PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
M. le président. La séance est reprise.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de participer à nos travaux.
Je rappelle que l'auteur de la question, de même que la ou le ministre pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes trente.
logement en guadeloupe
M. le président. La parole est à M. Daniel Marsin.
M. Daniel Marsin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'outre-mer.
Alors que l'égalité sociale avec la métropole est considérée comme globalement réalisée, la situation de l'habitat en Guadeloupe trahit encore un retard considérable.
Lors de la première lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement, j'ai eu à alerter le Gouvernement sur la baisse de production du logement social outre-mer et sur la nécessité d'abonder la ligne budgétaire unique, la LBU, pour retrouver un rythme compatible avec les besoins identifiés.
Monsieur le ministre, votre ministère a procédé aux notifications suivantes pour 2006 : 46,21 millions d'euros en autorisations, ce qui correspond à 71 % des besoins estimés ; 31,88 millions d'euros en crédits de paiement, soit un pourcentage réduit à 56 %.
On note donc d'importants écarts entre les besoins et les dotations, et les 21 millions d'euros effectivement reçus à ce jour ne couvrent même pas les factures en cours, qui s'élèvent à 24 millions d'euros.
Dès lors, la première mesure d'urgence consisterait à rendre disponible le solde des crédits de paiement, soit environ 11 millions d'euros.
Monsieur le ministre, ma question est la suivante : au moment où les besoins en logements neufs - locatif ou accession sociale - et en réhabilitation de l'habitat insalubre s'expriment de plus en plus fortement, au moment où l'activité économique souffre déjà en Guadeloupe des effets d'une inflation supérieure à celle que connaît la métropole et qui menace d'aggraver un chômage déjà explosif, au moment où les collectivités de l'agglomération constituée par ma ville, les Abymes, et Pointe-à-Pitre, la capitale économique, s'apprêtent à s'engager dans une opération de renouvellement urbain de grande envergure, le Gouvernement peut-il prendre le risque de décourager les acteurs de la filière de la construction - bailleurs sociaux et professionnels du BTP - et de décevoir nos concitoyens aspirant à des conditions décentes de logement ?
En tout état de cause, pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, les dispositions administratives et financières que vous comptez prendre pour éviter une nouvelle rupture de paiement à très court terme, qui aurait pour conséquence la baisse de la production de logements sociaux en 2006 ? Comment comptez-vous abonder au niveau adéquat les dotations destinées à couvrir les dettes de 2005 ainsi que la programmation de 2006, et accélérer la mise à disposition des crédits notifiés ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre de l'outre-mer. Monsieur Marsin, je partage pleinement le constat que vous avez dressé en ce qui concerne le retard considérable pris en matière de logement social outre-mer ; nous en avons, d'ailleurs, déjà discuté ensemble. Nous avons également évoqué les perspectives qui s'offrent à nous.
Il est important de rappeler que nous sommes confrontés à une double problématique.
D'abord, nous constatons un retard cumulé, pour des raisons en partie identifiées.
Ensuite, les problèmes ne sont malheureusement pas seulement actuels ou derrière nous, ils sont devant nous, car la population de certains territoires est très active et sa démographie est dynamique : plus de 50 % de la population a moins de vingt-cinq ans. Cet état de fait rend difficile la gestion, pourtant importante, du logement social outre-mer.
Pour autant, depuis cinq à six années environ, ces territoires ont connu un taux de croissance deux fois supérieur à celui de la métropole. Malgré tout, cela ne fonctionne pas, ou en tout cas pas suffisamment par rapport à la demande portée par les collectivités locales.
Voilà pourquoi nous travaillons actuellement sur plusieurs pistes, selon un calendrier que je souhaite pour ma part très serré.
Premièrement, nous envisageons une mobilisation active du foncier disponible. Vous le savez comme moi, monsieur le sénateur, nous rencontrons des problèmes de livraison de terrains, pour des questions d'effets d'aubaine liés à un outil de défiscalisation sur lequel les sénateurs de la commission des finances travaillent.
Deuxièmement, nous devons également envisager une diversification des sources de financement. Nous aurons l'occasion d'en reparler dans quelques semaines, comme vous l'avez rappelé.
Troisièmement, nous réfléchissons à une programmation pluriannuelle, car nous devons à la fois résorber le retard pris et anticiper sur la future demande en nous projetant dans l'avenir.
Quatrièmement, enfin, nous envisageons de renforcer le partenariat local, notamment avec les communes.
Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que j'ai commandité, avec M. Copé, deux audits : l'un sur la résorption de l'habitat insalubre, l'autre sur la politique du logement social en outre-mer, qui est la dernière étape préparatoire.
En liaison avec le Premier ministre, et selon ses arbitrages, je présenterai dans les prochaines semaines un plan de relance de la politique du logement outre-mer dont l'objet sera de multiplier par deux la construction de logements sociaux pour les personnes en difficulté, notamment pour la population jeune, qui constitue l'une des forces d'avenir de l'outre-mer. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.)
bilan des dégâts dans les universités
M. le président. La parole est à M. Joël Billard.
M. Joël Billard. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche.
M. Jacques Valade. Très bien !
M. Joël Billard. Monsieur le ministre, ma question concerne les importants dommages causés aux universités par des énergumènes ...
Mme Éliane Assassi. Ce sont des étudiants !
M. René-Pierre Signé. La bataille est finie !
M. Joël Billard. ... qui, pendant les mouvements de protestation contre le CPE, se sont crus obligés de saccager et de détruire pour s'exprimer ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Alain Gournac. C'est scandaleux !
M. René-Pierre Signé. La racaille !
M. Didier Boulaud. Sortez le « Kärcher » !
M. Joël Billard. Dans une démocratie républicaine comme la nôtre, la violence n'est pas justifiable. La liberté d'expression est respectée et les moyens de communication sont libres.
Le droit à l'accès à l'enseignement de nombreux jeunes a été bafoué sans scrupule, et souvent au détriment de ceux qui sont les moins favorisés. En outre, les menaces faites aux élèves désirant travailler et celles pesant sur les examens étaient inacceptables.
MM. Jacques Valade et Alain Gournac. Très bien !
M. Joël Billard. Des actes consternants de violence et de destruction ont touché des biens collectifs. Aussi, outre l'organisation du rattrapage des cours et du report des examens, les responsables d'établissement sont maintenant confrontés à la remise en état des locaux et au chiffrage des dégradations provoquées par les blocages et les occupations.
M. Jacques Valade. Quel gâchis !
M. Joël Billard. Ainsi, le vice-président de la conférence des présidents des universités a récemment estimé les dégâts matériels à environ deux millions d'euros à l'échelon national, ce qui représente plusieurs dizaines de milliers d'euros par université touchée. Il existe, évidemment, des situations particulières, comme celle de la Sorbonne pour laquelle on évoque un chiffre de 500 000 euros !
