sommaire
présidence de M. Adrien Gouteyron
2. Saisine du Conseil constitutionnel
3. Loi de finances pour 2007. - Suite de la discussion d'un projet de loi
Engagements financiers de l'État
Compte d'affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l'État
Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État
MM. Paul Girod, rapporteur spécial de la commission des finances ; Michel Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
MM. Denis Detcheverry, Thierry Foucaud.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État.
Adoption des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».
Amendement no II-1 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre délégué, Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Retrait.
Adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
Adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
Article additionnel après l'article 48
Amendement no II-116 de Mme Hélène Luc. - Mme Hélène Luc, MM. le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Irrecevabilité.
Gestion et contrôle des finances publiques
Compte de concours financiers : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte de concours financiers : avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics
MM. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances ; Thierry Foucaud.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État.
Amendement no II-21 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre délégué, Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Retrait.
Adoption des crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques ».
Adoption des crédits des deux comptes spéciaux.
MM. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État.
Adoption des crédits de la mission « Provisions ».
Régimes sociaux et de retraite
Compte d'affectation spéciale : Pensions
MM. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances ; Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Bernard Piras, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
Mmes Marie-France Beaufils, Catherine Procaccia.
MM. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État ; Jean Arthuis, président de la commission des finances.
Adoption des crédits de la mission « Régimes sociaux de retraite ».
Adoption des crédits du compte d'affectation spéciale.
Article additionnel après l'article 51
Amendements identiques nos II-29 de la commission et II-53 de M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis ; Amendement no II-87 de M. André Lardeux. - M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.
présidence de M. Philippe Richert
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis ; Mme Catherine Procaccia, MM. le président de la commission, le ministre délégué, Yves Détraigne, Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Paul Virapoullé, Christian Cambon, Denis Detcheverry. - Retrait de l'amendement no II-87 ; rejet, par scrutin public, des amendements nos II-29 et II-53.
MM. le président de la commission, le ministre délégué.
Suspension et reprise de la séance
Remboursements et dégrèvements
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial de la commission des finances ; MM. Marc Massion, Bernard Vera.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement.
Adoption des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvement ».
Stratégie économique et pilotage des finances publiques
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme Marie-France Beaufils.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement.
Adoption des crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques ».
MM. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances ; Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois.
Mmes Catherine Procaccia, Marie-France Beaufils.
MM Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement.
Adoption des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances, rapporteur spécial ; Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois.
MM. Bernard Vera, Philippe Dallier.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement.
Adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Direction de l'action du Gouvernement
MM. Michel Moreigne, rapporteur spécial de la commission des finances ; François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances ; M. Yves Détraigne, en remplacement de Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois.
MM. Bernard Vera, Jacques Mahéas, Mme Catherine Procaccia.
M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique.
Amendements identiques nos II-16 de la commission et II-83 de Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis. - MM. François Marc, rapporteur spécial ; le rapporteur pour avis, le ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption des crédits modifiés de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Budget annexe des publications officielles et information administrative
MM. Bernard Vera, rapporteur spécial de la commission des finances ; Christian Jacob, ministre de la fonction publique.
Adoption des crédits de la mission « Budget annexe : Publications officielles et information administrative ».
Amendement no II-72 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur spécial. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Écologie et développement durable
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances ; MM. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Jean Bizet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
MM. Paul Raoult, Yves Détraigne, Mme Catherine Procaccia, M. Pierre Laffitte, Mme Évelyne Didier, MM. Christian Demuynck, Jacques Blanc.
Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable.
Amendement no II-19 de la commission. - Mmes le rapporteur spécial, la ministre. - Retrait.
Amendement no II-88 de M. Paul Raoult. - MM. Paul Raoult, Mmes le rapporteur spécial, la ministre, M. Jacques Blanc. - Rejet.
Amendement no II-18 de la commission. - Mmes le rapporteur spécial, la ministre, M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis. - Adoption.
Mme Évelyne Didier, M. Paul Raoult.
Adoption des crédits modifiés de la mission « Écologie et développement durable ».
Amendement no II-17 de la commission. - Mmes le rapporteur spécial, la ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Mme la ministre.
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
saisine du conseil constitutionnel
M. le président. M. le Président du Sénat a reçu de M. le Président du Conseil constitutionnel une lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi, le 1er décembre 2006, en application de l'article 61, alinéa 2 de la Constitution, par plus de soixante députés, d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi relative au financement de la sécurité sociale pour 2007.
Acte est donné de cette communication.
Le texte de cette saisine est disponible au Bureau de la distribution.
3
Loi de finances pour 2007
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale (nos 77 et 78).
Engagements financiers de l'État
Compte d'affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l'État
Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits des missions : « Engagements financiers de l'État », compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Paul Girod, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient de présenter devant vous, à la fois, une mission parmi les plus importantes du budget en termes de volume de crédits, et deux comptes spéciaux dont l'enjeu, dans chaque cas, s'avère essentiel pour la réforme de l'État.
Je dépasserai peut-être mon temps de parole de cinq minutes, monsieur le président, car il est difficile de comprimer ce rapport « trois en un » même si je vais à l'essentiel !
Je commencerai mon exposé par la mission « Engagements financiers de l'État ».
Cette mission, au total, regroupe plus de 40 milliards d'euros de crédits pour 2007. Elle constitue ainsi le troisième poste budgétaire, après l'enseignement scolaire notamment, mais avant la défense.
Je n'évoquerai que le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'État », qui concentre 96 % des crédits de la mission, soit 39,19 milliards d'euros en crédits évaluatifs.
Ce montant correspond à la charge nette de la dette de l'État, avant les recettes issues des contrats d'échange des taux. Ces swaps, l'année prochaine, devraient représenter une atténuation de charge de 267 millions d'euros, soit un peu moins de 0,7 % du total, ce qui portera la charge nette de la dette après swaps à 38,92 milliards d'euros.
Dans sa quasi-intégralité, cette charge résulte de la dette négociable de l'État. La hausse prévue, en ce domaine, pour 2007, de l'ordre de 0,4 % en volume, est principalement liée au financement du déficit budgétaire, qui doit s'élever à 41,7 milliards d'euros.
Nous pouvons donc une nouvelle fois méditer sur le fait que le volume du déficit est pratiquement équivalent au service de la dette.
Sans vouloir recommencer, ce matin, le débat que nous avons eu mercredi après-midi dans cet hémicycle, je rappellerai quelques chiffres intéressants.
La dette négociable de l'État, qui constitue 95 % de sa dette totale, devrait à la fin de l'année 2006 atteindre 887,9 milliards d'euros.
La dette globale de l'État correspond à près de 80 % de la dette des administrations publiques françaises, dont le montant, à la fin de l'année 2005, était de 1 138 milliards d'euros !
Le ratio d'endettement de nos administrations était ainsi de 66,6 % du PIB. Il est aujourd'hui estimé à 65,5 %. Ce ratio est compris entre la moyenne des vingt-cinq États membres de l'Union européenne et celle de la zone euro, mais sa dégradation s'avère progressive, d'une année sur l'autre, même si l'on enregistre actuellement une certaine atténuation.
Je l'ai déjà dit mercredi, sur 100 euros versés par le contribuable, 15 euros servent à financer cette charge de la dette. M. le président de la commission des finances a une formule encore plus lapidaire : à partir du 6 novembre, nous dépensons l'argent de nos petits-enfants, l'argent consacré par nous au budget de l'année étant épuisé à cette date.
Je rappelle également que, si la charge nette de la dette de l'État se maintient depuis plusieurs années en dessous de 40 milliards d'euros, c'est grâce au niveau historiquement bas des taux. Cela expose la France à un risque de variation des taux, qui n'a plus rien d'une vague hypothèse dès lors que la Banque centrale européenne depuis 2005 remonte ses taux directeurs, suivant l'orientation de la politique monétaire des Etats-Unis, ce qui changera peut-être dans les semaines qui viennent !
À cet égard, j'attire de nouveau votre attention, mes chers collègues, sur l'effet progressif de la sensibilité de la charge de la dette aux variations de taux d'intérêt : toutes choses égales, par ailleurs, une augmentation des taux de 1 % en 2007 se traduirait par une hausse de la charge d'intérêt sur la dette de 6 milliards d'euros en 2012, soit une aggravation de plus de 20 %.
Dans ce nouveau contexte, l'augmentation de l'encours de la dette négociable en 2006 n'a été contenue que grâce, en premier lieu, à des rachats de titres de dette, financés par 13,3 milliards d'euros de recettes de privatisations - je reviendrai sur ce sujet - et grâce, en second lieu, à une gestion optimisée de la trésorerie. Cependant, il s'agit là d'une opération unique nommée couramment « fusil à un coup » !
L'encaisse de précaution que constitue la trésorerie libre de l'État a été réduite, ce qui a permis de restreindre l'encours de la dette à court terme de 14 milliards d'euros entre janvier et août 2006, et de revoir à la baisse le programme de financement à moyen et à long terme, à hauteur de 10 milliards d'euros par rapport aux prévisions initiales.
En outre, l'Agence France Trésor s'est dotée d'un bon du Trésor à très court terme, d'une maturité de deux à six semaines, émis pour la première fois au début du mois de septembre dernier. L'opération a permis de lever 2,5 milliards d'euros pour une période de dix jours afin d'anticiper les rentrées fiscales du mois de septembre.
C'est une mesure intéressante. Mais, comme l'a indiqué le rapporteur général, notre collègue Philippe Marini, mercredi dernier, elle doit rester cantonnée à la couverture de besoins ponctuels de trésorerie et ne pas devenir une opération reconductible de manière rapide et permanente.
Au passage, je répète que la commission des finances a vivement regretté - je me tourne vers vous, monsieur le ministre - l'absence de mise en oeuvre de l'article 73 de la loi de finances pour 2006 - adopté sur l'initiative de la commission -, qui donnait au ministre de l'économie et des finances la faculté d'émettre pour le compte de la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, par l'Agence France Trésor un certain nombre de titres.
Il y aurait eu là la possibilité d'économiser quelques dizaines de millions d'euros, en évitant l'écart de taux d'intérêt constaté entre les opérations de gestion de la dette « souveraine » et celles de la dette sociale.
J'ai bien entendu votre réponse, monsieur le ministre, mercredi : la gestion de la dette sociale par l'Agence France Trésor dégraderait significativement le solde financier. Sans doute, mais vous savez bien que ce ne serait qu'un effet d'optique, d'ailleurs plus proche de la réalité que celui qui est aujourd'hui en place !
Une réflexion est en cours - parfait -, mais commencez, s'il vous plaît, monsieur le ministre, par prendre le décret d'application d'ores et déjà prévu par le législateur. C'est la loi, monsieur le ministre !
M. Paul Girod, rapporteur spécial. J'en viens aux deux comptes d'affectation spéciale concernant le patrimoine immobilier et les participations financières.
Les deux missions correspondantes, qui étaient « monoprogrammes » en 2006, seront à partir de l'année prochaine subdivisées chacune en deux programmes, et peut-être en trois, s'agissant du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier », si la proposition que je vous présenterai tout à l'heure est retenue.
Cette réforme met en oeuvre les prescriptions de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, rappelées par le Conseil constitutionnel, suivant lesquelles une mission ne peut comporter un programme unique.
Sur le fond, en ce qui concerne le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », je signalerai tout d'abord que le périmètre des opérations retracées est étendu par le projet de loi de finances.
Cette extension est double.
En premier lieu, les recettes du compte, à l'avenir, feront apparaître les fonds de concours, ce qui devrait permettre une visibilité plus complète des ressources dégagées à l'occasion des opérations immobilières.
En second lieu, les dépenses du compte comprendront désormais les opérations conduites, sur les immeubles de l'État, par des établissements publics. Cette mesure permet notamment l'intégration des établissements publics dans le dispositif d'intéressement dont bénéficient actuellement les seuls ministères - en principe, 85 % des produits de cession leur sont retournés, montant destiné à couvrir les dépenses immobilières induites par les cessions, principalement pour le relogement de services, les 15 % restants étant affectés au désendettement.
Cette réforme en faveur des établissements publics est de nature à appuyer utilement la politique volontariste de cessions engagée depuis 2003 par le Gouvernement.
Je rappelle que le programme de cessions d'immeubles, pour 2007 est fixé à 500 millions d'euros, dont 75 millions d'euros seront affectés au désendettement. Le montant de 500 millions d'euros représente 1,3 % des 38 milliards d'euros auxquels sont évaluées les propriétés immobilières de l'État. On y verra un peu plus clair au moment de l'arrêt du fameux bilan d'entrée de l'État dans les semaines ou dans les mois à venir.
C'est aussi l'objectif que le Gouvernement, en 2003, s'est fixé en termes de rythme annuel de ventes.
Je rappelle que, selon la loi de finances pour 2006, 479 millions d'euros de produits de cessions immobilières sont programmés cette année, dont 139 millions, soit 28 %, sont consacrés au désendettement.
D'après les informations obtenues, au 31 octobre 2006, 348 millions d'euros avaient été effectivement encaissés sur le compte, contre 252 millions seulement le mois précédent.
Ce montant actuel représente 72 % des recettes prévues. On peut donc estimer qu'au 31 décembre nous serons très proches de l'objectif qui avait été fixé dans la loi de finances de l'année dernière.
Ce serait un progrès par rapport aux exercices précédents.
Pour mémoire, les cessions d'immeubles de l'État ont représenté, en 2004, 170 millions d'euros de recettes, alors que la loi de finances initiale en prévoyait 500 millions d'euros, et elles ont réalisé en 2005, 634 millions d'euros, contre une prévision initiale de 850 millions d'euros.
En tout état de cause, monsieur le ministre, d'éventuels retards dans le programme 2006 ne sauraient être couverts par les objectifs fixés pour 2007 : les 500 millions d'euros de cessions prévus pour l'année prochaine doivent bien venir en sus des objectifs fixés pour cette année.
Par ailleurs, la mesure de la performance a été sensiblement améliorée.
En particulier, l'indicateur que j'avais préconisé a été mis en place et la commission des finances s'en félicite : il rapporte, pour chaque cession immobilière d'un montant supérieur à 2 millions d'euros, la valeur estimée des immeubles avant cession au produit retiré de la vente. L'objectif pour 2007 est de 1,3 % d'écart moyen entre la valeur vénale et la recette effective.
J'aurai tout à l'heure l'occasion de vous présenter un amendement, au nom de la commission des finances, visant à réaliser un autre progrès : celui de retracer clairement, dans le budget, les travaux immobiliers d'aménagement ou de rénovation, dont les crédits peuvent se trouver, actuellement, disséminés dans différentes missions où, en réalité, ils n'ont pas leur place. Cette mesure nous permettrait d'avoir une gestion totalement centralisée de ce qui se rapporte au parc immobilier de l'État.
J'en arrive maintenant au compte d'affectation spéciale « Participations financières ».
Les cessions d'actifs financiers, en 2007, devraient atteindre près de 5 milliards d'euros, soit environ 4 % des participations cotées de l'État évaluées à fin du mois d'octobre dernier à 130 milliards d'euros.
Sur ce montant, 3,6 milliards d'euros, soit près de 72 %, seront consacrés au désendettement public : 3,1 milliards d'euros pour l'État, 513 millions d'euros pour l'Établissement public de financement et de restructuration, l'EPFR, qui amortit la dette du Crédit Lyonnais.
Cette orientation de l'affectation des recettes de privatisations mérite d'être saluée. Elle s'inscrit dans la ligne de l'exercice 2006 : sur les 17,1 milliards d'euros de produits -niveau exceptionnel, lié aux 13 milliards d'euros réalisés par la cession des autoroutes -, 16 milliards d'euros au total, soit 93 %, ont été affectés au désendettement, dont 13,3 milliards d'euros pour l'État. Cela explique d'ailleurs le fait que nous passions de 66,6 % à 65,5 % d'endettement par rapport au produit intérieur brut dans le cours de l'année 2006.
Je signale qu'entre 1986 et 2005, sur les 81,7 milliards d'euros de recettes de privatisation réalisés durant cette période, soit deux fois le déficit de cette année, seuls 10 milliards d'euros sont allés au désendettement de l'État, et 1,6 milliard d'euros au fonds de réserve des retraites, c'est-à-dire le huitième seulement des recettes, chiffre à comparer aux 80 % ou aux 90 % de cette année.
Par ailleurs, j'ai obtenu de l'Agence des participations de l'État le détail des opérations de recapitalisation prévues pour 2007. Ce détail figure dans mon rapport écrit. Eu égard aux exigences de justification des crédits fixées par la LOLF, je regrette simplement, monsieur le ministre, que ces informations n'aient été fournies qu'avec un certain retard et d'une manière très incomplète dans les documents annexés au projet de loi de finances : le « bleu » budgétaire ne retrace, au total, que 400 millions d'euros de versements sur le 1,3 milliard d'euros prévu à cet effet.
Permettez-moi, enfin, monsieur le ministre, de vous poser une question sur l'Agence des participations de l'État, qui, depuis le départ de M. Denis Samuel-Lajeunesse, en septembre dernier, se trouve dépourvue de directeur général. Y a-t-il une raison particulière qui justifie cette absence ?
En tout état de cause, en attendant votre réponse, je recommande au Sénat, au nom de la commission des finances, sous réserve de l'adoption de l'amendement que je présenterai tout à l'heure, l'adoption des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État et des comptes d'affection spéciale « Participations financières de l'État » et « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en qualité de rapporteur pour avis sur la mission « Participations financières de l'État », au nom de la commission des affaires économiques, je souhaite tout d'abord saluer l'équilibre global qui nous est proposé pour la structure du compte d'affectation spéciale en 2007.
Celui-ci confirme la priorité forte accordée au désendettement de l'État, dans la continuité de l'exercice 2006, et non dans celles des vingt années précédentes.
Ce compte, qui s'établit à 5 milliards d'euros de recettes et de dépenses, traduit aussi un juste équilibre entre deux impératifs contradictoires.
Le premier est la sincérité budgétaire et politique, qui conduit à ne pas préjuger des choix électoraux que les Français seront appelés à formuler en 2007 et qui conditionneront inévitablement le montant des cessions de participations financières.
Le second impératif est, à mes yeux, celui d'une politique de cessions ambitieuse, à la fois compte tenu de nos objectifs de réduction de la dette publique, mais aussi des opportunités permises par la très bonne tenue des marchés financiers.
Aussi, le niveau de 5 milliards d'euros de cessions me paraît équilibré puisqu'il correspond à la moyenne annuelle des cessions observée depuis 1986.
Toutefois, qu'y a-t-il derrière ce montant de recettes ? Si l'on comprend bien que l'intérêt de l'État est de pas annoncer d'opérations très précises, afin de bénéficier au maximum des opportunités qui se présenteront sur le marché, peut-être serait-il possible, monsieur le ministre, d'en savoir un peu plus sur les critères ou les orientations que le Gouvernement pourrait se fixer pour les opérations qu'il mènera d'ici aux échéances électorales du printemps 2007.
S'agissant maintenant du volet dépenses, je ne peux que regretter le peu d'informations dont nous avons disposé dans les documents budgétaires et leurs annexes au sujet du montant de 1,4 milliard d'euros qui a été affecté non au désendettement, mais au programme n° 731 « Opérations en capital liées aux participations financières de l'État ». Ce manque d'information est d'autant plus surprenant lorsque l'on connaît la grande qualité du travail de suivi et de programmation accompli par les équipes de l'Agence des participations de l'État.
Par ailleurs, et hors des dépenses inscrites aujourd'hui, je souhaite interroger M. le ministre au sujet du dispositif « France Investissement », annoncé il y a quelques semaines. Il s'agit d'un « fonds de fonds » destiné aux PME et dans lequel - si j'ai bien compris ce qui est annoncé - l'État interviendra au travers de la Caisse des dépôts et consignations et aux côtés de fonds privés. Je souhaite savoir si les investissements du Trésor au travers de ce dispositif seront pris en compte dans le cadre des participations financières de l'État, de façon à garantir le contrôle du Parlement.
En conclusion, sans revenir sur l'amendement déposé en première partie par notre collègue Charles Revet, rapporteur pour avis de la mission « Transports » au nom de la commission des affaires économiques, et qui traitait de Réseau Ferré de France, je tenais à vous informer que cette même commission a émis un avis favorable sur les projets de recettes et de dépenses de la mission « Participations financières de l'État » proposés pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Je vous rappelle également que l'intervention générale vaut explication de vote pour ces trois missions.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Denis Detcheverry.
M. Denis Detcheverry. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'occasion de l'examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » et des deux comptes d'affectation spéciale qui y sont rattachés, le groupe UMP souhaite une nouvelle fois souligner les efforts entrepris par le Gouvernement en faveur du désendettement de notre pays.
Le désendettement est un enjeu politique majeur.
Comme l'a souligné notre collègue Joël Bourdin, au nom du groupe UMP, lors du débat d'orientation budgétaire de juin dernier, notre pays se trouve dans une situation paradoxale : les Français sont individuellement sous-endettés, mais collectivement surendettés.
D'un côté, la France est l'un des pays du monde développé où l'endettement individuel des ménages est le plus faible et peut encourager un certain endettement individuel pour soutenir la croissance. De l'autre, elle doit tout faire pour stopper la croissance inquiétante de la dette publique, c'est-à-dire de notre dette collective.
Le rapport publié par M. Michel Pébereau en décembre dernier a été l'occasion d'une véritable prise de conscience nationale.
Il faut également féliciter le Gouvernement pour l'effort de pédagogie et de gestion qu'il a su réaliser sur un sujet trop longtemps ignoré ou négligé dans notre pays.
Malgré la hausse des taux d'intérêt, la progression de la charge de la dette est contenue, comme l'indique notre excellent collègue M. Paul Girod dans son rapport spécial.
L'engagement de la majorité en faveur de l'assainissement des finances publiques depuis 2002 commence à porter ses fruits.
Le projet de loi de finances pour 2007 est un budget responsable devant conduire à une nouvelle réduction de l'endettement qui serait ramené à 63,6 % du PIB, soit un point de PIB de moins que l'année précédente.
Comme l'a souligné M. Paul Girod dans son rapport, la mission « Engagements financiers de l'État » est la troisième mission la plus importante du budget général par son volume, représentant 11,8 % du total des crédits de paiement. Cette proportion nous incite à être particulièrement vigilants sur l'organisation de la mission.
Notre groupe sera ainsi très attentif aux réponses que vous apporterez, monsieur le ministre, aux observations formulées par notre rapporteur spécial, notamment celles qui concernent les indicateurs de performance du programme « Appels en garantie de l'État » qui mériteraient selon lui quelques améliorations.
J'en viens au compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », dont il faut rappeler qu'il a été introduit à la demande du Parlement.
Dans une logique de transparence conforme à l'esprit de la LOLF, il retrace les recettes et les dépenses induites par des opérations immobilières de l'État et fait apparaître clairement la part du produit des cessions des biens immeubles de l'État affectée au désendettement public. Le Parlement se félicite du surplus d'information qui lui est ainsi fourni.
La commission des finances a déposé un amendement qui vise à créer un nouveau programme au sein du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » pour retracer spécifiquement les travaux d'aménagement ou de rénovation des immeubles de l'État ainsi que les dépenses de fonctionnement liées à ces opérations. Il tend également à accroître les crédits affectés à ce nouveau programme de 100 millions d'euros en 2007.
Cet amendement est lié à ceux qui visent à réduire d'un montant total équivalent les crédits des missions « Gestion et contrôle des finances publiques » et « Écologie et développement durable » que nous examinerons plus tard dans la journée.
Nous comprenons le souci de clarté de la commission et sa volonté de regrouper les crédits budgétaires par mission de l'État, dans l'esprit de la LOLF.
La question de l'entretien du patrimoine de l'État est l'une des étapes qui nous restent à franchir dans la modernisation de la politique immobilière, que vous avez engagée, monsieur le ministre.
Nous comprenons également les interrogations de la commission sur le coût et les modalités de certaines opérations de déménagement temporaire, comme celle du ministère de l'écologie et du développement durable.
Ces questions méritent selon nous d'être débattues sur le fond, sans toutefois conduire à remettre indirectement en cause des opérations importantes déjà engagées, au risque de provoquer de nouveaux retards et de nouveaux surcoûts budgétaires, ce qui irait à l'encontre de la philosophie de la commission des finances. Je pense en particulier à l'installation de la Maison de la francophonie sur le site du ministère de l'écologie et du développement durable, qui résulte d'un engagement fort du Président de la République.
Nous comptons sur le Gouvernement pour apporter les précisions nécessaires et éclairer nos futurs débats sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme chacun le sait, la mission concernée recouvre essentiellement les crédits relatifs au règlement du service de la dette publique.
Ces crédits s'élèveront, pour 2007, selon les éléments à notre disposition, à 39,191 milliards d'euros, en hausse relative d'un peu plus de 160 millions d'euros sur 2006.
Deux facteurs expliquent cette situation.
D'une part, malgré vos affirmations régulières, monsieur le ministre, le service de la dette n'a pas connu de réduction sensible tout simplement parce que le volume de la dette publique n'a pas profondément évolué à la baisse.
Cinq années de prétendue rigueur budgétaire n'ont pas empêché, loin de là, le cumul de 250 milliards d'euros de déficit ni la progression subséquente du volume de la dette publique.
D'autre part, un certain nombre de décisions politiques ont conduit à la réduction significative des recettes de l'État, notamment par le biais d'allégements fiscaux accordés tant aux plus hauts revenus qu'aux plus grandes entreprises, sans que cela se traduise in fine par une amélioration de la situation de l'endettement comme des comptes publics.
En soi, comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner, la dette publique n'est pas condamnable et elle présente même, de fait, un caractère souvent utile pour porter l'activité économique.
Sans la dette publique, que deviendraient nos entreprises de travaux publics, nos sociétés de production de biens d'équipement, nos entreprises métallurgiques ?
Ces interrogations figurent d'ailleurs dans l'intéressant rapport de notre collègue Joël Bourdin, au nom de la délégation pour la planification, sur les perspectives macroéconomiques et les finances publiques à moyen terme, 2007-2011, en instance de publication et que nous avons pu consulter.
Notre collègue rappelle ensuite que, a priori, le mouvement de réduction de la dette publique permet, certes, de réduire le niveau de déficit au regard du produit intérieur brut mais qu'il exerce une influence significative sur la croissance elle-même.
Il y aurait donc un lien entre réalité de la dette publique et niveau de l'activité économique. Il conviendrait dès lors d'arbitrer nos choix en fonction de la nécessaire mise en évidence des moyens de prolonger la croissance, malgré tout.
La priorité que vous accordez donc au désendettement, et que nous avons encore vu figurer au terme de la discussion de la première partie, mes chers collègues, est donc un arbitrage précis.
Il s'agit pour vous de créer les conditions permettant de réduire le déficit, coûte que coûte, fût-ce au prix, devons-nous le souligner, de la croissance.
Nous avons eu l'occasion d'exprimer notre point de vue sur ce sujet au cours de la discussion.
Nous devons clairement sortir de cette logique. Plus le temps passe, plus il apparaît au contraire que c'est au travers d'une dette publique utilement mobilisée que nous créerons les conditions de la croissance et donc de la résorption des déficits contribuant à la développer. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Je remercie, tout d'abord, M. Girod de la qualité de son intervention. Il fait une nouvelle fois la démonstration de sa remarquable maîtrise des questions relatives à la gestion de la dette de l'État, derrière lesquelles se dessinent de nombreux sujets sur lesquels nous sommes l'un et l'autre très engagés et partageons bien des valeurs communes.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez rappelé les nombreux efforts engagés par le Gouvernement pour réduire le niveau de la dette et promouvoir une gestion active.
Ainsi que je l'ai déjà rappelé avant-hier à la tribune, la réduction de la dette est véritablement pour nous une priorité, comme l'illustre l'objectif fixé par M. Thierry Breton de réduire de deux points la dette rapportée au PIB. Cela nécessite un travail très approfondi - afficher un objectif ne garantit pas qu'on l'atteindra - et la mise en oeuvre d'une démarche méthodique. Celle-ci passe, bien sûr, par les cessions de participation, mais elle implique, en quelque sorte, une discipline de vie : assumer et afficher que l'on veille à ce que tout surplus de recette fiscale soit affecté au désendettement. C'est un message important.
S'agissant de la CADES, dont nous avons également eu l'occasion de parler, mercredi dernier, lors du débat sur l'évolution de la dette, il faut quand même réfléchir à deux fois avant de présenter une dégradation du solde budgétaire de plusieurs milliards d'euros sans forcément être totalement assuré de la manière dont on va procéder.
Par conséquent, nous devons, me semble-t-il, continuer de travailler ensemble sur ce sujet un peu polémique. Certes, nous n'aurons pas besoin de beaucoup de temps pour décider, mais je souhaite que nous puissions mener une réflexion approfondie sur ce point dans les semaines qui viennent, monsieur le sénateur.
Vous avez évoqué le compte d'affection spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » en faisant remarquer qu'il avait évolué conformément à vos recommandations de l'an dernier. Je vous remercie de le dire, car nous vivons dans un pays où certains soulignent plus spontanément les dysfonctionnements que les réussites. Or, à mon sens, l'État peut se féliciter de la politique immobilière telle qu'elle a été engagée.
Nous avons distingué deux programmes, « Contribution au désendettement de l'État » et « Dépenses immobilières », tout en envisageant la possibilité d'élargir le compte aux opérateurs.
S'agissant des produits de cessions immobilières, d'aucuns se demandent si nous tiendrons notre objectif, c'est-à-dire 480 millions d'euros. La réponse est oui. Nous le tiendrons. Aujourd'hui, cela semble banal. Pourtant, je le rappelle, voilà deux ans, nous n'avions atteint que 100 millions d'euros. Puis, le montant de ces produits s'était élevé à 630 millions l'an dernier. Mais je vous rassure, nous tiendrons bien notre objectif cette année.
S'agissant des travaux, je prendrais des engagements très fermes à l'occasion de la discussion de l'amendement de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial.
Par ailleurs, je voudrais évoquer deux points sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
D'abord, les entreprises publiques réalisent de bons résultats. Leur chiffre d'affaires augmente en moyenne de 5,7 % et leur résultat a doublé, pour atteindre 12,4 milliards d'euros.
Ensuite, j'ai déjà évoqué le fléchage des recettes sur la dette. Sur les 17 milliards d'euros de produits résultant de cessions de titres de sociétés détenues indirectement par l'État, 93 % seront affectés au désendettement en 2006, contre seulement, vous vous en souvenez, 40 % de 1997 à 2002.
Certes, ce n'est pas le moment de remuer le couteau dans la plaie, mais, lors de l'élection présidentielle, vous pourrez compter sur moi pour suggérer à la gauche de s'inspirer de notre modèle plutôt que de son propre bilan en la matière.
Vous avez également souligné que le programme annuel de performances ne précisait pas à la Société de valorisation des actifs ferroviaires immobiliers, ou SOVAFIM, les montants prévus pour les opérations relatives aux retraites de la RATP. Comment expliquer cela ?
D'abord, comme je l'ai indiqué à votre commission, les négociations avec la caisse nationale d'assurance vieillesse, la CNAV, et les régimes complémentaires sur le montant et le calendrier de versement des soultes d'adossement des retraites de la RATP ne sont pas terminées.
Ensuite, s'agissant de la SOVAFIM, les arrêtés de partage entre RFF et la SNCF qui déterminent en partie le périmètre des biens transférés à la SOVAFIM en 2007 n'ont été publiés que cette semaine. Il y avait donc quelques incertitudes au moment où nous avons remis le programme annuel de performances, le PAP.
Je suis personnellement très engagé sur ce sujet. Nous avons fait, je crois, un travail de très bonne qualité avec la SOVAFIM et RFF. Je veux profiter de cette occasion pour saluer leur travail, qui est conforme à ce que nous avions souhaité et aux engagements pris devant vous, monsieur Girod, et devant la Haute Assemblée.
Monsieur Bécot, vous vous étonnez qu'aucun crédit ne soit prévu pour financer le dispositif « France Investissement », annoncé par le Gouvernement, le 9 novembre dernier. Ce mécanisme permettra de financer les PME innovantes à hauteur de 500 millions d'euros par an pendant six ans et reposera sur un partenariat avec la Caisse des dépôts et consignations et des acteurs privés. L'État n'interviendra donc pas directement dans son financement.
Vous me demandez comment on justifie les 5 milliards d'euros de recettes du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
D'abord, ces recettes sont toujours difficiles à évaluer. Les décisions de principe sur les cessions ne sont en général pas connues au moment de l'élaboration du projet de loi de finances, ce qui est normal. De ce point de vue, le cas de la privatisation des autoroutes était exceptionnel ; nous ne disposons pas toujours de telles précisions. Mais, même dans ce cas, le prix de vente demeure très volatile. Nous l'avons vu, nous l'avions fixé à un niveau plutôt plus bas que ce qui a été finalement réalisé.
Dans certains cas, lorsque les sociétés sont cotées, l'information doit rester confidentielle, pour des raisons évidentes.
Pour 2007, nous n'avons pas de projet totalement déterminé de cessions à ce jour. Les 5 milliards d'euros sont donc un chiffre évaluatif, qui correspond à environ 4 % de la valeur du portefeuille et à la moyenne des cessions depuis trente ans. Nous pouvons donc considérer cette évaluation comme raisonnable et prudente, du moins conforme aux exigences de sincérité budgétaire.
Vous le savez, c'est un principe auquel je suis aussi attaché que vous. Dans ce domaine, j'aurais même plutôt tendance à considérer qu'il vaut mieux être un peu en dessous qu'au dessus. C'est vrai tant pour les prévisions budgétaires de recettes que pour les prévisions de croissance économique. Je sais que M. le président de la commission des finances partage mon sentiment. (M. le président de la commission des finances acquiesce.)
Monsieur Detcheverry, vous avez abordé la question de l'immobilier. Le travail sur l'immobilier de l'État est un bon exemple de coproduction. Je suis bien d'accord avec vous. Nous en parlerons d'ailleurs dans quelques instants à propos de l'entretien, qui est un point important sur lequel j'aurai un certain nombre d'éléments à vous apporter.
S'agissant de la performance et des indicateurs concernant les garanties, il est très difficile de mesurer les effets de l'action des pouvoirs publics. Je souscris à votre analyse. La LOLF en est à ses débuts. Nous devons encore travailler sur cette question.
Monsieur Foucaud, sur ce sujet également, nous avons encore quelques divergences.
Mme Hélène Luc. Oh oui !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. C'est dommage. Je pensais que nous n'en aurions pas aujourd'hui. Je me trompais ! (Sourires.)
Pour ma part, je ne considère pas la réduction de la dette comme un obstacle à la croissance, bien au contraire. D'ailleurs, tous les exemples dans les pays étrangers l'illustrent.
Permettez-moi de vous mentionner le cas du Canada. Monsieur Foucaud, j'aimerais beaucoup pouvoir vous emmener dans ce pays pour deux raisons.
D'abord, lorsque l'on voyage, on oublie les différences idéologiques que l'on se croit obligé d'afficher à Paris pour ne pas désespérer Billancourt.
Ensuite, quand on se déplace dans ce pays, on regarde la réalité sans a priori ; c'est une bonne occasion pour voir ce qui réussit. Ainsi, vous pourriez rencontrer utilement ceux qui ont porté la modernisation de l'État canadien dans les années quatre-vingt-dix ou quatre-vingt-quinze. Vous auriez l'occasion de vous en rendre compte. Ce qu'ils ont fait est tout à fait remarquable.
Par ailleurs, la réduction de la dette n'est pas antisociale. Au contraire, monsieur Foucaud, c'est un effort de solidarité envers nos enfants, dont nous ne pouvons pas préjuger par avance des choix de vie. Mais si nous leur léguons trop de dettes, ils devront s'en acquitter dès leur naissance. Mieux vaut donc leur laisser en héritage un pays assaini. C'est ce à quoi nous nous employons.
C'est pourquoi il est très important que nous puissions poursuivre notre action après le mois de juin prochain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote sur l'ensemble des trois missions avant l'expiration du délai limite.
engagements financiers de l'état
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Engagements financiers de l'État |
40 862 600 000 |
40 862 600 000 |
Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs) |
39 191 000 000 |
39 191 000 000 |
Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs) |
292 600 000 |
292 600 000 |
Épargne |
1 149 000 000 |
1 149 000 000 |
Majoration de rentes |
230 000 000 |
230 000 000 |
M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».
(Ces crédits sont adoptés.)
compte d'affectation spéciale :
gestion du patrimoine immobilier de l'état
M. le président. Nous allons procéder à l'examen de l'amendement portant sur les crédits du compte d'affectation spéciale : « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », figurant à l'état D.
État D
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Gestion du patrimoine immobilier de l'État |
500 000 000 |
500 000 000 |
Contribution au désendettement de l'État |
75 000 000 |
75 000 000 |
Dépenses immobilières |
425 000 000 |
425 000 000 |
M. le président. L'amendement n° II-1, présenté par M. Girod, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Travaux
II. - En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Contribution au désendettement de l'État |
|
75.000.000 |
|
75.000.000 |
Dépenses immobilières |
|
25.000.000 |
|
25.000.000 |
Travaux |
100.000.000 |
|
100.000.000 |
|
TOTAL |
100.000.000 |
100.000.000 |
100.000.000 |
100.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Paul Girod, rapporteur spécial. Cet amendement vise d'abord à créer un nouveau programme intitulé : « Travaux » au sein du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat ».
Dans l'esprit de la commission des finances, ce programme serait dédié à l'ensemble des opérations d'aménagement ou de rénovation nécessitées par les immeubles de l'État et des dépenses de fonctionnement liées à de telles opérations.
Il convient de préciser que, malgré son intitulé, le programme « Dépenses immobilières » ne couvre en réalité - il suit en cela la nomenclature du compte d'affectation spéciale - que les dépenses induites par des opérations de cessions, d'acquisition ou de construction en vue du relogement de services.
Ensuite, le présent amendement tend à abonder le nouveau programme ainsi créé à hauteur des 100 millions d'euros nécessaires pour 2007. Eu égard aux règles applicables au Parlement en matière de recevabilité financière, cette somme est gagée sur les crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2007 au bénéfice des deux programmes initiaux de la mission. Ainsi, 75 millions d'euros seraient supprimés du programme : « Contribution au désendettement de l'Etat » et 25 millions d'euros seraient ôtés au programme : « Dépenses immobilières ».
Il appartiendra au Gouvernement de soumettre au Parlement les mesures de conséquence du point de vue tant du niveau global des crédits inscrits pour 2007 sur le compte d'affectation spéciale : « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » que de l'architecture même de ce compte.
Cependant, cet amendement vise avant tout à inciter le Gouvernement à retracer à l'avenir de manière spécifique l'ensemble des crédits demandés en considération de travaux à mener sur les immeubles de l'État.
Monsieur le ministre, je vous ai bien entendu mentionné l'entretien. Mais il faut également évoquer la rénovation, ce qui n'est pas pareil.
Au demeurant, une telle mesure ne fera que mettre en oeuvre le principe de regroupement des crédits budgétaires par mission de l'État fixé par la LOLF. Elle apparaît ainsi comme un complément indispensable aux dispositifs de réforme domaniale déjà mis en place.
Par conséquent, la commission des finances attend que le Gouvernement s'engage avec elle et très fermement sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Monsieur le rapporteur spécial, derrière son apparence technique, votre amendement est en réalité très important. Il témoigne, s'il en était besoin, de votre extrême vigilance pour que nous fassions preuve de cohérence.
Je vais vous demander de retirer votre amendement au bénéfice d'un certain nombre d'explications que je vais vous apporter et qui vont exactement dans votre sens. Pour autant, je ne souhaite pas l'adoption de votre amendement, car je ne suis pas prêt à mettre en place un tel dispositif.
Vous suivez ces questions, je le sais, avec beaucoup d'attention, puisque, avec Adrien Gouteyron, vous représentez le Sénat au sein du Conseil immobilier de l'État.
L'entretien des immeubles de l'État a suscité tout particulièrement notre attention. J'ai d'ailleurs demandé un audit pour évaluer avec précision nos possibilités d'action en la matière. Deux conclusions se sont imposées.
D'abord, l'enjeu budgétaire est élevé, puisque l'État dépense 2,7 milliards d'euros par an pour l'entretien de ses immeubles.
Ensuite, l'État entretient très mal ses immeubles, parce qu'il n'a pas les bons instruments de pilotage et qu'il n'a pas bien défini sa stratégie.
Ainsi, nous nous retrouvons sur la question de l'entretien dans une situation comparable à la situation dans laquelle nous étions sur la question de la valorisation et des cessions éventuelles avant la rédaction du rapport parlementaire qui avait conduit à la création du service « France Domaine ».
Votre proposition retient toute mon attention, mais elle implique de réunir deux conditions.
D'abord, nous devons augmenter les loyers de France Domaine. Pour les services logés dans les immeubles de l'État, nous utilisons la technique canadienne, chère à M. Foucaud, des loyers budgétaires. Cela nous permet de connaître le coût de l'espace occupé par chaque ministère et de le responsabiliser. Une telle valorisation est importante pour la suite. Le lancement ou l'introduction de frais de rénovation ou d'entretien augmenteraient d'autant le loyer correspondant et nous ne sommes pas prêts à le faire aujourd'hui. Nous devons y travailler à partir d'expérimentations avec le Conseil immobilier de l'État.
Ensuite, nous devons rattacher le programme à créer soit au budget général, soit au compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Pour ma part, je n'ai pas de religion sur le sujet. On peut imaginer de le rattacher à ce compte d'affectation spéciale, comme vous le proposez. Ce serait cohérent. En même temps, aujourd'hui, le compte d'affectation spéciale est uniquement alimenté par les produits de cessions.
En bonne gestion, ces ressources doivent réduire la dette de l'État et financer l'achat d'implantations plus modernes et plus adaptées.
Je dois être « girodiste » jusqu'au bout. (Sourires.) Si, comme vous le souhaitez, les produits des cessions sont affectés au désendettement, il n'est pas très cohérent de demander que le compte d'affectation spéciale serve à d'autres opérations, notamment des actions de rénovation. Nous avons donc un problème à résoudre. Je souhaite que nous continuions d'y travailler.
Par ailleurs, vous avez souligné à juste titre la nécessité de distinguer l'entretien, la réhabilitation ou la rénovation Je suis d'accord avec vous. Pour ma part, ce qui m'intéresse, c'est ce qui est à la charge du propriétaire. L'État a le devoir de veiller à l'entretien, à la rénovation et, le cas échéant, à la réhabilitation de ses immeubles.
Je vous propose donc de nous mettre au travail dès le début de l'année prochaine pour qu'un programme consacré aux travaux figure dans le projet de loi de finances pour 2008. Nous verrons alors si ce programme devra être intégré dans le budget général ou dans un compte d'affectation spéciale. Encore une fois, je n'ai pas d'opinion définitive à cet égard.
M. le président. L'amendement II-1 est-il maintenu, monsieur le rapporteur spécial ?
M. Paul Girod, rapporteur spécial. J'ai bien entendu M. le ministre et je me réjouis qu'il ait parlé aussi de rénovation.
M. Paul Girod, rapporteur spécial. Nous sommes en présence d'un paradoxe.
Le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », qui traite les produits des cessions des constructions, n'intègre pas la possibilité pour l'État de restructurer complètement la distribution des locaux, leur affectation et même leur nature à l'intérieur de son propre patrimoine.
Il est gênant de n'envisager que les entrées et les sorties sans penser à une gestion rationnelle poussée jusqu'au bout de la logique, afin de permettre à l'État de conserver son patrimoine, mais d'en modifier l'affectation pour la rendre plus efficace, plus efficiente et plus économe.
Par conséquent, en dépassant la seule notion d'entretien pour aborder les problèmes de rénovation et de réhabilitation, monsieur le ministre, vous avez effectué un pas important. Je conçois bien vos difficultés, liées notamment au Conseil immobilier de l'État.
Je le vois bien, pour l'instant, s'agissant des loyers, nous en sommes encore à un stade de balbutiement et d'approximation qui ne permet pas la mise en place de ce dispositif dès maintenant.
Dans la journée, vous entendrez parler d'une opération particulière sur laquelle un certain nombre de nos collègues se sont interrogés.
Dans l'état actuel des choses, je comprends votre appel, monsieur le ministre. Après avoir eu l'approbation du président de la commission des finances, je serai tout à fait disposé à retirer cet amendement, compte tenu de l'engagement que vous avez pris pour 2008 et en souhaitant que ce soit vous qui nous en rendiez compte l'an prochain !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je le souhaite également ! Sinon, vous me regretteriez ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Comme toujours, nous allons accéder aux sollicitations de M. le ministre.
M. Michel Moreigne. Oh !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous avons été alertés par une incongruité apparue lors de l'examen des crédits des missions « Gestion et contrôle des finances publiques » et « Écologie et développement durable ». Nous ne comprenons pas très bien pourquoi le Gouvernement a inscrit dans ces deux missions des crédits pour aménager, au 20 avenue de Ségur, un immeuble dont la destination n'a rien à voir avec leur vocation. Ce sont au total cent millions d'euros de dépenses que ces deux missions auraient dû supporter à ce titre.
Cette observation nous a fait comprendre qu'il conviendrait peut-être de créer un compte d'affectation spéciale, alimenté par des loyers forfaitaires, comme le compte d'affectation spéciale « Pensions », qui est alimenté par le prélèvement d'une cotisation de retraite forfaitaire sur les salaires, les dépenses correspondant aux pensions effectivement payées.
Dans ce cas particulier, ce compte pourrait être alimenté par les loyers que chaque programme aurait à supporter et les dépenses correspondraient à celles que vient d'évoquer Paul Girod et que vous avez vous-même rappelées, monsieur le ministre.
Compte tenu de votre engagement, la commission retire son amendement, mais il convient que nous puissions décider, dès les prochaines semaines, d'un dispositif qui serait transcrit dans le projet de loi de finances pour 2008 et dont vous seriez le garant.
M. le président. L'amendement n° II-1 est retiré.
Je mets aux voix les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
(Ces crédits sont adoptés.)
compte d'affectation spéciale :
participations financières de l'état
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d'affectation spéciale : « Participations financières de l'État » figurant à l'état D.
État D
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Participations financières de l'État |
5 000 000 000 |
5 000 000 000 |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
1 400 000 000 |
1 400 000 000 |
Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État |
3 600 000 000 |
3 600 000 000 |
M. le président. Je mets aux voix les crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Article additionnel après l'article 48
M. le président. J'appelle en discussion un amendement tendant à insérer un article additionnel qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».
L'amendement n° II-116, présenté par Mme Luc, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 48, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après les mots : « du capital social », la fin du deuxième alinéa du I de l'article 7 de la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 autorisant le gouvernement à prendre diverses dispositions d'ordre économique et social est supprimée.
La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Nous avons déposé cet amendement, car, comme vous le savez, nous avions combattu en 1973 l'adoption des dispositions concernées sur les privatisations.
Je voudrais appuyer la défense de mon amendement sur un exemple précis, celui de la société d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de la région parisienne, la SEMMARIS, qui gère le marché international de Rungis.
Sous couvert d'une nécessaire recapitalisation du marché d'intérêt national, le MIN, de Rungis, l'État actionnaire a décidé de se désengager au profit d'opérateurs privés. Cette opération, qui a été rendue publique en août dernier par voie de presse, sans que le conseil d'administration de la SEMMARIS en soit saisi, comporte deux aspects : d'une part, une augmentation de capital, qui sera le fait de l'État, d'autre part, une cession d'actions de la part de l'État, principalement destinée à des investisseurs de droit privé.
Les besoins de recapitalisation pour la modernisation du plus grand marché de produits frais mondial sont indiscutables. Doivent-ils se faire dans un double mouvement de désengagement de l'État et d'arrivée d'actionnaires privés étrangers à la profession, plus soucieux des cours de la Bourse que de ceux des produits alimentant quinze millions de personnes dans notre région et au-delà ?
À cette question, nous répondons clairement : non !
Nous partageons les préoccupations et les exigences des professionnels du marché lorsqu'ils déclarent que « l'État et les collectivités locales doivent garder ensemble la majorité du capital de la SEMMARIS. Il est hors de question que ce soient des fonds d'investissement qui veulent faire des ?coups? avec Rungis ».
Il est indispensable que les collectivités publiques restent majoritaires au sein de la SEMMARIS et qu'elles continuent d'accompagner, dans une logique de service public, le nécessaire développement du marché d'intérêt national de Rungis.
Il est regrettable que soit mobilisée une ressource prêtée par l'État à la SEMMARIS - une avance d'actionnaire remboursable datant de 1973, destinée à de précédents investissements - pour permettre aujourd'hui l'entrée d'actionnaires privés à la recherche de nouveaux dividendes. Cet argent appartient aux contribuables. Il doit servir l'intérêt général et non des intérêts financiers privés. Cette opération apparaît comme le début d'un processus de privatisation de l'entreprise publique SEMMARIS.
Je n'oublie pas que, lors d'une précédente législature, un ministre du commerce et de l'artisanat avait placé la SEMMARIS sur la liste des entreprises publiques privatisables. Une telle perspective est inacceptable et dangereuse pour les consommateurs et pour l'emploi sur le marché d'intérêt national qui est déjà en régression depuis plusieurs années.
Le MIN de Rungis et la SEMMARIS ont été créés en remplacement des Halles de Paris pour assurer une mission d'intérêt général, dans un cadre réglementaire associant de manière originale une entreprise publique et des opérateurs privés.
En 1973, les principaux aspects de cette mission consistaient à assurer aux agriculteurs français la mise sur le marché des productions régionales, à contrôler les mécanismes de formation des prix, à sécuriser l'approvisionnement alimentaire d'un marché désormais évalué à dix-huit millions de consommateurs, à contrôler la moralité des transactions, la qualité des produits distribués et, surtout, le respect des normes de sécurité alimentaire. Seul l'État et ses cinq ministères de tutelle sont en mesure de veiller durablement à l'accomplissement de ces missions de service public dans l'intérêt des opérateurs concernés et des consommateurs.
Pour ces raisons majeures, le désengagement de l'État n'est pas acceptable ; celui-ci doit continuer à assumer ses responsabilités en demeurant un actionnaire de premier plan au sein de la SEMMARIS.
Il est possible de concilier le développement du MIN de Rungis-Chevilly, le renforcement du capital social de la SEMMARIS et la conservation d'un dispositif d'économie mixte géré dans le cadre du service public par le maintien d'une majorité de capital public dans le capital de la SEMMARIS, le renforcement de la participation de la Caisse des dépôts et consignations et l'appel à la participation des professionnels du marché eux-mêmes.
L'enjeu est clair : soit engager la SEMMARIS dans une logique de privatisation qui ne peut servir que des intérêts étrangers au MIN, à ses entreprises, à ses salariés et aux consommateurs, en faisant prévaloir la finance sur l'alimentation,...
M. le président. Madame, veuillez conclure !
Mme Hélène Luc. ... soit poursuivre et conforter une stratégie de développement des activités du MIN de Chevilly-Rungis pour l'emploi, le développement du territoire, en coopération avec les MIN des autres régions françaises, et la diffusion de nos productions nationales à l'étranger.
Nous souhaitons que cette deuxième option soit retenue car elle préserve la construction économique originale que constituent le MIN de Rungis et les MIN régionaux.
M. le président. Madame, je vous prie de conclure !
Mme Hélène Luc. Trois mots, monsieur le président !
M. le président. Madame Luc, vous avez largement dépassé votre temps de parole.
Mme Hélène Luc. Cette construction est inséparable de la promotion de productions agricoles de qualité, représentatives de la biodiversité spécifique à notre pays, des productions de terroir et de la tradition culinaire française.
Elle est une exigence absolue pour garantir durablement les consommateurs contre les fraudes, les trafics en tous genres et les crises sanitaires, pour assurer une sécurité maximale dans le domaine alimentaire. Par la diversité et la pluralité de ses acteurs économiques, le secteur de la distribution alimentaire est également un obstacle à la standardisation des produits.
M. le président. Madame, concluez !
Mme Hélène Luc. Tels sont les arguments du maire de Chevilly-Larue, M. Christian Hervy, représentant du conseil général du Val-de-Marne au conseil d'administration de la SEMMARIS.
Monsieur le ministre, vous qui êtes élu de la Seine-et-Marne,...
Mme Hélène Luc. ... ce sujet vous concerne à deux titres : celui des consommateurs et celui des petits producteurs. Si vous pouviez me dire que ce marché ne sera pas privatisé, j'en serais très heureuse. J'attends une réponse de votre part !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Girod, rapporteur spécial. C'est par courtoisie à l'égard de Mme Luc que la commission n'a pas demandé à intervenir avant elle pour constater que son amendement est un remarquable cavalier budgétaire.
Pour être tout à fait franc, j'ajouterai avec une certaine malice que, de 1997 à 2002, les amis de Mme Luc étaient au pouvoir ; la loi qu'elle souhaite modifier datant de 1996, il me semble qu'elle aurait eu largement le temps de s'en occuper pendant ces cinq années !
Pour le reste, madame Luc, votre amendement relève de la cuisine électorale ! Apparemment, vous êtes plus préoccupée par la publication d'un certain nombre de documents électoraux propres à votre département que par le budget.
En tout état de cause, la commission des finances estime que l'amendement n°II-116 est irrecevable.
M. le président. L'amendement n° II-116 est irrecevable.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole.
M. le président. Madame Luc, je ne peux pas vous donner la parole : l'amendement vient d'être déclaré irrecevable.
Gestion et contrôle des finances publiques
Compte de concours financiers : Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte de concours financiers : Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits des missions « Gestion et contrôle des finances publiques », compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » et compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » constitue un terrain d'expérimentation et d'action privilégié pour la réforme de l'État : monsieur le ministre, vous êtes à la fois délégué au budget et à la réforme de l'État.
L'examen des crédits de la principale mission du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie m'a donc conduit à effectuer un « test de cohérence » entre les intentions de modernisation affichées par le ministère et ses réalisations.
Les résultats de ce test sont contrastés. Les progrès restant à accomplir doivent être envisagés à l'aune de ce qui a déjà été accompli.
La gestion du ministère bénéficie d'un certain nombre d'acquis de modernisation. Ainsi, comme je le souligne depuis plusieurs années, les contrats de modernisation constituent une démarche vertueuse qu'il convient de généraliser à toutes les administrations. Les directions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ont été pionnières dans la signature de tels contrats. Vous avez poursuivi la démarche en 2006 : des contrats pluriannuels de performance ont été conclus, pour la période 2006-2008, entre la direction du budget et les cinq grandes administrations à réseau de Bercy.
Les objectifs et indicateurs figurant dans ces contrats sont parfaitement articulés avec ceux du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2007. Les bons résultats enregistrés par les indicateurs liés au respect de leurs obligations fiscales par les contribuables soulignent que les engagements des administrations fiscales en matière de qualité de service sont désormais payants.
De la même manière, il faut remarquer les investissements considérables réalisés par le ministère en matière informatique, et ce depuis longtemps. L'achèvement de certains chantiers informatiques permettrait désormais, si une volonté politique s'exprimait en ce sens, des réformes fiscales d'envergure comme le rapprochement entre l'impôt sur le revenu et la cotisation sociale généralisée.
