M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Comme le rappelait très justement M. le rapporteur général, il s'agit d'un débat récurrent et, monsieur Bockel, je profite de l'occasion qu'il me donne de rendre hommage à votre ténacité : vous êtes un porte-parole éloquent des élus locaux sur ce sujet très difficile sur lequel je suis moi-même, je tiens à vous le dire, très mobilisé.
En effet, si les conséquences, évidemment involontaires, des décisions qui ont été prises devaient être totalement neutralisées, les effets budgétaires seraient colossaux. Il ne faut pas tourner autour du pot : c'est la réalité. Dès lors, des arbitrages doivent être rendus. Ce sont 70 millions ou 80 millions d'euros, voire 100 millions d'euros qu'il faudrait trouver.
M. Jean-Marie Bockel. En effet.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Chacun comprend qu'une des raisons pour lesquelles nous sommes là, les uns et les autres, à « bricoler » est que nous n'avons pas l'argent nécessaire, et je ne voudrais pas que vous pensiez que d'autres raisons que celle-là m'amènent à dire combien le sujet est difficile.
Dans ce contexte, je me propose de revenir devant vous dans le cadre du projet de loi de finances rectificative.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ah bon ?...
M. Jean-Marie Bockel. C'est une solution de compromis.
M. Michel Charasse. Il faut sortir « en sifflet » de ce « truc » !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je présenterai un dispositif qui, dès la première année, permettra de régler une partie du problème.
M. Jean-Marie Bockel. Ce sera un premier pas.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Le curseur devra être placé au bon niveau, car je ne peux pas me permettre de « plomber » nos finances, mais nous allons commencer à régler le problème de cette façon.
Je ne suis pas extrêmement fier de ma proposition, mais la réalité est qu'il n'y a pas d'autre solution que de mettre de l'argent sur la table. J'ai bien conscience qu'il y a des situations calamiteuses, pas seulement dans les petites villes et pas seulement non plus dans les villes qui sont proches de ma famille politique.
M. Jean-Marie Bockel. C'est en effet très partagé.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. J'ai ainsi été assez ému par le plaidoyer du maire de Poitiers, qui n'est pas toujours émouvant, mais qui l'a été sur ce sujet.
Je conçois donc qu'il peut y avoir des difficultés majeures ; nous devons les examiner. Mon engagement est donc de revenir devant vous d'ici à la fin de l'année avec un dispositif clé en main qui permette de commencer à débloquer la situation et, en attendant, je vous invite à retirer votre amendement, monsieur Bockel.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Jégou. Monsieur le ministre, j'ai été très sensible à ce que vous venez de dire, d'autant que l'amendement de notre collègue Jean-Marie Bockel est celui que j'aurais voulu moi-même déposer si j'avais ignoré que son coût était très élevé. Je ne veux pas « en rajouter », mais, étant vice-président d'un EPCI sur le territoire duquel est situé un établissement de France Télécom de l'Est parisien, dont vous avez aussi été élu et où, vous le savez, la moyenne de taxe professionnelle est calamiteuse, je pourrais moi aussi vous faire verser une larme.
Savoir que nous continuons à être prélevés nous rend finalement encore un peu plus tristes, mais je « positive », monsieur le ministre, et je retiens votre proposition. Je vous fais confiance et je veillerai, comme chacun d'entre nous ici, à ce qu'un geste soit fait en faveur de nos collectivités, notamment de nos EPCI, dans le Val-de-Marne mais aussi ailleurs, qui ne sont pas nécessairement riches et qui souffrent de la baisse de la taxe professionnelle et de ce prélèvement franchement injuste.
M. le président. Monsieur Bockel, l'amendement n° I-172 est-il maintenu ?
M. Jean-Marie Bockel. M. le ministre a eu le mérite de la clarté et de la franchise. Il nous propose d'étudier une piste de compromis. Certes, tous n'auront pas ce qu'ils s'estiment être en droit d'obtenir pour les raisons qui ont été développées, comme il l'a dit lui-même, par d'autres mieux que par moi parce qu'ils subissent encore plus les effets de la situation, mais cela nous permettra de faire un pas dans la bonne direction.
C'est dans cet esprit, monsieur le ministre, que j'accepte de vous prendre au mot : parce que vous vous êtes engagé à revenir devant nous avec des propositions concrètes de compromis, je retire mon amendement.