À Toulouse II, la présidence de l'université évalue provisoirement à 150 000 euros les dégradations subies.
Je citerai également Rennes II, première université à avoir voté le blocage, le 7 février dernier, et où les dégâts ont été estimés par constat d'huissier à environ 100 000 euros !
M. René-Pierre Signé. C'est le prix du CPE !
M. Joël Billard. Il s'agit de remettre en état les halls, les amphithéâtres, les portes et les fenêtres de ces universités, voire parfois de racheter le matériel pillé, tels les ordinateurs.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Arrêtez, vous vous faites du mal !
M. Joël Billard. Certains syndicats et partis politiques ont observé à l'égard de ces casseurs une neutralité pour le moins bienveillante ! (Très bien ! sur les travées de l'UMP. -Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Les Français savent-ils que, en définitive, ce sont eux qui paieront, avec leurs impôts ?
Mme Éliane Assassi. La question !
M. Joël Billard. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer dans quelles conditions seront financés les travaux nécessaires à la remise en état des locaux ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur le sénateur, tout d'abord, je confirmerai l'estimation dont vous avez fait état : le montant des dégradations, et donc des travaux à réaliser, dans les universités à la suite des récents événements s'élève bien à 2 millions d'euros.
M. Yannick Bodin. C'est le prix du CPE !
M. François Goulard, ministre délégué. Par ailleurs, il n'est pas question que l'État couvre à guichet ouvert les conséquences du comportement irresponsable d'un certain nombre d'individus. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)
M. Ivan Renar. C'est vous qui semez le désordre !
M. François Goulard, ministre délégué. Ce seront donc les universités, en vertu d'un principe de responsabilité, qui paieront sur leur budget pour effacer les conséquences malheureuses de ces actes.
Je précise toutefois que ces 2 millions d'euros sont à rapporter à l'effort que la nation consent pour l'enseignement supérieur, qui est aujourd'hui de 10 milliards d'euros. Quant au budget des universités elles-mêmes, il s'élève, hors traitement des enseignants, à 2,5 milliards d'euros. Il s'agit donc d'une charge supportable.
La seule exception possible concerne des établissements dont les responsables ont fait appel aux forces de l'ordre pour dégager les locaux occupés de manière inadmissible.
Je pense, en particulier, à l'École des Hautes études en sciences sociales, qui a été occupée de manière intolérable par des individus qui n'avaient rien à voir avec cet établissement et dont la directrice a demandé, à plusieurs reprises, le concours des forces de l'ordre.
Quoi qu'il en soit, au-delà des chiffres, au-delà de la responsabilité des uns et des autres, j'insisterai, comme vous, monsieur le sénateur, sur un point : il est particulièrement intolérable que des étudiants, ou prétendus tels, se croient autorisés à saccager l'outil de la connaissance universitaire, celui-là même qui doit appeler le respect le plus absolu ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) )
M. David Assouline. C'est de la mise en scène !
M. François Goulard, ministre délégué. Je rappelle que des étudiants, ou de prétendus étudiants, ont saccagé des livres anciens à la Sorbonne, que d'autres ont mis hors d'état de fonctionner des outils informatiques contenant des informations, des bilans, des résultats, fruits d'efforts de recherche de plusieurs années : c'est intolérable !
M. Ivan Renar. C'est ce gouvernement qui est intolérable !
M. Charles Pasqua. C'est honteux !
M. François Goulard, ministre délégué. Il est également intolérable que, dans bien des cas, une minorité empêche les étudiants d'étudier et de préparer leurs examens, c'est-à-dire leur avenir professionnel ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
affaire clearstream
M. le président. La parole est à M. Louis Mermaz.
M. Louis Mermaz. Mon intervention, monsieur le Premier ministre, portera sur le respect et sur la protection de nos institutions.
Qu'un ministre, M. de Villepin, alors chargé des affaires étrangères, vérifie des informations mettant en cause, sur le plan international, la sécurité du pays et l'intégrité de personnalités, à commencer éventuellement par celle de certains de ses collègues, relève des devoirs de sa charge. Encore qu'il ne puisse le faire, en janvier 2004, qu'avec l'autorisation du chef du gouvernement de l'époque, M. Raffarin !
Pourquoi, dès lors, ressentons-nous ce trouble profond sur toutes les travées de nos assemblées et dans le pays ? Parce qu'un dérèglement grave s'est produit au sommet de l'État et qu'il s'amplifie de jour en jour : les institutions de la République ont été confisquées à des fins personnelles et détournées de leur mission.
Monsieur de Villepin, vous avez pris le risque de porter atteinte au droit de l'un de vos collègues, M. Sarkozy. (Murmures sur les travées de l'UMP.) Celui-ci aurait dû être informé à temps par vous que des investigations engageant son honneur étaient entreprises ! Pourquoi n'en fut-il rien ?
Ensuite, ce collègue, M. Sarkozy, a fait savoir qu'il réintégrerait en juin 2005 son poste de ministre de l'intérieur, pour des raisons de convenances personnelles et pour se mettre à l'abri des menaces qu'il sentait peser sur lui ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est lui-même qui l'a dit !
M. le président. Écoutez l'orateur !
M. Louis Mermaz. Il serait d'ailleurs utile que M. Sarkozy nous fasse savoir comment il a subodoré progressivement - au moins depuis l'été 2004 - les menaces ayant trait à la présente affaire, pourquoi il s'est tu et pourquoi il a accepté de faire équipe avec M. de Villepin.
M. Charles Pasqua. Pour l'intérêt supérieur de la nation !
M. Louis Mermaz. Je vous demande, monsieur le Premier ministre, par-delà les graves développements actuels et par-delà le dénouement politique auquel vous ne pouvez vous soustraire, de nous dire selon quelle procédure vous auriez dû assurer à chacun la transparence et la garantie que l'on est en droit d'attendre dans une démocratie. Vous auriez ainsi évité au pays des défaillances dramatiques.
M. Alain Gournac. Et les écoutes téléphoniques ?
M. Louis Mermaz. Devant la dislocation actuelle de votre équipe où deux clans s'affrontent, les objectifs de carrière prenant le pas sur le souci de l'intérêt général (Exclamations sur les travées de l'UMP), ...
MM. Alain Gournac et Charles Pasqua. Les écoutes !
M. Louis Mermaz. ... il est grand temps, monsieur le Premier ministre, que, en conscience, vous tiriez les conséquences qui s'imposent ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur quelques travées du groupe CRC.)
M. Charles Pasqua. Pas vous, pas ça !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le sénateur, j'ai eu l'occasion de m'exprimer longuement sur ces sujets ce matin, et si je réponds à votre question, c'est par égard pour la Haute Assemblée.