En matière de télédéclaration de l'impôt sur le revenu, des enseignements ont été tirés des difficultés de l'année dernière, j'ai pu le constater lors d'un contrôle sur pièces et sur place dans un centre des impôts parisien, le 18 mai 2006. Les engorgements constatés en 2005, lors de la campagne de l'impôt sur le revenu, ne se sont pas reproduits. Le dispositif mis en place par la direction générale des impôts a fonctionné de manière très satisfaisante.
Certaines « contre-performances » doivent toutefois être relevées. Le versement des acomptes mensuels de la prime pour l'emploi n'a pas réservé que de bonnes surprises, tant pour leurs bénéficiaires que pour l'administration.
Plus de 250 000 foyers ont perçu en 2006 des acomptes supérieurs au montant définitif de leur prime pour l'emploi. Ils sont donc appelés à restituer une partie des acomptes reçus. Le Gouvernement a annoncé un examen au cas par cas des foyers en situation de trop-perçu, sachant que la perte d'un emploi est de nature à mettre fin au droit à la prime.
Quel est le montant global du trop-perçu de prime pour l'emploi ? Quels sont ces montants pour les foyers dont le revenu a augmenté et pour les contribuables ayant perdu leur emploi ? À combien peut-on évaluer les sommes dont l'État renoncera à obtenir le remboursement ?
S'agissant des entreprises, le taux actuel d'adhésion à la télédéclaration de la TVA n'est pas encore suffisant. Je constate toutefois que le recours à la téléTVA se développe peu à peu. La gratuité des certificats et le développement de l'assistance aux entreprises pourraient finir par emporter l'adhésion. Les efforts en matière de qualité de service doivent donc se poursuivre.
Naturellement, les gains de productivité doivent être partagés. C'est le sens de la réduction d'impôt accordée aux redevables à l'impôt sur le revenu qui télédéclarent leurs revenus, et permettent ainsi des économies de gestion pour l'administration. De la même façon, les collectivités publiques « clientes » de l'administration fiscale - collectivités territoriales et administrations de sécurité sociale - doivent voir diminuer les frais de gestion qui leur sont facturés, s'agissant des impôts recouvrés par votre ministère.
Par ailleurs, la démarche de modernisation doit être partagée par les agents de Bercy. L'indicateur relatif au taux de connaissance déclaré par les agents des évolutions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, présenté dans le projet annuel de performance, paraît insuffisant pour mesurer l'adhésion des agents aux réformes entreprises. Je me demande s'il ne faudrait pas plutôt mesurer leur approbation avec un indicateur de climat social. La réussite des réformes en cours tiendra à votre capacité à convaincre les agents !
De nombreux chantiers sont ouverts à Bercy, tous déterminants pour la modernisation de l'État.
Il en est ainsi, tout particulièrement, du bilan d'ouverture, d'autant plus sincère qu'il sera exhaustif du côté tant de l'actif que du passif.
Les audits de modernisation constituent, du point de vue de la commission des finances, un vecteur de réforme majeur. Certains audits concernent votre ministère : ils doivent avoir une traduction réelle sur la performance de l'administration.
Or, malgré un audit relatif au recouvrement des amendes, dont vos services indiquent que des conséquences concrètes ont été tirées, l'objectif, pourtant peu satisfaisant, lié au taux de recouvrement des amendes n'a été relevé ni pour 2007 ni pour 2008. Il est à craindre, comme l'a montré une audition de la commission des finances, que des dysfonctionnements ne perdurent.
Les loyers budgétaires qui concernent un certain nombre d'administrations, notamment Bercy, font l'objet de critiques de la part de la mission d'audit sur la gestion du patrimoine immobilier de l'État. Cette mission observe, entre autres, que les loyers budgétaires représentent « un mécanisme complexe pour des avantages attendus modérés, qui ne peut à lui seul réussir à atteindre l'objectif de rationalisation de l'occupation du patrimoine contrôlé par l'État qui lui est fixé ».
L'écart entre le niveau des loyers de marché et des loyers budgétaires, résultant aussi bien de l'imprécision des évaluations des immeubles inscrites au tableau général des propriétés de l'État que du choix du taux, biaise les arbitrages attendus entre la location et l'occupation domaniale, mais aussi entre deux occupations domaniales. France Domaine devra tenir compte de ces analyses dans le cadre de l'expérimentation en cours.
Je voudrais vous suggérer, enfin, de nouveaux sujets d'audit.
Le développement des moyens de paiement électroniques pour le secteur public local paraît bien lent : le contrat de performance de la direction générale de la comptabilité publique prévoit un taux de progression des paiements automatisés de seulement 5 % par an d'ici à 2008. C'est un vrai motif de préoccupation pour les collectivités territoriales.
De même, les dépenses de fonctionnement du plateau technique par agent ne sont toujours pas stabilisées. Comme le reconnaît le ministère, la rationalisation du patrimoine immobilier de Bercy, les déménagements et réaménagements en cours ont indubitablement un coût, du moins sur le court terme. Peut-on envisager un audit de la gestion du patrimoine immobilier de Bercy ?
En conclusion, sous le bénéfice de ces remarques et d'un amendement que je vous présenterai tout à l'heure, la commission des finances propose au Sénat une adoption des crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », ainsi que des deux comptes spéciaux qui lui sont rattachés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. le président de la commission des finances et M. Yves Détraigne applaudissent également.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Je rappelle également que l'intervention générale vaut explication de vote pour ces trois missions.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » recouvrent l'ensemble de nos administrations financières. Ce sont en effet les personnels de la direction générale des impôts, de la direction générale du trésor et de la politique économique, de la direction générale des douanes et des droits indirects qui sont au coeur des crédits budgétaires dont nous débattons. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le ministère des finances semble s'être fait, ces derniers temps, une spécialité d'être le meilleur élève de la réduction des effectifs budgétaires !
Depuis cinq ans en effet, le ministère a ainsi perdu 6 453 emplois, singulièrement des postes de catégorie C, tirant parti de gains de productivité liés à l'automatisation croissante des circuits de production de services, mais aussi de départs en retraite des agents en poste. Le mouvement est appelé à s'accélérer durant les trois années à venir, puisque ce sont 7 438 emplois complémentaires qui seraient supprimés en trois ans.
La traduction concrète de cette évolution est d'ores et déjà perceptible. Elle passe d'abord par la réduction, sans la moindre concertation locale, de l'implantation des directions de réseau - direction générale des impôts et direction générale de la comptabilité publique -, c'est-à-dire la fermeture de centres des impôts et de recettes-perceptions.
Par ailleurs, dans nombre de recettes-perceptions ou de centres des impôts, les conditions d'accueil du public, tout comme la qualité de traitement des dossiers, ne s'améliorent pas, sans que cela ne soit imputable aux agents. Ainsi, le taux de recouvrement des impôts ne parvient pas à progresser, malgré l'usage de plus en plus fréquent du télépaiement et de la télédéclaration par les contribuables. Et le contrôle fiscal ne doit son apparente amélioration de rendement qu'à la croissance - exponentielle - des droits rappelés et des pénalités appliquées aux droits d'enregistrement et au produit de l'impôt de solidarité sur la fortune omis par les redevables.
En effet, sur ces deux postes, les produits ont crû respectivement de 276 millions d'euros et de 122 millions d'euros en 2005 ! Le rendement du contrôle fiscal portant sur l'impôt sur les sociétés comme sur la TVA est en baisse, et celui des contrôles opérés sur l'impôt sur le revenu ne doit sa progression apparente qu'à l'accroissement même du nombre de contrôles sur pièces effectués.
En vérité, les conditions d'une détérioration de la qualité de rendement des services fiscaux se créent peu à peu, la généralisation des télédéclarations et du télépaiement permettant de justifier des réductions d'effectifs qui ne s'accompagnent pas, en réalité, d'un redéploiement des moyens disponibles vers des missions de contrôle pourtant nécessaires.
Ces derniers temps, les agents des administrations financières ont manifesté, au travers de plusieurs mouvements revendicatifs d'une certaine ampleur, leur colère profonde à l'égard des choix opérés par le Gouvernement en matière de gestion des moyens.
Aujourd'hui, tout concourt à créer les conditions d'une réforme de plus grande ampleur qui consisterait, entre autres, à privilégier la retenue à la source sur tout autre mode de recouvrement de l'impôt, délocalisant en fait dans les entreprises la gestion d'une bonne part des tâches aujourd'hui accomplies par les fonctionnaires du ministère de l'économie et des finances.
Une telle orientation est porteuse de dangers, car elle risque de nuire à l'accomplissement d'une fonction essentielle de l'État - le recouvrement des impôts -, au risque de rompre avec certains des principes fondamentaux de notre Constitution. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons évidemment pas ces crédits.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Je voudrais remercier M. Bernard Angels pour la qualité de son rapport - c'est d'ailleurs non une surprise, mais plutôt une habitude dans ce domaine !
La mission « Gestion et contrôle des finances publiques » est au coeur de l'action régalienne du ministère. La direction générale des impôts et la direction générale de la comptabilité publique, qui constituent l'essentiel des bénéficiaires des crédits de cette mission, ont en effet été des précurseurs pour la conclusion de contrats annuels de performance, qui sont de fantastiques instruments de réforme de l'État. Elles sont d'ailleurs suivies, à cet égard, par d'autres ministères comme celui des affaires étrangères.
Nous ne devons pas pour autant oublier les activités d'état-major, selon l'expression utilisée à Bercy. Je profite de cette occasion pour saluer la compétence tout à fait exceptionnelle des fonctionnaires de cette maison. Il est de bon ton d'en dire du mal. Mes amis politiques, qui considèrent quelquefois que mes propositions ne sont pas toujours géniales, en rejettent la faute sur Bercy ! C'est incroyable, car les choses ne se passent pas ainsi la plupart du temps ! Je peux témoigner, puisque je célèbre mon deuxième anniversaire en tant que ministre du budget, que c'est une maison qui tient la maison !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est le ministère de la réalité, et la réalité est souvent dans l'opposition...
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Vous avez évoqué la question de la prime pour l'emploi, la PPE. Sur 9 millions de bénéficiaires, 300 000 d'entre eux vont devoir rembourser tout ou partie de cette prime qui a été touchée par anticipation parce que leur situation a changé : départ à la retraite, perte d'emploi, ou augmentation des revenus des membres du foyer.
J'ai demandé que ces cas soient traités avec discernement. La moitié d'entre eux concerne des personnes dont le revenu a augmenté. Il semble normal qu'ils remboursent cet argent ; mais il faut simplement s'assurer que les conditions de remboursement ne soient pas trop brutales.
À l'inverse, pour ceux qui ont perdu leur emploi, chacun peut comprendre que des précautions soient prises pour que la régularisation des cas difficiles se fasse avec un accompagnement. J'ai donné des instructions à mes services pour que des délais de paiement puissent être admis dans certains cas, et que des remises gracieuses puissent être accordées, lorsque la situation financière du foyer le justifie, dans le cadre d'une appréciation au cas par cas.
Pour l'avenir, j'ai souhaité qu'un audit spécifique sur les modalités de versement de la prime pour l'emploi soit effectué. Je veux qu'un bilan précis de la mensualisation mise en oeuvre cette année soit dressé et que des voies d'amélioration à court et moyen termes soient proposées. J'ai eu l'occasion de l'évoquer : il s'agit notamment du versement de la PPE par l'employeur ou de la fiabilisation avec la déclaration pré-remplie. Dès le début du mois de janvier, les résultats de cet audit seront disponibles et rendus publics, comme c'est le cas pour tous les audits. Monsieur Angels, je vous en enverrai un exemplaire dédicacé ! (Sourires.)
Concernant l'évolution de la téléTVA pour les entreprises, le nombre des adhésions a fortement augmenté : le cap des 250 000 adhérents a été franchi début mars 2006, avec seulement deux mois de retard sur l'objectif. Le nombre d'adhérents a ainsi été multiplié par six en un peu plus de deux ans, pour atteindre aujourd'hui 371 000.
Sur les indicateurs de climat social, le ministère de l'économie s'est doté, dès 2001, d'un observatoire interne destiné à mesurer notamment, au travers d'une batterie d'indicateurs, l'adhésion des agents à la démarche de modernisation engagée par le ministère et aux orientations des directions, la perception du rythme et des effets du changement, le climat social, ainsi que la conflictualité potentielle. (Sourires.) Voilà autant d'outils très utiles au pilotage des réformes au sein du ministère des finances, pilotage d'autant plus utile que nous avons, depuis cette date, engagé des réformes de modernisation absolument majeures.
Concernant la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » et le suivi des audits de modernisation, qui me tiennent beaucoup à coeur, les résultats obtenus pour l'audit relatif à la télédéclaration de l'impôt sur le revenu ont été présentés il y a peu de temps. Depuis cette date, la direction générale de la modernisation de l'État a mis au point un dispositif de suivi détaillé. La consolidation des éléments ainsi recueillis a permis d'élaborer un tableau de bord gouvernemental qui donne une image synthétique de l'état d'avancement des différents audits. Il sera régulièrement actualisé.
Je préside moi-même un comité de suivi avec l'ensemble des chefs d'inspection et les secrétaires généraux des différents ministères afin de veiller à ce que ce dossier soit bien suivi au meilleur niveau.
Enfin, pour le ministère des finances, le tableau de bord porte sur quatre audits : télédéclaration de l'impôt sur le revenu, modernisation du paiement des amendes, extension du champ de compétences des centres d'encaissement, et traitement douanier des grands opérateurs du commerce international.
J'en viens au recouvrement des amendes, qui figure parmi les objectifs du projet de loi de finances pour mesurer l'activité de recouvrement en phase contentieuse uniquement, c'est-à-dire les amendes majorées. Le taux de recouvrement contentieux des amendes s'est établi, à la fin 2005, à 32 %, l'objectif étant d'atteindre 42 % à la fin de 2008.
Pour connaître la proportion des amendes payées par les contrevenants, il faudrait inclure dans le calcul celles qui sont payées spontanément et celles qui sont payées après majoration. Cette information n'est pas disponible, car la plupart des amendes sont encaissées localement. Il faudrait donc passer à la vitesse supérieure. Ce n'est pas à exclure, mais, aujourd'hui, nous ne sommes pas prêts pour le faire.
Le calcul n'est disponible que pour les amendes « radar », dont le taux de paiement spontané, c'est-à-dire dans les quarante-cinq jours qui suivent l'envoi de l'amende, est de 81 %. Si l'on y ajoute les paiements effectués à la suite des poursuites diligentées par le Trésor public, le taux de paiement de ces amendes s'établissait à 87 % à la fin du mois d'octobre.
S'agissant du développement des moyens de paiement électronique dans le secteur public local, la décision d'équipement en moyens de paiement électronique appartient non pas à l'État, mais aux collectivités locales. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle Thierry Breton a signé le 30 janvier dernier deux protocoles avec l'Association des maires de France et l'Assemblée des départements de France. Dans ce domaine, le Trésor public ne peut que s'appuyer sur les relations qu'il entretient avec les collectivités locales, mais c'est au cas par cas.
L'objectif est de progresser de 5 %. Nous y travaillons en multipliant l'effort de sensibilisation et d'information. Monsieur Foucaud, vous avez évoqué la question des effectifs du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, sujet dont nous avons eu l'occasion de débattre longuement avant-hier. Il est vrai que le ministère réduit ses effectifs de 2 988 équivalents temps plein, ce qui signifie le non-remplacement de deux départs à la retraite sur trois, mais l'esprit dans lequel ces réductions sont effectuées est très différent de celui qui prévalait sous la législature précédente. Je rappelle que, du temps de nos lointains prédécesseurs - M. Jospin et son équipe -, l'augmentation des effectifs par principe constituait une sorte de marque de fabrique dont on se satisfaisait.
Or, il est aussi abstrait de les augmenter par principe que de les diminuer par principe. Ce qui est important, c'est de justifier et de documenter ces augmentations ou ces diminutions. À certains endroits, il faut plus de fonctionnaires, parce qu'il y en a plus besoin, à d'autres, il en faut moins, parce qu'il y en a moins besoin. Ces besoins sont mesurés de manière objective par les audits. C'est tout l'intérêt de cette démarche d'audit, dont je souhaite qu'elle transcende les clivages politiques afin que nous nous emparions tous de ce bon produit, qui nous permet d'avancer. Les chiffres que je vous ai présentés sont d'ailleurs les résultats de ces audits, au fonctionnaire près, comme l'on dit maintenant.
La restructuration des services publics en milieu rural est un vaste sujet. Cette restructuration ne peut absolument pas se faire sans débat, à l'échelon tant national que local. À l'échelon national, vous le savez, une conférence nationale des services publics en milieu rural a été organisée. À titre personnel, je veille à ce que, à l'échelon local, les trésoriers-payeurs généraux procèdent, pour toutes les restructurations de trésoreries et de services fiscaux, à une concertation préalable, comme d'ailleurs pour les activités douanières. C'est absolument essentiel. L'objectif n'est pas de réaliser des gains de productivité, il est d'améliorer le service public sur le terrain. Cela peut d'ailleurs entraîner parfois des fermetures, quand certaines restructurations permettent un meilleur service au meilleur endroit.
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Gestion et contrôle des finances publiques |
9 085 193 080 |
8 900 065 603 |
Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local |
8 243 949 680 |
8 127 519 320 |
dont titre 2 |
6 651 487 073 |
6 651 487 073 |
Conduite et pilotage des politiques économique, financière et industrielle |
841 243 400 |
772 546 283 |
dont titre 2 |
380 773 534 |
380 773 534 |
M. le président. L'amendement n° II-21, présenté par M. Angels, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Conduite et pilotage des politiques économique, financière et industrielle Dont Titre 2 |
|
60.000.000 |
|
|
TOTAL |
|
60.000.000 |
|
|
SOLDE |
- 60.000.000 |
|
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial. Le présent amendement vise à supprimer 60 millions d'euros d'autorisations d'engagement sur l'action n° 5 - prestations d'appui et de support - du programme 218 - conduite et pilotage des politiques économique, financière et industrielle.
On peut en effet s'étonner de l'inscription dans le budget de Bercy des crédits dédiés à l'installation de la Maison de la francophonie dans l'immeuble appartenant à l'État situé 20 avenue de Ségur dans le VIIe arrondissement de Paris, le montant inscrit en autorisations d'engagement correspondant au coût d'objectif de l'opération défini en concertation avec l'Établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels de l'État, qui en assure la maîtrise d'ouvrage déléguée.
Le montant de cette opération est estimé à 60 millions d'euros. Pour justifier l'inscription de ces crédits à son budget, le ministère de l'économie et des finances avance le fait qu'il serait le « ministère affectataire » de cet immeuble, ce qui est peu convaincant à l'heure où cette notion disparaît. La francophonie relève des attributions non pas du ministre délégué au budget - vous avez certes de nombreuses missions, monsieur le ministre, mais pas celle-là ! -, mais de celles du ministère des affaires étrangères, qui est le chef de file naturel pour ces questions.
Il convient donc d'inciter le Gouvernement à inscrire ces crédits sur une mission plus appropriée, qu'il s'agisse de la mission « Aide publique au développement » ou de la mission « Action extérieure de l'État ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Pour reprendre un proverbe connu, l'exception confirme la règle !
J'ai été le premier, moi qui suis très attaché à la cohérence de l'action que nous conduisons, à considérer que cela avait un sens de placer ce projet sous la responsabilité du ministère des finances !
La Maison de la francophonie est en effet un projet majeur et tout à fait exceptionnel - j'insiste sur ce point. Il résulte d'un engagement que le Président de la République avait pris lors du sommet de Beyrouth en 2002.
Monsieur le rapporteur spécial, il me semble que ce sujet doit lui aussi largement dépasser les clivages politiques. Je n'imagine pas, quel que soit le résultat de l'élection présidentielle, qu'il n'y ait pas un devoir de suite concernant cette Maison, qui répond à des intérêts supérieurs, à savoir le développement de la francophonie. Soyons cohérents : on ne peut pas, d'un côté, privilégier cette politique et, de l'autre, ne pas prendre de décisions adaptées.
En outre, cette opération relève de plusieurs ministères - vous avez raison de le dire, monsieur le rapporteur spécial -, dont le Quai d'Orsay, mais pas seulement : le ministère de l'écologie et du développement durable est également concerné, ainsi d'ailleurs que l'Organisation internationale de la francophonie, l'OIF.
Dans ce contexte, du fait des caractéristiques exceptionnelles de ce projet, qui dépasse le cadre classique du CAS « Immobilier », ne serait-ce que parce que la partie du site qui ne sera pas occupée par l'OIF n'est pas vendue et qu'un montage un peu spécifique doit être mis en place, compte tenu par ailleurs de son caractère prioritaire - 60 millions d'euros de crédits d'engagement en 2007 -, il a été décidé, afin d'être plus opérationnel, que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie devait directement prendre en charge ce chantier. C'est dans cet esprit que nous travaillons.
L'immeuble choisi, qui est situé 20 avenue de Ségur, était occupé jusqu'à une date récente par le ministère de l'industrie. Dans l'ancien système de l'affectation, qui sera remplacé au 1er janvier 2007 par des conventions entre France Domaine et les occupants, Bercy est théoriquement responsable. Nous avons donc pu engager les opérations dès 2006, les crédits nécessaires ayant été rendus disponibles. Dans ce domaine, les services immobiliers du ministère de l'économie et des finances ont une expérience qui garantit la rapidité et l'efficacité du processus.
Telles sont les raisons pour lesquelles il nous a semblé plus sage et plus efficace de procéder ainsi. Dans ce contexte, je vous serais reconnaissant, monsieur le rapporteur spécial, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. J'entends bien votre argumentation, monsieur le ministre, mais la francophonie ne dépend-t-elle pas de la mission « Action extérieure de l'État » ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La francophonie ne relève donc pas de Bercy ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est donc hors LOLF !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La francophonie relève de l'action extérieure de l'État. Peut-être pourriez-vous prendre l'engagement de déposer un amendement tendant à transférer ces 60 millions d'euros de crédits sur les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » ? Cela aurait un sens et ce serait « lolfien » ! N'est-ce pas possible ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. À ce stade, je ne peux pas prendre d'engagement parce que le projet a démarré. Cette décision est intervenue dans un souci d'efficacité, compte tenu du caractère un peu exceptionnel de ce projet. Vous avez raison, monsieur le président, ce projet relève pour beaucoup du ministère des affaires étrangères, mais pas uniquement, comme je l'ai dit tout à l'heure. D'autres ministères sont également un peu concernés.
Aujourd'hui, ce projet est porté par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dans le respect de la LOLF - il ne doit pas y avoir d'ambiguïté sur ce point -, mais, après tout, rien ne nous empêche de nous fixer un nouveau rendez-vous dans quelques mois afin d'examiner éventuellement s'il y a lieu de le transférer par la suite. Toutefois, je considère que, aujourd'hui, cela a un sens que ce soit Bercy qui engage ce projet, qui, je le répète, a déjà démarré.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Un compte spécial du patrimoine immobilier qui préfigurerait une gestion du patrimoine avec facturation des loyers à chacun des programmes, cela n'aurait-il pas un sens également ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-21 est-il maintenu ?
M. Bernard Angels, rapporteur spécial. Il est important pour la commission des finances du Sénat de montrer qu'elle suit de près ces problèmes et qu'elle souhaite que la LOLF soit respectée. Cet amendement est donc un avertissement.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial. Cela étant dit, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-21 est retiré.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote sur l'ensemble de ces trois missions avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » figurant à l'état D.
État D
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés |
10 930 000 |
10 930 000 |
Prêts et avances à des particuliers ou à des associations |
930 000 |
930 000 |
Prêts pour le développement économique et social |
10 000 000 |
10 000 000 |
M. le président. Je mets aux voix les crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers : « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » figurant à l'état D.
État D
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics |
14 153 700 000 |
14 153 700 000 |
Avances à l'Agence unique de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
14 000 000 000 |
14 000 000 000 |
Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics |
50 000 000 |
50 000 000 |
Avances à des services de l'État |
103 700 000 |
103 700 000 |
M. le président. Je mets aux voix les crédits du compte de concours financiers : « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » et du compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».
Provisions
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Provisions ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Provisions » est originale : en deux programmes constituant des dotations, elle regroupe en effet des crédits destinés à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote du projet de loi de finances. Ces crédits sont répartis en tant que de besoin, en cours d'exercice, entre les autres missions.
En outre, conformément aux dispositions de la LOLF, la mission « Provisions » est dénuée de stratégie de performance. Par conséquent, les deux programmes qui la composent ne font l'objet d'aucun objectif ni indicateur.
La dotation du programme « Provision relative aux rémunérations publiques » correspond aux « mesures générales intéressant les agents du secteur public ». Elle a vocation à financer les mesures générales, en matière de rémunérations publiques, dont la répartition par programme ne pourrait être déterminée a priori avec précision.
Aucun crédit n'est demandé à ce titre pour 2007, ce qui suppose que l'ensemble des rémunérations a pu être réparti entre les programmes des autres missions. Dans la perspective d'une rationalisation des crédits, comme dans celle d'une meilleure lisibilité budgétaire, la commission des finances s'en félicite.
La dotation du second programme, « Dépenses accidentelles et imprévisibles », correspond aux crédits naguère consacrés aux « dépenses accidentelles », fusionnés avec les crédits pour « dépenses éventuelles ». Cette dotation, comme son nom l'indique clairement, assure les crédits nécessaires à des dépenses accidentelles, imprévisibles et urgentes. Il s'agit notamment des dépenses qu'occasionneraient des catastrophes naturelles, en France ou à l'étranger, ou des événements extérieurs qui nécessiteraient le rapatriement de Français.
Au titre de cette seconde dotation, pour 2007, 80 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement étaient demandés dans le projet de loi de finances initial. L'Assemblée nationale a, d'une part, minoré ces crédits de 3 millions d'euros pour gager la majoration de la dotation globale de fonctionnement au titre de la dotation versée aux communes situées dans un parc naturel et, d'autre part, majoré ces crédits de plus de 61 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement.
De la sorte, le montant des crédits de paiement demandés pour 2007 se stabilise, et celui des crédits d'engagement diminue de plus de 71 % par rapport aux crédits équivalents inscrits dans la loi de finances pour 2006.
Cette diminution significative, s'agissant des autorisations d'engagement, est justifiée par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie comme un retour à la norme budgétaire après le budget de 2006, le premier en mode LOLF.
En effet, la demande de crédits pour 2006 avait été surévaluée dans la mesure où deux incertitudes subsistaient lors de l'établissement des prévisions d'autorisations d'engagement pour 2006.
En premier lieu, la direction du budget redoutait une estimation insuffisante des crédits, notamment en raison du principe de crédits limitatifs. La commission des finances s'était alors interrogée, en particulier, sur les raisons du « transit » par la mission « Provisions » d'autorisations d'engagement destinées à couvrir les frais de justice, dépenses relevant a priori de la mission « Justice ». Elle avait rappelé que la sincérité budgétaire imposait de veiller à ce que les crédits demandés au titre de ces dépenses ne servent pas, en étant dénaturés, à corriger des évaluations de crédits initiales insuffisantes pour d'autres missions.
En second lieu, dans le contexte de la transition entre les deux régimes budgétaires - l'ordonnance de 1959 et la LOLF -, la direction du budget devait assurer le « basculement » entre les exercices 2005 et 2006, en anticipant, selon ses termes, les « éventuelles difficultés de gestion comptable liées à la mise en oeuvre de la LOLF, notamment s'agissant [...] de la transition entre les anciennes autorisations de programme et les nouvelles autorisations d'engagement ».
Cette année, la commission des finances se félicite du retour à des prévisions budgétaires plus conformes à celles des budgets précédents, l'année 2006 pouvant désormais être considérée comme une année de transition.
Sous le bénéfice des observations que je viens de présenter, la commission des finances a décidé, mes chers collègues, de vous recommander l'adoption de la mission « Provisions ». (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur spécial, cette mission est constituée de deux programmes.
La dotation relative aux dépenses accidentelles et imprévisibles a pour objet de permettre le financement en cours de gestion de dépenses urgentes comme, par exemple, les catastrophes naturelles. Dans le projet de loi de finances pour 2007, son montant est fixé à 80 millions d'euros en autorisations d'engagement au titre des aléas susceptibles d'intervenir en 2007.
La réduction de cette dotation correspond à la disparition des aléas qui auraient pu survenir ; il s'agit donc, comme vous l'avez souligné, d'un retour à la normale.
Le second programme, « Provisions relatives aux rémunérations publiques », n'est pas doté en projet de loi de finances pour 2007, les mesures générales d'augmentation des traitements que le Gouvernement entend mettre en oeuvre ayant d'ores et déjà été annoncées et budgétisées dans les programmes des différents ministères. (Applaudissements.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Provisions » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Provisions |
138 449 149 |
138 449 149 |
Provision relative aux rémunérations publiques |
0 |
0 |
dont titre 2 |
0 |
0 |
Dépenses accidentelles et imprévisibles |
138 449 149 |
138 449 149 |
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Provisions ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Provisions ».
Régimes sociaux et de retraite
Compte d'affectation spéciale : Pensions
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits des missions « Régimes sociaux et de retraite » et « Compte d'affectation spéciale : Pensions ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est en mon nom et en celui de M. Bertrand Auban, corapporteur spécial, aujourd'hui empêché, que je vous transmettrai les principales observations que la commission des finances a voulu porter sur les crédits dévolus aux pensions et aux régimes sociaux et de retraite.
Le compte d'affectation spéciale « Pensions » a été créé en 2006, en application de la LOLF. Il totalise 47 milliards d'euros de crédits, soit plus de 17 % du budget général.
Ces crédits augmentent de 1,4 milliard d'euros pour 2007. La hausse est pourtant minorée de 200 millions d'euros, car il a été décidé de ramener de 1 milliard d'euros à 800 millions d'euros le montant du fonds de roulement constitué en 2006.
Le compte d'affectation spéciale, dit CAS, « Pensions » permet de clarifier le financement de la partie la plus dynamique des dépenses de personnels : les pensions civiles et militaires représentent aujourd'hui 15 % du budget général, contre 9 % en 1990.
Mais l'apport majeur de ce compte d'affectation spéciale est la responsabilisation des gestionnaires de programmes. Désormais, ils doivent verser, à proportion des rémunérations d'activité, une « contribution employeur » qui équilibre le compte de pension. Il résulte de cette contrainte d'équilibre des taux élevés, en augmentation pour 2007. Pour les personnels civils, le taux est de 50 % en 2006 puis de 50,7 % en 2007 ; en ce qui concerne les personnels militaires, le taux s'élève à 100 % en 2006, puis à 101 % pour 2007.
Comme le rapport démographique doit passer de 1,6 actif civil par pensionné en 2005 à 1,3 actif civil en 2010, les taux de « contribution employeur » continueront d'augmenter.
En synergie avec la fongibilité asymétrique, ces augmentations inclinent les gestionnaires de programmes à mieux pondérer leurs décisions de recrutements en cours d'exercice et lors des conférences budgétaires.
Pour 2006, la démarche de responsabilisation n'était cependant pas aboutie : le CAS « Pensions » faisait ressortir une faiblesse anormale des taux de cotisation employeur pour les organismes publics et pour les ouvriers de l'État.
En 2007, il est prévu un rehaussement progressif du taux de cotisation employeur pour les opérateurs publics, qui est porté de 33 % à 39,5 %. J'observe d'ailleurs que cette décision répond à une critique émise par la commission des finances à l'occasion de l'examen du projet annuel de performance, le PAP, pour 2006.
Nous regrettons cependant que la « justification au premier euro » soit toujours décevante compte tenu des montants en jeu.
J'en viens à la mesure de la « performance ».
Partant du constat que la mission regroupe des dépenses obligatoires, le projet annuel de performance se borne à mesurer l'efficience de la gestion ou la qualité du service.
Seuls deux indicateurs suivent l'impact de la réforme des retraites de 2003 : ils portent sur l'âge moyen de la radiation des cadres et sur la durée moyenne des cotisations des fonctionnaires.
Or ces indicateurs sont frustes et seraient judicieusement complétés par des indicateurs portant sur le nombre moyen d'années de décote et de surcote appliqué au moment de la liquidation.
Si le projet annuel de performance manque encore d'ambition, il existe cependant des motifs de satisfaction.
Ainsi, la présence d'un indicateur pour retracer l'écart entre la prévision et l'exécution afin d'améliorer la précision du budget répond à un voeu émis par la commission.
En outre, la relative continuité des PAP en 2007 augure favorablement du suivi de cette performance.
Je signale que la commission des finances vous présente, par ailleurs, un amendement tendant à modifier les règles d'attribution de l'indemnité temporaire attribuée aux fonctionnaires retraités de l'État dans certaines collectivités d'outre-mer.
C'est dans une perspective de maîtrise des effectifs et de transparence des coûts, mes chers collègues, que la commission des finances vous recommande l'adoption des crédits de la mission « Pensions ».
Il me revient à présent d'aborder l'examen de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».
En augmentation de 11 %, ces crédits s'élèvent à 5 milliards d'euros, destinés à subventionner divers régimes en vue de contribuer à leur équilibre.
Cette augmentation s'explique par des situations démographiques déséquilibrées et une évolution défavorable des transferts de compensation démographique.
Pour l'essentiel, la mission permet de financer la participation de l'État au financement du congé de fin d'activité des conducteurs routiers, la subvention d'équilibre aux régimes de retraite de la SNCF et de la RATP, la subvention d'équilibre aux régimes de retraite et de sécurité sociale des marins, ainsi que diverses subventions d'équilibre à des régimes en déclin démographique, comme celui des mines, ou des régimes en extinction, tels ceux de l'Imprimerie nationale et de l'ORTF.
Dans le prisme « lolfien », cette mission est un autre parent pauvre de la démarche de performance.
Elle recouvre, certes, des dépenses obligatoires, et seuls des indicateurs mesurant l'efficience de la gestion et la qualité du service rendu ont ainsi été mis en place.
Pourtant, l'absence d'indicateur concernant les modalités de liquidation au sein de régimes fortement subventionnés par l'État paraît singulière, dans un contexte qualifié par la commission des finances « de renouveau de la démocratie budgétaire ».
La mission subventionne, par exemple, les régimes de la SNCF et de la RATP à hauteur de plus de 2,8 milliards d'euros.
Dans son dernier rapport annuel au Parlement sur la sécurité sociale, la Cour des comptes a consacré un développement sur les régimes spéciaux de retraite des industries électriques et gazières, de la RATP et de la SNCF. Ce rapport incline à réformer ces régimes procurant « des droits spécifiques qui ne sont pas financés par leurs bénéficiaires ».
Cette analyse nous parvient avant le prochain rapport du Conseil d'orientation des retraites, le COR, sur les enjeux du « rendez-vous » prévu d'ici à 2008 par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Sur cette question, il me paraît fondamental d'engager un dialogue social.
Par ailleurs, un récent « audit de modernisation » a donné lieu, au mois d'avril 2006, à un rapport sur l'Établissement national des invalides de la marine, l'ENIM. Il en résulte de nouvelles perspectives d'amélioration du service et de la gestion du régime spécial de sécurité sociale des marins, ainsi que l'amorce d'une réflexion sur son évolution ultérieure, compte tenu, naturellement, de la pénibilité des métiers.
Pour conclure, mes chers collègues, parce que les crédits de la mission sont aujourd'hui indispensables pour équilibrer les régimes concernés, la commission des finances - j'y insiste - vous recommande aussi, mes chers collègues, l'adoption des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite ». (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis l'an dernier, grâce à la LOLF, le Parlement examine de façon plus précise les crédits afférents aux régimes spéciaux de retraite les plus importants, ceux de la SNCF, de la RATP, des marins, des mines et des routiers.
J'en suis heureux, car cette démarche répond non seulement à un besoin, mais aussi à une attente de plus en plus forte de nos concitoyens.
Dans son rapport du mois de septembre 2006, la Cour des comptes a fort justement souligné que les ressortissants de ces régimes sont demeurés à l'écart des réformes des retraites de 1993 et de 2003. Les débats des dernières semaines ont bien montré que cette situation est de moins en moins bien acceptée par les Français, qui réclament avant tout plus d'équité et de transparence sur cette question.
Pour cette raison, la commission des affaires sociales renouvelle les demandes qu'elle avait formulées l'an dernier, mais en vain, afin d'obtenir l'amélioration des indicateurs et de la présentation de l'ensemble de cette mission. L'enjeu est de première importance : il sera impossible de préparer une réforme de ces fameux régimes de retraite spéciaux si le Parlement continue à n'en connaître que ce qui correspond à leurs charges de gestion, c'est-à-dire à 3 % des dépenses totales !
Monsieur le ministre, je souhaite savoir pourquoi il n'a pas été répondu à nos demandes formulées oralement puis confirmées par écrit et adressées au ministère du budget.
Si je mentionne ce fait, c'est parce que les indicateurs actuels ne donnent qu'une vision partielle des problèmes des régimes spéciaux.
Bien plus que les seules dépenses de gestion courante, qui sont dérisoires, nous aurions besoin de connaître le niveau des engagements à long terme de ces systèmes spéciaux de retraite, mais aussi la décomposition entre les « droits de base » servis par le régime général et les « avantages spécifiques » correspondants aux prestations supplémentaires de ces régimes, ainsi que l'hypothèse de projection et le mode de calcul de ces estimations.
Il importe en outre de disposer, pour chacun de ces régimes, de nouveaux indicateurs portant sur l'âge moyen de liquidation des pensions, la proportion des départs à la retraite des personnes en service actif, la répartition de ces départs par tranches d'âge - avant cinquante-cinq ans, entre cinquante-cinq ans et soixante ans. Le Parlement ne peut se contenter, année après année, d'une bonne lecture de la presse quotidienne et hebdomadaire...
Enfin, nous manquons de données sur la durée moyenne de perception et le montant moyen des pensions, ainsi que sur l'espérance de vie à soixante ans de ces assurés sociaux. L'ensemble de ces informations nous autorisera à procéder à des comparaisons avec les assurés sociaux des autres régimes, tant du secteur privé que du secteur public.
La commission des affaires sociales demande au moins que ces réflexions puissent être reprises dans le prochain projet de loi de finances. Nous comptons à cet égard sur l'aide de la commission des finances. Nous contribuerions ainsi à préparer dans de bonnes conditions la première clause de rendez-vous de la réforme des retraites, qui interviendra en 2008, voire dès 2007 sur certains points.
Nous y sommes d'autant plus attachés que les informations sur les retraites des grandes entreprises publiques sont rarement publiées ou très difficilement accessibles, y compris pour les parlementaires. Les adossements de régimes spéciaux aux caisses de retraite du secteur privé en fournissent malheureusement une illustration parfaite : en dépit de l'obligation d'information inscrite à l'article L. 222-7 du code de la sécurité sociale, le Parlement continue le plus souvent à ne connaître de ces dossiers que ce qu'en dit la presse. On peut donc mesurer l'aspect dérisoire de cette obligation d'équité et de transparence.
Réformer les régimes spéciaux supposerait de mener un travail préparatoire approfondi afin de pouvoir mettre en évidence leur spécificité et leurs modes de financement, procéder à des comparaisons avec les systèmes de retraite de droit commun et appréhender le caractère atypique de leur effort contributif. À la RATP et à la SNCF, par exemple, les cotisations des salariés ne représentent respectivement que 13 % et 7 % des prestations de retraite versées. Dans ces conditions, peut-on vraiment parler de régime de retraite par répartition ? Pour ma part, je suis convaincu que ces mots n'ont pas la même signification d'un organisme à l'autre.
En définitive, mes chers collègues, cette nouvelle mission constitue non seulement un élément potentiel pour le contrôle parlementaire - s'il est possible -, mais aussi une chance dans la perspective de la prochaine réforme des retraites, à condition que soit repensé rapidement le cadre général de ces documents, comme nos propositions invitent à le faire.
Soucieuse de contribuer au débat public et au succès de la LOLF, la commission des affaires sociales a souhaité publier dans son rapport de nombreuses données statistiques inédites, qui permettent d'illustrer le bien-fondé de ses suggestions.
Renforcer l'information et le contrôle parlementaire est également l'une des conclusions du rapport publié l'an dernier à la suite des travaux de la commission de réflexion sur la dette publique, présidée par Michel Pébereau. Notre commission en partage l'orientation.
Sous ces réserves, la commission des affaires sociales s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP. -M. le président de la commission des finances applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, rapporteur pour avis.
M. Bernard Piras, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques a examiné la mission « Régimes sociaux et de retraite » dans la mesure où celle-ci traduit, sur le plan budgétaire, les engagements pris par l'État, au titre de la solidarité nationale, à l'égard d'assurés sociaux et de pensionnés travaillant, pour l'essentiel, pour des entreprises ou dans des secteurs qui relèvent du champ de compétence de la commission : les transports, la marine marchande et hauturière, les mines, etc.
En effet, 87 % des 5 milliards d'euros demandés l'an prochain pour les trois programmes de cette mission financeront les subventions d'équilibre versées soit aux régimes de retraite de la SNCF et de la RATP, soit à l'ENIM, l'établissement national des invalides de la marine - le régime spécial assurant aux marins la protection des divers risques sociaux -, soit encore à la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, qui en fait de même pour les mineurs. C'est d'ailleurs l'importance de la progression des dotations devant être versées en 2007 à ces trois structures qui explique celle de la mission qui, à hauteur de 11 %, est significative.
Cependant, les justifications apportées par le projet annuel de performances, qui témoignent du reste du caractère contraint des crédits consacrés à la mission, ont conduit la commission des affaires économiques, sur ma proposition, à émettre un avis favorable à ces crédits.
L'essentiel est ailleurs : l'un de nos plus récents collègues, François Fillon, a relancé à la mi-septembre la controverse sur la réforme des régimes spéciaux de retraite. À la suite de quoi, la presse n'a eu de cesse ces deux derniers mois de stigmatiser les subventions d'équilibre versées par l'État à divers régimes spéciaux. Étaient toujours visés, au regard de l'importance des crédits en cause, ceux de la SNCF, de la RATP ou encore des mines. Mais ces trois régimes ne sont pas les seuls régimes spéciaux, et l'on ne peut pas simplement aborder la question à l'aune du coût budgétaire de la mission.
S'il est vrai que la réforme du 21 août 2003 n'a pas concerné les régimes spéciaux et que le débat a été renvoyé à un « rendez-vous » fixé en 2008, bien des évolutions ont eu lieu depuis trois ans ou sont actuellement en cours. Je citerai pour mémoire la réforme des régimes des industries électriques et gazières dès 2004, l'adossement de l'ENIM au régime général l'an dernier, la transformation du STIF, le syndicat des transports d'Île-de-France, en juillet 2005 - cela a entraîné le futur adossement de la RATP, question qui nous a occupés en séance publique lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale -, l'alignement du régime de la Banque de France sur celui de la fonction publique à compter d'avril 2007 - accepté par six des sept syndicats de la banque -, ou encore l'application à la SNCF et à la RATP des nouvelles normes comptables internationales, qui obligera l'an prochain ces deux entreprises à provisionner les engagements de retraite qui sont à leur charge, et qui explique la résurgence de la question de l'adossement du régime de la SNCF au régime général.
Je pense que le budget de la présente mission est de ce point de vue incomplet, puisque, dans l'hypothèse où l'adossement de la RATP, voire de la SNCF, interviendrait l'an prochain, il ne prend pas en compte les participations de l'État à sa mise en oeuvre. Cela dit, je reconnais que, au moment de l'élaboration du projet de loi de finances - et même aujourd'hui -, il n'était pas possible d'anticiper de manière raisonnable le niveau de ces participations.
Reste qu'il est évident que le contexte actuel se prête à une réflexion sur l'avenir des régimes spéciaux. Outre que cette réflexion est prévue pour 2008 et que l'élection présidentielle activera obligatoirement le débat, les déséquilibres des comptes, qui vont s'aggraver, comme la mise en oeuvre d'obligations internationales, la rendent nécessaire.
Toutefois, cette réflexion ne doit à mon avis pas nécessairement conduire à une réforme radicale des régimes spéciaux remettant en cause les droits des pensionnés et des agents en activité. En effet, les avantages dont bénéficient les personnels au titre de la retraite et de la protection sociale font partie intégrante de leurs statuts et sont la contrepartie de contraintes et de pénibilités qui doivent être prises en compte. Si changements il doit y avoir, ils ne pourront concerner, dès lors qu'ils seront profonds, que les nouvelles générations d'agents ou de salariés.
Avec les membres de la commission, nous sommes convenus qu'il s'agira de trouver des solutions équitables entre les professions et entre les générations, c'est-à-dire favorisant une uniformisation des règles dans le respect des spécificités propres à chaque situation et conduisant à un partage équilibré des charges entre la solidarité nationale et les contributions des différents secteurs d'activité. Je ne doute pas que, à l'issue du dialogue que nous aurons avec les partenaires sociaux en 2008, nous y parviendrons.
Dans cette attente, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de la mission pour 2007. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. le président de la commission des finances applaudit également.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Je rappelle également que l'intervention générale vaut explication de vote pour ces deux missions.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons tous, les sommes consacrées aux pensions et retraites des agents de l'État et de certains secteurs d'activité font partie des revenus des ménages, qui contribuent de façon importante à l'ensemble de l'activité économique. Les pensions et retraites ne sont donc pas uniquement une charge pour le budget de l'État.
Cela étant dit, c'est le devenir même des régimes spéciaux qui doit retenir notre attention dans le cadre de l'examen des crédits de cette mission. En effet, on nous explique souvent, en se fondant sur des extrapolations démographiques, que les régimes spéciaux, comme ceux de la fonction publique, représenteraient des charges trop lourdes. À ce titre, les futurs retraités de ces différents régimes devraient accepter quelques menus sacrifices.
Permettez-moi de faire quelques observations.
Si certains régimes sont aujourd'hui déficitaires de manière sensible - je pense au déficit structurel du régime des mines lié à l'interruption pure et simple de l'activité -, les décennies à venir seront marquées, pour l'ensemble des régimes, par la raréfaction du nombre des allocataires de prestations.
Dans le domaine des chemins de fer, par exemple, le fait que nous ayons connu un mouvement de réduction du nombre des cheminots en activité pèse dans l'immédiat sur le régime de retraite. A contrario, cet effet jouera à la baisse dans les années à venir, puisque le nombre d'actifs cessant leur activité sera moindre qu'aujourd'hui. Cette remarque vaut pour l'ensemble de la fonction publique et des régimes relevant des crédits de la mission et du compte spécial.
Un autre mouvement spectaculaire vient d'animer la fonction publique d'État, c'est le mouvement de transfert, découlant de la décentralisation, de personnels, notamment des personnels techniciens, ouvriers et de service, ou TOS, de l'éducation nationale et du personnel des directions départementales de l'équipement.
Ce transfert budgétaire a une traduction précise dans le cadre de la discussion qui nous occupe : 1,1 milliard d'euros de crédits de personnel imputables aux transferts a disparu de l'article 34 et sont compensés, à due concurrence, par autant de recettes fiscales transférées, c'est-à-dire notamment par une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers.
Mais, nous devons le souligner, cette somme considérable, qui consomme la majorité des ouvertures nouvelles de crédits prévues par la loi de finances initiale, n'est sans doute rien au regard des sommes que l'État économisera progressivement au détriment des finances locales dans les années à venir. Le passage des fonctionnaires d'État employés par le ministère de I'éducation nationale ou par le ministre de l'équipement en fonctionnaires dépendant du régime de la CNRACL, la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, permet en fait à l'État de se dégager du financement ultérieur des pensions versées à ces agents, puisque le volume des cotisations prélevées n'a pas été transféré avec les personnels.
Dans ces conditions, le compte d'affectation spéciale peut fort bien connaître ces prochaines années une amélioration tendancielle provenant du fait qu'il n'aura pas à prendre en charge le versement des pensions des personnels transférés. Une telle amélioration participera du même coup à la dégradation des comptes de la CNRACL et peut-être même à la mise en cause de la « bonne santé » de l'IRCANTEC, puisque ces organismes de retraite seront confrontés au problème du versement des prestations.
Nul doute qu'il conviendrait, dans la plus parfaite transparence, de faire le point de l'application concrète du transfert des personnels sur la situation financière des collectivités territoriales à échéance des dix à quinze prochaines années.
Nous ne voterons bien évidemment pas les crédits de cette mission ni ceux du compte d'affectation spéciale, car ils consacrent de manière générale la remise en question de la qualité et du niveau des prestations servies aux retraités.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la nouvelle mission « Régimes sociaux et de retraite » permet d'examiner sur le fond un dossier particulièrement important pour l'avenir de nos retraites.
Elle s'inscrit dans le contexte des réformes passées, présentes et à venir des régimes de retraite des fonctionnaires et des personnels de certaines entreprises publiques. Les choix qui ont été faits et les décisions qui seront prises détermineront pour longtemps les équilibres financiers de l'ensemble des régimes de retraite privés comme publics.
Le compte d'affectation spéciale « Pensions » présente le coût complet des pensions de retraite des fonctionnaires. Les dépenses représenteront donc 41,9 milliards d'euros, en progression de 0,6 % par rapport à 2006.
Il est encore un peu tôt pour connaître l'impact de la réforme de 2003 sur le besoin de financement du régime. Un rapport très attendu du COR, le Conseil d'orientation des retraites, en fera le bilan en 2008. Même si les effets de la réforme demeurent encore très limités, il est heureux que cette dernière ait eu lieu.
S'agissant des recettes, elles s'établiront à près de 42,1 milliards d'euros. Les cotisations salariales ne représentent que 4,8 milliards d'euros. Les contributions des employeurs s'élèvent, quant à elles, à 32 milliards d'euros. À ce titre, La Poste et France Télécom versent 4,3 milliards d'euros.
La situation de La Poste est préoccupante, car elle ne parvient plus à faire face à la charge de pensions qui explose : 3,3 milliards d'euros pour 2007 ! L'État en assume une part non négligeable, mais cette situation n'est pas tenable. Une réforme est en cours avec la mise en place d'un établissement public destiné à la gestion des retraites de La Poste.
Nous comprenons bien l'argument selon lequel La Poste, qui supporte aujourd'hui des charges significativement supérieures à celles de ses concurrents, ne se trouve pas en situation d'équité à leur égard. Mais, selon l'exposé des motifs du projet de loi de finances rectificative pour 2006, l'article 41 « donne à l'établissement la faculté de conclure des conventions avec les régimes de retraite de droit commun, et ouvre ainsi la possibilité de négocier des accords de mutualisation qui répondraient à l'intérêt de toutes les parties concernées ». Il s'agit donc d'organiser un adossement sur la Caisse nationale d'assurance vieillesse. Or je ne vois pas en quoi le régime général d'assurance vieillesse pourrait en tirer le moindre bénéfice.
Si, dans un délai de deux ans, des conventions n'aboutissaient pas, le Gouvernement devrait remettre un rapport au Parlement. Permettez-moi, monsieur le ministre, de m'interroger sur ce dossier.
Il est essentiel que le Gouvernement s'engage à ne pas autoriser d'adossement sans soulte compensatoire évaluée à un juste niveau. En outre, des clauses de révision devront être prévues si les dépenses excédent les sommes qui ont été versées par La Poste. Il me semble en effet qu'il est de notre responsabilité de veiller à ce que les intérêts des salariés de droit privé soient préservés. En tant que salariée du privé, je suis d'autant plus sensible à ce sujet.
S'agissant des régimes spéciaux, j'avais exprimé l'année dernière des inquiétudes sur l'importance des enjeux, puisque les sommes à financer au cours des prochaines décennies seront colossales : 105 milliards d'euros pour la SNCF, 89 milliards d'euros pour EDF-GDF, 23 milliards d'euros pour la RATP.
Pour 2007, les dotations SNCF et RATP atteignent plus de 3,1 milliards d'euros pour des régimes qui présentent des spécificités par rapport non seulement au régime général mais également à celui de la fonction publique. Compte tenu du déséquilibre démographique du régime SNCF, la sollicitation grandissante de l'État est inéluctable. L'on peut donc s'interroger sur le maintien de certaines spécificités du régime, notamment pour les nouveaux entrants.
À cet égard, le régime de la SEITA ainsi que celui de France Télécom sont des exemples à suivre concernant la sortie réussie d'un régime spécial.
Si la pénibilité de certains postes doit être reconnue en tant que telle, sa compensation ne doit pas forcément être établie à travers un statut spécifique au moment du départ à la retraite ; la solution passe, selon moi, notamment, par une amélioration des conditions de travail ou une augmentation des salaires.
Le rendez-vous fixé pour 2008 devra permettre l'ouverture d'un débat sur ce thème.
S'agissant de la RATP, l'adossement effectué par la caisse de retraites du personnel sur le régime de droit commun est en cours. Les négociations avec la CNAV sur le montant de la soulte financée par l'État et sur les conditions de l'adossement n'ont malheureusement toujours pas abouti.
Ce qui est inquiétant, c'est l'écart qui s'accentue entre 2006 et 2007 concernant les montants de la dotation de l'État et les déficits du régime de retraite de la RATP. Le ratio démographique tendant par ailleurs à se dégrader à long terme, des solutions de financement devront être trouvées afin de combler les besoins de financement croissants du régime.
Pouvez- vous, monsieur le ministre, nous dire quelles sont les pistes envisagées pour que les négociations engagées progressent ?
En conclusion, je voudrais évoquer la spécificité française qui consiste à faire cohabiter plusieurs centaines de régimes d'assurance vieillesse différents dont les structures de financement ne sont pas toujours transparentes et dont les modalités, souvent complexes, sont difficiles à comparer.
Ce qui est acquis, hélas - je dis bien hélas ! -, c'est que la part financée par l'État est sans cesse croissante et représente aujourd'hui plus de la moitié des ressources pour ce qui concerne les principaux régimes. En tout état de cause, le statu quo est difficilement tenable. J'estime, pour ma part, qu'il en va de notre responsabilité politique à tous. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. En premier lieu, je voudrais répondre aux différents points que vous avez évoqués dans votre rapport, monsieur Foucaud, en rappelant que l'efficacité de la gestion des régimes est la seule façon de se fixer des objectifs mesurables et maîtrisables par le responsable de programmes.
La question posée dans ce contexte est celle de l'information, tout à fait légitime, du Parlement.
Dès le projet de loi de finances pour 2007, le projet annuel de performance a partiellement tenu compte de cette attente. Chaque régime s'est ainsi vu enrichi d'un certain nombre d'indicateurs de contexte qui, bien que sans lien direct avec la performance au sein de la LOLF, constituent évidemment de précieux éléments d'information.
Les travaux du COR, au sein duquel le Parlement est représenté, doivent cependant rester la principale source d'information technique détaillée sur les régimes de retraite, sauf à vouloir alourdir encore les documents budgétaires transmis du Parlement, ce qui n'est sans doute pas la meilleure manière de procéder.
Monsieur Leclerc, à l'instar de M. Foucaud, vous avez évoqué la préconisation de la Cour des comptes à propos des régimes spéciaux.