M. Thierry Foucaud. Mon groupe ayant également déjà présenté un tel amendement, je tiens à dire que c'était une proposition qui allait dans le bon sens même si elle n'était pas suffisante.
Article 12
I. - Dans le premier alinéa du II de l'article 57 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003), les mots : « et en 2006 » sont remplacés par les mots : «, en 2006 et en 2007 ».
II. - Dans le douzième alinéa du IV de l'article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986), les mots : « En 2004, en 2005 et en 2006 » sont remplacés par les mots : « En 2004, en 2005, en 2006 et en 2007 ».
III. - Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Dans le quatrième alinéa du 4° de l'article L. 2334-7, après les mots : « selon un taux égal », sont insérés les mots : « au plus » ;
1° bis Le 1° de l'article L. 1613-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À compter de 2008, pour le calcul du montant de la dotation globale de fonctionnement, le montant de la dotation globale de fonctionnement pour 2007 calculé dans les conditions définies ci-dessus est majoré d'un montant de 3 millions d'euros. » ;
1° ter La dernière phrase du 5° de l'article L. 2334-7 est ainsi rédigée :
« Le montant de cette dotation est fixé à 3 millions d'euros pour 2007 et évolue chaque année selon le taux d'indexation fixé par le Comité des finances locales pour la dotation de base et la dotation proportionnelle à la superficie. » ;
2° Le cinquième alinéa de l'article L. 3334-3 est ainsi rédigé :
« À compter de 2006, le montant de la dotation de base par habitant de chaque département et, le cas échéant, sa garantie, évoluent chaque année selon des taux de progression fixés par le Comité des finances locales. Ces taux sont compris, pour la dotation de base et sa garantie, respectivement entre 35 % et 70 % et entre 0 % et 50 % du taux de croissance de l'ensemble des ressources de la dotation globale de fonctionnement. » ;
3° L'article L. 4332-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La dotation forfaitaire fait l'objet de versements mensuels. La dotation de péréquation fait l'objet d'un versement, intervenant avant le 31 juillet. » ;
4° Dans le troisième alinéa de l'article L. 4332-7, les taux : « 75 % et 95 % » sont remplacés par les taux : « 60 % et 90 % » ;
5° L'article L. 4332-8 est ainsi modifié :
a) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Les régions d'outre-mer bénéficient d'une quote-part de la dotation de péréquation dans les conditions définies à l'article L. 4434-9. » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
6° Le premier alinéa de l'article L. 4434-9 est ainsi rédigé :
« La quote-part de la dotation de péréquation des régions mentionnée à l'article L. 4332-8 perçue par les régions d'outre-mer est déterminée par application au montant total de la dotation de péréquation du triple du rapport entre la population des régions d'outre-mer, telle qu'elle résulte du dernier recensement général, et la population de l'ensemble des régions et de la collectivité territoriale de Corse. »
M. le président. L'amendement n° I-77, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
I. - Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Dans le premier alinéa du II de l'article 57 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003), le taux « 33% » est remplacé par le taux « 50% »
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... L'augmentation du taux d'évolution des dotations versées aux collectivités locales est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. L'article 12 reconduit le contrat de croissance et de solidarité à la même hauteur que depuis 2001, soit 33 % du produit intérieur brut.
Vous évoquez, monsieur le ministre, le décalage entre le comportement de l'État et celui des collectivités locales : d'une part, un État, selon vous vertueux, qui se consacrerait à « l'effort de maîtrise des finances publiques », finances dont vous souhaitez maintenir le taux de croissance sous celui de l'inflation pour être en conformité avec le traité de Maastricht ; d'autre part, des collectivités territoriales qui dépenseraient trop.
Nous estimons que cela va vous amener à remettre en cause le contrat de croissance et de solidarité. En effet, le rapport souligne fort bien que l'installation du Conseil d'orientation des finances publiques le 20 juin 2006 a pour objectif essentiel d'obtenir des élus « un objectif de progression de l'enveloppe normée plus compatible avec les contraintes pesant sur le budget de l'État », ce qui signifie bien que vous voulez sa disparition à terme.
Nous pensons, quant à nous, que le seul fait de porter le taux de 33 % à 50 % aurait des effets positifs sur les finances locales, mais pas seulement. Le taux d'indexation, qui s'établirait en 2007, selon vos calculs, à 2,5425 %, serait ainsi porté à 2,9250 % et ferait évoluer de façon raisonnable l'enveloppe normée. Son taux de progression serait inférieur à ce qu'il a été entre 2000 et 2002 alors que le taux d'inflation est aujourd'hui supérieur.