M. Yannick Bodin. C'est la moindre des choses !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Quand on est victime, dans sa vie personnelle comme dans la vie publique, de mensonges, de calomnies, d'amalgames - et votre question en était nourrie, peut-être par méconnaissance -, il n'y a qu'une solution possible.
M. René-Pierre Signé. Où est le mensonge ?
M. Yannick Bodin. Il parle de ses propres mensonges !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Pour ma part, je crois dans la force de la vérité, dans la force de la démocratie. Et quelle que soit la façon dont vous tourniez les choses - vous n'avez pas d'expérience de la vie internationale, ce que je ne vous reproche pas - (Rires et protestations sur les travées du groupe socialiste.), ...
M. Jean-Pierre Caffet. Il est élu depuis trente ans !
M. Jean-Pierre Sueur. Il a été président de l'Assemblée nationale !
M. Ladislas Poniatowski. On a écouté la question de M. Mermaz, écoutez la réponse de M. le Premier ministre !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ...dans ce domaine, il y a une règle : face aux menaces, face aux risques du monde d'aujourd'hui, l'exigence fondamentale est de vérifier la nature des informations qui sont présentées. Cette exigence de vérité est indispensable. C'est le premier devoir d'un responsable ministériel dans des domaines comme ceux que j'ai occupés.
M. René-Pierre Signé. Allez voir les électeurs !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Au coeur de notre démocratie, il y a une exigence de justice. Personne ...
M. Yannick Bodin. Ne vous croit !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... plus que moi ne veut la vérité et la justice. Mais il y a aussi, monsieur le sénateur, une exigence de respect - je suis heureux de pouvoir vous le rappeler -, ...
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ...le respect que nous nous devons les uns aux autres, entre l'opposition et la majorité, entre la gauche et la droite. Le combat politique ne justifie pas tout.
M. Didier Boulaud. Expliquez-vous entre vous !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Dans un État de droit, il existe des règles. La confusion, l'amalgame, les procès d'intention auxquels vous vous prêtez ne sont pas dignes.
Mme Nicole Bricq. Ce n'est pas à nous qu'il faut le dire !
M. Yannick Bodin. Adressez-vous à vos amis ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Josselin de Rohan. Bodin est un âne !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Le respect, c'est aussi le respect de l'État de droit, c'est le respect des règles qu'il implique. Ces règles doivent l'emporter sur les procès d'intention, sur les jugements hâtifs et, je l'ai dit, sur les amalgames.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Lisez le Figaro !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Ces règles s'imposent à nous tous, en tant que citoyens bien sûr, mais aussi en tant que responsables politiques.
Premier ministre, je suis à ma tâche avec tout le Gouvernement, ...
Mme Catherine Tasca. Sauf un !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... avec toute la majorité, pour défendre les intérêts de la France et pour servir les Français, comme nous le faisons depuis onze mois avec les résultats que vous connaissez et qui vous dérangent peut-être ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP - Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État.
La loi de finances pour 2006 comporte deux novations relatives à la taxe sur les véhicules de société, la TVS. Cette taxe est ancienne. Elle est payée par les sociétés mettant à la disposition de certains de leurs collaborateurs des véhicules de tourisme.
L'une des novations est une réforme du barème. Le Gouvernement a en effet souhaité substituer au barème tenant compte de la puissance du moteur un barème fondé sur l'émission de CO2. Cette mesure, qui obéit à une préoccupation d'ordre environnemental, a été approuvée par le conseil des ministres et adoptée par l'Assemblée nationale, puis par le Sénat.
Cependant, ce dernier a apporté sa propre contribution. Constatant que l'équilibre du budget restait préoccupant, il s'est efforcé de trouver une ressource nouvelle en tentant de contenir une mesure d'optimisation fiscale. En effet, un certain nombre de sociétés ont pensé qu'elles pourraient échapper à la taxe sur les véhicules de société en encourageant leurs collaborateurs à utiliser leur propre véhicule et en remboursant les frais de déplacement sur la base d'un nombre de kilomètres suffisamment important. C'est une sorte d'externalisation de la flotte.
Notre commission des finances a pensé qu'il s'agissait là d'un contournement de la loi. Elle a donc mis au point un amendement. Celui-ci fut bien rédigé, puisque le ministre du budget et ses collaborateurs nous ont apporté leur précieux concours. Le Gouvernement a donc émis un avis favorable et le Sénat l'a adopté. Toutefois, lorsque ce dispositif a été connu, il a fait l'objet de protestations et d'incompréhension de la part, notamment, des petites et moyennes entreprises qui exercent sous forme de société.
Depuis lors, monsieur le ministre, nous avons eu l'occasion de discuter de ce sujet. Je pense qu'il faut aménager le dispositif afin de le rendre acceptable et d'apaiser les craintes. Si vous pouviez nous faire part du fruit de votre arbitrage, nous vous en serions reconnaissants. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Yannick Bodin. Sans langue de bois ! (Sourires.)
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement résumé la situation.
La TVS a été réformée en même temps que nous supprimions la dernière part résiduelle concernant la vignette automobile qui restait due par les entreprises. Nous pensions qu'il s'agissait d'une bonne opportunité pour simplifier et améliorer le dispositif applicable aux véhicules non polluants ou faiblement polluants.
De ce point de vue, l'amendement qui a été présenté par le rapporteur général du Sénat, M. Marini, a eu un excellent mérite, celui de simplifier cette mesure et de la rendre beaucoup plus lisible. Mais il est vrai que nous avons été saisis par les représentants des PME.
Avec Thierry Breton, nous avons rencontré les représentants de la CGPME et du MEDEF. Nous avons travaillé sur des problèmes d'application pratique. Dans la vie, je crois qu'il faut savoir être pragmatique par rapport à la réalité première qui est de permettre aux entreprises d'investir, de se développer et de créer de l'emploi. Durant cette période où le chômage connaît une baisse très significative grâce à la politique économique qui est conduite par le Gouvernement, il n'est pas question de prendre des mesures qui n'iraient pas dans ce sens.
Après avoir rencontré de nombreux représentants et en concertation avec vous, monsieur le président de la commission des finances du Sénat, avec le rapporteur général, M. Marini, ainsi qu'avec le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, M. Méhaignerie, et son rapporteur général, M. Gilles Carrez, nous avons imaginé trois mesures afin d'améliorer le dispositif actuel.
Tout d'abord, nous proposons de réajuster le barème applicable aux véhicules de collaborateurs bénéficiant du remboursement kilométrique. L'idée est simple : l'entrée du barème est triplée - il passe de 5 000 kilomètres à 15 000 kilomètres - et la TVS sera due en totalité à partir de 45 000 kilomètres au lieu de 20 000 kilomètres.
Ensuite, nous suggérons de mettre en place un abattement de 15 000 euros. Du coup, cette mesure deviendra indolore pour la très grande majorité des PME, ce qui est bien évidemment l'objectif.