Je rappellerai que l'adossement de ces régimes, tel qu'il a été réalisé ou est en cours de réalisation pour les industries électriques et gazières ainsi que pour la RATP, constitue une réforme du financement dont l'objectif premier était d'éviter à ces entreprises de provisionner massivement leurs engagements de retraite dans le cadre de leur passage aux normes IFRS.
En ce qui concerne l'évolution des droits, la loi de 2003 portant réforme des retraites a prévu que le Gouvernement devrait élaborer avant le 1er janvier 2008 un rapport qui sera rendu public et transmis au Parlement sur la base des travaux du COR.
L'équilibre entre les générations et l'équité entre les régimes devront évidemment être pris en compte par les travaux du COR sans qu'il soit aujourd'hui possible de préempter leurs conclusions.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez également évoqué l'ENIM qui, comme vous le savez, a fait l'objet d'un audit de modernisation ; il figurait, en effet, sur la liste des 100 audits que j'ai déjà lancés.
Les principales recommandations de cet audit sont les suivantes : simplification de l'instruction des dossiers de pensions d'invalidité et de retraite anticipée pour invalidité avec, notamment, la suppression des commissions spéciales de visite ; renforcement des mesures de prévention ; basculement progressif de l'activité de liquidation des feuilles de soins et de gestion de la branche maladie vers les caisses primaires d'assurance maladie ; enfin, maintien du régime spécial, assorti de la mise en place d'une réflexion sur ces paramètres.
Chaque piste doit être examinée et donner lieu aux actions qui lui sont propres. Le régime des marins expertise ainsi à l'heure actuelle les préconisations de l'audit.
Pour ce qui concerne les paramètres du régime, je ne puis que vous renvoyer aux futurs travaux dans le cadre de la « clause de rendez-vous » générale prévue pour 2008.
Monsieur Leclerc, vous avez évoqué les conditions d'adossement des régimes spéciaux.
Le respect du principe de neutralité des adossements est inscrit dans le code de la sécurité sociale ; il est au centre des discussions techniques qui précèdent et accompagnent les négociations avec les caisses du régime de droit commun.
Les adossements donnent lieu à d'importants travaux juridiques et de chiffrage conjoints entre la CNAV, les régimes concernés, les entreprises et l'État. La transparence est le principe de base auquel le Gouvernement veille attentivement.
Comme pour les institutions de régime complémentaire, la signature des conventions financières d'adossement est en tout état de cause autorisée par l'organe délibérant de la CNAV, c'est-à-dire son conseil d'administration.
Mme Beaufils m'a interrogé sur le transfert des TOS et des personnels de l'équipement au régime de retraite des collectivités locales.
Je voudrais ici la rassurer : l'État assure bien la compensation aux régions et aux départements du coût des cotisations de retraite de ces agents au taux qui est celui de la CNRACL.
Pour votre part, monsieur Piras, vous indiquez que les soultes d'adossement des retraites de la RATP n'ont pas été budgétisées. Permettez-moi à cet égard de vous renvoyer aux rapports de M. Michel Bécot et de M. Paul Girod sur le CAS « Participations financières de l'État » précisant qu'une dotation en capital à la RATP a été prévue à cet effet dans la justification des dépenses du CAS pour 2007.
Madame Procaccia, la réforme qui sera proposée dans le projet de loi de finances rectificative pour 2006 repose sur les principes suivants.
D'abord, les droits des fonctionnaires seront inchangés. Un dispositif fondé sur une cotisation libératoire pour La Poste est mis en place ; il sera progressivement diminué pour atteindre un taux d'équité concurrentiel en 2010, calculé de manière à égaliser le niveau des charges sociales et fiscales obligatoires assis sur les salaires entre La Poste et les autres entreprises du secteur des transports et de la banque.
Un établissement public national de financement des retraites de La Poste est créé. Il recevra une dotation de La Poste de 2 milliards d'euros qui sera, au cours des années suivantes, progressivement appelée pour faire face aux besoins de financement du CAS « Pensions » au titre des fonctionnaires de La Poste.
L'établissement pourra conclure des conventions d'adossement de la population postière avec le régime général dans le respect strict de la neutralité financière voulue par le code de la sécurité sociale ; mais il s'agit là d'une simple option. Le conseil d'administration de la CNAV devra en tout état de cause se prononcer pour que cette voie de l'adossement soit ou non retenue.
Tels sont les éléments de réponse que je tenais à apporter aux différentes questions qui m'ont été posées.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je voudrais en cet instant exprimer le souhait que le « bleu » budgétaire fasse l'objet d'une documentation plus détaillée lors de la prochaine loi de finances.
Par ailleurs, monsieur le ministre, l'évocation des régimes spéciaux de la SNCF, de la RATP et de quelques autres entreprises que l'État doit abonder - Thierry Foucaud, en sa qualité de rapporteur spécial, rappelait les 2,770 milliards d'euros que l'État doit supporter pour couvrir le régime spécial de la SNCF - nous renvoie directement au bilan d'ouverture et, plus particulièrement, au bilan que la SNCF va devoir établir en respectant les normes IFRS.
La charge de la dette est de l'ordre de 100 milliards d'euros pour la SNCF, la fraction incombant à cette dernière se situant aux alentours de 9 milliards ou 10 milliards d'euros. Dès lors, que fait-on de la différence ?
En application de ces principes, la SNCF devrait afficher une dette de 9 milliards ou 10 milliards d'euros. Est-ce à dire que les 90 milliards d'euros d'écart, qui justifient l'inscription en charges annuelles de 2,770 milliards d'euros, devront apparaître dans le bilan de l'État ? C'est de cela que nous aurons l'occasion de parler au cours des prochaines semaines, monsieur le ministre.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Début 2007, effectivement !
C'est dire si ces questions sont lourdes de conséquences. C'est pourquoi je souhaite que, s'agissant de la justification au premier euro, les prochains documents budgétaires contiennent des informations un peu plus détaillées.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite », figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Régimes sociaux et de retraite |
4 981 076 911 |
4 981 076 911 |
Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres |
3 289 936 911 |
3 289 936 911 |
Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins |
718 600 000 |
718 600 000 |
Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers |
972 540 000 |
972 540 000 |
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d'affectation spéciale « Pensions » figurant à l'état D.
État D
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Pensions |
46 780 054 437 |
46 780 054 437 |
Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité |
42 098 208 548 |
42 098 208 548 |
dont titre 2 |
42 098 208 548 |
42 098 208 548 |
Ouvriers des établissements industriels de l'État |
1 708 379 000 |
1 708 379 000 |
dont titre 2 |
1 699 719 000 |
1 699 719 000 |
Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
2 973 466 889 |
2 973 466 889 |
dont titre 2 |
13 700 000 |
13 700 000 |
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte d'affectation spéciale « Pensions ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 51, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission.
Article additionnel après l'article 51
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° II- 29 est présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II- 53 est présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I - Après l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est inséré, après l'article L. 57 du code des pensions civiles et militaires de retraite, un article L. 57- 1 ainsi rédigé :
« Art. L. 57- 1 - Le régime d'indemnité temporaire accordé aux personnes retraitées tributaires du code des pensions civiles et militaires de retraite est réservé aux seuls bénéficiaires de cet avantage à la date du 1er janvier 2007 qui remplissent la condition de résidence effective à la Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.
Les agents cessant de résider dans ces territoires, ou s'absentant de ceux-ci plus de quatre-vingts jours par an, perdent définitivement le bénéfice de l'indemnité temporaire ».
II - En conséquence, faire précéder cet article par la mention :
Régimes sociaux et de retraite.
La parole est à M. le président de la commission des finances, pour défendre l'amendement n° II- 29.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Un amendement de même nature a déjà fait l'objet d'un vote au Sénat. Il s'inscrit dans une démarche entièrement respectueuse de l'économie ultramarine et des relations sociales dans chacun de ces départements et territoires.
Au vu de la mission d'information sur la politique du logement en outre-mer que vient de conduire notre collègue Henri Torre, je crois très franchement pouvoir dire, comme lui-même, que le Gouvernement dispose là de marges de progression, monsieur le ministre.
Le constat que nous faisons est le suivant : si les autorisations d'engagement ont été généreuses, il reste que les crédits de paiement n'ont pas suivi et que la dette actuelle doit être de l'ordre de 450 millions à 800 millions d'euros. En d'autres termes, face aux besoins, je ne suis pas sûr que la politique du logement soit, dans chaque territoire, à la hauteur des attentes légitimes de la population.
Ce que nous voulons dire, c'est qu'il convient de mener une politique respectueuse de l'outre-mer ; or certaines pratiques ne nous paraissent pas répondre à cette ambition, à cette préoccupation.
Nous revenons donc une nouvelle fois sur la question des indemnités temporaires allouées à des fonctionnaires d'État qui, après avoir exercé leur carrière en métropole, choisissent de prendre leur retraite dans tel ou tel territoire d'outre-mer ou collectivité territoriale ou dans le département de La Réunion.
C'est ainsi que ceux qui prennent leur retraite à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française ou à Wallis-et-Futuna peuvent bénéficier de cette majoration en application de décrets de 1952, majoration qui peut varier de 35 % à 75 % !
Nombre de ces bénéficiaires appartiennent à la catégorie des hauts fonctionnaires, des officiers généraux, bref de ceux dont les pensions se situent au niveau le plus élevé.
Par ailleurs, outre le bénéfice de cette pension supplémentaire, ils peuvent se prévaloir des dispositions fiscales propres à tel ou tel territoire et échapper, pour certains d'entre eux tout au moins, à l'impôt sur le revenu. Je tiens ici à préciser que, à l'exception de La Réunion, les revenus outre-mer ne sont soumis ni à la CSG ni à la CRDS.
Naturellement, on peut souhaiter qu'un contrôle s'exerce, mais ce dernier est totalement inopérant, et nous sommes fondés à penser qu'il existe peut-être certains abus de la part de personnes qui sont domiciliés fictivement dans l'un ou l'autre de ces territoires. L'arrêt du Conseil d'État Vedel et Jannot du 20 décembre 1995 a privé les instructions administratives antérieures de toute portée réelle. Par conséquent, il est permis d'affirmer qu'il n'y pas de contrôle effectif.
La Cour des comptes a ainsi souligné, en avril 2003, dans un rapport particulier consacré aux pensions des fonctionnaires civils de l'État qu'il s'agit là d'une indemnité avantageuse - c'est le moins que l'on puisse dire - au contrôle quasi impossible.
Ce qui est symptomatique, c'est que le coût de ces surpensions ne cesse de progresser. En 2001, la Cour des comptes avait estimé le coût du dispositif à 159 millions d'euros. En 2003, il s'élevait à 203 millions d'euros. Tout laisse à penser qu'il pourrait atteindre, en 2007, 300 millions d'euros.
En 1995, les bénéficiaires étaient au nombre de 17 329. Ils sont aujourd'hui - je dis « aujourd'hui », mais les chiffres que j'ai à ma disposition sont de 2005 - 32 172, c'est-à-dire qu'ils ont pratiquement doublé, un phénomène d'accélération étant observé.
Cette hausse s'explique par deux raisons. D'abord, une jurisprudence a étendu les dispositions au minimum retraite, significativement relevé depuis 2001. Ensuite, les avantages du dispositif commencent à être connus des fonctionnaires de l'État, notamment à la suite de plusieurs reportages diffusés à des heures de grande écoute. Ce mouvement est relayé par des forums de divers sites Internet qui fournissent toutes informations - je peux vous en indiquer quelques-uns. Cela est parfaitement significatif.
La position que nous prenons est constante, puisque, dès 2003, à l'occasion de l'examen du projet de loi de programme pour l'outre-mer, nous avions déposé un amendement, que j'ai ensuite retiré sur la foi des engagements du ministre de porter remède à cette situation.
Depuis, que s'est-il passé ? Rien ! Avec constance, chaque année, lors de la discussion du projet de loi de finances, Philippe Marini et moi-même déposons un amendement pour alerter le Gouvernement. Aucune suite n'a été donnée à cette démarche.
Pour la commission des finances, il s'agissait non de tout bousculer, mais de poser le problème, de demander que des dispositions soient prises pour stabiliser le stock, modérer le flux et rechercher des dispositions équitables. En effet, nous ne croyons pas que ces dépenses soient véritablement au service de l'outre-mer.
Monsieur le ministre, je n'ai cessé de dire à quel point vous avez eu raison de multiplier les audits. Et je salue votre initiative qui a consisté à mandater sur ce problème particulier une mission mobilisant l'Inspection générale des finances, l'Inspection générale de l'administration et le Contrôle général des armées.
Vous êtes allé jusqu'au bout de votre démarche en mettant en ligne sur Internet le rapport d'audit. Je salue cette initiative : c'est de la très bonne administration !
Mon seul étonnement porte sur la difficulté de passer des recommandations de l'audit à l'initiative législative.
J'ai sous les yeux le rappel des dysfonctionnements constatés. Ce sont ceux que nous nous étions permis de souligner et qui justifiaient nos propositions.
Face à ces recommandations dépourvues de toute ambiguïté, nous attendions une initiative du Gouvernement. Nous persistons, parce que nos convictions nous le dictent.
Nous ne sommes pas de ceux qui estiment que le Parlement est une simple chambre d'enregistrement. Hier soir, l'un d'entre nous s'interrogeait pour savoir où était le pouvoir législatif. Il est ici, mes chers collègues, à condition que nous ayons la sagesse d'assumer nos prérogatives.
Pour notre part, c'est ce que nous faisons. Nous ne voulons pas être suspects de nous accommoder de je ne sais quelle décision prise ailleurs. Nous avons à rendre des comptes à nos électeurs et aux Français. Il est urgent de combler ce déficit de confiance entre les politiques, dont nous sommes, et nos compatriotes.
Nous avons tiré les conséquences de l'audit de modernisation, et nous avons donc déposé l'amendement n° II-29.
Nous souhaitons joindre nos efforts à ceux des personnes qui militent pour le développement de l'outre-mer. Nous aurons l'occasion, mercredi prochain, d'évoquer avec M. François Baroin les crédits de l'outre-mer, pour constater d'ailleurs que, dans la mission « outre-mer », à peu près 20 % des crédits concernent l'outre-mer.
Nous verrons aussi, à cette occasion, qu'il manque entre 450 millions et 800 millions d'euros de crédits pour satisfaire aux besoins du logement. Les organismes constructeurs qui ont lancé des travaux sont aujourd'hui pratiquement en cessation de paiement. C'est dire si vous aurez besoin de gages. Nous vous en offrons un, monsieur le ministre.
Je présente cet amendement, cosigné par mon collègue Philippe Marini, avec la sérénité qui caractérise les parlementaires que nous sommes, en espérant pouvoir un jour être entendus.
Peut-être aujourd'hui le Sénat va-t-il nous suivre ? Je me souviens que, l'an dernier, notre amendement avait recueilli huit voix, lors du scrutin public.
À cet égard, je voudrais dire combien le vote par scrutin public peut être une immense frustration pour ceux d'entre nous qui participent aux débats. Nous sommes ici en séance. Pendant de longues minutes, nous essayons de faire partager nos convictions. Et, chemin faisant, nous y parvenons. Puis, vient l'heure du scrutin public, celle où l'on fait voter ceux qui ne sont pas présents et qui votent contre vous. Il faudra qu'un jour, monsieur le président, nous nous interrogions sur les votations au sein du Parlement. (Mme Catherine Procaccia applaudit.)
(M. Philippe Richert remplace M. Adrien Gouteyron au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-53.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis. Cet amendement est évidemment porté par les mêmes intentions que celles que vient de développer M. le président de la commission des finances.
Pour la troisième année consécutive, la commission des affaires sociales a adopté un amendement qui vise à remettre à plat le dispositif de surpension dont bénéficient les fonctionnaires de l'État outre-mer.
Vous le savez, notre démarche s'inscrit dans la continuité de la réforme des retraites de 2003. Elle a pour objet de fermer une brèche qui menace cet édifice et ne cesse malheureusement de s'élargir.
Le débat qui a eu lieu au sein de la commission des affaires sociales me permet aujourd'hui de me prévaloir du large soutien de mes collègues.
Bien sûr, nul n'ignore parmi nous le calendrier électoral. Nous avons pourtant considéré qu'il convient d'en finir au plus vite avec les dérives auxquelles ce système de majoration de pensions donne lieu.
Nous sommes d'ailleurs convaincus que c'est tout à l'honneur du Sénat et de ses commissions des finances et des affaires sociales d'avoir relayé les observations de la Cour des comptes et d'avoir porté ce débat tout au long de la législature.
Je serai très bref, car nos échanges - ô combien fournis ! - de ces dernières années ont déjà permis à chacun de faire valoir ses arguments.
Je comprends parfaitement la dimension affective et passionnelle que recouvre cette question.
Malheureusement, j'ai parfois aussi l'impression que nous sommes engagés dans une sorte de dialogue de sourds, car le temps passe, le statu quo perdure, et le problème s'aggrave.
Cette année encore, plusieurs éléments nouveaux sont intervenus qui militent tous en faveur d'une réforme de la majoration de pension pour les fonctionnaires de l'État résidant outre-mer.
Je me bornerai à les rappeler : tout d'abord, le nombre des heureux bénéficiaires de cet avantage s'est accru de 2 200 pour atteindre désormais un total de 32 500 personnes. La dépense correspondante pour le budget de l'État a augmenté de 12 % en douze mois seulement. Elle a ainsi dépassé 250 millions d'euros en 2005 et pourrait atteindre cette année 300 millions d'euros. Il ne s'agit donc nullement de petits avantages ou d'une niche réservée à une poignée de personnes. Au contraire !
Ensuite, je relève que la presse nationale, qui s'intéresse désormais à cette question, a porté à la connaissance du grand public les dérives auxquelles donne lieu le mécanisme de l'indemnité temporaire.
Je suis certain qu'à la lecture de telles informations les 20 millions d'assurés sociaux que la réforme des retraites de 2003 met à contribution pour sauvegarder, leur a-t-on dit, notre système d'assurance vieillesse jugent pour le moins choquant le maintien de ces avantages.
Enfin, l'audit de modernisation réalisé par les trois inspections générales mentionnées par M. Jean Arthuis, et dont le contenu a été publié en novembre 2006 par le ministère de l'économie et des finances, a confirmé, dans des termes beaucoup plus sévères, les vives critiques déjà formulées par la Cour des comptes dans son rapport d'avril 2003.
J'observe, en particulier, que ce nouveau rapport rejette nettement les principaux arguments évoqués en faveur du statu quo, qu'il s'agisse de l'écart des prix avec la métropole, que l'Inspection générale des finances évalue à 10 %, ou de l'impact économique sur les territoires, qui n'est pas jugé probant. En outre, l'idée de renforcer les contrôles n'apparaît pas comme une solution efficace, et ce pour des raisons pratiques.
Voilà pourquoi la commission des affaires sociales souhaite fermer l'accès à ce dispositif le 1er janvier 2007 et ne plus accepter de nouvelles demandes après cette date. Il s'agit, pensons-nous, d'une position pragmatique et équilibrée puisqu'elle ne remet en rien en cause la situation des 32 500 bénéficiaires actuels.
Au terme de mon propos, je souhaite surtout vous convaincre que notre commission n'entend nullement opposer la métropole aux territoires ultramarins. Au contraire, nous estimons que ces cas de fraudes émanant de citoyens métropolitains nuisent à l'image de l'outre-mer, de même que les nombreux articles auxquels le statu quo donne lieu actuellement dans la presse nationale.
En définitive, la commission des affaires sociales propose un schéma de réforme raisonnable. Je vous invite à y souscrire en votant cet amendement, qui permettrait de résoudre enfin ce lancinant problème.
Soyez assurés, mes chers collègues, que, pas plus que la commission des finances, la commission des affaires sociales ne se satisfait d'une situation qui voit paradoxalement l'État dépenser deux fois plus d'argent dans le cadre de ce mécanisme contestable plutôt que pour résorber l'habitat insalubre dans les départements d'outre-mer. (M. le président de la commission des finances et Mme Catherine Procaccia applaudissent.)
M. le président. L'amendement n° II-87, présenté par M. Lardeux et Mme Procaccia, est ainsi libellé :
I - Après l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est inséré, après l'article L. 57 du code des pensions civiles et militaires de retraite, un article L. 57-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 57-1 - Le régime d'indemnité temporaire accordé aux personnes retraitées tributaires du code des pensions civiles et militaires de retraite est réservé aux seuls bénéficiaires de cet avantage à la date du 1er janvier 2007 qui remplissent la condition de résidence effective à la Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.
« L'indemnité servie aux intéressés est plafonnée au montant atteint à cette même date.
« Elle est en outre ramenée à 35 % du montant en principal de la pension, à partir du 31 décembre 2007, pour les personnes n'ayant pas été en poste dans ces territoires pendant les cinq années précédant la liquidation de leur pension.
« Les agents cessant de résider dans ces territoires, ou s'absentant de ceux-ci plus de quatre-vingts jours par an, perdent définitivement le bénéfice de l'indemnité temporaire ».
II - En conséquence, faire précéder cet article par la mention :
Régimes sociaux et de retraite.
La parole est à Mme Catherine Procaccia
Mme Catherine Procaccia. Je suis satisfaite que les débats se déroulent cette année dans une certaine sérénité. Les deux illustres orateurs qui m'ont précédée ont expliqué dans quel l'esprit nous avons présenté nos amendements.
L'amendement n° II-87, que j'ai déposé avec André Lardeux, vise à mettre fin à une situation complètement désuète.
Le principe de surpension a été instauré voilà cinquante ans. J'ai interrogé la commission des affaires sociales pour connaître les fondements de ce principe. Les sénateurs d'outre-mer qui en font partie m'ont expliqué que, voilà cinquante ans, les fonctionnaires ne voulaient pas aller dans ces territoires et collectivités territoriales d'outre-mer, ainsi qu'à la Réunion, dissuadés par maintes difficultés, notamment les délais de transport et l'éloignement. À présent, c'est moins vrai, même si le billet d'avion reste cher, sans que le coût soit insurmontable.
Si l'on prend sa retraite, par exemple, à la Réunion ou à Tahiti, c'est sans doute parce que la vie n'y est pas désagréable. Sans avoir le plaisir de les connaître tous, je sais qu'on y passe de bonnes vacances, preuve que ce sont des lieux plaisants.
Ce qui me paraît inique dans cette disposition, c'est qu'elle concerne un certain nombre de personnes, en l'occurrence des hauts fonctionnaires qui ont connaissance de ce système, et non pas tous ceux qui pourraient aller prendre leur retraite dans ces départements.
Ce qui me paraît également inique, c'est qu'il y a - je le tiens de mes collègues de l'outre-mer - de fausses adresses, des résidences fictives.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir honoré l'engagement pris l'année dernière par M. Baroin. Un audit a été réalisé, et il va dans notre sens. Cela montre que les auteurs de ces amendements ne veulent pas opposer l'outre-mer et la métropole. Ce qui les anime, c'est un esprit de justice par rapport à l'ensemble des salariés et des fonctionnaires.
Ainsi que je l'ai dit tout à l'heure, je suis une salariée du privé. Si cette disposition est jugée indispensable à l'économie des départements d'outre-mer, étendons-la à tout le monde, y compris aux salariés du privé !
En outre, pourquoi appliquer cette mesure uniquement à un certain nombre de territoires et de collectivités territoriales d'outre-mer, ainsi qu'à la Réunion, et pas à la Martinique, à la Guadeloupe et à la Guyane ?
Il y a donc énormément de choses que je n'arrive pas à comprendre, et c'est la raison pour laquelle, avec André Lardeux, nous avons déposé cet amendement que j'estime modéré.
D'abord, il vise simplement à « fermer le robinet » : le dispositif ne s'appliquera plus à partir du 1er janvier 2007. Selon la règle qui doit, j'en ai conscience même si cela ne me paraît pas toujours normal, s'appliquer, nous ne touchons pas aux « avantages acquis ».
Il tend ensuite à plafonner, à cette même date, le montant de l'avantage perçu par les bénéficiaires.
Enfin, et cela pour les seuls fonctionnaires qui n'ont pas résidé dans ces territoires au cours des cinq dernières années précédant leur départ en retraite, il a pour objet de ramener, à partir du 31 décembre 2007, la majoration au taux unique de 35 %.
Ce taux de 35 % est le plus bas taux actuellement appliqué ; c'est celui de la Réunion, et je crois qu'il est aussi difficile ou aussi facile d'y vivre qu'à Tahiti, en Nouvelle-Calédonie ou ailleurs. (M. Christian Cambon applaudit.)
M. le président. L'amendement n° II-170, présenté par M. About, est ainsi libellé :
I - Après l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 57 du code des pensions civiles et militaires de retraite, il est inséré un article L. 57-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 57-1 - Un régime d'indemnité temporaire est accordé aux fonctionnaires retraités tributaires du code des pensions civiles et militaires de retraite qui résident effectivement, au moins sept mois par an, à la Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.
« À compter du 1er janvier 2008, le taux de l'indemnité est fixé à 35 % du montant en principal de la pension. Les personnes qui perçoivent, avant cette date, l'indemnité temporaire en conservent le bénéfice aux conditions qui leur étaient précédemment consenties si le traitement indiciaire majoré ayant servi de base à la liquidation de leur pension est inférieur ou égal à 500. Dans le cas contraire, elles relèvent de la règle générale fixée au présent alinéa.
« Les retraités qui ne remplissent plus la condition de résidence définie au premier alinéa perdent définitivement le bénéfice de l'indemnité temporaire. »
II - En conséquence, faire précéder cet article par la mention :
Régimes sociaux et de retraite.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-87 ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cet amendement va dans la même direction que les amendements identiques de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, et je regrette, madame Procaccia, que nous n'ayons pas eu l'occasion d'évoquer ensemble nos propositions au moment où nous déposions nos amendements.
Je pense en effet que nous pourrions rédiger un amendement qui réglerait le problème des flux, comme proposent de le faire les deux commissions, et qui prévoirait un système de traitement transitoire avec l'application du taux de 35 %.
Nous essaierons donc de trouver, si aujourd'hui nos amendements sont votés, une rédaction satisfaisante d'ici à la commission mixte paritaire et, pour la clarté des débats, je vous invite, ma chère collègue, à retirer votre amendement au bénéfice des premiers.
Ce faisant, je prends à titre personnel l'engagement d'intégrer dans notre rédaction vos propositions visant à assurer une pension minimum avec le taux de 35 %, ce qui réglerait les difficultés liées à la Réunion, et de demander au Gouvernement de prendre toute disposition, éventuellement par la voie législative, pour que le contrôle soit effectif.
C'est une situation scandaleuse que celle qui permet un tel laxisme et cette sorte d'abandon de l'État. C'est l'autorité de l'État qui est en cause, monsieur le ministre ! Et l'idée que nous nous faisons de la République et de ses principes...
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je crois que j'ai compris le message, monsieur le président de la commission des finances ! (Sourires.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances... nous rend assez peu tolérants.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Beau sujet ! (Rires.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai écouté très attentivement vos propos et je souhaite faire plusieurs remarques, en commençant par une remarque de forme.
Madame Procaccia, vous avez fait observer que le débat se déroulait de manière assez sereine.
À l'évidence, nous devons cette sérénité au ton très modéré de chacun et de chacune d'entre vous dans la présentation de ses amendements - à quelques petites exceptions près -, mais peut-être la devons-nous aussi, au moins un tout petit peu, aux initiatives prises par le Gouvernement.
Après tout, vous seriez en droit, les uns et les autres, d'être très sévères, et donc moins sereins, si, après les alertes que vous nous aviez lancées l'an dernier, nous étions restés inertes, mais c'est un reproche que vous ne pouvez pas adresser à notre gouvernement, et un procès d'intention serait malvenu.
Vous pouvez consulter vos archives, jamais un gouvernement n'est allé aussi loin, avec autant de courage, sur un sujet extrêmement difficile, car il engage plusieurs de nos compatriotes à l'égard desquels des dispositions ont été prises que l'on ne saurait brutalement jeter aux orties au seul motif qu'il y a, en effet, des abus sans être en situation de les démontrer.
Je dois dire que, de ce point de vue, un travail préalable important a été fait. Vous évoquiez, monsieur le président de la commission des finances, la Cour des comptes ; vous ne devez pas oublier non plus le travail qui a été accompli par votre commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je ne l'oublie pas !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Comme vous êtes un homme élégant, vous avez aussi salué l'audit qui vient d'être effectué, sur l'initiative du ministre de l'outre-mer, mon ami François Baroin, ainsi que de votre serviteur dans le cadre plus général du mouvement d'audits que j'ai engagé sur l'ensemble de nos processus publics.
Cet audit existe, mais vous avez vous-même convenu qu'il était récent puisqu'il n'a qu'un mois et demi d'existence ; il est très courageusement écrit, il est audacieux et, le moins que l'on puisse dire, est qu'il a été réalisé en toute transparence puisqu'il est accessible sur Internet, comme tous les autres audits.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce qui est très bien.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je tiens à insister sur le fait que la commande de cet audit n'était pas accompagnée de limitations : nous avons repris tous les points que vous avez soulignés, et l'Inspection générale des finances, l'Inspection générale de l'administration ainsi que le Contrôle général des armées, qui ont collaboré à cet audit, ont veillé à ce qu'il soit exhaustif.
Je ne peux donc pas laisser dire que nous aurions juste fait mine de faire un audit pour le mettre ensuite dans un tiroir, car, un audit dans un tiroir, c'est un audit dont les résultats ne sont pas connus.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On ne l'a pas dit !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je n'ai pas dit que vous l'aviez dit : c'est ce que moi je dis. (Sourires.)
Cet audit a été rendu public, il est connu, et la meilleure preuve en est qu'il vous a aidés pour la conception de vos amendements. L'ayant fait réaliser puis mis en ligne, il convient maintenant que nous passions à l'étape suivante, qui est d'en tirer les conclusions.
À ce stade, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous rendre attentifs au fait que l'on ne peut pas demander une chose et son contraire.
Votre Haute Assemblée a montré un grand intérêt de principe pour un texte, adopté voilà peu de temps en conseil des ministres, relatif à la qualité du dialogue social et à sa modernisation, et j'ai souvenir qu'à plusieurs reprises dans cette même assemblée a été rappelée l'importance attachée au dialogue et à la concertation avant toute décision, et cela sur tous les sujets. Or, il ne me semble pas qu'il y ait de petits et de grands sujets, c'est-à-dire de sujets sur lesquels on doive aller plus vite que sur d'autres...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Celle-là, je ne l'attendais pas ! (Sourires.)
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Avec moi, il ne faut jamais être surpris, monsieur le président de la commission des finances ! (Nouveaux sourires.)
Quelle va donc être la suite des choses ? Tout simplement, conformément à l'engagement qui a été pris, après le temps de l'audit, maintenant rendu public, va venir le temps de la concertation, et de la concertation approfondie, sur tous ces sujets. Puis viendra le temps de la décision.
Autrement dit, si je demande le retrait de ces amendements, je le fais dans un esprit très simple : je vous invite à prendre date ensemble pour la suite. L'audit, je le répète, est connu depuis quelques semaines ; l'étape suivante est celle de la concertation.
Vous aurez d'ailleurs tout loisir de poser à mon collègue François Baroin, qui viendra dans quelques jours présenter les crédits de ses missions ici même, les questions que vous vous posez, sur ce sujet comme sur d'autres, par exemple sur la politique du logement outre-mer, que vous avez évoquée, monsieur Arthuis.
Je rappelle d'ailleurs à ce propos que des audits ont également été lancés sur le logement social et sur la résorption de l'habitat insalubre outre-mer et que des suites ont commencé à leur être données, notamment au travers des engagements pris par le Premier ministre. C'est, là encore, un domaine dans lequel nous travaillons dans la concertation.
Cela étant dit, mesdames, messieurs les sénateurs, je peux comprendre la tentation de voter des amendements comme ceux-là, car il s'agit d'amendements d'interpellation, mais le faire aurait du sens si vous aviez en face de vous ou un gouvernement muet, mais, en l'occurrence, vous avez devant vous le porte-parole du Gouvernement, donc c'est « bonne pioche » ! (Sourires), ou un gouvernement inerte, mais vous avez devant vous un ministre délégué au budget particulièrement attentif à ce que les processus qu'il lance se mettent en place.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est vrai.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je puis vous assurer, monsieur le président de la commission des finances, que je suis aussi regardant que vous sur ce point, et même aussi susceptible que vous. C'est dire si l'intérêt que j'accorde à l'aboutissement de ces initiatives converge avec le vôtre.
Je ne laisserai pas non plus dire - vous ne l'avez d'ailleurs pas dit (M. le président de la commission des finances rit), vous avez juste exprimé une inquiétude - que les audits, de manière générale, ne donnent pas lieu à un suivi.
Cet audit étant très récent, je vais rappeler quelques résultats obtenus à la suite d'audits un peu plus anciens, résultats qui devraient intéresser votre Haute Assemblée.
Premier exemple, le décret sur les décharges statutaires, qui a directement découlé des audits, a été présenté aux syndicats.
Deuxième exemple, à la suite de l'audit réalisé sur le coût des empreintes génétiques, le prix des analyses est passé de 300 euros à 45 euros, et nous pouvons aujourd'hui nous féliciter de ce que les empreintes génétiques stockées permettent déjà d'élucider beaucoup plus d'affaires que le fichier des empreintes digitales.
Troisième exemple, les dispositions prises après audits s'agissant de l'optimisation des achats de l'État, sujet sur lequel nous avons beaucoup travaillé, vont permettre d'économiser 1,3 milliard d'euros, et ce n'est qu'une partie des économies très substantielles que nous allons pouvoir réaliser grâce à cette méthode.
Je ne résiste pas, monsieur le président de la commission des finances, à vous adresser un dernier clin d'oeil, puisque vous avez évoqué les limites du recours au scrutin public.
Je me disais en vous écoutant que la logique des fonctions était infernale...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !
M. Jean-François Copé, ministre délégué.... et qu'à votre place j'aurais dit la même chose.
Si vous vouliez bien vous souvenir que vous avez occupé les fonctions qui sont au-dessus des miennes, puisque vous étiez ministre de l'économie et des finances, je suis persuadé que vous reconnaîtriez que les scrutins publics peuvent avoir parfois quelque intérêt.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est en effet commode...
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je crois donc, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur pour avis, madame le sénateur, que la bonne gouvernance gagnerait à ce que vous retiriez, compte tenu de tous les éléments précis que je viens de vous donner, vos amendements.
M. le président. Monsieur le président de la commission des finances, l'amendement n° II-29 est-il maintenu ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Au fil des années, l'expérience stimule la réflexion, et l'on ne saurait prétendre que la relation entre l'exécutif et le législatif soit au meilleur niveau de performance.
Dans le cadre de la réforme de l'État, nous devrons aussi mettre en cause le fonctionnement du Parlement, d'autant qu'il peut arriver qu'un dysfonctionnement du Parlement soit un facteur de dysfonctionnement de l'État.
Quant aux modes de votation, il faudra les revoir afin de faire en sorte que chacun s'implique.
Mais je reviens à vos propos, monsieur le ministre.
J'avoue que je n'avais pas prévu le « coup » du dialogue social préalable, même si je l'avais déjà vu venir à l'occasion d'une proposition de loi sur la Banque de France que j'avais déposée, domaine dans lequel il y avait encore - les choses commencent à bouger - quelques inerties contre lesquelles il fallait lutter pour faire évoluer certaines pratiques contestables.
Il est de la responsabilité du Parlement de tirer la sonnette d'alarme, et de le faire avec une tonalité un peu exigeante et parfois critique. Je voudrais vous convaincre, monsieur le ministre, que c'est la meilleure preuve de respect que le Parlement puisse donner au Gouvernement.
Dans le cas qui nous préoccupe aujourd'hui, j'ai assisté à la soumission du Parlement au Gouvernement depuis 2003. Certes, la législature se termine sur ce rapport d'audit et c'est fort bien, mais enfin, quelle inertie ! Et quel débat avons-nous eu l'an passé, dans une ambiance surchauffée ! C'était un soir, et nos collègues ultramarins - je salue au passage Jean-Paul Virapoullé - étaient un peu plus nombreux qu'aujourd'hui. Que n'a-t-on pas entendu ?
Dès que l'on évoque ces questions, c'est la passion qui l'emporte, et l'on ne peut plus rien dire ! Proposer une réforme, c'est déjà s'inscrire contre l'outre-mer... Arrêtons ces débats qui perdent tout sens et qui ne font pas honneur au Parlement. Je me réjouis qu'aujourd'hui, comme l'a souligné Mme Procaccia, la sérénité ait été de mise.
Monsieur le ministre, les auteurs de cette proposition souhaitent poser un jalon. J'ignore combien de voix recueillera cet amendement, dont vous demanderez peut-être la mise aux voix par scrutin public.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Quoi qu'il en soit, en conscience, je le maintiens.
Ne le prenez pas en mauvaise part, monsieur le ministre. L'an dernier, cette proposition avait obtenu huit voix. Si elle en recueillait un peu plus aujourd'hui, il s'agirait d'un signal clair adressé au Gouvernement pour qu'il prenne enfin une initiative sur cette question.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Monsieur le président de la commission des finances, pardonnez-moi, mais je prends mal votre expression : « inertie gouvernementale ». Je m'excuse de vous le dire avec autant d'insistance, même si c'est avec la courtoisie qui s'impose du fait de la qualité de nos relations, mais il s'est passé quelque chose avec cet audit !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Tardivement !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je prends date devant vous : à la suite de cet audit, qui a été rendu public - ce qui n'était jamais arrivé par le passé ! -, un dialogue social sera engagé, car c'est tout à fait légitime.
En plaisantant, vous avez dit que je vous faisais le « coup du dialogue social ». Non, ce n'est pas cela ! Personne ne peut imaginer que sur un tel sujet le dialogue social n'ait pas lieu.
Je le répète, il s'agit d'une question très difficile, sinon elle aurait été réglée bien avant nous, par un gouvernement de droite ou de gauche ! Si aucune solution n'a encore été trouvée, c'est parce que ce problème était entouré de non-dits qui, désormais, sont dissipés, grâce à votre contribution et à l'audit commandé par le Gouvernement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai pris date devant vous. Il reste maintenant à passer à la phase du dialogue et, je l'espère, de la décision.
M. le président. Madame Procaccia, l'amendement n° II-87 est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Je suis confrontée à une double demande de retrait et je n'aurai aucun état d'âme, car ce qui importe, vous l'aurez compris, mes chers collègues, c'est de montrer notre attachement à un système de retraite équilibré.
Monsieur Arthuis, le taux de 35 % que j'ai proposé figurait déjà dans un amendement que Nicolas About et moi-même avions déposé l'an dernier et que j'avais défendu. Il s'agit, me semble-t-il, d'un seuil minimal de négociation.
Monsieur le ministre, j'ai apprécié la publication de l'audit que vous avez commandé. Je veux vous croire quand vous affirmez qu'il s'agit d'un premier pas. J'ai suivi ce dossier pendant toute une année, en constatant que les promesses qu'avait formulées M. le ministre chargé de l'outre-mer n'étaient pas tenues.
J'espère que, grâce à l'étude et à l'audit qui ont été réalisés, lorsque nous nous retrouverons en séance l'an prochain - du moins, certains d'entre nous ! -, nous pourrons aller plus loin sur ce sujet.
C'est dans cet esprit, et à la demande de M. le président de la commission et de M. le ministre, que je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-87 est retiré.
Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-53 est-il maintenu ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis. M. le ministre a souligné, à juste titre, que l'audit réalisé conjointement par trois inspections avait permis de faire avancer considérablement ce dossier, sur lequel nous avons clairement exprimé notre volonté dans le passé.
D'ailleurs, je dois reconnaître qu'il était courageux de mettre en ligne ce rapport d'audit. Sur cette question, le Gouvernement a fait preuve d'une transparence qui n'existait pas autrefois.
Quel est l'esprit dans lequel la commission des affaires sociales a formulé sa proposition ?
Je le répète, cet amendement a pour objet d'assurer le relais entre 2003 et 2008.
En 2003, le Gouvernement a lancé une réforme courageuse des retraites, qui était la première de cette ampleur depuis 1993, sinon depuis la Seconde Guerre mondiale. Je suis fier de l'avoir soutenue, car il s'agit d'une question essentielle pour notre pays : comme l'a affirmé le rapport Pébereau, l'absence de règlement du problème des retraites fait peser une hypothèque sur l'avenir et les jeunes générations.
Monsieur le ministre, la commission des affaires sociales ne comprend pas que certains de nos concitoyens se réfugient derrière des principes de répartition et de solidarité qui n'existent plus. Je le répète, certains régimes sont financés chaque année par l'État à hauteur de 60 % ou 70 % ! Nous atteignons les limites de ce système, qui ne repose plus sur la répartition. Au nom d'une prétendue solidarité, certains de nos concitoyens sont mis à contribution en tant que contribuables et usagers, puis, de nouveau, au titre d'une compensation devenue inique.
Il est grand temps de nous armer pour affronter ce problème. Quels que soient les décideurs en 2008, ils devront faire avancer ce dossier. En effet, si la réforme de 2003 a représenté un réel progrès, sur le plan financier elle a été largement hypothéquée, nous le savons, par la générosité du Gouvernement s'agissant des carrières longues, et elle manque de lisibilité.
Cette réforme est masquée par des départs à la retraite qui sont dépourvus de lien avec l'âge légal, puisqu'ils se produisent entre cinquante et soixante ans. Mes chers collègues, vous avez vu les tableaux parus dans la presse : dans certaines catégories professionnelles, 75 % des gens, pour ne pas dire 100 %, partent à la retraite avant 55 ans !
Or, dans le même temps, nous demandons à d'autres Français d'allonger la durée de leur vie active à partir de 2008 : jusqu'à 41 années travaillées. Nos voisins ont déjà procédé à une telle réforme ; l'âge légal de la retraite en Allemagne est sur le point de passer de 65 ans à 67 ans.
Vous le comprendrez, mes chers collègues, quand certains découvrent dans la presse les inégalités qui persistent et les tricheries qui sont organisées - à la marge, certes, mais elles sont mises en avant -, ils ne comprennent pas la nécessité des efforts que nous leur avons demandé de consentir, et que, demain, nous exigerons inévitablement d'eux une nouvelle fois, pour que la solidarité entre les individus d'une même classe d'âge et entre les générations puisse perdurer.
C'est dans cet esprit que la commission des affaires sociales, solidaire de la commission des finances, a déposé cet amendement. Notre proposition n'est dirigée contre aucune catégorie professionnelle, et je conviens que les personnes concernées par ce régime ont sans doute bien des difficultés à vivre aujourd'hui.
Comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, c'est seulement par la confrontation des idées et dans le respect de tous que nous parviendrons à définir des règles équitables en matière de retraites, ce qui devient de plus en plus difficile.
Au nom de la commission des affaires sociales, je souhaite donc, moi aussi, que notre assemblée se prononce sur ces amendements identiques. (M. le président de la commission des finances applaudit.)
M. le président. Mes chers collègues, j'indique que la réforme des modes de scrutin du Sénat constitue l'une des pistes de la réflexion sur l'amélioration des méthodes du travail sénatorial engagée par la conférence des présidents,...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En effet !
M. le président.... au sein de laquelle M. Arthuis occupe une place éminente.
Cette question se trouve évoquée dans la fiche n° 3 des réflexions très courageuses qu'a engagées la Haute Assemblée,...
M. Jean-François Copé, ministre délégué. N'en faites pas trop vite la fiche n° 1, tout de même ! (Sourires.)
M. le président.... afin de faire évoluer sereinement ses méthodes tout en prenant en compte tous les effets d'une éventuelle réforme.
Dans les mois qui viennent, la conférence des présidents, avec le bureau du Sénat, bien sûr, devra donc se pencher de nouveau sur ce dossier, auquel M. Arthuis apportera un éclairage utile.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. J'ai écouté attentivement les trois orateurs qui ont présenté chacun un amendement tendant à supprimer un régime très particulier - c'est le moins que l'on puisse dire ! - et, comme la plupart de nos collègues présents sur les travées de notre assemblée, me semble-t-il, j'ai été entièrement convaincu par leurs propos.
Nous ne pouvons laisser ce régime inchangé, comme nous le faisons depuis plus d'une cinquantaine d'années. Le contexte de 1952, qui a présidé à sa mise en place, a changé. Année après année, nous ne cessons de dénoncer les déficits de nos finances publiques, qui s'accumulent. Je suis convaincu que ce régime particulier est totalement dépassé et qu'il convient d'y mettre un terme.
J'ai également entendu M. le ministre nous affirmer que le Gouvernement évoluait sur cette question, comme le prouverait l'audit qu'il a commandé. Toutefois, les orateurs qui l'avaient précédé nous ont expliqué que trois audits avaient déjà été réalisés, qui posaient un diagnostic très clair et proposaient tous des solutions. Le Gouvernement n'aurait-il pas eu connaissance de ces précédents audits ? Je n'arrive pas à le croire, monsieur le ministre !
Vous affirmez ensuite qu'une loi rend obligatoire une concertation avant toute mesure touchant à un régime ou à un dispositif d'ordre social. Or, sans vouloir remuer le couteau dans la plaie, je crois me souvenir que cette loi, depuis qu'elle existe, a subi quelques entorses !
Monsieur le ministre, je ne vous en veux pas personnellement - nous nous connaissons depuis longtemps, et je vous aime bien -, mais j'ai tout de même l'impression qu'avec ces arguments vous essayez de gagner du temps !
Si nous disposions encore du temps nécessaire, si nous devions mener avec vous une autre discussion budgétaire, par exemple à l'occasion du projet de loi de finances pour 2008, je me rangerais sans doute à vos arguments. Toutefois, je ne suis pas certain que vous serez encore le ministre chargé du budget dans un an, même si je vous le souhaite !
M. Yves Détraigne. Pas du tout, monsieur le ministre ! Mais nul n'ignore que des élections importantes auront lieu et que les cartes risquent d'être rebattues d'ici à l'année prochaine.
À l'approche d'échéances aussi importantes que les élections présidentielles et législatives, je crains donc que le dialogue qui, selon vous, va être engagé à la suite de l'audit commandé par le Gouvernement n'aboutisse pas et que, dans un an, nous ne soyons toujours au point mort ! C'est pourquoi je voterai les amendements identiques de la commission des finances et de la commission des affaires sociales.
Une demande de scrutin public sera sans doute formulée, comme j'ai cru le comprendre en écoutant les échanges entre M. le président de la commission des finances et M. le ministre. Il est exact que les résultats des scrutins publics dans notre assemblée ne reflètent pas forcément la pensée de chacun de nos collègues. Pour ma part, si un tel vote est organisé, je ne déposerai dans l'urne que les bulletins des collègues de mon groupe dont je connais la position sur cette question. Je ne ferai pas « voter » - pour reprendre l'expression de M. Arthuis - ceux dont j'ignore l'opinion, et j'appelle tous mes collègues présents en séance à agir de même pour leurs groupes respectifs.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Mes chers collègues, j'étais déjà présente lors du débat qui a eu lieu l'an dernier sur ce sujet. Les amendements dont nous discutons visent à réformer le système des majorations de retraites appliqué dans certains territoires d'outre-mer.
Lors de l'examen des crédits de la mission « Outre-mer », nous débattrons peut-être également des compléments de rémunération destinés aux fonctionnaires en poste outre-mer, des congés bonifiés dont bénéficient les fonctionnaires ultra-marins quand ils prennent leurs vacances dans leur département d'origine - nous avions évoqué cette question l'an dernier -, de la TVA non perçue remboursée, qui constitue, de fait, une mesure de soutien représentant 90 millions d'euros, ou encore de l'indemnité temporaire qui leur est destinée !
Toutefois, on oublie, me semble-t-il, de considérer avec la même attention le rapport entre le coût et l'efficacité des quatorze niches fiscales recensées outre-mer.
La proposition qui nous est présentée et qui, je le répète, a déjà été débattue l'an dernier, aurait dû faire l'objet d'une concertation, comme le Gouvernement s'y était engagé. Or celle-ci, si j'ai bien compris, n'a pas même commencé.
Dans le cadre de la discussion des crédits de la mission « Outre-mer », il est envisagé de dresser l'état des lieux des interventions publiques. Cet amendement me semble donc prématuré, pour ne pas dire inopportun.
Comme l'indiquait lors d'un précédent débat notre collègue Gélita Hoarau, qui n'a pu être présente aujourd'hui, une étude de l'INSEE a établi qu'entre les prix de l'île de la Réunion et ceux de la métropole il existait une différence de 20 % à 30 %, en moyenne. Elle insistait donc sur la nécessité d'engager une négociation et de dresser l'état des lieux des interventions publiques qui, je le répète, représentent au total 245,2 millions d'euros, pour 32 500 bénéficiaires.
Nous sommes loin, me semble-t-il, de la rente de situation offerte à certains actionnaires de sociétés privées par l'article 200 septies du code général des impôts relatif au crédit d'impôt sur les revenus de capitaux mobiliers !
En outre, les retraités, comme d'ailleurs les fonctionnaires en poste qui bénéficient de la majoration de rémunération outre-mer, participent, pour une bonne part, à l'activité économique de la Réunion et des autres territoires et collectivités ultramarins.
Pour autant, la situation qui leur est faite - et qui trouve une origine très ancienne, puisqu'elle remonte à 1952 - ne peut occulter l'autre aspect clé de la vie ultramarine : les locaux ne bénéficient pas des mêmes conditions de rémunération et de pension. C'est là une véritable injustice qu'il faudra bien un jour corriger.
Le statut de région ultrapériphérique peut constituer un élément suffisant pour justifier que nous menions, pour l'outre-mer français, une politique particulièrement incitative au développement du pouvoir d'achat des résidents.
Bref, la mesure que tendent à instaurer ces amendements identiques nous semble inadaptée, non seulement parce qu'elle ignore pour une part les réalités du terrain, mais surtout parce qu'elle n'appréhende la question qu'au travers du prisme étroit de la logique comptable et qu'elle tend à être imposée sans concertation.
C'est ce dernier aspect qui nous semble essentiel et qui nous conduira à ne pas voter ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Virapoullé. J'ai beaucoup apprécié les diverses contributions qui ont été apportées à ce débat ce matin.
Notre collègue Jean Arthuis a établi un très bon diagnostic. Il a d'ailleurs beaucoup apporté à l'outre-mer à titre personnel. Mais le ministre délégué au budget a proposé, quant à lui, une bonne méthode pour traiter ce problème.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui, bien sûr !
M. Jean-Paul Virapoullé. Je suis donc pleinement satisfait d'avoir fait le voyage jusqu'ici.
Je ne suis pas là pour défendre des privilèges outre-mer. Mais nous avons, outre-mer, une population jeune, qui représente un atout pour la communauté nationale et qui doit bénéficier d'un égal accès au savoir et au savoir-faire. Vous aurez besoin de ces bras, de ces cerveaux. D'un autre côté, nous avons besoin de logements décents pour loger nos familles, Jean Arthuis l'a souligné et M. le ministre l'a reconnu. Dès lors, nous voulons aussi participer à l'effort de redressement national et réaliser des économies là où c'est nécessaire, notamment en mettant fin aux abus.
Ce régime de la retraite « boîte aux lettres » n'a pas été souhaité par les élus d'outre-mer ! Après trois années de discussion, grâce à la contribution de la commission des finances, de la commission des affaires sociales et surtout du ministre de l'outre-mer, qui a fait mettre en ligne un rapport d'audit que tout le monde pourra consulter, le bon diagnostic a été établi et la bonne méthode a été proposée. Choisissons aujourd'hui d'appliquer les mesures que nous soumet le ministre. Le Parlement n'est pas dépourvu de moyens : si aucun projet de loi ne nous est soumis d'ici à l'année prochaine, mon cher collègue Jean Arthuis, je serai d'accord pour élaborer avec vous une proposition de loi !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Promis !
M. Jean-Paul Virapoullé. Cela figurera au Journal officiel !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Les choses bougent, c'est bien !
M. Jean-Paul Virapoullé. Aujourd'hui, compte tenu des éléments que le Gouvernement a versés au débat, nous avons suffisamment de données pour travailler à une proposition de loi, qui pourra être reprise sous la forme d'un projet de loi, ou inversement. En tout cas, nous ne pouvons pas maintenir le statu quo : les abus ne servent pas l'intérêt de l'outre-mer. Bien au contraire, ils en détruisent l'image !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !
M. Jean-Paul Virapoullé. Il est intolérable que des personnes qui n'y ont jamais travaillé s'installent dans ces territoires pour échapper à l'impôt et toucher des retraites dorées. Je ne suis pas leur avocat, et l'outre-mer n'est pas le cocotier doré destiné à les accueillir !
Nous avons d'autres objectifs : éducation, travail, dignité. (Mme Catherine Procaccia applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, pour explication de vote.
M. Christian Cambon. Je souhaite rendre hommage à notre collègue Jean-Paul Virapoullé, dont les propos extrêmement mesurés et responsables reflètent parfaitement l'esprit des discussions qui ont eu lieu au sein de notre groupe.
Je tiens également à rassurer notre collègue Yves Détraigne. Nous connaissons la mécanique du scrutin public, elle est ce qu'elle est. Mais, en amont, le groupe UMP a eu l'occasion de réfléchir longuement à ces questions, car nous partageons les inquiétudes du président de la commission des finances, de Mme Procaccia, de Dominique Leclerc et de bien d'autres. Nous avons donc bien conscience des dérives qu'entraîne cette situation, mais nous souhaitons nous inscrire dans une démarche progressive.
M. le président. La parole est à M. Denis Detcheverry, pour explication de vote.
M. Denis Detcheverry. Le rapport sur l'indemnité temporaire de retraite des fonctionnaires de l'État outre-mer, qui a paru au mois de novembre dernier et qui semble avoir inspiré certains de mes collègues, met en avant le coût trop élevé de cette mesure et insiste sur les abus qu'elle entraîne, notamment à cause des conditions de résidence qui sont insuffisamment exigeantes.
Pour autant, si le rapport de Mme Bolliet, MM. Bougrier et Tenneroni est parfaitement légitime dans sa dénonciation de ces dérives, il n'en est pas de même des préconisations qu'il contient : elles ne sont accompagnées d'aucune étude quantitative ou qualitative des conséquences sur les économies locales des mesures proposées. En effet, comme l'a souligné le ministère de l'outre-mer dans ses observations, il faudrait procéder à des études économétriques complexes pour déterminer les véritables répercussions économiques de l'indemnité temporaire de retraite.
Si nous pouvons regretter que la fonction publique ait une telle importance pour l'emploi et le pouvoir d'achat, conséquence de choix parfois peu judicieux qui ont été imposés à l'outre-mer pour compenser un déficit de développement économique - comme l'a dit Jean-Paul Virapoullé, nous n'avons pas choisi ce genre d'économie, très fragile et souvent improductive - il est impossible maintenant de mettre fin arbitrairement à certaines mesures sans les remplacer par des dispositifs économiques compensateurs équivalents.
L'abrogation de l'indemnité temporaire de retraite, qui touche au pouvoir d'achat de tous les fonctionnaires et aurait de lourdes conséquences sur l'économie locale, ne peut se justifier par le fait que l'on réinvestirait dans le logement social, comme le suggère le rapport de notre collègue Henri Torre.
L'indemnité temporaire de retraite ne relève pas réellement du régime des retraites : elle fait partie intégrante des compléments de rémunération de la fonction publique d'État outre-mer, lesquels comprennent l'indexation des salaires, la prime d'installation et les congés bonifiés. Elle s'intègre dans tout un système qui touche le pouvoir d'achat d'une part importante de la population !
Toute réflexion sur ce sujet doit donc se faire de manière globale et transversale et non de façon verticale, comme le font les auteurs de ces amendements, qui restent prisonniers de la logique de réforme des retraites. Pour autant, je ne remets pas en question la sincérité et la bienveillance initiale de leur démarche. Mais je tiens à préciser que les mesures prises dans le cadre de la réforme des retraites en 2003 s'appliquent pleinement outre-mer.
Sur proposition du ministre, il a été décidé l'année dernière de profiter de l'évaluation de la loi de programme pour l'outre-mer du 21 juillet 2003 pour analyser l'indemnité temporaire de retraite. Si la commission ad hoc a bien été mise en place, la proposition n'a malheureusement pas été retenue. Entre-temps, le député Jean-Pierre Brard a été chargé d'un rapport sur ce dispositif. Un rapport de plus, me direz-vous ! Pourtant, il serait judicieux d'en attendre les conclusions, pourvu que son auteur ait réellement les moyens de procéder à une analyse suffisamment poussée, objective, quantifiée et vérifiée, en concertation avec les responsables socioprofessionnels et les élus des collectivités concernées.
Je comprends que des institutions comme la Cour des comptes ou l'Inspection générale des finances souhaitent faire des économies. Il faut reconnaître que la France se trouve dans une situation financière plutôt délicate.
Je terminerai sur la nécessité du dialogue social qu'a évoquée M. le ministre. Dominique Leclerc a évoqué un dialogue de sourds. C'est effectivement ce à quoi nous assistons depuis l'année dernière alors que le dialogue social aurait créé les conditions de l'ouverture. De plus, à ma connaissance, peu de parlementaires de l'outre-mer ont été associés à ce débat, ce qui pour moi serait une nécessité.
Tous - j'en ai parlé avec mes collègues de l'outre-mer - nous avons conscience des abus et des fraudes que peut engendrer l'existence de l'indemnité temporaire de retraite et nous sommes tous persuadés qu'il faut absolument réagir. Toutefois, il faut passer par la concertation, et la proposition de M. le ministre a le mérite de donner du temps pour élaborer et mettre en application des mesures justes et équilibrées.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-29 et II-53.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 67 :
Nombre de votants | 299 |
Nombre de suffrages exprimés | 202 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 102 |
Pour l'adoption | 16 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme Catherine Procaccia. Nous avons doublé le score !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je me félicite du débat qui vient d'avoir lieu. En tout cas, pour nous, le résultat du scrutin est très encourageant, puisque nous avons doublé notre score (Sourires) et que l'écart entre les voix s'opposant à ces amendements identiques et celles qui y sont favorables s'est considérablement réduit !
Enfin, j'ai bien noté que, si le Gouvernement ne prenait pas d'initiative, une proposition de loi cosignée par Jean-Paul Virapoullé, Dominique Leclerc, Catherine Procaccia et moi-même serait déposée.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, je ne lâche rien, c'est un principe. Je vous soumets donc mon interprétation de ce scrutin : son résultat montre que la confiance que le Sénat accorde à la volonté du Gouvernement d'assumer ses engagements s'est encore renforcée ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits concernant les missions « Régimes sociaux de retraite » et « Compte d'affectation spéciale : Pensions ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale.
Remboursements et dégrèvements
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je limiterai mon propos à quelques observations principales.
À titre liminaire, cependant, je formulerai une remarque sur les réponses au questionnaire budgétaire portant sur la mission dont nous débattons que j'ai reçues. Cette année, contrairement à l'an dernier, le taux de réponses est plutôt satisfaisant : au 10 octobre, date limite fixée par la LOLF, 69 % des réponses attendues m'étaient parvenues et, à ce jour, je dispose de la quasi-totalité, soit 97 %.
Cependant, ces réponses se caractérisent par leur excessive brièveté. Les questions les plus fondamentales soit ont fait l'objet d'une réponse laconique, soit n'ont pas été traitées. C'est pour cette raison que, lors de l'examen de la mission, le 9 novembre dernier, la commission des finances a réservé sa position ; elle n'a décidé de proposer au Sénat son adoption, sans modification, que le 23 novembre.
Je souhaite vivement qu'un échange plus fructueux se noue et que les réponses au questionnaire préparatoire au projet de budget pour 2008 soient vraiment plus substantielles.
Sur le fond, je ne peux, malheureusement, que répéter, pour l'essentiel, ce que j'ai déjà dit l'année dernière.
Tout d'abord, je m'interroge toujours sur la raison d'être de la mission. La LOLF a pour objet de regrouper les crédits de l'État dans des missions correspondant à une logique de résultat. Or, les crédits retracés par la mission correspondent à des finalités diverses et mériteraient, par conséquent, d'être « éclatés » entre différentes missions.
La commission des finances n'est pas convaincue par les arguments juridiques mis à nouveau en avant par le Gouvernement. Dans le questionnaire budgétaire, je vous ai demandé, monsieur le ministre, de mieux étayer votre position. Or, vous nous dites que cette mission ne constitue qu'une partie, parfois faible, de la réponse fiscale, le reste prenant la forme d'atténuations de recettes. Vous ajoutez que l'analyse des dispositifs fiscaux ne peut pas se faire par le biais de la présente mission, mais doit intervenir dans le cadre des dépenses fiscales ventilées au sein des différentes missions particulières de l'action de l'État. Cette réponse, à elle seule, me semble bien militer pour l'éclatement, dans chaque mission spécifique, des remboursements et dégrèvements.
Si les deux programmes qui composent cette mission comportaient des objectifs et indicateurs satisfaisants, on pourrait, à la rigueur, s'accommoder de la structure actuelle de la mission. Mais les indicateurs dont nous disposons ne permettent pas de déterminer si l'objectif unique associé à chacun des deux programmes de la mission, c'est-à-dire permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible, a été atteint. D'ailleurs, peut-il être le seul objectif. Dans le cas du programme relatif aux impôts locaux, l'unique indicateur porte sur la seule taxe d'habitation, de sorte que 80 % des crédits ne sont pas couverts par un indicateur.
De nombreux indicateurs pourraient pourtant être introduits. Ainsi, il pourrait être procédé à l'évaluation de l'efficacité des principaux allégements fiscaux. On pourrait prendre en compte l'exactitude de l'imposition du contribuable ; on pourrait imaginer un indicateur concernant les vérifications préalables opérées par les services, en matière de remboursements de TVA notamment, ou un indicateur concernant le nombre d'erreurs de l'administration fiscale. On pourrait aussi analyser les progrès réalisés en ce qui concerne la distinction entre les dégrèvements associés à des mesures législatives particulières et ceux qui sont liés à des opérations de dépenses pour ordre.
S'agissant du programme relatif aux impôts locaux, il est évident que les admissions en non-valeur devraient être ventilées entre les différents impôts. L'administration le reconnaît d'ailleurs elle-même. Je pense, en outre, que les principaux dégrèvements devraient être individualisés.
Mes observations sont confortées par la mission d'audit de modernisation qui a remis récemment un rapport très critique sur le programme relatif aux impôts locaux. Ce rapport reprend les principales préconisations que j'ai présentées à la commission des finances. Je constate même que les recommandations de la mission d'audit sont parfois plus exigeantes que les miennes. Ainsi, ladite mission propose de fixer non pas un simple objectif d'évaluation de l'efficacité des dégrèvements législatifs, mais des objectifs d'efficacité impôt par impôt.
Je souhaite savoir dans quelle mesure le Gouvernement compte donner suite à ces observations convergentes relatives à la mission « Remboursements et dégrèvements ».
M. le président de la commission des finances, sur mon initiative, a saisi la Cour des comptes, au début du mois d'octobre dernier, d'une demande d'enquête, en application de l'article 58-2 de la LOLF. Cette enquête portera sur la gestion et l'efficacité des remboursements et dégrèvements d'impôts d'État et d'impôts locaux. Ses résultats feront l'objet, en 2007, d'une audition afin que nous en tirions les conséquences.
Sous réserve de ces observations, la commission des finances vous recommande, mes chers collègues, l'adoption des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette mission recouvre les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État et d'impôts locaux.
Son examen me donne l'occasion de revenir sur l'absence de prise en compte, dans ce projet de loi de finances, de la réforme de la taxe professionnelle, notamment de ses coûts pour l'État.
Dans le cadre de la préparation du budget, à plusieurs reprises, la question suivante a été posée en commission des finances : mais où sont donc les crédits affectés au dégrèvement supplémentaire accordé par l'État au titre du nouveau dispositif de plafonnement de la taxe professionnelle ?
Il faut en effet rappeler que, dans le cadre de la réforme adoptée, le plafonnement de la taxe professionnelle fait l'objet d'un dégrèvement au profit des entreprises calculé sur la base, non plus des taux gelés en 1995, mais des taux, éventuellement majorés, de 2004.
Au vu du produit total de taxe professionnelle - environ 24 milliards d'euros en 2005 -, ce « rattrapage » entre les années 1995 et 2004 a un coût non négligeable pour le budget de l'État.
Or, dans la mission que nous examinons aujourd'hui, au titre du programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », sont comptabilisés les dégrèvements de taxe professionnelle.
L'action 01 « Taxe professionnelle » constitue environ 70 % des crédits du programme, autrement dit, l'essentiel. Pour 2007, elle regroupe 9,8 milliards d'euros en crédits de paiement tout comme en autorisations d'engagement, en légère hausse de 500 millions d'euros par rapport à l'an dernier.
Le plafonnement existant en fonction de la valeur ajoutée y représente déjà 5,2 milliards d'euros. Mme le rapporteur spécial souligne que ce montant est, cette année, en baisse, du fait de la montée en puissance du dispositif de dégrèvement pour investissements nouveaux, qui est d'ailleurs pérennisé et qui s'élève à 2,2 milliards d'euros.
Au regard de ces chiffres, nous pouvons conclure qu'aucune provision raisonnable n'a été faite cette année pour tenir compte de l'entrée en vigueur de la réforme de la taxe professionnelle. Les autorisations d'engagement ne sont pas majorées en ce sens.
D'ailleurs, lors de l'examen de cette mission, en commission des finances, le rapporteur spécial nous a confirmé ce point de vue en précisant que, selon le Gouvernement, le coût de la réforme pour l'État devrait être de 220 millions d'euros en 2007 et de 1,6 milliard d'euros en 2008. Mais le Gouvernement ne prend pas acte de ce fait !
Soulignons que les estimations présentées lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006 s'élevaient tout au plus à 1,3 milliard d'euros. De surcroît, plusieurs cabinets spécialisés en finances locales mettent en doute les évaluations du Gouvernement.
D'une façon générale, Mme le rapporteur spécial a considéré qu'un certain flou demeurait quant au coût pour l'État et les collectivités de ce nouveau dégrèvement.
Comme nous l'avons déjà signalé lors de l'examen des articles de la première partie, nous souhaitons un retrait de cette réforme. Cela nous semble d'autant plus justifié que, finalement, personne n'est capable de mesurer, de manière fiable, les coûts de cette réforme et pour l'État et pour les collectivités locales.
Le fait que ce budget ne prenne pas acte de l'impact de cette réforme sur les finances de l'État nous semble un signe supplémentaire de l'irresponsabilité du Gouvernement en la matière.
L'État impécunieux peut-il vraiment s'offrir la largesse d'une réforme qui lui coûtera, selon vos propres estimations, plus de 1,6 milliard d'euros par an au bénéfice des entreprises, alors que ces dernières bénéficient déjà de 9,8 milliards d'euros de réduction fiscale au titre de cette taxe ?
Pour notre part, nous ne voterons pas ces crédits.
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pure mission de constatation de la dépense fiscale, la mission « Remboursements et dégrèvements » nous fournit toutefois d'intéressants éléments sur la réalité des engagements financiers réels de l'État en matière budgétaire.
Il se trouve en effet que, même extraite de l'ancien budget des charges communes, cette mission est la plus importante du budget général, atteignant 76 841 millions d'euros. Deux programmes composent la mission et portent l'un sur la fiscalité nationale, l'autre sur les mouvements affectant la fiscalité locale. Le premier programme vise 62 393 millions d'euros de dépenses prévues, dont 41 300 millions d'euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, qui confirme son statut d'impôt au recouvrement le plus coûteux, et 9 300 millions d'euros au titre de l'impôt sur les sociétés. Encore ne s'agit-il là que de crédits de caractère évaluatif, attendu que les montants en jeu intègrent, en réalité, les effets du cadrage économique de la loi de finances initiale.
Mais la tendance lourde reste confirmée : l'essentiel des dépenses de remboursements et dégrèvements portant sur la fiscalité d'État est consacré à l'activité économique, puisque les deux éléments ci-dessus relevés constituent 81 % des crédits. Le seul remboursement de la TVA dite « déductible » équivaut pratiquement au montant net perçu de l'impôt sur les sociétés.
On notera, par ailleurs, que l'élément le plus dynamique de la progression des crédits est constitué par l'évolution de la prime pour l'emploi. Les éléments dont nous disposons sur ce sujet nous permettent de dire qu'elle est surtout une prime à l'emploi précaire et à temps partiel, avant d'être un élément de pouvoir d'achat des ménages. Elle constitue, de surcroît, un formidable moyen de gestion de la modération salariale dans les entreprises, fait qui n'est pas sans incidence sur la situation des dégrèvements locaux.
S'agissant de la prise en charge de la fiscalité locale, comme pour le programme « Fiscalité d'État », les crédits ouverts sont d'abord et avant tout consacrés à la prise en charge par le budget général de la taxe professionnelle, puisque sur 14 088 millions d'euros de crédits, 9 800 millions d'euros, soit près de 70 %, portent sur la taxe professionnelle. Il s'agit, en l'espèce, des conséquences du plafonnement de la taxe sur la valeur ajoutée, qui consomme, et de loin, l'essentiel des crédits ouverts.
On observera, par ailleurs, que parmi les admissions en non-valeur sur les créances fiscales considérées comme irrécouvrables, une partie devrait sans doute être imputée également à la taxe professionnelle.
Notons cependant que, pour être parfaitement objectifs, nous devrions ajouter à la prise en charge par l'État de la taxe professionnelle, dans le cadre de cette mission, le poids spécifique de l'allégement transitoire des bases - 1,1 milliard d'euros au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, la DCTP - ou encore celui de la suppression de la base taxable des salaires, que l'on peut aisément estimer entre 11 milliards et 12 milliards d'euros aujourd'hui.
Le coût réel de la prise en charge de la fiscalité locale n'est donc pas retracé dans cette mission.
L'insuffisance d'éléments d'évaluation, matérialisée par le caractère souvent succinct des réponses au questionnaire budgétaire relevé par Mme le rapporteur spécial, atteste la nécessité d'une véritable remise à plat de nombre de dépenses fiscales qui sont venues surcharger notre législation au fil du temps.
Nous appelons à une remise en question de l'efficacité économique et sociale de la dépense fiscale, qui ne saurait selon nous se substituer positivement à la dépense publique, comme ce fut trop souvent le cas ces dernières années.
C'est à partir de cette approche critique que nous pourrons donner sens à la mission dont nous débattons.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser M. le ministre délégué au budget qui a été retenu par des obligations auxquelles il ne pouvait se soustraire. Je le remplacerai donc au cours de l'examen des crédits des missions « Remboursements et dégrèvements », « Stratégie économique et pilotage des finances publiques », « Conseil et contrôle de l'État » et « Pouvoirs publics ».
En ce qui concerne la mission « Remboursements et dégrèvements », vous le savez, Mme Beaufils, nous proposons d'inscrire 76.481 millions d'euros au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts, impôts d'État et impôts locaux.
Sous son apparence technique, cette mission recouvre des dispositifs auxquels les Français et, bien sûr, leurs représentants sont sensibles.
Nous avons tenu le plus grand compte des observations que M. le député Descamps et vous-même avez formulées, en particulier pour permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible.
Un audit vient également d'être réalisé, afin que nous progressions dans la gestion de ces dispositifs. M. Copé accordera la plus grande attention aux suites qui lui seront données.
Si vous le permettez, madame le rapporteur, je répondrai aux questions que vous avez posées au cours de votre intervention.
Je noterai d'abord que vous avez en quelque sorte accordé un satisfecit au Gouvernement quant au taux de réponses au questionnaire que vous avez adressé. Chaque fois que cela a été possible, la direction générale des impôts a traité les questions posées dans les meilleurs délais.
Soyez assurée, madame la sénatrice, que les services du ministère du budget vous ont transmis toutes les réponses aussi vite que possible. Il n'y a, en tout état de cause, aucune mauvaise volonté de la part du Gouvernement. Nous avons seulement rencontré des contraintes techniques que vous connaissez.
Le ministère du budget s'emploiera, quoi qu'il en soit, à améliorer encore davantage sa performance l'an prochain.
En ce qui concerne l'architecture actuelle de la mission, je vous dirai qu'elle ne représente pas un frein au suivi de la pertinence et de l'efficacité des dispositifs mis en place. Je voudrais apaiser ce qui me semble être pour le moins une fausse controverse.
Selon les prescriptions de la LOLF, il faut isoler les dépenses à caractère évaluatif : telle est la raison d'être de ces programmes « Remboursements et dégrèvements ».
Le Parlement n'y perd ni en information ni en aide à la décision. Les mêmes catégories de dépenses fiscales, vues sous l'angle de leur finalité sociale ou économique cette fois, sont décrites dans les programmes sectoriels pertinents, qui présentent les dépenses fiscales leur correspondant.
Pour ce qui est du débat fiscal à proprement parler, débat de première partie, le fascicule des voies et moyen consacré aux dépenses fiscales permet, par exemple, d'éclairer le débat autant qu'il est nécessaire. Il est enrichi cette année par les mesures afférentes à la fiscalité locale.
C'est donc bien lors de l'examen de la première partie du projet de loi que sont prises les décisions de politique fiscale.
Il est logique, dans les limites ainsi posées aux programmes de la mission « Remboursements et dégrèvements », que les objectifs fixés visent la qualité et la rapidité des services. C'est un engagement important que doivent prendre les administrations fiscales envers le contribuable français.
Mme la sénatrice, vous évoquiez l'audit sur le dégrèvement et les exonérations d'impôts locaux. Cet audit très important était, il est vrai, demandé avec force par les élus. Il est mis en ligne. Ses principales conclusions résident dans le constat de ce que l'État est désormais le premier contribuable local. Les collectivités locales et les contribuables n'ont pas toujours conscience de cet état de fait.
Les préconisations résultant de cet audit incitent à une meilleure information des élus et des collectivités locales. Les conclusions de l'audit seront soumises au Conseil d'orientation des finances publiques.
Enfin, madame le rapporteur spécial, il me semble que vous vous interrogiez sur les remboursements et dégrèvements institués au titre de la taxe professionnelle.
Sur ce point, les objectifs des programmes ne peuvent être orientés que vers la qualité du service rendu, par opposition à des objectifs d'efficience qui n'aurait de sens qu'à l'égard des dépenses fiscales.
C'est pourquoi l'objectif de la mission est de permettre aux usagers de jouir de leurs droits en matière de remboursements et dégrèvements d'impôts d'État le plus rapidement possible, tout en garantissant le bien-fondé des dépenses au regard de la législation.
Les indicateurs des programmes de la mission ont été définis en cohérence avec cet objectif : ils n'ont effectivement pas vocation à permettre l'analyse de l'efficience socio-économique des dégrèvements.
M. Marc Massion. Vous n'avez pas répondu aux autres orateurs, monsieur le ministre !
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Remboursements et dégrèvements |
76 480 000 000 |
76 480 000 000 |
Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) |
62 392 000 000 |
62 392 000 000 |
Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs) |
14 088 000 000 |
14 088 000 000 |
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Stratégie économique et pilotage des finances publiques
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » concerne, d'une part, la conduite de la politique économique et financière de la France et, d'autre part, le pilotage des actions de modernisation de l'État.
Elle se compose de deux programmes : le programme « Stratégie économique et financière et réforme de l'État », qui regroupe pour l'essentiel les administrations centrales du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, et le programme « Statistiques et études économiques », qui renvoie principalement à l'activité de l'INSEE.
Cette mission représente 860,1 millions d'euros de crédits de paiement pour 2007, soit une progression modérée de 0,5 % par rapport à 2006.
En termes d'emploi, il faut relever un net déséquilibre en faveur du programme « Statistiques et études économiques », qui compte 6 242 emplois en équivalent temps plein travaillé, soit 80 % des effectifs de la mission. Au total, les dépenses de personnel s'élèvent à 488,6 millions d'euros, soit une baisse de 1,4 % par rapport à 2006.
Le programme « Stratégie économique et financière et réforme de l'État » est un programme composite et particulièrement atypique du fait de la faiblesse de ses effectifs et de ses moyens.
Il remplit en fait une fonction de support, les crédits de ses différentes actions étant marqués par de nombreuses interactions entre les différentes missions relevant du ministère des finances. De ce fait, la lecture des coûts de ce programme est malaisée.
Ce programme se caractérise, pour 2007, par une forte contraction des autorisations d'engagement. Celles-ci s'élèvent à 369,4 millions d'euros : elles sont en recul de 40,8 % par rapport à 2006.
Cette diminution très significative s'explique par les importantes demandes d'autorisations d'engagement qui étaient intervenues en loi de finances pour 2006 pour assurer la transition des systèmes d'information en mode LOLF, notamment en vue de la mise en place de Palier 2006 et d'Accord LOLF. Ces demandes d'autorisations d'engagement n'avaient pas lieu d'être renouvelées pour 2007.
Les actions menées au sein de ce programme sont très diversifiées, mais il est possible de distinguer deux grands axes : la modernisation de l'État et les grands projets informatiques.
Pour ce qui est de la modernisation de l'État, 64,5 millions d'euros sont demandés en crédits de paiement. Ils visent notamment à financer les initiatives prises en matière d'administration électronique et les audits de modernisation engagés depuis octobre 2005.
La mise en oeuvre des grands projets informatiques relève pour sa part de l'Agence pour l'informatique financière de l'État, l'AIFE. Elle dispose d'une enveloppe de 106,8 millions d'euros en crédits de paiement, notamment pour financer l'avancement du projet CHORUS.
Ce progiciel de gestion intégré qui a vocation à succéder au projet Palier 2006 a toutefois pris du retard. Prévue initialement pour 2008-2009, sa généralisation est désormais repoussée à 2010.
Ce délai supplémentaire est d'autant plus regrettable qu'il renvoie malheureusement aux difficultés rencontrées par nombre de fonctionnaires confrontés à un outil informatique souvent défaillant face aux nouvelles exigences budgétaires et comptables de la LOLF.
Il convient en outre de souligner quelques résultats décevants en matière de performance au sein de ce programme. Ainsi, seulement 58 % des personnels d'encadrement de l'État estiment que la direction générale de la modernisation de l'État apporte un appui efficace à la mise en oeuvre de la réforme budgétaire.
Ce taux de satisfaction enregistre, qui plus est, une dégradation sensible : on prévoit un taux de 50 % pour 2006.
De tels résultats illustrent les difficultés liées à la mise en oeuvre de la réforme de l'État et, plus particulièrement, de la LOLF.
Le programme « Statistiques et études économiques » connaît un recul sensible de son enveloppe budgétaire. Ainsi, hors fonds de concours, les crédits de paiement passent à 465,9 millions d'euros, ce qui représente une baisse de 1,4 % par rapport à 2006.
D'une manière générale, les objectifs de ce programme paraissent pertinents, et ses indicateurs mettent en lumière des performances satisfaisantes.
À propos de ce programme, je souhaiterais toutefois rappeler trois questions qui restent en suspens.
Tout d'abord, il n'est pas certain que la dualité des études de conjoncture de l'INSEE et de la Banque de France ne soit pas source de doublons. Les études menées de part et d'autre apportent-elles des informations suffisamment différentes pour être justifiées ?
Ensuite, le coût du Centre de recherche en économie statistique, le CREST, reste difficile à identifier. L'absence de réelle comptabilité analytique au sein du présent programme ne peut à cet égard qu'être vivement déplorée.
Enfin, les interrogations concernant la délocalisation de l'École nationale de la statistique et des études appliquées, actuellement située à Malakoff, méritent de trouver une réponse afin que cette école ait une chance supplémentaire de se développer.
En conclusion et malgré ces remarques finales, qui devront trouver des réponses lors de l'examen des prochaines lois de finances, la commission des finances propose au Sénat l'adoption des crédits de la mission et de chacun de ses programmes. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis.
Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » est dotée d'environ 860 millions d'euros pour 2007. Elle comporte essentiellement les crédits de personnel et les crédits de fonctionnement des directions générales du ministère de l'économie et des finances chargées d'aider à définir la politique économique et financière de la France.
Tout en précisant d'emblée que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur l'adoption de ces crédits, je souhaiterais néanmoins vous faire part de plusieurs observations.
Tout d'abord, cette mission est affectée par des baisses très sensibles. On constate des baisses de crédits, tout d'abord, puisque les autorisations d'engagement du premier programme baissent de 40 %. On note ensuite une réduction des emplois, puisque, M. Copé l'a lui-même indiqué à l'Assemblée nationale, le ministère totalise 2 988 réductions de postes, ce qui signifie que deux départs à la retraite sur trois ne seront pas remplacés.
À titre personnel, je ne peux que déplorer vivement cette évolution, qui me semble faire peser des risques importants sur la qualité du service public. Quant à la commission des affaires économiques, elle salue dans leur principe les importants efforts de modernisation engagés par Bercy, dont la nouvelle démarche interministérielle d'audits de modernisation.
À ce sujet, il faut toutefois relever que le pourcentage des personnels d'encadrement de l'État satisfaits de l'appui apporté par la nouvelle direction à la modernisation de l'État indique une performance moyenne. Surtout, l'objectif cible fixé pour 2008 n'est que de 54 %, ce qui n'apparaît pas très ambitieux. Pouvez-vous nous éclairer, monsieur le ministre, sur les raisons d'une valeur cible aussi basse et sur l'éventualité de son relèvement ?
La fiabilité des prévisions de croissance économique est également marquée cette année par une performance moyenne, alors que cet indicateur est au coeur des objectifs de la mission. Ainsi, le Gouvernement avait tablé sur une croissance de 2,5 % en 2005 ; finalement, elle n'a été de 1,2 %, ce qui représente tout de même un écart de 1,3 point.
Une telle situation est tout à fait regrettable, car cela signifie que le projet de budget se fonde sur une hypothèse erronée et que le vote du Parlement est donc, d'une certaine façon, biaisé. Comme le souligne d'ailleurs la Cour des comptes, aucun des quatre programmes pluriannuels établis entre décembre 2001 et décembre 2004 n'a été exécuté conformément aux prévisions : tous se sont traduits par des résultats très en retrait des ambitions affichées en raison d'hypothèses économiques insuffisamment réalistes.
Au demeurant, l'écart entre les prévisions de croissance et les réalisations ne menace-t-il pas de se répéter pour 2006, du fait de la croissance nulle annoncée par l'INSEE au troisième trimestre ?
Par ailleurs, notre attention a été récemment attirée sur la pertinence de l'indice des prix à la consommation. Il est urgent que l'INSEE engage une réflexion de fond sur cette question. En effet, depuis la création de l'euro, cet institut fournit des statistiques officielles concernant le pouvoir d'achat qui sont en nette contradiction avec la perception qu'en ont nos concitoyens, comme l'a montré le vif débat suscité par l'annonce, au début du mois d'octobre, d'une hausse de 2,3 % en 2006.
L'estimation repose sur l'indice des prix à la consommation, qui aurait augmenté, toujours selon l'INSEE, de 1,9 % sur un an. Or cet indicateur est de plus en plus contesté, car il sous-estime le poids réel de certaines dépenses : par exemple, les loyers ne pèsent que 6 % dans la composition de l'indice, alors que les locataires, qui représentent 40 % de la population française, consacrent près d'un quart de leur budget à se loger ; de même, les crédits immobiliers ne sont pas pris en compte par l'INSEE, alors qu'ils grèvent de plus en plus le budget des familles.
En réalité, selon l'indice du coût de la vie, créé en 2004 par Michel-Édouard Leclerc, le pouvoir d'achat n'aurait augmenté que de 0,5 %, une fois soustraites les charges contraintes, c'est-à-dire le remboursement des crédits, les loyers, les assurances, les transports publics. Entre ces deux estimations, l'Institut national de la consommation évalue à 0,9 % la hausse du pouvoir d'achat en 2006. (M. le président de la commission des finances s'exclame.)
Vous contestez mes propos, mon cher collègue ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Pas du tout ! Mais c'est de la publicité pour Leclerc !
Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis. La capacité de l'indice des prix à la consommation à refléter réellement l'évolution du pouvoir d'achat des Français soulève une grande interrogation. Il nous semble urgent d'élaborer de nouveaux instruments de mesure plus transparents et plus fiables. La commission des affaires économiques se félicite donc que le Conseil d'analyse économique ait été chargé d'une mission de réflexion sur l'indice des prix à la consommation. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner quelques indications sur l'état d'avancement de cette réflexion ?
Le dernier point que je souhaitais aborder concerne la dotation de recensement aux collectivités territoriales, qui relève du deuxième programme de la mission. En effet, l'Association des maires de France exprime des interrogations sur son montant, qui ne serait pas suffisant pour compenser les nouvelles tâches mises à la charge des communes. Pourriez-vous également, nous donner davantage de précisions sur ce point ?
Sous le bénéfice de ces observations, mes chers collègues, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques », qui est une mission relativement « petite » sur le plan budgétaire, puisqu'elle ne porte que sur un peu plus de 860 millions d'euros d'engagement, est répartie entre deux programmes qui semblent bien dissemblables. En effet, tandis que l'un recouvre les aspects stratégiques assez fondamentaux, notamment sur le plan de la convergence des politiques économiques dans le cadre européen, l'autre porte sur l'outil statistique de qualité dont nous avons besoin pour faire face aux enjeux de l'information économique et sociale, autrement dit l'INSEE.
Je souhaite apporter quelques éclairages sur l'un et l'autre de ces programmes, en relevant notamment que l'Institut national de la statistique et des études économiques connaîtra l'an prochain une contraction de ses effectifs qui nous rend inquiets sur sa capacité à fournir les éléments nécessaires à notre propre appréciation.
Cette situation nous semble, en effet, peu appropriée à la réalité des missions de l'Institut, attendu que les indicateurs de performance retenus dans le cadre du programme manifestent, de manière générale, une relative dégradation de la qualité du service rendu. La complexité croissante des missions accomplies et la diversité des études menées sont, de notre point de vue, autant de raisons de maintenir des effectifs suffisamment pertinents en vue de l'accomplissement de ces tâches.
Or, dans le cas qui nous préoccupe, il est à craindre un nouveau transfert de charges vers d'autres opérateurs que l'INSEE. Je pense notamment aux collectivités locales, qui sont de plus en plus souvent sollicitées pour faire face aux charges de réalisation du recensement général de la population, sans en recevoir la juste compensation exigée par l'ampleur de la dépense.
Plus généralement, c'est tout l'appareil statistique, qui nous permet notamment d'avoir une vision macroéconomique et d'appréhender les réalités sociales de notre pays, qui est en question.
Or l'INSEE produit tout de même un grand nombre de documents essentiels à la bonne compréhension de la vie économique et sociale du pays, permettant notamment aux parlementaires que nous sommes de disposer d'éléments d'information fiables pour déterminer, en toute connaissance de cause, nos choix politiques. Au demeurant, nous comprendrions mal que nous soyons amenés, en adoptant en l'état les crédits de cette mission, à voter la déperdition de nos moyens d'investigation et de connaissance des réalités quotidiennes vécues par nos compatriotes.
L'autre programme de la mission est largement mis en oeuvre par l'action des services centraux de la direction générale du Trésor et de la politique économique, dont l'une des tâches essentielles consiste à mener, en concertation avec nos partenaires européens, la négociation sur l'harmonisation fiscale européenne.
Le sujet est d'importance, d'autant que la concurrence fiscale continue d'animer le débat communautaire. Par rapport à cette négociation, le fait que notre pays dispose aujourd'hui en Europe d'une situation originale pose un problème qui est loin d'être anodin : en rejetant par référendum le projet de Constitution en mai 2005, nous avons en effet fait valoir, par la voie du suffrage universel, une autre conception de la construction européenne.
C'est en fonction de ce choix qu'il importe selon nous d'appréhender rapidement deux domaines essentiels.
Il s'agit, d'une part, de l'harmonisation fiscale en matière de taxe sur la valeur ajoutée des secteurs à forte intensité de main d'oeuvre, associée à la mise à l'étude d'un abaissement significatif du taux réduit de la taxe sur les produits de première nécessité et à la fixation d'un plancher plus faible du taux normal.
Il s'agit, d'autre part, de l'impôt sur les sociétés, pour lequel il nous semble indispensable de parvenir à s'entendre sur la disparition des régimes dérogatoires de dumping fiscal pratiqués par quelques pays, notamment certains nouveaux entrants, et sur l'harmonisation des assiettes d'imposition, domaine dans lequel nous sommes singulièrement en retard sur la plupart de nos partenaires.
Telles sont les priorités qui, en la matière, nous semblent devoir être retenues pour les années à venir. Sous le bénéfice de ces observations, nous ne pourrons donc que rejeter les crédits de la mission.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est sur les crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » qu'est financée notre politique de réforme de l'État. Conçue comme une démarche globale et cohérente, elle mobilise principalement trois leviers : d'abord, le déploiement d'une culture de performance et de résultat ; ensuite, le développement de l'administration électronique ; enfin, la volonté de placer l'usager au coeur du service public.
C'est aussi une démarche orientée vers les attentes des Français : elle vise à rechercher le meilleur service public au meilleur coût, en direction, naturellement, des citoyens, des usagers et des contribuables, qui souhaitent une utilisation optimale des deniers publics, mais aussi en direction des agents eux-mêmes, qui attendent de la reconnaissance pour les actions conduites et espèrent trouver, pour tous les métiers exercés, un travail intéressant et de qualité.
C'est enfin une démarche responsabilisante puisque, avec la LOLF, les moyens de l'État sont fixés par politiques avec des objectifs et des indicateurs mesurant l'action du Gouvernement. Chaque responsable de programme dispose de crédits globalisés, qu'il peut redéployer, et doit être ainsi en mesure de répondre de sa gestion devant le Parlement.
La responsabilisation des gestionnaires est également accrue par le développement des dispositifs contractuels de pilotage, que connaît bien le ministère de l'économie et des finances.
Je voudrais maintenant répondre aux questions et observations qu'ont formulées M. le rapporteur spécial et Mme le rapporteur pour avis.
Tout d'abord, monsieur le rapporteur spécial, je tiens à vous dire que les conclusions de l'audit de modernisation conduit sur le déploiement du projet CHORUS ont été rendues publiques voilà quelques jours, conformément à l'engagement pris par le ministère du budget sur tous les audits de modernisation.
Dès la remise de ces travaux, une réflexion sur les conséquences qu'il convenait d'en tirer a été engagée pour que le projet soit naturellement une réussite. Trois objectifs sont fixés : tous les mécanismes de la LOLF doivent jouer à plein ; l'ensemble des ministères doivent adhérer au projet et profiter de cette occasion pour conduire une réflexion approfondie sur l'organisation de leur back office ; l'engagement ainsi consenti par l'État et donc par les contribuables suppose de dégager une rentabilité économique réelle.
Les discussions interministérielles ont commencé sur les suites données à cet audit. Jean-François Copé tient cependant à fixer certains principes. Ainsi, comme MM. Lambert et Migaud le demandent dans leur rapport, le calendrier du déploiement 2009-2010 doit être tenu. L'audit l'a montré, il est possible de dégager un retour sur investissement positif pour ce projet. Enfin, les ministères doivent y trouver un intérêt fonctionnel et financier.
Monsieur Massion, vous m'avez ensuite interrogé sur les éventuels doublons entre les missions de l'INSEE et celles de la Banque de France. Il existe effectivement un domaine de recoupement qui porte sur l'analyse conjoncturelle, mais les deux organismes interviennent plus de manière complémentaire que de façon concurrente ou redondante. Une complémentarité entre les enquêtes de l'INSEE et celles de la Banque de France est naturellement indispensable : les premières sont particulièrement adaptées à l'information précoce sur le mouvement macroéconomique d'ensemble ; les secondes permettent de mieux percevoir le sens du mouvement de la production sur le dernier mois.
Vous avez également posé une question sur le coût du CREST, qui est le centre de recherche commun à l'INSEE et à ses grandes écoles, l'ENSAE et l'ENSAI. Ce système intégré « enseignement-recherche-institut » ne permet que très difficilement d'isoler une fonction de recherche pure pour le CREST. Inscrite sur l'action « Formation » du programme « Statistiques et études économiques », la part des crédits du CREST dans les composantes diverses qui viennent d'être rappelées représentent moins de 30 % du budget de l'action, soit environ 6 millions d'euros pour un centre de recherche classé, vous le savez, parmi les tout premiers en France et en Europe.
Vous m'avez également interrogé sur la délocalisation de l'École nationale de la statistique et de l'administration économique. Le 24 novembre dernier, le Premier ministre a annoncé que le Gouvernement entendait procéder à son transfert sur le campus de l'École polytechnique. Le dossier budgétaire en vue de l'implantation de l'ENSAE sur le plateau de Saclay est désormais en cours de finalisation.
Vous m'avez également interrogé, monsieur le rapporteur pour avis, sur le montant des crédits du programme CHORUS.
Pour l'ensemble des projets Accord-LOLF et CHORUS, le projet de loi de finances pour 2007 sera doté, en crédits d'investissements, de 40,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et de près de 90 millions d'euros en crédits de paiement. Ces dotations sont logiquement en diminution par rapport à la loi de finances de 2006, puisque l'essentiel des autorisations d'engagement nécessaires, à ce stade, à la mise en oeuvre du programme CHORUS ont été ouvertes l'an dernier ; elles étaient ainsi de 210 millions d'euros en 2006, contre 32 millions cette année.
En revanche, les crédits de paiement destinés aux programmes passent de 52 millions d'euros à près de 70 millions d'euros, ce qui correspond logiquement à la montée en puissance des mandatements consécutive au pic d'autorisations d'engagement enregistré en 2006.
Madame le rapporteur pour avis, vous avez posé une question sur l'évolution des effectifs du ministère de l'économie et des finances. Je vous indique que la réduction de ces effectifs a concerné 2 988 postes en équivalents temps plein, ce qui correspond au non-remplacement d'environ deux départs à la retraite sur trois. Comme Jean-François Copé l'a dit à maintes reprises, il ne s'agit pas d'un effort de circonstance, mais de l'accentuation d'une dynamique engagée depuis le début du quinquennat.
Au total, en cinq ans, Bercy aura réduit ses effectifs de 11 200 postes, c'est-à-dire de 7 %, tout en intensifiant son action en matière économique et financière. C'est une vraie différence par rapport à la période précédente, au cours de laquelle il n'y avait pas eu de suppression significative de postes.
M. Jacques Mahéas. Heureusement !
M. Henri Cuq, ministre délégué. Cet effort est entièrement documenté grâce aux audits.
Quant à la qualité du service public, elle n'est pas remise en cause, bien au contraire.
M. Jacques Mahéas. Bien sûr que si !
M. Henri Cuq, ministre délégué. Vous m'avez également interrogé, madame Demessine, sur la réalité des prévisions économiques. Malgré la pause de la croissance au troisième trimestre, tout indique, y compris les dernières prévisions de l'INSEE, que la croissance française sera bien comprise en 2006, comme cela avait été prévu, entre 2 % et 2,5 %.
Enfin, vous avez posé une question sur la dotation de recensement. Cette dotation s'élève pour 2007 à 18,1 millions d'euros. Elle a été calculée sur la base des dépenses remboursées par l'INSEE aux communes lors du recensement de 1999. Ces dépenses ont été abondées pour tenir compte, d'abord, des évolutions indiciaires, ensuite, de la charge d'encadrement des agents recenseurs, qui incombe désormais aux communes et, enfin, des charges sociales, auparavant prises en charge par l'INSEE. Au total, à population recensée équivalente, la dotation de recensement est supérieure de 80 % à ce qu'elle serait dans les conditions de 1999.
J'en viens à l'indice des prix. Celui-ci est élaboré de façon indépendante par l'INSEE, conformément aux normes internationales les plus exigeantes. Le Conseil national de l'information statistique, le CNIS, a publié en mars 2006 une intéressante analyse des écarts qui existent entre les perceptions et la mesure du pouvoir d'achat. Le Conseil d'analyse économique, le CAE, et le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale, le CERC, présidé par Jacques Delors, se sont aussi penchés sur cette question dans le cadre de la Conférence sur l'emploi et les revenus organisée par le Gouvernement.
Madame Beaufils, vous avez posé des questions relatives à la politique fiscale. Mais la présente discussion n'est pas l'espace approprié pour discuter de ces sujets, qui relèvent de la première partie du projet de loi de finances. Je ne peux donc pas vous donner les réponses que vous attendez.
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Stratégie économique et pilotage des finances publiques |
813 804 402 |
857 713 402 |
Stratégie économique et financière et réforme de l'État |
367 501 837 |
412 210 837 |
dont titre 2 |
117 720 828 |
117 720 828 |
Statistiques et études économiques |
446 302 565 |
445 502 565 |
dont titre 2 |
370 975 578 |
370 975 578 |
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques »
(Ces crédits sont adoptés.)
Conseil et contrôle de l'État
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Conseil et contrôle de l'État » est constituée de trois programmes : « Conseil d'État et autres juridictions administratives », « Conseil économique et social », « Cour des comptes et autres juridictions financières ».
Après un « accouchement » qualifié l'année dernière de « douloureux », cette mission a désormais trouvé son rythme de croisière. Elle bénéficie de 470,4 millions d'euros de crédits de paiement, dont 83,6 % correspondent à des frais de personnel.
Le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » est doté de 251,1 millions d'euros en crédits de paiement, soit plus de 50 % des crédits de l'ensemble de la mission. Il s'agit là d'une évolution significative, avec une hausse des crédits de 5,1 % par rapport à 2006.
La dotation relative aux frais de justice correspond à 8,86 millions d'euros, après un réajustement de 1,24 million d'euros par rapport au montant alloué dans le projet de loi de finances initiale pour 2006. Cet accroissement important de 14,1 % de la dotation laisse toutefois planer un doute sur la sincérité budgétaire de ce poste, dans la mesure où la consommation de ces crédits en 2005 était déjà de 8,19 millions d'euros, avec un taux de croissance de 12 %.
Au-delà de la question posée par ces frais de justice, il convient de souligner une évolution maîtrisée des crédits, résultant d'une réflexion approfondie menée conjointement par le Conseil d'État et les autres juridictions administratives afin d'instaurer un contrôle de gestion sur leurs budgets de fonctionnement.
L'effort réalisé en matière de création d'emplois au titre de la loi d'orientation et de programmation pour la justice s'élève, pour 2007, à 3 millions d'euros. Cet effort s'avère toutefois insuffisant pour atteindre les objectifs fixés par ladite loi, qui prévoyait la création de 480 emplois dans les juridictions administratives entre 2003 et 2007. Au cours de cette période, seuls 342 emplois auront finalement été créés. Il manque notamment 54 postes de magistrats administratifs et 84 postes d'agents de greffe.
M. Jacques Mahéas. C'est beaucoup !
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial. Ce retard est d'autant plus regrettable que le Conseil d'État et les autres juridictions administratives subissent la pression tant de l'augmentation continue du contentieux que de nouvelles contraintes. Ainsi, la présidence des chambres de discipline des différentes professions de santé est désormais confiée à un magistrat administratif.
La poursuite de l'augmentation du contentieux administratif - elle a été de 5 % en 2005 - confirme la pertinence de l'objectif principal du programme, qui est de ramener, à la fin de 2007, les délais de jugement devant les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs à un an au lieu de dix-huit mois, ce qui a été fait au Conseil d'État.
J'en viens au programme « Conseil économique et social ».
Le Conseil économique et social bénéficie depuis sa création et encore aujourd'hui, sous l'empire de la loi organique relative aux lois de finances, d'une forte autonomie de gestion. Du fait du faible montant de son budget, de la relative rigidité de la dépense et de la nature même de ses activités, essentiellement de conseil et dialogue, activités qui sont difficilement chiffrables en termes de coûts, le Conseil économique et social n'est pas incité à se doter d'une véritable comptabilité analytique. Toutefois - et je me plais à le souligner - même si cela ne constitue pas un véritable contrôle de gestion, le Conseil dispose d'une capacité d'analyse par fonction qui lui permet d'assurer un suivi maîtrisé de ses dépenses.
Ce programme connaît une très faible progression de ses crédits - 0,6 % -, qui s'élèvent pour 2007 à 35,8 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, soit moins de 10 % de la totalité des crédits de la mission.
Par nature, le Conseil économique et social, assemblée consultative, se prête mal à la mesure de la performance : « les chiffres ne remplacent jamais les idées ».
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial. Je relève que le Conseil s'est récemment intéressé à deux débats importants pour la société française.
Le premier sujet, qui concerne la représentativité syndicale et la recherche d'une plus grande justesse...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Justesse ou justice ? (Sourires.)
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial.... dans l'appréciation de la situation de ce début de XXIe siècle, doit être considéré comme un véritable enjeu démocratique.
Le deuxième sujet a été fourni au Conseil par l'Association des maires de France, l'AMF, l'Assemblée des départements de France, l'ADF, et l'Association des régions de France, l'ARF, qui lui ont demandé d'ouvrir des pistes de réflexion relativement à l'aménagement des ressources de nos collectivités locales. Le Sénat s'intéressera naturellement aux conclusions prospectives auxquelles aboutira ce travail.
Le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » est financé, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, par une enveloppe de 181,7 millions d'euros, en progression de 5,8 % par rapport au budget accordé pour 2006.
La Cour des comptes s'est vu récemment attribuer deux nouvelles missions d'assistance au Parlement, qui nécessitent l'attribution de moyens supplémentaires, ce qui explique cette progression de 5,8 % de ses crédits. Il s'agit de la mission de certification des comptes de l'État, prévue dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, et de la mission de certification des comptes des organismes nationaux du régime général de sécurité sociale.
Dans cette perspective, la Cour s'est attachée à renforcer ses moyens humains par des redéploiements internes ainsi que par une politique de recrutement d' « experts » issus du secteur privé et encadrés par des magistrats.
Si les 1 851 équivalents temps plein travaillés du programme incluent à ce jour les 401 équivalents temps plein travaillés mis à la disposition des juridictions financières par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, ce qui représente un premier pas vers l'indépendance à l'égard de Bercy, une modification des statuts de ces personnels est nécessaire, dans la mesure où l'autonomie budgétaire des juridictions financières implique une gestion directe des personnels.
Enfin, si la démarche de performance engagée par les juridictions financières mérite d'être saluée, il conviendra de porter une attention particulière aux conclusions du groupe de travail chargé d'améliorer les indicateurs de performance lors du projet de loi de finances pour 2008.
En conclusion et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances, unanime, propose au Sénat d'adopter les crédits de la mission et de chacun de ses trois programmes. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la nomenclature budgétaire définie par la LOLF est, dans ses grandes lignes, semblable à l'architecture arrêtée l'année dernière dans le domaine de la justice : le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives », rattaché depuis 2006 à une mission distincte « Conseil et contrôle de l'État », se singularise toujours des autres programmes de la mission « Justice ».
Monsieur le ministre, je formulerai deux observations et je poserai quatre questions.
Première observation : comme l'année dernière, plus de la moitié - 53,5 % - des crédits alloués à la mission « Conseil et contrôle de l'État » par le projet de budget pour 2007 sont consacrés au financement du programme 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives ».
Hors fonds de concours, ce poste budgétaire - en hausse de près de 5,3 % - progresse plus que le budget général de l'État - en hausse de 0,8 % - et même légèrement plus que le budget alloué à la mission « Conseil et contrôle de l'État » - en hausse de 5,1 %.
La justice administrative devrait ainsi bénéficier en 2007 de près de 251 millions d'euros de crédits de paiement et de 253 millions d'euros d'autorisations d'engagement.
Ma seconde observation concerne l'évaluation des frais de justice.
Le Gouvernement a réévalué le montant de la dotation allouée aux frais de justice pour la porter à 8,8 millions d'euros - soit une hausse de 1,2 million d'euros par rapport à la dotation prévue en loi de finances initiale pour 2005.
Toutefois, force est de constater que cet abondement dépasse seulement de 8 % la consommation constatée en 2005. Compte tenu de l'accélération du rythme des dépenses depuis 2003, lequel n'a jamais été inférieur à 10 %, et dans le contexte d'une activité contentieuse dense, il est à craindre que la somme allouée cette année soit insuffisante pour financer les besoins réels.
Or la suppression du caractère évaluatif de ces dépenses qui, aux termes de la LOLF, revêtent désormais un caractère limitatif impose que l'évaluation en loi de finances soit fixée au plus près de la consommation effective.
Cette analyse rejoint celle de notre collègue Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial, qui doute, comme il vient de l'indiquer, de la sincérité budgétaire de ce poste.
J'en viens à mes quatre questions.
Tout d'abord, le taux de réalisation prévisionnel de la loi d'orientation et de programmation pour la justice en matière de créations d'emplois, qui s'établit à un peu plus de 71 %, se révèle décevant. Ainsi, seulement 342 postes sur les 480 postes attendus ont été effectivement créés, le solde des créations d'emplois non exécutées s'élevant à 138 postes - 54 magistrats et 84 agents de greffe.
Le présent projet de budget, compte tenu du contexte budgétaire contraint, n'a ainsi pu rattraper le retard observé depuis 2005.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, le plan quinquennal adopté en 2002 pourra-t-il être respecté ? Pouvez-vous m'assurer qu'un rattrapage interviendra l'année prochaine ? Quel sera son ordre de grandeur ?
Ensuite, et je souhaite insister tout particulièrement sur ce point, car il s'agit d'un sujet important dont nous aurons sans doute à reparler, une nouvelle extension des matières ressortissant à la compétence du juge unique est annoncée depuis l'année dernière par le Gouvernement.
Le décret du 28 juillet 2005 a opéré un premier élargissement du recours au juge unique. Cette réforme concerne les requêtes relevant d'une série de requêtes formées devant toutes les juridictions, ainsi que les affaires les plus simples soumises à la procédure d'admission des pourvois en cassation devant le Conseil d'État.
La perspective d'une nouvelle extension inquiète fortement les magistrats administratifs, traditionnellement attachés à la collégialité de la formation de jugement.
Le renoncement à la collégialité constitue un pis-aller pour remédier à l'encombrement des juridictions administratives. Telle est la raison pour laquelle le recours au juge unique doit être strictement cantonné aux affaires les moins complexes et dépourvues d'enjeu à l'égard des libertés et droits fondamentaux.
Monsieur le ministre, le Gouvernement peut-il nous assurer que l'extension envisagée ne viserait qu'un contentieux très ciblé et répétitif dans des domaines où la jurisprudence est stable et bien établie ?
S'agissant plus particulièrement des nouvelles règles envisagées par le Gouvernement en application de la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration en matière de recours à l'encontre d'un titre de séjour, il paraît essentiel que la procédure contentieuse ne soit pas trop raccourcie afin de laisser au justiciable le temps de présenter tous ses arguments.
Ainsi, le délai de quinze jours au-delà duquel il n'est plus possible de présenter un mémoire complémentaire annoncé par le requérant et que le Gouvernement prévoit, semble-t-il, nous paraît un peu court et mériterait d'être allongé. Que pense le Gouvernement de cette proposition ?
Enfin, je me félicite de la bonne exécution du programme immobilier. Toutefois, en tant qu'élu gardois, je souhaiterais insister sur le nouveau tribunal administratif de Nîmes.
Alors que la façade du palais de justice et de la préfecture ont été dernièrement réhabilitées, il manque 450 000 euros pour le ravalement de la façade du tribunal administratif, qui fait partie du même ensemble architectural.
Ne serait-il pas possible d'envisager un cofinancement de cette opération avec les collectivités locales - la ville de Nîmes, le conseil général et le conseil régional -, afin de finaliser l'établissement de ce nouveau tribunal ?
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois a émis un avis favorable sur l'adoption des crédits consacrés au programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » dans le projet de loi de finances pour 2007. (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le caractère hétéroclite des programmes qui composent la mission « Conseil et contrôle de l'État » impose d'en faire une analyse distincte, ainsi que l'a fait M. le rapporteur spécial.
Je tiens à rappeler la position de notre groupe, maintes fois réitérée.
La légitime création de cette mission « Conseil et contrôle de l'Etat » regroupant le Conseil économique et social ainsi que les juridictions financières ne devait pas, à notre sens, entraîner une intégration en son sein des juridictions administratives.
En effet, quand bien même cette mission aurait trouvé son rythme de croisière, certains arguments sérieux tendent cette année encore à montrer que le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » n'a pas réellement sa place dans ce budget.
Je citerai deux chiffres du rapport de notre collègue M. Frécon.
La fonction juridictionnelle représente 90 % de ce programme. Autrement dit, la fonction de conseil et d'expertise du Conseil d'État ne représente qu'un dixième de ce budget. Il faut savoir, de plus, que les crédits affectés à ce programme représentent plus de 50 % des crédits de la mission.
À eux seuls, ces deux chiffres montrent de façon concrète que le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » n'a pas sa place dans la mission « Conseil et Contrôle de l'État ».
Si nous comprenons parfaitement la « tectonique » qui a présidé à cette redistribution, nous regrettons cependant la décision finale. Sans refaire l'historique de cette fission, la création de la mission « Conseil et contrôle de l'État » ne devait pas nécessairement impliquer cette sortie des juridictions administratives.
Une telle sortie nous semble pénalisante pour l'ensemble de la justice judiciaire et, tout d'abord, en raison des risques d'éclatement de la justice judiciaire.
En effet, les perpétuelles dichotomies entre parquet et siège ou entre pénal et civil contribuent à brouiller le message d'unité de notre justice. La sortie de la justice administrative ne peut que renforcer cette tendance à l'éclatement, alors même que nos concitoyens attendent un message fort donnant plus de lisibilité à l'ensemble de notre justice.
Concernant le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives », qui représente donc 50 % de la mission, deux constats peuvent être faits.
Premier constat, on peut se féliciter du processus mis en oeuvre par les juridictions administratives pour améliorer le processus de la LOLF.
Le Conseil d'État et les tribunaux administratifs jouent le jeu de la performance. L'objectif de ramener à un an, au lieu de dix-huit mois, les délais de jugement témoigne d'une véritable volonté de l'ordre judiciaire d'améliorer son fonctionnement. Cet effort mérite d'être souligné, car il s'agit d'une priorité pour nos concitoyens.
Le second constat que l'on peut faire est relatif à la dotation « frais de justice ». Comme M. le rapporteur l'a indiqué, cette dotation stagne à 8,86 millions d'euros alors qu'en 2005 elle était déjà à 8,19 millions d'euros, et ce malgré un taux de croissance moyen annuel de 12 %.
Les frais de justice représentent une problématique majeure.
Personne ne conteste le fait que la société doive engager un budget considérable en ce sens, et que celui-ci, au même titre que les dépenses de santé, ne peut être maîtrisé au travers d'une seule dimension comptable.
Pour autant, il convient d'appréhender réellement ces chiffres. Ceux-ci doivent donc être sincères et ils ne doivent en aucun cas constituer une variable d'ajustement budgétaire qui occasionnera, de toute façon, l'octroi d'une rallonge.
On peut se féliciter de constater que la justice judiciaire a engagé de gros efforts cette année en matière de réduction des coûts, qui témoignent d'une volonté de maîtriser l'utilisation des deniers publics. Le bilan de la justice administrative n'en deviendra que meilleur le jour où sera entreprise une véritable stratégie en la matière.
Enfin, je parlerai rapidement des programmes « Cour des comptes et autres juridictions financières » et « Conseil économique et social ».
En ce qui concerne la Cour des comptes, on ne peut que saluer la démarche entreprise par M. Philippe Séguin, qui a engagé cette institution vers des objectifs de performance imposés par la LOLF. Elle est l'exemple probant des organismes français qui travaillent bien, et il fallait le souligner.
Quant au Conseil économique et social, comme l'a dit M. le rapporteur, sa nature même se prête mal à une telle démarche, car les critères retenus ne permettent pas de rendre compte de la réalité du travail de cette institution consultative, qui bénéficie, depuis sa création, d'une forte autonomie de gestion.
En tout état de cause, notre groupe adoptera les crédits de cette mission, en espérant toutefois que nos suggestions seront prises en compte dans le futur. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission recouvrent les moyens de fonctionnement et d'action du Conseil d'État, des cours administratives d'appel, du Conseil économique et social, de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes.
Ces organismes jouent un rôle déterminant dans la confection de la loi, comme dans le contrôle de la réalité de l'exécution budgétaire ou dans la constitution de la jurisprudence.
Sans partager absolument les attendus de la position du Premier président de la Cour des comptes sur l'exécution budgétaire en cours, je me permettrai d'émettre des regrets quant aux mauvaises habitudes budgétaires qui sont à l'oeuvre aujourd'hui.
Un rapide coup d'oeil sur les discussions menées dans le cadre de cette seconde partie montre que, apparemment, toutes les astuces sont bonnes pour comprimer les dépenses sans tenir compte des lois antérieurement votées.
Ainsi, la ligne de crédit consacrée à la rénovation urbaine n'a jamais été abondée à la hauteur des orientations fixées par la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, tandis que les promesses faites aux chercheurs scientifiques ne sont pas tenues, ou encore que les décisions budgétaires de la loi d'orientation et de programmation pour la justice ne sont pas respectées.
Et je ne parle pas de la pratique constante qui veut que, dans bien des domaines, les crédits inscrits en missions budgétaires soient tantôt sous-évalués, tantôt transformés en « réservoirs » destinés à être utilisés au gré des besoins de l'exécution budgétaire !
Il suffit de regarder les lois de finances rectificatives pour se rendre compte que l'essentiel des crédits supplémentaires ouverts en loi de finances initiale est soumis au redéploiement, sinon à l'annulation, ce qui, au-delà des critiques exprimées par la Cour des Comptes, va à l'encontre du respect dû au rôle des parlementaires.
S'agissant de la procédure législative, le Conseil d'État dispose de moyens d'expertise pour donner un avis éclairé sur la conformité aux principes du droit des textes de loi qui nous sont présentés par le Gouvernement. Or, depuis plusieurs années, semble se généraliser une procédure visant à présenter par voie d'amendements parlementaires ou de propositions de loi des dispositions sur lesquelles le Conseil d'État aurait pu exercer un contrôle de légalité respectueux des principes du droit.
Les dernières discussions législatives que nous avons eues sont truffées, c'est le moins que l'on puisse dire, de ces détournements de procédure qui soumettent à l'avis des parlementaires des mesures parfois d'importance, sans avis extérieur, notamment sans avis des instances telles que le Conseil d'État.
Telles sont les remarques que je tenais à exprimer, au nom de mon groupe, sur la mission regroupant ces organismes. Peut-être serait-il bon de faire en sorte que cette mission soit mieux mise en oeuvre, y compris pour l'optimisation de notre action de parlementaires.
Pour notre part, nous ne voterons pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier le rapporteur spécial, M. Frécon, pour le satisfecit qu'il a accordé au Conseil d'État, à la Cour des comptes et au Conseil économique et social. Effectivement, tous trois ont eu la volonté d'adopter très rapidement les logiques de la LOLF et particulièrement celle de performance, même si parfois, ainsi que M. le rapporteur spécial l'a relevé à juste titre, des progrès restent à accomplir.
Pour des raisons évidentes, cela a été plus difficile pour le Conseil économique et social, mais il a entamé un effort réel qu'il est décidé à poursuivre.
Je présenterai successivement les programmes 164, « Cour des Comptes et autres juridictions financières », 165, « Conseil d'État et autres juridictions administratives » et 126, « Conseil économique et social ».
Pour ce qui concerne le programme 164, je soulignerai le rôle particulier d'assistance que joue la Cour des comptes à l'égard du Parlement et du Gouvernement, avec le souci constant « de faire en sorte que l'équilibre voulu par le constituant ne soit pas faussé au détriment de l'un de ces deux pouvoirs », comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 25 juillet 2001.
Le rattachement de cette mission et donc de ce programme au Premier ministre est le gage de l'indépendance de la Cour des comptes.
Celle-ci est d'autant plus nécessaire que le législateur a confié de nouvelles missions à la Cour. Selon la LOLF, elle doit, chaque année, déposer un rapport conjoint au dépôt du projet de loi de règlement et certifier les comptes de l'État.
Depuis 2005, cette mission de certification est étendue aux comptes du régime général de la sécurité sociale. Mais l'objectif de la Cour demeure : informer le plus complètement possible le Parlement et l'opinion publique sur le fonctionnement de l'exécutif.
Cette extension des missions se conjugue avec la consolidation de l'autonomie de gestion engagée en 2006 en matière de personnel. C'est la conséquence du changement de rattachement des quelque 400 agents qui relevaient précédemment du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Je tiens à rassurer M. Frécon : ce rattachement ne créera aucun problème statutaire aux personnels concernés.
Tout cela se traduit évidemment par une augmentation du montant des crédits affectés à ce programme, qui s'établit à 181,7 millions d'euros, soit une évolution de 5,8 % par rapport à 2006, 86 % de cette somme étant consacrés aux dépenses de personnels.
Je conclurai sur les indicateurs de performance de la Cour et des juridictions financières. Le Premier président a la volonté de poursuivre leur amélioration au cours de 2007.
Cette démarche est complexe à mettre en oeuvre, car elle nécessite, comme vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur spécial, de réfléchir, à une harmonisation des divers indicateurs utilisés par la Cour, d'une part, les chambres régionales et territoriales des comptes, d'autre part. Tout sera fait pour que de nouveaux indicateurs harmonisés figurent dans le projet de loi de finances pour 2008.
Pour ce qui concerne le programme 165, « Conseil d'État et autres juridictions administratives », avant d'entrer dans le détail, je souhaite répondre au rapporteur pour avis et à Mme Procaccia sur le rattachement dudit programme à une mission distincte de la mission « Justice ».
En créant cette mission « Conseil et contrôle de l'État », le Gouvernement a souhaité, dans la logique de la LOLF, identifier une fonction particulière du contrôle de l'administration, essentielle pour les citoyens.
Je rappelle que le choix du Gouvernement de rattacher ce programme à la mission que nous examinons vise à préserver son indépendance.
À cet égard, je ferai trois brèves remarques.
Inclus dans la mission « Justice », ce programme pourrait faire l'objet d'arbitrages internes visant à modifier les crédits qui lui sont affectés. Cela pourrait entraîner une remise en cause de l'autonomie budgétaire de la juridiction administrative, contraire à une tradition bien établie.
Ensuite, la place du Conseil d'État au sein de la mission « Conseil et contrôle de l'État » paraît naturelle aux côtés de la Cour des comptes et du Conseil économique et social. En effet, le Conseil d'État incarne parfaitement cette double mission consultative et juridictionnelle. La justice administrative, parce qu'elle a une double mission, est totalement différente de la justice judiciaire.
Enfin, cette présentation n'altère en rien le niveau de contrôle que le Parlement doit exercer sur le Conseil d'État et sur les autres juridictions administratives.
J'ajoute que ce rattachement ne remet pas en cause le rôle du garde des sceaux, qui, comme par le passé, propose les nominations des magistrats administratifs, prépare les textes concernant les juridictions administratives, etc.
Cela étant précisé, ce programme est marqué par deux données importantes.
En premier lieu, il continue de s'inscrire dans un contexte d'augmentation de l'activité du Conseil d'État et des autres juridictions administratives. Les tribunaux administratifs ont dû faire face à un accroissement de 14 % en 2003, 16 % en 2004 et 5 % en 2005 du nombre d'affaires dont ils ont été saisis. L'activité consultative du Conseil d'État a également fortement augmenté en raison de l'activité normative du Gouvernement.
En second lieu, ce programme s'inscrit dans le cadre de l'application de la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002. Celle-ci se concrétise par la poursuite des contrats d'objectifs et de moyens conclus entre le Conseil d'État et les cours administratives d'appel.
Ces contrats ont déjà permis de réduire le délai moyen de jugement de moitié entre 2002 et 2005 ; ce délai a en effet été ramené à un an et quatre mois.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est encore beaucoup !
M. Henri Cuq, ministre délégué. On se rapproche du délai d'un an souhaité par le Parlement. En la matière, et pour répondre au président Jean Arthuis et à certains de ses collègues, je crois prudent de fixer des objectifs réalistes qui tiennent compte de l'augmentation sensible du contentieux.
Je ferai deux observations.
La procédure administrative, même si de réels efforts ont été accomplis, est plus longue que les autres. Il ne faudrait pas, en réduisant les délais, fragiliser la sécurité juridique des décisions rendues. C'est le justiciable qui en subirait les conséquences.
Je rappellerai enfin que la loi du 30 juin 2000 permet aux particuliers d'obtenir en urgence la suspension des décisions administratives qui leur causent un grave préjudice.
Le projet de budget du Conseil d'État s'élève à 252,88 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 250,73 millions d'euros en crédits de paiement, soit une progression de 5,3 % en crédits de paiement.
Ainsi, soixante emplois pourront être créés pour faire fonctionner le nouveau tribunal administratif de Nîmes ouvert le 1er novembre dernier ; M. Sutour en est, je l'imagine, satisfait.
S'agissant du ravalement de la façade du tribunal, le Conseil d'État envisage de réaliser les travaux dès que possible. Un cofinancement avec les collectivités locales serait bienvenu.
Plusieurs mesures catégorielles pourront également être mises en place grâce à ce budget. L'objectif est de récompenser les efforts de productivité des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel demandés dans le cadre du projet annuel de performance. Depuis 2003, la productivité des magistrats des tribunaux administratifs a augmenté de plus de 15 %.
Ce budget permettra aussi de s'assurer que la dotation prévue pour le règlement des frais de justice sera suffisante pour faire face à une augmentation du contentieux en 2007. L'évaluation qui en est faite est tout à fait sincère, je le dis pour MM. Frécon et Sutour.
Toute comparaison avec les résultats obtenus en la matière par les juridictions judiciaires n'est pas opportune, car les procédures sont de nature très différente. Le Conseil d'État a volontairement modifié ses règles de procédures pour maîtriser ces coûts, qui correspondent, pour l'essentiel, à des frais d'affranchissement, tout en respectant les règles du procès équitable.
Le Conseil d'État expérimente également, depuis un an, l'envoi par Internet des pièces de procédure.
Monsieur Sutour, l'extension envisagée des compétences du juge statuant seul concerne uniquement le contentieux du permis de conduire à points.
Le Conseil d'État et les autres juridictions administratives sont engagés depuis longtemps dans la démarche de performance encouragée par la LOLF en diminuant les délais de jugement, en augmentant la productivité des magistrats et des agents de greffe tout en maintenant la qualité des décisions juridictionnelles.
Cette année, le Conseil d'État a souhaité étendre cette démarche de performance à son activité de conseil du Gouvernement en s'engageant sur des objectifs chiffrés quant à la proportion des textes examinés en moins de deux mois : il a pour objectif d'examiner 80 % des projets de lois et d'ordonnances dans ce délai. Le satisfecit délivré par le rapporteur spécial sur les indicateurs de performance est donc pleinement légitime, et je l'en remercie !
S'agissant du programme 126, « Conseil économique et social », les crédits demandés pour 2007 atteignent 35 856 000 euros, en progression de 0,65 % par rapport à la loi de finances de 2006. Cette hausse modérée s'explique exclusivement par l'augmentation de la valeur du point de la fonction publique. Les dépenses de personnel représentent, vous le savez, 87 % de la totalité du budget du Conseil économique et social.
À l'occasion de la présentation de ce programme, je tiens à souligner la qualité des travaux du Conseil économique et social. Cette année, il a très largement contribué à la réflexion dans de nombreux domaines tels que le dialogue social, la représentativité syndicale, la réforme des tutelles, le dispositif « Défense deuxième chance », la gestion des matières et déchets radioactifs ou encore le travail dominical... Autant de thèmes sensibles pour le Parlement comme pour le Gouvernement.
La nature de l'activité du Conseil économique et social rend plus difficile la mise en place d'objectifs et d'indicateurs aussi rigoureux et précis que ceux qui sont applicables aux autres programmes. Votre rapporteur spécial l'a bien compris, puisqu'il souligne que c'est effectivement plus l'activité qui est mesurée que la performance.
Il a pointé quelques lacunes mais également des améliorations par rapport à l'an passé, dont certaines font suite à des recommandations formulées alors ici même. Ainsi, et pour répondre à une observation de M. Frécon, je peux confirmer que le Conseil économique et social va mettre à profit l'année 2007 pour réfléchir à une présentation en actions, afin de l'intégrer dans son programme dès le projet de loi de finances pour 2008.
Je suis certain que, l'an prochain, votre assemblée pourra constater avec satisfaction que plusieurs de ses suggestions, notamment sur les indicateurs permettant d'apprécier les relations entre le Parlement et le Conseil économique et social, auront été prises en compte.
Telles sont, mesdames et messieurs les sénateurs, les précisions que je souhaitais vous apporter sur la mission « Conseil et Contrôle de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Conseil et contrôle de l'État |
470 355 386 |
468 211 241 |
Conseil d'État et autres juridictions administratives |
252 582 535 |
250 438 390 |
dont titre 2 |
205 496 405 |
205 496 405 |
Conseil économique et social |
35 925 137 |
35 925 137 |
dont titre 2 |
31 130 881 |
31 130 881 |
Cour des comptes et autres juridictions financières |
181 847 714 |
181 847 714 |
dont titre 2 |
156 900 000 |
156 900 000 |
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Pouvoirs publics
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, rapporteur spécial. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'année dernière, presque jour pour jour, lors de la présentation des crédits de la mission « Pouvoirs publics », nous avions, Yves Détraigne et moi-même, quelque peu ironisé sur la très relative « surinformation » qui devait nous permettre d'émettre un avis sur les crédits proposés.
Le Gouvernement s'était alors engagé à étoffer les documents de présentation des crédits du projet de loi de finances pour 2007.
Nous avons été entendus puisque la présentation de la mission « Pouvoirs publics » correspond aujourd'hui à une « compilation » des anciennes annexes « jaunes » du projet de loi de finances. Cette nouvelle présentation permet ainsi une vision plus en amont de ces dotations. Des développements peuvent toujours être envisagés, mais nous avançons dans la bonne direction. Soyez-en remerciés, messieurs les ministres.
J'en viens à l'exposé des crédits proposés.
Tout d'abord, le périmètre de la mission évolue : une nouvelle dotation est intégrée ; il s'agit de la rémunération versée aux élus français au Parlement européen. En 2006, celle-ci avait été transférée sur les crédits de la mission « Action extérieure de l'État », qui relève du ministère des affaires étrangères. À l'Assemblée nationale, le rapporteur spécial de la commission des finances pour cette mission, M. Jérôme Chartier, s'étonnant de ce positionnement, avait interpellé le ministre des affaires étrangères quant à l'opportunité de l'inscription des crédits destinés à la rémunération des élus français au Parlement européen sur ce budget.
Répondant au principe démocratique d'autonomie des assemblées parlementaires, même si les élus concernés sont en l'occurrence « extranationaux », le Gouvernement a choisi d'en faire une dotation, objet d'une nouvelle action de la mission « Pouvoirs publics ». Les crédits affectés à cette action sont de l'ordre de 8 millions d'euros.
S'agissant des dotations « plus anciennes », on constate une progression de près de 30 millions d'euros des crédits demandés pour l'année 2007 par rapport à l'année 2006. La quasi-totalité de cette progression concerne le provisionnement opéré par l'Assemblée nationale pour faire face au coût du renouvellement législatif prévu au printemps 2007.
L'élection présidentielle aura également un effet important sur l'activité du Conseil constitutionnel, qui sollicite une dotation exceptionnelle de 1,7 million d'euros pour assurer les opérations de contrôle des scrutins et, éventuellement, pour accueillir un onzième membre à partir du mois de mai 2007. (Sourires.)
Les chaînes parlementaires, LCP-Assemblée nationale et Public Sénat, voient également leurs crédits augmenter fortement, respectivement de 15,91 % et de 26,57 %. Ces augmentations s'expliquent par les coûts de diffusion de la télévision numérique terrestre, la TNT. Pour ce qui est de Public Sénat, des crédits sont prévus pour l'installation d'un deuxième plateau et de la régie qui y est associée.
Pour sa part, le Sénat, a contraint l'évolution de sa dotation dans un objectif de « progression zéro » en volume. Malgré la nécessité d'anticiper dès 2007 l'arrivée de dix sénateurs supplémentaires en 2008, le Sénat atteint cet objectif en opérant, pour l'essentiel, un prélèvement sur ses disponibilités.
Enfin, comme je m'y étais engagé l'an dernier, j'ai tenu à mener plusieurs contrôles sur pièces et sur place.
C'est ainsi que je me suis rendu, le 14 septembre 2006, à la présidence de la République pour y rencontrer le directeur de cabinet du chef de l'État. J'ai pu me faire confirmer que les salaires des 378 personnels militaires et des 424 personnels civils restaient à la charge des ministères qui les mettent à la disposition de la présidence de la République, seules leurs indemnités de sujétion étant imputées sur la dotation.
Mes chers collègues, cette situation est contraire aux principes prévus par la LOLF. J'évalue, de ce fait, à 25 millions d'euros, peut-être même à 30 millions d'euros, la sous-estimation des crédits de la présidence de la République. Il sera donc nécessaire que le prochain projet de loi de finances corrige cette anomalie.
Messieurs les ministres, je souhaite que vous puissiez faire le nécessaire pour que les salaires versés aux collaborateurs mis à la disposition de la présidence de la République figurent l'an prochain dans les charges de cette institution.
Le 19 octobre 2006, j'ai également rencontré le président de la Cour de justice de la République. J'ai souhaité obtenir des informations permettant de justifier le niveau du loyer annuel, c'est-à-dire 438 000 euros, et son maintien, alors que les salaires des magistrats et des agents administratifs sont pris en charge sur la mission « Justice ». À la vérité, il m'apparaît finalement que la Cour de justice de la République fonctionne comme un « appendice » de la Cour de cassation. À l'avenir, peut-être faudra-t-il envisager que les bureaux mis à la disposition des magistrats de la Cour de justice de République, qui sont issus de la Cour de cassation, soient adjoints à cette dernière.
Mes chers collègues, je ne doute pas que, éclairés par ces propos, et à l'instar de ce qui s'est passé en commission des finances, vous approuverez à l'unanimité les crédits de la mission « Pouvoirs publics » pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, parmi les dotations budgétaires figurant dans la mission « Pouvoirs publics », se trouvent notamment les crédits concernant le Conseil constitutionnel, la Haute Cour de justice et la Cour de justice de la République.
Comme vous le savez, il s'agit de juridictions dont l'existence est prévue par la Constitution elle-même et qui exercent un rôle tout à fait spécifique dans l'ensemble de nos institutions juridictionnelles.
Il est cependant un autre organisme qui remplit une fonction non moins spécifique, le Conseil supérieur de la magistrature, le CSM, mais dont les crédits correspondent à une simple action de la mission « Justice » et non à un programme de la mission « Pouvoirs publics », contrairement aux institutions que je viens d'évoquer.
L'an dernier, la commission des lois avait déjà signalé cette incohérence. Aujourd'hui, plus encore que voilà un an, en raison des réformes annoncées dans le domaine de la justice, la commission des lois souhaite que soit prise en compte sa demande de faire figurer les crédits consacrés au CSM non plus comme une simple action de la mission « Justice », ces crédits pouvant être réduits au gré des besoins d'autres actions de la même mission, mais, à côté de ceux du Conseil Constitutionnel, de la Haute Cour de Justice et de la Cour de Justice de la République, dans la mission « Pouvoirs publics ». Cela répondrait mieux aux spécificités de cette institution dont l'existence est également inscrite dans notre Constitution et dont l'indépendance est appelée à s'accroître.
Dans le même ordre d'idées, la commission des lois estime également que la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL, devrait non pas constituer une simple action de la mission « Justice », mais voir en quelque sorte son budget « sanctuarisé » dans une mission à créer. Celle-ci pourrait regrouper un certain nombre d'autorités administratives indépendantes, qui ne sont certes pas prévues dans la Constitution, mais qui jouent également un rôle très important de gardiennes des libertés publiques. Je pense par exemple au Médiateur de la République, à la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, au Conseil supérieur de l'audiovisuel ou encore à la Commission d'accès aux documents administratifs. Nous en parlerons, me semble-t-il, à propos du rapport suivant.
Ayant commencé par mentionner ce qui ne figurait pas dans la mission « Pouvoirs publics », je me dois maintenant d'évoquer brièvement ce qui y figure, et notamment le Conseil constitutionnel.
Je n'aborderai pas l'augmentation de son budget, certes importante cette année, mais qui est très logiquement due au financement des opérations exceptionnelles auxquelles l'institution devra faire face en 2007, à l'occasion de l'élection présidentielle. En revanche, je tiens à souligner que, bien que le Conseil constitutionnel ne soit pas plus soumis aux objectifs de performances que les autres organismes figurant dans la mission « Pouvoirs Publics », il a réellement pris en compte cette préoccupation.
Ainsi, la brièveté des délais dans lesquels il rend ses décisions constitue pour lui un impératif en fonction duquel il a fait des efforts d'organisation.
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. C'est vrai !
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis. Ses décisions relatives au contrôle de constitutionnalité sont préparées très en amont, notamment grâce à un suivi attentif des débats parlementaires. Sur les dix dernières années, le délai moyen entre les saisines et les décisions s'est ainsi établi à quinze jours seulement.
De même, le Conseil constitutionnel s'efforce de concilier efficacité de l'action et souci de modération de la dépense publique. Cela mérite, me semble-t-il, d'être souligné. Par exemple, son enveloppe budgétaire a diminué de 4 % en 2005 et ses moyens de fonctionnement ont été stabilisés en 2006 malgré la majoration des traitements de la fonction publique et l'accroissement de son activité.
Tels sont, messieurs les ministres, les quelques points que je voulais évoquer à propos de l'examen des crédits de la mission : « Pouvoirs publics », sur lesquels la commission des lois émet un avis favorable.
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la présente mission recouvre des enjeux importants puisqu'il s'agit des crédits destinés au fonctionnement de la présidence de la République, des assemblées parlementaires, du Conseil constitutionnel, de la Cour de justice de la République, de la Haute Cour de justice, et de la chaîne de télévision parlementaire, ainsi que de ceux qui sont dévolus à la représentation française au Parlement européen.
Il faut le noter, du fait leur caractère assez particulier, ces crédits échappent assez nettement à la norme de progression des dépenses appliquée de manière générale au budget de l'État. En effet, ils passent de 872millions à 919 millions d'euros environ.
On observera que les prévisions de dépenses les plus dynamiques portent sur la diffusion de la chaîne parlementaire, puisque la dotation globale de celle-ci passe de 21,741 millions d'euros à 26,345 millions d'euros.
Par ailleurs, le degré de consommation des crédits des assemblées parlementaires est étroitement dépendant de la réalité de l'activité parlementaire.
Ce sont donc sur ces deux points que portera cette brève intervention.
S'agissant de la chaîne parlementaire, l'évolution sensible des dépenses correspondrait à la montée en charge des coûts liés au passage des programmes réalisés sur le réseau numérique terrestre. Elle résulterait également d'un investissement structurant, indispensable à la réalisation desdits programmes.
Selon nous, une telle évolution implique que, le moment venu, et bien au-delà d'une discussion budgétaire annuelle, nous nous penchions sur la manière dont l'activité parlementaire est portée à la connaissance du public. Je pense notamment à l'audience de nos travaux par le biais de la TNT.
À ce propos, il conviendrait de s'interroger sur la gouvernance de la chaîne, sur l'audience qu'elle rencontre et sur l'apport qu'elle fournit à la connaissance de l'activité politique du pays.
S'agissant de l'activité parlementaire, permettez-moi de formuler une remarque.
Là encore, l'une des questions qui se posent avec la progression apparemment maîtrisée des crédits des assemblées est celle de la mise en oeuvre de la session unique. En effet, lors de la dernière session, nous avons battu le record du nombre de jours de séance depuis les débuts de la Ve République. Par exemple, nous avons siégé pendant neuf jours sans discontinuer sur le projet de loi relatif à l'égalité des chances, dont l'une des dispositions phares, le contrat « première embauche », a finalement été corrigée en catastrophe grâce au dépôt d'une proposition de loi de circonstance, un mois après le terme de nos discussions.
Pour la session 2005-2006, nous sommes finalement parvenus à cent vingt jours de séance publique, nous approchant des mille heures de débat public, ce qui soulève un certain nombre de problèmes politiques essentiels. Il est permis, notamment, de se demander si, avec la multiplication des lois, ce n'est pas la question du sens même de la loi qui se trouve posée.
Comment ne pas pointer que l'on a exigé du Parlement qu'il examine le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, portant singulièrement sur la délinquance des mineurs, alors même que les différents textes précédemment adoptés au cours de la législature sur ce thème ne sont, pour un certain nombre de dispositions, même pas encore applicables ?
L'activité parlementaire a besoin de réflexion, de profondeur, de maturation et d'expertise. Elle ne peut pas être dictée par l'événement, l'émotion ou, pis encore, par des considérations de stricte opportunité politique, voire par le pur et simple électoralisme, comme nous le voyons trop souvent depuis le début de la présente législature.
Ainsi a-t-on voté en 2003 une loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine qui contenait des engagements : l'État, notamment s'agissant de la rénovation urbaine, ne les a pas respectés ! Ainsi a-t-on voté une loi d'orientation et de programmation pour la justice dont, exercice budgétaire après exercice budgétaire, les engagements sont reniés. Ainsi la loi de programme du 18 avril 2006 pour la recherche n'est-elle pas respectée, ni dans ses objectifs ni dans ses moyens ! Ainsi, chaque année, l'exécution des lois de finances fait l'objet de tels ajustements de gestion que le rôle du Parlement, c'est-à-dire fixer la quotité de la dépense publique, est de plus en plus limité, sinon rendu inexistant par l'application sélective des normes arrêtées en loi organique.
Tels sont quelques-uns des points qu'il convenait d'évoquer à l'occasion de cette discussion.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous sommes invités à nous pencher sur la mission « Pouvoirs publics », qui, je le rappelle, regroupe les dotations de la présidence de la République, du Parlement et de ses chaînes télévisées, du Conseil constitutionnel, de la Cour de justice de la République et, cette année, des indemnités des élus français au Parlement européen.
Il est toujours malaisé d'avoir à commenter une mission d'une telle nature. Notre rapporteur spécial, et éminent président de la commission des finances, M. Jean Arthuis, l'a très justement démontré.
En effet, comme l'a d'ailleurs rappelé le Conseil constitutionnel dans une décision du 27 décembre 2001, « les pouvoirs publics constitutionnels déterminent eux-mêmes les crédits nécessaires à leur fonctionnement », car « ce dispositif assure la sauvegarde du principe d'autonomie financière des pouvoirs publics concernés, lequel relève du respect de la séparation des pouvoirs ».
Face au respect absolu de cette indépendance, qui est une ardente obligation, quelle marge de manoeuvre est laissée au législateur pour éviter le simple blanc-seing ?
Malgré tout, quelques constats doivent permettre d'étayer notre discussion. Notre excellent rapporteur ayant déjà procédé à un examen très complet des crédits de cette mission, je centrerai mon intervention sur certains aspects de celle-ci.
Tout d'abord, je me félicite que la suggestion formulée l'an dernier à l'Assemblée nationale par M. Bourguignon, rapporteur spécial, et relayée ici par Jean Arthuis ait enfin été entendue. En effet, l'ajout au « bleu budgétaire » des informations jusqu'alors contenues dans les « jaunes », a permis, sinon de donner plus d'envergure aux crédits des pouvoirs publics, tout du moins de conférer une plus grande clarté à leur présentation.
Au nom du groupe UMP, je me réjouis également de voir que les chaînes parlementaires « investissent » - il s'agit plus, en l'occurrence, de redevances que d'investissements stricto sensu - dans l'accès à la TNT. Les coûts augmentent et nous serions intéressés par des informations supplémentaires nous permettant de savoir si cette augmentation va se poursuivre ou si elle sera limitée.
Quoi qu'il en soit, il est tout à fait positif pour la citoyenneté et pour la République que l'accès à la connaissance du fonctionnement de nos assemblées parlementaires soit ainsi ouvert à un nombre croissant de Français. Si le nombre de téléspectateurs reste en deçà de nos légitimes espérances au regard des crédits consacrés à ces chaînes de télévision, force est de constater que la qualité de leurs programmes honore les deux chaînes en question, et plus particulièrement Public Sénat.
À cet égard, la retransmission des débats de la commission d'enquête sur l'affaire d'Outreau, que beaucoup de Français ont suivie, fut un événement télévisuel important. Elle a marqué un changement dans notre pratique institutionnelle ; c'est là une démarche qu'il convient d'encourager. De même, la retransmission en direct de certaines manifestations ou débats politiques a certainement contribué à la notoriété de ces chaînes. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Enfin, même si des efforts peuvent encore être faits en ce qui concerne l'information du Parlement sur le budget de la présidence de la République, les informations obtenues devraient mettre un terme à la polémique stérile à laquelle nous avions assisté ces dernières années. Je suis heureux de constater que ce débat est maintenant clos.
Sous le bénéfice de ces observations, le groupe UMP votera bien évidemment ces crédits. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai été naturellement très attentif aux propos des différents orateurs sur la mission « Pouvoirs publics ».
J'en retiendrai tout d'abord la satisfaction exprimée concernant la présentation des documents budgétaires. Le Gouvernement a tenu compte des voeux émis l'an passé sur ce point par le rapporteur spécial et le rapporteur pour avis. Il en va de même pour la clarté de l'affichage des indemnités des représentants français au Parlement européen.
Je ne reviendrai pas sur les caractéristiques de cette mission, développées l'an passé, ni même sur l'augmentation modérée du volume global de la dotation d'ensemble qui lui est consacrée. Le président Arthuis, ainsi que vous-même, monsieur le rapporteur pour avis, avez parfaitement exposé les raisons de cette évolution.
Je préciserai simplement, concernant la dotation de la présidence de la République, que de réels efforts de transparence ont été réalisés, monsieur le président de la commission des finances, en particulier sur les effectifs du personnel qui y est affecté. Je rappelle qu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires propre à l'Élysée et qu'il est de tradition constante, depuis la IIIe République, que les moyens en personnel soient mis à disposition par différents ministères. Cette tradition n'a jamais été remise en cause, quel que soit le Président de la République. Pour répondre au souhait du président de la commission des finances, un effort de présentation budgétaire a été réalisé, mais celle-ci est, naturellement, susceptible d'être revue, sans que cela change d'ailleurs quoi que ce soit à l'équilibre d'ensemble des comptes de l'État.
Pour conclure, je résumerai ainsi les caractéristiques globales de cette dotation : stabilité, effort de modération des dépenses et souci de bonne gestion. C'est bien là l'essentiel. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Pouvoirs publics |
918 701 950 |
918 701 950 |
Présidence de la République |
31 783 605 |
31 783 605 |
Assemblée nationale |
529 935 000 |
529 935 000 |
Sénat |
314 487 165 |
314 487 165 |
La chaîne parlementaire |
26 345 000 |
26 345 000 |
Conseil constitutionnel |
7 242 000 |
7 242 000 |
Haute Cour de justice |
0 |
0 |
Cour de justice de la République |
886 680 |
886 680 |
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
8 022 500 |
8 022 500 |
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Direction de l'action du Gouvernement
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission : « Direction de l'action du Gouvernement » (et article 47 bis).
La parole est à M. Michel Moreigne, rapporteur spécial.
M. Michel Moreigne, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Direction de l'action du Gouvernement » correspond au regroupement de la plupart des crédits relevant des services du Premier ministre et concourant soit à des fonctions d'état-major de la politique gouvernementale, soit à des actions interministérielles à caractère transversal.
En ce sens, la mission « Direction de l'action du Gouvernement » présente un caractère exceptionnel au regard des dispositions de l'article 7 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, lequel dispose qu'« une mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie ».
La direction de l'action du Gouvernement ne saurait constituer une politique publique stricto sensu, mais les dépenses afférentes doivent être retracées dans le projet de loi de finances : telle pourrait être la justification de la constitution de la présente mission.
Les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » dans le projet de loi de finances pour 2007 s'élèvent à 532 millions d'euros en crédits de paiement et à 559 millions d'euros en autorisations d'engagement et elles sont réparties entre deux programmes.
Le programme « Coordination du travail gouvernemental » est doté de 358 millions d'euros en crédits de paiement et de 384 millions d'euros en autorisations d'engagement. Il comprend notamment les crédits du secrétariat général de la défense nationale, le SGDN, qui s'élèvent à 78 millions d'euros en crédits de paiement, des fonds spéciaux, à hauteur de 42 millions d'euros, du Centre d'analyse stratégique, pour 21 millions d'euros. Ce programme regroupe également les crédits de plusieurs autorités administratives indépendantes, comme le Médiateur de la République, pour 11 millions d'euros, et le Conseil supérieur de l'audiovisuel, pour 34 millions d'euros. Il comprend enfin les crédits des directions d'administration centrale relevant des services du Premier ministre.
Le programme « Fonction publique » est doté de 174 millions d'euros en crédits de paiement et de 175 millions d'euros en autorisations d'engagement. Il comporte des dépenses de formation, celles de l'École nationale d'administration et des cinq instituts régionaux d'administration, ainsi que des crédits d'action sociale interministérielle.
Mes chers collègues, vos rapporteurs spéciaux se sont demandé si la maquette budgétaire et la présentation des crédits étaient conformes aux principes posés par la LOLF.
Comme l'an passé, nous observons que la maquette budgétaire peut être améliorée.
En particulier, le programme « Coordination du travail gouvernemental » regroupe les crédits d'autorités administratives indépendantes qui ne relèvent pas véritablement de fonctions d'état-major de l'action gouvernementale : le CSA, le Médiateur de la République, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la Commission consultative du secret de la défense nationale, la Commission d'accès aux documents administratifs et le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé.
C'est ainsi que nous vous proposerons un amendement, élaboré en étroite liaison avec notre collègue Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement tendrait à créer, au sein de la mission « Direction de l'action Gouvernement », un nouveau programme, intitulé « Protection des droits et des libertés fondamentales », qui regrouperait les crédits des autorités administratives indépendantes que je viens de citer.
Je laisse maintenant à mon collègue François Marc le soin de présenter les principales évolutions des dépenses budgétaires proposées.
M. le président. La parole est à M. François Marc, rapporteur spécial.
M. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je complète effectivement l'exposé de mon collègue Michel Moreigne pour souligner d'abord, s'agissant de la présentation des crédits, le véritable effort de transparence qui a été accompli.
Il n'en est que plus regrettable que le « bleu budgétaire » ne comporte plus la répartition des crédits par sous-action, laquelle correspond pour cette mission au niveau pertinent d'analyse des évolutions budgétaires. En effet, en 2005, la présentation par sous-action avait permis à vos rapporteurs spéciaux de relever un certain nombre d'imprécisions, voire d'erreurs. Cette répartition a dû être demandée expressément aux services du Premier ministre et elle figure aux pages 16 à 19 de notre rapport écrit.
Vos rapporteurs spéciaux, mes chers collègues, expriment leur souhait très vif que, à l'avenir, les « bleus budgétaires » présentent cette information.
La disparition de ce tableau récapitulatif a été justifiée comme suit : « L'application Farandole, utilisée par les différents ministères pour la confection des projets annuels de performances ne prévoit, pour les services du Premier ministre comme pour les autres ministères, qu'une présentation par action et non par sous-action. »
Sans doute faudra-t-il que les services de Bercy adaptent leurs applications informatiques, car la justification des crédits au premier euro exige l'accès à ces données de base pour la préparation du débat budgétaire.
Je vous propose de détailler à présent l'évolution des dotations budgétaires. L'analyse d'ensemble est rendue difficile par les changements de périmètre, mais aussi par les réévaluations de certaines dépenses.
S'agissant des changements dans la maquette budgétaire, les crédits de la Documentation française ainsi que ceux des centres interministériels de renseignements administratifs, les CIRA, ont été regroupés avec ceux des Journaux officiels, dans la mission « Publications officielles et information administrative », dont notre collègue Bernard Véra, rapporteur spécial, vous proposera l'adoption.
Vos rapporteurs spéciaux estiment que ce rapprochement institutionnel souligne la complémentarité des missions des organismes concernés, dans la continuité des observations que j'avais formulées dans mon rapport de contrôle budgétaire de juin 2004 sur les crédits de la Documentation française.
Par ailleurs, les effectifs des services du Médiateur de la République ainsi que les dépenses immobilières et de location des services du Premier ministre ont été réévalués à la hausse. Vos rapporteurs spéciaux ne peuvent que se féliciter de cette opération de vérité budgétaire, qui brouille cependant la lecture de l'évolution des crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental ». À périmètre constant, les crédits de ce programme sont stables, quelques économies étant par ailleurs effectuées. Ainsi, le solde des créations et des suppressions d'emplois fait apparaître une diminution nette de six emplois.
En revanche, l'augmentation des dépenses d'action sociale interministérielle du programme « Fonction publique » est réelle. Il s'agit des chèques vacances, d'aides ménagères à domicile et d'aides au logement, en partie gérés par la Mutualité fonction publique, la MFP.
Jusqu'en 2006, ces dépenses étaient traditionnellement sous-dotées en loi de finances initiale. Un prélèvement sur le fonds de roulement de la MFP permettait de couvrir intégralement les dépenses. En 2005, vos rapporteurs spéciaux avaient souligné que le niveau du fonds de roulement de la MFP ne permettrait plus de reconduire une telle opération en 2007. De fait, un abondement du budget général de l'État à hauteur de 14,5 millions d'euros vient compenser l'absence de prélèvement sur le fonds de roulement de la MFP en 2007.
Si l'on fait abstraction de cette opération de redéploiement budgétaire, les dépenses d'action sociale interministérielle progressent de plus de 20 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2006, soit une hausse de 31 %. Les aides au logement et les aides aux retraités sont les principaux postes en augmentation. Cette augmentation s'inscrit dans le cadre des accords conclus le 25 janvier 2006 entre vous-même, monsieur le ministre de la fonction publique, et les organisations syndicales.
Vous me permettrez de me demander, à titre personnel, si la progression des crédits d'action sociale interministérielle n'est pas destinée à atténuer la moindre revalorisation du point de la fonction publique.
Enfin, dans le cadre de la création du Centre d'analyse stratégique, le CAS, né des cendres de l'ancien Commissariat général du Plan, vos rapporteurs spéciaux se demandent quelles seront les économies d'échelle qui résulteront effectivement du rapprochement avec les autres organismes prospectifs, notamment le Conseil d'analyse économique et le Conseil d'orientation des retraites. Ces questions avaient déjà été posées par vos rapporteurs spéciaux lors de leur contrôle budgétaire sur les crédits du Centre d'analyse stratégique, qui a fait l'objet d'un rapport d'information déposé en juin 2006.
Par ailleurs, l'article 47 bis, qui a été introduit par l'Assemblée nationale et qui est rattaché à la mission « Direction de l'action du gouvernement », prévoit la présentation d'un rapport, annexé au projet de loi de finances initiale, sur la fonction publique, notamment ses effectifs et les politiques de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences.
Telles sont, mes chers collègues, les principales observations que nous souhaitions porter à votre connaissance. Sous réserve de ces observations, la commission des finances a proposé l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du gouvernement », modifiés par l'amendement qu'elle a déposé, ainsi que l'adoption de l'article 47 bis.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis.
M. Yves Détraigne, en remplacement de Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais d'abord vous présenter les excuses de Mme Jacqueline Gourault, qui ne pouvait être parmi nous aujourd'hui.
Outre la mission « Direction de l'action du Gouvernement », la commission des lois a décidé de se saisir cette année du programme « Édition publique et information administrative » de la nouvelle mission « Publications officielles et information administrative », qui comprend désormais les crédits de la Documentation française et des centres interministériels de renseignements administratifs, les CIRA.
Je ne reviendrai pas sur l'évolution générale de la fonction publique, détaillée dans l'avis, puisque nous avons déjà eu l'occasion d'en débattre en première partie.
Concernant le programme « Fonction publique », ses crédits sont en forte hausse - de plus de 27 % -, principalement en raison de la politique active du ministère de la fonction publique pour mettre en oeuvre les accords signés le 25 janvier 2006 par vous-même, monsieur le ministre, avec trois organisations syndicales.
La commission des lois se félicite particulièrement de la mise en place du chèque emploi service universel, le CESU, effective depuis le 1er septembre 2006, et de la garantie Locapass, ainsi que de la rénovation de la prestation « aide à l'installation des personnels de l'État », désormais étendue à l'ensemble du territoire national. Ces prestations d'action sociale devraient contribuer à remédier à deux des principales difficultés que rencontrent les fonctionnaires les plus jeunes : trouver un logement et faire garder leurs jeunes enfants pendant qu'ils travaillent.
La commission des lois se réjouit également de l'application, depuis le 1er janvier 2006, de la réforme de la scolarité de l'École nationale d'administration, qui devrait permettre d'offrir aux élèves une plus grande ouverture vers les enjeux internationaux et « l'administration des territoires ». J'estime, pour ma part, que cette évolution est particulièrement nécessaire.
Enfin, si le nombre d'objectifs et d'indicateurs associés au programme « Fonction publique » pouvait effectivement être réduit, la commission des lois considère que ce nombre est désormais insuffisant, avec seulement trois objectifs et six indicateurs. Elle regrette surtout que les indicateurs conservés se contentent, pour l'essentiel, de mesurer la performance de l'action ministérielle au regard du seul coût de la mesure. Par exemple, la seule maîtrise du coût des formations de l'ENA et des instituts régionaux d'administration ne saurait suffire à la satisfaction des contribuables sans garantir une certaine qualité desdites formations.
S'agissant du programme « Coordination du travail gouvernemental », les indicateurs de performances, en particulier ceux qui sont relatifs au Médiateur de la République et au Conseil supérieur de l'audiovisuel, ont été améliorés.
Toutefois, il paraîtrait pertinent que soit défini, pour le secrétariat général du Gouvernement, un objectif de performances mesurant la proportion des décrets d'application publiés dans un délai de six mois suivant la promulgation de la loi.
Comme l'année dernière, la commission des lois a plus précisément examiné la situation des autorités administratives indépendantes. À cet égard, elle se félicite de l'augmentation des crédits alloués à la Commission d'accès aux documents administratifs et à la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Cette revalorisation répond aux souhaits exprimés par votre commission en 2006 et aux recommandations du rapport sur les autorités administratives indépendantes présenté par notre collègue Patrice Gélard au nom de l'office parlementaire d'évaluation de la législation.
De même, les crédits du Médiateur de la République progressent fortement, du fait de la prise en charge par cette autorité de la rémunération des fonctionnaires détachés auprès d'elle, conformément à la LOLF, et de l'extension de ses compétences, en particulier avec la généralisation de la présence de délégués au sein des établissements pénitentiaires.
En 2006, le Sénat avait adopté un amendement de la commission des lois tendant à regrouper au sein d'un même programme les autorités administratives indépendantes exerçant une mission de protection des droits fondamentaux. En continuité avec cette première initiative, et dans une démarche commune avec la commission des finances, nous vous proposerons à nouveau un amendement visant à améliorer la situation des autorités administratives indépendantes au sein de la mission.
Enfin, pour ce qui concerne le programme « Édition publique et information administrative » de la mission « Publications officielles et information administrative », je me limiterai à saluer les efforts entrepris pour rationaliser l'organisation du service public de l'information administrative, en confiant la gestion des CIRA à la Documentation française.
Sous le bénéfice de ces observations, notre commission a émis un avis favorable quant à l'adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2006 consacrés à la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette mission, dont le montant est relativement réduit - 532 millions d'euros - recouvre des réalités très dissemblables.
En effet, la mission regroupe à la fois des crédits destinés au fonctionnement des services du Premier ministre, mais aussi ceux des services de la direction générale de l'administration et de la fonction publique et du secrétariat général de la défense nationale, ceux du Médiateur de la République, ainsi que ceux destinés à l'activité d'un certain nombre d'autorités indépendantes en charge de missions précisées par la loi.
C'est notamment dans ce cadre que nous trouvons retracés les crédits d'organismes tels que le Conseil supérieur de l'audiovisuel, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la Commission nationale de déontologie de la sécurité ou encore un certain nombre d'organismes de prospective économique et sociale.
Cette diversité ne doit pas occulter quelques questions essentielles.
L'activité d'un organisme comme la Commission nationale de l'informatique et des libertés implique naturellement de réfléchir aux moyens budgétaires qui lui sont alloués, mais aussi au sens que l'on donne, dans notre pays, à la législation.
Nous avons ainsi discuté ces derniers temps des projets de loi portant sur la délinquance ou la sécurité qui comportaient, entre autres mesures, des articles permettant des croisements de fichiers informatisés et donc des échanges de données. Une telle démarche, sans doute critiquable sur le plan du respect des libertés individuelles, risque fort d'accroître quelque peu la tâche de la CNIL. Cela pose d'ailleurs le problème du rôle des parlementaires, certains étant non seulement dépositaires de la mission de faire la loi, mais aussi membres de cette autorité indépendante.
De la même manière, la Commission nationale de déontologie de la sécurité a rendu des rapports d'activité qui illustrent clairement que les pratiques des forces de police, en maintes occasions, semblent avoir pris quelques libertés avec le principe d'égalité de nos concitoyens devant les droits. Les manquements à la déontologie, au-delà des formules mesurées des rapports de la commission, sont manifestement trop fréquents pour ne pas justifier aujourd'hui une majoration des moyens dévolus à cette commission.
Enfin, je ne peux manquer de regretter que les préconisations du Médiateur de la République, notre ancien collègue Jean-Paul Delevoye, aient tant de peine à trouver une traduction dans les textes de loi que nous discutons. Par exemple, il a fallu attendre trois ans pour que la franchise de l'aide personnalisée au logement, qui avait été fixée à 24 euros, soit enfin ramenée à 15 euros malgré ses recommandations déjà anciennes, recommandations qui vont d'ailleurs jusqu'à conseiller le versement unique des droits d'un montant inférieur à 15 euros.
Il nous semblait nécessaire de relever ces quelques points à l'occasion de la discussion de ces crédits.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, puisque je ne dispose que de cinq minutes, je ne vous parlerai que du programme qui concerne la fonction publique et qui comporte deux actions : la formation des fonctionnaires et l'action sociale interministérielle.
Il s'agit du dernier budget de la législature et il intervient dans un contexte de réduction massive des effectifs : 15 019 emplois seront supprimés en 2007. Du jamais vu ! Comme si réduire le nombre d'agents publics était la seule ambition qui vaille !
Cette purge sans précédent n'a pas pour autant vocation à améliorer le pouvoir d'achat des fonctionnaires, qui ne sera même pas maintenu en 2007. Les partenaires sociaux que nous avons rencontrés sont légitimement très inquiets de cette situation. Depuis que les gouvernements de droite se succèdent, aucun accord salarial n'a pu être conclu.
Monsieur le ministre, vous vous défaussez sur l'action sociale, que vous présentez comme un élément de pouvoir d'achat. Permettez-moi de vous dire qu'il s'agit là d'un tour de passe-passe assez grossier ! L'accord signé le 25 janvier dernier comporte bien un volet social et un volet statutaire, mais il n'a été approuvé que par trois syndicats et ne comprend pas de volet salarial.
Examinons néanmoins les mesures que vous mettez en avant.
L'aide à l'installation des personnels a été augmentée et élargie à toutes les régions. À la façon du Locapass, le prêt immobilier couvre la caution de loyer en cas de mobilité ; il est sans intérêt et remboursable sur trois ans.
La démarche est positive, mais sans doute n'est-elle pas à la hauteur des enjeux. Beaucoup de communes rencontrent en effet de réelles difficultés à fournir des logements aux fonctionnaires et les nouveaux logements ne sont pas toujours construits dans les quartiers où se manifestent les besoins les plus criants.
À cet égard, je ne peux qu'appeler une fois encore à une application stricte de la règle des 20 % de logements sociaux, afin que ne subsiste plus d'infraction flagrante à la loi, comme à Neuilly-sur-Seine, la ville de M. Nicolas Sarkozy, qui n'affiche que 2,6 % de logements sociaux quand Neuilly-sur-Marne, ville dont le conseil municipal est à majorité socialiste, en compte 46 % !
Il est d'ailleurs très étonnant de voir aujourd'hui un acteur de renom - il a notamment joué dans le film les Visiteurs - ayant des attaches avec la commune de M. Sarkozy, dont il est manifestement un soutien, plaider pour le logement social. Je suis persuadé qu'il va convaincre ce dernier de construire des logements sociaux à Neuilly-sur-Seine, au moins pour les fonctionnaires !
Autre mesure d'action sociale : le chèque emploi service universel destiné à la garde d'enfants de zéro à trois ans. Là encore, les communes peinent notamment à accueillir en crèche les enfants âgés de deux à trois ans que l'éducation nationale n'accepte plus - j'en ai l'exemple dans ma ville -, sauf dans les zones d'éducation prioritaire.
C'est pourquoi ces mesures me semblent relever du replâtrage. Elles ne remplacent ni une légitime évolution de salaire ni même des investissements collectifs importants, comme la construction de logements par toutes les communes et la création de crèches.
Quant aux crédits de formation des fonctionnaires, ils atteignent 72 millions d'euros. Leur augmentation, de 2,5 %, reste toutefois modeste au regard de l'ampleur des besoins. C'est aujourd'hui et maintenant qu'il faut former les cadres qui remplaceront les nombreux départs à la retraite.
Quand la réduction irraisonnée des effectifs le dispute à la diminution du pouvoir d'achat, il est impensable, monsieur le ministre, que le groupe socialiste du Sénat vote des crédits qui ne prennent nullement la mesure des défis que doit relever une fonction publique moderne.
Tout au plus, compte tenu du rattrapage des crédits concernant l'action sociale interministérielle, nous ne pouvons que nous abstenir.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos rapporteurs spéciaux viennent de le souligner : il n'est pas aisé de définir une mission aussi transversale, qui regroupe des crédits relevant aussi bien des services du Premier ministre ou d'actions interministérielles à caractère - pardonnez-moi le terme - hétéroclite.
Or cette mission ne répond pas vraiment aux objectifs de la LOLF. Convenez que c'est d'ailleurs un peu le propre des missions résiduelles que nous étudions cet après-midi !
J'évoquerai plus particulièrement trois points.
En premier lieu, le Médiateur de la République voit les crédits qui lui sont alloués augmentés cette année de 28,3 %. Cette substantielle croissance résulte en partie des nouvelles missions qui lui sont confiées, se traduisant par la création de quarante délégués supplémentaires pour les établissements pénitentiaires et consulaires, ainsi que de postes dans les zones franches urbaines.
Je me réjouis de cette décision, d'autant que j'ai pu rencontrer personnellement le délégué du Médiateur à la prison de Fresnes et mesurer l'intérêt de cette présence qui contribue à réduire de façon significative les tensions et les conflits au sein des établissements, mais aussi à aider à préparer la réinsertion des personnes détenues. Cette mesure montre en tout cas que le Gouvernement a à coeur d'améliorer les conditions de la détention.
Par ailleurs, la loi de 2005 pour l'égalité des droits et des chances a permis l'examen des réclamations des personnes handicapées. Pour répondre à la spécificité de ces situations, la loi a créé, à l'article L. 146-13 du code de l'action sociale et des familles, un nouveau mode de saisine du Médiateur, mieux adapté puisqu'il passe par le biais d'une « personne référente [...] désignée au sein de chaque maison départementale des personnes handicapées ». Ce mode de saisine risque cependant d'être générateur d'un coût que l'augmentation des crédits devra absorber.
En second lieu, j'aimerais développer une approche un peu plus nuancée sur la Commission nationale de déontologie de la sécurité, la CNDS.
Comme nos collègues, je salue, avec le respect qu'elle mérite, l'action de son président, M. Pierre Truche, mais avec eux je conviens de la nécessité d'augmenter les crédits de la CNDS, tout en me félicitant de la progression inédite, de 48,10 %, des crédits de personnel, progression d'ailleurs conforme à la recommandation de notre éminent collègue Patrice Gélard.
Mais ces crédits devront donner à la CNDS l'occasion d'améliorer ses méthodes de travail. Certains de nos collègues ont en effet été surpris de rencontrer les plus grandes difficultés pour obtenir des informations, parfois de simples statistiques, de la part de cette institution. Nous souhaitons donc tous que la création de ces postes permette une meilleure collaboration avec les élus.
J'appelle également de mes voeux une plus grande diversité dans les nominations des membres siégeant au sein de cette institution, afin qu'elle demeure en phase avec la réalité de l'action des forces de sécurité intérieure et qu'elle ne se contente pas de débattre en vase clos.
Enfin, j'apporte mon soutien aux amendements identiques de la commission des finances et de la commission des lois, qui tendent à créer au sein de la mission un nouveau programme rassemblant les crédits des sept autorités administratives indépendantes ayant pour mission de défendre et de protéger les droits et les libertés fondamentales.
L'an passé, le Sénat avait envisagé de regrouper l'ensemble des autorités administratives indépendantes dans un même programme, distinct du programme « Coordination du travail gouvernemental ». Le Gouvernement avait indiqué qu'un tel regroupement ne lui semblait pas présenter une cohérence particulière et que joindre des actions distinctes dans un même programme en raison de leur nature plutôt que de la mission qui leur était assignée était contraire à l'esprit de LOLF.