Ce dispositif très simple, utilisé notamment pour la dotation globale de fonctionnement, permettrait ainsi de donner de l'oxygène à nos collectivités. En effet, celles-ci ont des charges de plus en plus lourdes. Je rappelle seulement que leurs coûts, traduits dans le « panier du maire », marquent une différence d'un point supplémentaire d'inflation par rapport à l'inflation de l'indice INSEE.
Nous pourrions ainsi éviter de faire peser sur les habitants la hausse des impôts, qui devient inévitable à moins de supprimer des services aux habitants. Prendre une telle mesure permettrait donc de mieux répondre aux besoins des populations, en accroissant le montant des ressources mises en péréquation, en stabilisant la DCTP et en rendant les dotations d'équipement plus efficaces.
Alors que nombre de nos collectivités locales sont, même si vous le niez, au bord de l'asphyxie, cette mesure, bien que partielle, aurait des effets immédiats sur les finances locales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes revenus dans le rituel puisque, chaque année, nous avons des amendements de cette nature. Celui-ci ne coûterait « que » 160 millions d'euros par an... (Sourires.)
Outre qu'il est difficile de remettre en cause les règles de progression de l'enveloppe normée, on pourrait légitimement se demander, si jamais une telle mesure était votée, pourquoi s'arrêter à 160 millions d'euros par an et ne pas trouver une forme d'indexation plus favorable. Ce serait d'ailleurs, monsieur Foucaud, la proposition que vous formuleriez l'année suivante.
Pour cette simple raison, l'avis de la commission ne peut qu'être tout à fait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le Gouvernement a, évidemment, le même avis que la commission.
L'enveloppe normée augmentera, comme vous le savez, de 2,54 %, soit un taux supérieur à celui de l'inflation. Cette augmentation représente un effort de 987 millions d'euros qu'il paraît difficile et même impossible de prolonger.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, il faut arrêter de dire que, pour les communes, l'augmentation sera supérieure à 2,5 % parce que, dans la réalité, ce ne sera pas le cas et vous le savez bien.
De la même manière, la progression de la fiscalité directe fait peut-être réagir les parlementaires, notamment ceux de la majorité, qui accusent un peu facilement à la fois les conseils régionaux et les conseils généraux de « forcer la dose » sur la fiscalité, mais il ne faut pas oublier les frais, notamment de perception par l'État, que génère automatiquement cette fiscalité. Pour 2007, l'évaluation porte sur un montant de 3 731,2 millions d'euros, en hausse de 153,2 millions d'euros sur 2006. Voilà au moins un facteur, monsieur le ministre, pour répondre à notre proposition de passer de 33 % à 50 % : on est presque là à l'équilibre et, au niveau de l'État, on ne perdra rien.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° I-78 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° I-177 est présenté par MM. Haut, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-207 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. - Compléter le III de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
°... - L'article L. 3334-7-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2007, la dotation de compensation des départements fait l'objet d'un abondement supplémentaire de 12 millions d'euros réparti entre les départements en fonction du rapport entre le nombre de sapeurs-pompiers volontaires au sein du corps départemental de chaque département au 31 décembre 2003 et le nombre de sapeurs-pompiers volontaires présents dans les corps départementaux au niveau national à cette même date. »
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
...- La perte de recettes pour l'État résultant de l'application du dernier alinéa de l'article L. 3334-7-1 du code général des collectivités territoriales est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° I-78.
M. Bernard Vera. La question de la juste compensation des charges dévolues aux collectivités territoriales est, comme à l'habitude, au coeur du débat que nous menons chaque année au sujet des relations entre l'État et les collectivités territoriales.
L'amendement que nous proposons en constitue d'ailleurs une illustration. Il s'appuie évidemment sur les termes de la loi sur les responsabilités locales du 13 août 2004, qui a notamment précisé que « les modalités de la contribution de l'État au coût pour les départements seront définies dans des conditions fixées en loi de finances » s'agissant de la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs pompiers volontaires.
Or, comme chacun le sait, de manière récurrente, la contribution de l'État ne couvre pas la moitié des charges transférées aux collectivités territoriales, qui se retrouvent, une fois encore, confrontées à une sollicitation financière plus élevée que prévue.