Enfin, nous ferons en sorte que la réforme entre en vigueur de façon progressive sur trois ans : les entreprises ne devront qu'un tiers de l'imposition la première année, deux tiers la deuxième année et l'imposition exacte la troisième année. Ainsi, chaque entreprise aura le temps de mener l'arbitrage qui s'impose pour ce qui concerne sa flotte externe ou interne.
En outre, pour des raisons de simplification, nous supprimerons les obligations déclaratives pour les montants inférieurs à 15 000 euros.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, nous avons fait preuve de pragmatisme en entendant les messages qui nous ont été délivrés, car l'objectif est bien évidemment d'encourager la croissance et l'emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur quelques travées de l'UC-UDF.)
politique économique de la france
M. le président. La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Ma question ne portera pas sur l'affaire Clearstream. Néanmoins, je ne peux m'empêcher d'évoquer cette crise, qui constitue moins une affaire judiciaire qu'une manifestation supplémentaire du dérèglement complet de la vie démocratique de notre pays. La faillite et le désaveu qui frappent notamment le Président de la République et le Gouvernement doivent les conduire à prendre leurs responsabilités. (La question ! sur les travées de l'UMP.) Et c'est bien de cela dont je veux parler !
Votre Gouvernement, monsieur le Premier ministre, doit cesser, notamment, de poursuivre la transformation de l'économie de notre pays au seul service de la spéculation financière et en tournant le dos à la satisfaction des besoins individuels et collectifs.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bravo !
M. Michel Billout. Vous n'en aviez déjà pas la légitimité. Votre Gouvernement ayant été composé à l'issue du référendum concernant le projet de Constitution européenne, vous auriez dû mettre un terme à toutes les mesures de libéralisation de l'économie.
Vous n'en avez rien fait. Pis, en pleine tourmente du CPE, qui vous envoyait pourtant un nouveau signe fort de la désapprobation populaire à l'égard de votre action, vous avez poursuivi. (La question ! sur les travées de l'UMP.)
Vous avez ouvert le capital d'Aéroports de Paris, faisant peser de lourdes craintes sur la sécurité de ces plateformes aéroportuaires essentielles à l'économie de notre pays. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Vous avez bradé Alstom Marine, fleuron de l'industrie nationale de construction navale, pour le plus grand bénéfice des actionnaires de Aker Yards.
Vous engagez de nouveau la financiarisation de l'épargne populaire avec le rapprochement de la Caisse d'épargne et de la Banque populaire au sein de Natixis.
Vous vous apprêtez à remettre en cause la promesse faite par votre ministre de l'intérieur de maintenir le capital de l'État dans Gaz de France à hauteur de 70 % en organisant la fusion avec Suez. (La question ! sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Eh oui, cela vous ennuie !
M. Josselin de Rohan. C'est un inventaire à la Prévert !
M. Michel Billout. Et vous organisez de fait, dans le cadre du projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité nucléaire et du projet de loi de programme relatif à la gestion des matières et des déchets radioactifs, les conditions d'entrée d'opérateurs privés dans le domaine si sensible de cette énergie.
Les conséquences de ces politiques sont pourtant catastrophiques : hausses des tarifs, baisse de la qualité du service, pertes d'emplois. Dans le même temps, il est vrai, on observe l'augmentation continue des dividendes versés aux actionnaires. (La question ! sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà !
M. le président. Un peu de silence, s'il vous plaît !
M. Michel Billout. Pour exemple, je citerai le plan d'entreprise 2005-2007 de GDF, qui prévoit le doublement des dividendes versés aux actionnaires sur cette période. (La question ! sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais pas d'emploi !
M. Michel Billout. Cette politique est dangereuse et antidémocratique par son caractère difficilement réversible. Elle est très majoritairement désavouée. D'ailleurs, un nouveau sondage - un de plus -, paru dans la presse ce matin, fait apparaître que 70 % des Français déclarent ne pas partager vos orientations économiques et sociales. (La question ! sur les travées de l'UMP.)
Pourtant, vous avez déclaré il y a quelques heures : « Il serait irresponsable de ne pas poursuivre et d'intensifier notre action. » (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Veuillez poser votre question !
M. Michel Billout. Pour ma part, je crois qu'il serait beaucoup plus conforme à l'esprit républicain de respecter, enfin, l'expression populaire. C'est pourquoi, au nom du groupe communiste républicain et citoyen (nouvelles exclamations sur les mêmes travées.), je vous demande de décider un moratoire sur toutes les dispositions en cours tendant à libéraliser davantage notre économie, et ce jusqu'à la prochaine législature. (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Guy Fischer. Riez, vous verrez !
Mme Hélène Luc. C'est une mesure de sagesse !
M. Michel Billout. Êtes-vous prêt à prendre cette décision, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe socialiste.)
M. Alain Gournac. Quels guignols !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je vous remercie, monsieur le sénateur, de poser cette question au Gouvernement.
Mme Annie David. Vous y aviez pensé ?
M. Thierry Breton, ministre. Car, voyez-vous, pendant ce temps-là, la France travaille (Applaudissements sur les travées de l'UMP - Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC), la France avance.
Mme Annie David. Dans quel sens ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Plaisantin !
M. Thierry Breton, ministre. Je sais que cela vous gêne (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC), ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tous des plaisantins au plus haut niveau de l'État !
M. Thierry Breton, ministre. ... mais je suis obligé de le dire, car c'est la vérité ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Pendant ce temps-là, monsieur le sénateur, la France gagne des points sur tous les marchés, à l'intérieur comme à l'international. Qui le dit ? Ce n'est pas moi, sinon vous ne me croiriez pas, mais c'est l'ensemble des observateurs internationaux.
Depuis 2002, il a fallu remettre la France dans le bon sens, en ordre de marche. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Il a fallu rétablir le travail.
Oui, monsieur le sénateur, il a fallu prendre un train de réformes importantes pour permettre à notre économie de rattraper le retard qui avait été accumulé !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Votre modèle est quand même en grave difficulté !
M. Thierry Breton, ministre. Quels sont les résultats aujourd'hui ? Je vais vous les détailler.
Dans quelques instants, je m'envolerai pour Bruxelles. (Murmures.)
M. Didier Boulaud. Prenez plutôt le Thalys, cela va plus vite !
M. Thierry Breton, ministre. Savez-vous quel sujet nous y aborderons ? Nous y évoquerons les performances de notre économie, dont la progression est aujourd'hui la plus rapide d'Europe ! (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
C'est la réalité !
D'abord, grâce à la politique menée par le gouvernement de Dominique de Villepin, le taux de chômage est passé de 10,2 % à 9,5 % en moins de dix mois. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Personne n'y croit !
M. Guy Fischer. C'est uniquement grâce à des radiations de chômeurs !
M. Thierry Breton, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, selon mes services, nous devrions passer sous la barre des 9 % de chômeurs avant la fin de cette année. Dans un an, le taux de chômage sera vraisemblablement proche de 8,7 %. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Personne n'y croit !
M. Thierry Breton, ministre. Ensuite, comme je l'ai indiqué à maintes reprises dans cet hémicycle, le taux de croissance est aujourd'hui solidement installé entre 2 % et 2,5 %. (Rires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. René-Pierre Signé. C'est faux !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La seule véritable croissance aujourd'hui, c'est celle des dividendes des actionnaires !
M. Thierry Breton, ministre. Les chiffres ne sont pas encore connus, mais, selon tous les prévisionnistes, notre taux de croissance devrait atteindre au moins 0,6 % à 0,7 % au cours du premier trimestre, soit un taux annualisé compris entre 2,4 % et 2,8 %.
M. Guy Fischer. Augmentez donc les salaires !
Mme Hélène Luc. Ce qui nous déplait, c'est la précarité !
M. Yannick Bodin. Parlez-nous du déficit de la France !
M. Thierry Breton, ministre. ...sont-ils tombés du ciel ? Non ! Ils sont liés à l'action du Gouvernement.
Ainsi, l'année dernière, pour la première fois depuis plus de treize ans, nous avons augmenté de manière très significative le pouvoir d'achat des Françaises et des Français, qui a progressé de 2,8 %. (Rires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. C'est faux !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Archifaux !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Augmentez plutôt les salaires !
M. Thierry Breton, ministre. Enfin, pour la première fois depuis plus de treize ans, nous avons respecté les objectifs maastrichtiens de déficit, à savoir un déficit public inférieur à 3 % du PIB.
Monsieur le sénateur, tout cela n'est pas le fruit du hasard ! C'est le résultat de la politique du gouvernement de Dominique de Villepin ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Didier Boulaud. Dites cela à un cheval de bois et il vous donnera une ruade !
M. Ivan Renar. On se demande bien pourquoi les Français sont mécontents !
M. le président. Mes chers collègues, celui qui pose une question aimerait écouter en silence la réponse qui lui est adressée. Sinon, si l'on n'écoute pas les réponses, ce n'est pas la peine de poser des questions !
les relations entre la france et israël et la francophonie
M. le président. La parole est à M. Philippe Richert.
M. Philippe Richert. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie.
À partir du 15 mai prochain, nous célébrerons les premières journées de l'amitié franco-israélienne, organisées par la Fondation France-Israël, avec la venue du nouveau Premier ministre israélien, M. Ehoud Olmert.
Madame la ministre, dans ce contexte, je souhaite attirer votre attention sur la tenue à l'écart d'Israël des institutions de la francophonie.
Pourtant, la population de cet État est francophone à près de 20 %. Cela correspond à un million de locuteurs, parmi lesquels 28 % ont le français comme langue maternelle. De plus, quelque 55 000 élèves israéliens étudient notre langue à l'école. Cela fait d'Israël le deuxième pays francophone du Proche-Orient. La langue française y est plus répandue que dans bien des pays membres de l'Organisation internationale de la francophonie, l'OIF.
Toutefois, si l'État d'Israël a naturellement vocation à rejoindre la communauté francophone, ce projet s'est toujours heurté à la règle de l'unanimité qui prévaut pour l'admission d'un nouveau membre au sein de l'organisation francophone. Jusqu'à présent, les gouvernements israéliens se sont abstenus de présenter une demande formelle face au veto quasi systématique de certains pays arabes. Je pense notamment au Liban, par lequel s'exprimait - nous le savons bien - la voix de la Syrie. Depuis, la donne politique dans cette région du monde a, me semble-t-il, changé.
Par ailleurs, la France a toujours affiché son soutien à une candidature d'Israël au sein de l'OIF. Depuis 2004, des premiers pas ont été franchis. Ainsi, trois villes israéliennes, Tel-Aviv, Eilat et Natanya, ont été intégrées au sein de l'Association francophone internationale de coopération décentralisée, l'AFICOD. En outre, l'université de Tel-Aviv a été admise au sein de l'Association des universités partiellement ou entièrement de langue française, l'AUPELF.
Désormais, il est temps d'aller plus loin et de saisir l'occasion du prochain sommet de la francophonie, qui aura lieu à Bucarest les 28 et 29 septembre prochains.
La France pourrait exercer son influence pour faire évoluer les mentalités. Elle enverrait ainsi un signal fort à la communauté juive et au peuple israélien, au service d'un rapprochement entre nos deux pays, mais également d'un renforcement de la langue et de la culture françaises en Israël et dans cette région du monde, alors que l'anglais y connaît une forte progression.
Enfin, les institutions de la francophonie pourraient être un lieu de rencontre pacifique entre Israël et les pays voisins, autour des valeurs communes de diversité culturelle, de paix et de démocratie. Cela favoriserait le dialogue entre les cultures et aiderait à faire évoluer la situation au Proche-Orient.
Madame la ministre, le temps n'est-il pas venu d'ouvrir le débat lors du prochain sommet de la francophonie, auquel Israël pourrait assister en qualité d'observateur ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. René-Pierre Signé. Voilà une question tout à fait d'actualité ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, la position de la France sur ce sujet est très claire.
Nous soutenons totalement l'adhésion d'Israël à l'Organisation internationale de la francophonie, comme l'a déclaré sans ambiguïté le Président de la République en février 2004, lors de la venue en France du président israélien.
Nous souhaitons fortement un consensus pour que cette admission puisse se produire. Nous y travaillons d'ailleurs en favorisant le rapprochement avec les réseaux francophones existants. C'est ainsi que l'université de Tel-Aviv a rejoint l'Association des universités partiellement ou entièrement de langue française à la fin de l'année 2005. L'université de Natanya fera de même prochainement.
De même, le Forum francophone des affaires a récemment accueilli le patronat israélien.
Par ailleurs, nous travaillons également dans le cadre de notre coopération bilatérale. Ainsi, le nouvel Institut français de Tel-Aviv sera-t-il ouvert à l'automne prochain.
Nous espérons vivement qu'Israël nous rejoindra dans le combat que la France mène en compagnie des autres pays membres de l'organisation francophone en faveur du respect de la diversité culturelle.
Tous ces éléments contribuent évidemment au renforcement de nos liens d'amitié avec l'État d'Israël, où la population francophone - vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur - est très importante, ce qui donne bien évidemment toute sa légitimité à l'adhésion de ce pays à l'OIF. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
politique de l'immigration
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ma question s'adressait à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Mais, si j'en crois le dérouleur, c'est M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire qui me répondra.
Je constate que M. le ministre de l'intérieur est effectivement absent.
Mme Annie David. Il n'est jamais là !
Mme Hélène Luc. Les débats du Sénat ne l'intéressent pas !
M. Yannick Bodin. Ce n'est pas grave, puisque Dominique de Villepin est là !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il est évidemment curieux de constater que M. le ministre d'État est absent aujourd'hui, tout comme il l'était hier lors de la séance des questions d'actualité de l'Assemblée nationale...
M. Alain Gournac. C'est faux !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'ai regardé la retransmission de la séance, mon cher collègue !
Nous pouvons nous interroger sur les raisons de telles absences ! Cela dit, ce n'est pas très grave, car, comme nous le savons tous, M. Estrosi est le double de M. Sarkozy ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
De surcroît, lors de la séance des questions d'actualité, les ministres de ce gouvernement répondent systématiquement à côté des questions posées par les membres de l'opposition. Mais les esquives sont éloquentes et soulignent la pertinence des questions. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Voici les miennes ; elles sont au nombre de quatre. (Murmures.) Je vous remercie de les transmettre à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Je vais même faire mieux ; je vais y répondre !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Premièrement, faire adopter la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité et récidiver moins de trois ans après, alors qu'il n'y a pas eu d'alternance, est-ce reconnaître son échec ? Est-ce rechercher le maintien d'un climat malsain ? Ou est-ce les deux à la fois ?
Deuxièmement, se résoudre à ne pas voir appliquer les dispositions prises pour limiter la double peine, tout en s'attribuant le mérite de les avoir fait adopter, n'est-ce pas tenir un double langage ?
Troisièmement, réclamer des immigrés une maîtrise de notre langue et s'apprêter à expulser des enfants scolarisés, n'est-ce pas également contradictoire ?
M. Jean-Pierre Sueur. Bien sûr !
M. Jean-Marc Todeschini. Très bien !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Enfin, quatrièmement, vous jouez sans cesse sur la durée de nombreux délais, que vous étendez ou réduisez selon les cas, et ce toujours au détriment des immigrés.
Ainsi, vous avez fait porter de un an à deux ans le délai nécessaire au conjoint étranger d'un Français pour obtenir une carte de résident. Vous proposez aujourd'hui de le fixer à trois ans. Pour votre pêche en eaux troubles, une telle escalade a-t-elle l'avantage d'être sans limite ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, à votre place, j'aurais fait preuve de plus de prudence.
D'abord, M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, était absent hier au début de la séance des questions d'actualité à l'Assemblée nationale parce qu'il était allé se recueillir en Indre-et-Loire sur la dépouille d'un gendarme mort en service. Et je vous invite au recueillement qui s'impose ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Ensuite, s'il est absent à cet instant précis, en accord avec M. le Premier ministre (M. le Premier ministre acquiesce), c'est parce qu'il s'est rendu à Évry, où un drame a, hélas ! causé la mort d'un jeune de seize ans dans la nuit du 30 avril au 1er mai.
M. Jean-Pierre Caffet. C'est un peu tard pour s'y rendre !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. J'essaierai modestement d'apporter une brève réponse à vos questions, mais je le ferai sans détour.
Monsieur le sénateur, la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité visait à doter notre pays d'une politique de lutte contre l'immigration clandestine.
À cet égard, permettez-moi de vous rappeler quelques chiffres. Entre 1997 et 2002, sur les 70 000 étrangers en situation clandestine qui se trouvaient chaque année sur notre territoire, le gouvernement de Lionel Jospin n'était capable d'en raccompagner chez eux qu'entre 8 000 et 10 000 par an.
M. René-Pierre Signé. Et alors ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Aujourd'hui, 20 000 ou 25 000 étrangers en situation irrégulière sont reconduits dans leur pays chaque année. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. René-Pierre Signé. Comment pouvez-vous vous en réjouir ?
M. Guy Fischer. Voilà le véritable visage de la droite !
M. Didier Boulaud. Que faites-vous de la France terre d'accueil ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous apportons désormais un complément, en accord avec le Premier ministre et de manière transversale avec tous les ministres concernés.
Oui, nous présentons pour la première fois devant le Parlement un projet de loi alliant les politiques de l'immigration et de l'intégration ! Telle est notre vision de l'équilibre et de la justice dans notre pays.
La France n'a pas vocation à continuer de « subir » une politique de l'immigration. Une immigration subie est une véritable folie et une fausse générosité !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les Français issus de l'immigration apprécieront !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous voulons nous doter d'une politique d'immigration choisie, qui apporte le respect et la dignité nécessaires à l'ensemble de celles et de ceux qui veulent se rendre en France.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Notre pays n'a pas vocation à accueillir toutes celles et tous ceux auxquels il n'est capable d'offrir ni travail ni logement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
C'est la raison pour laquelle nous proposons aujourd'hui un contrat d'accueil et d'intégration, qui fixe des règles. La France n'est pas une terre en jachère !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quelle honte ! Parler ainsi de la France !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sont des personnes humaines ! Ne les traitez pas comme des marchandises !
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Ils doivent respecter notre histoire et notre culture et apprendre à parler et à lire notre langue. Ils doivent accepter de figurer à visage découvert sur les photos d'identité. Les hommes doivent accepter que leurs épouses soient soignées par n'importe quel médecin dans n'importe quel hôpital. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est honteux !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous voulons nous doter d'une politique de regroupement familial qui permette au chef de famille d'avoir les moyens nécessaires pour nourrir et loger dignement les siens.
Nous voulons également une politique de visas de longue durée, qui apporte de véritables engagements en matière de lutte contre l'immigration clandestine.
M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur le sénateur, pourquoi notre politique est-elle équilibrée ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle fabrique des clandestins, votre politique !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Parce que, d'un côté, il y a l'extrême droite. Et l'extrême droite, ce sont les barbelés !
M. Yannick Bodin. L'extrême droite, c'est vous !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. De l'autre côté, il y a la gauche. Et la gauche, c'est un terrain vague ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est honteux !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. En ce qui nous concerne, nous proposons un portail de sécurité ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia.
M. Robert Del Picchia. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie.
Hier, quelque six millions de Tchadiens étaient appelés à voter dans le cadre d'un scrutin présidentiel, qui s'est finalement déroulé - il faut s'en réjouir - dans le calme, malgré des menaces d'attaques rebelles. L'actuel chef de l'État sera très vraisemblablement reconduit.
Cette élection a eu lieu dans un contexte particulièrement troublé. Le 13 avril dernier, une colonne rebelle partie de l'est est entrée dans la capitale avant d'être repoussée par les forces régulières. Les combats ont fait plusieurs centaines de morts.
La menace n'a pas disparu pour autant. Certains observateurs estiment même que la tenue de ces élections pourrait entraîner le Tchad dans une guerre civile catastrophique.
Par ailleurs, les conséquences d'une telle déstabilisation pour le reste de la région seraient loin d'être négligeables.
Le Tchad, qui, je vous le rappelle, jouxte le Darfour, abrite près de 300 000 réfugiés, chassés de cette province de l'ouest soudanais par des combats et des exactions. Ce conflit a fait des dizaines de milliers de morts depuis 2003.
Les convois d'aide humanitaire à destination des camps installés au Darfour transitent également par le territoire tchadien. Idriss Déby a d'ailleurs prévenu que si l'ONU ne s'impliquait pas rapidement au Darfour, son pays ne serait plus en mesure d'héberger ces réfugiés.
Bref, si le Tchad implose, ou s'il devait entrer en guerre civile, aucune solution durable ne pourrait être trouvée pour le Darfour. Je rappelle que la France soutient sans réserve les pourparlers de paix pour le Darfour qui se déroulent à Abuja et qui ont d'ailleurs été prolongés.
Madame la ministre, nous savons le rôle éminent que la France joue au Tchad, notamment grâce à un soutien financier important, doublé d'une présence militaire. Nous savons également que la France est très attachée à la stabilité de ce pays, dont la position centrale en Afrique constitue un point d'ancrage très fort.
Pouvez-vous nous indiquer dans quelles conditions s'est déroulé ce scrutin à risques et, plus généralement, nous faire part de votre analyse sur la situation actuelle du Tchad et sur son évolution, dans la mesure où ce pays est aujourd'hui producteur de pétrole et où la diplomatie américaine est engagée dans cette crise et dans la région ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, vous avez rappelé le contexte troublé dans lequel a vécu le Tchad ces derniers mois. Il apparaît clairement que les événements du mois d'avril sont directement liés à la crise du Darfour, celle-ci se conjuguant avec des tensions politiques internes au Tchad.
Vous le savez, la France, comme la communauté internationale, a condamné la tentative de prise de pouvoir par la force. Dans cet environnement difficile, s'est déroulé hier, et sans incident, le scrutin présidentiel.
Je rappelle que plusieurs dizaines d'observateurs africains ont participé à la surveillance de ce scrutin, dont les résultats seront proclamés dans dix jours. Mais l'essentiel est à venir. Un dialogue politique, que le président Idriss Déby a lui-même annoncé à l'issue de la consultation électorale, doit s'ouvrir entre tous les Tchadiens, dialogue que nous appelons de nos voeux.
Nous pensons en effet qu'il est l'une des conditions de la réussite du développement de ce pays, qui passe notamment par la mise en valeur du pétrole. À cet égard, nous nous réjouissons qu'un accord ait enfin pu être conclu avec la Banque mondiale.
La politique de la France au Tchad est fondée sur trois exigences.
La première est de contribuer à la stabilité de ce pays, qui conditionne celle de toute la région, notamment le Soudan. Les États-Unis partagent cette préoccupation.
Notre deuxième exigence est d'appliquer l'accord de coopération militaire que nous avons conclu avec le Tchad depuis 1986. C'est ce que nous avons fait lors de la tentative de coup d'État en apportant au Tchad une assistance logistique et une aide en matière de renseignements.
Enfin, notre troisième exigence est d'assurer la sécurité des ressortissants de la communauté française. Tel est notre devoir, au Tchad comme partout dans le monde où se trouvent nos compatriotes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
sorties illicites d'enfants du territoire national
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, mais, en son absence, je serai très heureuse d'avoir une réponse de Mme la ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Une jeune Française, mère de trois enfants et enceinte d'un quatrième, est emprisonnée au Canada. Son crime : être rentrée en France avec ses enfants, en infraction à la convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants.
On dénombre des centaines de cas similaires. Je citerai celui de Marie-Françoise, qui, depuis plus de un an, est sans la moindre nouvelle de sa petite fille de quatre ans renvoyée aux États-Unis. Elle ignorait l'existence de cette convention. Au chômage, endettée, elle n'a pas les moyens d'entamer une action en justice auprès des cours américaines pour tenter d'obtenir l'application de cette convention et le droit élémentaire de pouvoir au minimum parler ou apercevoir sa fillette.
Un père français s'est fait retirer cet été ses trois enfants par la police allemande, en violation du droit, sans mandat d'arrêt ni commission rogatoire, sans saisine des autorités centrales, sur simple demande d'un juge allemand saisi par l'un de ses confrères américains à qui la mère avait faussement déclaré que le père avait enlevé les enfants.
Un autre père, Olivier, n'a pas revu son fils depuis sept ans, à la suite d'un jugement unilatéral allemand dont il n'avait pas été informé et qui avait été rendu en contradiction avec cette même convention.
Ces quelques exemples prouvent que, malgré la convention de La Haye, malgré l'entrée en vigueur récente du règlement « Bruxelles II bis », des failles, des dérives intolérables et des dysfonctionnements subsistent, et ce souvent à cause d'une application aveugle du texte.
L'association SOS Enlèvements internationaux d'enfants a répertorié 1 500 de ces cas, en tenant compte des pays hors convention de La Haye. Des enfants sont ramenés illégalement et retenus, en dépit de décisions de justice et de conventions bilatérales.
Si nous nous ne prenons pas rapidement des mesures préventives, le nombre de ces affaires va encore s'accroître. Je rappelle que, aujourd'hui, un Français sur trois se marie avec un étranger ou une étrangère. (Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Que fait l'État français dans de tels cas pour protéger ses ressortissants et prévenir d'autres drames de ce type ? Ne pourrait-on, par exemple, octroyer dès le début du conflit une aide juridictionnelle aux parents français qui n'ont pas les moyens de défendre leurs droits élémentaires face à des cours étrangères ? Dans l'intérêt des enfants, la convention de La Haye doit impérativement être amendée.
Où en sommes-nous et quelle est la position française à ce sujet ? Enfin, ne serait-il pas utile que la commission parlementaire franco-allemande, qui, avec l'aide des élus de l'Assemblée des Français de l'étranger, avait résolu de nombreux cas, suscité la création d'un site Internet et réfléchi à cette indispensable réforme, soit non seulement maintenue mais élargie à d'autres pays ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Pascal Clément, qui est retenu à l'étranger. Je m'efforcerai de répondre du mieux possible au problème douloureux que vous évoquez.
En 2005, nous avons recensé 302 déplacements illicites d'enfants, qui posent les problèmes que vous avez signalés.
Vous l'avez rappelé, la France applique la convention de La Haye depuis le 1er décembre 1983. Cette convention institue une coopération afin d'assurer le retour d'un enfant illicitement déplacé ou retenu à l'étranger vers son lieu de sa résidence. Cette convention permet aux autorités de chaque État signataire de coordonner leurs actions afin de localiser l'enfant et, à défaut de règlement amiable, de saisir une juridiction.
La France a accepté, le 2 janvier 2006, l'adhésion de dix nouveaux États à cette convention. Les adhérents sont donc aujourd'hui au nombre de soixante et un.
Vous avez également souligné, madame la sénatrice, l'accord intervenu entre les États membres de l'Union européenne, qui permet un mécanisme simplifié de reconnaissance et d'exécution.
Mais, en cette matière évidemment très sensible, plusieurs pistes sont à l'étude pour améliorer la situation.
Bien sûr, nos représentations diplomatiques et consulaires sont chaque fois fortement mobilisées et apportent leur appui aux ressortissants nationaux confrontés à de tels problèmes.
Nous avons également mis en place une mesure de médiation, qui permet de rechercher une issue négociée à un conflit familial transfrontalier aigu, en vue d'obtenir un accord sur les conditions d'exercice de l'autorité parentale.
Par ailleurs, le ministère de la justice a créé la Mission d'aide à la médiation internationale pour les familles, qui traite plusieurs dizaines de dossiers par an.
Madame la sénatrice, le Gouvernement est déterminé à tout mettre en oeuvre pour parvenir à un règlement apaisé de ces situations, qui sont évidemment humainement très difficiles. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
violences urbaines
M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud.
M. Didier Boulaud. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, le week-end dernier, dans une commune voisine de la ville de Nevers, que j'ai l'honneur d'administrer, plusieurs de mes concitoyens ont été refoulés à l'entrée d'une discothèque, pour d'évidentes raisons discriminatoires. Ils ont été pris pour cibles par les vigiles de l'établissement et ont été, on peut le dire ainsi, « tirés comme des lapins ». Les maisons environnantes portent encore aujourd'hui les impacts des projectiles utilisés.
Malheureusement, l'un des quatre blessés, atteint à la tête, est aujourd'hui dans un état désespéré, entre la vie et la mort, au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand.
L'émotion légitime qu'a suscité cet engrenage a, hélas ! servi de prétexte à des émeutes urbaines, dont les excès sont condamnables et qu'il a été difficile de contenir. Le calme est à ce jour revenu, grâce à l'effort, à la réflexion et au dialogue engagés entre tous - tous pouvoirs publics confondus -, mais également grâce aux familles du quartier, qui sont dans le chagrin, aux travailleurs sociaux, aux animateurs et, enfin, à la mise en place d'une originale veille citoyenne qui, jusqu'à maintenant, a porté ses fruits.
À Évry, au cours de ce même week-end, un adolescent est mort, victime d'un affrontement entre jeunes.
Ces événements graves mettent en lumière deux problématiques. Nos concitoyens attendent des réponses précises et concrètes de la part du Gouvernement.
En premier lieu, la législation concernant le port d'armes apparaît inadaptée. La détention d'armes doit absolument être interdite dans les boîtes de nuit et les personnes chargées d'en assurer la sécurité doivent faire l'objet de contrôles réguliers et disposer d'une qualification reconnue.
En second lieu, chacun a conscience que notre société est bien malade : malade des inégalités sociales criantes et accrues qui la déchirent chaque jour un peu plus, malade des discriminations et de la haine qui conduisent à des agissements insupportables dans une démocratie digne de ce nom.
Monsieur le ministre, vous êtes au Gouvernement depuis quatre ans et vous prétendez remédier à cette situation par des mesures toujours plus sécuritaires, à l'efficacité douteuse ; chaque jour, face à l'évidence, nos concitoyens sont conduits à mettre en doute les chiffres que vous annoncez.
En réalité, c'est de plus d'équité et de fraternité que notre pays a besoin aujourd'hui. Votre politique ne prend pas ce chemin-là.
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Boulaud.
M. Didier Boulaud. Au-delà des effets d'annonce, quelles mesures concrètes le Gouvernement compte-t-il prendre pour éviter que, à l'avenir, de tels événements tragiques ne se reproduisent ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Monsieur Boulaud, vous avez été écouté sans avoir été interrompu. Veuillez en tirer un enseignement pour la suite ! (Sourires.)
La parole est à M. le ministre délégué.
Mme Hélène Luc. La doublure !
M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. S'agissant des comportements discriminatoires, monsieur le sénateur, je ne peux que partager votre sentiment. D'ailleurs, Jean-Louis Borloo et Gérard Larcher ont apporté des réponses tout à fait précises à ce problème dans la loi pour l'égalité des chances.
Pour le reste, en matière de lutte contre l'insécurité, nous n'avons aucune leçon à recevoir !
M. René-Pierre Signé. Oh si !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. L'insécurité dans notre pays a augmenté de 14 % entre 1997 et 2002.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Allez !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Depuis, elle a reculé de 8,9 % (Applaudissements sur les travées de l'UMP -Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC), comme en atteste l'état 4001, le baromètre en la matière. J'ajoute que cet état est toujours le même, que nous ne l'avons pas modifié.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Arrêtez vos litanies !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. S'agissant de la délinquance des mineurs, nous voulons des politiques justes et équilibrées entre prévention et intégration.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a aucune prévention, il n'y a que de la répression. Ce n'est pas équilibré !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je fais cette déclaration alors que le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, est à Évry, où un drame - je l'ai indiqué tout à l'heure - s'est produit...
M. Didier Boulaud. Et les armes à feu ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... dans la nuit du 30 avril au 1er mai. Un adolescent de seize ans a perdu la vie.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La prison à l'âge de dix ans, voilà ce que vous proposez !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Malheureusement, le meurtrier présumé est un autre adolescent de seize ans. Ce sont donc deux vies qui sont brisées. Tel est l'enseignement qu'il nous faut tirer de ce drame.
Nous devons donc, sans la moindre défaillance et avec la plus grande fermeté, apporter des réponses adaptées. C'est la raison pour laquelle Nicolas Sarkozy vous soumettra prochainement un projet de loi sur la prévention de la délinquance des mineurs.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est honteux ! Pourquoi pas la prison dès l'âge de trois mois ?
M. Didier Boulaud. Et les armes à feu ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Ce projet de loi devra être lié à une réforme de la politique de la ville. Il n'est plus acceptable de considérer, comme en 1945, qu'un voyou de seize ans ne doit pas être traité de la même manière qu'un voyou de trente ans. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Quand on se comporte comme un barbare, on est un barbare ! Il faudra donc avoir le courage de modifier l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. (Protestations sur les mêmes travées) et d'aborder la question de la responsabilité parentale.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Didier Boulaud. Et les armes à feu ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Il conviendra également de responsabiliser les maires, en relation avec les caisses d'allocation familiales et les inspections d'académie.
Avec Lionel Jospin, vous aviez reconnu que vous aviez été naïfs en matière de sécurité ; nous n'avons pas du tout l'intention, en ce qui nous concerne, de l'être à notre tour ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Populiste !
Mme Hélène Luc. Vous n'avez pas répondu sur les armes à feu !
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.