Les amendements qui nous sont aujourd'hui soumis ne sauraient encourir le même reproche étant donné que le regroupement serait limité aux autorités administratives indépendantes concourant à la défense et à la protection des droits et des libertés fondamentales.
Un tel programme serait donc conforme à l'ambition de la LOLF, qui est de regrouper « les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère ».
Fort de ces observations et désireux que ses recommandations soient entendues, le groupe UMP adoptera les crédits de cette mission, tels qu'ils résulteront de nos travaux. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai l'honneur de vous présenter, au nom du Premier ministre, les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Les crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental » pour 2007 s'élèvent à 384 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 358 millions d'euros en crédits de paiement.
Ainsi que cela a déjà été souligné, le périmètre de ce programme a notablement évolué par rapport à 2006 : les moyens consacrés aux actions d'information et à la commission interministérielle de la politique immobilière en ont été sortis et les moyens consacrés à la stratégie et à la prospective y ont été regroupés.
Les crédits pour 2007 doivent permettre aux services rattachés au Premier ministre de l'assister dans un certain nombre de fonctions, et d'abord dans les fonctions d'état-major liées à la direction du Gouvernement. Cela concerne le secrétariat général du Gouvernement, le secrétariat général de la défense nationale ainsi que le secrétariat général des affaires européennes.
Ces crédits doivent ensuite permettre à ces services d'assister le Premier ministre dans des fonctions de stratégie et de prospective. À ce titre, je tiens à vous préciser que le Gouvernement a demandé au Comité d'enquête sur le coût et le rendement des services publics de réfléchir, en lien avec le Centre d'analyse stratégique et le ministère de la réforme de l'État, sur ses modalités de fonctionnement, de saisine et de restitution des travaux.
Enfin, ces crédits doivent permettre à ces services d'assister le Premier ministre dans des fonctions de coordination. Cela concerne la direction générale de l'administration et de la fonction publique.
Les crédits de ce programme sont également destinés au financement des autorités administratives indépendantes et de certains organismes consultatifs.
Les crédits du programme « Fonction publique » pour 2007, qui enregistrent une croissance de plus de 25 %, comprennent 174 millions d'euros en autorisations d'engagement et 173 millions d'euros en crédits de paiement, dont 71 millions d'euros au titre de l'action de formation des fonctionnaires et 103 millions d'euros au titre de l'action sociale interministérielle.
Ce budget est celui de la mise en oeuvre des accords du 25 janvier 2006, signés avec la CFDT, I'UNSA et la CFTC. En effet, ces crédits assurent le financement du protocole d'accord portant sur l'évolution de l'action sociale. Je vous rappelle que ces négociations ont été l'occasion d'une approche globale du pouvoir d'achat, en trois volets.
Le volet social a permis de cibler les agents qui connaissent le plus de contraintes. Il s'agit notamment des plus jeunes et des parents de jeunes enfants, qui subissent la mobilité ou prennent leur premier poste.
Le volet statutaire permettra de renforcer les promotions internes et d'accélérer les déroulements de carrière, éléments qui influent sur le pouvoir d'achat. En effet, si l'élément indiciaire est déterminant, il n'est pas le seul : les progressions de carrière doivent également être prises en compte. Ainsi, lorsqu'un agent de catégorie C passe en catégorie B, il gagne en moyenne 160 euros de plus par mois ; lorsqu'un agent de catégorie B passe en catégorie A, il gagne en moyenne 190 euros de plus par mois. Or nous avons doublé le nombre des promotions internes et mis en place la validation des acquis de l'expérience professionnelle : ce sont autant d'éléments qui permettent d'augmenter de manière significative le pouvoir d'achat.
J'entends bien les critiques sur le fait que seules trois organisations, sur les sept de la fonction publique, ont signé l'accord. Mais cela faisait huit ans qu'aucun accord sur le pouvoir d'achat n'avait été signé dans la fonction publique. Il vaut donc mieux que cet accord ait été signé par trois organisations que par aucune !
Le Gouvernement tient ses engagements. Ainsi les crédits de l'action sociale du programme « Fonction publique » augmentent-ils de plus de 50 % en 2007, après avoir connu une hausse de 25 % en 2006. En deux ans, l'augmentation atteint près de 90 %.
Les crédits de l' « action sociale interministérielle » permettront en premier lieu le financement des mesures du protocole d'accord.
J'ai souhaité ouvrir aux fonctionnaires le bénéfice du chèque emploi service universel, qui, jusqu'à présent, n'était offert qu'aux salariés du secteur privé. Ainsi, un CESU pour la garde des jeunes enfants a été mis en place dès le mois de septembre de cette année. Concrètement, cela représente une participation de 200, 350 ou 600 euros, selon les revenus et les charges de famille. Pour financer cette mesure au profit des agents de l'État, 18 millions d'euros sont prévus dans le projet de budget pour 2007.
Un vaste plan de rénovation des restaurants inter-administratifs est lancé. Il permettra la réhabilitation et la remise aux normes de près de huit restaurants sur l'ensemble du territoire. Pour cela, 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et 9 millions d'euros en crédits de paiement sont prévus pour 2007.
L'aide à l'installation des personnels de l'État a été revalorisée et étendue. Depuis le 1er juillet 2006, son montant est passé de 609,80 à 700 euros en Île-de-France et en Provence-Alpes-Côte d'Azur, ainsi que dans les zones urbaines sensibles. Par ailleurs, une aide d'un montant de 350 euros a été créée dans les régions qui ne bénéficiaient d'aucune aide jusque-là.
À l'instar du Locapass existant dans le secteur privé pour le financement du dépôt de garantie locatif, un « prêt mobilité » sans intérêt d'un montant de 1 000 euros, remboursable en trois ans, sera proposé aux agents primo-arrivants ou à la suite d'une mobilité. Les droits sont ouverts depuis le 1er septembre 2006.
J'ajoute que, parallèlement, j'ai engagé une démarche visant à optimiser le parc existant de logements et de places en crèche au profit des fonctionnaires.
Enfin, une aide au transport sera mise en place à compter du 1er janvier 2007. Elle permettra de financer jusqu'à 50 % du titre de transport public collectif pour le trajet entre le domicile et le lieu de travail.
En second lieu, les crédits de l'« action sociale interministérielle » assurent la poursuite des prestations interministérielles existantes : les chèques vacances, l'aide ménagère à domicile.
J'en viens aux crédits consacrés à l'action « Formation des fonctionnaires ». Ils s'élèvent à 71 millions d'euros pour 2007. Ils permettent le financement de la formation initiale assurée par les écoles interministérielles de formation - l'ENA et les cinq IRA - et de la préparation aux concours administratifs, ainsi que de la formation interministérielle continue, à hauteur de 3,5 millions d'euros. Enfin, ils permettent de financer le soutien à certaines associations et aux organisations syndicales.
Pour conclure, j'ajoute que le budget de la fonction publique ne se limite pas aux 174 millions d'euros du programme « Fonction publique ». Il comprend également l'ensemble des crédits de titre 2 de l'ensemble des trente-quatre missions, soit 119 milliards d'euros.
Ces 119 milliards d'euros permettent le financement des rémunérations d'activité, des cotisations et des contributions sociales, des prestations sociales et des allocations des quelque 2 307 664 agents équivalents temps plein travaillé inscrits au budget de l'État pour 2007.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les points sur lesquels je souhaitais intervenir. Je pense avoir ainsi répondu à vos questions. Si je n'ai pas été suffisamment complet, je me tiens naturellement à votre disposition. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Direction de l'action du Gouvernement |
553 655 652 |
526 866 024 |
Coordination du travail gouvernemental |
380 284 180 |
354 862 269 |
dont titre 2 |
159 933 071 |
159 933 071 |
Fonction publique |
173 371 472 |
172 003 755 |
dont titre 2 |
1 200 000 |
1 200 000 |
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-16 est présenté par MM. Marc et Moreigne, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-83 est présenté par Mme Gourault, au nom de la commission des lois.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. Créer le programme :
Défense et protection des droits et des libertés fondamentales
II. En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Coordination du travail gouvernemental Dont Titre 2 |
47 715 000 25 430 000 |
47 715 000 25 430 000 |
||
Fonction publique Dont titre 2 |
||||
Défense et protection des droits et des libertés fondamentales Dont titre 2 |
47 715 000 25 430 000 |
47 715 000 25 430 000 |
||
TOTAL |
47 715 000 |
47 715 000 |
47 715 000 |
47 715 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. François Marc, rapporteur spécial.
M. François Marc, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet d'identifier dans un programme spécifique, au sein de la mission « Direction de l'action du gouvernement », les crédits de plusieurs autorités administratives indépendantes qui concourent à la défense et à la protection des droits et des libertés fondamentales.
Dans la maquette du présent projet de loi de finances, ces dépenses sont inscrites dans le programme « Coordination du travail gouvernemental » alors qu'elles ne relèvent manifestement pas des fonctions d'état-major de l'action gouvernementale.
En revanche, le programme qu'il est proposé de créer serait conforme à la définition posée par l'article 7 de la LOLF : « Un programme regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auquel sont associés des objectifs précis, définis en fonction de finalités d'intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l'objet d'une évaluation. »
Le présent amendement s'inscrit dans le cadre d'une démarche commune menée avec notre collègue Jacqueline Gourault, rapportrice pour avis au nom de la commission des lois, dans la pleine continuité des propositions faites par notre collègue Patrice Gélard dans son rapport d'information de juin 2006 sur les autorités administratives indépendantes, fait au nom de l'office parlementaire d'évaluation de la législation.
Seraient donc intégrés dans le programme « Défense et protection des droits et des libertés fondamentales » les crédits des actions et sous-actions suivantes du programme « Coordination du travail gouvernemental » : l'action « Instances indépendantes », ainsi que les sous-actions « Commission d'accès aux documents administratifs » et « Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé » ; l'action « Médiateur de la République » ; l'action « Défense et protection des libertés », comprenant les sous-actions « Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité », « Commission consultative du secret de la défense nationale » et « Commission nationale de déontologie de la sécurité », enfin, l'action « Conseil supérieur de l'audiovisuel ».
Par conséquent, le nouveau programme « Défense et protection des droits et des libertés fondamentales » comprendrait trois actions : « Médiateur de la République », « Conseil supérieur de l'audiovisuel » et « Protection des libertés fondamentales ».
Ce transfert se ferait, pour chaque action et sous-action, à budget constant.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-83.
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis. J'ajouterai simplement à l'excellente présentation qui vient d'être faite par notre collègue François Marc que cet amendement reprend une démarche qui avait été inaugurée l'an dernier par la commission des lois à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 2006 et qu'il est en lien avec l'observation que j'ai faite lorsque j'ai présenté le rapport pour avis de la commission des lois sur la mission « Pouvoirs publics » au sujet de la CNIL.
La CNIL ne peut évidemment pas être intégrée dans le programme que tend à créer cet amendement puisqu'elle ne figure pas dans la mission que nous examinons. Le Parlement n'a pas en effet le pouvoir de déplacer une action ou un programme d'une mission à une autre.
La commission des lois est très attachée à cet amendement, qui est tout à fait conforme à l'esprit de la LOLF, car il permet d'identifier clairement les crédits des autorités administratives indépendantes que nous avons évoquées et qui exercent une mission spécifique particulièrement importante.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Jacob, ministre. L'architecture du projet de loi de finances n'a pas retenu la constitution d'un programme propre aux seules autorités administratives indépendantes puisque la nomenclature raisonne par mission et non pas en fonction de la nature juridique de l'organisme. C'est pour cette raison que les autorités administratives exerçant une mission de contrôle et de régulation sont dans le programme « Coordination du travail gouvernemental », au sein des différentes actions concernées.
Néanmoins, sensible aux préoccupations des deux commissions et ayant été attentif à l'amendement de votre commission des lois adopté l'année dernière, le Premier ministre a proposé de confier une mission à l'inspection générale des finances afin d'étudier les rapports entre les autorités administratives et les responsables du programme dont elles relèvent. Des discussions sont en cours de façon à définir les modalités de cette mission.
Je vous propose donc, messieurs les rapporteurs, de retirer vos amendements en attendant les résultats de cette mission.
M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-16 est-il maintenu ?
M. François Marc, rapporteur spécial. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre.
Dans l'esprit de la commission des finances, la volonté de transparence exprimée par cet amendement s'inscrit bien dans la dynamique de la loi organique relative aux lois de finances visant à offrir le maximum de précisions et d'informations au Parlement. L'opération porte, de surcroît, sur 47 millions d'euros, ce qui n'est pas négligeable.
C'est la raison pour laquelle la commission des finances maintient son amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-83 est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis. J'ai bien noté que le Gouvernement était sensible à ce qui avait été dit l'an dernier et se penchait sur la question.
Notre amendement ne remet absolument pas en cause les crédits de la mission que nous examinons, et nous sommes tout à fait dans l'esprit de la LOLF en proposant de regrouper certaines autorités administratives indépendantes dans un programme spécifique.
J'ajoute que nous ne modifions pas d'un centime les crédits consacrés à chacune de ces autorités par le projet de loi de finances établi par le Gouvernement.
En conséquence, la commission des lois maintient également son amendement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-16 et II - 83.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », modifiés.
M. le président. J'appelle en discussion l'article 47 bis, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Direction de l'action du Gouvernement
Article 47 bis
Le Gouvernement présente, en annexe générale au projet de loi de finances de l'année, un rapport annuel sur l'état de la fonction publique comportant, en particulier, un état des effectifs des agents publics territoriaux, hospitaliers et de l'État. Ce rapport comporte une information actualisée sur les politiques de gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences au sein des administrations de l'État. - (Adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Budget annexe des publications officielles et information administrative
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Budget annexe des publications officielles et information administrative » (et article 62 ter).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Vera, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le peu de temps dont je dispose, je me limiterai à la formulation de mes principales observations
Dotée de 196,9 millions d'euros en crédits de paiement et de 1 032 équivalents temps plein travaillé, la mission « Publications officielles et information administrative » est une mission nouvelle, issue du rapprochement de la direction des Journaux officiels et de la direction de la Documentation française.
Ce rapprochement répond à plusieurs nécessités : tout d'abord, mettre en conformité avec la LOLF le budget annexe des Journaux officiels, qui constituait une mission « mono-programme » en 2006 ; ensuite, rationaliser les moyens de l'administration ; enfin, optimiser l'offre de services aux usagers et aux acteurs de la vie publique en rassemblant les potentialités de chacune des directions en matière de diffusion, d'édition, d'impression et d'information publique. Ce rapprochement a été amorcé dès 2005 et des collaborations se sont développées dans les secteurs de l'impression et de la diffusion.
Les crédits du premier programme, « Accès au droit, publications officielles et annonces légales », correspondent aux crédits du budget annexe des Journaux officiels, dont la situation financière est bonne, avec un excédent d'exploitation qui atteint, fin 2005, 56,5 millions d'euros. Les recettes attendues sont de 182,85 millions d'euros, en hausse de 7,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2006.
Les crédits du programme, 148,7 millions d'euros, sont en baisse de 15 % par rapport à 2006, reflétant la diminution des besoins de fonctionnement, due en particulier aux conséquences de la politique de dématérialisation.
Le budget annexe des Journaux officiels est fortement marqué par les réductions d'effectifs, qui résultent de la mise en oeuvre des nouvelles technologies. Le plan d'accompagnement social mis en oeuvre pour la presse quotidienne parisienne sera appliqué en 2007 et devrait toucher plus d'un quart des effectifs actuels de la direction des Journaux officiels, soit 175 agents âgés de cinquante-cinq ans et plus, et près de la moitié des 350 agents de la SACI-JO sur trois ans.
À ce sujet, je tiens à faire part de deux remarques.
La mise en place des plans sociaux doit se faire dans le double souci de préserver l'intérêt des personnels et de maintenir la qualité et la pérennisation des missions de service public des Journaux officiels.
Par ailleurs, l'intégration de nouveaux travaux confiés par la Documentation française et la recherche de nouvelles coopérations doivent être soutenues afin de maintenir les effectifs prévus par les plans sociaux et d'assurer ainsi l'avenir des personnels dont le savoir-faire constitue une garantie de qualité et de fiabilité. Je reprendrais volontiers, à ce sujet, les propos des représentants des personnels que j'ai rencontrés : Il est absolument nécessaire de « faire droit aux inquiétudes des salariés qui restent ».
Enfin, la mesure de la performance du programme est jugée globalement satisfaisante, même si des retards informatiques n'ont pas permis d'établir l'effort de productivité de la direction des Journaux officiels.
Le second programme, « Édition publique et information administrative », recouvre les activités de la Documentation française et des Centres interministériels du renseignement administratif, les CIRA.
Je tiens à saluer le rattachement des CIRA à la Documentation française depuis le mois de mai 2006, rattachement qui permet la création d'un pôle unique multicanal des services d'information, ce qui facilitera la complémentarité entre les services offerts aux usagers à travers la diffusion sur le réseau Internet, les réponses aux messages électroniques et le renseignement téléphonique.
Après le fort endettement du compte de commerce, les efforts de la Documentation française ont permis de redresser la situation financière. Les recettes commerciales, de 16,5 millions d'euros, sont en hausse de 2,3 % par rapport à l'année 2005, avec un excédent de 330 000 euros de recettes par rapport aux dépenses.
Les crédits demandés pour 2007 s'élèvent à 48,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, et le plafond d'emploi atteint 415 équivalents temps plein travaillé.
La mesure de la performance du programme est satisfaisante, mis à part les prévisions de la performance économique de la Documentation française, mesurée à travers le résultat annuel d'exploitation, qui n'a pas une réelle portée compte tenu de l'évolution du système comptable, le compte de commerce devant être soldé au 31 décembre 2006.
Chers collègues, la majorité de la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits proposés pour la présente mission.
M. le président. Étant rappelé que le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir sur ces crédits, je donne parole est à M. le ministre.
M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique. Ainsi que vous l'avez signalé, monsieur le rapporteur spécial, les crédits de la mission s'élèvent à 190 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 197 millions d'euros en crédits de paiement.
La mission, qui intègre cette année les moyens consacrés à la Documentation française et au renseignement administratif, comporte deux programmes : l'un est relatif à l'accès au droit, avec les publications officielles et les annonces légales ; l'autre concerne l'édition publique et l'information administrative.
J'ajoute qu'un accord social concernant les départs à la retraite à cinquante-cinq ans a été conclu au mois d'octobre. Cet accord répond aux observations que vous avez formulées, monsieur le rapporteur spécial, en nous faisant part des préoccupations exprimées par les agents que vous aviez rencontrés.
Telles sont les observations que je souhaitais ajouter à la présentation qu'a faite le rapporteur spécial.
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Budget annexe des publications officielles et information administrative » figurant à l'état C.
État C
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Publications officielles et information administrative |
190 231 704 |
196 956 704 |
Accès au droit, publications officielles et annonces légales |
142 016 704 |
148 741 704 |
dont charges de personnel |
48 151 250 |
48 151 250 |
Édition publique et information administrative |
48 215 000 |
48 215 000 |
dont charges de personnel |
21 165 000 |
21 165 000 |
Augmentation du fonds de roulement (ligne supprimée) |
M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Budget annexe des publications officielles et information administrative » figurant à l'état C.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion l'article 62 ter, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Budget annexe des publications officielles et information administrative ».
Publications officielles et information administrative
Article 62 ter
Est autorisée, à compter du 1er janvier 2007, la perception des rémunérations de services rendus par la direction de la Documentation française instituées par le décret n° 2006-1208 du 3 octobre 2006 relatif à la rémunération des services rendus par la Documentation française. - (Adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-72, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. Christian Jacob, ministre. Une disposition relative à la rémunération des services rendus par la direction de la Documentation française a été introduite en seconde partie du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale.
S'agissant de recettes perçues par l'État en 2007, l'article trouve davantage sa place en première partie. Sur proposition du ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, le Sénat a bien voulu intégrer cette disposition au sein de la première partie. C'est donc par coordination que je vous propose d'adopter cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Vera, rapporteur spécial. Favorable.
M. le président. En conséquence, l'article 62 ter est supprimé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi concernant le budget annexe des publications officielles et information administrative.
Écologie et développement durable
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Écologie et développement durable » (et article 48).
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant son examen par l'Assemblée nationale, la mission ministérielle « Écologie et développement durable » rassemblait 698 millions d'euros en autorisations d'engagement et 637 millions d'euros en crédits de paiement, répartis en trois programmes.
Dans le cadre de la seconde délibération demandée par le Gouvernement, l'Assemblée nationale a globalement réduit ces crédits de 1,7 million d'euros.
Cette présentation ne rend toutefois que très partiellement compte de l'effort budgétaire consacré à la protection de l'environnement.
En effet, la mission « Écologie et développement durable » ne représente que le quart de l'ensemble des crédits des différentes missions consacrés à l'environnement et, sur la base des données de l'année 2004 - les dernières disponibles -, seulement 1,3 % de la dépense nationale liée à l'environnement.
En outre, le ministère de l'écologie et du développement durable présente la particularité de s'appuyer sur de très nombreux opérateurs, dont les effectifs sont presque deux fois supérieurs à ceux prévus par le plafond d'emplois du ministère.
Enfin, la fiscalité joue un rôle de plus en plus important, que ce soit par le biais de taxes nouvelles ou de dépenses fiscales. On constate ainsi que les dépenses fiscales contribuant directement ou indirectement à cette mission représentent presque trois fois les crédits de la mission.
Dans la mesure où chacun pourra trouver dans le rapport écrit des éléments précis relatifs aux différents programmes, je me contenterai de faire sept observations, étant entendu que d'autres thèmes seront abordés à l'occasion de l'examen des amendements.
Première observation : comme l'an dernier, cette mission est marquée par des opérations de débudgétisation.
Cette débudgétisation passe tout d'abord par l'affectation de taxes à certains établissements publics sous tutelle. L'ADEME, Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage s'étaient déjà vu affecter le produit de certaines taxes l'an passé. Ils en reçoivent à nouveau cette année.
L'ADEME devrait recevoir le produit d'une taxe sur le charbon, en application d'une disposition instituée par l'article 23 du collectif budgétaire. J'observe que l'agence a intégré cette somme à hauteur de 20 millions d'euros dans son budget prévisionnel. Or, selon les dernières données de la direction du budget, cette taxe ne devrait pas rapporter plus de 5 millions d'euros. Je souhaite donc, madame la ministre, que vous nous précisiez quelles en seront les conséquences sur les actions menées par l'ADEME, la situation budgétaire de cette agence n'apparaissant pas claire.
Le Conservatoire du littoral recevra désormais l'intégralité du produit du droit de francisation et de navigation, soit 7 millions d'euros supplémentaires.
L'Office national de la chasse et de la faune sauvage voit les redevances cynégétiques qui lui sont affectées réévaluées par l'article 48 du présent projet de loi de finances.
Enfin, le Conseil supérieur de la pêche recevra 23 millions d'euros provenant du prélèvement de solidarité pour l'eau. L'intégralité de ce prélèvement opéré sur les agences de l'eau devrait à terme lui revenir lorsque sa transformation en Office national de l'eau et des milieux aquatiques, le fameux ONEMA, sera opérée.
Ces affectations de taxes, qui sont contraires au principe d'universalité budgétaire, sont largement perçues par les établissements publics comme un moyen d'échapper aux opérations de régulation budgétaire menées en cours d'année. La commission des finances a donc exprimé des réserves sur ce procédé, qui permet de contourner la norme de dépenses.
Par ailleurs, le Fonds de prévention des risques naturels majeurs est de plus en plus mis à contribution afin de compléter les actions menées par le ministère au titre de cette mission. Les fonds de concours versés représentent ainsi le double des crédits inscrits à l'action « Prévention des risques naturels ». Or il faut avoir présent à l'esprit que, à force d'accroître les possibilités de dépenses de ce fonds, sa trésorerie sera tendue dès la fin de 2007 et qu'il faudra ensuite augmenter ses ressources. Je voudrais souligner que les dépenses devraient atteindre 95 millions d'euros en 2006, soit un montant supérieur aux dépenses constatées sur quatre années, à savoir de 2002 à 2005, où elles s'élevaient à 73 millions d'euros.
Compte tenu de ces éléments, on peut dire que l'analyse de la mission « Écologie et développement durable » demande de porter autant d'attention à ce qui ne s'y trouve pas, ou ne s'y trouve plus, qu'à ce qui reste dans son champ strict. (Sourires.) J'espère, madame la ministre, que vous ne prendrez pas ombrage de ce petit trait d'humour.
Deuxième observation : des précisions doivent être apportées s'agissant des engagements pris par le ministère.
En effet, pour le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions », le projet annuel de performances, fait apparaître une différence de plus de 818 millions d'euros entre les crédits de paiement ouverts en 2006 et 2007 au titre de ce programme et les crédits de paiement nécessaires pour faire face aux engagements pris antérieurement, dont 580 millions d'euros au titre de l'ADEME. Même s'il tempère ces données, il me paraît important de souligner la nécessité de mieux suivre à l'avenir les engagements pris. Cette remarque vaut pour l'ensemble des programmes.
Il est essentiel que le ministère porte une attention particulière à ce sujet afin de pouvoir disposer d'une vision claire des marges de manoeuvre dont il dispose. Je souhaite donc, madame la ministre, que vous nous apportiez des précisions sur les engagements pris non couverts par les crédits de paiement et que vous nous éclairiez sur le montant des dettes proprement dites de votre ministère.
Ma troisième observation porte sur l'évolution des effectifs de l'inspection des installations classées.
Comme l'an passé, je regrette que le plan de renforcement des effectifs annoncé à la suite de la catastrophe de l'usine AZF n'ait pas été respecté. Au total, si l'on tient compte des 10 emplois supplémentaires accordés en 2007, seuls 206 postes - sur les 400 annoncés - auront vu le jour sur la période 2004-2007, dont 146 par redéploiement.
Ma quatrième observation concerne la politique de l'eau.
La conduite des programmes de la mission a été modifiée : la secrétaire générale du ministère sera désormais responsable de deux des trois programmes, et ce en raison des tensions internes liées à l'absence de programme traitant spécifiquement de la politique de l'eau, ce qui se heurte à la structure actuelle du ministère.
Au-delà de cet aspect « administratif » se pose la question, dans le cadre de la LOLF, de la mise en valeur des actions menées par l'État s'agissant de l'eau. Compte tenu de la faiblesse des crédits demeurant sur cette mission une fois que l'ONEMA sera mis en place, je pense qu'un document de politique transversale serait préférable à un programme, qui conduirait à remettre en cause la structure de cette mission.
Madame la ministre, envisagez-vous la création d'un document de politique transversale ? Quelles sont vos réflexions sur la structure de votre ministère ?
Je souhaite également que vous nous éclairiez sur le calendrier de mise en oeuvre du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, dont l'examen en deuxième lecture à l'Assemblée nationale est prévu pour la mi-décembre, ainsi que sur la préparation des décrets et autres textes d'application. Ce projet de loi a en effet fait l'objet de longues négociations.
Ma cinquième observation a trait aux contentieux auxquels le ministère doit faire face.
J'observe tout d'abord que la situation s'est améliorée du point de vue des contentieux communautaires. Je vous félicite de cette évolution. Pour ma part, j'avais apporté ma pierre aux nombreuses réflexions conduites au sein des ministères et devant la représentation permanente. Vous avez particulièrement mis l'accent sur la transposition de la directive communautaire et apporté les moyens adéquats. L'effort doit néanmoins se poursuivre dans la mise en oeuvre de ces textes.
En revanche, le coût des contentieux nationaux progresse fortement. On constate un report de charges de 10,4 millions d'euros de 2006 vers 2007, pour des paiements de 2,15 millions d'euros en 2006. L'émergence de notions comme la responsabilité sans faute de l'État peut représenter un enjeu budgétaire susceptible de créer des inquiétudes financières.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous préciser comment vous entendez maîtriser les contentieux nationaux ?
Ma sixième observation touche à l'impact budgétaire de la loi du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels.
La subvention accordée aux parcs nationaux augmentera fortement en 2007, puisqu'elle passera de 32,8 millions d'euros à 47,1 millions d'euros. Cela devrait notamment permettre de créer deux nouveaux parcs, l'un à la Réunion et l'autre en Guyane - et je connais votre engagement personnel en ce domaine -, ainsi que l'établissement public « Parcs nationaux de France ». Cette dépense est appelée à croître puisque le ministère évalue le budget des parcs nationaux à 65 millions d'euros en 2009.
Par ailleurs, le projet de loi de finances intègre la création d'une Agence des aires marines, qui se voit attribuer une subvention de 5,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 4,2 millions d'euros en crédits de paiement. Même si je ne suis pas élue d'un territoire baigné par la mer, je dois dire que je suis particulièrement heureuse de la création d'une telle structure spécialement chargée de gérer les zones maritimes.
Cette dépense est également appelée à croître très fortement, puisque le budget de l'Agence est évalué, à terme, à 40 millions d'euros par an pour dix parcs naturels marins.
Ma dernière observation concerne la gestion des effectifs.
En effet, le ministère de l'écologie et du développement durable revêt, ainsi que je l'avais déjà dit l'an dernier, un caractère tout à fait particulier dans la mesure où il ne dispose pas de corps propres et transfère, en gestion, les emplois et les crédits inscrits à son budget vers d'autres départements ministériels. Ainsi n'exécute-t-il pas lui-même la dépense et ne connaît-il pas la consommation réelle de ses crédits de personnel, situation qui n'est pas satisfaisante.
Toutefois, deux éléments méritent d'être soulignés et salués : d'une part, des expérimentations sont en cours afin de permettre au ministère de l'écologie et du développement durable, par le biais de délégations de gestion, de mieux maîtriser la consommation des crédits de personnel, ce qui est très positif ; d'autre part, la fusion des DRIRE, les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, et des DIREN, les directions régionales de l'environnement, sera expérimentée dans cinq régions, ce qui traduit un réel effort de rationalisation de l'action des services de l'État.
Ces évolutions sont tout à fait bénéfiques et je ne puis que vous encourager, madame la ministre, à poursuivre ce travail qui est très apprécié sur le terrain.
Sous réserve de ces remarques et des amendements qu'elle présentera, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits de la mission « Écologie et développement durable ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis.
M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après l'excellente intervention de notre collègue Fabienne Keller, que j'ai écoutée avec beaucoup d'attention, je crains de me livrer à quelques redites, mais je crois néanmoins devoir aborder certains éléments importants d'un rapport qui est plutôt consacré à ce que j'appellerai - pardonnez-moi l'expression, madame la ministre - l'« environnement de surface ».
La hausse des crédits alloués au ministère de l'écologie et du développement durable montre bien, comme l'a dit Fabienne Keller, la force de l'engagement du Gouvernement en matière de protection de l'environnement. Il se donne ainsi les moyens de mettre en oeuvre les politiques ambitieuses qu'il a souhaité promouvoir cette année.
À cet égard, je citerai, après ma collègue rapporteur spécial, la création de nouveaux parcs nationaux et de parcs naturels marins, dont les crédits sont en hausse de 38 %. La commission des affaires culturelles se réjouit également que le programme « Gestion des milieux et biodiversité », qui comprend les actions destinées à la protection du patrimoine naturel, bénéficie d'un budget en croissance de plus de 20 %.
Cependant, des inquiétudes subsistent.
S'agissant des réserves naturelles, le ministère prend l'initiative d'en créer de nouvelles, étend celles qui existent déjà, mais, paradoxalement, n'augmente pas les crédits ou ne le fait que très faiblement. Dans ce domaine, madame la ministre, il me semblerait utile que le ministère se dote d'un plan prospectif destiné à établir l'orientation qu'il souhaite donner à sa politique de création et de soutien des réserves naturelles. J'insiste sur cette notion de soutien, car c'est le soutien qui indique le chemin !
Par ailleurs, l'article 25 du présent projet de loi de finances, qui tend à affecter l'intégralité du droit de francisation et de navigation au Conservatoire du littoral, contre 80 % aujourd'hui, va dans le bon sens. Cela étant dit, son assiette, modifiée par le projet de loi de finances rectificative pour 2005 a été mal calibrée et nous espérons que le prochain collectif budgétaire permettra de remédier à cet état de choses.
Enfin, l'initiative prise par le Gouvernement d'affecter à l'ADEME la taxe intérieure de consommation sur le charbon constitue également une bonne nouvelle, même si l'on peut s'interroger sur la réalité de la somme de 20 millions d'euros annoncée initialement par le Gouvernement. Cette affectation était d'autant plus nécessaire que l'agence connaît un déficit de crédits de paiement évalué, en cumulé, à 70 millions d'euros.
Cette précision m'amène à évoquer un sujet préoccupant qu'a également abordé Fabienne Keller : je veux parler de la dette du ministère. Celle-ci s'élèverait, s'agissant des factures impayées, à 25 millions d'euros. Or, selon les informations communiquées par vos services, madame la ministre, les engagements pris par les ministres précédents et non respectés, c'est-à-dire l'ensemble des autorisations d'engagement qui n'ont pas trouvé leurs crédits de paiement, atteindraient 900 millions d'euros, soit un montant nettement supérieur à l'ensemble des crédits attribués à la mission. Il serait nécessaire, me semble-t-il, que le ministère soit plus transparent sur cette question de la dette, qui pourrait utilement faire l'objet d'une information détaillée dans le projet annuel de performance.
Autre sujet de réflexion : l'impact prévisible du développement de l'énergie éolienne sur la protection des paysages.
Les accords de Kyoto et une directive européenne nous imposent de faire passer de 14 % à 21 % la proportion de notre électricité provenant des énergies renouvelables. Cet effort de rattrapage reposera presque exclusivement, en France, sur le développement de l'éolien.
La croissance attendue du parc éolien est impressionnante : 1 300 mégawatts aujourd'hui, 13 500 en 2010 et 17 000 en 2015, si l'on se réfère aux objectifs officiels. Il s'agit là d'un changement d'échelle dont la réglementation doit tenir compte, tant il est vrai que les éoliennes sont de plus en plus puissantes et imposantes.
Contrairement à ce que donne à entendre l'expression trompeuse de « fermes éoliennes », nous sommes en présence de véritables installations industrielles qu'il faut traiter comme telles. Or leur encadrement juridique me paraît insuffisant. C'est ainsi que les nuisances sonores qu'elles engendrent continuent de relever du droit commun des bruits de voisinage, ce dont l'Académie de médecine s'étonne dans un récent rapport, recommandant, à titre conservatoire, un éloignement de ces structures d'au moins 1 500 mètres des habitations.
Le code de l'environnement rend le promoteur de l'éolienne responsable de son éventuel démantèlement. Toutefois, le décret qui devait préciser les modalités de constitution des garanties financières nécessaires n'est toujours pas paru. Il faut combler cette lacune, madame la ministre, si l'on veut éviter, comme c'est le cas en Espagne, la présence de sites d'éoliennes abandonnés.
Enfin, je me réjouis que la loi de programme du 13 juillet 2005 ait réservé le bénéfice de l'obligation d'achat et du tarif garanti aux éoliennes situées dans des « zones de développement de l'éolien », les ZDE, qui doivent prendre en compte la protection des paysages, des monuments et des sites. Afin que cette exigence soit respectée en pratique, les services déconcentrés de la culture et de l'écologie devront être associés étroitement à ceux de l'industrie, car les ZDE sont susceptibles d'affecter les dispositifs de protection dont ils ont la charge : périmètres des monuments historiques, secteurs protégés, parcs nationaux, réserves naturelles, sites classés.
En résumé, si nous ne sommes pas hostiles par principe au développement des éoliennes, il convient cependant, selon nous, de se montrer attentif au choix de leur implantation, en privilégiant des paysages qui soient à la mesure de ces hautes machines.
Telles sont, madame la ministre, les quelques observations que je souhaitais faire au nom de la commission des affaires culturelles qui s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie et développement durable ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, rapporteur pour avis.
M. Jean Bizet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre mes chers collègues, s'agissant des crédits de la mission « Écologie et développement durable », je partage l'analyse de ma collègue Fabienne Keller. J'ajouterai simplement que les choix opérés en faveur de la protection de la biodiversité à travers la politique des parcs nationaux et le réseau Natura 2000 ont reçu l'aval de notre commission des affaires économiques qui a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.
Dans le temps qui m'est imparti, je souhaite insister sur l'importance des enjeux internationaux en matière de développement durable et de protection de l'environnement, en illustrant mon propos par l'exemple de la politique de lutte contre le changement climatique.
Celle-ci s'inscrit en effet pleinement dans une démarche de développement durable et les conclusions du rapport Stern, établi à la demande du gouvernement britannique, sont, à cet égard, sans appel, évaluant le coût économique du « laisser-faire » au niveau mondial.
Il est donc essentiel d'appliquer les instruments mis en place et même d'aller au-delà, à l'échelle tant internationale qu'européenne et nationale.
Ainsi en est-il du protocole de Kyoto, signé en 1997 et entré en vigueur le 1er février 2005, qui met en place un cadre ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur la période 2008- 2012.
Il importe de préparer, au niveau politique, les négociations pour la période ultérieure. En outre, l'engagement de la communauté internationale, lors du sommet de Nairobi, d'entamer le processus de révision du protocole de Kyoto en 2008 constitue un signal important quant à la pérennité du dispositif.
Les pays ayant ratifié le protocole de Kyoto, y compris les pays en développement, ont reconnu la nécessité de diviser au moins par deux les émissions de gaz à effet de serre à l'échelon mondial. Cette reconnaissance partagée représente, de mon point de vue, une avancée importante en vue de la mise en place d'objectifs pour l'après-2012.
J'ajoute que la conférence a pris date pour une revue complète du protocole de Kyoto en 2008, alors que l'Union européenne sera sous présidence française ; notre mobilisation et notre force de conviction seront alors déterminantes.
Cette perspective apporte un éclairage particulier sur les négociations en cours avec la Commission européenne à propos de notre plan national d'allocations de quotas dans le cadre du système européen des quotas pour la période 2008 - 2012.
La presse s'est fait l'écho du refus opposé au projet transmis par le Gouvernement en septembre dernier, ce qui vous a conduit, madame la ministre, à le retirer pour le renégocier avec l'ensemble des acteurs économiques et diminuer sans doute le volume des quotas alloués.
Il me paraît essentiel de tout mettre en oeuvre pour que le marché européen des permis d'émission soit réellement incitatif, au risque, sinon, de discréditer notre position, tout au moins de conforter les pays opposés au protocole de Kyoto, à savoir les États-unis et l'Australie, voire le Canada, tentés par un revirement. À cet égard, je ne puis que déplorer la dérive à laquelle ces pays sont entraînés ; je pense notamment à l'augmentation, en l'espace de dix ans, de plus de 26 % de leur tonnage en CO2. Comment, dans ces conditions, pourrions- nous convaincre des pays émergents et gros émetteurs de CO2 tels que la Chine, l'Inde ou encore le Brésil d'accepter des engagements de réduction ?
Or il est certain que le marché d'échanges de quotas ne saurait fonctionner si l'offre excède largement la demande, ce qui s'est produit durant la première période.
À l'inverse, il convient d'être attentif, mais je sais que vous l'êtes, madame la ministre, à la nécessaire prise en compte de la croissance économique et de la compétitivité des entreprises européennes.
La lutte contre le changement climatique doit se traduire non pas par moins de croissance mais par plus de science et de technologie, afin d'aider les entreprises à innover en matière d'efficacité énergétique. Or il me semble que la France dispose à cet égard de nombreux atouts et que lui sont ouvertes des perspectives fort encourageantes.
Dans ce contexte, la proposition du comité interministériel du développement quant à la mise en place d'une « taxe carbone » sur les importations en provenance des pays refusant de s'engager dans le protocole de Kyoto au-delà de 2012 prend tout son sens.
Bien entendu, cette disposition doit être examinée à l'aune des exigences de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, mais, pour ma part, j'ai toujours été convaincu de la nécessité d'intégrer le respect de l'environnement dans les règles du commerce international.
De la même façon, il convient de soutenir la proposition de la Commission européenne d'intégrer le secteur des transports dans le système d'échanges européen afin de ne pas faire porter la charge exclusive de l'effort sur le secteur industriel qui, pour ce qui est de la France, a déjà réduit ses émissions de CO2 de plus de 21 % entre 1990 et 2002.
Vous avez également raison, madame la ministre, de défendre la spécificité française qui tient à la taille notre parc nucléaire ; celui-ci nous permet d'émettre moins de gaz à effet de serre que d'autres pays.
Il faut également mettre en avant le contenu du plan national sur le climat en matière de transports et d'habitat.
Pour bénéficier d'une meilleure lisibilité de cette politique, il est indispensable, dans le cadre de la LOLF, de mettre en place un document de politique transversale sur la politique du climat et j'avoue être un peu déçu de ne rien trouver à ce sujet dans le projet de loi de finances rectificative pour 2006, contrairement aux engagements que vous aviez pris, madame la ministre. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?
Tout ce qui vient d'être dit ne fait montrer un peu plus combien il est nécessaire de mettre en place une véritable gouvernance mondiale en matière d'environnement, et je souscris totalement à la volonté du Président de la République d'avancer dans la voie de cette réforme institutionnelle.
Il faut tout à la fois mettre de la cohérence dans la multiplicité des accords internationaux signés en matière d'environnement et se donner les moyens d'établir un corpus de règles en matière de respect de l'environnement par tous les pays.
Le projet de transformation du programme des Nations unies pour l'environnement doit nous mobiliser. Sur ce point, j'en suis convaincu, chacun saura prendre ses responsabilités. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Blanc. Très bien !
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 44 minutes ;
Groupe socialiste, 31 minutes ;
Groupe Union centriste-UDF, 17 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 15 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 13 minutes.
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose de trente-cinq minutes pour intervenir.
La parole est à M. Paul Raoult.
M. Paul Raoult. Madame la ministre, le budget de l'écologie et du développement durable que vous nous présentez peut être apprécié de diverses manières, selon les critères que l'on utilise.
Il est vrai que, globalement, ce budget n'est pas mauvais. On a vu pire dans le passé ! Dans un contexte de fortes contraintes, vous avez fait plus que sauver les meubles puisque votre budget est en augmentation.
Avouez toutefois qu'il est difficile de se faire une idée exacte et précise de votre budget.
D'abord, on y trouve beaucoup de taxes affectées, ce qui a certes pour vertu de faire échapper les budgets considérés à la régulation budgétaire en cours d'année, mais a l'inconvénient de ne pas garantir un niveau de recettes suffisant pour couvrir toutes les dépenses de l'exercice, le ministère étant conduit, dans le cas où le produit de la taxe considérée n'atteint pas le niveau escompté, à apporter le complément nécessaire.
Ensuite, de nombreuses politiques environnementales étant transversales, on peut les retrouver dans d'autres budgets, tels ceux de l'agriculture ou de l'équipement ; c'est, par exemple, le cas des crédits affectés à l'aménagement de la Loire.
Enfin, d'autres budgets, complètement autonomes, sont dotés de recettes propres. C'est le cas de celui des agences de l'eau, qui représente quand même 2,3 milliards d'euros, dont 1, 68 millions de recettes de redevance.
Je voudrais insister sur un aspect souvent négligé : les diverses exonérations fiscales ou crédits d'impôt, qui peuvent représenter des montants de non-recettes très importants ; on en a une illustration particulièrement frappante dans le chapitre des incitations aux économies d'énergie, qui est bien une politique à caractère environnemental.
En outre, il arrive que les crédits de l'État aient un effet levier ou multiplicateur sur les crédits environnementaux des collectivités territoriales, lesquels s'élèvent à 28, 5 milliards d'euros.
Avant tout développement ultérieur, je me dois, madame la ministre, d'exprimer mon courroux, sinon mon indignation, devant le nouveau report de la deuxième lecture du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques à l'Assemblée nationale. Faut-il y voir un manque de considération du Premier ministre à l'égard de la politique de l'eau ? En ce cas, c'est inacceptable, et c'est méconnaître les enjeux que recouvre ce texte, certes imparfait par certains côtés. Ou bien faut-il comprendre que la majorité actuelle, incapable de se mettre d'accord sur le fond de ce texte, ne veut pas étaler ses divisions à la veille des grands rendez-vous électoraux ?
Au-delà de ces hypothèses, je ne peux que rappeler l'attente forte de tous les partenaires liés à l'eau, qu'il s'agisse des pêcheurs, qui attendent la transformation du Conseil supérieur de la pêche en Agence nationale de l'eau et des milieux aquatiques, ou des élus des agences de l'eau, dont je suis. Comment ne pas comprendre l'impatience du président de la commission « programmes », par exemple, qui doit pouvoir bâtir un neuvième programme 2007-2013 sur des bases et des recettes solides et pérennes, et non incertaines comme aujourd'hui ?
Pour revenir à votre budget, on peut rappeler que, dans la présentation actuelle, la politique de l'eau n'est pas très lisible et que des réformes de la LOLF sont nécessaires à ce propos ; nous l'avions déjà dit l'année dernière.
Les indicateurs de performances ne me paraissent pas très pertinents. Pourtant, les enjeux sont importants ; je ne prends que l'exemple des stations d'épuration, qui doivent, pour celles qui existent, être mises aux normes pour le traitement de l'azote et du phosphore ou, pour celles qui n'existent pas encore, être construites dans les délais les plus brefs, sous peine de voir la France subir des condamnations financières importantes, très dommageables pour notre budget.
L'objectif final est bien d'avoir un réseau de rivières en état écologique pour 2015.
Cela dit, on peut se réjouir de l'effort que vous avez accompli pour mettre le droit français en conformité avec le droit communautaire. On constate, en revanche, une augmentation des contentieux nationaux qui risquent de peser lourdement sur le budget.
Manifestement, un gros effort est fait en direction des parcs nationaux et de leur établissement public, des parcs naturels marins et de l'agence des aires marines. Il est vrai qu'il y a, là aussi, une attente très forte, après le vote de la nouvelle loi sur les parcs nationaux et régionaux puisqu'on passe de 34,2 millions à 49,1 millions d'euros en autorisations d'engagements et de 32,8 millions à 47,1 millions d'euros en crédits de paiement. Pour les parcs nationaux, je pense qu'il sera nécessaire d'inscrire 65 millions d'euros pour 2008-2009.
De même, ont été pris en compte les besoins des 157 réserves naturelles et l'action Natura 2000. Là aussi, il faut ajuster les moyens aux objectifs que l'on s'est fixés.
Pourtant, je regrette que l'on n'ait pas pris en compte toutes les demandes exprimées aujourd'hui par les quarante-cinq parcs régionaux, dont l'action pour la défense du patrimoine naturel est largement connue et reconnue. J'ai donc déposé un amendement afin qu'il soit répondu à cette attente.
Si un effort est fait en faveur des effectifs, avec 40 créations et 18 transferts, je regrette vivement que l'État se désengage progressivement de l'aide qu'il peut apporter aux grandes associations écologiques nationales : les crédits sont passés de 5,1 millions d'euros en 2005 à 4,9 millions d'euros en 2007. Pourtant, ces associations mènent un travail d'alerte, de réflexion et d'actions responsables, et souvent remarquables.
À l'heure où les problèmes environnementaux font la une de la presse du fait d'une médiatisation parfois un peu excessive de diverses personnalités, il faut, je le crois, prendre en considération ces associations pour leur travail pédagogique, qui mérite respect et estime.
Au-delà de cette gestion budgétaire au quotidien, il nous faut réfléchir, madame la ministre, au moyen de mieux soutenir la richesse de notre biodiversité, qui subit un processus inexorable de dégradation ou de mort. Nos efforts globaux restent insuffisants face à ce que certains ont appelé le « massacre de la biodiversité animale et végétale ». Ce problème mérite d'être pris à bras-le-corps ; l'avenir de la planète tout entière en dépend.
Deuxième sujet de préoccupation : la maîtrise et surtout la diminution des gaz à effet de serre. Même si la France est, parmi les pays industriels, le troisième plus faible émetteur de CO2 par habitant, il n'en reste pas moins que Bruxelles juge nos efforts insuffisants. Madame la ministre, que comptez-vous faire sur ce dossier ? J'ai le sentiment que notre plan en faveur de l'éolien tarde à se mettre en place.
Troisième sujet de préoccupation : la place qu'aura la politique environnementale dans les contrats de projets, en particulier dans leur volet territorial. Vous avez fait émerger - et je crois que c'était judicieux - la notion d'infrastructure écologique. Espérons que les préfets et les représentants des régions et des départements se retrouveront sur des objectifs ambitieux dans ce domaine.
On parle en permanence de développement durable en indiquant qu'il s'agit de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Au-delà de votre force de conviction, qui est grande, votre budget est-il capable de relever ce défi ? Voilà la question qui est posée et qui m'amène à conclure en exprimant un certain scepticisme.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question du changement climatique est désormais une question d'actualité récurrente. Il ne se passe pas de semaine sans qu'une série d'articles, de conférences ou de films nous alerte sur cette question.
Tout le monde s'alarme des conséquences désastreuses de l'effet de serre sur notre planète : sécheresses de plus en plus sévères, cyclones chaque fois plus violents, inondations de plus en plus fréquentes, hausse des températures, etc. Bref, c'est un ensemble de catastrophes qui s'abat sur la planète, frappant plutôt, de surcroît, des populations déjà extrêmement vulnérables.
En avril dernier, la mission d'information sur l'effet de serre a remis un rapport préconisant de poursuivre, de toute urgence, un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 25 % d'ici à 2020, afin de limiter le réchauffement de la planète, au lieu de l'objectif de 5,2 % d'ici à 2012 qui avait été fixé par le protocole de Kyoto.
Il serait donc grand temps de nous doter d'une politique environnementale qui prenne réellement en compte les urgences écologiques
C'est à l'aune de ces enjeux que nous devons juger votre budget, madame la ministre. Or, s'il est en nette augmentation - ce dont on ne peut que se réjouir -, il reste tout de même anormalement faible eu égard aux défis à relever.
Permettez-moi, madame la ministre, de citer des propos que vous avez tenus lors de votre conférence de presse sur le budget 2007 : « La part du budget du ministère dans le budget civil de l'État augmente depuis 2005 dans des proportions notables ; elle atteindra 0,40 % en 2007 si l'on tient compte du programme des interventions territoriales de l'État. Il s'agit d'un niveau jamais atteint par le ministère. Je n'en espère pas moins que, très vite, le ministère de l'écologie représentera 1 % du budget civil de l'État. »
Voilà qui se passe de commentaire. Je crois qu'avec 0,40 %, nous n'avons effectivement pas le compte !
Le Gouvernement pense-t-il pouvoir répondre aux attentes des Français en matière de protection de l'environnement en n'y consacrant que 0,40 % de son budget civil ? Je pense qu'il est loin d'avoir réellement pris l'exacte mesure des besoins et du travail à réaliser en matière de protection de l'environnement.
La protection de l'environnement, enjeu de premier ordre, est l'une des problématiques majeures de la campagne présidentielle qui débute.
Or, à l'heure où le rapport Stern révèle que le coût économique du réchauffement de la planète pourrait s'élever à plus de 5 500 milliards d'euros si les gouvernements ne prennent aucune mesure significative pour mettre sous contrôle les émissions de gaz, je ne pense pas que ce budget permette de répondre à cet objectif prioritaire.
C'est d'autant plus regrettable que l'investissement financier dans la lutte contre le réchauffement climatique, loin de pénaliser l'essor économique des pays industriels, constituerait une démarche volontariste créatrice de richesses. Le rapport Stern souligne d'ailleurs combien il importe d'investir dans la recherche et le développement, ainsi que dans les nouvelles technologies moins polluantes.
Je déplore que le Gouvernement n'apporte pas une réponse plus globale au problème du réchauffement climatique.
Parlons, par exemple, de la politique des transports. Les transports sont, en effet, le premier secteur d'émission de gaz à effet de serre. Or les crédits du programme « Transports terrestres et maritimes » sont en diminution de 11,3 %, ce qui limite les capacités de développement des modes de transport alternatifs à la route.
À cela il convient d'ajouter les actuels dérapages en ce qui concerne le plan national d'allocation de quotas de CO2 sur la période 2008-2012. Madame la ministre, mercredi dernier, vous avez retiré vos propositions. Vous disposez désormais de deux semaines pour soumettre un nouveau projet à la Commission européenne. Pourriez-vous nous dire comment le Gouvernement compte gérer cette crise ?
Au-delà du manque d'ambition de ce budget, je souhaite aborder deux points qui me tiennent à coeur.
Je tiens d'abord à vous dire, en tant que rapporteur de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques naturels et technologiques, que je suis très sensible aux progrès réalisés en la matière.
L'un des objectifs principaux de cette loi était de mieux prendre en compte les risques accidentels dans l'urbanisme autour des sites Seveso, au travers de la création des plans de prévention des risques technologiques. Un autre objectif était de renforcer la concertation avec les acteurs internes et externes à l'entreprise.
Ce sont 421 plans de prévention des risques technologiques qui doivent être élaborés d'ici au 31 juillet 2008, concernant 622 établissements industriels classés Seveso recensés au 1er janvier 2005, sur plus de 900 communes. Ils seront réalisés en quatre phases successives.
L'élaboration des 124 plans de prévention des risques technologiques de la première phase a été engagée au dernier trimestre 2005. Il s'agit, dans un premier temps, de mettre à niveau les études de dangers, ce qui devrait permettre d'apprécier la maîtrise des risques dans les établissements. Trois plans de prévention des risques technologiques sont déjà entrés en phase opérationnelle.
Par ailleurs, plus de 21 000 communes sont exposées à des risques naturels majeurs menaçant les biens et les personnes. L'État a mis en place une politique de prévention dont l'un des outils est, depuis 1995, le plan de prévention des risques naturels. Ce plan a pour objet de rassembler la connaissance des risques sur un territoire donné, d'en déduire une délimitation des zones exposées et de définir des prescriptions en matière d'urbanisme, de construction et de gestion dans les zones à risques, ainsi que des mesures de prévention, de protection et de sauvegarde des constructions existantes dans ces zones.
L'objectif de 5 000 plans de prévention des risques naturels approuvés a été atteint à la fin de 2005. Cela concerne un tiers de la population. La démarche doit être poursuivie pour des territoires sur lesquels les menaces restent réelles. Ainsi, sera particulièrement privilégiée en 2007 l'approbation des plans de prévention des risques naturels inondations et risques sismiques. Tout cela va dans la bonne direction.
Deuxième point, primordial dans le contexte actuel du renchérissement du coût de l'énergie : les biocarburants.
Je tiens à saluer les efforts que le Gouvernement a accomplis en accompagnant l'initiative de la représentation nationale consistant à introduire dans la loi d'orientation agricole les objectifs que nous nous sommes fixés quant à l'incorporation de biocarburants dans l'énergie. Nous avons également entrouvert la porte des huiles végétales et de leurs utilisations. Il faut que nous avancions dans ce domaine.
Si nous voulons que la France soit au rendez-vous des biocarburants, comme nous le souhaitons tous, nous devons faire preuve d'une grande détermination. À la suite du rapport demandé à Alain Prost, des avancées ont été réalisées, notamment avec l'annonce du plan E85 ainsi qu'avec l'adoption d'un régime fiscal très favorable à ce carburant dans le présent projet de loi de finances.
Je constate cependant que le plan E85 ne pourra réellement se développer et avoir un effet réel sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre que si le Gouvernement incite les distributeurs à mettre en place un véritable réseau de pompes vouées à ce carburant. Or on est à cet égard loin du compte ! Tant qu'il en sera ainsi, l'utilisation de l'E85 restera marginale et réservée à des flottes captives, ce qui n'est absolument pas à la mesure des enjeux liés au développement des biocarburants.
Il faudra également que les constructeurs automobiles s'engagent résolument dans cette voie, et nous comptons sur le Gouvernement pour les y inciter.
Nous n'arrivons pas à atteindre les taux d'incorporation cibles que nous avions fixés, que ce soit au niveau communautaire ou au niveau national, lorsque a été mise en place la fameuse TGAP. On atteint à peine 1 % pour le bioéthanol alors que, nous devrions être à 1,5 % dès cette année et à 3,5 % en 2007.
J'ajoute que la table ronde qui a été réunie sur l'initiative des ministres de l'agriculture et de l'industrie mercredi dernier a fait apparaître que l'incorporation en direct demeurait au second plan des préoccupations.
Je crains fort que l'annonce d'un plan E85 ne relègue à un rang subalterne l'incorporation en direct de l'éthanol dans les essences, alors qu'elle reste la priorité du Parlement. Je le crains d'autant plus que, comme je le disais à l'instant, on ne voit pas arriver la mise en place des pompes nécessaires au développement du plan E85.
N'en doutons pas, le défi de la lutte contre le changement climatique ne concerne pas que notre agriculture et notre industrie ; il nous concerne tous et ne pourra être relevé que collectivement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, avec ce budget, nous examinons pour la dernière fois de la législature les engagements financiers de la mission « Écologie et développement durable ».
À l'heure des bilans, nous ne pouvons que saluer l'action de notre majorité depuis 2002 et, plus particulièrement, madame le ministre, votre engagement personnel et votre détermination.
Au cours de cette seule année, le Parlement a déjà adopté, sur votre initiative, deux textes fondamentaux, la loi relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux, et la loi relative à la transparence et à la sécurité nucléaire. En outre, nous sommes en train d'achever nos travaux sur le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, texte attendu depuis de nombreuses années.
À ce propos, madame le ministre, nous comprenons qu'en raison des débats plus longs que prévus sur un autre texte à l'Assemblée nationale, la deuxième lecture de ce projet de loi ait été reportée ; nous souhaitons simplement que ce texte puisse être réinscrit le plus rapidement possible à l'ordre du jour, au plus tard au début de 2007.
En conséquence, pouvez-nous assurer que les dispositions financières prévues pour 2007 seront effectivement mises en place sans trop de retard ?
Je rappellerai, sans être exhaustive, que, parallèlement, le plan climat a été renforcé, que plusieurs plans d'action pour la stratégie nationale de la biodiversité ont été mis en place, de même que le plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides, le plan de gestion de la rareté de l'eau, le programme de prévention contre les séismes et la filière de récupération des déchets d'équipements électriques et électroniques.
Vous vous êtes également fortement mobilisée, madame le ministre, pour achever la transposition des directives européennes, et vous avez réussi.
Nous avons bien pris la mesure de l'importance de ces actions : nos concitoyens sont attentifs à la qualité de leur environnement, dont ils s'inquiètent souvent, et le développement durable est, sans aucun doute, aujourd'hui déjà un enjeu de société.
Nous avons donc non seulement une obligation de prise en compte de ces attentes, mais encore une obligation de résultats en termes de préservation de notre planète.
En matière d'environnement, il nous faut toujours mieux faire et faire toujours plus !
La présentation générale des crédits de la mission « Écologie et développement durable » a été faite, dans le détail, par nos collègues rapporteurs.
Permettez-moi seulement de souligner que les crédits de la mission connaissent une hausse globale d'environ 2,5 %. C'est très satisfaisant, d'autant que nous savons que ces crédits ne représentent qu'une partie - environ un quart - des moyens que l'État alloue à l'écologie. En effet, en 2007, l'ensemble des moyens consacrés à l'écologie devrait augmenter de près de 9 %. J'estime que c'est un engagement remarquable au regard des contraintes budgétaires actuelles.
Dans ces conditions, le groupe UMP votera avec plaisir les crédits de cette mission.
Pour ma part, j'insisterai sur les crédits affectés à la protection de la biodiversité, c'est-à-dire à la protection de la nature et des paysages.
Ces crédits enregistrent une forte augmentation, de 21,8 %, par rapport à la loi de finances pour 2006.
Cet effort est un élément de la mise en oeuvre de la stratégie nationale de la biodiversité et consacre les priorités de l'année 2007, à savoir l'application de la loi du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs régionaux et la mise en place du réseau Natura 2000.
En effet, grâce à une forte mobilisation de tous les acteurs, nous avons pu honorer nos engagements européens et respecter l'échéance du 30 avril de cette année pour achever la désignation des sites Natura 2000, ce qui nous a permis d'échapper à une saisine de la Cour de justice européenne pour condamnation sous astreinte.
Grâce à ces crédits, nous nous donnons les moyens de conserver la biodiversité, de reconquérir la qualité d'espaces naturels sensibles et de préserver notre patrimoine naturel dans le cadre d'une gestion durable.
Je me permettrai cependant, madame le ministre, de vous demander des éclaircissements sur deux points particuliers : les réserves naturelles et les parcs naturels régionaux.
Plusieurs réserves naturelles ont été récemment créées ou vont l'être. Pouvez-vous nous indiquer si les dotations envisagées permettront à chacune d'elles d'accomplir leur mission et d'être dotée d'une équipe minimale, composée d'un conservateur et d'un garde ?
Quant aux parcs, leur financement ne dépend pas uniquement de l'État, mais aussi des collectivités territoriales et des fonds européens. Certains parcs connaissent néanmoins des difficultés. C'est pourquoi il semble nécessaire que leur situation financière soit stabilisée et qu'ils soient éligibles aux contrats de projets : c'est le seul moyen d'assurer la pérennité de leurs interventions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà près de cinquante ans, alors que j'exerçais des responsabilités au Bureau de recherches géologiques et minières, j'avais constaté que, dans les départements de France, les différents services administratifs qui s'occupaient de l'eau - avec leurs ingénieurs des Ponts et Chaussées, des Mines, du Génie rural des eaux et des forêts - le faisaient sans se concerter.
Cette situation me paraissant anormale, j'ai réuni les chefs des trois corps en terrain neutre, c'est-à-dire en un lieu géologique. (Sourires.) C'est ainsi qu'ont été jetées les bases des futures agences de l'eau, celles-là mêmes qui permettent aujourd'hui à la France de disposer dans ce domaine d'un système qui fonctionne parfaitement, en liaison avec les collectivités locales et sous l'autorité de votre ministère, madame.
Plus récemment, mon collègue socialiste Claude Saunier et moi-même avons réalisé un rapport dans le cadre de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques intitulé Changement climatique et transition énergétique : dépasser la crise.
Après avoir parcouru le monde et procédé à plus de mille heures d'auditions, nous avons constaté que le problème du changement climatique était extraordinairement grave et que ses effets se feraient sentir dans un avenir beaucoup plus proche de nous qu'on ne l'imaginait.
Ce rapport est un cri d'alarme. Il a d'ailleurs évoqué, six mois avant le rapport Stern, les coûts considérables des dégâts liés au réchauffement.
Ces coûts atteignent d'ores et déjà 1 % du produit intérieur brut mondial et nous pensons qu'ils atteindront dans moins de quinze ans 6 % de ce même produit intérieur brut mondial, ce qui implique une récession à l'échelle de la planète.
Cela signifie surtout qu'une part non négligeable de l'humanité sera soumise au stress hydrique - en d'autres termes, elle « crèvera de soif » -, tandis qu'une autre part, ou la même à d'autres moments, sera victime d'inondations, comme c'est déjà le cas au Bangladesh, dans le sud de la Chine ou en Inde à certaines périodes de l'année, avec des milliers et des milliers de morts. Cette situation conduira inéluctablement à une émigration massive.
Cette émigration massive, sommes-nous préparés à la recevoir ? Où vont en effet aller tous ceux qui mourront de soif ? Là où on ne meurt pas de soif, donc dans les zones actuellement tempérées, qui elles-mêmes, dans leur partie méridionale, risquent d'être touchées par un manque d'eau de plus en plus fréquent.
Nous avons déjà un aperçu de cet avenir. Si les Maliens tentent de passer, dans des conditions très difficiles, vers les Canaries pour gagner ensuite l'Europe, c'est parce qu'ils sont obligés de partir de chez eux ! Or de plus en plus de populations seront contraintes d'émigrer.
L'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques examinera le 28 mars un rapport consacré à une autre question fondamentale : la biodiversité.
Pour l'élaboration de ce rapport, nous conduisons actuellement toute une série d'études. Nous allons en Grande-Bretagne dans deux jours, nous avons fait une visite aux États-Unis... Partout, nous avons constaté que les scientifiques et les agronomes s'intéressaient très vivement aux nécessaires évolutions liées aux transformations profondes que connaît le monde agricole et, plus encore, à celles qui tiennent à l'urbanisation. Celle-ci constitue probablement, avec le changement de climat, une des menaces majeures pour la biodiversité.
Il y a là une priorité nationale.
D'ailleurs, me semble-t-il, l'opinion publique commence à bien le comprendre, peut-être même mieux que beaucoup de hauts fonctionnaires et de politiques. Vous avez donc, madame la ministre, de pouvoir « surfer » sur une dynamique populaire très importante : vous avez l'opinion publique avec vous !
Permettez-moi de vous faire part, à cet égard, de mon expérience personnelle. Je participe souvent à des discussions dans les fêtes de village et, chaque fois que je fais un petit exposé sur ces questions, je constate un intérêt puissant de la part de tous les auditeurs, en même temps d'ailleurs qu'une assez bonne connaissance du phénomène.
Je ne parlerai pas ici de l'indispensable transition énergétique dans le bâtiment et les transports. Je voudrais aborder le problème concernant la politique de l'eau.
Nous avons déjà introduit - grâce à vous, madame la ministre - la notion de changement climatique dans la dernière loi sur l'eau. Il sera important de faire en sorte de développer massivement les recherches scientifiques dans ce domaine, car le développement des sciences de l'eau est probablement la plus grande priorité.
Comme le dit Nicolas Hulot, il faut sortir l'écologie scientifique de l'isolement. En particulier, il faut non seulement susciter des recherches beaucoup plus importantes, mais encore obtenir un effet de masse en favorisant les croisements entre les divers travaux, qu'ils soient financés par votre ministère ou par ceux de la recherche, de l'industrie, de l'agriculture, de façon à renforcer considérablement notre capacité de recherche.
Désormais, il nous est également possible de développer en même temps la recherche et ses applications, grâce, en particulier, aux réseaux thématiques de recherche avancée, les RTRA, qui ont été institués par la loi de programme pour la recherche.
Personnellement, j'ai l'intention de constituer un réseau thématique de recherche avancée sur le thème « Climat et Eau ». Celui-ci serait destiné principalement à fédérer des chercheurs et des organismes, dans le cadre fixé par la loi de programme, afin que des recherches communes puissent être menées par des universités, des établissements de recherche, tels que l'Office international de l'eau, le BRGM, ou Bureau de recherches géologiques et minières, le CEMAGREF, ou Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et des forêts, le CNRS, ou Centre national de la recherche scientifique, des écoles d'ingénieurs, dont l'École des mines de Paris, des organes de gestion et d'étude, tels que les SAGE, les schémas d'aménagement et de gestion des eaux, des agences de l'eau, des industriels, comme EDF, Veolia ou Suez, enfin des PMI, des petites et moyennes industries, notamment celles qui appartiennent au secteur de l'observation de la terre, tous ces acteurs recevant l'appui de l'État et des collectivités locales.
Initialement, ce RTRA serait chargé d'étudier de façon précise le cycle de l'eau dans les zones les plus menacées, c'est-à-dire les régions méditerranéennes de la France, de l'Italie et de l'Espagne, afin de pouvoir combiner et mieux définir les mesures de prévention. Ces dernières sont bien connues. Il est nécessaire, en particulier, de savoir où créer des retenues collinaires, de façon à augmenter les ressources hydriques, ou des bassins de rétention des crues. Il est important également de mieux connaître les précipitations. En bref, de nombreux domaines sont concernés.
Un ouvrage remarquable, Les eaux continentales, qui vient d'être publié par l'Académie des sciences, sous la direction de M. Ghislain de Marsily, détaille les mesures de prévention qui ont été édictées par les organismes les plus divers. Elles sont déjà connues. Il s'agit désormais de les mettre en oeuvre.
Pour cela, il est nécessaire, me semble-t-il, de mobiliser le public, l'éducation nationale - celle-ci est encore très réservée, et il faudrait donc l'inciter à accomplir un effort beaucoup plus important -, et les collectivités locales, qui commencent à s'intéresser à ces questions.
De même, il convient de développer les processus qui, dans une économie de marché, pilotent les évolutions nécessaires aux grandes industries. Mes chers collègues, il faut établir un plan à quinze ans, qui fixerait un calendrier précis et, par exemple, interdirait progressivement les voitures qui émettent plus d'une certaine quantité de CO2 par litre d'essence utilisé. Ensuite, les industriels se débrouilleront !
Si nous établissons une programmation suffisamment longue, l'industrie et la technologie suivront. Nous pourrions également instituer une taxe sur le carbone, qui serait augmentée progressivement, afin de fournir l'argent nécessaire au financement des recherches.
Enfin, il serait nécessaire, me semble-t-il, de mieux coordonner les actions de l'État et des collectivités locales en la matière. (Applaudissements sur les travées du RDSE et au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits consacrés à la mission « Écologie et développement durable » du présent projet de loi de finances sont globalement en augmentation de 2,5 %, et nous nous réjouissons, bien sûr.
Si nous saluons volontiers votre pugnacité et votre engagement personnel, madame la ministre, nous estimons également que la période électorale dans laquelle nous entrons ainsi que l'intérêt croissant de nos concitoyens pour l'environnement ne sont pas étrangers à cet affichage.
Je dis « affichage », car, en réalité, avec les dettes du ministère, le différentiel entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement, la hausse de certains prélèvements d'un côté, et la baisse du produit de certaines taxes de l'autre, notamment, il est extrêmement difficile de se faire une idée d'ensemble de ce budget, qui doit être clarifié, me semble-t-il
Avant d'entrer dans le détail des programmes, je tiens à évoquer un sujet particulièrement préoccupant, à savoir l'impact des produits chimiques dangereux pour la santé et le programme REACH, Registration evaluation autorisation of chemicals, qui est actuellement en discussion dans les instances européennes.
Nous pouvons dire, sans risquer de nous tromper, que des produits hautement toxiques, dont certains sont considérés comme cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, sont fabriqués, commercialisés et utilisés, alors qu'ils constituent une véritable bombe à retardement pour la santé publique.
De nombreux scientifiques de renom, qui étaient déjà à l'origine de « l'appel de Paris », ont réaffirmé, le 9 novembre dernier, la nécessité absolue de retirer ces produits du marché et de soumettre les pesticides et les additifs alimentaires aux mêmes évaluations que les médicaments avant leur mise en vente.
Or il semble que le Conseil de l'Union européenne, qui est composé des représentants des gouvernements des vingt-cinq États membres, dont la France, propose seulement que les substances les plus dangereuses fassent l'objet d'un contrôle adéquat.
Ainsi, le principe de substitution serait abandonné au nom de la compétitivité de l'industrie européenne. Pourtant, les atteintes à la santé humaine représentent à nos yeux un coût social beaucoup trop grand, même si le marché l'ignore.
Les conséquences négatives de ces décisions sur la santé des populations sont considérables. Une fois encore, l'industrie veut méconnaître les dégâts sociaux et environnementaux qu'entraîne son activité. « Trop d'intérêts économiques sont en jeu », nous dit-on. Mais quels drames découvrirons-nous un jour, et ne serons-nous perdants, au final ?
Il incombe donc à la France, me semble-t-il, de défendre une version ferme et contraignante du programme REACH. S'il luttait pour protéger la santé publique en Europe, sans céder à la pression des lobbys industriels, le gouvernement français montrerait qu'il s'investit vraiment sur ces questions !
En effet, il s'agit d'un sujet extrêmement important. Une étude publiée très récemment par l'Institut de veille sanitaire conclut à l'existence d'« un lien statistique entre le niveau d'exposition aux incinérateurs dans les années 70-80 et l'augmentation de la fréquence de certains cancers au cours des années 90-99 ». Certes, cette étude est partielle, et les incinérateurs se sont améliorés, nous le savons. Toutefois, dès lors qu'un tel lien peut être établi, c'est toute la démarche de précaution qu'il faudrait engager s'agissant des produits chimiques !
En ce qui concerne les produits toxiques, je soulignerai une incohérence, ou du moins une différence de traitement, dans la politique gouvernementale.
À ce jour, des dizaines de milliers de produits chimiques sont disponibles sur le marché : on en compte 100 000 dans l'Union européenne et 80 000 aux États-Unis. Or, moins de la moitié d'entre eux ont fait l'objet de tests évaluant leur toxicité, et dans 80 % des cas aucune information n'est disponible sur les effets que ces substances pourraient entraîner sur le développement du cerveau, notamment celui de l'enfant.
En revanche, on déclare d'office hors la loi la mise en vente, l'utilisation et la détention par l'utilisateur final des produits phytopharmaceutiques si ceux-ci ne bénéficient pas d'une autorisation de mise sur le marché. Or cette interdiction pose un problème s'agissant de produits naturels - vous direz que je me répète, madame la ministre -, tels que le purin d'orties ou le compost organique.
Certes, il serait naïf de penser que tout ce qui est naturel est inoffensif. Toutefois, le statut de ces produits doit être rapidement clarifié, surtout à l'heure où nous constatons l'intérêt de l'agriculture biologique. Au fond, mes chers collègues, d'un côté, nous sommes laxistes avec les produits chimiques et, l'autre, nous faisons la chasse au purin d'orties. J'aimerais que nous mettions en perspective notre politique et que nous traitions de la même façon tous ces produits.
J'en viens aux quelques remarques que mon temps de parole me permet de formuler sur les différents programmes de cette mission.
Le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions » est le grand perdant du budget de l'écologie et du développement durable.
Madame la ministre, vous justifiez la baisse de ces crédits par la suppression de l'action consacrée à la lutte contre les changements climatiques, mais cela n'explique pas tout : les autorisations d'engagement sont passées de 178 millions d'euros pour 2006 à 141 millions d'euros pour 2007, et les crédits des six actions du programme sont frappés. En outre, nous constatons une différence importante entre les crédits de paiement ouverts en 2006 et 2007 au titre de ce programme et ceux qui sont nécessaires pour faire face aux engagements pris antérieurement.
Force est donc de constater que les crédits du programme 181 ne sont pas suffisants pour mettre en oeuvre une véritable politique de lutte contre les pollutions et les changements climatiques.
C'est le cas, par exemple, de l'action « Prévention des risques technologiques et des pollutions ». Dans le cadre de la loi de 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, des associations agréées ont été investies d'une mission de surveillance de la qualité de l'air. La mise en oeuvre effective des actions du plan national santé-environnnement relatives à la lutte contre la pollution de l'air est essentielle, quand on sait que l'Agence européenne de l'environnement évalue à 60 000 le nombre des décès annuels qui sont imputables à une exposition prolongée à la pollution de l'air.
Or ces associations dénoncent la diminution des aides de l'État. La part industrielle de leur financement, sous la forme de taxes sur les activités polluantes, revient le plus souvent à Bercy, dans le budget général, et parfois elle disparaît bel et bien.
Les crédits affectés à la prévention des risques et à la lutte contre les pollutions restent donc insuffisants. Surtout, madame la ministre, les politiques mises en oeuvre par vos services sont largement amoindries par d'autres décisions gouvernementales.
C'est le cas, par exemple, en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre. Le vendredi 17 novembre dernier, s'achevait à Nairobi la douzième conférence des Nations unies sur le changement climatique, qui s'est révélée globalement décevante. Le texte adopté évite d'imposer toute mesure contraignante, et il semble que la révision annoncée du protocole de Kyoto n'entraînera pas l'adoption de nouveaux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Les engagements de la France en la matière impliquent un changement dans les modes de production et de consommation de l'énergie. Or, madame la ministre, quelles sont les mesures préconisées sur le plan national ?
M. le Premier ministre évoque une taxe sur le charbon et une taxe CO2 européenne à l'importation, alors même que les instances européennes jugent insuffisants les quotas de réduction imposés aux industriels. La Commission de Bruxelles vient d'ailleurs de nous faire savoir qu'elle rejetterait le deuxième plan national français d'allocation de quotas de CO2, qu'elle juge trop laxiste !
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer ce que vous comptez faire pour répondre aux exigences de Bruxelles ?
Mes chers collègues, je souhaite pointer une autre incohérence de la politique gouvernementale. Nous savons que plus d'un quart des émissions de gaz à effet de serre en France est dû aux transports, et que le secteur routier est responsable de 84 % d'entre elles. Le rail, en revanche, constitue un mode de transport plus économe en énergie et moins polluant.
Pourtant, l'an dernier, un rapport d'audit sur l'état des infrastructures de transport ferroviaire faisait le constat d'un sous-investissement chronique de l'État dans ce secteur, qui pourrait conduire à la suppression de 60 % des lignes d'ici à 2025.
J'évoquerai à présent le programme « Gestion des milieux et biodiversité ». En France, 10 % des espèces de la flore qui sont connues et près de 35 % des espèces de mammifères sont considérées comme étant en danger ou vulnérables. Nous nous réjouissons donc de constater que les crédits consacrés à ce programme augmentent considérablement.
Je dois toutefois ajouter que cet accroissement des crédits bénéficiera pour l'essentiel à la politique des parcs nationaux, à la création des aires marines protégées et aux sites Natura 2000.
Dans le même temps, les réserves naturelles ont exprimé leur inquiétude. En effet, les crédits qui leur sont alloués sont identiques à ceux de 2006, au détail près qu'en moyenne 10 % des crédits de paiement prévus par la loi de finances pour 2006 n'ont pas été versés aux organismes qui gèrent les réserves naturelles. Ceux-ci, de surcroît, voient leurs budgets fragilisés par les gels pratiqués dans les directions régionales de l'environnement.
Enfin, aucun financement supplémentaire n'étant prévu pour les nouvelles réserves naturelles, le coût de leur installation reposera sur les dotations prévues pour les réserves existantes.
Parmi les 800 personnes qui travaillent dans le réseau des réserves naturelles, 20 % d'entre elles ont des contrats de travail précaires. Encore une fois, la faiblesse des crédits ne manquera pas de se traduire par des suppressions de postes, et l'on peut supposer qu'en ce domaine comme dans de nombreux autres le Gouvernement cherchera à transférer le plus possible ses dépenses aux régions et aux départements.
Je tiens à signaler un fait qui me semble symptomatique de l'attitude du Gouvernement, à savoir le pilotage des sites Natura 2000.
En l'occurrence, les préfets ont reçu la mission de faire en sorte que les comités de pilotage soient présidés par des représentants des collectivités territoriales. Madame la ministre, vous me répondrez qu'il s'agit là d'un symbole, ou peut-être d'une tentative de donner à ces sites une gestion de proximité. Il n'empêche que cette attitude traduit, selon moi, la volonté de l'État de transférer toujours davantage ses compétences aux collectivités locales.
D'ailleurs, le budget de l'écologie et du développement durable reste très limité s'agissant de la promotion de l'emploi, comme je le soulignais tout à l'heure.
Ainsi, nous regrettons que le plan de renforcement des effectifs de contrôle des installations classées ne soit pas respecté. En effet, seuls 60 postes ont été réellement créés sur les 400 annoncés, car 146 emplois sont issus de redéploiements. Il semble de plus en plus nécessaire d'instituer un corps de personnels liés spécifiquement aux questions environnementales. Enfin, l'État continue de délaisser les associations engagées dans la sauvegarde de la biodiversité, qui avaient déjà vu leurs subventions baisser de 20 % en 2006.
En ce qui concerne la partie du budget de la mission consacrée aux opérateurs dans le domaine de l'environnement, il faut bien constater une nette diminution par rapport à 2006. Ainsi, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques voit ses crédits de paiement se stabiliser, mais ses autorisations d'engagement diminuer. La dotation budgétaire de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, ne s'élève plus qu'à 10 000 euros. Compte tenu des coupes claires successives qui ont été opérées dans son budget, cette agence ne dispose plus de moyens financiers ou humains à la hauteur de ses missions, et elle devrait connaître en 2007 un déficit de crédits de paiement cumulés évalué à 70 millions d'euros.
Notons toutefois que le budget de l'ADEME bénéficierait d'une taxe sur le charbon lui rapportant 20 millions d'euros ; celle-ci n'apparaît pas dans le budget général mais fait l'objet de l'article 23 du projet de loi de finances rectificative pour 2006.
Pour conclure, j'aborderai bien sûr la question de la politique de l'eau. Nous avons demandé à plusieurs reprises la création d'un programme « Politiques de l'eau ». En effet, l'existence de six programmes budgétaires distincts est préjudiciable à la cohérence de cette politique, à laquelle je sais que vous êtes sensible, madame la ministre. Les modifications apportées à la répartition des responsabilités, afin de donner au directeur de l'eau un pouvoir budgétaire, constituent une maigre consolation.
Nous pensons que des efforts doivent être accomplis pour que la France soit en mesure non seulement de respecter les directives-cadres « nitrate » et « eaux résiduelles urbaines » mais également d'atteindre les objectifs de la directive-cadre « eau » à l'horizon 2015. Toutes ces questions constituent d'ailleurs autant de contentieux communautaires potentiels.
Nous venons d'apprendre le report de la discussion du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques. Je sais, madame la ministre, que vous avez tout fait pour qu'il soit examiné le plus tôt possible : il est question du mois de janvier prochain, si tout va bien ! Cette décision est révélatrice de la place que l'écologie occupe dans les préoccupations du Gouvernement. Nous savons ici que le fonctionnement des agences de l'eau, l'inscription au budget des collectivités des programmes de travaux concernant l'eau et l'assainissement, la mise en place de la nouvelle organisation de la pêche associative, pour ne prendre que ces exemples, sont suspendus au vote de ce texte. C'est inadmissible et inacceptable.
Tout cela pour que soit examiné le texte relatif à la prévention de la délinquance dont nous n'avions nul besoin ! On le voit, le Gouvernement a fait un choix et il serait dommage que ce projet de loi ne soit pas adopté par le Parlement avant la fin de la législature.
Le budget de la mission « Écologie et développement durable » n'est donc pas à la hauteur des enjeux. Il est des urgences dont nous n'avons pas encore pris conscience et il est fondamental de consacrer une part beaucoup plus importante des finances de l'État aux questions de l'écologie et du développement durable.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas les crédits de cette mission.
M. le président. La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. En cette dernière discussion budgétaire avant les élections législatives, madame la ministre, je tenais tout d'abord à saluer votre combativité et votre action au sein du ministère de l'écologie et du développement durable. Vous avez agi avec passion et efficacité au sein d'un ministère qui n'a malheureusement pas la dimension qui devrait être la sienne, et ce depuis bien des années.
En effet, malgré l'augmentation notable de votre budget pour 2007 - et il faut la souligner -, on ne peut que déplorer le fait que l'écologie ne représente que 0,39 % du budget de l'État, alors que l'urgence environnementale à laquelle nous sommes aujourd'hui confrontés doit mobiliser tout le monde, au-delà de nos clivages politiques et bien au-delà de nos frontières géographiques.
On le voit bien, une prise de conscience collective s'amorce sur le fait que notre planète n'est pas interchangeable et que nous courons à la catastrophe si nous ne changeons pas nos pratiques et nos habitudes.
À ce propos, madame la ministre, je souhaite souligner l'efficacité du message de la campagne publicitaire lancée par votre ministère sur les économies qu'individuellement nous pouvions réaliser. Il est vrai que, à l'échelle de chaque citoyen, les petits gestes peuvent paraître dérisoires, mais, multipliés par plusieurs dizaines de millions, ils prennent une tout autre dimension !
Il convient de poursuivre dans cette voie pédagogique et de continuer à engager nos concitoyens à adopter des comportements écoresponsables. C'est l'une des actions pour préserver notre planète.
En 2002, le Président de la République Jacques Chirac rappelait à Johannesburg : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l'admettre. L'humanité souffre. » Ce message résonne encore dans nos esprits et reste plus que jamais d'actualité.
J'entends ici et là certains condamner la « starification » de la cause environnementale. S'il ne faut évidemment pas réduire ce débat à la forme, le fait que des personnalités comme Nicolas Hulot aient contribué à sensibiliser l'opinion est très positif. Avoir assisté à la course à la photo des candidats à la présidentielle ou des ex-présidentiables avec le présentateur vedette de TF1, ou bien encore avoir entendu le candidat malheureux Laurent Fabius annoncer vouloir faire de Nicolas Hulot son vice-premier ministre, tout cela m'a beaucoup amusé.
Néanmoins, l'année 2007, avec ses rendez-vous électoraux majeurs, doit être l'occasion de porter sur le devant de la scène la question environnementale. Il faut surtout que les candidats s'engagent, au-delà des effets d'annonce et des envolées lyriques, à mettre en oeuvre un programme réellement ambitieux, à donner à ce ministère des moyens financiers mais surtout à renforcer ses compétences. À ce titre, la création d'un grand ministère de l'environnement me paraît à terme une nécessité tant le champ d'action en matière environnementale est grand et tant le cloisonnement ministériel actuel constitue un frein à une action réellement globale.
Ainsi, en matière de lutte contre le réchauffement climatique, le secteur du logement et celui des transports sont parmi les grands responsables des émissions des gaz à effet de serre.
Concernant le logement, la consommation d'énergie représente près de 25 % des émissions. Il convient donc d'augmenter l'effort que le Gouvernement a entrepris avec la mesure incitative du crédit d'impôt. En effet, le soutien aux équipements les plus performants, tels les chaudières à basse température ou à condensation, les dispositifs de régulation ou les appareils utilisant les énergies renouvelables comme les pompes à chaleur, doit être maintenu mais surtout développé, afin que les habitudes de consommation continuent à évoluer.
S'agissant des transports, qui représentent 26 % des émissions de gaz à effet de serre, j'entends souvent certains s'offusquer de l'utilisation excessive de la voiture pour se rendre à son travail. Si ce constat se révèle exact - il suffit de prendre le boulevard périphérique parisien à n'importe quelle heure de la journée pour constater qu'il est saturé et que, dans 90 % des cas, le véhicule n'est occupé que par son conducteur -, il faut néanmoins s'interroger sur la principale cause de ces pratiques, à savoir une inadaptation de notre réseau de transports en commun.
En effet, tant que les transports collectifs ne seront pas adaptés et attractifs, il ne faut pas espérer que nous changerons nos habitudes. Tant que les voyageurs seront entassés aux heures de pointe, tant que les transports ne seront pas mieux sécurisés, tant qu'ils n'arriveront pas à l'heure et tant que des grèves à répétition se succéderont sans même qu'un service minimum digne de ce nom soit assuré, n'imaginons pas que les voitures resteront au garage !
En outre, si l'effort à l'endroit des transports doit être quantitatif, il lui faut également être qualitatif.
Sur ce sujet encore, je constate une spécificité française, quand j'apprends que certains souhaitent taxer les poids lourds pour permettre le développement du fret ferroviaire et fluvial. Cette mesure coercitive, qui instaure un rapport de force et accable les entreprises de transports - qui sont souvent des PME -, ne me semble pas la meilleure solution.
S'il faut bien entendu agir pour développer le fret ferroviaire et fluvial, il conviendrait plutôt de le rendre attractif au lieu de créer une contrainte par le biais d'une pression fiscale supplémentaire. Il s'agirait aussi peut-être de permettre à la recherche de faire en sorte que le transport routier soit moins polluant.
À ce titre, pourquoi le Gouvernement ne s'impliquerait-il pas davantage dans le développement d'une nouvelle génération de véhicules et de carburants qui réduisent les émissions de CO2 en soutenant la recherche des constructeurs ? Par ailleurs, pour les transporteurs, et à l'instar de ce qui est fait pour le logement avec le crédit d'impôt, pourquoi ne pas mettre en place une fiscalité particulière pour les véhicules qui utilisent des techniques avancées d'un point de vue environnemental ?
En tout état de cause, je tiens à saluer le travail de l'ADEME, qui, grâce à la valorisation des énergies renouvelables et aux économies d'énergie, s'inscrit dans une posture plus incitative et informative que coercitive, ce qui me semble, à terme, beaucoup plus constructif. Je crois donc qu'il convient de maintenir, voire d'accentuer l'effort gouvernemental en faveur de l'ADEME, qui contribue efficacement au changement des pratiques et des mentalités.
J'insisterai également sur l'éducation des jeunes générations, qui me paraît un préalable à l'émergence d'automatismes écoresponsables. De la même façon que l'éducation civique a été réintroduite dans les programmes scolaires, je ne serais pas choqué que l'écocitoyenneté ait sa place à l'école.
Je terminerai mon propos en renouvelant, madame la ministre, mes félicitations pour votre action au sein de ce ministère difficile. Je prendrai pour illustrer mon propos deux exemples qui me semblent révélateurs.
D'une part, concernant les risques naturels et technologiques, depuis la catastrophe d'AZF, l'ensemble des élus, les administrations et les industries ont su, sous l'égide de votre ministère, prendre des mesures appropriées. Je pense notamment aux plans de prévention des risques naturels prévisibles, les PPR, dont le succès ne se dément pas.
D'autre part, pour revenir sur une actualité européenne très récente, je tenais à rendre hommage à votre action concernant le deuxième plan national d'affectation des quotas de CO2. Je mesure votre difficulté à imposer vos positions, puisqu'elles prennent le contre-pied d'intérêts qui relèguent les considérations environnementales au second plan, ce qui est regrettable, mais je suis sûr que cela changera un jour.
Il convient, par conséquent, de rappeler au prochain Président de la République ses devoirs : il aura la lourde tâche de relever le défi qui engage des générations futures, celui de notre Terre.
Parce que j'ai la certitude que l'écologie prendra la place qu'il est aujourd'hui nécessaire de lui donner, je voterai les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc.
M. Jacques Blanc. Madame la ministre, de nombreux orateurs l'ont souligné et je le répète, car c'est vrai : vous êtes un bon ministre de l'environnement. Cela se manifeste non seulement dans les résultats que nous examinons à l'occasion de ce budget, mais également dans vos réussites. Vous êtes ainsi parvenue à réconcilier les chasseurs et les écologistes, à faire en sorte que les agriculteurs ne soient plus l'objet de la vindicte mais se sentent des acteurs du développement durable. Il est essentiel que la défense de notre capital naturel soit partagée par tous et ne soit plus accaparée par quelques petits groupes.
La qualité des excellents rapports - et je tiens à en féliciter Mme et MM. les rapporteurs - me permet de ne pas revenir sur une analyse trop détaillée de vos propositions budgétaires, madame la ministre. C'est pourquoi, après m'être livré à une réflexion générale, je me pencherai plus spécifiquement sur les crédits de la biodiversité, sur la question des parcs naturels et la situation de Natura 2000.
Tout d'abord, personne n'a évoqué - mais peut-être n'ai-je pas été suffisamment attentif ! - ce document jaune (M. Jacques Blanc en brandit un exemplaire) qui est annexé au projet de loi de finances pour 2007 et qui reprend les interventions financières de tous les ministères, et pas seulement du vôtre, madame la ministre, en proposant une analyse des crédits des collectivités territoriales en matière d'environnement.
Il s'agit d'une démarche intéressante qui rejoint cette approche transversale que chacun considère comme nécessaire. Certes, ce document n'est pas exhaustif, mais il permet d'avoir une vision assez précise des enjeux et des engagements dans ce domaine, à un moment où, incontestablement, a émergé dans notre société cette prise de conscience qu'il fallait réagir, que les richesses des ressources naturelles n'étaient pas inépuisables et que l'action de l'homme était indispensable pour assurer la qualité de son environnement naturel.
Dans les espaces que l'homme a désertés, c'est une catastrophe : tout brûle ! En effet, la nature a besoin de l'intervention de l'homme, mais il faut que celle-ci soit maîtrisée. Notre collègue Pierre Laffitte a évoqué à juste raison les choix scientifiques. Notre société s'est enfin rendu compte que son avenir dépendait de ce qu'elle ferait non seulement pour l'atmosphère mais également pour la qualité de la terre et des eaux.
Nous sommes à un tournant tout à fait intéressant. Plus nous nous engagerons dans cette voie, plus nous prendrons conscience que toute l'action politique doit être imprégnée de cette exigence. Il n'y a pas d'un côté la politique environnementale et de l'autre le reste. Les questions de l'écologie et du développement durable ne sont heureusement plus entre les mains de petits cercles agaçants : l'ensemble de notre société se les est appropriées. Nous constatons une nette évolution en ce sens.
Sur ce point, rendons hommage à l'Europe, au lieu de l'attaquer, ce qui est tellement facile ! Elle nous a fait prendre conscience de ces besoins, je pense notamment à l'évolution des programmes agricoles. Je souhaite que, dans les négociations, dans les contrats de projets État-régions, dans la mise en oeuvre des programmes européens du Fonds européen de développement régional, le FEDER, du Fonds social européen, le FSE, mais surtout du Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER, cette approche dans le domaine de l'agriculture des techniques agri-environnementales soit une chance que notre pays saisisse.
On a un peu oublié - mais le président du groupe d'études sur le développement économique de montagne ne peut pas ne pas le rappeler - que la prime à la vache tondeuse a été inventée par l'Europe afin d'empêcher l'érosion des sols. On faisait coup double : économie et protection des sols. Telle est aujourd'hui la démarche pratiquée.
Vous avez d'ailleurs beaucoup défendue cette démarche, madame le ministre. Tout le monde reconnaît votre pugnacité, ce qui ne signifie pas que vous n'ayez pas bon caractère, même si vos propos sont parfois durs. Je tiens à vous rendre hommage. Vous vous êtes bien battue. Nous avons pu le constater lors de votre visite dans le département le moins peuplé de France mais qui, peut-être, pourrait être un modèle de développement durable, je veux parler du département de la Lozère.
M. Jean Bizet, rapporteur pour avis. On l'aurait deviné !
M. Jacques Blanc. Ce département a su aménager des zones pour implanter des éoliennes et délivrer des labels « Pôles d'excellence rurale » pour développer des réseaux de régénération à base de bois. Il s'est mobilisé en faveur du parc national des Cévennes. De surcroît, 30 % de son territoire est situé en zone Natura 2000 alors que la moyenne nationale s'élève à 10 %.
Vous vous êtes battue et il est vrai que, cette année, le budget est plus favorable. Il faut reconnaître que, jusqu'à présent, les efforts n'étaient pas au niveau de ce que l'on pouvait attendre. Grâce à votre action, l'évolution globale des crédits est positive, en particulier celle du chapitre relatif aux crédits en faveur de la biodiversité et de la gestion des espaces. Ainsi, les crédits consacrés aux parcs nationaux augmentent de 38,6 %. Il s'agit de mesures prises en faveur des territoires.
Ce budget traduit aussi une volonté politique que vous avez impulsée et que la Haute Assemblée a partagée. Cette volonté s'est manifestée lors du vote de la loi relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux. Je me réjouis, madame le ministre, que les communes situées au coeur des parcs puissent désormais bénéficier d'une majoration de la dotation globale de fonctionnement de 3 millions d'euros.
À cet égard, il me semblait qu'avait été adopté un amendement tendant à garantir que, à l'avenir, cette somme suivrait l'évolution des dotations. C'est peut-être dans la partie du projet de loi de finances concernant les ressources que figurait cette mesure, que je n'ai pas retrouvée. Qu'en est-il donc, madame la ministre ?
S'agissant de la politique des parcs nationaux, lorsque ces derniers sont habités - ce qui est le cas du parc national des Cévennes, donc je sais ce dont je parle - je souhaite que la population, les communes, les acteurs qui assurent la vie de ces territoires adhèrent et participent au rayonnement des parcs. Madame la ministre, j'espère que vous voudrez bien confirmer votre accord pour que le parc national des Cévennes porte l'ambition d'un réseau euroméditerranéen des parcs naturels nationaux, de la rive nord comme de la rive sud.
M. Pierre Laffitte. Très bonne idée !
M. Jacques Blanc. Je suis convaincu que c'est un moyen d'associer de multiples acteurs...
M. Pierre Laffitte. Très bien !
M. Jacques Blanc. ...à une démarche que vous soutenez, mon cher collègue, comme les acteurs du Plan Bleu et l'Institut du développement durable et des relations internationales. Il est vrai que le président de cette dernière instance, Lucien Chabasson, qui a marqué la politique mondiale méditerranéenne, est l'un des grands acteurs du Plan Bleu. Je tiens, en cet instant, à rendre hommage à tous ces acteurs.
Mardi prochain, madame le ministre, vous allez installer l'établissement public Parcs nationaux de France. Pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur son budget ?
Nous avons décidé que le conseil d'administration de cet établissement est notamment composé des présidents des parcs nationaux de France ou de leurs représentants. Je souhaiterais que ceux qui le désirent puissent nommer des représentants permanents afin que soit effectué un suivi régulier et que l'interprétation du texte soit conforme à l'intention du législateur.
M. le président. Mon cher collègue, je vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de dix minutes.
M. Jacques Blanc. Je voudrais évoquer l'effort qui a été fait pour le dispositif Natura 2000. Quels que soient les gouvernements, c'est l'administration française qui a laissé croire que l'Europe compliquait les choses, alors que la faute nous incombait. Des simplifications sont intervenues. Aux termes de la loi relative au développement des territoires ruraux, les élus assument des responsabilités puisqu'ils président désormais les comités de pilotage. Nous devons nous approprier le dispositif et ne pas dire : l'Europe nous embête. Au contraire, l'Europe nous aidera à réussir ces politiques environnementales. Les programmes européens sont donc essentiels.
Je souhaite formuler une dernière remarque. Un grand débat national est engagé en raison des prochaines échéances électorales. Des débats européens devraient aussi avoir lieu, qui, je l'espère, retrouveront toute leur vitalité. Faisons en sorte de nous dégager des a priori élitistes et de faire passer le message selon lequel nous avons une responsabilité à l'égard des générations futures. L'aménagement équilibré, harmonieux de notre territoire, la qualité de notre environnement sont indispensables pour que les femmes et les hommes de notre siècle, qui ont perdu la référence à des valeurs spirituelles, qui sont envahis par une angoisse existentielle, puissent retrouver la paix. (Applaudissements au banc des commissions.)
M. le président. Mon cher collègue, nous avons tous été sensibles à votre enthousiasme et à vos profondes analyses de la société.
M. Paul Raoult. Notre ami Jacques Blanc devient philosophe !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est un honneur pour moi de présenter, pour la deuxième fois devant le Sénat, le budget du ministère de l'écologie et du développement durable.
Dans le cadre de la LOLF, ses crédits sont répartis en deux missions et quatre programmes. Trois programmes constituent la mission « Écologie et développement durable » et sont dotés de 637 millions d'euros ; il s'agit d'un programme de prévention des risques et de lutte contre les pollutions s'élevant à 133 millions d'euros, d'un programme de gestion des milieux et de la biodiversité à hauteur de 188 millions d'euros et d'un programme relatif à la conduite et au pilotage des équipes environnementales et du développement durable pour 316 millions d'euros. Ce dernier programme porte l'ensemble des 3 775 équivalents temps plein travaillé, les ETPT, attribués au ministère dans ce budget. Dans le cadre de la mission interministérielle de la recherche et de l'enseignement supérieur, le ministère pilote un programme de recherche dans le domaine des risques et des pollutions, pour 278 millions d'euros.
La progression des crédits s'élève à 22,4 millions d'euros pour la mission « Écologie et développement durable » et le programme « Recherche », soit une augmentation de 2,5 % pour l'ensemble du budget si l'on s'en tient au seul projet de loi de finances.
Mais si l'on prend en compte l'ensemble des crédits mis en oeuvre pour la protection de l'environnement, l'augmentation est beaucoup plus importante.
En effet, je le rappelle, d'autres ressources financières que les crédits budgétaires contribuent à financer les politiques dont j'ai la charge : le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », est doté de 50 millions d'euros supplémentaires cette année ; le produit des taxes affectées à des établissements publics s'élève à 376 millions d'euros, l'ADEME voyant ainsi ses moyens financiers d'intervention assurés et confortés.
De même, le programme des interventions territoriales de l'État, le PITE, représente, pour les actions relatives à l'environnement, 16 millions d'euros.
La prise en compte de ces différents financements nous permet d'apprécier la véritable augmentation des moyens mis en oeuvre, qui s'élève, au total, à 9,3 %.
Pour ce qui concerne les effectifs, l'augmentation est de 58 ETPT, ce qui permet la création nette de 40 emplois, les 18 autres correspondant à des transferts d'emplois existants. Ces 40 créations sont prioritairement affectées au dispositif Natura 2000, à l'évaluation environnementale, à l'inspection des installations classées et à la mise en oeuvre du futur règlement REACH.
Cela constitue un effort substantiel dans le cadre contraint qu'est celui des finances publiques aujourd'hui.
Je ne peux pas parler des moyens de mon ministère sans élargir mon propos au service public de l'environnement. Les politiques de l'environnement, dont mon ministère a la responsabilité, associent de très nombreux établissements publics. Les autres ministères, quant à eux, participent chacun dans son domaine à la mise en oeuvre des politiques de l'écologie et du développement durable et je souhaite définir et renforcer avec chacun d'entre eux les actions qu'il convient de mettre en oeuvre en 2007.
Prendre en compte cette réalité laisse entrevoir l'importance, y compris financière, des champs couverts de façon transversale par mon ministère et de la politique conduite par le Gouvernement.
Ce service public de l'environnement pèse plus de 3 milliards d'euros et emploie plus de 13 000 personnes.
Encore plus que sur la croissance de mon budget, j'attire votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur la manière dont mon ministère anime cet ensemble.
En ce qui concerne les programmes LOLF, je dois souligner que leur structure actuelle ne me satisfait pas totalement. Sur le fond, je considère, en effet, que mon ministère mène trois grandes politiques sectorielles : outre le développement durable et la lutte contre l'effet de serre, qui sont des politiques transversales, il y a la lutte contre les risques, la biodiversité et l'eau. Chacune de ces politiques relève logiquement d'une direction d'administration centrale. Il me semble anormal que n'ait pas été attribué à chacune d'elles un programme budgétaire.
Par conséquent, quand on fera le bilan de la LOLF et que l'on envisagera des restructurations, il faudra mettre la politique de l'eau sur le même pied que les deux autres, en créant un programme « Eau ».
Comme vous le constatez, nous avons recherché, comme l'an dernier, l'affectation des moyens les plus pertinents pour atteindre les objectifs et la performance demandés à l'action publique.
La part du budget de mon ministère dans le budget civil de l'État augmente depuis 2005 dans des proportions notables et atteindra 0,40 % en 2007. Il est vrai que nous sommes encore loin de ce que devrait être l'objectif, à savoir représenter 1 % du budget civil de l'État. Mais eu égard aux deux années qui viennent de s'écouler, qui se caractérisent par des augmentations substantielles, je peux dire, même si je ne suis pas tout à fait satisfaite, que nous sommes sur la bonne voie. Si de telles augmentations interviennent chaque année, cet objectif pourra être atteint rapidement. Ce seuil de 1 % est certes symbolique mais il serait pertinent, dans la mesure où ce budget représente un levier extraordinaire afin de mobiliser des ressources pour la protection de l'environnement. En effet, un euro investi par mon ministère sur un projet est le plus souvent complété par trois euros supplémentaires d'autres provenances.
L'écologie a besoin de tout le monde. Je sais pouvoir compter sur votre soutien, mesdames, messieurs les sénateurs, lors du vote de ce projet de budget.
Je souhaite maintenant répondre aux différents orateurs.
Madame le rapporteur spécial, je connais votre investissement et le combat que vous menez pour l'environnement et le développement durable, ainsi que toutes les actions que vous avez mises en oeuvre dans votre ville. Je sais les raisons pour lesquelles vous tenez des discours très fermes. Sachez que je vous en sais gré.
Pour en revenir au plan de renforcement des effectifs de l'inspection des installations classées en DRIRE, je reconnais qu'il n'a pu être mené à son terme, et je le regrette.
Je partage avec vous la conviction que cette mission est fondamentale pour la sécurité de nos concitoyens et l'amélioration de la qualité de l'environnement.
Je sais, comme vous, que ces services font face à de très importants chantiers, tant dans le domaine de la prévention des risques technologiques - avec le renforcement des mesures de sécurité sur les sites Seveso ou la mise en place des plans de prévention des risques technologiques - que dans celui de la prévention des pollutions chroniques. Citons par exemple le plan santé-environnement, avec la prévention des émissions de légionelles, ou la mise en conformité des installations de traitement de déchets. Je rappelle que nous sommes parvenus en 2005 à ce que toutes les usines d'incinérations soient aux normes. Celles qui ne l'étaient pas ont été fermées.
Le Gouvernement a cependant entrepris un effort sans précédent de renforcement des effectifs des DRIRE, en créant 150 postes en 2002, puis 206 sur la période 2004-2007. C'est dans ce cadre que le projet de budget pour 2007 prévoit la création de 10 postes complémentaires d'inspecteur des installations classées. Certes, l'objectif de 400 postes nouveaux n'est pas atteint.
Je soulignerai d'autre part que ce renforcement des effectifs a été obtenu dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, alors que très peu de ministères avaient la possibilité de créer des emplois.
Je partage également avec vous la conviction qu'il faut doter l'inspection des installations classées, que ce soit en DRIRE ou dans les directions départementales des services vétérinaires, de moyens adaptés à ses missions, qui ne sont certes pas en décroissance. Je puis vous assurer que j'y serai très attentive dans le cadre des réflexions que je conduirai dans les mois à venir, en faisant le bilan du plan de renforcement et de modernisation 2004-2007, et en demandant aux services de faire de nouvelles propositions d'évolution pour les années à venir.
Le Premier ministre a décidé de renforcer les moyens de l'ADEME dans le cadre de l'actualisation du plan Climat récemment adoptée en comité interministériel.
Les moyens d'intervention supplémentaires alloués à l'ADEME s'élèveront à 30 millions d'euros. Ils seront financés d'une part par la création d'une nouvelle taxe sur la consommation de charbon, à hauteur de 5 millions d'euros et, d'autre part, par l'affectation d'une partie des recettes de la taxe générale sur les activités polluantes, pour 25 millions d'euros. Notons que les taux de cette taxe seront augmentés pour rattraper leur non évolution depuis 1999.
Je pense que cela vous rassurera pleinement quant au renforcement des moyens de l'ADEME.
En ce qui concerne l'utilisation de ces moyens nouveaux, je peux vous confirmer que le Gouvernement et le conseil d'administration de l'Agence ont récemment validé les priorités d'emploi de ces crédits.
L'Agence mobilisera 20 millions d'euros pour doubler l'effort en faveur de l'accompagnement de la production de chaleur à partie d'énergies renouvelables.
Elle consacrera 3 millions d'euros à la poursuite et au renforcement des campagnes d'information sur la lutte contre le changement climatique.
Elle vouera 3 millions d'euros au doublement du nombre d'espaces « info-énergie » destinés à l'information du grand public, dont nous constatons qu'ils font face à une demande sans cesse croissante.
Elle consacrera enfin 4 millions d'euros au renforcement du budget des aides à la décision, à l'aide à la création de centres régionaux de ressources sur la qualité environnementale du bâti tournés vers les professionnels et au développement des capacités d'observation dans le domaine de l'énergie.
Comme vous pouvez le constater, l'ambition est forte, et le Gouvernement l'assume budgétairement en dotant substantiellement l'ADEME, qui s'engagera résolument dans ce défi.
Madame le rapporteur spécial, vous vous interrogez aussi sur la nécessité d'un programme « Eau » - je crois y avoir répondu et vous avoir montré combien je partage votre souci -et vous proposez d'établir en place de ce programme un document de politique transversale.
Je n'ai aucune hésitation sur la nécessité de créer ce programme, comme je l'ai dit. Il faut absolument un système de pilotage fort sur une politique mobilisant 4 400 agents pour le seul ministère de l'écologie et du développement durable - 1 800 fonctionnaires et 2 600 agents dans les agences de l'eau et au Conseil supérieur de la pêche - et un budget consolidé de plus de 2 milliards d'euros par an.
C'est un comble de constater que ce pilotage qui était permis par l'ordonnance du 2 janvier 1959 est interdit par la LOLF, qui met pourtant l'accent sur l'efficacité des politiques et les indicateurs de suivi de performance. Où se trouve la disposition de la LOLF qui me permet d'établir des indicateurs « transprogrammes » ?
Par ailleurs, le découpage actuel ne permet pas non plus d'inscrire certaines dépenses de façon transparente, dépenses qui correspondent pourtant à des pans majeurs de notre politique. Où inscrire les dépenses liées à l'eau potable ou à la création de ressources nouvelles dans la nomenclature actuelle ? Où inscrire les dépenses liées à la gestion de la sécheresse ?
Pire, une partie importante des actions liées à l'eau relève de deux programmes. Elle peut ainsi être imputée sur l'un ou sur l'autre, au gré des humeurs.
Il en est ainsi de l'entretien des rivières, ou de certains éléments du système d'information sur l'eau, par exemple l'hydrométrie, qui servent à la prévention des inondations - programme 181 - et à la mesure de la sécheresse - imputation, faute de mieux, sur le programme 153. Où inscrire les crédits : sur le programme 153, comme je l'ai fait en 2006, ou sur le programme 181, comme je le propose en 2007, parce que les services qui ont besoin des crédits sont des unités opérationnelles du programme 181 ?
Je donnerai un autre exemple : si l'État est condamné au contentieux pour un défaut de police de l'eau - programme 153 - qui serait révélé à l'occasion d'une inondation - programme 181 -, où devrons-nous imputer la dépense ?
Ces exemples montrent que nous avons dû séparer une partie des instruments des politiques qu'ils servent, ce qui me semble être à l'opposé de la philosophie de la LOLF.
Enfin, que dire des agences de l'eau, dont une grande partie des moyens sont rattachés au programme 181, alors que leurs objectifs relèvent en totalité du programme 153, depuis la transposition de la directive-cadre sur l'eau ?
Votre proposition d'établir un document de politique transversale ne permet qu'une addition de dépenses prévues ou constatées, et ne me semble donc régler aucun de ces problèmes, en particulier celui du pilotage et de l'évaluation.
Certains font remarquer que créer un programme « Eau » conduirait à reproduire dans la nomenclature l'organigramme du ministère de l'écologie et du développement durable. Toutefois, cet organigramme a justement été modelé sur les politiques du ministère, et c'est l'adoption de la loi sur l'eau de 1992 qui a entraîné la création de la direction de l'eau.
Cette politique est au coeur des préoccupations des Français, et son importance ne cesse de croître, y compris au niveau mondial.
Pour ma part, je milite pour que les instruments soient subordonnés aux politiques dont l'État a la charge, et non l'inverse.
Madame le rapporteur spécial, vous avez également demandé des éclaircissements sur les échéanciers de crédits de paiement associés aux autorisations d'engagement. Vous faites ici référence aux dettes de mon ministère. Je souhaite donc vous apporter les précisions suivantes.
Cet échéancier ne donne qu'une vision strictement comptable et partielle du problème. En effet, la différence entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement qui les couvrent correspond à une vision pluriannuelle, parfaitement légitime. Elle ne peut cependant être rapportée au seul projet de loi de finances : les opérations se mènent sur plusieurs années, vous le savez, et si les autorisations d'engagement sont engagées sur un seul exercice, les crédits de paiement associés sont consommés sur plusieurs exercices, le plus souvent sur cinq ans. La loi de finances ne peut donc permettre de couvrir toutes les autorisations d'engagement ouvertes.
De surcroît, dans le cadre du dialogue de gestion entre les responsables de programme et les responsables de budgets opérationnels de programme, les BOP, la question des dettes a été constamment abordée. Il en ressort que le paiement des dettes est un souci que tous partagent. Les responsables de BOP ont prévu de consacrer des crédits de paiement au remboursement des dettes dans une proportion un peu supérieure à celle qui était envisagée dans le projet annuel de performance, sans toutefois aller jusqu'à remettre en question le financement d'opérations nouvelles que nous appelons tous de nos voeux. Le calcul définitif de cet abondement est en cours de consolidation, et je ne manquerai pas de vous informer du résultat.
Pour accompagner les efforts de désendettement de ce ministère, qui était lourdement endetté, le Premier ministre a accepté une contribution exceptionnelle du fonds Barnier, à hauteur de 40 millions d'euros.
Ce prélèvement est inscrit à l'article 16 ter du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, dont je vous rappelle à quel point je souhaite le voir aboutir. Je vous annonce d'ailleurs ici que cette loi sera adoptée avant la fin de l'année, et non l'année prochaine.
M. Christian Demuynck. Très bien !
M. le président. Bravo !
Mme Nelly Olin, ministre. Il nous reste enfin à nous pencher sur le cas de l'ADEME. Comme mes services l'ont signalé dans le projet annuel de performance, une opération de recollement de la dette est actuellement menée en collaboration avec les services de la comptabilité publique, et devrait aboutir à une connaissance exacte de la situation, que j'appelle de tous mes voeux. Je ne peux donc pas m'engager ici sur le montant exact des dettes de l'État vis-à-vis de l'ADEME qui, dans le projet annuel de performance, représentent 70 % de la différence entre autorisations d'engagement et crédits de paiement.
Madame le rapporteur spécial, vous avez également demandé des précisions sur les actions menées pour améliorer la situation des contentieux nationaux.
Comme vous l'avez noté, des efforts importants ont été réalisés en matière de transposition. Depuis le mois de novembre 2006, c'est-à-dire depuis plus d'un an, le ministère de l'écologie et du développement durable est à jour en ce qui concerne toutes les transpositions de directives européennes. Cela nous a permis de réduire le risque de contentieux communautaires. Il nous faut cependant rester vigilants sur ce point : ce n'est pas parce que nous avons réussi cette « performance » que tout nous est donné. Les délais sont inévitables, et j'ai bien l'intention de les respecter.
Pour ce qui concerne les contentieux nationaux, une évaluation précise a été faite dans le courant du mois d'octobre par les services juridiques du ministère, en liaison étroite avec les préfectures et les directions régionales de l'environnement, les DIREN. Le montant hors intérêts moratoires s'élève à 12,4 millions d'euros. Sur ce montant, 2 millions ont déjà été réglés au titre du programme 211, en dépit du fait que les crédits n'avaient pas été inscrits à cet effet en loi de finances initiale. Le responsable de programme a en grande partie fait jouer la fongibilité asymétrique des crédits du titre II, pour 1,2 million d'euros, ainsi que les marges de manoeuvre dégagées en cours de gestion. Il s'agit de multiples petits contentieux locaux, qui n'avaient, hélas ! pu être soldés jusqu'alors.
Un contentieux important avec le conseil général de la Réunion, d'un montant de 2,1 millions d'euros, pourrait être réglé dans les jours qui viennent, si les délais contraints de fin de gestion en 2006 le permettent : les mises en paiements doivent être faites au plus tard le 15 décembre.
Reste enfin un contentieux majeur avec l'Établissement public d'aménagement de la Loire, d'un montant de 8,4 millions d'euros. Le ministère de l'écologie et du développement durable s'est pourvu en cassation sur cette affaire importante, qui constitue la plus grosse partie des 12,4 millions d'euros mentionnés.
Dans le projet de loi de finances pour 2007, une somme de 8,5 millions d'euros est pourtant réservée au paiement d'éventuels contentieux.
Monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique réaffirme l'engagement de la France à respecter l'objectif indicatif de 21 % de consommation électrique d'origine renouvelable à l'horizon 2010.
La filière éolienne paraît effectivement la principale ressource susceptible d'être mobilisée dans ce cadre. Elle contribue à la diversification du bouquet énergétique et à la lutte contre l'effet de serre.
Je suis très attachée à ce que l'essor de cette technologie qui répond à des objectifs environnementaux ne se fasse pas au détriment d'autres objectifs environnementaux ou patrimoniaux, concernant notamment les nuisances sonores, la biodiversité, les paysages ou le patrimoine culturel.
La circulaire que j'ai signée le 19 juin 2006 avec M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, donne aux préfets des instructions très précises à cet égard. Elle a été élaborée à la suite d'une large concertation avec les professionnels, les associations et les élus.
Elle précise les conditions dans lesquelles doivent être élaborées et autorisées les zones de développement de l'éolien, en fonction de trois critères : le potentiel éolien, les possibilités de raccordement au réseau électrique, mais également - et cela rejoint vos préoccupations, monsieur Dupont - la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés.
Si l'instruction des dossiers est pilotée par la DRIRE, il est prévu que les services déconcentrés en charge de l'environnement et de la culture, les DIREN et les services départementaux de l'architecture et du patrimoine, les SDAP, soient très étroitement associés. Mes services conduisent avec les DIREN un travail d'harmonisation des pratiques des services de l'État des différentes régions.
Concernant les garanties financières, l'article L. 553-3 du code de l'environnement auquel vous faisiez référence prévoit que, pour les éoliennes situées sur le domaine maritime, les garanties financières doivent être constituées dès le début de la construction. Le porteur de projet doit donc faire la preuve qu'il a mis en place ces garanties financières pour obtenir son autorisation.
Pour l'ensemble des éoliennes, j'ai pris note de vos observations et, soyez-en sûr, je veillerai avec M. le ministre délégué de l'industrie à ce que le dispositif définissant la constitution de ces garanties financières soit rapidement précisé.
Dans votre rapport présentant l'avis de la commission des affaires culturelles, monsieur Dupont, vous avez souhaité que soit mis en place un plan prospectif établissant l'orientation que l'État entend donner à sa politique de création de réserves naturelles nationales.
Je puis vous assurer que je partage entièrement cette préoccupation et vous préciser qu'une mission de l'inspection générale de l'environnement est actuellement en cours pour travailler à l'élaboration de ce projet.
Il s'agit en effet de configurer le visage qu'aura le réseau national d'aires protégées d'ici quinze ou vingt ans, afin que celles-ci représentent bien le patrimoine naturel le plus en danger, en métropole et dans les DOM, sur terre comme sur mer, mais aussi le patrimoine géologique
Dans cette perspective, il nous faut tirer un bilan de l'ensemble des réserves naturelles nationales actuelles. Je crois savoir que les missions sur le terrain de l'inspection générale de l'environnement sont envisagées pour le début de 2007.
Monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, je vous remercie d'avoir dressé un panorama si pertinent de la problématique « Climat » dans sa dimension planétaire avec l'état des négociations internationales pour préparer notamment l'après-2012 et, au plan national, les ambitions portées par la France en matière de lutte contre le changement climatique. Plusieurs politiques portées par le Gouvernement concourent en fait, directement ou indirectement, à cette lutte. Je partage votre conviction qu'un document de politique transversale portant sur le climat serait un outil de cohérence et de visibilité de l'ensemble des actions menées dans ce domaine. Le Gouvernement présentera, dès la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2006, un amendement prévoyant l'élaboration d'un tel document.
Par ailleurs, le plan national d'allocation des quotas de CO2 constitue un outil très important au service de la lutte contre le changement climatique, dans laquelle, je le répète, la France est pleinement engagée. Nous ne devons pas opposer économie et écologie, bien au contraire, et la mise en place du marché du carbone est un moyen formidable pour inciter nos entreprises à développer des technologies propres. Pour ma part, je leur fais confiance : elles ont d'ailleurs déjà consenti des efforts très importants pour défendre l'environnement et elles se sont engagées dans la lutte contre le changement climatique.
Comme vous le savez, c'est la France, seule, qui a pris l'initiative de demander un délai supplémentaire à la Commission européenne, laquelle n'a émis aucun avis de rejet ni aucun avertissement en amont. Cette décision n'en est que plus courageuse : nous souhaitons prendre le temps de procéder à une nouvelle consultation, afin de rendre éventuellement une meilleure copie.
M. Christian Demuynck. Très bien !
Mme Nelly Olin, ministre. Nous avons déjà commencé à travailler et je recevrai moi-même, dès la semaine prochaine, les associations, les ONG et, bien sûr, les industriels à l'occasion d'un nouveau tour de table. Les objectifs chiffrés annoncés par la Commission européenne s'avèrent extrêmement difficiles à atteindre et supposent un effort très significatif de notre part. Voilà pourquoi un délai supplémentaire est tout à fait nécessaire. Notre nouveau plan national d'allocation des quotas de CO2 sera notifié à Bruxelles d'ici à la mi-décembre.
Monsieur Raoult, j'ai déjà en partie répondu à plusieurs de vos interrogations.
Concernant la biodiversité, je suis heureuse du soutien que vous apportez aux efforts déployés pour lutter contre la perte de diversité biologique. Vous avez tout particulièrement insisté sur la politique des parcs naturels régionaux, dans laquelle nous sommes tous les deux très investis. Nous l'avons notamment manifesté lors des dernières Journées nationales des parcs naturels régionaux, qui se sont déroulées en Camargue.
Les crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2007 au titre du soutien financier à la politique des PNR s'élèvent à 7,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 7,7 millions d'euros en crédits de paiement. Le niveau de l'enveloppe budgétaire est donc stable par rapport à 2006, ce qui mérite d'être souligné. Je peux vous assurer, puisque tous les calculs ont été faits, que ces sommes permettront à l'État de continuer à apporter un soutien important à la politique des PNR.
Le soutien à l'ingénierie de projet que déploient les PNR au service de la biodiversité et du développement durable représente près de 6 % de leurs budgets. En incluant les aides dont ces parcs bénéficient de la part d'établissements publics de l'État ou sur d'autres programmes ou actions de son budget, l'aide globale de l'État monte à quelque 12 %.
Par ailleurs, j'ai obtenu du Premier Ministre, avec l'aide précieuse de la Fédération des parcs naturels régionaux de France, que les préfets puissent inscrire ce soutien dans les contrats de projets État-région, les CPER.
Nous avons donc su trouver un juste équilibre entre les régions, les autres collectivités territoriales et l'État, pour soutenir financièrement la mise en oeuvre de cette politique : la continuité de l'aide est assurée pour sept ans grâce aux CPER. La grande réussite des parcs naturels régionaux est ainsi pleinement reconnue par l'État, qui leur renouvelle une confiance d'ailleurs tout à fait justifiée.
Monsieur Raoult, je vous précise que l'enveloppe prévue permettra également d'assurer le financement à près de 20 % de la Fédération des parcs naturels régionaux de France, dont vous êtes d'ailleurs l'un des vice-présidents et avec laquelle vous accomplissez un travail de grande qualité. Elle bénéficiera en 2007 d'une dotation complémentaire, qui est destinée à contribuer au financement des manifestations prévues pour la célébration du quarantième anniversaire du texte fondateur des PNR.
Vous avez également appelé mon attention sur le soutien aux associations. Je souhaite tout d'abord vous informer que les crédits inscrits dans le budget 2007 sont maintenus par rapport à 2006 ; l'examen de la gestion de l'année 2006 montre que la plupart des projets importants présentés par les associations ont pu être pris en compte. C'est notamment le cas pour les plus importantes d'entre elles, notamment France Nature Environnement ou la Ligue pour la protection des oiseaux, qui, contrairement à ce que la presse a pu écrire, n'ont pas subi une diminution de leurs subventions.
Par ailleurs, depuis plusieurs années, le ministère de l'écologie et du développement durable a entrepris un travail de programmation et de suivi de gestion plus rigoureux, ce qui lui permet de cibler plus précisément les demandes financières et d'apporter ainsi des réponses mieux adaptées. Je dois constater à cet égard que nombre d'associations doivent encore faire un effort de gestion important : en effet, au début du quatrième trimestre de cette année, de nombreux dossiers n'avaient pas encore été déposés, ce qui perturbe tout de même la bonne exécution de la programmation initiale.
Madame Procaccia, je tiens avant tout à vous souhaiter un prompt rétablissement, et je vous remercie en tout cas des efforts que vous faites parce que je sais que vous souffrez beaucoup.
Je partage tout à fait votre souci de voir le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques voté au plus vite. Je le répète, celui-ci sera bien adopté avant la fin de l'année. Je suis donc un ministre heureux ! Il importe d'agir vite eu égard aux mesures prévues.
Je pense, tout d'abord, aux neuvièmes programmes pluriannuels des agences de l'eau et à leurs 12 milliards d'euros de dépenses sur la période 2007-2013, dont un milliard d'euros de dotation de solidarité envers les communes rurales.
Mme Évelyne Didier. Un milliard, seulement ?
Mme Nelly Olin, ministre. Les comités de bassin et les conseils d'administration se sont prononcés ou vont prochainement le faire. J'ai d'ailleurs assisté hier à une réunion du comité de bassin Loire-Bretagne, qui a entériné la mesure. À mon avis, les délais seront respectés.
Je pense, ensuite, à la création de l'ONEMA, qui sera l'instrument de la solidarité interbassins et de la connaissance des milieux. À cet égard, grâce à une action en amont, le travail réglementaire est déjà très avancé.
Je pense, enfin, au crédit d'impôt pour la récupération des eaux pluviales.
Sur tous ces points, je le dis solennellement, un travail très important est réalisé, et je m'engage à ce que les textes d'application de ces dispositions soient publiés dans les trois mois. (Marques d'approbation au banc des commissions.)
Madame le sénateur, vous avez insisté plus particulièrement sur les crédits affectés à la protection de la biodiversité et des paysages, qui sont en effet en forte augmentation. Je vous remercie d'avoir notamment mentionné les efforts faits en direction de la stratégie nationale pour la biodiversité, les parcs nationaux et le réseau Natura 2000.
Pour autant, je peux vous assurer que le réseau des réserves naturelles nationales est loin d'être négligé. C'est un réseau actif, qui s'est enrichi très récemment d'extensions ou de créations de nouvelles réserves, comme la Petite Camargue Alsacienne ou le Mont Grand Matoury en Guyane. Il a vocation à constituer un réseau pertinent et représentatif des milieux naturels, qui abritent la plupart des espèces menacées en métropole et outre-mer.
Les réserves naturelles nationales protègent aujourd'hui environ 2,8 millions d'hectares terrestres et marins, dont plus de 2,2 millions d'hectares pour la seule réserve des Terres australes françaises, créée en octobre dernier.
Les subventions versées sont principalement destinées à la gestion écologique de ces parcs. Plus de 700 agents, représentant environ 500 équivalents temps plein, sont mobilisés pour surveiller, étudier et gérer les milieux naturels et pour informer le public. Les moyens de fonctionnement consolidés pour 2007 permettront d'accompagner la gestion des réserves, tout en maintenant la capacité de création de nouvelles réserves naturelles. Les « dialogues de gestion » conduits récemment avec les régions ont permis d'intégrer ces éléments et des moyens complémentaires pourront aussi être mobilisés, notamment dans le cadre de Natura 2000 ou du projet « Inventaires et connaissance ».
Sur les parcs naturels régionaux, je me suis déjà longuement exprimée aujourd'hui et vous connaissez, là aussi, mon attachement à la politique de partenariat exemplaire qui est actuellement menée. Je le rappelle, le réseau des 44 parcs naturels régionaux couvre 13 % du territoire, regroupe plus de 3 millions d'habitants et assure la cohérence des multiples petits territoires que sont notamment les sites Natura 2000, les zones de protection spéciale créées en application de la directive « oiseaux » et les réserves naturelles.
Monsieur Laffitte, je partage totalement vos conclusions quant aux conséquences inévitables du changement climatique. En effet, la « machine à réchauffer le climat » est en marche et, même dans le meilleur des cas, c'est-à-dire si nous parvenions à une diminution draconienne des émissions, les effets du changement climatique sur la ressource en eau seront importants : inondations plus fréquentes, sécheresses aggravées, remontée du niveau des mers. Vous l'avez dit, ce sont des centaines de millions de personnes qui seront touchées.
Je tiens à vous rendre hommage pour votre engagement et pour le combat que vous menez dans ce domaine, et à vous remercier, car vos éclaircissements m'aident beaucoup dans mon travail.
À l'échelon national, l'adoption de l'excellent amendement que vous avez proposé lors de la discussion du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques en septembre dernier permet désormais de placer l'adaptation au changement climatique au coeur des objectifs de la politique de l'eau. Cela donne ainsi un cadre législatif à l'ensemble des actions à mener, qui seront notamment déclinées dans le cadre des SDAGE.
Au niveau européen, sur l'initiative de la France, de l'Espagne et du Portugal, huit pays ont demandé à la Commission européenne de s'intéresser à la sécheresse comme elle le fait pour les inondations, qui font l'objet d'un projet de directive. Une communication sera faite lors du Conseil européen qui se tiendra au premier semestre 2007, afin d'identifier les actions à mettre en place sur cette question.
Au demeurant, certains pays seront sans doute beaucoup plus touchés que d'autres par ces phénomènes, du fait de leur situation géographique ou d'une grande difficulté d'adaptation. Le Forum mondial de Mexico de mars dernier, auquel j'ai participé, a commencé à aborder ces sujets et à esquisser des solutions : il reste bien sûr maintenant à la communauté internationale à les mettre en oeuvre.
En matière de recherche, de nombreuses structures existent, et je suis totalement d'accord avec vous sur le fait qu'il nous faut les mobiliser sur toutes ces questions : le cadre pour l'établissement de tels réseaux existe ; à nous de l'utiliser !
Vous avez également insisté à juste raison sur l'érosion de la biodiversité et, notamment, sur l'importance de la sensibilisation du grand public en la matière. Cela a été cité, une vaste campagne de communication a été lancée cet automne, sur mon initiative. Comme vous, je sens que l'opinion publique change progressivement de comportement et est désormais très sensibilisée à ce problème.
Monsieur Détraigne, si j'ai déjà répondu à certaines de vos interrogations, je tiens à vous remercier des appréciations que vous avez formulées.
En ce qui concerne les biocarburants, vous l'avez dit, le Gouvernement a installé en juin dernier un groupe de travail chargé de produire un programme pour développer la filière des véhicules flex fuel, qui sont capables de fonctionner avec de l'essence intégrant un taux d'éthanol pouvant varier de 0 % à 85 %. Ce groupe de travail a effectivement associé tous les spécialistes de la filière et les constructeurs automobiles. Les premières voitures Peugeot et Citroën de ce type seront disponibles dès l'été 2007, et Renault prévoit de convertir la moitié de sa gamme au flex fuel d'ici à 2009. L'année prochaine, 500 à 600 pompes vertes seront ainsi mises en place, trois fois plus en 2008, pour mettre à la disposition des consommateurs le fameux carburant E85 ou flex fuel.
Vous avez évoqué notre plan national d'affectation de quotas d'émission de CO2. Je n'y reviens pas car j'ai fourni un certain nombre de précisions tout à l'heure.
Madame Didier, en ce qui concerne le projet REACH, auquel vous avez fait référence, un accord équilibré vient d'être trouvé entre le Parlement et le Conseil, et le principe de substitution n'est pas abandonné.
Mme Évelyne Didier. Ah !
Mme Nelly Olin, ministre. Le 13 décembre prochain, je présenterai en conseil des ministres un plan de renforcement de notre action sur la gestion des produits chimiques, du renforcement de nos capacités d'évaluation à la mise en oeuvre de contrôles opérationnels.
Je citerai également le plan santé-environnement mis en place depuis 2005, dont l'objectif de réduction des émissions de dioxines des incinérateurs ne constitue qu'un volet. Pour ne prendre qu'un exemple, nous avons divisé par cent en dix ans les émissions de dioxines : les normes ainsi obtenues ne présentent absolument aucun danger pour la santé. Nous avons aussi lancé un plan de réduction des émissions toxiques portant sur 483 établissements.
En ce qui concerne les crédits des associations de surveillance de la qualité de l'air, ils ne sont pas en baisse, puisqu'ils sont reconduits en 2007 au niveau de 2006, étant précisé que l'ADEME contribue également à leur financement.
S'agissant des autres sujets que vous avez abordés, j'ai déjà apporté, me semble-t-il, des réponses précises.
Monsieur Demuynck, je vous remercie de votre soutien. Je connais les actions de fond que vous menez en ce domaine dans votre commune et je vous rejoins dans vos réflexions sur la nécessité de constituer à terme un grand ministère de l'environnement.
J'ai dit que je souhaitais la constitution d'un programme « Eau », mais à défaut de pouvoir fusionner les trois programmes de la mission « Écologie et développement durable », qui sont chacun d'une taille sous-critique par rapport à ce que la LOLF porte dans sa logique de responsabilisation des gestionnaires. En fait, c'est bien la mission elle-même qui ne reflète pas l'ampleur de la politique de l'environnement.
Je pense qu'à ce sujet la LOLF n'en est qu'à ses débuts et qu'une telle réforme, porteuse de potentialités majeures, a besoin de temps pour trouver ses pleins effets. Nous avons là un exemple de l'interaction entre structure budgétaire et organisation administrative, et je gage que nous connaîtrons, dans les années à venir, des évolutions importantes de la structure des programmes et des missions. Je ne doute pas que l'écologie se voit reconnaître, dans ce cadre et dans l'organisation administrative, la place primordiale qui doit être la sienne.
En qui concerne la lutte contre le réchauffement climatique, j'ai répondu à votre question lorsque je me suis adressée à M. Bizet.
Vous avez souligné l'importance de la recherche dans le domaine automobile. Je vous rappelle que le Gouvernement a lancé un programme de 100 millions d'euros, qui permettra de mettre sur le marché en 2010 une voiture familiale consommant moins de 3,4 litres aux 100 kilomètres. Conformément à la demande du Premier ministre, l'Agence de l'innovation industrielle soutiendra également un programme destiné à mettre au point un moteur hybride diesel.
Enfin, je vous remercie d'avoir souligné l'effort entrepris dans le domaine de la prévention des risques, à la suite de la loi de juillet 2003, que ce soit par la réduction des risques dans les sites SEVESO, par l'amélioration de l'information de nos citoyens, pour la mise en oeuvre des plans de prévention des risques naturels et, désormais, technologiques. Soyez assuré que cet effort sera maintenu. Certains orateurs ont évoqué l'importance du suivi de la performance de nos actions : vous constaterez que notre projet de plan annuel de performances et les indicateurs associés sont explicites sur cet enjeu.
Monsieur Jacques Blanc, je vous remercie de la pertinence de votre analyse et de votre soutien sans faille. Pour la ministre chargée de l'environnement, qui est un peu « l'empêcheur de tourner en rond » dans le travail gouvernemental, celle qui rend les choses un peu plus difficiles encore en obligeant ses collègues à introduire la préservation de l'intérêt des générations futures dans les choix du présent, celle qui, selon les uns, en fait trop et, selon les autres, jamais assez, il est réconfortant de se sentir comprise et soutenue.
Je suis persuadée que vous exprimez en fait l'opinion de la majorité de nos concitoyens, celle qui constate que beaucoup a été fait ces dernières années et que l'impulsion donnée devra en tout état de cause être poursuivie.
Vous soulevez, monsieur le sénateur, la question de la mise en place d'un réseau euroméditerranéen des parcs nationaux. Il me semble que cette question est à replacer dans le cadre plus global des partenariats à l'international que portent et déploient les parcs nationaux. Comme vous le savez, la dimension internationale entre dans les missions du nouvel établissement Parcs nationaux de France, PNF, dont j'installerai la semaine prochaine le premier conseil d'administration. Sur ce point, je pense donc nécessaire avant tout que des échanges et des discussions aient lieu avec les autres pays européens concernés, la Commission européenne, Europarc et Parcs nationaux de France, afin de bien cerner les contextes et les enjeux. La décision me paraît devoir relever ensuite du conseil d'administration de PNF.
Quant à l'ouverture de Parcs nationaux de France aux élus régionaux, je partage votre analyse, monsieur le sénateur. Sur ces projets de territoires exceptionnels, l'articulation entre les parcs et les régions est non seulement essentielle mais incontournable. Il est en effet d'un intérêt commun évident de continuer à apprendre à travailler ensemble. Cela n'a d'ailleurs pas échappé à la vigilance du législateur, qui a tenu à ce qu'un représentant de l'Association des régions de France, l'ARF, soit membre du conseil d'administration de Parcs nationaux de France. Je peux même vous préciser que M. Le Scornet a été désigné récemment par l'ARF pour occuper cette fonction.
En ce qui concerne le financement du « 5è critère » de la dotation globale de fonctionnement au bénéfice des communes dont une partie du territoire est comprise dans le coeur d'un parc national, prévu par l'article 20 de la loi du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux, je suis à même de vous apporter les apaisements nécessaires : cette mesure ne sera pas financée par un gage sur les crédits de la mission « Écologie et développement durable ». Le gage a bien été levé au cours de la discussion de la première partie de ce projet de loi de finances, et je m'en réjouis. La politique de la biodiversité bénéficiera donc en 2007 de l'augmentation de 32 % que j'ai annoncée, ce qui est nécessaire pour mener à bien la stratégie nationale qui a été décidée et dont je suis très fière. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et au banc des commissions.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Écologie et développement durable » figurant à l'état B.
État B
(En euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Écologie et développement durable |
696 361 452 |
635 313 952 |
Prévention des risques et lutte contre les pollutions |
140 244 878 |
132 596 578 |
Gestion des milieux et biodiversité |
199 013 858 |
187 114 658 |
Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable |
357 102 716 |
315 602 716 |
dont titre 2 |
227 047 000 |
227 047 000 |
M. le président. L'amendement n° II-19, présenté par Mme Keller, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention des risques et lutte contre les pollutions |
|
|
|
|
Gestion des milieux et biodiversité |
|
|
|
|
Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable Dont Titre 2 |
|
40.000.000
|
|
|
TOTAL |
40.000.000 |
|||
SOLDE |
- 40.000.000 |
0 |
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Le Président de la République a décidé d'installer la Maison de la francophonie sur le site du ministère de l'écologie et du développement durable. À terme, le ministère occuperait les deux tiers du site et la Maison de la francophonie un tiers. La rationalisation des locaux et leur rénovation devraient permettre d'offrir des surfaces améliorées.
À cet effet, 40 millions d'euros ont été inscrits en autorisations d'engagement sur l'action « Management et soutien » du programme « Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable » de la mission « Écologie et développement durable », au titre des frais engendrés par le déménagement du ministère, qui devrait durer environ trois ans, afin de réaliser des travaux dans le bâtiment.
D'après les informations obtenues, le coût de ces travaux est évalué à 60 millions d'euros et la phase intermédiaire à 40 millions d'euros, soit une facture totale de 100 millions d'euros. Les 60 millions d'euros d'autorisations d'engagement correspondant aux travaux sont inscrits sur l'action « Prestation d'appui et support » du programme « Conduite et pilotage des politiques économique, financière et industrielle » de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », autrement appelé service France Domaine.
La commission des finances estime que les autorisations d'engagement correspondant aux frais engendrés par le déménagement du ministère doivent être inscrites non pas sur cette mission, mais sur la mission correspondant au compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », au sein d'un nouveau programme retraçant les dépenses liées à des travaux.
C'est pourquoi elle propose de réduire de 40 millions d'euros les autorisations d'engagement inscrites sur l'action « Management et soutien » que je viens d'évoquer et souhaite, à défaut de pouvoir le faire eu égard aux règles de recevabilité financière des amendements fixées par l'article 40 de la Constitution, que le Gouvernement inscrive ces autorisations d'engagement sur la mission correspondant au compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », au sein d'un nouveau programme retraçant les dépenses liées à des travaux.
C'est une question d'équilibre. L'entité qui va gérer l'ensemble du patrimoine de l'État doit prendre en compte à la fois les dépenses et les recettes. À défaut, la présentation financière ne serait pas complète.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nelly Olin, ministre. Le président de la République a signé à Bucarest, au début du mois d'octobre 2006, une convention avec la Maison de la francophonie, aux termes de laquelle la France s'engage à mettre à disposition de cet organisme une partie de l'immeuble situé 20, avenue de Ségur, après rénovation totale, le ministère de l'écologie et du développement durable occupant actuellement 69 % de la surface des locaux.
Lors de la réunion interministérielle du 4 juillet 2006, le cabinet du Premier ministre a décidé d'allouer une enveloppe de crédits de 100 millions d'euros pour cette opération, répartis comme suit : 60 millions d'euros au titre des travaux de rénovation conduits par le ministère de l'économie et des finances, et 40 millions d'euros au ministère de l'écologie afin de financer les coûts de location, de déménagement et d'installation de ses services dans des locaux provisoires. En effet, l'ampleur des travaux et des nuisances qu'ils engendreront implique que ces services quittent les locaux qu'ils occupent actuellement pour une durée prévisible de trois ans. Par ailleurs, il n'existe pas à Paris de locaux domaniaux disponibles d'une surface suffisante pour accueillir le ministère de l'écologie et du développement durable pendant la période de rénovation.
La dotation de 40 millions d'autorisations d'engagement a été inscrite au projet de loi de finances pour 2007, les besoins en crédit de paiement devant être couverts en gestion 2007 et suivantes.
Le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » est destiné à accueillir les produits de cession des immeubles, 80 %, par les ministères, qui disposent chacun, au sein de ce compte, d'un budget opérationnel de programme, BOP. Ces crédits sont destinés au financement d'opérations immobilières ou de relocalisation ou d'extension. L'imputation des crédits alloués au ministère de l'écologie et du développement sur son BOP au sein du compte d'affectation spéciale « immobilier » n'est pas justifiée, compte tenu de l'objet de ce financement exceptionnel, à savoir le paiement de loyers sur plusieurs années.
Par ailleurs, le BOP, récemment créé au sein du compte d'affectation spéciale « immobilier », est destiné aux travaux de gros entretien qui sont sous la responsabilité de l'État propriétaire, tous ministères confondus.
L'affectation des crédits exceptionnels alloués au ministère de l'écologie et du développement et destinés au financement de son relogement provisoire pendant la durée des travaux de rénovation de l'immeuble de l'avenue de Ségur qui lui sont imposés constitue un détournement de l'objet de cette dotation.
Je vous demande donc, madame le rapporteur spécial, de bien vouloir retirer cet amendement voté en commission et, dans un souci de cohérence par rapport au débat de ce matin, d'attribuer de nouveau les 40 millions d'autorisations d'engagement au programme 211. À défaut, je serai contrainte d'émettre un avis défavorable.
M. le président. Madame le rapporteur spécial, l'amendement n° II-19 est-il maintenu ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Madame la ministre, notre préoccupation est tout simplement de respecter l'esprit de la LOLF.
L'opération envisagée, qu'il ne nous appartient pas de juger sur le fond, paraît raisonnable puisqu'il s'agit de loger un plus nombre de personnes au sein de l'immeuble qui abrite actuellement le ministère de l'écologie et de rénover celui-ci afin d'accueillir la Maison de la francophonie.
Mais là n'est pas la question. Notre amendement concerne les méthodes et les affectations liées à la gestion du patrimoine. Il est assez curieux de constater qu'une opération dont l'origine essentielle est liée à cette Maison de la francophonie a lieu au coeur même du budget du ministère de l'écologie et du développement durable. De plus, ce n'est pas la totalité de la charge qui est inscrite dans ce budget mais seulement une petite partie - les frais de déménagement et de location provisoire durant les travaux -, lesdits travaux étant quant à eux gérés par un autre ministère.
La commission des finances est soucieuse d'assurer la transparence dans la gestion patrimoniale de l'État, et celle-ci, chacun en a bien conscience, nécessite des moyens. Certes, il est important que les conditions de travail soient optimisées : il n'y a pas de débat à ce sujet. Il s'agit simplement d'une question de pilotage de ces politiques patrimoniales et de vision dans les comptes de l'État, qui ici relèvent, d'une part, de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » et , d'autre part, de votre ministère, alors que, dans d'autres cas, on les trouve dans le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
C'est dans ce souci de transparence, de clarté et d'identification des enjeux, qui, je n'en doute pas, est aussi le vôtre, madame le ministre, que nous avons fait cette proposition.
Toutefois, M. Jean-François Copé ayant, semble-t-il, donné ce matin quelques pistes d'inscription plus conformes à cette exigence de clarté, j'accepte de retirer cet amendement.
M. le président. L'amendement n° II-19 est retiré.
L'amendement n° II-88, présenté par M. Raoult, Mme Alquier et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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Prévention des risques et lutte contre les pollutions |
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9 156 000 |
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Gestion des milieux et biodiversité |
9 156 000 |
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Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable Dont Titre 2 |
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TOTAL |
9 156 000 |
9 156 000 |
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SOLDE |
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La parole est à M. Paul Raoult.
M. Paul Raoult. Cet amendement tend à transférer des crédits des actions 1, 2 et 3 au bénéfice des parcs naturels régionaux. Aux termes du projet de loi de finances, la moyenne des affectations de crédits par parc s'élève à 115 000 euros. Nous souhaitons que cette dotation minimale moyenne soit portée à 150 000 euros.
Il faut savoir que, aujourd'hui, les quarante-quatre parcs naturels régionaux - ils seront bientôt au nombre de quarante-cinq - couvrent 12 % à 13 % du territoire sur plus de 3 700 communes et représentent 12 % des sites Natura 2000 et cinquante et une réserves naturelles. Il s'agit donc d'infrastructures écologiques majeures.
Madame la ministre, vous le savez, les dotations sont aujourd'hui déconcentrées auprès des préfets et des DIREN. Dans la pratique, des parcs ont connu une diminution assez sensible de leur dotation budgétaire liée à l'État et les conditions de répartition varient d'une région à l'autre.
C'est pourquoi je vous propose cet amendement, qui prévoit un transfert des crédits au bénéfice de parcs naturels régionaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Nous partageons la préoccupation de M. Raoult concernant les parcs naturels régionaux et nous comprenons son souhait de les doter encore davantage.
Néanmoins ce budget permet une dotation complémentaire et constitue un progrès significatif.
En tout état de cause, je ne partage pas l'idée de M. Raoult de réduire de manière draconienne - il s'agit d'une division par cinq - des moyens pour la prévention des risques et la lutte contre les pollutions. Nous connaissons l'importance de ces politiques préventives, monsieur le sénateur, toujours trop chères quand on les met en oeuvre, mais toujours insuffisantes en cas de gros problème !
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nelly Olin, ministre. Je fais miens les propos de Mme le rapporteur spécial. On ne peut pas vouloir éliminer les risques et supprimer dans le budget des crédits qui sont consacrés à leur prévention. J'émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour explication de vote.
M. Jacques Blanc. Certaines régions ont supprimé des participations partenariales avec les parcs nationaux.
Il est donc difficile de supprimer des crédits destinés à lutter contre les risques, d'un côté, pour aller aider, de l'autre, des parcs au motif que certaines régions, pour des raisons purement politiciennes, ont cessé leurs partenariats !
M. Jean Bizet, rapporteur pour avis. Vous pensez à Georges Frêche !
M. Jacques Blanc. Je ne cite pas de nom !
M. le président. L'amendement n° II-18, présenté par Mme Keller, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention des risques et lutte contre les pollutions |
|
500.000 |
|
500.000 |
Gestion des milieux et biodiversité |
500.000 |
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500.000 |
|
Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable Dont Titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
500.000 |
500.000 |
500.000 |
500.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet de réduire de 500 000 euros les crédits de l'action « Prévention des risques technologiques et des pollutions » du programme 181 et d'augmenter à due concurrence les crédits de l'action 3 du programme 153 « Gestion des milieux et biodiversité ».
La subvention accordée à l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail, l'AFSSET, est reconduite en 2007.
Cette agence, dont les objectifs croissent pour atteindre 96,5 équivalents temps plein, contre 84 en 2006, recevra ainsi 3,2 millions d'euros de ce programme, et au total 17,3 millions d'euros de dotations budgétaires, contre 17,09 millions d'euros en 2006.
Cette agence avait fait l'an dernier, madame le ministre, l'objet de critiques, tant du président de son conseil d'administration - qui a depuis démissionné-, s'agissant de la qualité des expertises menées, que de la Cour des comptes, s'agissant de l'exercice général de ses missions.
Quand il a été interrogé, le ministère de l'écologie et du développement durable nous a indiqué que l'élargissement des missions de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale, l'AFSSE, au domaine des relations entre la santé et le travail et sa transformation en Agence Française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail avait permis de mieux préciser les relations qui doivent s'établir entre l'agence et ses partenaires institutionnels.
Il nous a indiqué également que les ministères de tutelle qui s'appuient pleinement sur l'AFSSET sont naturellement très attachés à l'indépendance des experts qu'elle est appelée à solliciter dans le cadre de ses travaux.
Il nous a précisé, par ailleurs, que le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens en cours d'élaboration permettra de résoudre les autres difficultés rencontrées.
Permettez-moi de vous dire, chers collègues, que cette réponse reste trop évasive.
Cet amendement est donc l'occasion d'obtenir, madame le ministre, des justifications complémentaires sur la nécessité de maintenir l'intégralité de ces crédits au profit de l'AFSSET et de faire le point sur la situation de cette agence.
Il me permet par ailleurs de poser un problème un peu plus générique s'agissant des agences : celui de leur maîtrise et de leur pilotage dès lors que ce sont des organismes autonomes, quand ils rencontrent des difficultés.
Cet amendement est donc clairement un amendement d'appel. Il vise à transférer 500 000 euros sur les réserves naturelles, dont le nombre augmentera dès la fin de l'année 2006.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nelly Olin, ministre. Les explications qui vous ont été données étant sans doute un peu légères, j'apporte un complément d'information.
Les moyens que je propose d'allouer aux réserves naturelles en 2007 sont en progression de 3,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2006, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement.
Ces progressions tiennent notamment compte des nouvelles réserves qui vont être créées.
Les ajustements ont été faits de façon précise dans le cadre des dialogues de gestion avec nos régions, et des moyens pourront être mobilisés, je l'ai rappelé tout à l'heure, par exemple dans le cadre de Natura 2000 ou des inventaires et de la connaissance.
En ce qui concerne l'AFSSET, elle a été créée par ordonnance en 2005 pour compléter le dispositif d'ensemble des agences de sécurité sanitaire et permettre ainsi la mise en oeuvre des politiques définies par le Gouvernement en matière de « santé-environnement » et de « santé-travail ».
Elle disposait en 2006 de quatre-vingt-quatre emplois et de 17 millions d'euros de ressources publiques, provenant, concernant le ministère de l'écologie et du développement durable, pour 3,2 millions d'euros sur le programme 181 et pour 1,1 million d'euros sur le programme 189 rattaché à la MIRES.
L'AFSSET a vocation à coordonner et à animer un réseau de vingt et un établissements publics intervenant en France dans le domaine de la sécurité sanitaire, et à participer au développement d'un réseau d'expertise aux échelons européen et international.
Elle est chargée d'organiser et de piloter l'évaluation des risques sanitaires, ce qui la conduit à émettre, principalement à la demande des pouvoirs publics, un grand nombre d'avis et de recommandations à caractère scientifique. Dans le cadre de sa mission d'expertise et d'appui scientifique et technique, elle contribue également à l'élaboration des réglementations et des normes techniques à venir.
L'AFSSET est par ailleurs chargée de piloter et de soutenir des programmes de recherche et de procéder à une veille scientifique permanente dans son double champ de compétence, et elle mène des actions d'information et de formation en direction des multiples composantes de la société civile.
Elle est dès maintenant, je tiens à le souligner, appelée à jouer un rôle essentiel en ce qui concerne le plan « santé-environnement », le nouveau plan « santé-travail » et la directive « biocides ». Il en ira de même prochainement pour la mise en oeuvre du règlement REACH, qui impliquera une forte charge de travail pour les autorités françaises, et donc pour l'AFSSET. Je l'ai dit tout à l'heure, je présenterai d'ailleurs en conseil des ministres prochainement un ensemble de mesures préparées avec les ministères concernés.
Le champ de saisine de l'AFSSET par les pouvoirs publics ne se résumera cependant pas aux questions relatives aux produits chimiques et il couvre d'ores et déjà un domaine vaste : prévention de la légionellose, bruit engendré par les éoliennes et incidence sur la santé, cyanobactéries et eaux potables, sont des exemples récents de saisine.
Une mission d'inspection relative aux méthodes de travail scientifique de l'AFSSET a été confiée par les deux tutelles à l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS et à l'Inspection générale de l'environnement, l'IGE. À la suite de ce rapport, des améliorations ont été apportées au pilotage par les tutelles de l'AFSSET : mise en place d'un comité de coordination des tutelles, élaboration d'une charte des saisines. Les procédures internes de l'AFSSET ont aussi été améliorées : programme de travail annuel, méthode de traitement des saisines, formalisation des règles de choix des experts.
Par ailleurs, vous l'avez souligné, madame le rapporteur, un contrat d'objectifs et de moyens est actuellement en cours de mise au point entre l'Agence et les ministères de tutelle, afin de programmer ses activités au cours des quatre prochaines années, d'en permettre l'évaluation - c'est important - et de leur conférer davantage de lisibilité et d'efficacité.
C'est dans cette perspective que je vous propose de maintenir en 2007 le montant des ressources publiques affectées par mon ministère à l'AFSSET, en ce qui concerne tant le programme 181 que le programme 189.
Face aux enjeux importants représentés par les plans « santé-environnement », « santé-travail », la directive « biocides », le règlement REACH - qui ne sera pas simple -, et plus globalement la complexité et les attentes croissantes de l'opinion et des acteurs socioéconomiques sur les questions sanitaires liées à l'environnement, il apparaît capital de poursuivre le confortement des moyens de cette agence.
C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis.
M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis. Je ne veux pas engager un débat avec Mme la ministre sur la nécessité des crédits qu'elle veut rétablir.
Je souhaite simplement profiter de la circonstance, après avoir bien écouté la réponse générale du Gouvernement, afin d'insister pour que les crédits des réserves naturelles soient confortés cette année en attendant, madame la ministre, que vous ayez lancé cette inspection générale.
Cette dernière est tout à fait utile pour donner des perspectives aux réserves naturelles. Cependant, je tiens à souligner que les crédits qui leur sont alloués ont été gelés année après année, et que le réseau aujourd'hui souffre véritablement.
Il y a deux ou trois ans, au nom de la commission des affaires culturelles, je m'étais occupé de la partie « personnels » des réserves naturelles. J'ai été sur place, j'ai rencontré les personnes qui animent ce réseau, et je peux affirmer qu'elles méritent toute votre attention, madame la ministre.
C'est pourquoi je suis favorable à l'amendement présenté par Mme Keller.
M. le président. Madame le rapporteur spécial, l'amendement n°II-18 est-il maintenu ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. En écho à mon collègue, je veux confirmer que les subventions accordées en 2007 aux réserves naturelles ne progressent malheureusement que très légèrement - elles passent de 14,3 millions d'euros à 14,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 13,8 millions d'euros à 14,3 millions d'euros en crédits de paiement -, alors que le nombre de réserves augmente.
Cent cinquante-sept réserves existent. Le ministère prévoit la création de six à sept nouvelles réserves et vingt et un projets de création sont actuellement en cours d'instruction.
Sur le volet AFSSET, quelques éléments de la mission d'expertise qui a été réalisée nous ont confortés dans notre analyse.
En effet, ce rapport propose de remodeler le dispositif actuel des agences de surveillance et de veille autour de trois opérateurs en lieu et place des sept structures actuelles - L'INVS, l'AFSSAPS, l'AFSSA, l'AFSSET, l'INERIS, l'IRSN et l'INRS.
Le rapport, point tout à fait intéressant, suggère une réforme qui créerait trois organismes : un institut de surveillance du vivant, une agence de sécurité sanitaire des produits consommés par les êtres vivants et une agence des milieux.
Au moment où il nous est proposé d'augmenter les dotations, il me semble plus raisonnable d'effectuer dans un premier temps les restructurations, de fixer les objectifs, puis, dans un second temps, de doter ces organismes « réorganisés » de moyens complémentaires.
Je maintiens donc mon amendement, et je propose à mes collègues de l'adopter.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote sur les crédits de la mission « Écologie et développement durable ».
Mme Évelyne Didier. Madame la ministre, si nous avions, ce soir, à évaluer le rapport entre le travail de votre ministère et les crédits qui lui sont alloués, vous auriez évidemment tout mon soutien.
Nous connaissons votre engagement en faveur de l'écologie et du développement durable. Vous avez fait avancer beaucoup de questions de manière très concrète, avec pragmatisme et efficacité. Personne ne met donc en doute l'engagement qui est le vôtre, madame la ministre.
Par ailleurs, j'ai apprécié le livre que vous nous avez fait parvenir et qui faisait le point sur chacune des politiques. Il y a de votre part un véritable effort d'efficacité et de transparence - je pense notamment à votre action louable concernant la transposition des directives européennes.
Je souhaite que vous ayez raison et que nous obtenions que le projet de loi sur l'eau soit enfin adopté. En tout cas, nous allons faire en sorte que vous soyez entendue et que l'examen de ce texte ne soit plus reporté.
Pour le reste, sur ce budget de l'écologie et du développement durable, outre les remarques que j'ai déjà formulées, je suis profondément persuadée que nos concitoyens sont en avance sur les politiques dans ce domaine, qu'ils ont pris la mesure des choses. Les rapports très convergents de diverses personnalités du monde politique ou du monde de l'environnement, qui connaissent bien le sujet, nous imposent d'être plus réactifs. Le Gouvernement, quel qu'il soit, doit véritablement prendre la mesure des enjeux. Je ne suis pas certaine que nous pourrons relever tous les défis. Il faut souhaiter que nous y arrivions.
En tout état de cause, j'ai la conviction que ce budget n'est pas à la hauteur des enjeux. C'est pourquoi je voterai contre les crédits de cette mission, mais, je le répète, madame la ministre, n'y voyez aucune remise en cause du travail que vous avez effectué.
M. le président. La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote.
M. Paul Raoult. J'avais exprimé mon scepticisme en concluant mon intervention. Cela étant, madame la ministre, Mme Didier et moi-même portons la même appréciation sur votre travail. J'ai en effet conscience, pour travailler avec vous depuis de nombreux mois, que les choses ont progressé dans la transparence et que vous avez la volonté d'être efficace.
Au-delà de votre budget, qui est en progression et comporte des avancées, je ne suis pas sûr, à travers le débat national qui s'engage, que l'ensemble des familles politiques, qu'elles soient de gauche ou de droite, aient saisi ce que certains ont appelé « l'urgence écologique ». Pour ma part, j'ai la conviction, depuis de nombreuses années, qu'il y a effectivement urgence écologique.
Ayant écouté, il y a quelques semaines, les débats entre les candidats de mon parti politique, j'ai trouvé qu'il avait été peu question d'environnement, et c'est le moins que l'on puisse dire ! Donc, je suis humble et modeste. Cependant, j'ai aussi un certain nombre de convictions personnelles, que je partage avec ceux qui sont présents ce soir, même s'ils ne sont pas très nombreux. Que nous soyons de gauche ou de droite, nous sommes, les uns et les autres, des passionnés qui croyons beaucoup à cette valeur environnementale.
Le succès du film d'Al Gore témoigne bien du décalage qui existe entre le monde politique et la population. Cela dit, quand Al Gore était au pouvoir, il n'a pas fait grand-chose pour faire avancer ce type de dossier. On retrouve, là aussi, la même contradiction.
Que faisons-nous réellement face au problème du réchauffement climatique et des gaz à effet de serre, face au problème de la pollution de l'eau et de l'air ? Cela fait vingt ans que je participe aux travaux de l'Agence de l'eau Artois-Picardie. Lorsque je constate que les taux de nitrates ou les taux de pesticides continuent de progresser dans les zones de champ captant du syndicat intercommunal que je préside, je me demande si nous avons été efficaces et si nous sommes capables de l'être.
Il peut exister un décalage important entre nos efforts de gestion au quotidien et le résultat parfois décevant auxquels ils aboutissent.
En matière de risques sanitaires, des difficultés se posent aussi.
La fièvre catarrhale qui atteint les troupeaux, aujourd'hui, dans mon territoire, perturbe les éleveurs mais elle nous fait aussi réfléchir : voici un moucheron piqueur que l'on ne devrait normalement pas trouver sous de telles latitudes, puisqu'il vit dans des territoires chauds, méditerranéens, et qui a récemment fait son apparition aux Pays-Bas, où l'on dénombre actuellement plus de six cents foyers d'infection. Nous en comptons six dans mon département, mais c'est six de trop.
Bien des éléments montrent qu'il est nécessaire de prendre conscience des problèmes, de sortir de l'inconscience généralisée telle qu'on la vit tous les jours.
Je le sais, compte tenu du contexte politique, à six mois des prochaines échéances électorales, chacun est dans un camp. J'espère toutefois que nous saurons, au-delà de ces oppositions, faire avancer les dossiers. Ne serait-ce que sur les organismes génétiquement modifiés, les OGM, chaque camp politique est aujourd'hui partagé, ce qui explique d'ailleurs le retard pris dans la discussion du projet de loi portant sur ce sujet. Chacun hésite et, pourtant, il faut prendre des décisions rapidement.
Face à vos actions honnêtes et déterminées, madame la ministre, j'ai quand même le sentiment que le budget qui nous est proposé n'est pas à la hauteur des enjeux qui ont été définis. Toutefois, une prise de conscience collective est nécessaire si l'on veut progresser.
Certes, votre budget représente 0,39 % du budget de l'État, sans parler des actions menées par les départements, les régions et l'ensemble des partenaires, mais il reste encore insuffisant par rapport aux enjeux.
Pour cette raison et compte tenu du contexte politique actuel, je ne voterai pas les crédits de cette mission, madame la ministre.
M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Écologie et développement durable », modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion l'article 48 qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Écologie et développement durable ».
Écologie et développement durable
Article 48
L'article L. 423-21-1 du code de l'environnement est ainsi rédigé :
« Art. L. 423-21-1. - Le montant des redevances cynégétiques est fixé pour 2007 à :
« - redevance cynégétique nationale annuelle : 197,50 € ;
« - redevance cynégétique nationale temporaire pour neuf jours : 118,10 € ;
« - redevance cynégétique nationale temporaire pour trois jours : 59,00 € ;
« - redevance cynégétique départementale annuelle : 38,70 € ;
« - redevance cynégétique départementale temporaire pour neuf jours : 23,40 € ;
« - redevance cynégétique départementale temporaire pour trois jours : 15,30 €.
« À partir de 2008, les montants mentionnés ci-dessus sont indexés chaque année sur le taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée. Ils sont publiés chaque année par arrêté des ministres chargés de la chasse et du budget.
« Les redevances cynégétiques sont encaissées par un comptable du Trésor ou un régisseur de recettes de l'État placé auprès d'une fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs et habilité, selon les règles et avec les garanties applicables en matière de droits de timbre. »
M. le président. L'amendement n° II-17, présenté par Mme Keller, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 423-21-1 du code de l'environnement, après les mots :
par arrêté
insérer le mot :
conjoint
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. L'article 48 prévoit l'indexation de la redevance cynégétique de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage.
Cet amendement est purement rédactionnel. L'ajout de l'adjectif « conjoint » se justifie du fait que le ministère des finances et le ministère de l'écologie et du développement durable devront conjointement signer l'arrêté fixant les modalités de cette indexation.
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Écologie et développement durable ».
La parole est à Mme la ministre.
Mme Nelly Olin, ministre. Monsieur le président, je tiens tout d'abord à vous remercier pour la manière dont vous avez présidé nos débats.
Je veux également remercier les rapporteurs et les différents orateurs pour la qualité de leur travail et de leurs interventions.
Je me félicite du climat de grande sérénité dans lequel s'est déroulée cette discussion. Les arguments ont été échangés avec courtoisie et déférence. Cela rehausse l'image que nous nous faisons parfois de la politique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
4
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 4 décembre 2006, à dix heures, quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale (nos 77 et 78, 2006-2007) (M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation).
Seconde partie. - Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales :
- Justice (+ articles 49, 49 bis et 49 ter)) :
M. Roland du Luart, rapporteur spécial (rapport n° 78, annexe n° 15) ;
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (Justice et accès au droit, avis n° 83, tome III) ;
M. Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (Justice et accès au droit, avis n° 83, tome III) ;
M. Philippe Goujon, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (Administration pénitentiaire, avis n° 83, tome IV) ;
M. Nicolas Alfonsi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (Protection judiciaire de la jeunesse, avis n° 83, tome V).
- Défense :
M. Yves Fréville, rapporteur spécial (rapport n° 78, annexe n° 8) ;
M. François Trucy, rapporteur spécial (rapport n° 78, annexe n° 8) ;
M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Capacités interarmées, avis n° 81, tome IV) ;
M. André Dulait, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Forces terrestres, avis n° 81, tome V) ;
M. Philippe Nogrix, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Forces aériennes, avis n° 81, tome VI) ;
M. André Boyer, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Forces navales, avis n° 81, tome VII).
M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Environnement et soutien de la politique de défense, avis n° 81, tome VIII) ;
- Enseignement scolaire :
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial (rapport n°78, annexe n° 13) ;
M. Philippe Richert, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 79, tome V) ;
Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (Enseignement scolaire, avis n° 79, tome V) ;
Mme Annie David, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (Enseignement technologique et professionnel, avis n° 79, tome V).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant l'examen des crédits de chaque mission
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant l'examen des crédits de chaque mission est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à onze heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements aux crédits des missions pour le projet de loi de finances pour 2007
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits des missions et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2007 est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion à onze heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la seconde partie, non joints à l'examen des crédits des missions du projet de loi de finances pour 2007
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la seconde partie, non joints à l'examen des crédits des missions du projet de loi de finances pour 2007 est fixé au vendredi 8 décembre à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt et une heures vingt-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD