Article 31
Le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la mise en oeuvre de l'ensemble des dispositions de la présente loi dans les dix-huit mois suivant sa promulgation. Ce rapport comporte un chapitre spécifique sur les conditions de mise en place d'une plate-forme publique de téléchargement permettant à tout créateur vivant, qui se trouve absent de l'offre commerciale en ligne, de mettre ses oeuvres ou ses interprétations à la disposition du public et d'en obtenir une juste rémunération.
M. le président. Sur l'article 1er bis, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Quelqu'un demande-t-il la parole sur cet article ?...
Le vote est réservé.
Article 2
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa de cet article, après les mots :
Les dispositions
insérer les mots :
du dernier alinéa
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement vise à corriger une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. Monsieur le président, j'approuve bien entendu cet amendement, mais, si vous le permettez, je saisis cette occasion pour revenir sur la création d'une nouvelle autorité administrative indépendante.
Au moment de la discussion du texte, j'avais exprimé quelques réserves, déplorant la multiplication de ces autorités administratives indépendantes. Il n'en demeure pas moins que je suis heureux de me rallier au texte issu de la commission mixte paritaire, qui me paraît représenter un grand progrès : d'une part, une seule autorité est installée, dont les compétences, fort opportunément, ne sont que techniques ; d'autre part, j'ai pris bonne note non seulement des explications du rapporteur et du président de la commission, mais encore de l'engagement du ministre à ce que ce texte garantisse l'avenir des logiciels libres (M. le ministre le confirme.) C'était véritablement ce qui m'importait. J'accueille avec confiance la parole du ministre.
M. Assouline, se mêlant de nos affaires, affirmait que certains membres du groupe UMP étaient en désaccord avec ce texte. Eh bien, je suis heureux de lui faire part de mon ralliement à ce texte !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Merci !
M. le président. Le vote sur l'article 2 est réservé.
Sur les articles 3 à 19, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Article 20 bis
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer le VI de cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. L'initiative parlementaire visant à créer une mesure fiscale en faveur de la production phonographique a, conformément à l'article 40 de la Constitution, été gagée. Le Gouvernement, qui est favorable à cette mesure, souhaite la levée du gage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Le vote sur l'article 20 bis est réservé.
Sur les articles 20 quater à 31, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Dominique Braye pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si le texte a été soumis à la procédure d'urgence, il est avant tout le fruit de la concertation et du dialogue.
Ce dialogue a débuté avec l'examen du texte par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, il s'est poursuivi par des concertations spécifiques avec le ministère, qui a écouté les arguments des divers professionnels concernés et des consommateurs.
Au Sénat, une table ronde organisée par la commission des affaires culturelles a permis très tôt de réunir l'ensemble des intervenants afin de rapprocher les points de vue et de trouver des solutions.
Le texte proposé par le Gouvernement a ensuite été profondément modifié, comme l'ont rappelé tous les orateurs, par le travail parlementaire, à l'Assemblée nationale comme au Sénat.
Enfin, la réunion de la commission mixte paritaire, la semaine dernière, a apporté les derniers ajustements, sans bouleverser ce qui avait été adopté.
Ce travail aboutit à un dispositif équilibré, prenant en considération, d'une part, la protection des auteurs ainsi que l'encouragement à la création et, d'autre part, la liberté de l'internaute ainsi que la nécessité de ne pas entraver les progrès technologiques.
Nous sommes parvenus à une position commune sur des points très importants.
Tout d'abord, je me réjouis que l'exception pédagogique permettant l'utilisation des oeuvres à des fins d'enseignement et de recherche, introduite par notre Haute Assemblée, ait été maintenue. M. le ministre étant intervenu pour conclure des accords avec les ayants droit, la loi leur succédera en 2009.
La défense de l'interopérabilité a été réaffirmée et précisée. Comme vous l'avez souligné, monsieur le ministre, avec l'interopérabilité, le projet de loi affirme un principe nouveau qui fait de la France un pays pionnier en Europe. Il était incompréhensible qu'une oeuvre acquise légalement ne puisse être lue sur n'importe quel support numérique.
Depuis que nous avons évoqué la question de l'interopérabilité, d'autres pays européens ont manifesté leur intérêt et vont probablement suivre l'exemple français.
L'Assemblée nationale a souhaité rendre plus contraignantes les procédures par lesquelles l'autorité de régulation pourra imposer la fourniture des informations essentielles à l'interopérabilité. Nous voyons là un gage de l'efficacité du dispositif. Je me réjouis, comme mon collègue Yann Gaillard, que la création par notre Haute Assemblée de l'autorité de régulation ait trouvé un accueil favorable.
Je tiens à remercier notre excellent rapporteur, Michel Thiollière, ainsi que M. le président de la commission, Jacques Valade, de la qualité de leurs travaux et de leurs analyses. Je remercie également M. le ministre de son investissement personnel et de sa détermination à préserver les droits des créateurs.
Notre pays a la chance de réunir une somme considérable de talents dans tous les domaines artistiques. Aussi Internet doit-il représenter pour eux un outil et non une menace. Le projet de loi est une première étape nécessaire. En soumettant l'essor des nouvelles technologies au contrôle d'une autorité indépendante, composée de juristes et de spécialistes, il prépare l'avenir.
Bien évidemment, le groupe UMP, dans sa quasi-totalité, votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Je ne reviendrai pas sur le fond du débat puisque tout a déjà été dit lors de la discussion générale. Je me contenterai de réagir à l'intervention de M. Valade.
Nous ne remettons pas en cause la qualité de l'investissement dont ont témoigné, tout au long des débats, les membres de la commission des affaires culturelles, son président et son rapporteur. Reconnaissons que, sur ce sujet, légiférer était un exercice particulièrement complexe : nous avions à nous prononcer à partir de principes, en faisant valoir, comme c'est notre rôle, une volonté politique, mais, en même temps, nous étions sous la pression d'avis divergents, s'agissant des possibilités offertes par les technologies, de la réalité de l'économie numérique et de ses évolutions probables.
Sur des sujets aussi importants, aucun d'entre nous, monsieur Valade, n'avait de certitudes absolues.
C'est la méthode du Gouvernement qui est en cause, concernant notamment le recours à la commission mixte paritaire. Celle-ci fait son travail, bien entendu, mais une solution est parfois difficile à trouver lorsqu'il existe un écart aussi important entre la position de l'Assemblée nationale et celle du Sénat.
Je prendrai l'exemple de l'autorité administrative, qui ne figurait pas dans le texte de l'Assemblée nationale. Cette instance se voit conférer un pouvoir considérable puisqu'elle est garante de l'interopérabilité. Or non seulement sa fonction mais sa « matérialité juridique » même sont contestées et soulèvent des interrogations.
Je ne vois pas comment, dans un tel cas, il est possible de rapprocher les points de vue au sein d'une commission mixte paritaire ! Voilà bien un point qui aurait pleinement justifié que le Gouvernement sollicite une deuxième lecture, afin de donner au débat parlementaire toute sa place et toute sa force.
Le fait de ne pas participer aux travaux de la commission mixte paritaire ne relevait d'aucune manoeuvre de notre part. Voilà ce qui s'est passé : avant d'arriver, avec mes collègues, à neuf heures du matin, à la réunion de la CMP, je ne disposais d'aucun document écrit et l'on m'a annoncé que je devais me prononcer, dans les minutes suivantes, sur cinquante-cinq réécritures. Le respect que nous portons tant à l'écrit qu'au travail législatif nous a conduits à considérer que nous ne pouvions participer à une séance qui n'avait rien à voir avec une discussion sérieuse.
Voilà aussi pourquoi nous voterons contre ce texte.
Je ne suis certes pas un « ancien » - j'ai même probablement tous les défauts du jeune parlementaire -, mais, depuis un an et demi que je siège ici, j'ai pu constater que le Gouvernement avait multiplié les déclarations d'urgence et que, chaque fois - comme lors de l'examen du projet de loi sur l'égalité des chances, qui créait le contrat première embauche -, cette procédure, au lieu d'accélérer les débats, les compliquait inutilement, jusqu'à faire capoter le projet, que l'on se prenait les pieds dans le tapis et que cela pouvait même aboutir à une abrogation. Finalement, malgré la procédure d'urgence et en fait à cause d'elle, nous avons tergiversé pendant six mois !
Le groupe socialiste, y compris les Verts, votera clairement contre ce projet de loi, non pas parce que nous pensons qu'il n'y a pas matière à légiférer - il est nécessaire de mettre en place un cadre précis -, mais parce que nous estimons que nous devons prendre notre temps pour parvenir à un consensus en ce domaine.
Des recours ont été déposés devant les juridictions internationales ; les armadas d'avocats des grands groupes industriels s'affairent déjà ! S'y ajoutent les contestations de nos collègues députés. Tout cela ne contribuera pas non plus à rendre cette loi plus lisible et plus rapidement applicable.
Cette question devra prendre place dans le débat qui animera les Français avant la prochaine élection présidentielle. Ainsi, une vraie loi, préparant l'avenir et fixant un cadre aussi consensuel que possible, pourra voir le jour.
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Je veux dire un mot à M. le président de la commission des affaires culturelles concernant le dogmatisme.
Monsieur Valade, je n'ai accusé personne d'être dogmatique. J'examine les faits, je les énonce. Ne pas reconnaître les faits, c'est tout de même un peu ennuyeux !
On m'a dit que j'avais, derrière moi, une histoire. Eh bien oui, j'ai l'âge que j'ai ! Voilà quarante-sept ans que je suis élu : je défie quiconque de me citer un cas où, durant ces quarante-sept ans, le parti communiste français n'a pas été du côté de la liberté de création !
Je rappelle qu'en 1966, à Argenteuil, le comité central du PCF a établi un texte fameux sur la liberté de création, qui a été ensuite repris par toutes les forces politiques.
N'êtes-vous pas venu, monsieur le président Valade, dans le théâtre de ma ville,...
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Avec beaucoup de plaisir !
M. Jack Ralite. ...voir une pièce russe, Chère Helena, qui traitait de questions tragiques dans la Russie des années soixante ?
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Absolument !
M. Jack Ralite. Lors du printemps de Prague, à quel endroit a été montée la pièce de Pavel Kohout, Auguste Auguste ? À Aubervilliers !
Quand, en 1968,...
M. Dominique Braye. Pendant que vous faisiez des manifestations alibis, il y en a qui luttaient contre l'envahisseur !
M. Jack Ralite. Oui, mais moi, je ne vous renvoie pas sans cesse, si vous êtes catholique, au massacre de la Saint-Barthélemy. On n'en finit plus ! (M. Dominique Braye s'exclame.)
M. le président. Je vous en prie, laissez M. Ralite s'exprimer !
M. Jack Ralite. Croyez-moi, monsieur Braye, je ne vous ai pas attendu pour porter des jugements sur un certain nombre de choses ! Moi, l'histoire, je l'ai vécue, et je sais qu'elle est douloureuse.
Un jour, au cours d'un repas avec l'évêque de Saint-Denis, celui-ci m'a demandé pourquoi j'étais communiste au regard de tout ce qui s'était passé en URSS. Je lui ai répondu : « Et les Guerres de religions ? » Il a aussitôt souhaité passer à l'ordre du jour...
Faisons de l'histoire, mais, là, on fait l'histoire et, dans cette histoire-là, je revendique le fait d'être du côté de la liberté.
M. Dominique Braye. Les Guerres de religion, nous ne les avons pas vécues personnellement !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements précédemment adoptés par le Sénat.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Au terme d'un débat passionnant, je veux remercier celles et ceux, qui, en votant ce texte, font oeuvre utile pour les créateurs et pour les internautes. Cette réconciliation nécessaire était attendue ; votre intelligence, votre travail - plus d'une centaine d'heures de débats - ont permis de la mener à bien.
À ceux qui reprochent au Gouvernement d'avoir déclaré l'urgence sur ce texte, j'aurai la cruauté de rappeler quelques chiffres : six textes ont fait l'objet d'une déclaration d'urgence par le Gouvernement au cours des dix-huit derniers mois ; au cours de la précédente législature, on en a dénombré dix-huit !
5
Engagement national pour le logement
Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant engagement national pour le logement (n° 416.)
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici donc parvenus au terme d'un long marathon législatif, qui a débuté il y a près de huit mois, le 21 novembre 2005 exactement, date de la première lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement par notre Haute Assemblée.
J'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui les conclusions de la commission mixte paritaire qui s'est tenue le mercredi 21 juin dernier à l'Assemblée nationale.
Mes chers collègues, avant d'aborder la présentation du texte élaboré par la CMP qui est soumis à votre approbation, je voudrais tout d'abord rendre un hommage appuyé au président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Emorine, qui m'a épaulé et encouragé tout au long des différentes étapes - quelquefois difficiles - de l'examen de ce texte important.
Qu'il me soit également permis de saluer l'ouverture d'esprit de notre collègue député Gérard Hamel, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, ainsi que l'excellente ambiance qui a régné lors de nos travaux en commission mixte paritaire.
Il était à craindre que, sur un projet de loi désormais long de plus de cent dix articles, la commission mixte paritaire n'ait un travail considérable à effectuer. En réalité, ses travaux ont été grandement facilités par les convergences de vue évidentes entre les deux chambres du Parlement. D'ailleurs, comment pouvait-il en être autrement quand notre pays est confronté à un défi majeur : combattre la grave crise du logement qui frappe notre pays, crise qui nécessite la mobilisation de tous les acteurs ? Comment expliquer aux partenaires du monde du logement qu'ils doivent se rassembler et travailler ensemble pour relever ce défi si nous, élus de la nation, n'avions pu donner l'exemple ?
De ce point de vue, il est également indéniable que le travail préparatoire initié par la commission des affaires économiques en janvier 2005, avec la création d'un groupe de travail consacré aux facteurs fonciers et immobiliers de la crise du logement - dont j'avais l'honneur de présider et dont notre collègue Thierry Repentin était le rapporteur -, a largement orienté nos travaux. Le Parlement dans son ensemble, notre Haute Assemblée en particulier, peut être fier du travail accompli et des nombreux enrichissements qui ont été apportés à un texte qui ne comptait, à l'origine, que onze articles.
Dans ce cadre, tous les groupes politiques de notre assemblée, sans exception, ont apporté leur pierre à l'édifice. Certes, je ne nie pas que certains points aient pu susciter d'intenses et longs débats, parfois, d'ailleurs, pour des raisons infondées à mes yeux. Du reste, dès que la question de la réforme de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ou loi SRU, a été tranchée - dans un sens, je le crois, conforme aux intérêts de nos concitoyens - la plupart des polémiques se sont éteintes.
Ce rappel étant fait, j'en viens maintenant à la présentation du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
L'essentiel de nos travaux a porté sur le titre Ier, consacré aux dispositions en matière d'urbanisme.
La commission mixte paritaire a tout d'abord rétabli certaines dispositions que l'Assemblée nationale avait supprimées.
À l'article 2, elle a rétabli la consultation d'un représentant des organismes d'HLM lors de l'élaboration des plans locaux d'urbanisme, disposition qui avait été introduite au Sénat. Afin de ne pas alourdir à l'excès les procédures, elle a toutefois précisé que le représentant des organismes devait rendre son avis dans un délai de deux mois à compter de sa saisine par le maire.
Après un riche et long débat, la CMP a rétabli l'article 3 bis, qui avait été supprimé à deux reprises par l'Assemblée nationale. Cette disposition, issue des travaux du groupe de travail présidé par M. Philippe Pelletier, institue une prescription administrative de dix ans sur les constructions afin de permettre à leurs propriétaires d'engager des travaux de sécurisation ou de rénovation, ce qu'ils ne peuvent pas faire à l'heure actuelle. Afin de prendre en compte les interrogations, justifiées, suscitées par cet article, la commission mixte paritaire a précisé que cette prescription n'était pas applicable lorsque la construction avait été réalisée sans permis de construire ou lorsqu'une action en démolition était engagée.
S'agissant de l'article 4 quinquies, en deuxième lecture, les députés ont souhaité que la majoration de taxe applicable au foncier non bâti sur les terrains constructibles soit instituée par délibération du conseil municipal, et cela dans toutes les communes, quelle que soit leur importance. Sous réserve de quelques ajustements rédactionnels, la CMP a validé ce dispositif très attendu par tous les acteurs locaux dans le contexte actuel de forte hausse des prix du foncier, dont on constate qu'elle encourage grandement la rétention foncière. Nous pouvons faire confiance aux maires pour utiliser à bon escient cet outil essentiel qui doit leur permettre de mettre en oeuvre leur politique d'urbanisation, et en aucun cas de percevoir de nouvelles recettes.
Les députés ont rétabli l'article 4 septies, introduit par le Sénat en première lecture, puis supprimé par lui en deuxième lecture, qui vise à instaurer un partage de la plus-value réalisée par les propriétaires d'un terrain rendu constructible au profit des communes. Dans la même logique que l'article 4 quinquies, l'Assemblée nationale a prévu que cette taxe devrait être instituée sur délibération du conseil municipal. En outre, les députés ont précisé qu'elle ne pourrait s'appliquer qu'à partir du triplement au moins du prix du terrain. La CMP a adopté cet article ainsi modifié, avec quelques amendements rédactionnels.
Avant d'aborder la partie « logement » du texte, je ne peux que regretter que le décret relatif à la décote à 35 % sur les terrains de l'État n'ait toujours pas été publié, alors même que notre commission avait accepté au mois de novembre de retirer son amendement en contrepartie de l'engagement du Gouvernement à publier ce décret avant la deuxième lecture du texte au Sénat. Nous sommes bientôt au mois de juillet et, sur le terrain, les opérations sont prêtes à démarrer !
Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, que vous nous donniez des indications précises sur la date de parution de ce décret afin de pouvoir mettre en route toutes les opérations qui sont en attente. En outre, nous exercerons un suivi attentif et vigilant de la mise en oeuvre de cette disposition, dont l'application dépendra des discussions sur le plan local et de la volonté effective de l'État de remettre des terrains sur le marché.
S'agissant de la partie « urbanisme », je souhaiterais que vous nous donniez également des indications précises sur la date envisagée pour la parution du décret prévu à l'article 4 quinquies du projet de loi.
Sur le titre II, la commission mixte paritaire a adopté un grand nombre d'amendements rédactionnels et de cohérence sur plusieurs articles. Ils n'ont cependant aucune incidence sur le fond.
Dans le cadre de la réforme de l'article 55, les députés ont renoncé à comptabiliser les logements en accession sociale à la propriété dans le décompte des obligations de construction. En revanche, ils ont adopté un dispositif permettant de majorer, jusqu'au 31 décembre 2010, le montant du prêt à taux zéro pour les opérations d'accession sociale à la propriété qui reçoivent une aide d'une commune. Sur ce sujet, la CMP a adopté une disposition précisant que le bénéfice de cette majoration était également applicable aux opérations aidées par tout type de collectivité territoriale.
La commission mixte paritaire a validé, dans la rédaction retenue par les députés, l'article 8 septies, introduit au Sénat, qui vise à créer des commissions départementales et une commission nationale chargées d'analyser les difficultés rencontrées par les communes pour remplir leurs obligations de construction de logements sociaux dans le cadre de l'article 55 de la loi SRU.
Enfin, l'Assemblée nationale a finalement supprimé l'article qui comptabilisait les aires permanentes d'accueil des gens du voyage comme logements sociaux au titre dudit article 55 et a adopté un amendement rendant déductibles du prélèvement les dépenses engagées par les communes pour développer ces emplacements. La CMP a validé ce schéma.
En ce qui concerne les autres modifications de fond, nous avons supprimé l'article 5 sexies A, introduit par les députés en seconde lecture, qui prévoyait l'institution d'un mécanisme de garantie des emprunts immobiliers pour les personnes titulaires d'un contrat de travail autre qu'un contrat à durée indéterminée.
Cela ne signifie nullement que nous méconnaissons les difficultés que rencontrent certains de nos concitoyens, en particulier les plus modestes, pour avoir accès au crédit, difficultés qui entravent gravement leurs possibilités de devenir propriétaires. Toutefois, tel qu'il était rédigé, cet article aurait été inapplicable. Je sais que le ministre en charge du logement, M. Jean-Louis Borloo, s'est engagé à se pencher sur ce problème et à faire en sorte que des mesures législatives puissent être proposées dans la prochaine loi de finances. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous confirmer cet engagement ?
La CMP a également supprimé l'article 5 decies, lui aussi voté à l'Assemblée nationale en deuxième lecture, qui créait une nouvelle forme d'accession sociale à la propriété, dite de « location-attribution ». En définitive, nous n'avons pas été convaincus par les modalités d'application de ce dispositif.
Sur l'article 7 nonies, en deuxième lecture, les députés ont adopté des amendements de M. Michel Piron, président du Conseil national de l'habitat, qui ont remplacé le permis de louer par un régime déclaratif. Tout en conservant le caractère expérimental de ce dispositif, l'Assemblée nationale a trouvé une formule beaucoup plus souple et plus pragmatique. La CMP, quant à elle, a précisé que ce régime de déclaration de mise en location était sans effet sur le bail dont bénéficie le locataire.
S'agissant des dispositifs relatifs à la lutte contre les « déconventionnements », les députés ont prévu que les conventions des logements possédés par les filiales de la Caisse des dépôts et consignations seraient prolongées de six ans au seul bénéfice des locataires en place. La commission mixte paritaire s'est ralliée à leurs arguments. Il s'agit là d'une avancée majeure.
Par ailleurs, la CMP a maintenu la suppression de l'article 8 septies C, adopté au Sénat contre l'avis du Gouvernement et de la commission, qui obligeait les bailleurs possédant plus de 100 logements à offrir un relogement aux locataires « déconventionnés » dans la même commune ou à proximité.
Sur les articles du titre III, la commission mixte paritaire a validé l'article 19 B, qui instaure un régime comptable simplifié pour les petites copropriétés. En revanche, elle a supprimé l'article 19 C, qui conférait aux syndicats de copropriétaires un privilège sur les créances des entreprises en liquidation judiciaire. Enfin, la commission mixte paritaire a élargi aux communautés d'agglomération le bénéfice du dispositif prévu à l'article 25 bis.
En définitive, la commission mixte paritaire a retenu un texte équilibré, qui prend en compte toutes les préoccupations des députés et des sénateurs. Au total, je crois que nous nous retrouvons tous largement dans ce texte. C'est pourquoi, mes chers collègues, je ne peux que vous inviter à le voter. Il apporte en effet une réponse ambitieuse et globale aux problèmes du logement dans notre pays.
Reste maintenant, monsieur le ministre, à rendre ce texte applicable le plus rapidement possible : la balle est dans le camp du Gouvernement. Croyez bien que le Parlement y veillera avec la plus grande attention compte tenu des problèmes de logement que connaît notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le savez, la France connaît aujourd'hui une crise du logement. Dans de nombreuses régions et dans la plupart des grandes agglomérations, il existe en effet une grave insuffisance de l'offre de logements accessibles aux ménages à revenus modestes et moyens, qui s'explique en grande partie par une construction insuffisante depuis près de vingt ans.
Pour répondre à cette situation, le Gouvernement a engagé très tôt une politique volontariste. Dès 2004, nous avons lancé le plan de cohésion sociale pour répondre sans attendre aux besoins des ménages modestes, qui sont les plus durement touchés par cette crise.
Ce plan fixe des objectifs ambitieux de développement d'une offre locative à loyer accessible sur la période 2005-2009, pour lesquels les financements de l'État sont garantis dans la durée grâce à une loi de programmation : pour le parc public, 500 000 logements sociaux en cinq ans ; pour le parc privé, 200 000 logements à loyers maîtrisés et 100 000 logements vacants remis sur le marché en cinq ans.
Dans le même temps, le Gouvernement a décidé d'encourager l'accession à la propriété, qui correspond à une aspiration forte des Français. Les prêts à taux zéro dédiés à l'accession sociale, jusque-là réservés à l'accession dans le neuf, ont été étendus au début de 2005 à l'accession dans l'habitat existant, sans obligation de travaux, et leurs conditions financières ont été améliorées, au bénéfice des emprunteurs.
Grâce à ces premières mesures et à la mobilisation de tous les partenaires - services de l'État, collectivités territoriales, organismes d'HLM, propriétaires privés, etc. - des résultats très encourageants ont été obtenus en 2005.
Ainsi, plus de 80 000 logements sociaux financés dans le parc public ont été réalisés. C'est le plus haut niveau depuis dix ans et le double de la production de l'année 2000. Le nombre de prêts à taux zéro est passé de 80 000 à 200 000. En outre, 410 000 nouveaux logements ont été mis en chantier en 2005 et ce chiffre s'élève même à 424 000 sur les douze derniers mois. Il s'agit là d'un record inégalé depuis vingt-cinq ans !
Nous avons donc déjà commencé à inverser la tendance.
Mais nous devons maintenant conforter et amplifier cet effort de construction sur toute la chaîne du logement, qu'il s'agisse du locatif social, du locatif privé ou de l'accession sociale, et ce dans toutes les régions de notre pays.
En effet, après avoir doublé le nombre de logements sociaux financés en quatre ans, notre objectif est aujourd'hui de prendre toutes les mesures complémentaires pour pouvoir le tripler, ce qui correspondrait à un niveau de 120 000 unités supplémentaires dans les trois ans. Nous atteindrions ainsi un total de 500 000 logements sociaux entre 2005 et 2009. Comme vous le savez, c'est l'objectif fixé par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.
En matière de construction de logements en général, nous devons également viser plus haut si nous voulons à la fois rattraper les retards accumulés ces dernières années et répondre aux nouveaux besoins de nos concitoyens. Entre 450 000 et 500 000 nouvelles mises en chantier seront nécessaires chaque année. En outre, le nombre de permis de construire actuellement délivrés, qui était de 542 000 ces douze derniers mois, permet de prévoir que nous dépasserons le seuil des 450 000 mises en chantier dans les prochains mois.
M. Dominique Braye, rapporteur. Très bien !
M. Henri Cuq, ministre délégué. C'est précisément pour consolider les premiers résultats obtenus, et notamment ceux du plan de cohésion sociale, que le Gouvernement a décidé, en septembre 2005, de mettre en oeuvre le Pacte national pour le logement.
Ce plan d'ensemble comprend des actions opérationnelles, dont la plupart sont déjà en application : inventaire exhaustif des terrains de l'État qui seront cédés pour permettre la construction de 30 000 logements dans les trois prochaines années ; mise en place de nouveaux prêts de la Caisse des dépôts et consignations de très longue durée, jusqu'à soixante ans, dédiés aux acquisitions foncières ; amélioration des conditions financières des prêts en faveur de la construction de logements sociaux, etc.
En outre, le projet de loi portant engagement national pour le logement, qui a été présenté en conseil des ministres en octobre 2005, constitue le volet législatif de cette action destinée à consolider le plan de cohésion sociale.
Ce projet de loi vise à atteindre quatre grands objectifs. Il s'agit de mobiliser la ressource foncière pour la construction de logements, de soutenir l'accession sociale à la propriété, de développer l'offre locative à loyers maîtrisés, sociale comme privée, et de favoriser l'accès de tous à un logement confortable.
Permettez-moi d'en rappeler brièvement les principales mesures.
S'agissant d'abord de la mobilisation de la ressource foncière, les collectivités territoriales disposeront de nouveaux outils pour améliorer la prise en compte du logement dans leurs documents d'urbanisme, pour lutter contre la rétention foncière et pour disposer de ressources nouvelles permettant de mieux accompagner l'urbanisation et la construction de logements.
Pour ce qui est, ensuite, du développement de l'offre locative à loyers maîtrisés, le projet de loi tend à créer deux nouveaux dispositifs d'incitation fiscale, qui, selon les professionnels, seront très performants : un dispositif en faveur du neuf en parallèle du dispositif « Robien », afin de loger les ménages à revenus modestes et moyens à des loyers inférieurs de 30 % au marché, et un dispositif dans l'ancien, qui ira de pair avec l'élargissement des compétences de l'ANAH au conventionnement sans travaux.
Par ailleurs, s'agissant du soutien à l'accession sociale à la propriété, le projet de loi prévoit deux mesures phares. Il s'agit de la majoration, jusqu'à 15 000 euros de prêt supplémentaire, pour 20 000 prêts à 0 % par an au bénéfice des ménages modestes et d'un taux de TVA réduit pour tous les projets d'accession sociale dans les quartiers en rénovation urbaine et à proximité.
Enfin, pour favoriser l'accès de tous à un logement confortable, le projet de loi comporte plusieurs mesures importantes comme la réforme des mécanismes d'attribution des logements sociaux et le renforcement des moyens de lutte contre l'habitat non décent ou indigne.
Monsieur le rapporteur, vous avez souhaité obtenir quelques précisions de la part du Gouvernement sur certains articles particuliers de ce projet de loi. Je vous les donne bien volontiers au nom de Jean-Louis Borloo.
Je vous confirme que le décret prévoyant une décote de 35 % sur les terrains de l'État cédés en vue d'y construire des logements sociaux a été signé récemment ; sa publication est donc imminente. Des opérations à caractère social sur des terrains publics pourront ainsi se monter, y compris dans les zones les plus tendues, ce qui est une bonne chose. Je partage pleinement votre souhait : en tant que propriétaire, l'État doit montrer l'exemple en ce domaine.
S'agissant de l'article 4 quinquies, qui vise à donner aux communes le souhaitant des moyens accrus pour lutter contre les risques de rétention foncière, le décret d'application correspondant, qui est un décret simple, sera publié au plus tard à la rentrée prochaine.
Enfin, vous avez largement évoqué l'article 5 sexies A, qui a été introduit à l'Assemblée nationale en seconde lecture, puis supprimé en commission mixte paritaire. Celui-ci prévoyait l'institution d'un mécanisme de garantie des emprunts immobiliers pour les personnes aux revenus irréguliers. Je vous confirme que le Gouvernement, notamment Jean-Louis Borloo, souhaite permettre à ces personnes d'accéder à la propriété. Nous nous engageons à trouver une solution avant la fin de l'année, si besoin est au travers de mesures législatives.
M. Dominique Braye, rapporteur. Je vous remercie, monsieur le ministre.
M. Henri Cuq, ministre délégué. J'espère que ces précisions répondent à vos attentes, monsieur le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Tout à fait !
M. Henri Cuq, ministre délégué. Le Gouvernement partage totalement votre souci : il faut que les dispositions de ce projet de loi soient opérationnelles dans les meilleurs délais.
Ce texte, très riche et très complet, a donc l'ambition de redynamiser l'ensemble de la chaîne du logement.
Nous arrivons aujourd'hui à la fin de la discussion parlementaire de ce projet de loi. Celle-ci a été particulièrement fructueuse de bout en bout. En effet, le texte initial du Gouvernement comportait onze articles et le texte qu'il vous est proposé d'adopter définitivement aujourd'hui en compte cent douze.
Sur la méthode, je me félicite bien sûr que ce texte constitue une véritable coproduction du Gouvernement et du Parlement. C'est une construction commune très solide au service du logement de tous nos concitoyens.
Je tiens à saluer la contribution remarquable du Sénat sur ce projet de loi. Je pense en particulier à l'excellent travail accompli par votre rapporteur, Dominique Braye, avec le soutien actif du président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Emorine, que je salue également.
En outre, je souhaite rendre hommage à l'apport extrêmement utile du groupe de travail qui a été mis en place par la commission dès le début de l'année 2005. Les deux responsables de ce groupe de travail, Dominique Braye et Thierry Repentin, ont pris soin de rencontrer l'ensemble des acteurs du logement. Cela leur a permis d'apporter des réponses très souvent pertinentes et fortes aux difficultés de logement de nos compatriotes.
Dans ce long travail collectif, nous avons été constamment guidés par la conviction que le logement constitue un ciment de notre cohésion sociale et par la volonté d'actionner tous les leviers de la politique du logement, qu'il s'agisse du locatif social et intermédiaire ou de l'accession à la propriété, afin de proposer une offre de logement adaptée aux besoins et aux possibilités des Français.
Les mesures proposées par le projet de loi portant engagement national pour le logement sont bien, me semble-t-il, à la hauteur des enjeux actuels de la politique du logement.
Comme vous, monsieur le rapporteur, je souhaite une publication rapide de cet excellent texte, afin que les principaux outils qu'il prévoit soient mis en place sans délai et que nous continuions ainsi à apporter ensemble des solutions concrètes aux demandes pressantes de nos concitoyens dans le domaine du logement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme le disait voilà quelques minutes notre rapporteur Dominique Braye, nous voici donc parvenus au terme de ce long processus législatif, qui nous occupe désormais depuis plus de huit mois.
À présent, il nous est demandé d'examiner les conclusions de la commission mixte paritaire sur le présent projet de loi. Le groupe socialiste, tout en reconnaissant certaines avancées dans ce texte, demeure réservé sur un grand nombre de sujets.
Toutefois, nous n'oublions pas que ce texte procède, à l'origine, d'un travail préparatoire conduit par le Sénat dans le cadre d'une mission constituée au sein de la commission des affaires économiques. Il est indéniable que les nombreux apports parlementaires à ce projet de loi, même s'ils ne sont pas tous issus de ce travail, y ont trouvé une source d'inspiration non négligeable.
M. Dominique Braye, rapporteur. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Caffet. À cet égard, je souhaite rendre hommage à l'apport émanant du groupe de travail sénatorial.
Ce groupe a été constitué avec le soutien du président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Emorine, et animé par notre rapporteur Dominique Braye et notre collègue Thierry Repentin. Je vous prie d'ailleurs de bien vouloir excuser l'absence de ce dernier, qui est retenu aujourd'hui par un déplacement à l'étranger consacré aux partenariats entre le public et le privé pour favoriser l'émergence du logement accessible.
M. Dominique Braye, rapporteur. Vous-même avez été un membre très actif du groupe de travail sénatorial, monsieur Caffet !
M. Jean-Pierre Caffet. Effectivement, ayant moi-même été membre de ce groupe de travail, je puis témoigner qu'un grand nombre de réflexions, de débats et de traductions législatives résultent de nos travaux. Cela démontre toute la valeur ajoutée qu'un travail parlementaire entamé en amont peut apporter.
À l'évidence, mes chers collègues, le Parlement peut tirer un bilan tout à fait positif de cette expérience, qui pourrait opportunément être réitérée dans d'autres domaines et sur d'autres sujets.
Cela étant, comme je le disais en introduction de mon propos, même si le groupe socialiste s'est vu confier le poste de rapporteur de ce groupe de travail, poste qui a été occupé par Thierry Repentin, nous sommes loin de considérer que tous les problèmes d'urbanisme, de foncier, de fiscalité et de logement auxquels notre pays est actuellement confronté ont reçu une réponse adaptée dans ce projet de loi. Un grand nombre de sujets n'ont pas fait l'objet d'un traitement suffisamment ambitieux compte tenu des enjeux, voire ont été purement et simplement écartés.
S'agissant tout d'abord de la partie relative à l'urbanisme, nous avons certes quelques motifs de satisfaction, mais également des regrets et un profond sujet de désaccord.
Nous avons en effet des motifs de satisfaction, puisque le groupe socialiste peut se féliciter que certains de ses amendements aient été adoptés. Nous en prenons acte ! Je mentionnerai pêle-mêle l'exonération de taxe sur les plus-values en cas de cession d'un bien au profit du logement social, l'accès des personnes expropriées au fichier des hypothèques ou encore la consultation des organismes HML pour l'élaboration des PLU, même si cette dernière mesure a été singulièrement amoindrie en commission mixte paritaire.
Outre ces quelques mesures, d'importantes dispositions relatives à la fiscalité foncière ont été introduites dans ce projet de loi. C'est là que j'en viens au chapitre des regrets.
Le groupe de travail avait formulé des propositions ambitieuses et innovantes sur ce sujet ; certains les avaient même qualifiées, et non sans fondement, de « révolutionnaires ».
M. Dominique Braye, rapporteur. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Caffet. Il s'agissait principalement de l'instauration d'un partage de la plus-value sur les terrains constructibles entre les propriétaires et les communes et de la majoration de taxe sur le foncier non bâti constructible.
La première de ces mesures est d'abord passée à la moulinette de Bercy. Puis elle a été supprimée en deuxième lecture par le Sénat, qui l'avait pourtant adopté à l'unanimité en première lecture. Elle a heureusement été rétablie par les députés. Toutefois, elle a entre-temps été rendue facultative, alors même que de nombreux acteurs concernés nous avaient demandé, et nous demandent encore, qu'elle soit instituée par la loi. Au final, il s'agit donc bien d'un pas dans la bonne direction, mais d'un petit pas.
La majoration de taxe sur le foncier non bâti a subi le même sort. Nous le regrettons évidemment.
Autre sujet de regret, la décote sur les terrains de l'État : nous aurions souhaité qu'elle soit plus importante que les 35 % acceptés par le Gouvernement. À cet égard, je relève que la loi sera prochainement promulguée et que le décret n'a toujours pas été publié. Toutefois, j'ai bien entendu les assurances de M. le ministre sur ce point lors de son intervention.
S'agissant toujours des terrains de l'État, la fusion du droit de préemption et du droit de priorité instituée par ce texte aboutira, dans certains cas - nous en sommes convaincus -, à contraindre les communes à se porter acquéreur de l'ensemble des biens de l'État sur la commune en même temps, ce qu'elles n'auront pas la capacité financière de faire.
J'en viens au profond désaccord qui nous oppose. La mesure la plus choquante de ce texte reste, à nos yeux, l'article 2, qui institue un droit de délaissement en contrepartie des obligations que pourront désormais imposer les PLU en matière de logement, notamment social.
Sur le plan des principes, tout d'abord, nous considérons qu'il est inadmissible de faire entrer le logement social dans le champ des servitudes, car, vous en conviendrez, de la servitude à la nuisance, il n'y a souvent qu'un pas ! Je regrette que certains parlementaires considèrent que cette servitude puisse constituer, dans certains cas, une nuisance. Comme l'a très récemment écrit un éminent professeur de droit, une telle mesure en dit long sur l'estime du législateur français pour le logement social et ses occupants.
Sur le plan pratique, ensuite, cette disposition risque de conduire à une paralysie des exécutifs locaux, qui ne seront pas en mesure d'acquérir les terrains si tous les propriétaires font jouer leur droit de délaissement en même temps, sujet que nous avons longuement évoqué la semaine dernière en commission mixte paritaire sans, malheureusement, être entendus. Nous aurons l'occasion de vérifier, dans les mois à venir, si le danger est réel, à Paris notamment.
Nous estimons donc que les réponses apportées sur ce sujet restent bien modestes au regard de l'envolée des prix du foncier et de la nécessité de remettre sur le marché des terrains à des prix compatibles avec des opérations de logement social.
S'agissant du volet logement du projet de loi, nous nous félicitons, bien entendu, que l'article 55 de la loi SRU n'ait pas été vidé de sa substance, comme le proposait le président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, M. Patrick Ollier, dans son désormais célèbre amendement.
Le groupe socialiste, avec l'appui d'autres groupes de la Haute Assemblée - relayant ainsi une mobilisation associative exemplaire -, n'a pas à rougir de la guérilla parlementaire qui a été menée sur cette disposition et se félicite de sa suppression lors de la discussion au Sénat. Nous nous réjouissons également que les députés aient finalement renoncé à la réintroduire en deuxième lecture. Cela démontre, s'il en était besoin, à quel point cette mesure constituait une aberration. Son seul objet était d'exempter les communes disposant de peu de logements sociaux d'en construire. Nous nous réjouissons que le Parlement ne soit pas tombé dans ce piège.
Cela étant, même si l'essentiel a été préservé, le groupe socialiste aurait souhaité profiter de ce texte pour renforcer les objectifs de mixité sociale défendus par l'article 55, par exemple en alourdissant les contributions de solidarité ou en augmentant le nombre de communes concernées par ces obligations. Malheureusement, la majorité sénatoriale est restée sourde à nos propositions et nos amendements ont été rejetés tant en première lecture qu'en deuxième lecture.
En ce qui concerne la lutte contre les déconventionnements des logements des filiales immobilières de la Caisse des dépôts et consignations, nous notons, là encore, une volonté d'avancer sur ce sujet et d'apporter une réponse aux difficultés rencontrées par de nombreux ménages franciliens. Bien entendu, nous ne pouvons que nous réjouir de l'article voté au Sénat qui prolonge lesdites conventions. Toutefois, alors que le Sénat avait prévu que les conventions pourraient être prolongées pour une durée identique à celle des conventions initiales, les députés ont ramené cette durée à six ans et ont limité le bénéfice du dispositif aux locataires en place. Nous regrettons bien entendu ce pas en arrière.
De même, sur ce sujet, nous déplorons la suppression par l'Assemblée nationale de l'article qui obligeait les propriétaires de parcs conventionnés de plus de cent logements, donc les filiales de la Caisse des dépôts et consignations, à proposer une solution de relogement aux ménages « déconventionnés ».
Par ailleurs, le groupe socialiste continue de regretter que rien, dans ce projet de loi, n'ait été prévu en matière d'aides à la personne et donc en faveur des ménages les plus modestes. Nous persistons pourtant à penser que c'est un enjeu majeur pour nos concitoyens les plus démunis en termes de pouvoir d'achat. Le moins que l'on pouvait d'attendre d'un projet de loi portant engagement national pour le logement aurait été qu'il supprime, comme nous l'avons demandé à de très nombreuses reprises, un certain nombre de règles injustes ; je pense notamment au fameux seuil de 24 euros en deçà duquel les aides à la personne ne sont pas versées, mais également à la règle du mois de carence.
De même, l'indice des loyers a été réformé, ce qui est un élément positif, car cela permettra de limiter les progressions des loyers. Toutefois, afin de préserver le pouvoir d'achat des ménages, il aurait été nécessaire, nous semble-t-il, d'indexer l'évolution des aides à la personne sur ce nouvel indice.
Nous regrettons que le texte ait porté un premier coup de canif au principe de plafonnement du taux d'effort des locataires dans le parc HLM à 25 % de leurs revenus. En effet, l'article 10 permet désormais aux programmes locaux de l'habitat de porter ce taux à 35 % et nous le déplorons.
Enfin, les dispositifs de soutien aux investissements locatifs constituent une autre source d'insatisfaction importante pour le groupe socialiste, car ils n'ont pas été réformés dans le sens que nous souhaitions.
Compte tenu des effets pervers du dispositif « Robien », constatés d'ailleurs par un grand nombre d'acteurs de l'immobilier, notre demande était pourtant simple : la suppression pure et simple de ce mécanisme de défiscalisation. En effet, nous considérons que ce dispositif ne contribue qu'à produire des logements déconnectés des réalités locatives locales et qui ne sont pas destinés aux ménages rencontrant les plus grandes difficultés pour se loger. Nous ne souscrivons donc pas au simple toilettage de l'amortissement « Robien » opéré par le projet de loi et à la création d'un pseudo-amortissement social, pour lequel les plafonds de ressources et les niveaux de loyers seront, en définitive, assez élevés.
Pour autant, malgré ces critiques, bien réelles, nous ne sommes pas aveugles : nous reconnaissons, bien entendu, que ce texte contient des avancées substantielles, notamment les dispositions en faveur de la lutte contre l'insalubrité ou contre la vacance des logements.
De même, nous nous réjouissons que la majorité ait accepté, en deuxième lecture, un amendement du groupe socialiste tendant à compléter la liste des clauses abusives dans les baux d'habitation, dispositif qui permettra de mettre fin à un grand nombre de pratiques inacceptables de la part des professions immobilières.
Nous prenons acte, également, du fait que l'article 57 de la loi SRU ait été réformé et que l'abonnement aux réseaux de chaleur, ainsi que la fourniture de chaleur quand elle provient d'énergies renouvelables bénéficient du taux de TVA à 5,5 %.
Enfin, nous ne pouvons que constater les progrès évidents intervenus en matière de compensation des pertes de recettes pour les collectivités territoriales liées à l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficient les logements sociaux. Nous aurions néanmoins souhaité que celle-ci soit définitive, alors que le projet de loi prévoit que la disposition ne sera applicable que pendant la durée du plan de cohésion sociale.
À ce stade du bilan, vous me permettrez de mettre en exergue le fait que nous ne serions sans doute pas allés aussi loin, collectivement, si ce texte avait été déclaré d'urgence, comme c'est désormais une pratique trop courante. Il reste à s'interroger, tant au sein du Gouvernement que du Parlement, sur le temps de l'élaboration de la loi et sur l'initiative parlementaire à la lecture de la jurisprudence de l' « entonnoir » qui paraît se profiler.
Mais revenons au fond du texte. Malgré ces éléments indiscutablement positifs, nous continuons de penser que le compte n'y est pas, pour toutes les raisons que je viens d'évoquer.
En définitive, mes chers collègues, restant ainsi cohérent avec les votes qu'il a émis tout au long de ce processus législatif, le groupe socialiste votera contre les conclusions de cette commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons, le logement fait partie des premières attentes des Français tant la crise que nous traversons en rend l'accès de plus en plus difficile : hausse des prix de vente et de location, crise du foncier, déséquilibre entre l'offre et la demande, manque de logement sociaux constituent autant d'éléments qui justifient que nous agissions vite.
À cet égard, monsieur le ministre, je salue les efforts que vous avez entrepris depuis quelques années pour relancer la construction de logements sociaux, domaine dans lequel la France accusait un retard considérable avant le plan de cohésion sociale. Ce plan, certes ambitieux, permettra de combler, dans une certaine mesure, le déficit que nous avions en la matière.
Ce projet de loi répond à d'autres aspects de cette crise : il prend en compte les difficultés de mobiliser du foncier, la demande de logements locatifs des catégories intermédiaires, les questions d'accession sociale à la propriété et il permet de lutter contre le mal-logement.
Les parlementaires ayant disposé d'une grande marge de manoeuvre, le projet de loi a été considérablement enrichi par des mesures très différentes, parfois au détriment de sa cohérence.
À titre personnel, je remercie M. le ministre et M. le rapporteur d'avoir émis un avis favorable sur plusieurs des amendements que j'avais présentés. Je pense à celui qui permet la mise en oeuvre dans chaque région d'outre-mer, comme en métropole, du volet logement du plan de cohésion sociale, en mobilisant de manière appropriée l'ensemble des mesures de soutien au logement social dans le cadre d'un contrat d'objectifs. Je pense également à l'amendement qui donne la possibilité aux organismes d'HLM d'assurer des prestations de construction et de gestion de programmes de société civile immobilière en défiscalisation « Girardin ».
Mais l'initiative des parlementaires a parfois suscité quelques inquiétudes de notre part, s'agissant notamment de la réforme de l'article 55 de la loi SRU. Je remercie l'ensemble des sénateurs qui ont permis de revenir sur le dispositif que le président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale avait fait adopter. En effet, intégrer dans le décompte des 20 % de logements locatifs sociaux les logements acquis avec une aide à l'accession à la propriété contribue à dénaturer l'esprit de cet article alors que nous savons quelles sont les attentes en matière de logements locatifs sociaux. Par ailleurs, revenir sur cette règle, c'était aller à l'encontre du principe de mixité sociale, auquel nous sommes très attachés.
Sur cette question de la mixité sociale, je regrette que l'Assemblée nationale soit revenue sur le plafonnement du surloyer. Le maintenir à 25 % aurait été plus sage, me semble-t-il, et aurait largement contribué à soutenir l'exigence de mixité sociale.
Autre regret, partagé par un grand nombre de mes collègues, la confirmation de la réintroduction dans le texte de l'article 4 septies. De nombreux collègues avaient en effet soutenu l'amendement de suppression de notre collègue Henri de Raincourt, estimant que cette mesure n'était ni juste ni équitable.
Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des articles du projet de loi, les deux lectures nous ayant largement donné la possibilité de nous exprimer. Je remercie à cet égard M. le ministre de ne pas avoir déclaré l'urgence. Je ne suis pas sûre que nous aurions pu alors obtenir satisfaction sur l'article 55 de la loi SRU. Par ailleurs, je remercie notre collègue Dominique Braye, qui nous a permis, tout au long de ces semaines, de travailler dans un climat serein et constructif.
Pour terminer, j'évoquerai la question du logement très social. Il semble que cette partie de la problématique du logement reste encore très en deçà des espérances. Nous devons, à l'image de ce qui a été fait précédemment, mettre en oeuvre une politique d'envergure en la matière. Les instruments manquent pour encourager la production de logements très sociaux. C'est pourquoi, avec ma collègue Valérie Létard, le groupe UC-UDF avait suggéré quelques pistes de réflexion. Nous avions ainsi proposé que, pour l'inventaire des 20 % de logements locatifs sociaux, les logements financés à l'aide d'un prêt locatif aidé d'intégration soient affectés d'un coefficient égal à deux.
D'autres pistes sont à explorer ; nous vous en avons proposé. Il ne faut pas oublier, en effet, que l'accès au logement doit devenir une priorité, d'autant que la part des revenus d'un ménage consacrée au logement ne cesse de progresser.
En dépit de cette attente, à laquelle nous sommes très sensibles, le groupe UC-UDF votera ce texte.
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous finissons pratiquement cette session ordinaire par l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant engagement national pour le logement, qui a constitué, parmi d'autres, l'un des temps forts de la session.
Le moins que l'on puisse dire est que, sur un plan strictement formel, ce débat a illustré ce qui peut se faire de pire en matière d'exercice des droits du Parlement, la première lecture du texte au Sénat ayant été hachée au beau milieu de la discussion budgétaire, sans respect pour la simple continuité des débats et la cohérence des dispositions.
Mais, à égale distance des critiques de fond et de forme, comment ne pas relever de nouveau que le projet de loi initial comportait onze articles et que le projet de loi qui sera finalement voté en comptera probablement plus de cent, ce qui signifie que tout a été fait pour que le législateur débatte dans la précipitation ?
Des dispositions importantes du projet de loi - modification du statut des organismes HLM, devenir des sociétés de crédit immobilier, incitation fiscale en faveur de l'investissement immobilier privé, nouvelle ponction sur les ressources du 1 % logement, par exemple, - sont ainsi apparues par voie d'amendements, souvent d'origine gouvernementale, déposés en dernière instance, au milieu d'une multitude d'amendements divers et variés !
Que l'on se représente les faits !
Première lecture au Sénat : 500 amendements déposés ! Première lecture à l'Assemblée nationale : 610 amendements déposés ! Deuxième lecture au Sénat : 550 amendements supplémentaires ! Deuxième lecture à l'Assemblée nationale : 299 amendements de plus !
Au total, près de 2 000 amendements auront été défendus sur ce texte - 1 959 exactement - ce qui a conduit, comme nous l'avons dit, à accroître sensiblement le périmètre des dispositions du projet de loi.
La preuve en est que la commission mixte paritaire avait encore à trancher sur un ensemble assez substantiel d'articles, une bonne cinquantaine, chiffre témoignant d'un niveau de désaccord dans la rédaction du projet de loi qui, en lui-même, aurait pu justifier une troisième lecture.
On pourrait considérer cette situation comme la preuve d'une certaine vitalité de l'activité parlementaire, mais la vérité est sans doute moins satisfaisante. Le texte qui est issu de nos travaux constitue, sous certains aspects, un retour en arrière sur les acquis de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, loi dont la discussion avait occupé une bonne part de la législature précédente.
La question de l'obligation de construction de logements sociaux, dans toutes les villes, question centrale au regard de la crise du logement, question à laquelle la loi SRU avait commencé de produire des réponses, est de nouveau esquivée.
Au motif de rendre aux élus locaux une forme de souplesse dans leur gestion de l'aménagement urbain, on crée les conditions pour stopper net la réalisation de logements sociaux, même sous la forme du PLS, le prêt locatif social, et laisser place aux opérations immobilières spéculatives, ségrégatives et consommatrices d'espaces disponibles.
La souplesse dont certains se prévalent n'est que la déclinaison infinie des « localismes », que le texte qui nous est présenté valide, sans la moindre remise en cause.
L'État, d'ailleurs, semble devoir lui-même appliquer les mêmes principes : les orientations fixées en matière de cession de biens fonciers et immobiliers ne permettront pas de dégager les moyens d'une véritable politique de réalisation de logements sociaux, et il est à craindre que les possibilités foncières ainsi libérées ne se perdent, là encore, dans des plans d'aménagement fort éloignés des aspirations des populations.
Une autre idée-force traverse le texte, découlant d'ailleurs des positions adoptées : la banalisation libérale de la question du logement.
Des offices HLM transformés en sociétés commerciales aux activités banalisées, à l'égal de celles des marchands de biens et des gestionnaires de fonds, en passant par l'incitation fiscale à l'investissement ou encore par le nouvel allongement des charges récupérables par les bailleurs, tout est fait pour privatiser la question du logement, contrairement au titre de ce projet de loi, qui porterait, paraît-il, engagement national...
Il y a en effet, de ce point de vue, une grande tricherie intellectuelle. Ce n'est pas un engagement national pour le logement qui est défini ; nous ne sommes en face que d'une longue suite - au demeurant cohérente - de dispositions libérales, adaptables à chaque situation locale, c'est-à-dire à chaque rapport de forces et de pouvoir local.
L'État n'est pas appelé à intervenir plus avant dans la mise en oeuvre de la politique du logement ; il ne fait que poser quelques règles ; libre ensuite à chacun de les mettre en oeuvre sur tout ou partie du territoire.
Le droit au logement est pourtant une priorité nationale et son exercice nécessite autre chose, de notre point de vue, que de se plier aux seules considérations locales.
Une bonne part des interventions des parlementaires de la majorité a consisté à mettre en cause le fameux seuil des 20 % de logements sociaux, alors même que 70 % des demandeurs de logement que compte notre pays pourraient bénéficier de logements en prêts locatifs aidés d'intégration, les PLAI !
On fait comme si l'on voulait relancer l'activité du secteur mais sans répondre à la réalité de la demande, ce qui est pour le moins paradoxal !
Continuez ainsi, et la crise du logement, qui occupe déjà une bonne partie de la vie politique réelle de notre pays, va devenir l'un des éléments fondamentaux du débat qui nous animera d'ici au printemps prochain.
Le mal-logement est une maladie grave, dont souffre un nombre important de nos concitoyens, frappant de manière brutale les plus modestes, les plus vulnérables, les familles populaires, les jeunes à la recherche de leur premier logement indépendant, les salariés victimes de la précarité de l'emploi.
Le mal-logement est un des éléments de l'insécurité sociale, et les mesures contenues dans le texte sur la gestion du logement des plus défavorisées sont loin, très loin d'y remédier.
Il est évident que le texte qui résulte des travaux parlementaires - CMP comprise - ne constitue pas, malgré sa longueur, une réponse adaptée à cette situation de mal-logement.
Sans programmation effective de réalisation de logements sociaux, sans maîtrise foncière renforcée, sans validation de l'action sociale des organismes HLM, sans remise en cause des avantages fiscaux éhontés dévolus à l'investissement immobilier spéculatif, sans prise en compte du droit opposable mis en avant par le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, dont je suis membre, sans avancée en matière de droits des locataires, ce projet de loi ne permettra pas de répondre aux véritables questions qui se posent, au quotidien, en ces matières.
Nous ne voterons donc pas plus le texte issu des conclusions de la commission mixte paritaire que nous n'avions approuvé celui qui résultait des deux lectures du projet de loi par notre assemblée.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, premièrement, aucun amendement n'est recevable, sauf accord du Gouvernement, deuxièmement, le Sénat étant appelé à se prononcer avant l'Assemblée nationale, il statue d'abord sur les amendements, puis par un seul vote sur l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
TITRE IER
MOBILISATION DE LA RESSOURCE FONCIÈRE POUR LA RÉALISATION DE LOGEMENTS
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Chapitre IER
FACILITER LA RÉALISATION DE LOGEMENTS SUR LES TERRAINS PUBLICS