Les 12 millions d'euros qui sont mentionnés dans cet amendement permettraient tout simplement à l'État de prendre à son compte la moitié du coût de la prestation de fidélisation, à part égale avec les départements, dans le respect des règles fixées par l'équilibre de la décentralisation.
Nous ne proposons donc rien d'autre qu'un ajustement de la contribution de l'État à hauteur des besoins.
Comme cette demande émane de nombreuses travées de notre assemblée, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter le présent amendement par la voie d'un scrutin public.
M. le président. La parole est à M. Claude Haut, pour présenter l'amendement n° I-177.
M. Claude Haut. Cet amendement vise à proposer de majorer la dotation de DGF des départements au vu des engagements de l'État lors de la mise en place du régime de retraite applicable aux sapeurs-pompiers volontaires.
En effet, cette dotation de compensation n'avait fait l'objet d'un abondement qu'à hauteur de 20 millions d'euros lors de l'adoption de la loi de finances pour 2005. Cette somme est venue abonder la dotation de compensation de la DGF des départements. Cette dotation étant intégrée dans la DGF des départements, elle est mécaniquement reconduite chaque année.
En résulte, pour 2005, une participation de l'État à la prestation de fidélisation et de reconnaissance, la PFR, inférieure à 50 % ; elle est de 31 % exactement.
Lors de la discussion de la loi de finances pour 2005, nous avions déposé un amendement qui tendait à porter l'effort de l'État à 50 %. Cet amendement n'a pas été adopté.
En revanche, au titre de 2006, l'effort de l'État a bien été de 50 %, puisque 32 millions d'euros ont été versés aux départements pour compenser la PFR des sapeurs-pompiers volontaires.
En effet, en plus des 20 millions d'euros versés dans la dotation de compensation de la DGF en 2005, 12 millions d'euros supplémentaires ont abondé cette dotation, la portant au total à 32 millions d'euros. Celle-ci évolue au même rythme que le montant de DGF mis en répartition.
Du fait des délais liés à la mise en place de la PFR, les services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS, ont dû verser, au 15 octobre 2006 au plus tard, le montant total des contributions publiques pour 2005 et 2006.
Par conséquent, les élus départementaux souhaitent que la rectification opérée en 2006 et 2007 porte également sur le montant dû au titre de 2005.
Il convient donc d'abonder la dotation de compensation des départements au sein de la DGF de 12 millions supplémentaires en 2007, conformément à l'engagement initial du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour présenter l'amendement n° I-207.
M. Michel Mercier. En 2004, le Gouvernement a décidé de créer une retraite pour les sapeurs-pompiers volontaires. C'était une excellente mesure, quoiqu'un peu difficile à mettre en oeuvre, puisque nous n'avons reçu la « facture » de cette mesure qu'il y a trois mois. Les départements ont payé leur cotisation pour 2005 et 2006.
L'engagement du Gouvernement était clair, simple et limpide : 50 % du coût de la mesure devait revenir à l'État et 50 % aux collectivités territoriales, qui n'avaient d'ailleurs rien demandé.
En conséquence de cette mesure, les départements ont dépensé 64 millions d'euros pour 2005 et 2006. Cette somme divisée par deux donne 32 millions d'euros. Le budget ne consacre que 20 millions à cet effet. Monsieur le ministre, vous avez le sens de la parole donnée, vous tenez vos promesses. Je ne puis imaginer que vous ne teniez celle-ci et je vous demande donc d'ajouter 12 millions d'euros afin de régler la moitié de ce coût, ce qui vous permettrait de quitter cette enceinte avec bonne conscience.
Je rappellerai, monsieur le ministre, que vous avez vous-même fixé le tarif de la retraite des sapeurs-pompiers volontaires, ainsi que la quotité, le montant, l'assiette et le taux. Vous avez décidé de la caisse qui gérerait cela, vous avez envoyé les factures. Aucune décision n'a été prise au niveau local. Et vous avez annoncé que vous paieriez la moitié.
Eh bien maintenant, payez, monsieur le ministre, car vous vous y êtes engagé ; payez, car vous n'avez qu'une parole ; payez, parce que les pompiers attendent que vous teniez vos engagements ; payez, tout simplement parce que vous voulez être un bon ministre ! (M. de Broissia applaudit.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. En 2005 a été créée la prestation de vétérance pour les sapeurs-pompiers volontaires. Le coût de cette prestation, alors estimé à 60 millions d'euros, devait être assuré à 50 % par l'État et à 50 % par les départements. Cela représentait 30 millions d'euros pour chacun.
Pour cette année 2005, considérant que la montée en puissance de cette mesure prendrait un certain temps, l'État n'a abondé la dotation des départements que de 20 millions d'euros au lieu de 30 millions.
En 2006, il a été constaté que le coût total de cette mesure pour 2005 ne serait pas de 60 millions d'euros comme prévu, mais de 64 millions d'euros. L'État a alors abondé la dotation de compensation de 12 millions d'euros supplémentaires, ce qui porte le total de sa contribution à 32 millions d'euros. Cette somme évolue avec la DGF.
Ces amendements identiques portent sur le « bouclage » de l'année 2005. On considère que les départements ont supporté pour l'année 2005 un coût de 64 millions d'euros, et non de 40 millions d'euros, coût qui n'a été compensé que par un apport de l'État de 20 millions d'euros. C'est pourquoi l'on demande à l'État de régler un impayé de 12 millions d'euros.
Il serait nécessaire, monsieur le ministre, que vous nous donniez quelques précisions à ce sujet. Pourriez-vous nous dire quelles sommes ont effectivement été déboursées au titre de l'allocation de vétérance pour 2005, de manière que nous sachions si les départements ont réellement pris en charge plus de 50 % de leur coût ? Pourriez-vous nous confirmer qu'à compter de 2006 il n'y aura plus de contestation ?
S'agissant d'une dépense de 12 millions d'euros, quelles que soient les explications données, la commission des finances ne peut manifester un grand enthousiaste. Toutefois, nous avons eu tout à l'heure la surprise de voir M. le ministre du budget faire une ouverture qui risque d'être coûteuse en réponse à la question de M. Bockel et à laquelle nous ne nous attendions pas.
M. Michel Mercier. C'est certain !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Bien entendu, si les auteurs des amendements en discussion, dont M. Mercier, avaient l'idée d'une possible économie de 12 millions d'euros sur un autre poste du budget de l'État, nous adopterions plus facilement ces amendements.
M. Michel Mercier. Je vous laisse trouver, monsieur le rapporteur général.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. J'ai écouté attentivement les intervenants et notamment M. Mercier, âme sensible, dont chacun sait qu'il n'hésite pas à faire appel aux sentiments. (Sourires.)
Il est vrai, M. le rapporteur général l'a souligné, que la loi de 2004 prévoit cette prestation de fidélisation et de reconnaissance. Cette loi a permis à l'État d'entrer dans le dispositif d'allocation de vétérance des sapeurs-pompiers, allocation qui, jusque-là, était intégralement financée par les SDIS.
L'État a souhaité accompagner ce dispositif en assumant 50 % de son coût, estimé en 2004 à 30 millions d'euros. Vous vous en souvenez, le Gouvernement a alors proposé de majorer la dotation de compensation de la DGF de 20 millions d'euros en 2005, puis de 10 millions d'euros en 2006.
Entre-temps, le coût de cette prestation a été réévalué, puisqu'il est estimé à 64 millions d'euros. Le Gouvernement a alors accepté de majorer de 20 % sa participation pour 2006, portant ainsi l'abondement supplémentaire à 12 millions d'euros.
Concrètement, l'abondement pérenne de l'État atteignait plus de 32 millions d'euros en 2006. Cette somme est désormais indexée sur la DGF.
Il est difficile de le nier, l'État n'a pas financé la moitié du coût de la prestation en 2005. Nous en avions discuté lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006. Le Sénat avait alors voté un abondement de 12 millions d'euros applicable à compter de 2006, sans prévoir la régularisation de l'année 2005.
J'aurais naturellement préféré que l'on s'en tienne à l'équilibre arrêté à la fin de 2005. La DGF a été abondée en base de 32 millions d'euros, et cette compensation est dynamique. J'en profite pour rappeler que la reconduction du contrat de croissance pour 2007 assure à la DGF des départements une croissance de 286 millions d'euros.
Le Gouvernement, sans grande fierté il est vrai, demande le retrait de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis véritablement écartelé, monsieur le président : d'un côté, je suis face à un ministre qui plaide coupable,...
M. Michel Mercier. Il y a aveu !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...de l'autre, je serais gêné que le solde des finances publiques ressorte de l'examen de la première partie du projet de loi avec un déficit supplémentaire de 12 millions d'euros, alors que nous nous efforçons de réduire ce déficit le plus possible.
Par ailleurs, les auteurs des amendements ne nous ont pas apporté de contrepartie sérieuse.
Aussi, sous le regard vigilant du président Arthuis, je serais tenté de m'en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J'aurais un gage à proposer. Il viendra en discussion samedi, à l'occasion de la discussion des crédits de la mission « Pensions et retraites ».
Dans ce domaine, il est des pratiques qui font offense à l'idée que nous nous faisons de l'équité dans la République. Je crois que là, monsieur le ministre, vous trouveriez les gages nécessaires, puisque, selon la Cour des comptes, environ 300 millions d'euros pourraient être économisés !
À nos collègues qui sont présents ce soir, je donne donc rendez-vous samedi prochain. L'an passé, nous avions recueilli dix voix sur ce sujet, j'espère que nous ferons un peu mieux cette année ! (Sourires.)
En ce qui concerne ces amendements identiques, comme l'a dit M. le rapporteur général, nous nous en remettons à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Claude Haut, pour explication de vote.
M. Claude Haut. Pour ma part, je suis stupéfait de la réponse qui nous est apportée !
Monsieur le ministre, voilà quelques années vous avez décidé de contraindre les SDIS et les départements à verser une nouvelle prestation. L'État s'est alors engagé à fournir 50 % des crédits nécessaires.
Or, aujourd'hui, vous nous annoncez que cet abondement est supprimé et que l'État ne versera plus 50 %, mais seulement 31 % de la prestation prévue. Je trouve que c'est inadmissible, d'autant que votre engagement était précis et clair !
Ce revirement créera sans doute à l'avenir beaucoup de difficultés. Quand nous entendons évoquer de nouvelles dispositions en faveur des sapeurs-pompiers, par exemple en ce qui concerne la NBI, la nouvelle bonification indiciaire, nous en déduisons que ces mesures, quand elles seront adoptées, seront entièrement à la charge des collectivités territoriales !
Monsieur le ministre, une telle position n'est pas admissible ! Vous devez nous apporter une autre réponse.
Je ne comprends pas que vous puissiez aussi facilement revenir sur un engagement pris par plusieurs ministres, y compris d'ailleurs M. le ministre de l'intérieur, et rejeter catégoriquement ces amendements, sur le mode : « circulez, il n'y a rien à voir ! ».
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, pour explication de vote.
M. Louis de Broissia. Je soutiendrai ces amendements identiques, qui visent à corriger une politique décidée par le Gouvernement - mais, en la matière, les gouvernements se suivent et se ressemblent !
Au cours de nos discussions, nous avons beaucoup parlé d'argent. Et une somme de 12 millions d'euros n'est pas négligeable, nous le savons, à plus forte raison pour les collectivités locales.
Il s'agit d'un sujet extrêmement sensible, qui touche, comme notre collègue Claude Haut l'a souligné, à la relation de confiance entre l'État et les collectivités territoriales. Or, vous le savez, monsieur le ministre, la confiance se construit sur de petits actes.
Cette dépense de 12 millions d'euros a été ordonnée par l'État, afin de financer une décision d'une grande sagesse : il était nécessaire de donner des gages aux sapeurs-pompiers volontaires, qui ne sont plus bénévoles, en récompensant leur fidélité à leur profession.
Les départements ont pris leur part du financement de cette mesure. Dans les discussions futures sur ce dossier, l'attitude du Gouvernement risque de coûter cher à son image en termes de confiance.
C'est pourquoi je soutiens ces amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-78, I-177 et I-207.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 62 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 170 |
Contre | 158 |
Le Sénat a adopté.
L'amendement n° I-174, présenté par MM. Marc, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Miquel, Moreigne, Repentin, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :
... - Le code général des collectivités territoriales est modifié comme suit :
1° Après le premier alinéa de l'article L. 2334-1, il est inséré un alinéa rédigé comme suit :
« La dotation forfaitaire par habitant attribuée aux communes et à leurs groupements est comprise dans une fourchette de plus ou moins 20% par rapport à la moyenne constatée au sein de leur strate démographique » ;
2° Après le premier alinéa de l'article L. 3334-1, il est inséré un alinéa rédigé comme suit :
« La dotation forfaitaire par habitant attribuée aux départements est comprise dans une fourchette de plus ou moins 20% par rapport à la moyenne constatée. » ;
3° L'article L. 4332-4 est complété par un alinéa rédigé comme suit :
« La dotation forfaitaire par habitant attribuée aux régions est comprise dans une fourchette de plus ou moins 20% rapport à la moyenne constatée. »
II. Le solde résultant de l'ajustement de la répartition de la dotation forfaitaire proposée au I est affecté aux dotations de péréquation de la dotation globale de fonctionnement visées aux articles L. 2334-14, L. 2334-15, L. 2334-20, L. 3334-4 et L. 4332-8 du code général des collectivités territoriales.
III. Les dispositions du I et du II font l'objet d'une mise en oeuvre progressive entre le 1er janvier 2007 et le 1er janvier 2012.
Les conditions de ce lissage sont définies par décret.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Cet amendement a pour objet de modifier le dispositif de péréquation entre les collectivités territoriales.
Bien sûr, une réforme progressive, globale et solidaire des finances locales aurait dû constituer un préalable à tout nouveau transfert de compétence.
Toutefois, le Gouvernement en a décidé autrement, monsieur le ministre. La nouvelle vague de décentralisation libérale mise en oeuvre depuis 2002 étrangle un système financier local déjà à bout de souffle. Nous l'avons souligné, les élus locaux sont agacés, comme en témoigne la tonalité du dernier congrès des maires sur les questions financières.
Le partenariat financier entre l'État et les collectivités territoriales se trouve malmené, et chacun convient aujourd'hui qu'une réforme ambitieuse des finances locales s'impose si nous voulons relancer la dynamique de la décentralisation. Cet amendement tend à s'inscrire dans ce cadre.
La réforme constitutionnelle de 2003 a consacré deux principes.
Tout d'abord, le principe de l'autonomie financière. Celui-ci, qui a été précisé par une loi organique et qui fait aujourd'hui l'objet d'un suivi, a bien été pris en compte.
Ensuite, le principe de la péréquation entre les collectivités territoriales, dont la Constitution prévoit qu'il sera garanti par des dispositifs validés par la loi. Or, à ce jour, aucun dispositif n'a été proposé au Parlement afin de formaliser ce principe. Tel est l'objet de cet amendement.
Il s'agit de préciser dans la loi le contenu que nous entendons attribuer au principe de péréquation, afin de donner à celui-ci une portée similaire à celle du principe d'autonomie financière.
Par conséquent, à la lumière d'exemples étrangers, cet amendement tend à proposer que les écarts de ressources entre les collectivités, au titre de la dotation forfaitaire, soient limités à plus ou moins 20 %, soit une fourchette comprise entre 80 et 120.
Mes chers collègues, toute réforme des finances locales doit être mise en oeuvre dans la durée. Nous proposons donc que celle-ci soit lissée sur cinq ans.
Je le répète, cet amendement vise à inscrire dans les faits un mécanisme qui fait partie des objectifs constitutionnels mais qui, jusqu'ici, n'a reçu aucune traduction concrète. Bien entendu, une telle réforme doit être adaptée dans le temps, et c'est pourquoi nous proposons qu'elle soit mise en place sur une durée de cinq ans.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement tend à accroître progressivement, entre 2007 à 2011, le caractère péréquateur de la DGF des communes, des départements et des régions.
Un tel objectif peut paraître louable. Toutefois, sa mise en oeuvre, telle qu'elle résulterait du texte de cet amendement, poserait des problèmes assez nombreux, me semble-t-il.
Monsieur Marc, vous proposez de réduire les inégalités de dotation forfaitaire par habitant au sein de chaque catégorie de collectivité, ce qui ne semble pas la solution la plus appropriée.
Je le rappelle, la DGF est constituée, pour chaque catégorie de collectivité, d'une dotation forfaitaire, qui augmente selon sa logique propre, et d'une ou plusieurs dotations de péréquation, qui constituent le solde de la DGF.
Pour renforcer la péréquation, il faudrait donc imposer un faible taux de croissance à la dotation forfaitaire. Or je ne vois pas en quoi la réduction des inégalités de dotation forfaitaire par habitant permettrait d'atteindre cet objectif.
En outre, la rédaction de cet amendement me paraît vague et il laisse à un décret le soin de définir l'essentiel des modalités de sa mise en oeuvre. En d'autres termes, le texte de cet amendement n'épuise pas la compétence législative.
Pour toutes ces raisons, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable.