nous agissons concrètement : les pôles de compétitivité sur les nouveaux textiles, l'Agence de l'innovation industrielle, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la formation des hommes, la mise en compétitivité des territoires en sont la preuve, ainsi que le crédit collection, dispositif fort important pour Kenzo, notamment, et qui n'existe pas dans un certain nombre d'autres pays de l'Union européenne.
En conclusion, m'adressant à l'ensemble de cette assemblée, je soulignerai que, quelle que soit notre appartenance politique, nous allons devoir relever un défi majeur dans les mois qui viennent : l'Union européenne va en effet avoir à renégocier la majorité de ses accords commerciaux dans les dix-huit mois à venir.
Nous en avons déjà débattu à Berlin et nous sommes un certain nombre à estimer que l'exigence d'un travail décent et la dimension sociale du travail doivent bien être intégrées dans les accords commerciaux que nous concluons avec des pays tiers. Cet aspect me paraît essentiel et il sera, dans tous les cas, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, porté par la France dans le débat qui aura lieu, le 22 février prochain, lors du conseil des ministres de l'emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments d'information que je suis en mesure de vous transmettre. Une attention particulière sera portée par le pôle de cohésion sociale aux salariés de Poix-du-Nord mais aussi à ceux d'Aubade, de Well et d'Arena, car, pour nous, il s'agit de se battre pour des hommes et des femmes et pour la préservation de l'activité économique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.
Monsieur le ministre délégué, le 7 janvier dernier, un hélicoptère s'est écrasé à proximité d'un restaurant en Camargue, provoquant la mort de trois personnes. Il s'agissait d'un hélicoptère civil de type Alouette 2. L'enquête déterminera les causes exactes de l'accident.
L'annonce de ce drame a suscité une émotion d'autant plus vive au sein de la population des Hautes-Pyrénées et des acteurs du secours en montagne que le traumatisme subi en 2003 et en 2006 dans notre département a été particulièrement fort.
En effet, le 20 juillet 2003 et le 5 juin 2006 se sont produits deux crashes d'hélicoptères EC 145, le premier sur la face nord de l'Arbizon, le second sur le pic de l'Astazou, dans le cirque de Gavarnie. Ces deux accidents ont fait quatre morts et six blessés graves parmi les équipages de la sécurité civile et des secouristes.
De plus, ces deux accidents semblent avoir des causes similaires dans la mesure où les premières conclusions rendues par les experts ont pointé, pour les deux appareils, une perte d'efficacité du rotor anti-couple à haute altitude. L'appareil se met à tourner de plus en plus en vite et part en rotation incontrôlable avant de s'écraser au sol. Il semblerait donc que ce type d'appareil ne soit pas adapté aux interventions spécifiques en haute montagne.
L'absence d'explications convaincantes et le silence des pouvoirs publics ne font qu'accentuer les inquiétudes et les craintes des membres des équipages, des secouristes et de leurs proches.
En outre, monsieur le ministre délégué, nous avons appris par voie de presse qu'un appareil EC 145 modifié a été livré le 19 décembre dernier à la base de la sécurité civile de Pau. Toutefois, l'opinion publique n'a pas eu connaissance des modifications réalisées sur cet appareil.
On peut légitimement penser que les modifications apportées par le constructeur répondent aux défauts techniques relevés dans les résultats du Bureau enquête accident défense, le BEAD, et aux observations de l'expert mandaté dans le cadre de l'enquête judiciaire diligentée à la suite du premier accident de 2003.
Monsieur le ministre délégué, je vous pose deux questions : les modifications apportées améliorent-elles sensiblement la sécurité ? Quelle est la fiabilité des anciens appareils non modifiés et qui continuent à être utilisés ?
Les professionnels du secours en montagne doivent être rassurés, et nous leur devons des réponses claires et sans ambiguïté pour qu'ils reprennent confiance, d'autant plus que ce gouvernement a fait de la sécurité son cheval de bataille. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Fortassin, vous avez raison. Le 5 juin 2006, un hélicoptère EC 145 s'est écrasé à Gavarnie, alors qu'il effectuait un entraînement de treuillage avec des CRS. Trois d'entre eux ont malheureusement été tués, et l'un d'entre eux a été grièvement blessé.
L'enquête a montré qu'il y avait effectivement plusieurs hypothèses, notamment le choc contre une paroi.
Cet accident nous renvoie, hélas, à un précédent, celui qui s'était déroulé trois années plus tôt, en juin 2003, avec le même type d'appareil, mais dans des circonstances, il est vrai, très différentes.
Vous vous en souvenez, il avait alors été décidé de procéder à des évaluations de cet EC 145 et de conduire une expertise avec les différentes parties, notamment le constructeur, Eurocopter, ainsi que le centre d'essais en vol de la Délégation générale pour l'armement, la DGA.
Le 15 juin, le ministre d'État a reçu les représentants de l'ensemble des interlocuteurs concernés, c'est-à-dire des navigants de la sécurité civile, des gendarmes, des secouristes de haute montagne, des membres des compagnies républicaines de sécurité, des agents des services départementaux d'incendie et de secours ainsi que du SAMU.
À cette occasion, il a été décidé de créer deux groupes de travail : l'un sur les évolutions techniques de l'appareil, ce qui est votre préoccupation, l'autre sur la formation de ceux qui utilisent ces appareils en haute montagne.
Trois mesures ont été arrêtées et, là, je réponds précisément à votre question : premièrement, harmoniser les techniques de treuillage ; deuxièmement, standardiser la formation des équipes de secours ; troisièmement, améliorer l'aménagement des cabines.
Grâce à ces améliorations, les essais qui ont eu lieu, pour l'essentiel pendant le mois de novembre, ont été concluants. Et, le 19 décembre, le premier hélicoptère EC 145 modifié sur la base de ces trois initiatives a été affecté à la base de la sécurité civile de Pau. Pourquoi prioritairement à Pau ? Précisément en considération des deux accidents.
Cela signifie très concrètement, monsieur Fortassin, que le Gouvernement partage votre préoccupation et qu'il est tout aussi convaincu que vous de la nécessité d'un effort en matière de sécurité, de sorte que nous puissions donner des garanties optimales à des agents qui s'engagent pour le secours à nos compatriotes. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UMP et de l'UC-UDF.)
les réformes pédagogiques
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Miraux.
M. Jean-Luc Miraux. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oh là là !
M. Jean-Luc Miraux. On entend, ici et là, des professionnels du syndicalisme qui n'ont sûrement pas mis les pieds depuis très longtemps dans un établissement scolaire pour enseigner ...
M. Roland Muzeau. Dites des syndicalistes ! À vous entendre, seul le MEDEF a des professionnels !
M. Jean-Luc Miraux. ... résumer l'enjeu de l'éducation de nos enfants uniquement à des questions budgétaires ou à des petits intérêts catégoriels.
Jamais, parmi ceux, peu nombreux, il faut bien le dire, qui, la semaine dernière, manifestaient encore...
M. Roland Muzeau. Attendez le 8 février, et vous verrez !
M. Jean-Luc Miraux. ... on n'a entendu parler de la qualité de l'enseignement, ni du souci de voir nos enfants entrer en sixième en sachant correctement lire, écrire ou compter.
M. Robert Hue. C'est de la provocation !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous vous ridiculisez ! C'est affligeant !
M. Jean-Luc Miraux. Ce que je dis vous dérange, n'est-ce pas ? (Dénégations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Il n'est question, encore et encore, encore et toujours, que de statuts et de postes,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n'avez pas été souvent sur les bancs de l'école !
M. Jean-Luc Miraux. ... alors que le taux national d'encadrement des élèves, cette année encore, n'a pas varié : dix-neuf élèves pour un enseignant dans le premier degré et vingt-quatre dans le second degré.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Un gouvernement qui pense que les professeurs gagnent plus de 4 000 euros par mois devrait se dispenser de parler pendant un certain temps !
M. Jean-Luc Miraux. Au nom de la représentation nationale tout entière, du moins je l'espère, ainsi qu'au nom de tous les parents de ce pays, dont la préoccupation première est bien la réussite de leurs enfants dans la vie, je vous demande, monsieur le ministre, de nous dire quels sont les principes qui ont guidé et qui guident votre politique.
M. Roland Muzeau. C'est télécommandé !
Mme Hélène Luc. Traiter ainsi les enseignants, c'est honteux !
M. Jean-Luc Miraux. Dites-nous comment ces principes sont traduits concrètement au bénéfice des élèves et comment ils prennent forme d'un point de vue pédagogique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.- Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, comme il est bon d'entendre parler de l'éducation nationale et de la mission de l'éducation nationale sous l'angle de la réussite scolaire, de l'apprentissage des fondamentaux, (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.), plutôt que sous un angle réducteur, celui du clientélisme, où tout se résume à une ligne budgétaire, au nombre de postes créés ou supprimés ! (Protestations sur les mêmes travées.)
Comme c'est bon d'entendre que le débat est enfin recentré sur les missions de l'école, en priorité, l'apprentissage des fondamentaux sur lesquels nous avons voulu fonder une ambition commune pour l'éducation nationale.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Gilles de Robien, ministre. Cette ambition est maintenant définie dans le socle commun de connaissances et de compétences, qui englobe au moins deux fondamentaux : la maîtrise de la langue française et l'apprentissage du calcul.
M. Charles Revet. Très bien !
M. Gilles de Robien, ministre. Comment peut-on en effet poursuivre des études si l'on ne sait pas s'exprimer ?
M. Rémy Pointereau. Exactement !
Mme Christiane Hummel. Bravo !
M. Gilles de Robien, ministre. Comment peut-on converser, négocier et échanger avec l'autre si l'on ne sait pas parler le français ? Oui, la maîtrise de la langue française relève tout simplement d'une question de cohésion sociale. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Hélène Luc. C'est la raison pour laquelle il faut aider les élèves individuellement !
M. Gilles de Robien, ministre. J'ai commencé par l'apprentissage de la lecture. Grâce aux missions que j'ai confiées à l'académicien Erik Orsenna et au professeur Alain Bentolila, l'apprentissage systématique de la grammaire est en place. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les sénateurs connaissent-ils bien leur grammaire ? Pas sûr !
M. Gilles de Robien, ministre. La circulaire est signée : dès la rentrée prochaine, l'apprentissage de la grammaire sera systématique. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP. -Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faudra faire faire une dictée aux parlementaires !
M. Gilles de Robien, ministre. Quant au calcul, il était indispensable, pour en harmoniser l'apprentissage, pour réhabiliter le calcul mental, trop souvent oublié, de dire très clairement que, dès la grande maternelle, il faut commencer à apprendre à compter et que, dès le CP, il faut chaque jour, pendant quelques minutes, s'exercer au calcul mental. Dès la rentrée prochaine, cette consigne pourra être appliquée.
Pour réussir, nous avions aussi besoin d'une réforme des instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM. C'est fait ! Mesdames, messieurs les sénateurs, les nouveaux IUFM vont dispenser une formation en alternance à l'école - une école des maîtres, avec des maîtres qui ont déjà enseigné, ce qui n'était pas le cas - et en entreprise, avec un stage obligatoire. (Marques d'approbation sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. Jacques Mahéas. Tout cela est merveilleux !
M. Gilles de Robien, ministre. Enfin, une formation continue sera organisée pour que, une fois sortis des IUFM, les enseignants soient encore suivis par leurs maîtres.
Telles sont les quelques indications que je voulais vous donner sur la véritable rénovation de l'éducation nationale actuellement en cours.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si je suis en mesure d'entreprendre de telles réformes, c'est parce que je sais pouvoir compter sur l'ensemble de la communauté éducative qui, contrairement à ce que certains voudraient laisser croire, évolue, tant elle se préoccupe, comme vous, et avant tout, de la réussite des élèves ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. N'oubliez pas la dictée pour les parlementaires, monsieur le ministre !
les enquêtes des renseignements généraux
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, mes chers collègues, notre question, au départ, s'adressait à M. le ministre de l'intérieur, mais, comme il n'est pas là, selon son habitude,...
Mme Hélène Luc. Il n'est jamais là ! Il n'est plus là ! Il fait sa campagne électorale !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... c'est au Premier ministre que je m'adresse, au nom du groupe socialiste, au Premier ministre comme garant, dans un moment particulièrement sensible de la vie démocratique de notre patrie, l'élection présidentielle, de l'usage, du bon usage, honnête et impartial, des moyens de l'État.
M. Rémy Pointereau. Comment a fait Jospin, quand il était candidat ?
M. Jean-Luc Mélenchon. J'ai eu l'honneur, monsieur le Premier ministre, d'être membre d'un gouvernement dont le chef, Lionel Jospin, avait donné des consignes extrêmement rigoureuses (Commentaires ironiques sur les travées de l'UMP.), qui furent appliquées d'une manière extrêmement sourcilleuse en ce qui concerne l'utilisation des moyens de l'État pendant la campagne présidentielle. (Rires sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela les fait rire, à droite ! Ils ont tort !
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous sommes nombreux à penser que cette utilisation, aujourd'hui, n'est pas impartiale. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Peut-être, nous trompons-nous. Alors, vous le démentirez avec des arguments.
Nous avons le sentiment que ces moyens sont utilisés pour la campagne par le ministre de l'intérieur, qui est, par ailleurs, candidat à l'élection présidentielle.
M. Rémy Pointereau. Et Jospin ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Cela seul suffirait pour que nous vous posions la question ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... de savoir quelles dispositions, quelles consignes vous avez données afin que, dorénavant, les choses se passent différemment et de manière plus respectueuse de l'impartialité à laquelle nous avons droit.
Mais, depuis hier, il y a plus grave, car le ministre de l'intérieur fait l'objet d'une accusation, de la part de deux journaux au moins, celle d'avoir utilisé les moyens d'État et les moyens de police pour enquêter sur la vie d'un conseiller de notre candidate à l'élection présidentielle. (Vives protestations sur certaines travées de l'UMP.)
Naturellement, notre groupe est, en toutes circonstances, attaché à la présomption d'innocence et il n'accuse pas. Il vous donne le moyen de vous défendre et de nous dire publiquement que, non, il n'y a pas eu d'enquête, qu'elle n'a pas été demandée par un conseiller et que, quoique n'ayant pas été demandée par un conseiller, si, par hasard, elle avait eu lieu, le rapport ne serait pas remonté au ministre, ni au conseiller qui ne le lui aurait pas demandé !
Nous attendons que vous nous disiez que, si enquête il y a eu, elle s'est, en toute hypothèse, déroulée dans des conditions respectueuses du droit à la vie privée de chaque citoyen dans ce pays, un droit qui veut que, pour avoir connaissance du contenu d'un jugement de divorce, lequel est prononcé par une juridiction civile, il faut des moyens légaux particuliers, qu'il ne suffit pas de les exiger pour les obtenir, car ces jugements se font à huis clos.
Or, s'il est reconnu que de telles informations ont été données, c'est qu'on se les est procurées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Charles Revet. La question !
M. Jean-Luc Mélenchon. Pouvez-vous nous garantir qu'on se les est procurées dans des conditions respectueuses de la loi et des droits de M. Rebelle ?
M. Roland Muzeau. Mais non !
M. Jean-Luc Mélenchon. Au total, voilà ce que nous avons à vous demander, à vous, monsieur le Premier ministre, parce que nous pensons que vous êtes peut-être en situation, vous, spécialement, de garantir une certaine impartialité. (Sourires sur les travées du groupe socialiste. -Protestations sur les travées de l'UMP.)
Car si l'on ne fait plus confiance aux institutions de son pays, où va-t-on ? (Protestations renouvelées sur les travées de l'UMP.) Que vous le vouliez ou non, c'est la règle, mes amis : c'est le Premier ministre qui est le garant de ces moyens, et pas le ministre...
M. le président. Monsieur Mélenchon, veuillez poser votre question !
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, je suis dans ma question : j'explique pourquoi elle s'adresse au Premier ministre en particulier.
M. le président. Nous l'avons compris, veuillez maintenant aller au bout de votre propos.
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, je vais achever. J'espère simplement que tout le monde a bien compris ma question. (Oui ! sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Je voulais souligner que c'était au Premier ministre de nous répondre. En effet, si cette affaire est avérée, vous n'y pouvez rien, c'est une affaire d'État, car nous ne sommes pas dans un pays où le ministre de l'intérieur, fût-il candidat, peut enquêter sur la vie privée des gens qui participent à une campagne électorale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Nous avons certainement en perspective une campagne rude.
M. le président. Monsieur Mélenchon, vous avez largement dépassé votre temps de parole !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est ma phrase de fin ! Monsieur le président, ne dérogez pas à votre mansuétude ordinaire !
M. le président. Monsieur Mélenchon, veuillez terminer !
M. Jean-Luc Mélenchon. Que nous ayons droit à une campagne peut-être rude, soit, car c'est dans nos habitudes de Gaulois, mais nous voulons une campagne propre et nous vous demandons de nous en répondre ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. (Très vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Guy Fischer. Et pourquoi pas au directeur de campagne ?
M. David Assouline. C'est de la provocation !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Mélenchon, permettez-moi d'emblée de regretter la confusion et l'amalgame. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. David Assouline. Vous êtes juge et partie !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. M. le Premier ministre a en effet adressé, dès le début du mois de janvier, une circulaire à chacun des membres du Gouvernement rappelant les règles républicaines, au respect desquelles nous devons naturellement veiller avec le plus grand soin.
M. Jacques Mahéas. Qu'est-ce que ce serait sans la circulaire...
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je vous remercie, monsieur Mélenchon, d'avoir cité Lionel Jospin qui, bien que candidat, est resté à son poste, jusqu'à la dernière seconde de la dernière minute de la dernière heure du dernier jour ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. David Assouline. Il n'était pas ministre de l'intérieur !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Alors, je vous le dis - je veux être très clair devant vous, monsieur Mélenchon - le ministre d'État, Nicolas Sarkozy, n'a jamais demandé une enquête des renseignements généraux sur qui que ce soit et où que ce soit.
M. Jacques Mahéas. Son cabinet non plus ?
M. François Marc. Alors, c'est le hasard !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Cela ne s'inscrit ni dans son comportement, ni dans son tempérament, ni dans ses méthodes. (Exclamations dubitatives sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jacques Mahéas. Saint Nicolas !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Et je vous le prouve.
C'est lui, Nicolas Sarkozy, qui a décidé l'abandon des études ou investigations ayant une portée politique. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
C'est lui qui, ensuite, par une directive du 4 octobre 2002, a mis fin aux pratiques, détestables, des « notes blanches » dans l'administration. (Protestations sur les mêmes travées - Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Hélène Luc. Vous ne parlez pas sérieusement, monsieur le ministre délégué !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. C'est lui qui a mis en place une mission visant à éliminer les « officines » et les « nébuleuses », qui étaient nombreuses, sous vos gouvernements, notamment.
Mme Christiane Hummel. Bravo !
M. Jean-Pierre Bel. Vous ne manquez pas d'air !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Et, monsieur Mélenchon, je vous le dis en face : c'est certainement Nicolas Sarkozy qui, aujourd'hui, connaît le mieux les torts que peuvent causer les rumeurs non fondées et les fausses déclarations. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. François Marc. Ça, il faut oser le dire !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bref, c'est un martyr !
M. Robert Hue. Vous accusez le Premier ministre ?
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je peux vous l'affirmer, à aucun moment le ministre d'État Nicolas Sarkozy n'a demandé à quelque service que ce soit des notes à des fins politiques. Je vais même plus loin : je vous précise que jamais Nicolas Sarkozy n'a demandé à l'un de ses collaborateurs de lui transmettre des notes politiques. (M. Robert Hue s'exclame.) Je vois que M. Hue m'approuve : c'est bon signe ! (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Robert Hue. Non !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. D'ailleurs, les renseignements généraux l'ont précisé aussitôt, il s'agissait d'une simple actualisation, qui avait été réalisée ...
M. David Assouline. Au bon moment !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...automatiquement et sans ordres. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. François Marc. C'est laborieux !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Et, monsieur Mélenchon, puisque vous vous interrogez sur cette actualisation, pourquoi ne vous interrogez-vous pas plutôt sur la réalisation même de la notice biographique concernant la personne que vous évoquez ?
Mme Janine Rozier. Eh oui !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Souvenez-vous de la période à laquelle cela a pu se faire. À mon avis, il y a fort à parier, mesdames, messieurs les sénateurs, que c'était sous un gouvernement socialiste, ...
M. Alain Gournac. Oui !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...avec un Premier ministre socialiste, avec un ministre de l'intérieur socialiste (M. David Assouline s'esclaffe.) qui suivait avec beaucoup d'attention l'action d'une certaine association, laquelle association vous a causé bien des déboires et a entraîné la démission du ministre de la défense - socialiste - d'alors ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Rémy Pointereau. Exactement !
Plusieurs sénateurs de l'UMP. L'affaire du Rainbow Warrior !
M. David Assouline. Vous pouvez le dire !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...et la méthode est bien connue : quand on n'a rien à dire, quand tout va mal, quand tout s'emmêle, quand on accumule les erreurs, les imprécisions et les gaffes, alors là, on crie au complot !
Je vous accorde, monsieur Mélenchon, une originalité : d'habitude, c'est à la fin des campagnes ; avec vous, c'est au début !
S'il y a une enquête à mener, croyez-moi, ce n'est pas sur l'entourage d'une candidate ou sur la candidate elle-même, car tout est dans la presse, et notamment grâce à vous personnellement, monsieur Mélenchon,...
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est insupportable !
M. Charles Gautier. Vous n'êtes pas un gentleman, monsieur le ministre délégué !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...qui alimentez beaucoup la presse sur ce qui se passe chez vous ! (Très vives protestations sur les travées du groupe socialiste. - Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Yannick Bodin. C'est scandaleux !
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous allez retirer ces propos ! (M. Jean-Luc Mélenchon et plusieurs sénateurs du groupe socialiste se lèvent et, quittant leurs travées, se dirigent vers le banc du Gouvernement. - Les sénateurs du groupe socialiste restés assis martèlent leur pupitre aux mots de « Démission, démission ! », tandis que de nombreux sénateurs de l'UMP scandent : « Mélenchon, au piquet ! ».)
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je le dis très solennellement devant la Haute Assemblée (MM. les huissiers s'interposent alors, empêchant M. Jean-Luc Mélenchon d'approcher de M. le ministre délégué.), ...
M. le président. Monsieur Mélenchon, mes chers collègues, veuillez reprendre vos places !
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...jamais le Gouvernement n'acceptera le moindre dérapage et l'intégrité de l'État sera respectée ! (Très vifs applaudissements sur les travées de l'UMP. - Les sénateurs du groupe socialiste regagnent leurs travées en scandant : « Hortefeux, démission ! ».)
M. Jean-Pierre Bel. C'est une honte !
M. le président. La parole est à M. René Beaumont.
M. René Beaumont. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie.
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. »
Cette phrase, très condensée et hautement symbolique, fut prononcée par le Président de la République en ouverture de son vigoureux plaidoyer en faveur du protocole de Kyoto pour la réduction de la production des gaz à effet de serre, à Johannesburg, en 2002, et devait résonner comme un véritable signal d'alarme adressé à l'ensemble des peuples de la terre.
Pour avoir participé à la conférence de Johannesburg en tant qu'invité de la délégation qui accompagnait le Président de la République, je puis affirmer que ce fut un grand moment d'émotion et de prise de conscience pour tous les représentants du monde qui se trouvaient ainsi réunis.
Dès lors, sous l'impulsion du Président de la République et grâce à l'action énergique de nos différents gouvernements depuis 2002, en particulier celle de nos ministres de l'écologie et du développement durable, cette priorité annoncée dans les discours est devenue chez nous une réalité.
M. Guy Fischer. C'est ça...
M. René Beaumont. Je citerai la Charte constitutionnelle de l'environnement, la loi sur les risques technologiques, la promulgation tant attendue de la loi sur la protection des milieux aquatiques et la loi sur les parcs nationaux, textes qui sont venus refonder et renforcer notre droit de l'environnement.
En France, les résultas sont là : nos émissions de gaz à effet de serre diminuent, la qualité de l'air et de l'eau s'améliore, les zones naturelles protégées s'étendent. Mieux, et beaucoup plus encourageant pour l'avenir, l'éducation des jeunes à l'environnement se généralise.
Mais la France et l'Europe ne peuvent à elles seules relever les défis écologiques du monde. Les autres pays développés, je pense en particulier aux États-Unis, et les pays émergents tels que le Brésil, la Chine ou l'Inde ont un rôle essentiel à jouer en la matière.
Si la communauté internationale n'a pas ménagé ses efforts pendant cette période en signant plus de 500 conventions, force est de constater que les résultats attendus ne sont pas là et qu'il y a encore loin de la parole aux actes.
Sous nos yeux s'accumulent les premiers signes évidents d'un réchauffement climatique alarmant. Des espèces animales et végétales disparaissent, semble-t-il, à un rythme sans précédent.
M. Roland Muzeau. Ce n'est pas le cas des politiciens...
M. René Beaumont. De nouvelles pollutions apparaissent qui portent atteinte à la santé, et parfois à la vie, de milliers de personnes.
Pouvez-vous dire, madame la ministre déléguée, ce que la France entend faire aujourd'hui, sur l'initiative conjointe de son Président de la République et de son gouvernement, pour relancer l'action internationale en faveur de l'environnement et maintenir ainsi notre pays à la tête de ce combat mondial ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d'abord vous remercier d'avoir rappelé les nombreuses initiatives prises par la France, sous l'impulsion du Président de la République, en matière de protection de l'environnement.
À la tribune des Nations unies, en septembre dernier, le Président Chirac évoquait le risque d'un « lent suicide collectif » si nous ne parvenions pas à faire émerger une prise de conscience, individuelle et collective, sur les enjeux de l'environnement.
Il est vrai que la communauté internationale n'a pas été complètement inactive, avec plus de 500 conventions signées, dix-huit agences, des programmes, et notamment le programme des Nations unies pour l'environnement. Mais il est vrai aussi qu'il est plus que jamais nécessaire de franchir une nouvelle étape.
La France veut avoir une politique à la fois nationale et internationale exemplaire.
Sur le plan national, vous l'avez rappelé, notre pays est le premier à avoir inclus dans sa Constitution une charte de l'environnement.
Sur le plan international, nous sommes très actifs, comme en témoigne l'initiative qu'a prise le Président Chirac de réunir les 2 et 3 février prochain la conférence pour une nouvelle gouvernance écologique mondiale en vue de mobiliser la communauté internationale en faveur de la création de cette ONU pour l'environnement que nous appelons de nos voeux.
À cette conférence participeront de nombreux États puisqu'elle réunira tous les pays de l'Union européenne et plus d'une vingtaine de pays, notamment du Sud.
Je crois donc que le moment est venu pour que soit franchie une étape décisive dans la prise de conscience globale, nécessaire pour que chacun se sente citoyen de la terre et pour que tous les acteurs concernés, c'est-à-dire non seulement les États mais aussi les entreprises et les ONG, s'impliquent afin de préserver l'environnement dans toutes ses composantes, qu'il s'agisse de l'eau, du climat ou de la biodiversité.
Nous devons faire tout notre possible pour mobiliser la communauté internationale, pour imaginer de nouveaux modes de production et de consommation respectueux de l'environnement et qui ne compromettent pas l'avenir des générations futures.
Vous pouvez être assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, que, dans les prochains jours et dans les prochaines semaines, la France continuera, avec détermination et énergie, le combat pour cette nouvelle gouvernance écologique mondiale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
déficit 2006 du budget de l'état
M. le président. La parole est à Mme Adeline Gousseau.
Mme Adeline Gousseau. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État.
Il y a très exactement une semaine, M. Copé nous annonçait, avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Thierry Breton, une excellente nouvelle budgétaire : en 2006, notre pays a dégagé 10 milliards d'euros de plus-values fiscales, et ces plus-values vont être entièrement affectées à la réduction du déficit budgétaire, qui sera ainsi ramené à 36,1 milliards d'euros en 2006, contre 43,5 milliards l'année précédente !
M. Roland Muzeau. C'est bidon, tout ça !
Mme Adeline Gousseau. Il y a à peine un mois, la loi de finances initiale pour 2006 prévoyait pourtant un déficit de 46,9 milliards d'euros tandis que la loi de finances rectificative prévoyait, elle, un déficit de 42,4 milliards d'euros.
Au vu de ces très bons résultats, je crois pouvoir dire que tous ceux qui, sur ces bancs, sont attachés à l'état de nos finances, et donc de notre pays, se réjouissent de cette réduction du déficit budgétaire.
Pour ma part, non seulement je m'en réjouis, mais je tiens également à féliciter le Gouvernement, dont les options économiques et budgétaires font aujourd'hui leurs preuves.
Mme Janine Rozier. Bravo !
M. Charles Revet. Très bien !
Mme Adeline Gousseau. Après le retour de la croissance et la réduction significative du chômage en France, la politique budgétaire du Gouvernement montre qu'il est possible tout à la fois de diminuer les impôts et de réduire le déficit de nos finances. Voilà qui devrait faire réfléchir ceux qui souhaitent opter pour une solution de facilité en proposant d'augmenter la pression fiscale sur nos concitoyens, plutôt que de tenter de dégager des économies !
M. Rémy Pointereau. Très bien !
Mme Adeline Gousseau. Je souhaiterais que le Gouvernement détaille l'origine de ces plus-values fiscales très importantes et explique, d'une manière plus générale, comment nous sommes parvenus à une telle réduction du déficit budgétaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Madame Gousseau, le Gouvernement ne peut qu'être sensible à vos félicitations et, en effet, depuis 2002, les dépenses de l'État ont été strictement maîtrisées.
En 2006, pour la quatrième année consécutive, le Gouvernement a veillé à ce que ne soit pas dépensé un euro de plus que le plafond de dépenses voté par le Parlement.
Le respect de la norme de dépenses a été atteint tout en finançant intégralement les priorités retranscrites dans les lois de programmation relatives tant à la sécurité intérieure, à la justice et à la défense qu'à la recherche.
En outre, l'assainissement de la situation budgétaire s'est poursuivi à travers une nouvelle réduction des reports. Ceux-ci devraient s'établir à 4 milliards d'euros au début de 2007, contre 14 milliards d'euros au début de 2002.
Parallèlement à cette bonne tenue des dépenses, les plus-values de recettes sont revues à la hausse et sont, vous le savez, intégralement affectées à la réduction du déficit.
Les recettes fiscales s'inscrivent en amélioration de 10,2 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale de 2006 et de 5,3 milliards d'euros par rapport au collectif budgétaire de fin d'année.
Les principales évolutions sont les suivantes.
L'impôt sur le revenu est en progression de 1,1 milliard d'euros par rapport à l'estimation de la loi de finances initiale, performance qui tient à la fois à la progression des revenus des Français et à l'amélioration du recouvrement de l'impôt sous l'effet de la modernisation continue de notre système fiscal.
Pour ce qui est de la TVA, elle s'inscrit en plus-value de 1,4 milliard d'euros par rapport à la prévision initiale, illustrant ainsi la bonne tenue de la consommation des ménages.
Quant à l'impôt sur les sociétés, en plus-value de 6,4 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale, il reflète, lui, la bonne santé des entreprises françaises.
Madame la sénatrice, le solde budgétaire s'établit donc à moins 36,16 milliards d'euros.
Rapporté à la richesse nationale, le déficit est ainsi ramené à 2 % du PIB, soit, comme en l'an 2000, la meilleure performance depuis quinze ans - je dis bien la meilleure performance depuis quinze ans !
Il s'agit là, madame la sénatrice, vous le voyez, d'une avancée majeure dans la voie du désendettement, avancée qui devra naturellement être poursuivie dans les années qui viennent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
difficultés du monde viticole
M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, depuis plusieurs années, la crise viticole qui perdure en France ne cesse de s'accentuer et de nombreuses exploitations sont actuellement en très grande difficulté.
Mardi dernier, nous avons rencontré ici même, au Sénat, des viticulteurs du Languedoc-Roussillon qui nous ont fait part de leur désarroi.
Monsieur le ministre, nous craignons que, cent ans après les dramatiques événements de 1907 et après ceux de Montredon, en 1976, cette région ne connaisse une flambée de violences due au désespoir de nos vignerons.
Le constat que nous pouvons faire est simple : face à nos concurrents, qui gagnent des parts de marché, l'analyse d'une crise viticole liée à la surproduction mondiale est erronée.
Il est indispensable d'accompagner notre viticulture dans ses nécessaires mutations induites par la mondialisation, plutôt que de réduire ses possibilités d'action, comme c'est le cas actuellement.
Monsieur le ministre, vous avez pris une série de mesures qui, à notre avis, sont inadaptées. En effet, elles affaiblissent la filière sans pour autant relever les vrais défis en termes de compétitivité économique.
Comme résultat de cette politique, nous assistons à une précarisation de l'ensemble des acteurs, qui n'ont de ce fait aucun projet d'avenir, d'où les inquiétudes exprimées par les professionnels sur l'ensemble du territoire.
Oui, monsieur le ministre, la colère gronde !
Aussi, pour calmer cette colère, comptez-vous organiser une table ronde réunissant les professionnels, les metteurs en marché, les négociants et la grande distribution ?
Pour sauver notre viticulture, allez-vous vous opposer fermement à Mme la commissaire européenne, qui prévoit un plan d'arrachage de 400 000 hectares, ce qui entraînerait la disparition de 10 000 emplois ?
Allez-vous vous opposer à l'élaboration des vins à partir de moûts importés ?
Comptez-vous prendre les nécessaires mesures d'harmonisation avec les autres pays européens, concernant, notamment, les rendements à l'hectare, les règles de vinification et les contrôles sanitaires ?
De toute évidence, devant la gravité de la situation, l'organisation d'un grand débat national sur l'avenir de notre viticulture s'impose.
Envisagez-vous de prendre prochainement ces dispositions qui sont vraiment urgentes ?
Allez-vous entendre l'appel de cette profession ?
Monsieur le ministre, apportez-nous rapidement les réponses que nous attendons et qu'attendent surtout nos vignerons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, l'un de vos collègues député, élu de l'Hérault comme vous-même, a posé une question de même nature, hier, à l'Assemblée nationale. Au reste, cette question est tout à fait légitime, et les difficultés des viticulteurs du Languedoc-Roussillon sont connues sur les bancs de l'Assemblée nationale comme sur les travées du Sénat.
Le seul point de désaccord avec vous, monsieur le sénateur, en dehors du constat des difficultés présentes, est le suivant : les mesures que nous avons déjà prises l'ont été à la demande des professionnels.
S'agissant en particulier des dispositions relatives au report fiscal et social ou à l'exonération sur le foncier non bâti, ce sont les syndicats, les organisations professionnelles, les coordinations, qui nous ont demandé de prendre de telles mesures, ce que, bien sûr, nous avons fait.
M. le Premier ministre, lors de son récent déplacement dans votre département, a annoncé, après avoir assisté à une table ronde à laquelle participaient tous vos collègues députés et sénateurs des départements de la région, un plan de restructuration dans le cadre du contrat de projets État-région comprenant des mesures en matière d'accompagnement à l'arrachage, d'agro-environnement et de préretraites. Il s'agit là d'une décision importante qui a d'ailleurs été approuvée par le président de région, Georges Frêche.
Nous avons également mis en place des mesures de dégagement du marché et de distillation. Dès lors, je puis vous dire très clairement, monsieur le sénateur, que nous nous opposons, comme vous-même, à la réforme proposée par l'Union européenne.
En effet, il n'est pas question de faire de l'arrachage le plan viticole pour la France et l'Europe ; il n'est pas question de promouvoir les moûts importés ; il n'est pas question d'accepter une réforme dont la teneur actuelle est inacceptable pour la viticulture française.
D'ailleurs, le gouvernement français a obtenu le report de cette réforme, qui sera présentée au mois d'avril, sous la présidence allemande, par Mme la commissaire à l'agriculture.
À cette occasion, nous travaillerons avec la profession afin de changer les modalités de cette réforme et de faire en sorte que, d'un plan de casse, l'on passe à un plan de promotion, tant il est vrai que les vins du Languedoc-Roussillon, comme tous les vins de France - vous le savez parfaitement, monsieur le sénateur, vous qui les connaissez bien - ont un avenir ; en effet, ils sont de très bonne qualité et ont réussi à prendre des parts de marché. Simplement, il convient de favoriser leur exportation.
Pour ce faire, il est nécessaire de mieux segmenter notre offre avant de la présenter, ce qui a été fait par votre région à travers le label « Vins du sud de France », qui constitue une excellente initiative, à laquelle il faut ajouter la catégorie « Vignobles de France », que nous avons mise en place.
Je vous promets, monsieur le sénateur, que ce secteur retiendra toute mon attention. Ainsi, c'est ensemble que nous prendrons les mesures qui conviennent pour sauver la viticulture du Languedoc-Roussillon, qui est promise à un bel avenir.
Il faut l'envisager non pas comme un secteur structurellement en difficulté, mais comme un secteur qui connaît des problèmes temporaires que nous devrons résoudre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
11
DÉCÈS D'UN SÉNATEUR
M. le président. Madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'ai le très profond regret de vous faire part du décès de notre collègue Marcel Lesbros, sénateur des Hautes-Alpes depuis 1989.
M. le président du Sénat prononcera son éloge funèbre ultérieurement.
Pour l'heure, au nom du Sénat, je présente nos condoléances les plus attristées à ses proches et aux membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire et je vous invite à marquer notre émotion par une minute de silence. (Mme et MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs observent une minute de silence.)
12
souhaits de bienvenue à une délégation de l'assemblée nationale de la république de Corée
M. le président. Madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer, au nom du Sénat, une délégation du groupe d'amitié Corée du Sud-France de l'Assemblée nationale de la République de Corée, présidée par M. Young-Gil Song, qui effectue actuellement un séjour d'étude en France, à l'invitation de notre collègue le président Maurice Blin.
Ce séjour a été programmé dans la foulée de la célébration, en 2006, du cent vingtième anniversaire des relations diplomatiques entre la République de Corée et la France.
Le programme de nos collègues sud-coréens s'annonce particulièrement intéressant, puisqu'il comportera en particulier la visite du centre du Commissariat à l'énergie atomique de Caradache, siège d'ITER, ainsi que celle de l'établissement Eurocopter de Marignane.
Je formule mes voeux de succès pour leur séjour en France, espérant qu'il contribuera à un approfondissement de la coopération entre nos deux pays. (Mme et MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent chaleureusement.)
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
13
rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour un rappel au règlement.
M. Bernard Frimat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon rappel au règlement porte sur l'incident qui s'est produit tout à l'heure lors des questions d'actualité au Gouvernement.
Au nom du groupe socialiste, je souhaite élever une protestation solennelle contre un comportement que nous jugeons inadmissible. Je m'efforcerai de m'exprimer de façon plus pondérée, à la différence de M. le ministre tout à l'heure.
Lors des questions au Gouvernement, en lien avec l'actualité et au nom du groupe socialiste, Jean-Luc Mélenchon a posé, en des termes que chacun a salués comme étant très mesurés, une question légitime, que doivent se poser aujourd'hui nombre de nos concitoyens : y a-t-il étanchéité entre le travail des services des renseignements généraux et la campagne du candidat de l'UMP, au demeurant ministre de l'intérieur et patron des renseignements généraux ?
Cette question était fondée et Jean-Luc Mélenchon n'a formulé aucune accusation. Il a rappelé les faits et les problèmes qu'ils posent et il a demandé au ministre de l'intérieur de lui répondre. En l'absence - habituelle lors de ces questions - de ce ministre, un autre membre du Gouvernement a répondu à sa place, en tenant des propos qui n'ont pas lieu d'être dans notre assemblée.
En effet, alors que nous attendions une réponse et une argumentation, que nous étions tout à fait près à écouter, nous avons entendu un lot d'injectives et une mise en cause personnelle de notre collègue Jean-Luc Mélenchon, contre lequel ont été dirigées certaines accusations.
Monsieur le président, nous ne sommes pas sous un préau d'école, ni dans une salle des sports où l'on tient un meeting contradictoire. Nous sommes au Sénat, où l'opposition, dans le cadre de ses prérogatives, pose au Gouvernement des questions.
Dans sa réponse, un ministre - et je sais la sagesse de celui qui se trouve en ce moment au banc du Gouvernement - est entièrement libre de ses propos sur le fond, mais il doit respecter la Haute Assemblée dans la forme. Or je considère que la réponse de M. Hortefeux est sortie des limites admissibles dans le cadre des débats parlementaires.
Monsieur le président, le groupe socialiste vous demande donc très solennellement de transmettre cette protestation au président du Sénat, et il attend de la part du Gouvernement des excuses s'agissant d'un comportement qui lui semble absolument insupportable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Monsieur Frimat, je transmettrai bien entendu au président du Sénat la demande que vous venez de formuler.
Il ne m'appartient pas de prendre position sur le fond. Permettez-moi simplement de rappeler que M. Mélenchon a souhaité interroger le ministre de l'intérieur et que c'est le ministre délégué auprès de ce dernier qui lui a répondu.
Pour ma part, je regrette que les délais impartis pour poser une question ou formuler une réponse soient dépassés, parfois de façon très importante, car cette attitude ne permet guère à ces séances de se dérouler dans le climat le plus apaisé possible.
J'espère que nous parviendrons peu à peu à comprendre qu'un meilleur respect du temps attribué à chacun faciliterait l'organisation de nos débats. Je déplore que ce ne soit pas toujours le cas, ce qui pose parfois des difficultés, notamment au dernier intervenant.
14
NOMINATION DE MEMBRES de COMMISSIONs MIXTEs PARITAIREs
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution des commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique et du projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.
Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de ces commissions mixtes paritaires.
La liste des candidats établie par la commission des lois a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à ces commissions mixtes paritaires :
Titulaires : MM. Jean-Jacques Hyest, Christian Cointat, Patrice Gélard, Jean-René Lecerf, Philippe Arnaud, Bernard Frimat et Mme Eliane Assassi.
Suppléants : MM. José Balarello, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Charles Guené, Georges Othily, Hugues Portelli et Simon Sutour.
15
CANDIDATURES À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.
J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à cette commission mixte paritaire.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
16
Installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation
Adoption d'une proposition de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation (n° 22, 2005-2006, et n° 116).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi qui vous est soumise aujourd'hui vise à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumées dans tous les lieux d'habitation.
À la suite des accidents dramatiques que nous avons connus au cours de l'été 2005, le Gouvernement a confié à Patrick Doutreligne et Philippe Pelletier - respectivement responsable de la Fondation Abbé Pierre et président de l'Agence nationale de l'habitat, l'ANAH - la mission de proposer des mesures concrètes afin d'améliorer la sécurité des occupants de logements individuels collectifs et de logements d'urgence.
De nombreuses mesures ont d'ores et déjà été adoptées par le Gouvernement sur la base de leurs recommandations. Sans être exhaustifs, nous pouvons évoquer la loi portant engagement national pour le logement, qui prescrit le repérage des logements indignes, dans le cadre des plans départementaux pour le logement des populations défavorisées, permet d'expérimenter la déclaration préalable à la mise en location d'un logement et rend obligatoire le diagnostic des installations de gaz ou d'électricité à l'occasion des ventes de logements.
Au début de septembre 2006, les assises de la lutte contre l'habitat indigne ont permis de mobiliser plus de 800 acteurs de terrain, et avec l'aide de I'ANAH, en 2006, 135 000 logements ont été réhabilités et plus de 6 000 logements indignes ont été remis à niveau.
En outre, le Gouvernement a débloqué une enveloppe de 50 millions d'euros pour la mise en sécurité des structures d'hébergement collectif.
La modernisation du parc de logements français n'a jamais été aussi rapide : le programme de rénovation urbaine permet de mobiliser 35 milliards d'euros pour moderniser l'habitat de 530 quartiers. Près de 430 000 logements neufs ont été mis en chantier en 2006 - un record inégalé depuis trente ans - et le budget pour 2007 voté par I'ANAH atteint le niveau historique, le plus élevé depuis la création de cette agence, en 1971, de 577 millions d'euros.
Enfin, deux ordonnances très novatrices, en date respectivement des 15 décembre 2005 et 11 janvier 2006, ont considérablement renforcé les procédures de lutte contre l'habitat indigne.
Elles simplifient et améliorent les procédures et accordent davantage de droits aux locataires pour leur permettre d'obtenir la mise aux normes de décence de leur logement. Elles créent un privilège spécial immobilier et une solidarité entre les propriétaires et les exploitants successifs permettant de mettre fin à certains agissements des « marchands de sommeil », qui n'assurent jamais les obligations de travaux et de réparations des immeubles leur incombant.
Le rapport soulignait aussi la nécessité de développer la prévention des risques d'incendie dans les lieux d'habitation, en développant des actions d'information et en envisageant de rendre obligatoire l'installation de détecteurs avertisseurs autonomes de fumées.
Les immeubles d'habitation doivent répondre à des règles de sécurité dont le niveau d'exigence est élevé. La France se caractérise ainsi par un taux de décès par incendie inférieur à celui de nombreux grands pays comme les États-Unis, le Canada, la Grande-Bretagne ou la Norvège, qui ont pourtant rendu obligatoire le détecteur de fumées. Toutefois, ces statistiques ne sauraient justifier que nous ne cherchions pas à progresser.
La moitié des incendies d'immeubles d'habitation ont une origine qui se situe à l'intérieur du logement. Environ deux tiers des victimes sont tuées par les fumées et meurent dans leur chambre et 70 % des décès se produisent pendant la nuit. Ces quelques chiffres montrent bien l'enjeu d'une meilleure détection des fumées à l'intérieur du logement, afin de permettre aux occupants d'être alertés et d'évacuer le logement en feu.
Il ne saurait s'agir de créer un dispositif de détection incendie tel qu'il existe dans les établissements recevant du public, et dont l'efficacité repose sur la présence de personnels formés pour guider les usagers vers les sorties. Nous souhaitons plutôt apporter une réponse complémentaire à la sécurité passive de l'immeuble d'habitation, afin de prévenir le risque d'incendie qui affecte les résidents dans leurs propres logements, notamment pendant leur sommeil.
L'installation de détecteurs de fumées peut ainsi permettre d'améliorer la sécurité des habitants, sous réserve, toutefois, que les occupants du logement en connaissent bien l'usage et les conditions d'entretien.
Comme M. Jean-Louis Borloo s'y était engagé, une campagne d'information sur les risques d'incendie dans les habitations et sur les bons comportements que doivent adopter les occupants a été menée à l'automne 2006. Des spots radio, 100 000 affiches et un million de dépliants ont été diffusés. Il convient toutefois d'aller plus loin, en inscrivant cette campagne dans la durée et en développant ses moyens.
Sur la base des recommandations que vient de lui adresser le Conseil général des Ponts et Chaussées, le ministère du logement souhaite créer un outil de mutualisation des financements publics et privés, pour démultiplier les moyens et l'impact de ces campagnes d'information, mobiliser les assureurs, les syndics et les gérants d'immeubles et décliner des messages spécifiques auprès de certaines populations au travers des relais associatifs. Il convient également d'adosser cette campagne d'information annuelle à un ensemble d'événements nationaux et locaux qui lui assureront un plus grand impact médiatique.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, telle est la position du Gouvernement, qui approuve le principe de cette proposition de loi, telle qu'elle vous a été transmise. Celle-ci rend nécessaire une action d'accompagnement, qui a déjà été engagée mais qui doit être amplifiée et poursuivie durant plusieurs années afin d'améliorer la sensibilisation du public et l'apprentissage des comportements face au risque d'incendie. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René Beaumont, rapporteur de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, selon les données statistiques dont nous disposons désormais - « enfin », serais-je d'ailleurs tenté de dire -, les incendies domestiques ont fait, en 2005, 6 264 victimes, dont 295 morts et 728 blessés graves.
Si ces chiffres sont, bien sûr, moins élevés que les estimations précédentes, ils n'en sont pas moins intolérables.
Ils sont intolérables en raison des souffrances qu'ils représentent pour les victimes et leurs familles : ainsi, en une seule année, plus de 1 000 personnes auront perdu la vie dans des conditions terribles ou garderont, même après des mois ou des années de traitements très lourds et très pénibles, des séquelles irréparables.
Ils sont également intolérables parce qu'ils pourraient sans doute être très sensiblement réduits par de simples mesures de prévention, comme l'attestent les statistiques émanant de pays du nord de l'Europe déjà équipés de détecteurs de fumée depuis quelques années.
C'est pourquoi, même si la commission des affaires économiques a eu quelques doutes quant au caractère législatif de ce texte, nous souhaitons une adoption rapide de la proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation qui nous est aujourd'hui soumise, après avoir été adoptée par l'Assemblée nationale sur l'initiative de deux députés, MM. Damien Meslot et Pierre Morange.
Ce texte nous paraît en effet pouvoir utilement compléter la réglementation nationale relative à la protection des habitations contre l'incendie.
Deux conditions nous semblent toutefois indispensables pour que le texte atteigne toute son efficacité : d'une part, son application doit être précédée d'un important effort d'information et de formation du public et, d'autre part, des ajustements du dispositif nous paraissent souhaitables.
Ce sont ces points que je voudrais évoquer brièvement.
Déjà obligatoire dans les établissements recevant du public, l'installation de détecteurs de fumée dans les logements complétera la réglementation relative à la sécurité incendie des habitations.
Cette réglementation a essentiellement pour objet de limiter les conséquences des incendies, en garantissant la résistance au feu de la structure des immeubles et des matériaux de construction.
Elle est toutefois relativement récente : elle existe depuis 1967 pour les immeubles de grande hauteur, mais, pour tous les autres immeubles d'habitation, il a fallu attendre 1988 pour qu'entrent en vigueur des normes suffisamment exigeantes.
De ce fait, comme l'a souligné M. le rapporteur de l'Assemblée nationale, ce sont aujourd'hui environ 80 % des logements qui ne sont pas conformes à ces normes.
Je n'oublie pas, bien sûr, et je les cite dans mon rapport écrit, les importantes mesures qui ont été prises pendant l'actuelle législature pour lutter contre l'habitat indigne ou dégradé et qui contribueront aussi à améliorer la sécurité incendie ; M. le ministre a rappelé quelques-unes de ces mesures.
Mais tout cela ne suffit pas : même si les bâtiments sont conformes aux normes, un incendie éclatant dans un logement peut aujourd'hui tuer en quelques minutes, essentiellement en raison des fumées toxiques dégagées par la combustion de matériaux présents dans l'ameublement ou les équipements domestiques.
Ce constat et le bilan positif des expériences étrangères démontrent l'utilité des détecteurs de fumée pour limiter les conséquences humaines des incendies domestiques et, en particulier, de ceux qui se déclarent la nuit : ce sont les moins fréquents - ils représentent 30 % des sinistres seulement -, mais ce sont de loin les plus meurtriers, puisqu'ils entraînent 70 % des décès.
Permettez-moi d'ajouter, monsieur le ministre, que cette utilité serait renforcée si, comme au Royaume-uni, on imposait parallèlement dans l'industrie de l'ameublement l'utilisation de matériaux plus résistants au feu.
Une réflexion est en cours à ce sujet, nous a-t-on dit. J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez nous le confirmer et nous annoncer son prochain aboutissement.
J'aborderai ensuite le préalable de l'information et de l'éducation du public. Vous aviez vous-même insisté sur ce point, et à juste titre, monsieur le ministre, lors du débat à l'Assemblée nationale.
Comme le soulignait le rapport Pelletier-Doutreligne, l'installation obligatoire de détecteurs de fumée serait « vaine, sinon imprudente », sans une sensibilisation préalable du public.
Souvenons-nous, en effet, des dix-sept victimes de l'incendie de l'Hay-les-Roses, en septembre 2005 : à la différence des drames survenus à Paris peu de temps auparavant, celui-ci était imputable non pas à la vétusté ou à la suroccupation des locaux sinistrés, mais bien à une réaction de panique, causée par le déclenchement d'une alarme.
Certes, des campagnes d'information sur la prévention des incendies et la conduite à tenir en cas de sinistre sont régulièrement organisées et le travail de proximité accompli par les services d'incendie et de secours, les associations ou les organismes d'HLM est souvent remarquable.
Cependant, tout cela n'est pas à la hauteur du problème. Vous le savez bien, monsieur le ministre, puisque vous aviez annoncé l'an dernier des actions d'une toute autre ampleur. De telles actions sont en effet indispensables, en ce domaine comme en d'autres, si l'on veut vraiment faire évoluer les comportements. Nous attendons donc dès à présent leur mise en place, et nous serons attentifs à ce qu'il en soit rendu compte au Parlement, comme le prévoit l'un de nos amendements.
J'en viens aux modifications que nous proposerons au Sénat pour améliorer l'efficacité du dispositif.
En premier lieu, il ne nous paraît pas concevable que la loi impose un modèle unique de détecteur, le détecteur avertisseur autonome de fumée, ou DAAF, appareil fonctionnant sur pile et comportant une alarme sonore intégrée.
Ces appareils ont certes l'avantage de pouvoir être installés rapidement, sans travaux importants et pour un coût relativement modique. Ils peuvent donc représenter une solution minimale pour l'équipement rapide des logements existants.
Nous nous étonnons toutefois que le texte mentionne expressément et exclusivement ces appareils, au détriment de dispositifs plus fiables et plus performants : détecteurs fonctionnant sur secteur et batterie, réseau de détecteurs associés à une alarme sonore qui, elle-même, peut être reliée à l'extérieur du logement à un poste de sécurité, s'il en existe un dans l'immeuble, ou à un réseau de télésurveillance.
Il serait aussi choquant que dangereux que la loi impose un choix technique plutôt qu'un autre, surtout si ce choix ne répond pas aux besoins de certaines catégories de personnes : pensons en particulier aux personnes âgées, aux personnes handicapées ou aux très jeunes enfants.
En second lieu, nous estimons nécessaire, dans tous les cas, que le propriétaire du logement soit responsable de l'installation et de l'entretien des détecteurs de fumée. Nous rappellerons que, depuis l'adoption de la loi portant engagement national pour le logement, un accord collectif local pourra permettre d'inclure cet entretien dans les charges récupérables.
Je sais, monsieur le ministre, que ce choix ne vous agrée pas totalement. Mais, comme nos voisins belges, il nous semble s'imposer, pour des raisons à la fois de logique et d'efficacité.
Tout d'abord, l'installation de détecteurs de fumée concourt à la conservation et à la valorisation du patrimoine, ainsi qu'à la sécurité des occupants. La charge doit donc en incomber aux propriétaires, comme celle de la sécurité des portes de garages, des piscines ou des ascenseurs.
Ensuite, il sera possible de prévoir des aménagements permettant l'installation de détecteurs sur secteur ou leur mise en réseau lors de la construction des logements ou à l'occasion de leur rénovation, et de mettre à profit les compétences et les moyens techniques dont disposent les bailleurs institutionnels ou les copropriétés pour organiser, dans de bonnes conditions, l'installation rapide et l'entretien des appareils. Les données sur l'application de la loi pourront également être plus facilement collectées.
Permettez-moi à ce propos, monsieur le ministre, d'aborder une question que le texte ne fait qu'effleurer, mais qui est au centre du sujet : le coût de la mesure qui nous est proposée.
Même si ce coût reste très modique au regard des drames qu'il permettra d'éviter, il ne sera pas tout à fait négligeable, d'autant que l'effort de construction doit actuellement être intensifié, et l'accès de tous au logement facilité.
Devant l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, vous aviez évoqué la possibilité de mener des concertations tendant à faire participer les assureurs au financement de l'installation de détecteurs de fumée dans les logements. Cette idée nous paraît excellente. Nous souhaiterions savoir si vous avez déjà engagé cette concertation, ou si vous comptez toujours le faire.
En conclusion, sous réserve des amendements qu'elle propose, la commission des affaires économiques demande au Sénat d'adopter la proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 48 minutes ;
Groupe socialiste, 31 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes ;
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Claude Danglot, dont nous saluons la première intervention à la tribune. (Applaudissements.)
M. Jean-Claude Danglot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, remplaçant mon ami Yves Coquelle, qui a démissionné en début d'année, je suis très honoré d'intervenir pour la première fois dans cet hémicycle
On ne peut examiner la proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation des détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation sans penser aux morts et aux souffrances atroces causées par les incendies domestiques.
En tant qu'ancien sapeur-pompier professionnel, je suis d'autant plus sensible aux mesures qui pourront être prises pour garantir la sécurité des personnes contre les ravages du feu.
Il a été souligné, à juste titre, qu'un grand nombre de logements ne sont pas soumis à la réglementation relative à la protection des habitations contre l'incendie.
Bien souvent, les incendies frappent des personnes vivant dans des conditions précaires et inacceptables. Les drames survenus lors de l'été 2005 ont encore une fois montré qu'il y avait urgence à agir contre l'insalubrité et la vétusté des immeubles.
L'horreur de ces accidents ne doit toutefois pas nous aveugler au point d'adopter une réglementation de circonstance, qui pourrait se révéler insuffisante, voire dangereuse pour nos concitoyens.
Lors des débats qui se sont tenus à l'Assemblée nationale, on a pu entendre, pour justifier le dispositif prévu par la proposition de loi, que personne, aujourd'hui, n'envisage de remettre en question l'obligation de porter la ceinture de sécurité en voiture. C'est ce type de raccourci qu'il nous faudra éviter pour être en mesure de prendre une décision réfléchie et dépassionnée.
La lutte contre les incendies en général et la question des détecteurs de fumée en particulier soulèvent en effet des problématiques spécifiques, problématiques qui se distinguent de celles que l'on rencontre en pratique lors de la mise en oeuvre de l'obligation du port de la ceinture de sécurité.
Tout d'abord, en matière de sécurité, il semble largement admis qu'une approche coercitive ou directive s'avèrerait inefficace sans sensibilisation du public concerné.
À titre d'exemple, rappelons que l'obligation du port de la ceinture de sécurité s'est accompagnée de campagnes répétées de sensibilisation du public sur les dangers auxquels il s'exposait. En mars dernier encore, une campagne sur le port de la ceinture de sécurité à l'arrière du véhicule était lancée à la télévision, sur Internet et à la radio.
En ce qui concerne les accidents liés aux incendies, quel est l'état actuel de l'information du public ? Celle-ci est quasi nulle, en tout cas très largement insuffisante, puisqu'elle se limite à quelques dépliants.
Pourtant, il y a un an déjà, lors des débats à l'Assemblée nationale, les députés comme le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, M. Borloo, s'accordaient à dire que l'obligation d'installation des détecteurs de fumée serait inefficace sans « un savoir-faire et une sensibilisation du public », il s'agit des propos de M. Borloo.
Si cela ne suffisait pas à nous convaincre, la lecture de la note de l'Union sociale pour l'habitat du 26 avril 2006 y parviendrait. Cette note rend compte de l'expérimentation de l'installation des détecteurs de fumée dans certains logements. Le bilan en est plus que mitigé.
Ainsi, il est fait état de certaines difficultés concernant le bon fonctionnement des détecteurs de fumée, comme le détournement des piles pour une utilisation personnelle de l'habitant ou leur enlèvement volontaire en raison de déclenchements intempestifs. Est-ce là le comportement qu'adopterait une personne réellement informée du danger ?
Ensuite, il faut souligner que le détecteur de fumée ne permet que de signaler le danger, sans y apporter de remède.
C'est pourquoi il est nécessaire d'aller au-delà de la sensibilisation du public et de lui offrir une véritable formation relative aux comportements à adopter en cas d'incendie.
Cette formation, j'y insiste, est seule à même de sauver des vies. Il est fondamental que nos concitoyens connaissent la façon dont ils doivent réagir selon l'origine de l'incendie. Cela nécessite une information répétée pour que les comportements deviennent des réflexes, seuls efficaces dans des situations d'extrême danger.
Les effets contraires du système d'alarme ont été malheureusement illustrés lors du dramatique incendie dans une HLM de l'Haÿ-les-Roses auquel M. le rapporteur a fait référence.
Comme le souligne le rapport de MM. Doutreligne et Pelletier, les expériences étrangères nous ont enseigné qu'il serait vain, voire imprudent, de rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée avant la mise en oeuvre d'une campagne massive de sensibilisation du public.
Vous indiquez, monsieur le rapporteur, que les actions et les moyens nécessaires à cette information doivent être mis en place sans délai, avant l'entrée en vigueur du dispositif.
Devant un tel consensus, et plus d'un an après les premières discussions relatives aux détecteurs de fumée, on est en droit de se demander pourquoi ladite campagne d'information tarde à venir, et surtout si elle interviendra plus vite après l'adoption de la proposition de loi. En d'autres termes, le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a-t-il la volonté de financer une telle campagne ? J'aimerais qu'il soit répondu ici à cette question.
Face aux doutes qui persistent sur la dernière question et malgré la nouvelle rédaction proposée pour l'article 4 par l'amendement de la commission des affaires économiques du Sénat, il nous paraît plus prudent de privilégier, dans un premier temps, l'information et la formation des personnes, donc de remettre à plus tard l'adoption de la proposition de loi.
Il n'est cependant pas inutile, pour les débats de demain, de présenter nos remarques sur les dispositions que comporte ce texte.
Le contenu souvent hésitant des débats à l'Assemblée nationale et des rapports des différents organismes intéressés par la question montre que la réflexion n'est pas encore terminée et que le texte intervient prématurément. En effet, qu'il s'agisse du type de détecteur, de son prix, de la prise en charge de son installation et de sa maintenance ou de la sanction du dispositif, les difficultés soulevées par la proposition de loi sont loin d'être réglées.
Il est évident que le coût financier d'une mesure visant à garantir la sécurité des personnes ne devrait pas être une raison pour renoncer. Cependant, cette question est, hélas ! très importante pour un grand nombre de nos concitoyens, qui ont du mal à vivre de leurs revenus, notamment face à l'augmentation des loyers et des charges locatives.
Éviter de traiter la question du coût des détecteurs de fumée reviendrait à ignorer une partie importante de ceux qui touchent des revenus modestes ou qui sont dans des situations de précarité telles qu'un investissement de 60 euros pèserait trop lourdement sur leur budget.
Sans compter que plusieurs détecteurs peuvent être nécessaires suivant la taille de l'habitation. Leur entretien a également un coût, ainsi que leur pose. De plus, ces appareils ont une durée de vie limitée.
La question de la charge du coût n'a pas été résolue. Faire peser cette charge sur le locataire pose évidemment des problèmes juridiques, mais surtout des problèmes financiers, notamment en ce qui concerne les locataires les plus pauvres. Se tourner vers les propriétaires soulève la question inévitable de la répercussion indirecte des charges sur le locataire.
Notons que l'installation de détecteurs de fumée dans les 4 millions de logements de type HLM, à raison de deux appareils en moyenne par logement, représente un coût d'investissement minimum de 280 millions d'euros.
En bref, il faudrait que l'État soit mis à contribution pour financer ce dispositif de sécurité, au moins pour ce qui concerne les foyers les plus pauvres et les personnes les plus vulnérables. Mais une telle mesure n'est pas prévue.
De plus, indépendamment du coût du dispositif, il faut être prudent quant aux conséquences, en termes de responsabilité, pour la personne à laquelle incombe l'entretien de l'appareil. À ce sujet, la note délivrée par les offices d'HLM relève que l'ensemble des logements ne pourra être régulièrement visité. Le taux de pénétration des logements dans ce type d'opération de maintenance ne dépasse pas, en général, 80 %.
Enfin, je voudrais revenir sur la sanction du dispositif.
La proposition de loi prévoyait initialement une mesure abominable pour les personnes assurées contre le risque incendie. Ainsi, la possibilité offerte aux assureurs de pratiquer une franchise supplémentaire si le logement sinistré ne possède pas de détecteur de fumée leur aurait permis, dans les faits, de s'affranchir de leur obligation d'indemnisation. Heureusement, cette disposition a été abandonnée.
Cependant, on sent qu'une certaine inquiétude persiste à la lecture du garde-fou prévu par l'article 3 bis. C'est pourquoi il est nécessaire de bien peser les implications d'une telle obligation en matière d'assurance, et ce même en cas de possibilité d'une minoration de la prime d'assurance.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues : si l'installation de détecteurs de fumée est une mesure nécessaire pour améliorer la protection de nos concitoyens, elle ne nous semble absolument pas suffisante. En effet, la protection ne peut être efficace que si les personnes elles-mêmes se sentent concernées.
C'est pourquoi l'urgence réside aujourd'hui dans l'information et la formation de nos concitoyens en matière de lutte contre les incendies. Cette sensibilisation du public devrait présenter autant les règles de sécurité à respecter pour éviter les incendies que les comportements à adopter en cas d'incendie.
La proposition de loi, qui pose plus de problèmes qu'elle n'en résout, intervient prématurément. C'est pourquoi les membres du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous discutons cet après-midi d'une proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation.
Je sais que l'auteur de ce texte est élu d'un département dans lequel une ville a été endeuillée par un grave incendie voilà quelque temps. Je comprends son émotion, mais j'estime qu'il revient aux parlementaires de proposer des textes applicables et efficaces.
Nous débattons d'un sujet important. La prévention des risques domestiques est une nécessité dans notre pays. Il faut rappeler qu'en 2005 près de 800 personnes sont décédées à la suite d'un incendie dans leur habitation. Chacun de nous a en mémoire les incendies tragiques qui ont endeuillé Paris en 2005 ou Belfort au mois de mars 1999 et qui ont provoqué des dizaines de victimes.
Il est donc naturel que nos concitoyens attendent des pouvoirs publics et de leurs élus des solutions concrètes pour essayer de réduire les risques d'incendie. Mais nous considérons que la réponse apportée par la proposition de loi que nous examinons, et qui a été récemment adoptée par l'Assemblée nationale, n'atteindra pas l'objectif qui lui est assigné, à savoir réduire le nombre de décès.
L'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation n'est qu'un outil technique, qui ne règle pas le problème primordial de la prévention. Il s'agit d'une réponse non pas globale, mais parcellaire.
En effet, pour être efficace, l'obligation d'installer des détecteurs de fumée doit être précédée d'une campagne massive de sensibilisation à la lutte contre l'incendie ; c'est ainsi que le Royaume-Uni et les États-Unis ont réglé la question. Au Royaume-Uni, les pouvoirs publics ont consacré un budget colossal à la sensibilisation des populations et ils ont obtenu des résultats significatifs. Il en est de même aux États-Unis.
En France, une autre méthode est retenue, qui, selon les experts, peut s'avérer inutile, voire dangereuse. La Fédération nationale des sapeurs pompiers de France, qui regroupe plus de 250 000 adhérents - elle n'a été auditionnée ni par l'Assemblée nationale ni par le Sénat - estime que la proposition de loi, tout en ayant le mérite d'exister, peut être dangereuse. En effet, face au feu, les populations ne savent pas comment réagir.
Dans un établissement recevant du public, les consignes de prévention sont claires et les personnes sont évacuées. Des exercices d'évacuation sont régulièrement organisés.
En ce qui concerne les lieux d'habitation, la situation n'est pas la même. Si un feu se déclare dans les parties communes, les occupants doivent absolument rester dans leur logement. En revanche, si un incendie se produit dans un appartement, les habitants doivent quitter au plus vite leur logement. Les statistiques démontrent que 80 % des incendies se déclarent dans les immeubles d'habitation. Or les victimes sont essentiellement recensées dans les parties communes. Force est de constater que la proposition de loi ne traite que des parties privatives, en délaissant les parties communes, qui semblent être les plus dangereuses.
La Fédération nationale des sapeurs pompiers de France considère que, pour lutter efficacement contre les incendies meurtriers, le législateur doit adopter une réglementation nationale relative à la lutte contre les incendies y compris pour les bâtiments existants. En effet, ces dernières années, 90 % des feux qui ont fait des victimes ont eu lieu dans des bâtiments construits avant 1986.
En outre, pour évaluer l'efficacité des détecteurs de fumée, je vous invite à revenir sur les expériences conduites en France. On s'aperçoit que le bilan de la mise en place de détecteurs de fumée est pour le moins mitigé. Entre 2001 et 2004, deux organismes d'HLM importants ont décidé d'installer des détecteurs dans un ensemble de plus de 2 000 logements. Si l'un de ces organismes a maintenu ce dispositif, l'autre a jugé préférable de le suspendre.
En effet, à de nombreuses reprises, ces détecteurs ont été déclenchés de façon intempestive lors de la préparation de repas ou par la vapeur d'eau émanant de la salle de bain. Exaspérés par ces déclenchements intempestifs, les occupants sont souvent tentés de retirer la pile des détecteurs, les rendant ainsi parfaitement inopérants.
Eu égard au contexte de notre pays où la prévention des incendies dans les lieux d'habitation n'en est qu'à ses balbutiements, ces détecteurs peuvent avoir un effet pervers. En effet, ils nuisent à la prévention en déresponsabilisant les habitants. Confiants dans leur système de protection, ceux-ci pourraient avoir des comportements à risques.
Pour prévenir de tels comportements, seules la formation et la pédagogie seront efficaces. Je tiens, en la matière, à saluer la déclaration récente de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement dans laquelle il s'engage à lancer une campagne pluriannuelle de sensibilisation aux risques incendie.
Cependant, les effets de cette campagne ne donneront des résultats que dans les prochaines années, alors que si cette proposition de loi est adoptée, elle est susceptible d'être appliquée dans les prochains mois.
Dans un rapport remis à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, MM. Doutreligne et Pelletier avaient formulé plusieurs recommandations. Ils souhaitaient ne pas rendre obligatoire l'installation des détecteurs de fumée, inciter les occupants, par une réduction d'impôt, à installer progressivement de tels équipements, attendre que la moitié des ménages soient équipés avant d'imposer cette installation et, surtout, la rendre gratuite pour les personnes vulnérables. Je regrette que la proposition de loi n'ait pas pris en compte ces recommandations et qu'aucun amendement n'ait été déposé en ce sens.
Enfin, je terminerai mon propos en insistant sur le coût de ce dispositif. Je souhaite, au préalable, rappeler à notre assemblée que, selon l'INSEE, la part du revenu consacrée au logement par les Français s'élève aujourd'hui à 25 %. Face à la hausse du prix de l'immobilier et des loyers, il n'est pas possible d'alourdir encore plus la charge du logement dans le budget des ménages.
L'estimation du coût généré par une installation obligatoire de détecteurs de fumée est extrêmement floue ; elle peut varier d'un logement à l'autre. Les dépenses d'entretien doivent également être prises en compte. Par ailleurs, ces dispositifs ont une durée de vie très limitée.
Selon l'Union sociale pour l'habitat, pour un appartement de type F4, il faut au moins deux détecteurs. Cela finit par coûter cher. De plus, il semble qu'une seule entreprise en France distribue les détecteurs certifiés NF. Se pose alors la question du monopole rendu obligatoire par la loi.
Par ailleurs, le groupe socialiste considère qu'il est anormal de faire supporter les frais de cette installation uniquement par les locataires ou les petits propriétaires.
Cette proposition de loi révèle une approche simpliste et segmentée du problème. Même si elle est populaire, elle n'apporte ni réponse probante ni aucune garantie de résultat. Pour ces raisons, le groupe socialiste ne votera pas ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. André Dulait.
M. André Dulait. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'inscription à l'ordre du jour du Sénat de cette proposition de loi, malgré un programme de travail des assemblées particulièrement chargé, constitue pour moi une première satisfaction. En effet, avec mon collègue député Damien Meslot - qui a eu l'initiative, avec Pierre Morange, de cette proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en octobre 2005 - ainsi qu'avec plusieurs collègues sénateurs, je me suis efforcé d'obtenir l'examen de ce texte au Sénat avant la fin de cette législature.
Certains ont jugé qu'il était insuffisant ou prématuré. Pour ma part, j'estime que nous avons tout intérêt à essayer de rejoindre les pays qui nous ont devancés depuis quelquefois plus de dix ans, notamment les pays anglo-saxons.
Il nous faudra mener une campagne d'information, de formation, sans laquelle ce projet serait voué à l'échec, en y associant, notamment, comme tel est déjà le cas dans un certain nombre d'établissements, l'éducation nationale, car c'est par le biais de cette dernière et grâce à une sensibilisation des enfants à ce risque que nous parviendrons à progresser.
Il s'agit de combler les lacunes de la législation en matière de prévention des incendies et de lutter pour réduire le retard de la France dans ce domaine. Il y va de la santé publique.
Chaque année, notre pays connaît son triste lot d'incendies tragiques provoquant décès et victimes multiples. Ces dix dernières années, 2,5 millions de foyers français ont été victimes d'un sinistre incendie, 100 000 personnes ont subi des dommages corporels et plus de 8 000 personnes sont décédées. J'insiste sur les dommages corporels, qui ont créé des incapacités non seulement temporaires, mais aussi, souvent, hélas ! à vie.
Nous savons, grâce à l'expérience acquise dans le domaine de la prévention par les pays qui nous ont devancés, que ce bilan peut être considérablement allégé.
L'heure n'est plus à la lecture et à la comparaison des statistiques. Il faut agir !
Dès 1997, j'ai créé, dans mon département des Deux-Sèvres, désormais célèbre, avec le conseil général, les mutuelles d'assurances et des entreprises, le Centre européen de prévention des risques, le CEPR, un centre de recherche appliquée dans les domaines de la prévention des risques de la vie courante.
Le CEPR a une triple mission : il crée des sites pilotes d'expérimentation ; il collecte et analyse toute information concernant la prévention et met cette documentation à la disposition du grand public. Enfin, le CEPR est un centre de formation intervenant auprès des entreprises et du monde scolaire et universitaire.
Une expérience a été conduite, avec l'aval des services de sécurité incendie du département, donc des sapeurs-pompiers, sur 500 logements sociaux, dans les Deux-Sèvres, en 1998 : la mise en place d'appareils labellisés NF et la sensibilisation des locataires sont des éléments déterminants.
Nous avons là l'esprit qui a prévalu à l'élaboration de cette proposition de loi : état des lieux, comparaison avec d'autres pays, sensibilisation et mise en oeuvre.
Nous savons que, malgré de nombreuses campagnes de prévention, en liaison avec les services d'incendie, pour favoriser l'installation des détecteurs de fumée, les résultats n'ont pas été probants.
Le principe de précaution est aujourd'hui devenu une priorité pour nos concitoyens. La réglementation qui a permis de mettre en place, notamment, des mesures pour lutter contre l'habitat indigne grâce à des matériaux offrant une meilleure résistance au feu en est une démonstration.
L'accroissement des contraintes qui pèsent sur les maisons d'habitations - avec les diagnostics amiante, plomb, termites, exposition aux risques technologiques ou naturels - a pu être vécu comme une atteinte à la libre administration de leur bien par les propriétaires.
Toujours est-il qu'il n'y a pas eu, récemment, de baisse significative des sinistres. Si 70 % des incendies se produisent le jour, 70 % des décès sont à déplorer la nuit. Et ces décès concernent, malheureusement, souvent des personnes âgées, des femmes et des enfants.
Le 7 juin dernier, j'ai participé au colloque organisé par Damien Meslot sur le thème « Prévention de l'incendie domestique : comment combler le retard français ? ». À cette occasion, les échanges avec les différents acteurs du logement, de la protection et de la santé publique, que ce soient les services d'incendie, les assureurs, les organismes d'HLM, les professions médicales ou les associations de locataires, ont permis de confirmer la nécessité d'installer des détecteurs avertisseurs autonomes de fumées, les DAAF, dans tous les locaux d'habitation.
Ainsi, 50 % des personnes qui meurent chaque année pourraient être sauvées et bien des souffrances évitées pour les victimes de dommages corporels, sans compter la réduction du coût financier pour la société.
Il appartiendra au débat parlementaire de définir les obligations qui doivent peser en priorité sur les propriétaires pour gagner en efficacité, ainsi que la nature des détecteurs de fumée reliés au secteur ou fonctionnant sur pile. Il faudra également poser la question de l'entretien régulier des DAAF ou encore de la mise en place d'équipements complémentaires pour renforcer la sécurité domestique, notamment dans les parties communes.
Imposer des détecteurs normalisés dans chaque local d'habitation constitue un saut qualitatif qui nous rapprochera de la réglementation de bien des pays anglo-saxons ou scandinaves. Cette mesure doit bien sûr s'accompagner d'une information auprès des usagers, à définir en coopération avec les services d'incendie et de secours, mais aussi avec les assureurs et les bailleurs sociaux.
La sensibilisation des publics scolaires constitue également l'une des clés de la réussite de la démarche et le prolongement de la prévention en matière de risques domestiques.
C'est pourquoi le groupe de l'UMP votera pour ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué. Les orateurs se sont exprimés avec sérénité, en tant qu'élus ou sur un plan plus personnel, sur ce sujet sensible.
Cette proposition de loi va permettre de relancer les consultations engagées pour préparer l'installation des détecteurs de fumée, ainsi que l'apprentissage par le public de ces nouveaux dispositifs.
Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, la concertation avec les assureurs en vue du partage des coûts de la campagne d'information et de l'installation des détecteurs de fumée : je puis vous indiquer que cette concertation est d'ores et déjà engagée et qu'elle doit se poursuivre sur la base des travaux législatifs que nous accomplissons aujourd'hui.
Mais, sans attendre, le Gouvernement a financé seul la campagne d'information de 2006 à la radio et par dépliants. Il a ainsi clairement montré sa détermination, qui s'inscrit dans la durée ; M. Jean-Louis Borloo a eu l'occasion de l'affirmer.
Par ailleurs, s'agissant des meubles, un décret est sur le point d'être publié pour imposer des tests afin de prévenir les risques d'incendies provoqués par la cigarette. La Commission européenne est saisie d'une demande de normalisation dans ce domaine.
Nous poursuivons la modernisation de l'habitat, nous renforçons les diagnostics des installations de gaz et d'électricité, nous développons les actions d'information avec l'ensemble des acteurs, et nous mettons en place des relais qui soient mobilisables dans ce type de circonstances.
Chacun aura bien compris que le Gouvernement a la ferme volonté d'intensifier les campagnes de sensibilisation et d'information. La voie a été montrée, l'action du Gouvernement en la matière s'inscrit dans la durée : je tenais, à cet égard, à rassurer l'ensemble des intervenants. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
I. - L'intitulé du chapitre IX du titre II du livre Ier du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigé : « Sécurité des immeubles à usage d'habitation ».
II. - Les articles L. 129-1 à L. 129-7 du même code sont regroupés dans une section 1 intitulée : « Dispositions générales pour la sécurité des occupants d'immeubles collectifs à usage d'habitation ».
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Beaumont, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I.- Dans l'intitulé du chapitre IX du titre II du livre I du code de la construction et de l'habitation, le mot : « collectifs » est supprimé.
II.- Avant l'article L.129-1 du même code, sont insérés une division et son intitulé ainsi rédigés :
« Section 1.- Sécurité des équipements communs des immeubles collectifs à usage principal d'habitation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Beaumont, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé.
Article 2
Le chapitre IX du titre II du livre Ier du code de la construction et de l'habitation est complété par une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Détecteurs avertisseurs autonomes de fumée
« Art. L. 129-8. - L'occupant ou, le cas échéant, le propriétaire d'un logement doit installer dans celui-ci au moins un détecteur avertisseur autonome de fumée. Il doit veiller à l'entretien et au fonctionnement de ce dispositif.
« Art. L. 129-9. - Une déclaration d'installation du ou des détecteurs avertisseurs autonomes de fumée doit être transmise par l'occupant ou, le cas échéant, le propriétaire d'un logement, à l'assureur avec lequel il a contracté un contrat d'assurance contre le risque d'incendie.
« Art. L. 129-10. - Les modalités d'application des articles L. 129-8 et L. 129-9, notamment les cas dans lesquels les obligations qu'ils définissent pèsent sur le propriétaire du logement, les caractéristiques du détecteur avertisseur autonome de fumée et les conditions d'installation, d'entretien et de fonctionnement, sont définies par décret en Conseil d'Etat. »
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Beaumont, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la section 2 proposée par cet article pour compléter le chapitre IX du titre II du livre I du code de la construction et de l'habitation :
« Section 2
« Installation de détecteurs de fumée dans les locaux à usage principal d'habitation
« Art.L.129-8.- Tout propriétaire de locaux à usage principal d'habitation est tenu d'installer dans ces locaux au moins un détecteur de fumée normalisé et de veiller à sa maintenance.
« Il notifie cette installation à l'assureur avec lequel il a conclu un contrat garantissant les dommages d'incendie.
« Art. L.129-9 -Les modalités d'application de l'article L.129-8 sont fixées par décret en Conseil d'État. Ce décret définit au moins les caractéristiques et les conditions de la normalisation des détecteurs de fumée, ainsi que les conditions de leur installation et de leur maintenance. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Beaumont, rapporteur. Il s'agit là d'un amendement primordial, puisqu'il vise à réécrire en partie l'article 2, qui est l'article essentiel de cette proposition de loi.
Deux modifications importantes sont proposées par la commission.
La première consiste à supprimer toute référence aux détecteurs avertisseurs autonomes de fumée, référence qui nous a beaucoup surpris, puisqu'il s'agit d'un seul type de matériel, alors qu'il en existe beaucoup d'autres : mieux vaut avoir une conception beaucoup plus large du dispositif, d'autant que les autres matériels sont souvent plus performants, plus fiables et mieux adaptés à certaines situations et besoins spécifiques.
La commission souhaite donc que figurent dans le texte de loi les options techniques les plus diverses possibles, sous réserve, néanmoins, que tous ces appareils soient normalisés. Actuellement, ils ne le sont pas tous : des enquêtes récentes ont démontré que, sur le marché, de nombreux détecteurs de fumée présentent de graves insuffisances, voire de profonds dangers quant à leur fonctionnement ou leur absence de fonctionnement.
La seconde modification proposée par la commission concerne la responsabilité de l'installation et la maintenance des détecteurs, quels qu'ils soient, maintenance qui ne se limite pas, comme on le dit souvent, au remplacement des piles, mais qui est beaucoup plus vaste et qui doit incomber forcément au propriétaire des locaux d'habitation. En effet, au même titre que d'autres dispositifs - par exemple ceux qui concernent les ascenseurs ou les piscines - il s'agit d'éléments supplémentaires de sécurité qui appartiennent au propriétaire, lequel a la responsabilité de leur installation et de leur fonctionnement. Il ne peut en être autrement !
Le texte actuel, tel qu'il est issu des travaux de l'Assemblée nationale, fait mention du propriétaire, tout en précisant : « le cas échéant », ce qui, dans un texte législatif, ne manque pas de poser problème. Pour notre part, nous estimons que la responsabilité de l'installation et du fonctionnement des détecteurs doit systématiquement être assumée par le propriétaire.
Je ne rappellerai pas les raisons de droit et de fait qui conduisent la commission à prendre cette position ; je les ai déjà largement exposées, notamment dans mon rapport écrit.
Bien entendu, la commission approuve les actions qui sont d'ores et déjà menées. Des solutions doivent être recherchées par tous ceux qui participeront à l'application de cette mesure, y compris le secteur de l'assurance.
Je souhaite que se poursuive la concertation engagée et que celle-ci aboutisse rapidement à un accord avec les assureurs, en particulier : trouver des partenaires nous semble tout à fait nécessaire en ce qui concerne tant l'installation et la maintenance des détecteurs de fumée, que les campagnes de communication, qui sont essentielles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Henri Cuq, ministre délégué. Cet amendement tend à modifier substantiellement l'économie de l'article 2, en visant principalement à faire peser la responsabilité de l'installation du détecteur de fumée sur le propriétaire des locaux.
Certes, la sécurité collective de l'immeuble repose sur des dispositions de construction, dont la charge doit être assurée par le propriétaire. Mais, je le rappelle, près de 50 % des incendies ont une origine située à l'intérieur des logements. Il convient, par la pose d'un détecteur dont il aura la charge, de responsabiliser l'occupant sur les actes susceptibles d'être à l'origine d'un incendie, mais aussi d'améliorer sa propre sécurité en cas d'incendie déclenché dans son logement, notamment pendant son sommeil. Vous le savez, 30 % des incendies ont lieu la nuit et sont malheureusement à l'origine de 70 % des décès.
En outre, si le propriétaire était chargé de la pose et de l'entretien du détecteur, il n'aurait aucune garantie sur la pérennité de l'état du dispositif à l'intérieur du logement. Il devrait y pénétrer chaque année pour en assurer la maintenance, ce qui est matériellement impossible. Si l'on entre dans les détails, il devrait aussi remplacer la pile du détecteur aussi souvent que nécessaire.
Pourtant, c'est bien l'occupant, responsable au sens du code civil et assuré à ce titre contre les incendies, qui peut déclarer la présence de ce détecteur auprès de son assureur.
Par conséquent, monsieur le rapporteur, cet amendement pose un vrai problème de fond, même s'il est vrai que, dans quelques cas particuliers comme les locations saisonnières ou les structures de logement temporaire, l'obligation de fourniture et d'entretien des détecteurs de fumée par le propriétaire peut se justifier.
En tout état de cause, s'agissant du décret prévu au dernier alinéa de cet amendement, il ne saurait être question de définir les caractéristiques et les conditions de la normalisation, laquelle est régie par des règles générales. En revanche, le décret doit définir les caractéristiques du détecteur et ses conditions d'installation, d'entretien et de fonctionnement, comme le prévoit le texte adopté par l'Assemblée nationale.
Le Gouvernement n'est pas insensible à cet amendement, mais il lui est impossible, pour les raisons de droit et de principe que je viens d'indiquer, d'émettre un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Je profite de l'examen de cet amendement déposé par la commission des affaires économiques pour remercier le rapporteur, M. René Beaumont, d'avoir bien voulu travailler sur ce texte.
Monsieur le ministre, cette proposition de loi, émanant de l'Assemblée nationale, a le mérite d'exister. Nous ne pouvons pas être insensibles à ce problème, car nous sommes nombreux, ici, à avoir reçu des familles endeuillées par la perte d'un ou plusieurs membres, notamment des enfants, à la suite d'un incendie domestique.
J'ai bien écouté l'ensemble des intervenants. Vous-même, monsieur le ministre, avez évoqué certaines difficultés de mise en oeuvre de cette proposition de loi eu égard, notamment, à l'information de nos concitoyens et aux rapports entre le propriétaire et le locataire.
Aujourd'hui, nous essayons tout simplement, au travers de ce texte, de faire avancer les choses. Nous n'en sommes qu'à la première lecture. Après la discussion à l'Assemblée nationale, la commission, en particulier M. le rapporteur, s'est efforcée d'apporter une réponse plus satisfaisante. Cet amendement est donc très important à nos yeux.
Par conséquent, malgré les liens d'amitié qui nous unissent, je ne pourrai pas suivre l'avis du Gouvernement et je soutiendrai la position de la commission. Au demeurant, vous l'avez entendu, notre famille politique y est également très sensible.
Monsieur le ministre, ce texte fera encore l'objet de deux lectures. D'ores et déjà, compte tenu de la position du Gouvernement, je tenais à vous remercier d'avoir bien voulu l'inscrire à l'ordre du jour complémentaire du Sénat.
Plusieurs arguments ont été avancés. Si nous pouvons effectivement trouver des obstacles juridiques au fait que l'installation du détecteur soit à la charge du propriétaire, vous n'êtes pas sans savoir qu'il est toujours possible, dans n'importe quel bail, de confier l'entretien des installations de sécurité au locataire - je pourrais vous citer de nombreux exemples -, notamment dans une entreprise ou dans une exploitation agricole. Par conséquent, pourquoi ne pas prévoir une telle disposition pour les habitations individuelles ? (Marques d'assentiment sur les travées de l'UMP.)
Cette proposition de loi tend à répondre à la détresse de toutes ces personnes, qui, dans leur famille ou leur proche voisinage, ont eu à déplorer un décès causé par un incendie domestique. La commission, ainsi, d'ailleurs, que le groupe UMP, soutiennent donc cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
Après l'article L. 122-8 du code des assurances, il est inséré un article L. 122-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 122-9. - L'assureur peut prévoir une minoration de la prime ou de la cotisation prévue par la police d'assurance garantissant les dommages incendie lorsqu'il est établi que l'assuré s'est conformé aux obligations prévues aux articles L. 129-8 et L. 129-9 du code de la construction et de l'habitation. » - (Adopté.)
Article 3 bis
L'article L. 113-11 du code des assurances est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Toutes clauses frappant de déchéance l'assuré en cas de non-respect des dispositions prévues aux articles L. 129-8 et L. 129-9 du code de la construction et de l'habitation. » - (Adopté.)
Article 4
La présente loi entrera en vigueur, dans les conditions définies par un décret en Conseil d'État, au plus tard cinq ans à compter de sa publication.
Un rapport analysant la mise en oeuvre de la présente loi et évaluant son efficacité est remis par le Gouvernement au Parlement un an après la date de son entrée en vigueur.
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Beaumont, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - Les dispositions des articles 1er à 3 bis de la présente loi entrent en vigueur dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'État et au plus tard au terme d'un délai de cinq ans à compter de la date de sa publication.
II.- Un rapport sur l'application et sur l'évaluation de ces dispositions est transmis au Parlement un an après la date de leur entrée en vigueur. Ce rapport rend également compte des actions d'information du public sur la prévention des incendies domestiques et sur la conduite à tenir en cas d'incendie menées depuis la publication de la présente loi.
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Beaumont, rapporteur. Monsieur le ministre, si cet amendement est très largement rédactionnel, il tend néanmoins à apporter une précision très importante. Nous souhaitons en effet prévoir qu'il sera rendu compte au Parlement des actions d'information et d'éducation du public qui auront été menées depuis l'entrée en vigueur de l'obligation d'installation des détecteurs de fumée.
Puisque l'article 40 de la Constitution interdit formellement toute injonction au Gouvernement et la création de dépenses nouvelles, nous n'avons pas pu proposer, comme nous l'aurions souhaité, l'inscription dans la loi de crédits pour l'information du public. Tous les orateurs l'ont souligné, de telles actions d'information sont pourtant essentielles pour assurer l'efficacité du dispositif.
Par conséquent, afin de montrer l'implication du Gouvernement dans cette campagne de communication, nous demandons, par cet amendement, la transmission au Parlement d'un rapport à cet égard.
Monsieur le ministre, vous nous avez donné aujourd'hui des assurances sur ce point en nous annonçant qu'une telle campagne avait déjà commencé et qu'elle serait accentuée au moment de la mise en application du dispositif. Cela devrait permettre d'éviter que les détecteurs ne s'avèrent des outils dangereux pour les personnes peu expertes en la matière.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Henri Cuq, ministre délégué. Monsieur le rapporteur, j'ai effectivement déclaré tout à l'heure que le Gouvernement inscrivait naturellement ces campagnes d'information et de sensibilisation dans la durée. Il ne peut donc être que favorable à cet amendement.
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Lucienne Malovry, pour explication de vote.
Mme Lucienne Malovry. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, M. René Beaumont, rapporteur de la commission des affaires économiques, a rappelé les chiffres dans toute leur brutalité : en 2005, les feux d'habitation auraient fait 6 264 victimes, dont 295 morts et 728 blessés graves.
Pour avoir tous reçu des témoignages de familles de victimes et de personnes meurtries, blessées ou traumatisées à la suite d'un incendie survenu dans leur lieu d'habitation, nous ne pouvons pas être insensibles à ces drames.
En tant que législateur, nous nous devons de trouver les moyens de réduire les risques auxquels les personnes sont susceptibles d'être exposées.
À cet égard, nos collègues députés ont adopté une proposition de loi dont les dispositions améliorent la réponse susceptible d'être apportée à la survenance d'un incendie dans des lieux d'habitation. Ce texte complète les prescriptions techniques qui existent déjà, notamment dans les immeubles de grande hauteur, ainsi que les mesures que nous avons récemment votées à propos du diagnostic électricité lors d'une vente ou en matière de lutte contre l'insécurité dans l'habitat dégradé.
Comme cela existe déjà dans de nombreux pays européens, la présente proposition de loi vise à prévoir l'installation de détecteurs et d'avertisseurs de fumée dans tous les lieux d'habitation. Cette initiative, dont la mise en place est relativement simple et économique, reçoit notre entier soutien. Elle constitue en effet un système d'alerte : or, plus l'alerte est donnée tôt, plus la lutte contre l'incendie peut être efficace.
Cependant, j'insisterai sur la nécessité d'informer et de former nos concitoyens pour qu'ils adoptent les comportements adéquats afin de prévenir la survenance d'un incendie ou de lutter efficacement contre un tel sinistre.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe UMP votera la présente proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?....
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
17
NOMINATION DE MEMBRES D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été affichée, conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Nicolas About, Gilbert Barbier, Gérard Dériot, Dominique Leclerc, Alain Vasselle, Jean-Pierre Michel et Guy Fischer.
Suppléants : M. François Autain, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange et M. André Lardeux.
18
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI organique
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 182, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
19
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 183, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
20
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président. J'ai reçu de M. le Président de l'Assemblée nationale une proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux modalités de dissolution de la mutuelle dénommée Société nationale « Les Médaillés militaires ».
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 184, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
21
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président. J'ai reçu de M. Bernard Seillier un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (n° 170, 2006-2007).
Le rapport sera imprimé sous le n° 181, et distribué.
22
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 30 janvier 2007.
À dix heures :
1. Dix-huit questions orales.
À seize heures et le soir :
2. Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 170, 2006-2007), instituant le droit au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
Rapport (n° 181, 2006-2007) de M. Bernard Seillier, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Rapport (n° 174, 2006-2007) de M. Dominique Braye, fait au nom de la commission des affaires économiques.
Rapport (n° 175, 2006-2007) de M. Pierre Jarlier, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 29 janvier 2007, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 29 janvier 2007, à seize heures.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats (n° 125, 2006-2007) ;
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale (n° 133, 2006-2007) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale commune : mercredi 31 janvier 2007, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 29 janvier 2007, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à seize heures trente.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD