Article 5 bis B (priorité)
Après l'article L. 443-15-5 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 443-15-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 443-15-6. - Est institué dans les communes qui le souhaitent un guichet unique dans le cadre d'une procédure d'accession sociale à la propriété.
« Ce guichet unique, mis en place dans chaque mairie, met à la disposition du public un dossier présentant l'ensemble des dispositifs de soutien à l'accession sociale à la propriété.
« Sont notamment communiqués à cette fin aux maires, à leur demande :
« - les projets de ventes de logements à leurs locataires par les bailleurs sociaux ;
« - les informations relatives aux opérations d'accession sociale à la propriété des promoteurs privés ou sociaux situées dans la commune ;
« - les informations relatives aux dispositifs de prêts proposés par les établissements de crédit en faveur des ménages modestes tels que les prêts mentionnés à la première phrase du troisième alinéa de l'article L. 312-1 du présent code, et les avances remboursables sans intérêt mentionnées au I de l'article 244 quater J du code général des impôts.
« Sont assimilés aux logements sociaux visés à l'article L. 302-5 du présent code :
« - pendant cinq ans à compter de leur vente, les logements vendus à partir du 1er juillet 2006 à leurs locataires, en application de l'article L. 443-7 ;
« - pendant cinq ans à compter de leur financement, les logements neufs dont l'acquisition ou la construction a été financée à partir du 1er juillet 2006 au moyen d'une aide à l'accession à la propriété prévue par le présent code, et accordée à des ménages dont les revenus n'excèdent pas des plafonds définis par décret.
« Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret. »
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, sur l'article.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la politique de décentralisation, l'accent mis sur l'aménagement du territoire, l'égalité des chances sont les axes majeurs dans lesquels s'inscrit la politique du logement.
Il existe aujourd'hui une très forte disparité entre les zones rurales et les zones urbaines. Les départements dont la démographie baissait n'apparaissaient pas comme prioritaires. Les concentrations massives de populations dans les zones périurbaines et les problèmes sociaux induits ont fait porter l'effort principal du logement social sur celles-ci.
Aujourd'hui, les zones rurales, devenues beaucoup plus accessibles, ont retrouvé leur attractivité par le biais de la révolution de l'Internet et de toutes ses déclinaisons. Cela s'ajoute à une meilleure qualité de vie, à un prix du foncier plus abordable, à une sécurité bien moins altérée et à la quasi-absence de pollution.
Il faut prendre conscience du fait que les retards accumulés au cours des décennies ne pourront jamais être comblés sans une politique volontaire.
Cette politique se justifie par deux raisons majeures : d'une part, le niveau trop souvent indigne des logements sociaux existants et leur inadaptation aux personnes âgées, très nombreuses dans ces zones, et, d'autre part, l'accueil de populations nouvelles qui n'ont pas les moyens financiers suffisants pour acheter ou plutôt pour louer des logements non aidés.
Étendre le prêt à taux zéro aux zones de revitalisation rurale, les ZRR, constituerait un signe politique fort. Ce prêt pourrait, dans le cadre d'une expérimentation, être réservé aux communes. Il leur permettrait d'effectuer les investissements structurels indispensables, d'offrir à leurs populations âgées des logements dignes et d'encourager les PME, attirées par le prix du foncier et la qualité de la main-d'oeuvre, à s'établir dans ces zones en sachant que leurs salariés pourront s'y loger à des conditions attractives.
Le prêt à taux zéro concrétiserait alors l'intérêt porté aux ZRR. Les conséquences financières en seraient positives, la TVA générée par les investissements suscités, les emplois créés, donc la diminution du chômage, excédant largement le coût du prêt à taux zéro.
Madame la ministre, les convulsions des banlieues ont focalisé l'attention de tous, en particulier celle du ministère de la cohésion sociale. L'un des remèdes possibles réside dans une meilleure répartition des populations sur le territoire.
Aujourd'hui, plus de 60 % des Français souhaitent habiter dans une commune rurale. Le prêt à taux zéro doit permettre aux communes rurales de financer les structures d'accueil et les logements nécessaires, sans oublier les populations locales qui, elles aussi, ont droit à un logement conforme aux exigences de notre temps.
Madame la ministre, je souhaite que vous n'oubliiez pas les zones de revitalisation rurale. Soyez convaincue que la solution des problèmes des villes passe par l'équilibre harmonieux de notre pays. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Avec l'article 5 bis B, nous sommes en présence de ce qu'il faut bien appeler une véritable opération de démantèlement de la notion de logement social.
Comme chacun le sait, depuis un peu plus de cinq ans, les collectivités locales sont dans l'obligation de faire des efforts pour réaliser des logements sociaux sur leur territoire.
Cette obligation doit permettre aux habitants de toutes les communes concernées d'accéder à un logement avec un effort en fonction de leurs ressources. Cela assurerait une plus grande diversité sociale dans ces collectivités et éviterait des regroupements de populations fragiles dans les seuls sites comptant déjà un nombre très important de logements sociaux. Cela permettrait également de satisfaire la demande de logements telle qu'elle s'exprime aujourd'hui.
La discussion de cet article nous renvoie à l'article 55 de la loi SRU, qui a sans cesse été remis en cause dans cette enceinte, en particulier par M. Dominique Braye, rapporteur du texte que nous examinons aujourd'hui.
Actuellement, un certain nombre de villes - de 730 à 740 selon les indications disponibles - répondant aux critères définis par l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation ne se conforment toujours pas aux règles fixées par la loi.
Bien que le rythme de construction de logements sociaux ait augmenté dans un grand nombre de ces communes, ces dernières ne disposent toujours pas d'un parc locatif social à la hauteur des besoins de leur population.
Ce n'est pas parce que des villes présentent les caractéristiques sociologiques d'une population aisée que certains de leurs habitants ne sont pas directement concernés par les problèmes de logement. Je pense en particulier aux jeunes ménages, aux jeunes occupant un emploi précaire - et tel serait également le cas avec le CPE - dont les difficultés pourraient être amoindries du fait de la construction de logements sociaux. Mais peut-être considère-t-on que, comme pour le reste, les communes n'ayant pas de logements sociaux ne sont pas confrontées à ce type de problèmes ?
Comme nous aurons sans doute l'occasion de le rappeler, lorsque la moitié, ou peu s'en faut, des habitants d'une ville n'acquitte pas l'impôt sur le revenu, il est plus que probable que la demande de logements ne s'oriente pas vers le résidentiel de luxe... Les logements locatifs sociaux sont donc bien une nécessité.
Pourtant, cinq ans après la promulgation de la loi SRU, et surtout trois ans et demi après l'alternance politique, plus de deux ans après le vote de la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine et des lois dites de décentralisation, certains tentent encore de détourner le texte de la loi SRU et de remettre en cause la définition du logement social telle qu'elle a été établie par cette dernière.
Dans notre pays, certaines communes continuent de se libérer de leurs obligations en matière de construction de logements sociaux et préfèrent laisser à d'autres le souci de gérer la crise du logement.
Ces décisions égoïstes, prises en dépit des obligations prévues par la loi, ne peuvent plus être acceptées ! Or, avec l'article 5 bis B, n'ayons pas peur de le dire, c'est cet égoïsme qui est validé.
En fait, cet article peut être considéré comme une sorte d'article 55 « au petit pied » dans lequel, grâce à l'intégration des logements en accession sociale et à l'intégration temporaire des logements HLM vendus, on pourra aisément dédouaner certains de leurs obligations.
En effet, le dispositif prévu dans cet article consiste essentiellement à mélanger de manière abusive deux choses bien différentes.
Il s'agit d'abord de la nécessité de disposer d'un outil d'accession sociale à la propriété, ce qui pourrait au demeurant tout à fait se comprendre, mais qui n'est pas l'objet du texte qui nous est soumis.
Nous avons aujourd'hui bien du mal à savoir à quoi ressemble effectivement l'outil d'accession sociale à la propriété puisque l'aide directe aux ménages accédants a été transformée en crédit d'impôt pour les établissements de crédit gérant l'encours des emprunts des particuliers.
Il s'agit ensuite de modifications qui vont vider de toute signification l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation en intégrant dans le périmètre des logements « sociaux » les logements en accession à la propriété et les logements HLM vendus. Même si cette prise en compte n'était que temporaire, elle viendrait contrecarrer les orientations que la loi avait arrêtées.
Cet article 5 bis B résulte d'un amendement du président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire de l'Assemblée nationale, M. Patrick Ollier. Cette démarche, qui laisse perplexe, paraît cependant plus compréhensible quand on examine de près la situation : M. Ollier est élu de Rueil-Malmaison, ville qui compte un parc de logements de 20 029 résidences principales, dont 5 829, c'est-à-dire 18,18 %, seraient assimilables à des logements sociaux. Bien sûr, d'autres communes des Hauts-de-Seine sont encore plus éloignées du seuil de 20 %.
La ficelle est donc un peu grosse et indique même clairement les intentions réelles de l'auteur de l'amendement, quelles que soient ses qualités par ailleurs. Cet article de pure opportunité et à effet immédiat doit permettre, à brève échéance, de libérer cette commune de l'« insupportable » amende qu'elle devrait payer, faute d'atteindre le seuil d'un cinquième de logements sociaux au titre des résidences principales de ses administrés.
Or le montant de cette amende a été bien trop souvent allégé pour un certain nombre de communes, sans que la motivation de ces dégrèvements soit véritablement compréhensible.
Comment prétendre bien légiférer si l'on commence par ne prendre en compte que des préoccupations de caractère local ? Je crois que l'intérêt national mérite mieux dans ce domaine. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si l'article 55 de la loi SRU déclenche les débats les plus vifs, c'est bien parce qu'il est au coeur de la crise du logement et, en particulier, du logement social.
Cette disposition est révélatrice de deux approches divergentes des actions à mener en faveur du logement.
Le groupe socialiste considère que la mixité sociale est une priorité majeure dans notre pays. Les manifestations violentes de colère et de désespoir qu'ont connues nos banlieues l'ont bien montré. On ne peut plus accepter de voir le chômage, la précarité, les discriminations, l'échec scolaire et le « mal-logement » se concentrer dans les mêmes quartiers.
L'autre approche, celle de votre majorité, que les députés ont illustrée en amendant l'article 55 de la loi SRU, affiche la priorité de l'accession sociale à la propriété.
Oui, cet objectif doit être défendu ! Mais il ne saurait en aucun cas être prioritaire, car il n'apporte aucune réponse à la crise du logement social que les Français subissent. Bien au contraire, il l'aggrave !
En comptabilisant les logements en accession sociale à la propriété dans les 20 % de la loi SRU, vous encouragez la vente d'une partie du parc locatif social. Vous réduisez le nombre d'appartements disponibles pour les demandeurs de logement social. Avec un tel dispositif, la liste d'attente va rapidement passer de 1,2 million à 1,3 million, voire 1,4 million de personnes.
Ainsi, tout en respectant le niveau de 20 % de logements sociaux, il sera plus difficile pour les habitants les plus modestes de se loger et plus facile, pour certains élus locaux, de contourner l'obligation de promouvoir la mixité sociale.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. Roger Madec. En outre, à ceux qui n'ont pas les moyens de devenir locataires dans le parc privé, vous dites : « Devenez propriétaires ! » Or, je rappelle que 70 % des personnes qui demandent un logement ont des revenus équivalents aux plafonds de ressources les plus bas. Croyez-vous que l'accession, même sociale, à la propriété soit pour elles une alternative ? Pour ma part, je ne le pense pas.
Certes, madame la ministre, l'accession sociale à la propriété reste effectivement un objectif à atteindre. Les Français, dans leur grande majorité, aspirent à devenir propriétaires, et nous devons les y aider. Mais lorsqu'une crise sans précédent touche les milieux les plus populaires, c'est à ces derniers que doivent s'adresser tous nos efforts. La réalisation des aspirations de certains ne doit pas pénaliser le traitement d'une urgence sociale.
Il est possible de concilier la nécessité d'accroître le parc locatif social avec la demande légitime d'accession à la propriété. Il suffit pour cela de ne pas inclure cette dernière dans le calcul des 20 % de logements sociaux. Ou bien, si vous souhaitez l'intégrer dans ce calcul, il ne faut le faire que dans les seules communes disposant d'un parc locatif social déjà supérieur à 20 %. Tel est l'esprit des amendements que nous défendrons.
Mais vous ne pouvez en aucun cas confondre accession à la propriété et demande de logement locatif social ! En effet, le plus souvent, les demandeurs de logement ne sont pas de futurs propriétaires.
Qui sont-ils en réalité ? Ce sont toutes les personnes auxquelles leur situation sur le marché du travail ne permet pas de trouver un logement au prix du marché, qui enchaînent les périodes d'inactivité et les petits boulots ; toutes celles que les bailleurs n'acceptent pas comme locataires en raison de leurs revenus instables ; toutes celles auxquelles les banques refusent un emprunt pour devenir propriétaire.
En tout état de cause, la disposition dite « amendement Ollier » ne répond pas à la nécessité d'offrir un logement locatif social à ceux qui en ont le plus besoin et ne s'adresse pas à ce public prioritaire.
Désormais, pourront être comptabilisés dans les 20 % de parc social les logements achetés à l'aide du prêt à taux zéro qui profite, rappelons-le, à des ménages disposant de 6 000 euros de revenus mensuels. Il est évident qu'un tel dispositif ne profitera pas aux Français les plus modestes.
La modification proposée de l'article 55 de la loi SRU témoigne, au mieux, de la vision déformée que vous avez des besoins en matière de logement. Au pire, elle est une nouvelle manifestation de la volonté affichée par la majorité de contourner l'obligation faite aux élus locaux de créer des logements sociaux.
L'urgence du rétablissement de la mixité sociale dans les grandes agglomérations nous a été une fois de plus rappelée de manière cruelle à l'automne dernier. Les discussions sur l'article 5 bis B fournissent, je crois, l'occasion d'apporter une réponse sans équivoque à cet enjeu.
Il ne faut pas tomber dans l'amalgame : personne, dans cette assemblée, ne désignera du doigt les élus qui rencontrent des difficultés à mettre en oeuvre l'article 55 de la loi SRU, mais trop d'élus contournent délibérément la loi. Remettre en cause aujourd'hui cette disposition constitue une véritable provocation pour des millions de Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. La commission des affaires économiques a demandé l'examen par priorité des articles 5 bis B et 8 septies, ainsi que de tous les amendements ayant trait à la remise en cause de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dans son contenu rédactionnel actuel ou issu des amendements adoptés à l'Assemblée nationale.
Pourquoi cet empressement ? Peut-être craint-on que l'ombre de l'article 55 de la loi SRU ne pèse trop lourdement sur nos débats et que les impératifs de solidarité ne reviennent de manière trop insistante tout au long de la deuxième lecture de ce texte ?
Espère-t-on dissimuler ainsi l'évident décalage entre, d'une part, l'engagement solennel de sauvegarder l'intégrité de l'article 55 - je fais ici référence à l'engagement pris par le Président de la République devant les Français, le 21 novembre 2005 (Protestations sur les travées de l'UMP), ainsi que par les députés de la majorité et le Gouvernement devant l'abbé Pierre, il y a quelques semaines - et, d'autre part, l'adoption de l'amendement « cache-sexe » de M. Ollier qui remet totalement en cause, sans le dire, l'obligation de réaliser 20 % de logements locatifs sociaux dans toutes les communes de plus de 3 500 habitants en province et de plus de 1 500 habitants en région parisienne.
Madame la ministre, si vous prêtez une oreille distraite aux parlementaires de l'opposition, écoutez au moins les vingt-quatre associations dont l'appel est paru dans les principaux quotidiens nationaux le 31 mars 2006. Tous vous disent : « Ne touchez pas aux 20 % de logements locatifs sociaux. Il en va de la dignité des personnes. Il en va de la dignité de la France !»
Tout en regrettant l'absence de M. Borloo dans cette enceinte, je souhaite revenir un instant sur les propos tenus jeudi dernier par votre collègue devant notre assemblée, lors des questions d'actualité au Gouvernement. Son insinuation relative au financement politique de l'appel que je viens de lire, mêlée à d'autres allégations issues de l'hémicycle, est sans fondement, et par conséquent inacceptable. Elle constitue une injure aux associations, qui se mobilisent chaque jour et apportent une aide précieuse à toutes celles et à tous ceux auxquels la France ne garantit malheureusement pas le droit au logement. Les associations suppléent tant bien que mal - et plutôt bien - les carences de la puissance publique. Elles apportent le soutien à l'accès au logement que l'État assure insuffisamment, envisageant même de le réduire aujourd'hui.
Ces vingt-quatre associations ont donc acheté aux journaux l'espace nécessaire à la publication de leur appel. Elles l'ont financé sur leurs budgets respectifs, pour attirer l'attention des parlementaires que nous sommes ainsi que celle de nos concitoyens. On ne peut leur contester cette responsabilité ni cet engagement, face à une disposition législative qu'elles considèrent comme une menace.
Cette clarification nécessaire étant faite, les dispositions que nous nous apprêtons à discuter, notamment dans l'article 5 bis B, permettraient de comptabiliser dans les logements sociaux les logements vendus désormais à leurs occupants ainsi que l'accession aidée à la propriété. L'atteinte du seuil des 20 % sera certes facilitée pour les communes qui ne remplissent pas encore leurs obligations, mais de façon artificielle.
En effet, disons-le clairement, les modifications apportées à l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation ne créeront pas de logements sociaux !
Madame la ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, dois-je vous rappeler que la loi SRU avait pour objectif d'accroître le parc de logements locatifs sociaux disponibles ?
Or, l'amendement Ollier, dans le moins mauvais des cas, neutralisera une partie du parc social existant par la vente des HLM et, dans le pire, accolera simplement à un logement, dispendieux au regard du pouvoir d'achat de nos concitoyens, une étiquette « sociale », celle de l'accession aidée à la propriété.
En effet, si la production de logements s'est globalement accrue, elle souffre néanmoins toujours, je dois le rappeler, d'une carence grave dans le domaine du logement locatif social.
Est-il opportun d'encourager ainsi la vente de logements HLM à leurs occupants, laissant les listes d'attente pour l'attribution d'un logement social s'allonger - 1 300 000 demandes aujourd'hui - pendant que l'offre elle-même sera amputée ?
Est-il opportun de réduire les obligations de production, alors que celle-ci est encore dramatiquement insuffisante dans le champ locatif ? Selon le Secours catholique - je choisis mes références pour qu'on ne puisse pas me reprocher de citer des sources gauchistes (Murmures sur les travées de l'UMP) -, « si les 742 communes aujourd'hui concernées respectaient la loi leur imposant 20 % de logement social sur leur territoire, il serait possible de loger 830 000 personnes, grâce à 360 000 logements supplémentaires, soit le tiers des besoins actuels. »
Dans un tel contexte, j'émets également des réserves sur le fait de consacrer en priorité l'argent public, c'est-à-dire les crédits de l'État, à l'accession à la propriété, fût-elle aidée, au niveau où vous l'avez portée avec le relèvement des plafonds du prêt à taux zéro jusqu'à 6 000 euros de revenus mensuels, pour un ménage avec trois enfants, dans les zones où le marché est le plus tendu.
Au regard des prix du mètre carré, des garanties exigées par les établissements bancaires en termes d'apport, de niveau et de stabilité des revenus et des durées d'endettement, l'aide à l'accession à la propriété ne peut plus être considérée comme sociale. Elle ne concerne pas les jeunes ménages en emploi précaire ni les populations défavorisées vieillissantes, et reste fermée aux familles aux revenus modestes voire moyens.
Prenons l'exemple du Bas-Rhin, pour ne pas focaliser la discussion sur la région parisienne : dans ce département, 65 % des ménages demandeurs d'un logement disposent d'un revenu inférieur au SMIC ; par ailleurs, 76 % des demandeurs de logement social ont un revenu inférieur à 60 % des plafonds de ressources HLM. Il en va de même dans toutes les régions de France. Ces personnes n'accèdent déjà pas aux prêts locatifs sociaux, les PLS. Pourquoi les abuser en leur faisant croire qu'elles accéderont à la propriété ?
Madame la ministre, pouvez-vous vous engager à ce que l'accession aidée à la propriété qui serait comptabilisée au titre des 20 % - si d'aventure l'amendement Ollier devait prospérer - soit conditionnée aux plafonds de ressources des prêts locatifs aidés d'intégration, les PLAI et des prêts locatifs à usage social, les PLUS ? Pouvez-vous nous assurer que l'accession à la propriété soit possible dans de telles conditions ?
Les sénatrices et sénateurs du groupe socialiste sont convaincus que les deniers publics, de même que la force normative de l'État, doivent être concentrés sur les logements accessibles et les personnes qui en ont le plus besoin, lesquelles, autrement, n'auraient pas accès à un logement ou n'auraient pas le choix de leur lieu d'habitation, ce qui est aujourd'hui le cas d'une grande partie des classes moyennes.
De même, ce ne sont pas les maires qui réalisent des programmes d'accession à la propriété, aussi utiles soient-ils, qui ont le plus besoin du soutien de l'État. Ils rencontrent moins d'obstacles à leurs projets et pourront les poursuivre.
Ce sont principalement les maires susceptibles de conduire des opérations à vocation d'insertion qu'il faut aider et encourager. Nous avons d'ailleurs déposé plusieurs amendements en ce sens, qui permettent de pondérer les logements sociaux selon leurs financements - PLS, PLUS, PLAI -, et nous soutiendrons les amendements similaires issus d'autres groupes.
Refuser toute soustraction à la solidarité urbaine, apporter une réponse aux millions de Français mal logés ou prisonniers de leur logement trop petit, trop éloigné, trop dégradé, remettre de la dignité dans l'accès au logement, à un logement choisi et non un logement subi, c'est là le coeur de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, et notamment de son article 55. C'est pourquoi nous y sommes attachés, tout comme 64 % des Français qui la jugent « efficace » pour « améliorer la situation du logement » et 68 % des maires qui partagent cet avis.
Madame la ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite que, contrairement à jeudi dernier, nous abordions ce débat avec sérénité, dans le respect de nos convictions respectives et surtout en gardant toujours à l'esprit notre responsabilité collective de législateurs quant à la garantie de l'accès de tous à un logement abordable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes rassemblés ici sur ce sujet essentiel pour réparer - je l'espère de tout coeur - ce qui a été considéré par beaucoup comme une honte.
La honte, c'est ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale : l'abbé Pierre est venu, chacun l'a salué ; il a été congratulé et applaudi. Mais à peine était-il parti qu'est arrivé l'amendement de M. Ollier qui a mis en cause l'engagement solennellement pris par le Président de la République et par ceux qui avaient rencontré l'abbé Pierre. Cela n'est pas acceptable ! Mes chers collègues, si quelqu'un peut, ici, justifier cette attitude, j'aimerais bien connaître ses arguments !
Je tiens, dans cet hémicycle, à citer l'abbé Pierre,...
M. Gérard César. Ce n'est pas parole d'Évangile !
M. Jean-Pierre Sueur. ... qui a déclaré ceci : « Je suis triste. On nous a menti. »
Bernard Devert, président d'Habitat et Humanisme, a déclaré ceci : « En France, 1,3 million de familles attendent l'attribution d'un logement social. Si elles avaient les moyens d'accéder à la propriété, elles le feraient, bien entendu. Personne n'a jamais été empêché d'accéder à la propriété dans notre pays. Si l'État tient à renforcer les parcours résidentiels, il n'a nul besoin de piocher dans le quota des 20 % de logements sociaux pour promouvoir sa politique. » Cela, nous le savons tous !
L'amendement Ollier est absolument contraire aux engagements que vous avez pris et aux propos tenus à l'abbé Pierre. Par conséquent, il faut rectifier les choses ; c'est ce que nous vous demandons, afin de revenir au point de départ, à savoir l'application de la loi SRU telle qu'elle doit être appliquée et mettre en oeuvre ce qui a été affirmé dans les discours après la crise des banlieues. Si nous ne le faisons pas, ce n'est pas la peine de parler du logement social, parce qu'on aura mis en cause ce qui constitue un droit.
Ce combat en faveur du droit à être logés pour ceux qui n'en ont pas les moyens est un défi aussi important que celui qui a été mené, sous la IIIe République, en faveur de l'implantation d'une école dans chaque commune. On doit s'honorer d'accueillir des logements sociaux plutôt que de faire toutes ces contorsions pour y échapper après avoir pourtant dit qu'on le ferait !
Mes chers collègues, comme beaucoup d'entre vous, j'ai reçu une lettre dont je vais vous citer deux passages : « Malheureusement, le projet de loi portant engagement national pour le logement a connu un amendement qui met en échec ces 20 % de logements sociaux, puisque désormais, dans ce pourcentage, seront comptabilisés les logements neufs, financés au moyen d'une aide à l'accession. Peut-on penser que le plafond des prix retenus permettra à des familles modestes d'accéder à cette propriété, quand déjà elles ne peuvent pas bénéficier d'un logement locatif financé par le prêt locatif social ?»
« En votre qualité de sénateur, j'ose solliciter votre mobilisation pour que cet amendement soit supprimé lorsque le texte passera en deuxième lecture.
« Le Sénat, seul, peut aujourd'hui, me semble-t-il, revenir sur cet amendement bien malheureux. »
Mes chers collègues, nous devons réparer cette honte ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. André Vézinhet.
M. André Vézinhet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, MM. Roger Madec, Thierry Repentin et Jean-Pierre Sueur ont dit d'excellente manière ce qu'il convenait d'indiquer sur le sujet qui nous occupe.
Pour ma part, je voudrais ajouter la touche d'un débat qui a eu lieu dans cet hémicycle. Madame la ministre, c'est M. Louis Besson, alors secrétaire d'État au logement, qui était assis à votre place. M. Jean-Claude Gayssot, alors ministre de l'équipement, des transports et du logement, était également partie prenante de l'important dispositif en examen. Pour la première fois ici, le vrai débat était posé : comment pouvions-nous répartir le logement social par le biais de la mixité, mixité sur laquelle, bien sûr, tout le monde s'accorde lorsqu'on en parle !
Mme Annie David. En apparence !
M. André Vézinhet. En apparence, bien entendu, ma chère collègue. Sur le terrain, la réalité est en effet autre !
Si nous sommes ici, c'est aussi parce que, dans nos départements respectifs, nous avons été mandatés pour nous exprimer au nom de nos administrés. Imaginez ce que peut être la situation dans un département comme l'Hérault, où l'on compte 40 000 demandes - vous avez bien entendu ! - d'accès aux logements sociaux qui sont insatisfaites et une arrivée mensuelle de 1 500 habitants.
Je me demande si l'on retrouve ici ceux qui défendent les 32 % de maires dont on parlait tout à l'heure, tandis que les autres entendent les 68 % restants. Les 32 %, ce sont peut-être ces maires qui, lorsqu'ils sont soumis à élection ou à réélection, promettent à leur population qu'il n'y aura pas de logements sociaux dans la commune, moyennant quoi confiance doit leur être accordée. Je ne ferai pas à ceux qui siègent sur les travées de droite de cet hémicycle le procès de participer de cet état d'esprit, qui est déplorable. (Mme Gisèle Printz applaudit.) Aujourd'hui, on nous offre l'occasion de le condamner.
L'amendement de M. Ollier n'a d'autre objet que d'annihiler les vertus de la loi SRU. Certes, ces dernières ne résidaient pas uniquement dans l'article 55, mais cet article avait une force, un souffle ! Il redonnait à la République, fondée sur l'égalité, la fraternité et la liberté, cent raisons de s'exprimer. Il n'est donc pas concevable que, droite comme gauche, nous ne fassions pas une union sacrée pour maintenir ces vertus de la loi SRU ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, ce que j'ai entendu, notamment de la part de Jean-Pierre Sueur, m'incite à prendre la parole. Je rappelle quand même que la période au cours de laquelle le rythme de construction des HLM a été le plus faible a bien été la période 1997-2002 ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Il faut donc revenir sur terre !
Je m'exprime non seulement comme maire d'une commune qui comporte environ 38 % de logements sociaux par rapport au nombre total de résidences principales, mais aussi en qualité de président d'une agglomération de 72 000 habitants. Je voudrais vous faire partager - mais vous connaissez sans doute bien des situations de cet ordre - les anomalies qui procèdent de cette loi SRU.
Dans mon agglomération, une commune de 4 000 habitants ou un peu plus, considérée comme n'étant pas en continuité urbaine avec la ville-centre bien que reliée par une zone d'activités, compte environ 15 % de logements sociaux et paie la taxe. Une commune analogue de 4 500 habitants, considérée comme étant en continuité urbaine bien que séparée par plusieurs kilomètres de forêt, ne paie pas de taxe alors que sa proportion de logements sociaux est inférieure au taux de la première. Il faudrait m'expliquer pourquoi l'administration procède à des classifications aussi arbitraires !
Un sénateur socialiste. Bonne question !
M. Philippe Marini. Mes chers collègues, si vous étiez lucides, peut-être auriez-vous pu suggérer ou prendre l'initiative que la proportion soit déterminée au niveau d'une intercommunalité ou d'une agglomération ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. André Vézinhet. C'est le cas !
M. Philippe Marini. Pourquoi n'avez-vous pas pris une telle initiative ?
M. Thierry Repentin. On va vous l'expliquer ! Nous avons un amendement en ce sens. (L'orateur brandit sa pile d'amendements.)
M. Philippe Marini. Mes chers collègues, pour ma part, je voterai le texte de l'Assemblée nationale, qui résulte de l'amendement Ollier, car je crois à la mixité sociale. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Sueur. Nous aussi !
M. Philippe Marini. Il est important de disposer dans nos quartiers d'un véritable continuum de logements, de ne pas enfermer dans le logement social des personnes qui doivent bénéficier d'une promotion sociale.
M. Thierry Repentin. Arrêtez, c'est indécent !
M. Philippe Marini. Je crois profondément que l'accession sociale est un moyen de promotion et que l'amendement Ollier est une disposition de progrès et de promotion sociale ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. -Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Sueur. Six mille euros de revenus mensuels !
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Chacun essaie de faire ce qu'il peut dans un dossier qui n'est pas facile !
Je voudrais simplement dire pourquoi je considère aujourd'hui que l'amendement Ollier n'est pas bon, même si l'on pourrait tout à fait accepter l'idée qu'il faille prévoir plus d'accession sociale à la propriété. Il n'y a aucun problème de ce côté-là ; ce n'est simplement pas la question qui est posée dans le texte dont nous discutons.
Dans ce pays, il y a de plus en plus de gens...
Mme Gisèle Printz. De pauvres !
M. Michel Mercier. ... qui ne peuvent pas payer leur loyer, qui ne peuvent pas se loger pour nombre de raisons, ne serait-ce que parce que le prix du logement non social augmente de plus en plus.
Aujourd'hui, l'un des problèmes du logement social est le non-renouvellement des locataires du parc existant.
M. Charles Revet. Parce qu'on ne dégage pas de terrains !
M. Jean-François Voguet. Des terrains, il y en a partout !
M. Michel Mercier. Bien sûr qu'il n'y a pas de terrains pour le faire, et qu'il faudra dégager des moyens fonciers. Si nous ne construisons plus de logements sociaux nouveaux, nous aurons un grave problème social ! Or, des problèmes sociaux, nous en avons suffisamment en ce moment. Essayons de ne pas en créer de supplémentaires !
Si nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut créer plus de logements sociaux parce que des gens en ont besoin, il nous faut cependant veiller à ne pas implanter tous ces logements au même endroit, sous peine de voir se créer des ghettos de pauvres, mais aussi des ghettos de riches.
MM. Robert Bret et André Vézinhet. C'est déjà le cas !
M. Michel Mercier. Or un ghetto de riches n'est pas plus gai qu'un ghetto de pauvres ! On ne peut pas vivre rien qu'entre riches ou rien qu'entre pauvres !
Notre idéal, c'est quand même de vivre ensemble, riches ou pauvres,...
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Michel Mercier. ...et d'essayer que les choses aillent un peu mieux après. C'est quand même le but de toute action politique !
Personnellement, je ne suis pas un fanatique des quotas. Ce n'est sûrement pas ce qu'il y a de plus malin, mais c'est la seule chose à utiliser quand on n'y arrive pas autrement.
Mme Valérie Létard. Oui !
Mme Nicole Bricq. C'est un mal nécessaire !
M. Michel Mercier. Si l'on parvenait à faire du logement social autrement, il n'y aurait pas de problème, il ne serait pas nécessaire de prévoir des quotas, et tout irait bien ! Mais on sait bien aujourd'hui - on le voit lorsqu'on gère une collectivité comme un département - que le fait de concentrer les logements sociaux dans des communes crée pour la collectivité nombre de problèmes que tout le monde doit gérer ensuite !
L'idée selon laquelle il vaudrait mieux soi-même payer des pénalités et voir ainsi les problèmes s'imposer chez les autres, plutôt que d'accepter la mixité sociale, est une idée fausse. Elle est, quoi qu'il en soit, totalement contraire au modèle social français.
Je suis donc, quant à moi, tout à fait favorable à la disposition établissant un quota de 20 % de logements sociaux, faute de mieux. J'aurais préféré qu'une autre idée soit trouvée. Je reconnais en effet les imperfections de la mise en oeuvre de ce quota. Des amendements visent à étudier la question au niveau de l'agglomération : ce sont de bons amendements.
Je suis sûr, monsieur le rapporteur, que vous aurez à coeur d'améliorer le texte. Il vous suffira de veiller à ce que la comptabilisation se fasse au niveau de l'agglomération.
Dès lors qu'il y a un plan local d'habitat, une compétence en matière de logement et que le conseil d'agglomération est pleinement conscient de ses responsabilités, aucun problème ne se posera.
De grâce, continuons toutefois à construire des logements sociaux : les demandeurs sont aujourd'hui plus nombreux qu'en 1954. Les gens qui disposent d'un logement social ne peuvent plus le quitter, car le secteur locatif non aidé est beaucoup trop cher.
Il est donc nécessaire de construire, mais de ne pas le faire toujours aux mêmes endroits. La seule solution est par conséquent de conserver la mesure portée par la loi SRU. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Il s'agit bien ici d'un débat. De même que l'intervention de M. Sueur a suscité celle de M. Marini, la sienne, à son tour, suscite ma réaction.
Nous vous écoutons toujours avec beaucoup d'attention, monsieur Marini.
M. Philippe Marini. Merci !
M. Bernard Frimat. La question, aujourd'hui, n'est pas d'établir un constat du passé : il s'agit d'examiner comment nous pouvons essayer de résoudre pour l'avenir un problème dont personne ici, me semble-t-il, ne niera la réalité.
Ce problème réside dans la difficulté de plus en plus importante d'accéder à ce droit élémentaire : le droit au logement. C'est la difficulté toute simple de la vie.
À partir de l'exemple de votre département et de votre ville, monsieur Marini, vous avez signalé des éléments dont se dégage, pour vous, une certaine incohérence. Les obligations que subissent certains, notamment, seraient plus justifiées si elles s'appliquaient à d'autres.
Je souhaite que nous menions ce débat à son terme. Vous aurez ainsi la possibilité d'approuver l'un des amendements que défendra notre collègue Thierry Repentin.
Cet amendement vise très précisément à poser la question de la discontinuité urbaine. Il tend à répondre à votre interrogation, au niveau de l'intercommunalité.
Poursuivons donc avec sérénité le débat sur ce difficile problème, et essayons de saisir les points d'accord qui peuvent se dégager. Il en est ainsi, par exemple, d'un amendement déposé par M. Hérisson, politiquement plus proche de vous que de nous, qui vise, me semble-t-il, à étendre l'application de l'article 55 de la loi SRU aux communes dont la population est supérieure à 1 500 habitants.
Ce sont des éléments qui peuvent entraîner notre adhésion. Nous sommes donc disposés à les soutenir.
Quand on se penche sur l'important problème du logement social et que l'on se déclare en faveur de la mixité sociale, la première des cohérences devrait être que l'adoption d'un amendement n'aboutisse pas à un résultat inverse de celui auquel tend le principe que l'on proclame.
Puisqu'il nous semble que l'article résultant de l'adoption de l'amendement défendu par M. Ollier, loin de promouvoir la mixité sociale, y mettra un frein et s'y opposera, nous en désirons la suppression.
Cet article tend à déformer, à masquer, à transformer la volonté initiale : étendre à l'ensemble du territoire ce geste d'ouverture par lequel on pouvait accueillir partout la population, dans sa mixité et sa diversité.
Nous ne demandons pas un subit effort de justice partagé. La loi visait à atteindre cet objectif en vingt ans. Cette durée permettait non seulement de voir plusieurs alternances politiques intervenir (Sourires), mais aussi d'atteindre des buts précis, de progresser dans un domaine où l'on ne peut inverser des tendances dans un délai très court. Il faut simplement affirmer une volonté.
L'amendement de M. Ollier nous semble donc apporter un contre-témoignage ; il nous semble délivrer un message désastreux pour ceux qui, dans notre pays, éprouvent le plus de difficultés à accéder à un logement social.
Il est donc temps de supprimer l'article 5 bis B ; il serait quand même détestable de devoir le promulguer pour ne pas l'appliquer ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce débat préalable à la discussion des amendements est une bonne chose : il permet aux uns et aux autres de mettre en exergue leurs arguments et de prendre position.
À M. le rapporteur comme à M. Marini, je dirai que, comme eux, je crois à la mixité sociale ; mais, pour ma part, je considère qu'elle doit valoir à Clichy-sous-Bois comme à Neuilly-sur-Seine !
Dans le premier cas - et cette commune ne représente évidemment ici qu'un symbole -, une aide considérable de l'État serait nécessaire afin que les classes moyennes et les familles aisées s'installent à Clichy-sous-Bois.
Dans le second cas - mais cela vaut pour tous les Neuilly-sur-Seine -, il serait nécessaire que le logement social locatif atteigne progressivement un niveau comparable à la moyenne française, selon les termes de la loi SRU.
Comme l'a fait tout à l'heure l'un de nos collègues, j'aimerais attirer l'attention sur la terrible responsabilité que prennent un certain nombre d'élus qui, en vue de remporter des suffrages lors de campagnes électorales municipales, s'engagent à mener une politique de ségrégation sociale.
Il s'agit là d'une politique de gribouille, d'une politique antirépublicaine. Cette politique mène tout droit à des événements que nous devons bien appeler des émeutes et qui doivent ensuite, hélas, être réprimés par les forces de sécurité.
De ce point de vue, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale correspond manifestement à un désir sans détour de vider la loi SRU de toute sa substance, quant au quota de 20 % de logements locatifs sociaux.
Vendre des logements sociaux aux locataires, pourquoi pas ? Le simple bon sens voudrait cependant que l'on reverse alors aussitôt le produit de ces ventes et que l'organisme HLM puisse ainsi créer de nouveaux logements sociaux, susceptibles de compenser les ventes.
En revanche, le fait qu'il soit possible d'inclure dans le quota de logements sociaux ces acquisitions financées par et pour des familles à revenus élevés me semble absolument détestable et condamnable.
Sur ce point, nous nous trouvons manifestement face à la complète dénaturation d'un texte de loi qui nous semblait, depuis cinq ans, avoir progressivement conquis les faveurs de la majorité des élus locaux, de droite comme de gauche.
Je voudrais également attirer l'attention sur un argument souvent avancé : sous le gouvernement précédent, il n'y aurait pas eu création de logements sociaux. Cette thèse est infirmée par les chiffres.
On voudrait aujourd'hui que, grâce à la loi de programmation pour la cohésion sociale, il y ait au contraire création d'un nombre considérable de logements locatifs sociaux ! Monsieur le rapporteur, vous usez fort souvent de cet argument.
Mais si les logements locatifs sociaux sont concentrés dans les mêmes communes, et puisque les communes que tend à favoriser l'amendement de M. Ollier pourraient se dispenser de construire, alors nous aggraverons à nouveau le phénomène de concentration au lieu d'améliorer les choses. Nous créerons de nouvelles difficultés.
L'idée de calculer désormais à l'échelle de l'agglomération le quota de logements sociaux - disons la répartition, je préfère ce terme -, afin de parvenir à la mixité sociale, me paraît opportune et intéressante.
Il faut cependant y faire attention : cela pourrait aboutir à ce que les ghettos de riches continuent de se renforcer tandis que, mécaniquement, les familles les plus pauvres se concentreraient dans les quartiers les plus pauvres, dans les communes les plus défavorisées, parfois d'ailleurs par le biais d'un vote majoritaire des élus - cela peut arriver.
J'en viens à un dernier élément, déjà abordé lors de la discussion générale. M. Marini et un certain nombre de nos collègues pensent régler la question en disant qu'il faut à tout prix renforcer l'accession à la propriété. Nous sommes d'accord.
Toutefois, en tant que maire d'une commune de l'Hérault, essayant de conduire une politique courageuse en matière d'urbanisme, aidé en cela d'ailleurs par le département, je me demande si, en raison de la spéculation foncière, nous pourrons loger les habitants les moins fortunés de la commune.
Telle est la situation que nous affrontons, telle est la réalité. Quand on parle d'accession à la propriété, il faut prendre conscience de ce qu'elle est rendue aujourd'hui très difficile, voire impossible, dans un certain nombre de nos territoires.
Sans vouloir introduire un ton d'affrontement entre tel ou tel groupe de la Haute assemblée, sans intenter de procès à qui que ce soit, je voudrais vous dire solennellement, mes chers collègues, que nous ne pouvons pas ne pas revenir sur le dispositif adopté par l'Assemblée nationale.
Les dommages seraient considérables, quant à la légitimité du Sénat. En termes de politique à moyen terme, de plus, nous en verrions, hélas, les conséquences. Nous serions alors contraints d'adopter des textes, de dégager des budgets, pour tenter, mais trop tard, de réparer les dommages causés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. En Île-de-France, on dénombre 100 000 demandes de logements sociaux. Les trois quarts des demandeurs sont des familles qui ne peuvent se loger autrement que dans le cadre des PLAI. Nous avons donc besoin de logements sociaux adaptés au niveau des ressources de ces familles. Or, non seulement les orientations globales de la politique du logement mises en oeuvre par le Gouvernement ne nous le permettent pas, mais ce dernier s'engage maintenant également dans le « détricotage » du dispositif de la loi SRU. Tout est bon pour fustiger l'article 55 de la loi SRU ainsi que l'obligation faite aux communes appartenant à des agglomérations de plus de 50 000 habitants d'atteindre 20 % de logements locatifs sociaux en 2020.
Ainsi, utiliser le cas des déconventionnements des logements de la filiale Icade appartenant à la Caisse des dépôts et consignations, dans le Val-de-Marne, pour justifier la remise en cause de l'obligation de 20 % de logements sociaux relève de la mauvaise foi. C'est non pas sur l'exigence de mixité sociale qu'il faut revenir, mais sur le non-renouvellement des conventions et sur ses méfaits, et nous vous proposerons d'ailleurs ultérieurement, mes chers collègues, des mesures en ce sens.
Contrairement à ce que notre collègue Catherine Procaccia a voulu faire croire au cours de la discussion générale, il ne s'agit pas, pour nous, d'opposer de manière idéologique les méchantes villes de droite aux vertueuses villes de gauche ! La crise des banlieues est bien trop présente dans nos esprits et la situation en matière de logement bien trop grave pour verser dans l'opposition idéologique stérile.
De fait, construire du logement social, et surtout le logement très social dont nous avons le plus besoin, est compliqué et coûteux, particulièrement dans la petite couronne de l'Île-de-France. De nombreuses difficultés techniques et foncières existent, je le reconnais bien volontiers.
Toutefois, accepter temporairement l'accession sociale à la propriété dans le décompte des 20 % est une aberration, surtout lorsque, parallèlement, l'on déplore le prétendu manque de foncier disponible. À terme, cela conduit à organiser une baisse mécanique du logement social disponible, ce qui relève, comme nombre de dispositions de ce texte, d'une politique du logement à courte vue.
Force est également de reconnaître que certaines communes prétendent ne pas avoir de foncier disponible, alors que, dans le même temps, y ont fleuri, ces dernières années, de nombreux programmes immobiliers de standing. On y compte beaucoup de logements haut de gamme et très peu de logements sociaux. Cela a été le cas à Nogent-sur-Marne notamment, où il n'y a que 10,6 % de logements sociaux. De telles situations finissent par discréditer la loi et la politique, car nos concitoyens n'acceptent pas - et à juste titre - que certains élus s'exonèrent du respect des lois républicaines.
Exiger qu'une proportion de la superficie de tout programme de construction de logements soit affectée au secteur locatif social nous semble une solution efficace pour remédier à ces situations. Encore faut-il que la définition du logement social ne soit pas trop diluée, c'est-à-dire hors logements PLS, et que le pourcentage de logement social exigé soit suffisamment important.
Je citerai le cas d'une autre ville du Val-de-Marne, Saint-Maur-des-Fossés, avec 5,5 % de logements sociaux et 2 000 demandes en souffrance. La ZAC de la Louvière en plein centre-ville, au pied du RER, a vu se construire, depuis 2001, plus de 300 appartements de standing. La dernière tranche est en cours et pas un seul logement social n'est prévu. Entre 2001 et 2004, 1 589 logements ont obtenu un permis de construire. Sur la même période, en application de la loi SRU, la commune avait l'objectif de construire 743 logements sociaux ; or seuls 156 logements sociaux ont été construits ou acquis.
M. Thierry Repentin. Et voilà !
M. Serge Lagauche. Il faut dire que Saint-Maur-des-Fossés fait partie des communes, certes plus minoritaires que celles que j'ai citées en premier lieu, qui s'inscrivent délibérément dans la désobéissance à la loi républicaine et le revendiquent. Aux yeux du maire, cette attitude constitue même une marque de fabrique puisqu'il pratique la politique de la peur, en agitant le spectre d'un pseudo-retour des barres et des tours type années soixante-dix dans une ville qui vit de plus en plus sur le mode de « l'entre-soi », comme un îlot protégé dans sa boucle de la Marne, une ville ghetto à l'envers, c'est-à-dire pour population aisée, et prête, pour échapper à l'exigence de mixité sociale, à payer l'amende, quel qu'en soit le montant.
D'ailleurs, le récent constat de carence réalisé par le comité régional de l'habitat d'Île-de-France a amené ce dernier à proposer au préfet de faire passer cette amende de 750 000 euros à 1,34 million d'euros.
Dans ces conditions, doit-on accepter un assouplissement de l'article 55 de la loi SRU ? Doit-on donner une prime aux villes hors-la-loi qui s'exonèrent de l'exigence liée à la mixité sociale parce qu'elles ne se sentent absolument pas concernées par la crise du logement et par la récente explosion sociale de nos banlieues ? Répondre « oui » relève certes de l'inconscience, mais les députés ont ouvert la boîte de Pandore.
Monsieur Braye, vous qui avez tant protesté, comme à votre habitude d'ailleurs, lorsque mon collègue Thierry Repentin a posé une question d'actualité au Gouvernement à ce sujet, entendez enfin les associations et, à travers elles, les 3,2 millions de personnes mal logées qui nous ont solennellement interpellés dans la presse la semaine dernière ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.
Mme Valérie Létard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous partageons tous le souci de faire accéder à la propriété chaque famille qui le souhaite, qu'elle soit accédante classique ou accédante sociale à la propriété.
Un certain nombre d'analyses réalisées par des spécialistes du logement montrent que, sous le vocable « familles modestes », sont considérées comme accédantes à la propriété des familles dont les revenus peuvent aller jusqu'à 6 000 euros, comme l'a souligné M. Repentin, c'est-à-dire des familles moyennes. Non seulement se pose le problème de l'accession sociale à la propriété, mais se pose aussi celui de l'accession à la propriété tout court.
En effet, à la suite de la hausse du prix du foncier, on déplore chaque année une diminution du nombre des familles pouvant accéder à la propriété : 90 000 familles en moins ! Parallèlement, 90 000 logements locatifs sociaux ont été financés l'année dernière. Si nous avions pu additionner ces 90 000 logements locatifs sociaux financés aux 90 000 accessions à la propriété, qui auraient de fait libéré 90 000 logements locatifs sociaux, nous aurions multiplié la mise par deux.
M. Robert Bret. C'est un tour de passe-passe !
Mme Valérie Létard. En revanche, pour favoriser l'accession à la propriété, comment faire en sorte que ces 90 000 logements soient financés ? En quoi le fait d'inclure ces logements dans le quota des 20 % de logements sociaux va-t-il aider les familles et les solvabiliser ?
Personnellement, je défends, notamment dans ma région, le fait que chaque institution doit, à son niveau, en fonction de ses priorités, aider à l'accession à la propriété. Par exemple, si la région accompagne, via la maîtrise ou la réduction du coût du foncier, l'effort fait par l'État au travers du prêt à taux zéro, il s'agit alors d'une véritable aide apportée aux familles, d'un réel levier. Mais, je le répète, en quoi le fait d'inclure les opérations d'accession sociale à la propriété constituera-t-il une aide supplémentaire pour les familles, modestes ou non, à accéder à la propriété ?
En réalité, cette mesure ne fera que décharger les communes d'une partie de l'effort qu'elles doivent consentir en matière de production de logements locatifs sociaux, lesquels, eux, sont essentiels, du fait de l'augmentation du prix du foncier. Ne mélangeons donc pas tout et ne nous détournons pas de notre objectif essentiel.
Si, demain, une personne âgée retraitée percevant le minimum vieillesse, un jeune couple, ou une famille modeste veut s'installer dans un logement social locatif, nous devons faire en sorte qu'ils ne soient pas obligés, faute de logements disponibles, de cohabiter avec une autre partie de leur famille. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Je suis personnellement satisfait et heureux de constater que nous avons tous pu nous écouter. Je reviendrai sur un certain nombre de points.
Si je vous ai bien compris, mes chers collègues de l'opposition, et sachant parfaitement ce que pensent mes collègues de la majorité, j'observe que nous sommes tous totalement attachés à la notion de mixité sociale ; nous l'avons d'ailleurs toujours été. La plus grande réussite, la plus grande satisfaction d'un maire est de faire en sorte que des personnes de catégories sociales différentes vivent heureuses ensemble en s'apportant mutuellement un certain nombre de choses.
C'est la raison pour laquelle je veux dire d'emblée très fortement et très symboliquement à l'ensemble de mes collègues maires qu'il n'a jamais été question - j'y insiste - de remettre en cause le quota des 20 % de logements sociaux retenu dans la loi SRU.
Mes chers collègues, ceux d'entre vous qui ont assisté aux réunions de la commission des affaires économiques m'ont toujours entendu dire que les personnes qui participent à la vie d'une cité ou d'une ville doivent ensemble, du plus humble au plus riche, pouvoir vivre sur son territoire, car la cité a l'obligation morale de les accueillir. Il n'est donc pas question de remettre en question les 20 % de logements sociaux.
M. Jean-Marc Todeschini. Vous avez oublié votre proposition de loi ! Vous êtes amnésique !
M. Dominique Braye, rapporteur. Vous allez me demander les raisons pour lesquelles je souhaite amender l'article 55 de la loi SRU.
Pour aller au bout de notre discussion, j'aimerais que tous ceux qui ne sont pas d'accord avec moi puissent concrètement - reconnaissons-le, l'article 55 de la loi SRU est devenu un problème beaucoup plus passionnel que rationnel, car c'est manifestement l'arbre qui cache la forêt - me démontrer le contraire.
Tous les spécialistes du logement social sont convaincus que cette loi est trop rigide sur un certain nombre de points et qu'elle ne prend pas en compte certaines réalités locales.
Les communes qui n'ont pas réalisé les 20 % de logements sociaux et que vous avez pointées du doigt, mes chers collègues, sont de deux ordres : d'un côté, il y a celles qui ne veulent pas appliquer cette disposition et qu'il faut donc contraindre à le faire, y compris en les sanctionnant. Mais, d'un autre côté, il y a des communes petites ou moyennes dont les maires arrivent difficilement à engager des opérations, et pour qui le logement social est donc compliqué. Si notre seule motivation est de faire du logement social, il faut alors aider ces élus en ce sens, et c'est ce que je proposerai par le biais d'un amendement.
L'argent public est en cause ; nous devons tous le dépenser d'une manière optimale. Nous le savons, 83 %, ou 87 % de nos concitoyens, selon les dires des uns ou des autres, souhaitent être propriétaires de leur logement.
M. Dominique Braye, rapporteur. Or, seuls 57 % sont effectivement propriétaires en France, contre 83 % en Espagne, 82 % en Italie et 70 % en Grande-Bretagne. Pourquoi cette spécificité française, alors que la quasi-totalité de nos concitoyens souhaitent être propriétaire ? Le meilleur service que nous puissions rendre à ceux qui vont arriver à la retraite est de permettre à ces derniers de devenir propriétaire de leur résidence principale. En effet, avec les mêmes revenus, le niveau de vie d'une personne est tout à fait différent selon qu'il est propriétaire de son logement ou non. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Annie David. Il faut augmenter les retraites !
M. Dominique Braye, rapporteur. Pourquoi dépensons-nous autant d'argent pour assigner en résidence locative certains de nos concitoyens, alors que nous en dépenserions moins à les aider à devenir propriétaires ?
M. Jean-Pierre Sueur. Ce n'est pas la question !
M. Dominique Braye, rapporteur. Actuellement, certains de nos concitoyens vivent sous statut locatif. Avec l'argent que nous dépensons pour les maintenir sous ce statut, nous pourrions les aider à devenir propriétaires, ...
M. Jean-Pierre Sueur. En dehors des 20 % !
M. Dominique Braye, rapporteur. ... et nous devons les aider à réaliser ce rêve.
M. Jean-Pierre Sueur. Nous ne sommes pas contre, mais en dehors des 20 % !
M. Dominique Braye, rapporteur. Par ailleurs, un certain nombre de locataires ont malheureusement des revenus insuffisants pour accéder à la propriété.
Mme Annie David. Il faut augmenter les minima sociaux !
M. Dominique Braye, rapporteur. Et leurs revenus resteront manifestement longtemps, voire définitivement, insuffisants pour y parvenir ! C'est donc à eux que le parc social doit être réservé.
Mme Marie-France Beaufils. Alors on ne fera jamais de mixité sociale !
M. Dominique Braye, rapporteur. Pour terminer, je veux vous demander, mes chers collègues, si vous avez réfléchi au dispositif de l'article 5 bis B. (Oui ! sur les travées du groupe socialiste.)
Personnellement, c'est avec une grande prudence que je le conseillerai aux élus et maires de communes assujetties à la loi SRU, et ce pour une simple raison ...
M. Robert Bret. Il faut le supprimer alors !
M. Dominique Braye, rapporteur. ... qui va dans le sens de ce que vous souhaitez. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Thierry Repentin. Demande de suppression !
M. Gérard Delfau. Il faut le supprimer !
M. Dominique Braye, rapporteur. Mais non, car il va dans le bon sens. Laissez-moi vous expliquer, mes chers collègues !
Les logements seront comptabilisés pendant une période de cinq ans, qui correspond au temps nécessaire à la réalisation d'un gros programme de constructions. Que se passera-t-il au terme de ces cinq ans ? Ces logements d'accession à la propriété, comptabilisés provisoirement dans le quota des logements sociaux, deviendront des résidences principales et augmenteront d'autant les obligations qu'auront ces communes de faire du logement social. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Robert Bret. C'est un jeu d'écritures !
M. Dominique Braye, rapporteur. Par conséquent, les communes qui comptabiliseront dans leur quota de logements sociaux les logements d'accession à la propriété devront, au bout de cinq ans - c'est court -, faire plus de logements sociaux pour respecter la loi SRU. (Brouhaha sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Robert Bret. On a du mal à le croire !
M. Thierry Repentin. Il faut sauver le soldat Ollier !
M. Dominique Braye, rapporteur. Enfin, je souhaite revenir sur un dernier point.
On ne peut pas dire tout et n'importe au sein de la Haute Assemblée. Il y a un devoir d'honnêteté. À cet égard, je remercie notre collègue Serge Lagauche d'avoir fait remarquer que je n'avais pas supporté que soient proférés au cours de la dernière séance des questions d'actualité au Gouvernement un certain nombre de mensonges. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Vous parlez d'un revenu de 6 000 euros par mois. Bien que le ministre l'ait dit à plusieurs reprises, je crois nécessaire de préciser à nouveau que seuls seront comptabilisés les logements acquis par des personnes disposant de revenus inférieurs ou égaux au plafond pour l'accès au logement locatif social. Vous pouvez donc être tranquilles ! Notre objectif est précisément de faire en sorte que le plus grand nombre des personnes qui le peuvent accèdent à la propriété. Nous souhaitons pour notre part que le taux de 57 % de propriétaires augmente fortement, et ce le plus rapidement possible ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Je voudrais revenir sur quelques affirmations.
Chacun s'accordera à considérer que l'objectif de mixité sociale est une priorité pour tous, y compris pour le Gouvernement. Je suis personnellement élue d'une ville qui compte 41 % de logements sociaux, et ce depuis longtemps.
En outre, je tiens à dire que le Gouvernement a appliqué la loi SRU, puisque, à l'issue de la première période triennale, un constat de carence a été dressé pour 150 des 750 communes se situant sous le seuil des 20 %. Or combien de fois nous a-t-il été affirmé que jamais nous ne prendrions d'arrêté dressant un constat de carence ?
Jean-Louis Borloo a non seulement appliqué cet article sans défaillance, mais encore il s'est engagé concrètement à mettre en chantier des logements afin de répondre réellement aux besoins de nos concitoyens. M. Marini l'a rappelé tout à l'heure. Les chiffres, que vous connaissez tous, sont aujourd'hui les meilleurs depuis vingt-cinq ans. On comptait annuellement, entre 1997 et 2000, de 80 000 à 100 000 opérations d'accession à la propriété ; on en a compté 200 000 en 2005. Le nombre de logements locatifs sociaux est passé durant la même période de 40 000 à plus de 80 000. Enfin, le nombre de constructions de logements est quant à lui passé de 300 000 à plus de 410 000. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Les chiffres parlent d'eux-mêmes ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Cet engagement est historique. Pour la première fois, une loi de programmation a défini aussi bien un objectif chiffré de constructions de logements que le financement de ceux-ci. Tel a été notamment l'objet du plan de cohésion sociale. Vous connaissez les chiffres par coeur : 500 000 logements locatifs sociaux, 200 000 logements locatifs privés, 100 000 logements vacants remis sur le marché. Il y a donc là une volonté claire et précise, avec des objectifs qui permettent effectivement d'avancer.
Enfin, beaucoup d'entre vous ont évoqué l'amendement Ollier. Il faut reconnaître que ce texte vise à prendre en compte de manière très ciblée l'accession sociale, et ne change rien à l'obligation de construire du locatif social.
M. Bernard Frimat. Cela n'a rien à voir !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Nous le savons tous, la période de cinq ans correspond au temps nécessaire à la réalisation d'un projet.
Enfin, l'assujettissement au taux réduit de TVA à 5,5 % des opérations d'accession sociale à la propriété effectuées dans les zones urbaines sensibles, les ZUS, constitue un outil nouveau qui permettra de réaliser la mixité sociale en des endroits où, de surcroît, on dispose de foncier. Cela s'est déjà fait, en l'absence même d'un tel dispositif, à Trélazé, ville que beaucoup d'entre vous connaissent. Voilà qui montre parfaitement que, en se mobilisant, on peut aboutir rapidement à la transformation d'une ZUS et à l'instauration d'une vraie mixité sociale.
C'est cela qui doit nous rassembler. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. -Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant engagement national pour le logement.
Je rappelle que nous avons entamé l'examen de l'article 5 bis B.
Article 5 bis B (priorité) (suite)
M. le président. Je suis saisi de vingt amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 22 est présenté par Mmes Demessine et Didier, MM. Billout, Coquelle, Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 401 est présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 22.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement vise à supprimer l'article 5 bis B introduit par l'Assemblée nationale, sur proposition de M. Patrick Ollier, et ayant pour objet d'assouplir l'article 55 de la loi SRU.
À la fin de la séance de cet après-midi, la majorité des orateurs ont développé de nombreux arguments, tous aussi convaincants les uns que les autres, contre cet article. Permettez-moi d'insister, à mon tour, sur quelques aspects de ce problème.
Tout d'abord, le fait que nous nous opposions à l'introduction de l'accession sociale à la propriété dans le calcul des 20 % ne signifie pas que nous soyons contre l'accession sociale à la propriété.
Au contraire, nous pensons qu'il faut développer cette possibilité et rendre plus accessible l'aspiration légitime de tout un chacun à posséder, construire et aménager son « chez-soi » selon son choix de vie et celui de sa famille.
Force est de constater que, aujourd'hui, en raison de l'inflation du foncier, ce rêve devient de plus en plus inaccessible. Nous devons agir efficacement pour rendre abordables le crédit et le foncier à des budgets moyens ou modestes, à l'instar de ce que nous avons connu dans les années soixante-dix, quatre-vingt.
Atteindre cet objectif est une nécessité. Loger dans de meilleures conditions les mal-logés, les milliers de personnes qui n'ont pas de toit, qui sont en attente d'un logement, les sans-abri, les jeunes qui vivent encore chez leurs parents, est une obligation impérieuse, et rien ne doit nous détourner de cette exigence. C'est l'objectif essentiel de l'article 55 de la loi SRU, qui ne peut en aucun cas être affaibli.
Nous sommes donc favorables à l'accession sociale à la propriété, mais rien n'oblige à ce qu'elle soit prise en compte dans le calcul des 20 % de logements sociaux.
Monsieur le rapporteur, vous qualifiez le débat qui s'est instauré sur cette question de passionnel, voire d'irrationnel. Mais n'est-ce pas plutôt la situation qui est irrationnelle ? Chaque jour, des familles disposant pourtant de ressources se retrouvent sans logement. Or, sans habitation, il n'y a pas de vie possible, même en travaillant.
C'est bien l'aggravation de la situation de déficit de logements - pour de multiples raisons, qui ont été abondamment expliquées -, la stagnation des parcours résidentiels et la flambée spéculative qui appellent à un volontarisme sans exception. Vous appelez cela de la rigidité. Mais, en l'occurrence, la volonté politique ne peut s'exprimer que par un tel volontarisme, à travers ce fameux article 55.
Je me demande d'ailleurs si ce qui gêne le plus ceux qui contestent cette disposition, c'est de payer l'amende ou bien d'être montrés du doigt.
Alors, mes chers collègues, j'en appelle à la raison, qui a prévalu dans cet hémicycle en première lecture et qui nous a conduits à ne pas toucher à l'article 55.
Écoutez l'appel de toutes les associations ou organisations qui s'efforcent tous les jours, sur le terrain, d'apporter du réconfort et de l'espoir à ceux qui souffrent de ne pas avoir droit au logement ! Elles rappellent que le Président de la République s'était personnellement engagé à ce que ce texte ne soit pas modifié.
Permettez-moi de conclure mon propos en citant un passage vibrant de cet appel : « Il y a de la provocation dans cette décision, et on ne peut que regretter que le sens de l'honneur et de la justice semble avoir ainsi été nié. Mais il y a plus. Il y a aussi une inconscience de l'ampleur de ce qui se joue derrière ce vote. »
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous demande, mes chers collègues, d'adopter cet amendement de suppression de l'article 5 bis B. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l'amendement n° 401.
M. Thierry Repentin. L'article 5 bis B comporte deux parties assez étrangères l'une à l'autre.
La première crée un guichet unique consacré à l'accession sociale à la propriété, et la seconde remet gravement en cause l'article 55 de la loi SRU et les objectifs de mixité sociale qu'il sous-tend.
S'agissant du guichet unique créé pour orienter les porteurs d'un projet d'accession à la propriété, je ferai remarquer que son utilité est largement à démontrer, tant les organismes bancaires sont devenus experts en achats immobiliers et aides fiscales de toute sorte.
En outre, j'attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait que la création d'un guichet unique n'a aucune valeur normative. Donc, pourquoi l'inscrire dans la loi ? Puisque cette disposition est juridiquement inutile, nous pourrions nous en dispenser.
S'agissant du dévoiement de l'article 55 de la loi SRU, l'affaire est moins simple. Sous couvert de favoriser l'accession à la propriété - la vision selon laquelle il y aurait, parmi les élus, les tenants de l'accession à la propriété, d'une part, et les partisans des logements locatifs sociaux, d'autre part, est assez caricaturale -, puisque tel est l'intitulé du chapitre dans lequel s'insère cet article 5 bis B, l'article 55 de la loi SRU est totalement vidé de son sens, et le pouvoir à la fois incitatif et coercitif de la loi en faveur de la mixité et de la solidarité urbaines s'en trouve complètement annihilé.
En effet, l'article 55 de la loi SRU a pour objet de favoriser le développement de l'offre de logements locatifs sociaux, aujourd'hui très en deçà des besoins. Assimiler l'accession aidée à la propriété au logement locatif n'a donc aucun sens.
Quant à la vente de logements HLM à leurs occupants, elle constitue un véritable contresens, puisqu'elle tend à réduire le parc de logements locatifs sociaux. Pis, elle conduit les organismes HLM à se défaire d'une partie de leurs logements qui est déjà amortie, alors que les loyers y sont en général moins élevés que dans les programmes récents. Cette même partie est la plus valorisée en termes de localisation et de type de bâti.
En d'autres termes, c'est la partie attractive du parc HLM qui va changer de statut et cesser d'être disponible alors que le nombre de demandeurs continuera d'augmenter.
En outre, la vente aux locataires risque d'entraîner l'insolvabilité des occupants à terme. S'ils parviennent péniblement, pour certains, à acheter, pourront-ils tous assumer les charges de la nouvelle copropriété ? Il existe de nombreux exemples de copropriétés aujourd'hui dégradées qui se retrouvent en plan de sauvegarde. Après avoir été des logements sociaux il y a une quinzaine d'années, ces habitations ont été vendues à leurs occupants.
Ces recettes ne sont pas neuves et, malheureusement, l'histoire de la politique de la ville ne témoigne pas de leur efficacité, bien au contraire.
Enfin, rappelons que les dispositions de l'article 5 bis B ont été introduites par l'Assemblée nationale alors qu'il avait été expressément demandé au Sénat, en première lecture, de ne pas toucher à l'article 55 de la loi SRU. Nous avions collectivement respecté cet accord. Pourquoi a-t-il été rayé d'un trait à l'Assemblée nationale sans que le Gouvernement fasse les mêmes rappels à l'ordre ? Y aurait-il deux poids, deux mesures ?
L'amendement n° 401 a donc pour objet de supprimer l'article 5 bis B.
J'indique en outre que les maires de notre groupe dont la commune est soumise aux obligations figurant à l'article 55 de la loi SRU réclament la suppression des dispositions figurant à cet article 5 bis B. J'en veux pour preuve l'appel que nous a lancé notre collègue maire de Lyon : il compte sur nous pour que l'article 55 de la loi SRU s'applique pleinement, y compris dans sa commune. Il a souligné que, sur les trois dernières années, il a respecté scrupuleusement ses obligations quantitativement en comblant le retard de sa commune et qu'il a veillé à ce qu'il n'y ait pas plus d'un tiers de prêts locatifs sociaux, ou PLS, dans tout nouveau programme.
M. le président. L'amendement n° 402, présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I - Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, après les mots :
les communes
insérer les mots :
ou les établissements publics de coopération intercommunale
II - Dans le deuxième alinéa du même texte, après les mots :
dans chaque mairie
insérer les mots :
ou chaque siège d'établissement public de coopération intercommunale
III - Dans le troisième alinéa du même texte, après les mots :
aux maires
insérer les mots :
ou, le cas échéant, aux présidents de l'organe délibérant de l'établissement public
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Cet amendement aurait sa raison d'être si, d'aventure, l'amendement de suppression n'était pas retenu. Comme je l'ai dit, les premiers alinéas de l'article 5 bis B visent à créer un guichet unique de l'accession aidée à la propriété dans les mairies qui le souhaitent.
La création d'un tel guichet n'ayant aucune valeur normative, elle n'a strictement aucune raison d'apparaître dans le projet de loi. Néanmoins, si cette création doit absolument recevoir une consécration législative, il convient de lui apporter des aménagements et, à tout le moins, de prévoir que les structures intercommunales, c'est-à-dire les EPCI, puissent s'engager dans une telle démarche.
En effet, les EPCI compétents en matière de programme local de l'habitat doivent logiquement pouvoir intervenir sur l'ensemble des leviers des politiques de l'habitat. Il serait en effet incohérent que le plan local de l'habitat, le PLH, soit piloté par l'EPCI tandis que le guichet unique, pour l'accession aidée à la propriété, serait, lui, pris en charge par la commune.
Ouvrir cette possibilité aux EPCI est donc cohérent du point de vue de la compétence des équipes, de la circulation de l'information et d'une meilleure lisibilité pour les usagers.
Enfin, en matière de transfert de compétences à une structure intercommunale, il est un principe selon lequel on transfère tout ou rien. En cas de transfert de la compétence « logement », je ne vois pas comment la commune peut encore mettre en place une structure au titre de la politique du logement puisqu'elle a transféré cette compétence à l'échelle de l'intercommunalité. Pour éviter toute difficulté éventuelle devant des juridictions administratives, et si vous tenez vraiment au guichet unique, je propose que cette compétence puisse être ouverte aux EPCI.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 403 est présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat, Collomb et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
L'amendement n° 466 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer les quatre derniers alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour défendre l'amendement n° 403.
M. Daniel Raoul. Construire des logements sociaux dans les communes qui en manquent, pour les centaines de milliers de personnes en France ne pouvant se loger en raison de leurs revenus modestes ou moyens, tel était l'objectif même de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, voulue à l'époque par le gouvernement Jospin, et qui avait au moins le mérite de la clarté.
Il ne peut pas y avoir de réelle mixité sociale et urbaine sans changement de la carte du logement social. La fracture territoriale ne doit plus doubler la fracture sociale.
Depuis le 13 décembre 2000, toutes les communes de France de plus de 3 500 habitants et celles de plus de 1 500 habitants en Île-de-France ont ainsi pour obligation de compter au moins 20 % de logements locatifs sociaux sur leur territoire.
Alors que la majorité des communes ont su remplir les objectifs fixés par cette loi, et les ont même très largement dépassés dans de nombreux cas, certaines collectivités locales ont fait sciemment le choix de s'affranchir du droit.
C'est ainsi que la ville du président de l'UMP n'a réalisé que 15 % des objectifs fixés par la loi et ne compte à ce jour que 1,34 % de logements sociaux, pour une population de 60 000 habitants. De même, la commune du Raincy, ville de l'ancien ministre de la ville du gouvernement Juppé, n'a réalisé que 20 % des objectifs de la loi et continue à ne posséder que 3,91 % de logements sociaux.
M. Robert Bret. C'est honteux !
M. Daniel Raoul. Sur les 742 communes déficitaires en logements sociaux, le premier bilan triennal portant sur l'application de l'article 55 de la loi SRU souligne que 180 villes comptent toujours moins de 5 % de logements locatifs sociaux.
Selon la Fondation Abbé Pierre, un tiers des municipalités visées par la loi SRU refusent sciemment de construire des HLM sur leur territoire. Au lieu de remplir leur devoir de solidarité nationale et de construire des logements, qui font pourtant tellement défaut dans les agglomérations, ces villes préfèrent verser l'amende annuelle de 152 euros par logement social manquant.
Cette situation est inacceptable, je la trouve même immorale.
Dans ces conditions, comptabiliser dans les 20 % de logements locatifs sociaux des logements n'ayant rien de locatif et que très peu de social, c'est porter un coup fatal à la solidarité urbaine et octroyer un cadeau en or à tous les maires contrevenants.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 466.
M. Jean Desessard. Permettez-moi, monsieur le président, de formuler une remarque préalable.
Le service de la séance, dont vous savez combien j'apprécie le travail et l'efficacité, nous a remis un document qui, en l'occurrence, ne me semble pas relever d'une bonne initiative.
En effet, j'avais déposé trois amendements nos 462, 463 et 464 visant à poser la question de l'énergie dans les constructions neuves.
On peut certes m'objecter que ce domaine n'est pas en relation directe avec l'objet du texte. Cependant, en première lecture, M. Borloo lui-même m'avait demandé de retirer ces amendements, en m'affirmant que la discussion aurait lieu en deuxième lecture.
Or, si l'on s'en tient à l'aspect technocratique du document de la séance, les thèmes que nous n'avions pas pu aborder en première lecture ne devraient pas pouvoir non plus être traités aujourd'hui, ce qui m'amènerait à considérer que l'on a abusé de ma bonne foi en première lecture en m'incitant à retirer mes amendements. Il importe donc de rechercher une autre formule, qui soit plus politique et qui tienne compte de ce nouveau rendez-vous qu'est la deuxième lecture. À cette occasion, il faudrait d'ailleurs relire l'ensemble du compte rendu de la première lecture pour donner aux sénatrices et aux sénateurs à qui l'on a promis que tel point serait abordé lors de la navette la possibilité de susciter de nouveau le débat !
J'en viens à l'amendement n° 466.
L'élargissement de la notion de logement social aux logements vendus à leurs propriétaires et aux accessions sociales à la propriété, même de manière transitoire, a pour but de diluer l'aide au logement des classes populaires dans l'aide au logement des classes moyennes, parfois même aux classes moyennes favorisées.
Dans l'intégration des logements sociaux financés par des PLS au sein du concept de « logement social » était déjà sous-jacente la réduction du nombre de logements sociaux pour les plus pauvres. L'amendement du député Patrick Ollier n'a pas d'autre but que d'aider les communes les plus riches à s'exonérer des obligations de solidarité nationale imposées par l'article 55 de la loi SRU.
M. le président. L'amendement n° 300 rectifié, présenté par MM. Delfau, Fortassin, A. Boyer, Baylet et Collin, est ainsi libellé :
Supprimer les septième à neuvième alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation.
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Lors de la première lecture du présent texte, le Sénat avait sagement et unanimement décidé de ne pas toucher à l'article 55 de la loi SRU, qui organise la mixité sociale.
L'Assemblée nationale n'a pas manifesté la même retenue. Elle a voté un amendement du député Patrick Ollier, qui vide de sa substance le dispositif dudit article 55.
En effet, le texte issu de l'Assemblée nationale tend à assimiler aux logements sociaux visés à l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, pendant une durée de cinq ans, d'une part, les logements vendus à leurs locataires, d'autre part, les logements neufs dont l'acquisition ou la construction a été financée au moyen d'une aide à l'accession à la propriété.
Ces deux dispositions restreignent sensiblement la portée de l'article 55 de la loi SRU puisqu'elles permettent aux communes d'atteindre le seuil des 20 % sans augmenter pour autant l'offre locative sociale. À l'évidence, elles ne répondent ni à l'objet de la loi ni à l'objectif que le Parlement doit se fixer.
C'est pourquoi nous nous y opposons et nous proposons au Sénat d'en revenir à sa position initiale.
J'ajoute que nous n'avons pas été convaincus par la réponse de M. le rapporteur après le débat très large que nous avons eu sur ce point. Pourquoi le fait d'attendre cinq ans nous permettrait-il de progresser vers l'objectif recherché de mixité sociale du logement ?
Nous n'avons pas perçu non plus dans la réponse de Mme la ministre d'éléments éclairants susceptibles de nous convaincre du bien-fondé du texte issu de l'Assemblée nationale. Je tiens à lui rappeler en outre que la position prise par le Sénat lors de la première lecture semblait avoir reçu l'approbation au moins tacite du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 360, présenté par M. Repentin, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le septième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation :
« Pour les communes disposant de plus de 30 % de logements locatifs sociaux, sont assimilés aux logements sociaux visés à l'article L. 302-5 du présent code :
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. La loi SRU impose un seuil minimal de 20 % de logements sociaux dans les communes de plus de 3 500 habitants en province et de plus de 1 500 habitants en Île-de-France. En fait, chacun l'a bien compris, pour les communes qui se situent en deçà de ce seuil de 20 %, la loi prévoit un rattrapage que l'on peut dire « en douceur », puisqu'elle leur accorde un délai de vingt ans pour l'atteindre.
Il faut croire que ce rythme est encore trop rapide pour un certain nombre de communes, certes minoritaires, qui tendent à contourner leurs obligations légales de façon un peu expéditive, si l'on peut dire.
L'amendement Ollier leur apporte une aide précieuse en ce sens en leur permettant de comptabiliser dans les logements sociaux les logements dont l'acquisition a été financée par l'aide à l'accession à la propriété.
Pour nous, un tel dévoiement de l'article 55 de la loi SRU n'est pas acceptable.
À tout le moins, si le Sénat souhaitait vraiment maintenir cette disposition, il conviendrait de limiter son application aux communes disposant déjà d'un stock suffisant de logements locatifs sociaux. C'est pourquoi nous avons placé la barre à 30 % de logements locatifs sociaux présents dans une commune pour permettre de comptabiliser éventuellement les logements visés par l'amendement Ollier.
M. le président. L'amendement n° 404, présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat, Collomb et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Supprimer l'antépénultième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation.
La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. L'antépénultième alinéa de l'article 5 bis B prévoit de comptabiliser dans les logements sociaux au titre de l'article 55 de la loi SRU les logements locatifs sociaux vendus à leurs occupants.
Il s'agit là d'un véritable contresens par rapport à l'article 55 de la loi SRU, dont l'objet est de développer l'offre locative sociale.
La vente des logements HLM, même à leurs occupants, neutralise une partie du parc disponible alors que les listes d'attente de logement social ne cessent de s'allonger. Or, 70 % à 80 % des demandeurs inscrits sur ces listes ont des revenus représentant moins des deux tiers des plafonds de ressources ; ils ne peuvent donc se loger au prix du marché.
Le logement en France souffre d'un besoin aigu de logements locatifs abordables. Dès lors, pourquoi inciter à réduire cette offre ?
En outre, la disposition figurant à l'article 5 bis B repose sur un fondement très critiquable. Pour défendre son amendement à l'Assemblée nationale, M. Ollier a fait valoir l'argument suivant : « Le changement de statut ne change pas le caractère social du logement ». C'est faux, à un double titre.
D'abord, le changement de statut modifie drastiquement et quasi définitivement la vocation sociale du logement. Par définition, il sort du parc locatif social et n'est plus disponible.
Ensuite, l'argument de M. Ollier témoigne d'une conception de la solidarité urbaine particulièrement fallacieuse. Il semble considérer que, dans la mesure où les occupants ne changent pas et restent une charge pour les communes, on peut continuer à les faire apparaître dans l'effort communal en faveur du logement social.
Mais l'objet de la loi SRU est une affaire non pas d'occupation et de contenu, mais d'offre de logements accessibles et, par conséquent, de contenant. Cette loi vise non pas à répartir des personnes, mais à créer les conditions du logement pour tous sur l'ensemble du territoire.
Par ailleurs, la vente de logements HLM conduira les organismes à se défaire de la partie déjà amortie de leur parc, partie où les loyers sont en général inférieurs à ceux des programmes plus récents et plus valorisée en termes de localisation et de bâti. En d'autres termes, c'est la partie attractive du parc HLM qui changera de statut et ne sera plus disponible alors que le nombre de demandeurs - 1 400 000 aujourd'hui - continuera d'augmenter.
Enfin, la vente aux locataires représente un risque au regard de la solvabilité des occupants à terme. Si certains parviennent péniblement à acheter, auront-ils les moyens d'assumer les charges de la nouvelle copropriété ? Nombreux sont aujourd'hui les exemples de copropriétés dégradées, qui font l'objet d'un plan de sauvegarde, alors qu'il s'agit d'anciens logements HLM qui ont été vendus à leurs occupants parfois jusqu'à quinze ans auparavant.
Ces recettes ne sont pas neuves et, malheureusement, l'histoire de la politique de la ville ne témoigne pas de leur efficacité, bien au contraire.
Parce qu'elle neutralise une partie du parc locatif social, parce qu'elle tend à assimiler solidarité urbaine et effort d'accueil de populations défavorisées, parce qu'elle représente un risque pour les occupants acquéreurs eux-mêmes, la vente de logements HLM ne doit pas être encouragée et ne peut, en tout état de cause, être comptabilisée au titre du logement social.
Quant à la création d'un guichet unique, n'ayant aucune valeur normative, elle n'a aucune raison d'apparaître dans un projet de loi. Néanmoins, si cette création devait absolument recevoir une consécration législative, il conviendrait de lui apporter des aménagements et, à tout le moins, de prévoir que les EPCI puissent s'engager dans une telle démarche. En effet, les EPCI compétents en matière de programme local de l'habitat doivent pouvoir intervenir sur l'ensemble des leviers des politiques de l'habitat. Il serait incohérent que le PLH soit piloté par l'EPCI, tandis que le guichet unique, accession aidée à la propriété, serait pris en charge par la commune.
Ouvrir cette possibilité aux EPCI revêtirait un caractère de cohérence du point de vue des compétences des équipes, de la circulation de l'information et d'une meilleure lisibilité pour les usagers.
M. le président. L'amendement n° 369 rectifié, présenté par M. Revet, Mme Gousseau, M. Grillot, Mmes Henneron et Rozier, MM. Seillier et Vasselle, est ainsi libellé :
Dans les huitième et neuvième alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
pendant cinq ans
par les mots :
pendant la durée de remboursement du prêt contracté pour l'acquisition du logement
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Cet amendement vise à remplacer les mots « pendant cinq ans » par les mots « pendant la durée de remboursement du prêt contracté pour l'acquisition du logement ». Introduire cette notion de durée de remboursement me paraît en effet fondé.
Je suis de ceux qui considèrent que l'accession à la propriété a un caractère éminemment social.
M. le rapporteur nous a indiqué que plus de 80 % des familles françaises souhaitaient accéder à la propriété. De son côté, Mme Demessine a estimé que l'accès à la propriété était un souhait légitime des familles, y compris des plus modestes d'entre elles. Mais cela ne change rien à leur situation sociale !
Pendant la période où j'étais président de l'OPAC de Seine-Maritime, beaucoup de logements ont été vendus aux locataires en place. Au passage, je signale que, pour un logement vendu nous avons pu en construire 1,60, ce qui est tout de même un beau résultat : non seulement le parc social n'a pas diminué, mais il a augmenté !
Si je plaide pour que ces logements soient comptabilisés dans les logements sociaux, au moins pendant la durée de remboursement du prêt contracté, c'est parce qu'il s'agit du même logement et qu'il est habité par la même famille, dont la situation sociale n'est pas meilleure puisqu'elle rembourse l'emprunt. Certes, à terme, elle deviendra propriétaire. Il n'empêche qu'il me semble logique de prendre en compte l'accession à la propriété dans ces conditions en raison de son caractère éminemment social.
M. le rapporteur nous a également indiqué que près de 57 % des familles françaises étaient propriétaires de leur logement. Si je ne fais pas d'erreur de calcul, 57 % ôté de 100 %, cela fait 43 % : 43 % des familles sont donc locataires. Et là, on parle de 20 % ! Il faudrait peut-être aborder le vrai problème.
Dans mon département, au Havre ou à Rouen, on trouve beaucoup de logements locatifs vides. Pourquoi sont-ils vides alors que la demande a encore augmenté ?
Mme Michelle Demessine. C'est trop cher !
M. Charles Revet. Je prends les chiffres : en 2004, il y avait 45 000 demandes ; en 2005, on est passé à 46 000 demandes. Cela signifie que les gens souhaitent un autre cadre de vie que celui qu'on leur propose. Si nous voulons vraiment faire du social et répondre aux besoins des familles, c'est à ce problème que nous devons nous attaquer. Pourquoi n'y parvenons-nous pas ?
Sur ce point, nous rejoignons le problème du manque de foncier. En fait, les dispositions que nous prenons, non seulement ne libèrent pas de foncier, mais en outre créent de nouvelles contraintes. Cela fait dix ans que nous sommes confrontés à cette situation et que nous en parlons dans cette enceinte. La législature va bientôt se terminer et nous n'aurons pas apporté d'amélioration. Nous devons donc nous attacher à libérer du foncier en assouplissant les règles.
Je le répète, je suis partisan de l'accession sociale à la propriété, dont tout le monde s'accorde à dire que c'est une bonne chose. À partir du moment où une famille emprunte pour acheter son logement, c'est cette même famille qui continue à y vivre. Il faut donc lui laisser le temps d'assurer ses remboursements et, durant cette période, son logement doit être considéré comme du logement social.
M. le président. Monsieur Repentin, nous en arrivons à quatre amendements, dont vous êtes cosignataire et qui procèdent du même esprit. Souhaitez-vous les présenter en même temps ?
M. Thierry Repentin. J'allais vous le demander, monsieur le président.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont donc présentés par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat, Collomb et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
L'amendement n° 405 est ainsi libellé :
Dans l'antépénultième du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
un an
L'amendement n° 406 est ainsi libellé :
Dans l'antépénultième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
deux ans
L'amendement n° 407est ainsi libellé :
Dans l'antépénultième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
trois ans
L'amendement n° 408 est ainsi libellé :
Dans l'antépénultième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
quatre ans
Vous avez la parole pour présenter ces quatre amendements, mon cher collègue.
M. Thierry Repentin. L'amendement présenté par M. Revet a une logique : il vise à comptabiliser les logements acquis dans le cadre de l'accession sociale à la propriété dans les logements sociaux jusqu'à la fin du remboursement de l'emprunt. Il présente donc une date butoir reposant sur un élément tangible. Ce dispositif est donc plus fondé que celui qui nous vient de l'amendement de M. Ollier.
Nous avons cherché à savoir pourquoi la durée de cinq ans avait été retenue. Nous nous sommes demandé pourquoi ne pas prévoir quatre ans, trois ans, deux ans, voire une année, le temps, finalement, que les maires montent un programme locatif social. Tel est l'objet des amendements nos 405, 406, 407 et 408, grâce auxquels nous obtiendrons peut-être une explication.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 409 est présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat, Collomb et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
L'amendement n° 502 rectifié est présenté par M. Dubois, Mme Létard, MM. Mercier, Vanlerenberghe et Détraigne, Mmes Morin-Desailly et Dini et M. Portelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 409.
M. Jean-Pierre Sueur. Premièrement, on nous dit que l'accession sociale à la propriété est une bonne chose et qu'elle correspond au désir de nos concitoyens. Deuxièmement, on nous parle de l'impérieuse nécessité d'atteindre l'objectif de 20 % de logements sociaux - en fait, c'est plutôt de notre côté de l'hémicycle que cet objectif est affirmé.
Or nous ne comprenons pas pourquoi les logements acquis dans le cadre de l'accession sociale à la propriété devraient faire partie des 20 % de logements sociaux. Il est tout à fait possible de développer l'accession sociale à la propriété sans l'intégrer dans ce quota.
Mon cher collègue Revet, vous avez dit que cette notion avait un caractère éminemment social. Je voudrais vous faire observer que, quand le prix de l'immobilier est multiplié par deux en sept ans, quand le mètre carré atteint 2 500 à 3 000 euros dans les grandes agglomérations françaises et qu'il dépasse 5 000 euros à Paris et dans plusieurs communes franciliennes, l'accession à la propriété n'est plus très sociale. Tout au plus, peut-on parler d'accession aidée à la propriété.
Ne nous leurrons pas, le marché immobilier éloigne actuellement de la propriété une majorité de Français, malgré les dispositifs qui ont été mis en place. Ceux qui sont malgré tout parvenus à acquérir leur logement ont dû montrer patte blanche à leur banquier : ils ont dû faire valoir des revenus suffisants, prouver la stabilité de leur situation personnelle, voire solliciter leur entourage familial afin qu'il se porte garant. Tout cela, finalement, pour s'endetter très souvent jusqu'à un tiers de leurs revenus, c'est-à-dire le plafond légal, et pour des durées de prêt encore plus longues. Les prêts sur vingt-cinq ans sont désormais monnaie courante et ceux sur trente ans, voire au-delà, font une apparition florissante dans l'offre bancaire.
Comment dès lors pouvez-vous assimiler ces logements, acquis dans les conditions que je viens d'évoquer, à des logements sociaux ? Parmi les demandes de logement social, 70 % à 80 % émanent de personnes dont les revenus ne dépassent pas deux tiers des plafonds de ressources des PLAI. Ce sont ceux-là qui ont prioritairement besoin de logements sociaux, mais ils ne pourront pas accéder à la propriété. C'est donc d'eux qu'il faut parler, et c'est par rapport à leur cas que la règle des 20 % est absolument indispensable.
Pour autant, cela n'empêche pas de favoriser l'accession sociale à la propriété. Toutefois, aucun argument ne nous a été donné à ce stade du débat pour nous expliquer pourquoi celle-ci devrait se développer dans le cadre des 20 %. (Marques d'approbation sur les travées du groupe CRC.)
J'ajoute que la disposition que notre amendement vise à supprimer permettrait de comptabiliser dans les logements sociaux l'accession à la propriété financée par des aides de l'État, dont le prêt à taux zéro. Or, je ne l'invente pas, les plafonds de ressources pour l'éligibilité à ce prêt ont été relevés à 6 000 euros en 2005 dans un certain nombre de cas. Comment concevoir qu'une disposition qui s'appliquera aux ménages dont les revenus sont de 6 000 euros soit considérée comme une aide aux personnes en difficulté cherchant un logement social ? C'est complètement absurde ; il n'est pas possible de continuer avec de tels faux-semblants !
Bref, nous sommes favorables à l'accession sociale à la propriété, mais en dehors des 20 % requis au titre de l'article 55 de la loi SRU. Il faudrait nous expliquer pourquoi vous proposez qu'il en soit autrement. Jusqu'à maintenant, personne ne nous a encore apporté cette réponse.
M. Robert Bret. Ils ne peuvent pas !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour présenter l'amendement n° 502 rectifié.
M. Daniel Dubois. Cet amendement tend à supprimer la disposition introduite par les députés tendant à intégrer dans le décompte des 20 % de logements sociaux ceux qui sont financés au moyen d'une aide à l'accession à la propriété.
Mme la ministre nous a donné un certain nombre de chiffres et a précisé que ce gouvernement avait accompli un effort réel - ce qui est vrai - en augmentant de façon sensible le nombre de logements locatifs sociaux, qui est passé de 40 000 à près de 70 000, et le nombre global de constructions de logements, qui est passé de 300 000 à 400 000 et qui atteindra certainement le chiffre de 415 000 à 420 000 l'année prochaine.
En outre, elle nous a rappelé que 800 communes environ n'atteignaient pas le seuil des 20 % requis par l'article 55. Or celles-ci ont encore quinze ans pour atteindre l'objectif fixé par la loi SRU.
J'ai également noté que des propositions avaient été faites en ce qui concerne les communes qui, pour des raisons indépendantes de leur volonté, n'arrivent pas à atteindre l'objectif de 20 % de logements sociaux. Une commission pourra se réunir et permettre à ces communes de ne pas être taxées, ou d'être taxées différemment, surtout d'avoir un peu plus de temps pour tenir ces objectifs.
Je suis, moi aussi, extrêmement étonné par le dispositif qui nous est proposé.
Certes, nous sommes d'accord pour encourager le fonctionnement de l'ascenseur social en permettant à certaines familles d'acquérir leur logement et de garantir ainsi leur retraite. Mais il est nécessaire de trouver un équilibre entre le parc locatif et l'accession sociale à la propriété. Or intégrer cette dernière dans le pourcentage de logements prévus à l'article 55 de la loi SRU nous paraît une très mauvaise solution. En effet, ce dispositif remet en cause l'esprit même de cette loi, notamment son objectif de mixité sociale.
Par ailleurs, la question de l'accès à ce type de logement se pose. On le sait bien, les prix à la construction ont augmenté et les situations sociales ne se sont pas améliorées.
Il est, me semble-t-il, totalement déraisonnable de penser que les familles modestes pourront accéder à cette propriété, alors que, dans de nombreux cas, elles ne peuvent déjà pas supporter des loyers élevés.
Plus de 60 % des familles - dans certains quartiers, ce taux s'élève à 70 %, quand ce n'est pas à 90 % ! - ont des revenus qui leur permettraient de prétendre à un logement PLAI. De même, et ce dans la quasi-totalité des départements français, 90 % de la population serait susceptible d'obtenir un logement social.
Nous commettrions donc, j'en suis persuadé, une grave erreur en ne revenant pas sur le dispositif initial.
Certes, comme je l'ai déjà dit, nombre de maires rencontrent des difficultés. Mais les propositions qui sont faites permettront dans la plupart des cas d'y remédier. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement de suppression, afin de revenir à l'état actuel du droit.
Je le répète, nous souhaitons trouver des solutions à la fois pour aider les communes qui éprouvent de sérieuses difficultés à remplir leurs obligations et pour encourager par d'autres instruments l'accession sociale à la propriété, qui répond, elle, à une tout autre finalité que l'objectif visé par l'article 55 de la loi SRU.
M. le président. Je suis maintenant saisi de quatre amendements présentés par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat, Collomb et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
L'amendement n°410 est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
un an
L'amendement n° 411 est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
deux ans
L'amendement n° 412 est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
trois ans
L'amendement n° 413 est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation, remplacer les mots :
cinq ans
par les mots :
quatre ans
La parole est à M. Daniel Raoul, pour présenter ces quatre amendements.
M. Daniel Raoul. Ces quatre amendements ont le même objet : essayer de trouver une logique à la durée que prévoit l'article 5 bis B.
Je ne reprendrai pas la proposition de notre collègue, consistant à retenir la durée de remboursement du prêt contracté pour l'acquisition du logement. Je voudrais en revanche attirer votre attention, mes chers collègues, sur ce qui se passe dans ma ville.
Des opérations de vente ont été menées par la société d'économie mixte ou par l'OPAC. Nous nous sommes aperçus qu'au bout de cinq ans les nouveaux propriétaires étaient parfois incapables d'assumer les charges de leur logement en tant que propriétaires, à savoir les charges de copropriété. On observe alors une dégradation du logement à grande vitesse !
Certes, il faut aider, et sans doute favoriser, l'accession à la propriété. Mais ce n'est pas en intégrant les logements acquis au moyen de dispositifs d'accès à la propriété dans le quota des 20 % de logements sociaux que nous y parviendrons.
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
M. Daniel Raoul. Quoi qu'il en soit, il faut faire extrêmement attention. Lorsque les OPAC ou les sociétés d'économie mixte vendent des logements, il faut vérifier qui sont les acheteurs et s'ils disposent effectivement des moyens nécessaires. Seront-ils réellement capables d'assumer cette propriété ? Certes, en procédant à cet achat, ils seront en conformité avec leurs aspirations, ce que nous pouvons tous très bien comprendre dans cet hémicycle. Mais la véritable question porte sur leurs capacités financières.
En effet, à la Banque de France se trouvent de multiples fichiers de surendettement correspondant à des personnes qui ont acheté un logement à une société d'économie mixte et qui se retrouvent en situation de surendettement uniquement du fait des charges incombant au propriétaire.
Ainsi, en partant d'un bon sentiment, en cherchant à répondre à l'aspiration légitime de chacun d'accéder à la propriété, on risque de susciter des difficultés majeures et de placer des gens dans des situations impossibles. Je vous demande de bien réfléchir à cela, mes chers collègues.
M. le président. L'amendement n° 340 rectifié, présenté par Mme Létard et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 443-15-6 du code de la construction et de l'habitation par une phrase ainsi rédigée :
Dans ce cas, le taux visé au premier alinéa de l'article L. 302-5 est de 30 % des résidences principales.
La parole est à Mme Valérie Létard.
Mme Valérie Létard. Il s'agit d'un amendement de repli.
Bien entendu, nous espérons que l'amendement n° 502 rectifié, qui vient d'être défendu par mon collègue M. Dubois, obtiendra un accueil favorable. Mais, dans l'hypothèse où ce ne serait pas le cas, nous souhaitons porter le taux de logements sociaux dans les communes visées à l'article 55 de la loi SRU à 30 %,...
M. Philippe Dallier. Et pourquoi pas à 40 % pendant que vous y êtes ?
Mme Valérie Létard. ...si le texte issu de l'amendement de M. Patrick Ollier, tendant à intégrer les logements financés par des aides à l'accession à la propriété dans le décompte des 20 % de locatifs sociaux, n'est pas supprimé.
En effet, l'Assemblée nationale ayant jugé bon de toucher à l'équilibre de l'article 55 de la loi SRU, il faut bien que le Sénat propose un réajustement afin que les objectifs indispensables de production de logements locatifs sociaux puissent être atteints dans des délais et des proportions mieux adaptées aux besoins de notre population.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je vais essayer d'apporter un certain nombre de réponses aux questions qui nous ont été posées.
Comme je l'ai dit dans mon propos liminaire, la commission est naturellement défavorable à la suppression de l'article 5 bis B.
D'une part, la création dans les mairies d'un guichet unique consacré à l'accession sociale à la propriété, bien que peu normative, comme l'a fait remarquer notre collègue Thierry Repentin, nous apparaît comme une initiative intéressante.
D'autre part, l'intégration des logements en accession sociale à la propriété dans le quota des 20 % ne nous semble pas illégitime. En effet, de tels logements accueillent des personnes modestes au même titre que les logements locatifs sociaux.
À cet égard, vous avez évoqué le seuil des 6 000 euros. Je vous rappellerai que, dans la mesure où ce dispositif doit concerner les personnes modestes, que nous souhaitons amener à la propriété, Mme la ministre a déclaré que seuls les logements en accession sociale à la propriété pour les personnes dont le revenu est égal ou inférieur à celui du logement social seraient pris en compte.
M. Jean-Pierre Sueur. Ce n'est pas inscrit dans la loi !
M. Dominique Braye, rapporteur. Non, mais Mme la ministre nous l'a assuré à plusieurs reprises et ce sera fixé par décret. (M. Jean-Pierre Sueur s'exclame.)
M. Robert Bret. Avec quelle portée juridique ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Vous nous faites le même procès d'intention que celui que vous nous aviez fait s'agissant des constats de carence ! Après la réponse de Mme la ministre vous devez bien reconnaître que vous avez eu tort dans vos déclarations.
Aujourd'hui, je prends acte de vos propos et je vous dis que vous serez obligés d'admettre également que vous aviez tort. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Jean-Marc Todeschini. Ce sera comme pour le CPE !
M. Jean-Pierre Sueur. Là encore, la loi votée ne s'appliquera pas !
M. Dominique Braye, rapporteur. En outre, comme je l'ai dit dans mon rapport, cette disposition ne constitue pas, à mon sens, la panacée pour les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU.
M. Gérard Delfau. Il ne faut pas la voter alors !
M. Dominique Braye, rapporteur. En effet, ces logements ne seront comptabilisés que pendant une période très courte, limitée à cinq ans,...
Mme Michelle Demessine. Alors à quoi cela sert-il ?
M. Dominique Braye, rapporteur. ...ce qui est la durée de lancement d'une opération.
À cet égard, j'invite tous les élus locaux à faire très attention avant de recourir à ce dispositif.
M. Jean-Pierre Sueur. Pourquoi l'instituez-vous donc ?
M. Jean-Marc Todeschini. Ce sera comme pour le CPE, la loi ne sera jamais appliquée !
M. Dominique Braye, rapporteur. Veuillez me laisser terminer, je vous prie.
Par exemple, il ne faut surtout pas que les communes concernées consomment trop de foncier disponible pour ce type d'opération, afin de se mettre en règle avec l'article 55 de la loi SRU. Sinon comment feront-elles cinq après lorsque ces logements seront comptabilisés non plus au titre de l'article 55 de la loi SRU, mais comme des résidences principales, ce qui augmentera d'autant les obligations de ces collectivités locales en termes de logement social ?
Mme Michelle Demessine. Vous êtes très confus !
M. Dominique Braye, rapporteur. En fait, si nos collègues socialistes étaient réellement soucieux de logement social, ils adopteraient ce dispositif. En effet, au bout de cinq ans, les obligations des communes en termes de logement social s'en trouveront augmentées.
M. Jean-Marc Todeschini. C'est comme pour le CPE ; ils vont le retirer !
M. Dominique Braye, rapporteur. Et ces obligations supérieures aboutiront ipso facto à des constructions de logements sociaux plus importantes qu'au départ.
Mme Michelle Demessine. Il va falloir un traducteur !
M. Gérard Delfau. C'est grotesque !
M. Dominique Braye, rapporteur. Vous pouvez trouver cela grotesque, mais c'est mathématique ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
De toute façon, la commission estime que notre pays n'agit pas suffisamment en faveur de l'accession sociale à la propriété des ménages modestes. C'est pourquoi nous défendrons toutes les mesures qui permettront à un maximum de nos compatriotes d'accéder à la propriété, tout en gardant un parc social - je l'ai dit dans mon propos liminaire - pour ceux qui n'ont malheureusement pas les moyens de devenir propriétaires.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur les amendements n°s 22 et 401 tendant à supprimer l'article 5 bis B.
Vous nous avez interrogés sur les raisons pour lesquelles l'Assemblée nationale avait retenu une durée de cinq ans. La raison en est fort simple : les communes qui sont soumises à la loi SRU ont actuellement énormément de réticences à vendre leurs logements sociaux, puisque de ce fait leurs quotas diminueraient et leurs pénalités augmenteraient.
Or, comme nous le savons tous, il y a des parcs de logements sociaux, construits notamment dans les années soixante-dix - ce sont des parcs de bonne qualité, avec des loyers très peu chers -, dans lesquels le turn-over ne se fait absolument plus.
Mme Sylvie Desmarescaux. Tout à fait !
M. Dominique Braye, rapporteur. Ces logements sociaux ne jouent plus leur rôle, parce que leurs occupants dont la situation a changé et qui ont des revenus bien supérieurs aux plafonds autorisés ne cherchent pas à déménager.
Mme Michelle Demessine. Ils sont vraiment méchants !!
M. Dominique Braye, rapporteur. Ainsi, un nombre significatif de locataires préfèrent rester dans ces logements sociaux tout en acquérant une résidence secondaire, puisque le rapport qualité-prix des loyers dans de tels logements est manifestement très favorable.
M. Gérard César. C'est vrai !
M. Dominique Braye, rapporteur. Dès lors, ceux qui souhaitent véritablement défendre le logement social devraient être favorables à la vente de ces logements sociaux qui ne remplissent plus leur rôle, comme l'a très bien montré notre collègue Charles Revet. De fait, pour 1 logement vendu, nous pouvons construire, selon les cas, 1,6, voire 2,5 logements sociaux.
M. Gérard Delfau. Donnez plutôt cet argent aux offices HLM !
M. Dominique Braye, rapporteur. Et il s'agit de logements sociaux de nature différente, qui remplissent entièrement leur rôle ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Michel Mercier. Monsieur le rapporteur, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je vous en prie, mon cher collègue.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, avec l'autorisation du rapporteur.
M. Michel Mercier. Dans un souci de clarté, je voudrais simplement apporter une précision, monsieur le rapporteur.
Nous parlons de deux types de logements différents.
Pour ma part, je suis tout à fait d'accord pour intégrer dans les quotas de logements sociaux définis par l'article 55 de la loi SRU les logements sociaux existants que l'on vend à leurs occupants. C'est le cas que vous venez d'évoquer.
M. Dominique Braye, rapporteur. Absolument !
M. Michel Mercier. Un tel dispositif ne me pose aucun problème.
En revanche, il y a une deuxième catégorie. Dans le dernier alinéa de l'article 5 bis B tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale, les logements neufs acquis au moyen d'une aide à l'accession à la propriété, notamment le prêt à taux zéro, sont, eux aussi, inclus dans le quota des 20 % de logements sociaux. Cela, c'est un tout autre sujet.
Mme Annie David. Eh oui !
M. Michel Mercier. Monsieur le rapporteur, chacun peut avoir un avis, mais il faut l'exprimer clairement, pour que tout le monde puisse comprendre.
M. Dominique Braye, rapporteur. Absolument !
M. Michel Mercier. Pour ma part, je ne m'opposerai jamais à ce qu'un logement ancien construit dans les années soixante-dix avec le financement du logement social et que l'on vend aujourd'hui soit considéré comme un logement social. De ce point de vue, cet alinéa de l'article 5 bis B me convient parfaitement.
Mais l'alinéa dont nous demandons la suppression vise les nouveaux logements sociaux, construits par exemple avec le prêt à taux zéro, et qui entreraient pendant cinq ans dans le quota de 20 % défini par la loi SRU. Une telle disposition n'est, en effet, pas acceptable. Il ne s'agit plus en l'occurrence d'aider des locataires qui sont depuis longtemps dans des logements sociaux et qui désirent acheter, la vente de tels logements pouvant relever en effet d'une bonne gestion du patrimoine de la part de l'organisme de logement social. On s'adresse à ce moment-là à des personnes qui disposent de certains moyens et qui peuvent avoir accès à un prêt. Cela ne permet pas d'aider les plus pauvres à trouver un logement social.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Monsieur Mercier, je vous remercie de votre intervention et je vais essayer d'y répondre.
Je mets de côté la vente de logements sociaux existants pour centrer mon propos sur les logements neufs en accession sociale à la propriété.
Le problème est de fixer un niveau de revenus ; je demanderai à Mme la ministre de prendre un engagement sur ce point.
Au demeurant, mes chers collègues, ne trouvez-vous pas normal que des gens à qui leur niveau de revenus permettrait d'obtenir un logement social puissent bénéficier d'une accession sociale à la propriété et que les collectivités soient incitées à leur vendre des logements sociaux ?
Naturellement, si, comme le prétendent nos collègues socialistes, il s'agissait de revenus de 6 000 euros, je ne serais pas d'accord. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Mais si cette mesure peut permettre à des occupants de logements sociaux d'acquérir un statut de propriétaires avec les mêmes revenus que ceux qu'ils ont en tant que locataires,...
M. Jean-Marc Todeschini. C'est du rêve !
M. Dominique Braye. ... elle aura un effet positif.
M. Jean-Marc Todeschini. Vous y croyez sérieusement ?
Mme Michelle Demessine. Ce sont des bobards !
M. Jean Desessard. C'est pour les milliardaires !
M. Dominique Braye, rapporteur. Si nous pouvions donner la possibilité aux gens modestes ayant accès au logement social de devenir propriétaires, alors nous ferions, me semble-t-il, un grand pas dans la bonne direction.
M. Daniel Raoul. C'est de la poudre aux yeux !
M. Gérard Delfau. Monsieur le rapporteur, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, avec l'autorisation de M. le rapporteur.
M. Gérard Delfau. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de me permettre, à mon tour, de demander un certain nombre de précisions.
D'abord, si Mme la ministre s'engageait formellement, au nom du Gouvernement, à fixer un plafond garantissant que ces logements seront vendus à des occupants ayant peu de moyens, ce serait, pour nous, un premier motif de satisfaction.
Ensuite, si une partie significative du produit de ces ventes servait à la construction de nouveaux logements sociaux, ce serait un deuxième motif de satisfaction. Plus exactement, le dispositif qui a été voté par l'Assemblée nationale serait moins déséquilibré. Vous le voyez, j'essaie de faire en sorte que, tous ensembles, nous trouvions un système équilibré.
Enfin, je souhaite attirer votre attention sur le fait que, selon des études qui viennent de paraître, un certain nombre de programmes de logements financés par le prêt à taux zéro, formule Robien, sont en train de fleurir dans des communes dans lesquelles il n'y a pas de besoins ! Ce que vous nous proposez est donc surréaliste : des logements financés par le prêt à taux zéro et ne correspondant pas à des besoins pourraient tout de même être comptabilisés dans le quota de 20 % de logements sociaux !
Monsieur le rapporteur, si vous voulez que nous comprenions où vous voulez aller réellement - cela ne signifie d'ailleurs pas que nous vous suivrons -, votre argumentation mérite d'être affinée.
M. le président. Veuillez poursuive, monsieur le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Je remercie M. Delfau de cette demande de précision, très intéressante, d'autant plus que, manifestement, ce débat dépasse les clivages dogmatiques et idéologiques et qu'il se déroule dans le souci de l'intérêt des plus modestes.
Vous l'avez compris, notre seul but est que les gens modestes, à qui leurs revenus permettent d'accéder au logement social, puissent devenir propriétaires et ne soient pas cantonnés au locatif social. Cela n'a donc rien à voir avec le dispositif Robien, qui est un produit de défiscalisation.
Ce dispositif, s'il a eu des effets très positifs,...
Mme Michelle Demessine. Mettez les chiffres sur la table !
M. Dominique Braye, rapporteur. ... en a eu également de négatifs. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons souhaité le modifier. Nous nous sommes en effet aperçus que les logements concernés n'étaient pas toujours construits au bon endroit et qu'ils ne convenaient pas forcément aux populations résidentes.
Je demande donc à Mme la ministre que tout soit fait pour que ces gens modestes qui ont accès au logement social puissent devenir propriétaires. En fait, je vous propose simplement, mes chers collègues, tous ensembles, de réaliser le rêve de plus de 80 % de nos concitoyens.
M. André Vézinhet. Monsieur le rapporteur, me permettez-vous, à mon tour, de vous interrompre ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Comment pourrais-je vous le refuser, monsieur Vézinhet, alors que j'ai déjà accepté d'être interrompu deux fois ? (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. André Vézinhet, avec l'autorisation de M. le rapporteur.
M. André Vézinhet. Je vous remercie, monsieur le rapporteur.
Je n'ai pas l'intention de donner des leçons, mais cela fait désormais trente-cinq ans - c'est le hasard de la vie d'élu - que je m'occupe de logement social. J'ai, pendant quinze ans, présidé un important office d'HLM et été membre du comité directeur de l'union nationale des HLM. J'ai appris au moins une chose, c'est qu'il ne faut pas diaboliser le statut de locataire.
Mme Michelle Demessine. C'est vrai !
M. Dominique Braye, rapporteur. C'est vous qui le faites !
M. André Vézinhet. C'est un statut de grande dignité. Or faire miroiter à ce point l'accession à la propriété, c'est diaboliser le statut du locataire. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Et c'est épouvantable ! Cela fait un moment que nous tournons autour de ce concept, et nous avons tort ! (Tout à fait ! sur les travées du groupe socialiste.)
Les besoins en locations doivent être satisfaits le plus largement possible. Ne mettons pas en oeuvre des pis-aller aboutissant à une réduction du nombre de locations ! Vous avez de la chance, monsieur Revet, d'avoir des logements HLM vacants car tel n'est pas le cas dans mon département. Nous devons donc avoir pour ambition d'accroître le nombre d'appartements en location.
Enfin, on dit que vingt ans seront nécessaires pour atteindre le quota des 20 %. Or, grâce au droit de préemption dont ils disposent, les maires peuvent, sur le seul mouvement des ventes et en changeant le statut des logements acquis, accroître leur nombre de logements sociaux et atteindre le quota de 20 %. (M. Philippe Dallier s'exclame.)
M. le président. Veuillez poursuive, monsieur le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Monsieur Vézinhet, nous ne stigmatisons absolument pas le logement social. Nous voulons simplement que tous ceux qui souhaitent devenir propriétaires puissent l'être.
M. Jean Desessard. Augmentez les salaires !
M. Dominique Braye, rapporteur. N'oubliez jamais que, selon une étude européenne, les pays où l'on compte le plus de locataires sont les plus riches. Ainsi la Suisse compte-t-elle 30 % de locataires. Et les Suisses déclarent qu'ils ne veulent pas être propriétaires. Ils veulent la mobilité, ils la payent, ils l'ont ! La situation est la même en Allemagne.
M. Robert Bret. Parce qu'ils ont de bons salaires !
M. Dominique Braye, rapporteur. En revanche, c'est dans les pays où les gens ont manifestement le moins de moyens qu'il y a le plus de propriétaires.
Faisons donc en sorte que, chez nous, les gens les plus modestes puissent devenir propriétaires.
M. Pierre André. Monsieur le rapporteur, me permettez-vous également de vous interrompre ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je vous en prie, mon cher collègue.
M. le président. La parole est à M. Pierre André, avec l'autorisation de M. le rapporteur.
M. Pierre André. À ce stade du débat, un certain nombre d'éléments méritent d'être soulignés.
Aujourd'hui, nous campons sur des chiffres, notamment sur le quota de 20 %.
M. Charles Revet. Eh oui ! C'est absurde !
M. Pierre André. Depuis quelques semaines, c'est la période de préparation des cartes scolaires. On nous explique qu'il ne faut surtout pas tenir compte de l'arithmétique pour fermer les classes.
Mme Marie-France Beaufils. Pas « que » de l'arithmétique !
M. Pierre André. Faisons de même, mes chers collègues, s'agissant du logement. À quoi sert-il, en effet, de se fixer sur le pourcentage de 20 % ?
M. Bernard Frimat. On peut faire plus !
M. Robert Bret. C'est un plancher, on peut aller au-delà !
M. Pierre André. Vous pouvez faire tout ce que vous voulez, mais, entre les chiffres et le discours sur la mixité sociale, il y a une différence ! Favoriser la mixité sociale, c'est aussi tirer nos quartiers les plus difficiles vers le haut, c'est aussi permettre l'accession à la propriété.
Mme Michelle Demessine. Nous sommes d'accord !
M. Pierre André. Je ne vois donc pas en quoi il serait gênant, dans notre pays, de permettre à un certain nombre de personnes - M. Charles Revet l'a très bien dit, je n'y reviens pas - de devenir propriétaires de logements ayant déjà été amortis.
Mes chers collègues, ceux d'entre vous qui sont membres de la mission commune d'information banlieues, en particulier ceux qui ont participé à un certain nombre de ses déplacements en Europe, ont pu constater comme moi, que ce soit au Royaume-Uni ou en Allemagne, que ces pays encouragent aujourd'hui les propriétaires aux revenus moyens et élevés à investir dans les quartiers les plus difficiles afin de favoriser la mixité sociale.
M. Jean Desessard. Nous voulons des logements sociaux dans les communes riches !
M. Pierre André. Ce n'est donc pas en créant des ghettos, en voulant absolument enfermer 20 % de personnes dans tel ou tel secteur...
M. Jean-Pierre Sueur. Le quota de 20 % est justement anti-ghetto !
M. Pierre André. ...que nous réglerons les difficultés que nous connaissons actuellement, notamment dans les quartiers les plus difficiles !
M. Jean Desessard. Construisez des logements sociaux à Neuilly !
Mme Sylvie Desmarescaux. Monsieur le rapporteur, puis-je à mon tour vous interrompre ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je vous en prie, ma chère collègue !
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Desmarescaux, avec l'autorisation de M. le rapporteur.
Mme Sylvie Desmarescaux. Je vous remercie, monsieur le rapporteur.
Je suis étonnée des propos que tiennent mes collègues des travées situées à ma droite.
Mme Michelle Demessine. À gauche !
M. Robert Bret. Ce n'est pas un gros mot !
Mme Sylvie Desmarescaux. Je suis pour la mixité sociale. Dans la commune dont je suis maire, certaines habitations, qui appartiennent soit à la société Notre cottage, soit à la Maison flamande, sont occupées depuis douze ans par des locataires. Ceux-ci souhaitent aujourd'hui les racheter. Je leur ai proposé, pour que la commune reste au-dessus du quota de 20 %, d'acheter en accession sociale à la propriété d'autres maisons qui sont actuellement en construction.
Les maisons que leurs locataires voudraient racheter valent actuellement 800 000 francs ; les nouvelles qui sont en construction valent 1,1 million de francs. Si certains locataires pourraient peut-être y accéder, la plupart sont incapables de les acheter !
Pour ma part, je souhaiterais que l'on puisse donner aux locataires la possibilité de racheter les maisons qu'ils occupent (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste.)...
M. Jean-Marc Todeschini. Nous sommes d'accord !
Mme Sylvie Desmarescaux. Ne criez pas, respectez ceux qui ont la parole ! Je vous ai toujours respectés, faites de même !
Il faut donc permettre à ces locataires de racheter les maisons à 800 000 francs et nous autoriser à comptabiliser celles-ci dans le quota des 20 % pendant cinq ans.
Étant bloquée par les révisions des PLU, si ces maisons ne peuvent être comptabilisées dans le quota de 20 % de logements sociaux, je ne pourrai pas permettre à leurs locataires de les acheter, sinon je n'atteindrai plus ce pourcentage. Je serai obligée de dire aux personnes concernées, dont les demandes sont en attente - j'en ai signé quatre la semaine dernière -, qu'elles ne peuvent pas acheter leur maison parce que le Sénat n'a pas adopté l'amendement le permettant. Ces personnes, qui sont locataires de leur maison depuis dix ans ou douze ans, seront ainsi pénalisées et je pourrai vous dire merci, mesdames, messieurs ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme Michelle Demessine. Il faut réviser votre PLU !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 402, vous ne pourrez pas, monsieur Repentin, me suspecter d'être hostile à l'intercommunalité. Nous avons souvent plaidé de concert pour un renforcement de l'intercommunalité dans bien des domaines.
Pour autant, vous me permettrez de ne pas vous suivre concernant la possibilité d'instituer dans les EPCI le fameux guichet unique dans le cadre d'une procédure d'accession sociale à la propriété. En ce domaine, et tous les élus locaux le savent, la commune reste l'endroit de proximité par excellence. C'est naturellement vers les mairies et vers le maire que les administrés se tournent pour obtenir des informations à ce sujet.
Étant moi-même maire et président de communauté d'agglomération ayant la compétence logement, je constate tous les jours que ceux de nos concitoyens qui cherchent à se loger s'adressent beaucoup plus souvent au maire qu'au président d'EPCI.
Pour ces raisons, je ne peux pas donner un avis favorable à l'amendement n° 402.
S'agissant des amendements identiques nos 403 et 466, j'ai déjà largement développé les raisons qui me conduisent à être défavorable à la remise en cause de cette partie de l'amendement de M. Ollier.
La commission émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 300 rectifié.
L'adoption de l'amendement n° 360 remettrait en cause le dispositif d'intégration de l'accession sociale à la propriété dans le décompte opéré au titre de l'article 55 de la loi SRU. Vous comprenez bien, pour les raisons que j'ai déjà largement développées, que je ne peux vous suivre dans votre proposition, monsieur Repentin. La commission a donc donné un avis défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 404.
Avec l'amendement n° 369 rectifié de M. Revet, les logements en accession sociale à la propriété seraient pratiquement comptabilisés de façon définitive dans le décompte prévu à l'article 55, puisque la durée de remboursement des prêts peut aller jusqu'à vingt ans. Or l'article 55 n'a vocation à s'appliquer que pendant une vingtaine d'années, puisque c'est le laps de temps dans lequel les communes doivent parvenir aux 20 % de logements locatifs sociaux.
Votre amendement, mon cher collègue, remet donc en cause l'équilibre qui me semble atteint avec l'amendement Ollier, qui a déjà fait couler beaucoup d'encre. Je vous demande donc, pour toutes ces raisons, de bien vouloir le retirer, sinon, je donnerai un avis défavorable.
S'agissant des amendements nos 405, 406, 407 et 408, qui déclinent des durées d'un an à quatre ans, M. Repentin nous a dit avoir prévu ces différentes durées parce qu'elles correspondaient à la mise en place des opérations de substitution et de reconstruction. S'il a vraiment une solution pour reconstruire et remplacer des logements sociaux en un ou deux ans, qu'il nous la fasse connaître, ce sera une véritable découverte ! Nous sommes tous preneurs.
M. Thierry Repentin. Je parle des opérations qui sont en cours !
M. Dominique Braye, rapporteur. Nous n'avons pas encore trouvé de telles solutions. Monsieur Repentin, si vous avez des exemples, montrez-les nous !
M. Thierry Repentin. Absolument !
M. Dominique Braye, rapporteur. Si, en un an, il est possible de décider d'une opération, de libérer le foncier et de construire, je le répète, nous sommes preneurs !
Donc, sur ces amendements qui me paraissent peu sérieux, la commission a émis un avis défavorable.
Il est d'ailleurs heureux que M. Repentin n'en soit pas arrivé à une notion infra-annuelle parce que, s'il nous avait proposé des amendements par mois, imaginez jusqu'où cela nous aurait entraînés ! Et si M. Ollier avait lui-même prévu une durée de dix ans, nous serions encore là, demain matin, à discuter de ces amendements.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 409 et 502 rectifié, la commission a émis un avis défavorable.
Monsieur Dubois, j'ai déjà longuement évoqué les raisons qui me conduisent à refuser ces amendements. J'espère vous avoir convaincu, ainsi que M. Mercier, sur l'intérêt qu'il y aurait à permettre à des personnes aux revenus modestes de devenir propriétaires. Ce serait le meilleur service que nous pourrions leur rendre.
S'agissant des amendements nos 410, 411, 412, 413, qui visent à modifier la durée de cinq ans pendant laquelle sont assimilés à des logements sociaux les logements financés au moyen d'une aide à l'accession à la propriété, la commission a émis un avis défavorable, que cette durée soit ramenée à un, deux, trois ou quatre ans.
M. Robert Bret. Et à cinq ans aussi ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Enfin, je demande à Mme Létard de bien vouloir retirer l'amendement n° 340 rectifié pour les raisons que j'ai déjà évoquées à propos de l'amendement n° 360 de M. Repentin.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. J'ai bien compris la volonté, qui a été exprimée par les uns et les autres, d'aider nos concitoyens aux revenus les plus modestes. Pour autant, vouloir aider ces personnes à devenir propriétaires ne signifie aucunement que l'on stigmatise le statut de locataire, qui est des plus honorables, et que personne ici, en tout cas pas le Gouvernement, ne souhaite diaboliser.
À propos du plafond de ressources, je peux d'ores et déjà prendre l'engagement qu'il sera inférieur au plafond de ressources pris en compte dans l'article 55 pour les logements locatifs sociaux. Pour être clair, ce plafond de ressources sera, dans tous les cas, inférieur à celui des PLS.
J'en viens aux différents amendements.
Je ferai une réponse commune pour les amendements nos 22, 401, 403, 466 et 300 rectifié, auxquels le Gouvernement est défavorable.
En effet, l'ensemble de ces amendements tendent à supprimer l'amendement Ollier adopté par l'Assemblée nationale assimilant à des logements locatifs sociaux pendant cinq ans, d'une part, les logements sociaux vendus à leurs occupants, et, d'autre part, les logements neufs en accession sociale sous plafonds de ressources.
L'amendement Ollier constitue une prise en compte très ciblée de l'accession à la propriété dans l'inventaire des logements sociaux détaillé à l'article 55. En aucun cas, il n'exonère les communes qui n'ont pas atteint le seuil de 20 % de leur obligation de construire des logements locatifs sociaux puisque l'assimilation est temporaire sur cette fameuse durée de cinq ans dont on a tant parlé.
Les plafonds de ressources de l'amendement Ollier seront, comme je viens de le dire, nécessairement inférieurs à ceux des PLS.
De plus, pour l'accession très sociale, les mensualités versées par l'accédant - il me paraît important de le rappeler - sont souvent inférieures au loyer qu'il supporterait en logement locatif social. Donc, l'assimilation de son logement à un logement locatif social au titre du décompte de l'article 55 n'est pas totalement anormale.
En ce qui concerne l'amendement n° 402 sur l'EPCI, je partage totalement l'avis du rapporteur. J'y suis donc défavorable.
L'amendement n° 360 prévoit d'appliquer l'amendement Ollier sur l'assimilation de l'accession sociale aux logements locatifs sociaux de l'article 55 uniquement dans les communes qui disposeraient de plus de 30 % de logements sociaux. Ce décompte de l'accession nous semble à la fois ciblé et temporaire. Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Dans l'amendement n°404 se retrouve la même idée de supprimer, dans l'amendement Ollier, la prise en compte pendant cinq ans des logements sociaux. La vente de leur logement HLM aux locataires est incontestablement une forme, certes minoritaire, de l'accession sociale à la propriété. Il faut permettre tant aux communes qu'aux organismes HLM qui veulent recourir à cette formule de pouvoir le faire sans être financièrement pénalisés par une augmentation du prélèvement prévu par l'article 55. Dans ces conditions, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'amendement n° 369 rectifié de M. Revet vise à assimiler les logements en accession sociale à la propriété à des logements locatifs sociaux pendant toute la durée du remboursement du prêt.
Si, évidemment, on comprend cette volonté d'aider nos concitoyens à devenir propriétaires, on peut aussi mesurer qu'une telle disposition induirait un effet de blocage sur une période assez longue, puisque ces prêts peuvent s'étendre sur vingt ou trente ans. Par conséquent, l'adoption de cette proposition conduirait à dissuader durablement les communes qui sont sous le seuil de 20 % de réaliser de nouveaux logements sociaux. Or nous avons grandement besoin d'une rotation plus rapide.
La durée de cinq ans est par ailleurs compatible avec la nécessaire reconstitution de l'offre locative sociale dans le cas de la vente HLM. C'est pourquoi, comme l'a déjà fait le rapporteur, je vous demande, monsieur Revet, de bien vouloir retirer cet amendement.
En ce qui concerne les amendements nos 405, 406, 407 et 408 visant à ramener le délai de cinq ans à un, deux, trois ou quatre ans suivant les amendements, je dirai que la durée de cinq ans est celle qui nous paraît la plus compatible avec la reconstitution de l'offre locative sociale. Pour autant, comme M. le rapporteur, le Gouvernement est preneur - pourquoi pas ? - d'une solution « clé en mains » en un an. À défaut d'une telle solution, le Gouvernement est défavorable à cette série d'amendements.
Les amendements identiques nos 409 et 502 rectifié visent à supprimer une disposition de l'amendement Ollier alors que celui-ci n'exonère en aucune façon les communes sous le seuil de 20 % de leur obligation de construire de nouveaux logements locatifs sociaux. On peut également relever que la prise en compte très ciblée de l'accession sociale à la propriété de logements neufs dans l'inventaire de l'article 55 peut contribuer à favoriser cette mobilité à l'intérieur du parc HLM. Ceux qui quittent le parc HLM permettent à d'autres d'y entrer.
La suppression du décompte de l'accession sociale à la propriété de logements neufs pendant cinq ans dans l'inventaire de l'article 55 nous paraît négative en termes de reconstitution de l'offre locative. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
En ce qui concerne la série des amendements nos 410, 411, 412, et 413, je tiens encore une fois à rappeler que l'amendement Ollier n'exonère nullement les communes sous le seuil de 20 % de leur obligation de construire de nouveaux logements locatifs sociaux.
Pour cette raison, alors même que cette mesure est susceptible de favoriser la mobilité à l'intérieur du parc locatif, donc de rendre le droit au logement plus effectif pour un certain nombre de demandeurs, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Enfin, à propos de l'amendement n° 340, qui tend à porter le seuil à 30 %, je répéterai que la prise en compte à la fois ciblée, équilibrée et temporaire de l'accession sociale dans l'inventaire de l'article 55 n'exonère en aucune façon les communes concernées par la loi SRU de leur obligation de construire de nouveaux logements sociaux. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote, sur les amendements identiques nos 22 et 401.
M. Jean-Pierre Sueur. Je souhaite revenir sur l'intervention qu'a faite notre collègue M. André tout à l'heure.
Monsieur André, vous avez terminé votre propos en disant - je pense ne pas trahir votre pensée - que vous étiez contre les ghettos. Vous l'aviez commencé en exprimant toutes les réserves que suscitait de votre part le seuil de 20 %, qui, selon vous, conduirait à des logiques de « ghettoïsation »
Votre raisonnement m'étonne véritablement.
C'est précisément parce qu'il y a des quartiers en voie de ghettoïsation qu'a été instaurée la règle des 20 %. Si la mixité sociale se faisait naturellement, spontanément, par le jeu du marché, par l'addition des choix individuels des différents acteurs, il n'y aurait pas eu besoin de la loi SRU. Il n'y aurait pas eu besoin d'édicter ce pourcentage de 20 %. C'est parce que nous risquons la ghettoïsation qu'il est impératif de mettre en oeuvre la règle des 20 %, si bien que celle-ci est d'ailleurs devenue un symbole.
Elle est le symbole de la mixité sociale que nous devons réaliser et pour laquelle toutes les communes doivent faire effort en accueillant les familles dont les revenus sont modestes. C'est très clair, c'est la loi.
Et précisément parce que cette loi est tellement justifiée, tellement nécessaire, il ne faut pas donner le sentiment qu'on va l'affaiblir, la remettre subrepticement en cause, la contourner. L'adoption de l'amendement Ollier a été perçue, par tous ceux qui oeuvrent dans le domaine du logement social, comme une sorte de réticence à l'égard de ces 20 %. Toutes les associations, les nombreuses personnes que nous avons entendues sur ce sujet l'ont perçue ainsi.
Dès lors, vous ne gagnerez rien à maintenir ce texte, parce que vous ne réussirez pas à expliquer cette réticence, pas plus que vous ne pourrez continuer à tenir le discours selon lequel vous êtes pour les 20 %.
L'accession sociale à la propriété conforterait les 20 % ? Quelle plaisanterie !
Lors de la première lecture de ce texte au Sénat, il n'a pas été question de l'accession à la propriété...
Mme Sylvie Desmarescaux. J'avais présenté un amendement sur cette question !
M. Jean-Pierre Sueur. ...dans ce cadre-là, madame Desmarescaux : on en a parlé à propos d'autres articles. Or, depuis cet après-midi, on ne parle que de cela, comme si le problème crucial du logement en France était soudain devenu celui de l'accession à la propriété !
Nous sommes prêts à parler de l'accession à la propriété, mais le fait de se servir de l'accession à la propriété pour remettre en cause ce symbole fort de la mixité que constituent les 20 % est un choix politique déplorable.
En tout cas, vous ne parvenez pas à soutenir le raisonnement censé justifier cette mesure, et si d'aventure celle-ci était mise en oeuvre, elle ouvrirait une brèche considérable dans une action qui est aujourd'hui un impératif dès lors qu'on veut éviter la constitution de ghettos.
Certains élus ou certains opérateurs présentent cette règle des 20 % comme une catastrophe, une calamité ; j'entends des discours qui ont cette tonalité. Mais ils ne correspondent en rien à la réalité : les logements sociaux que nous construisons aujourd'hui sont des logements de qualité, qui s'intègrent bien dans les villes et les quartiers. Et c'est une chance que de vivre ensemble !
Voilà le discours que nous devons tenir.
Alors, arrêtez avec cette histoire d'accession à la propriété qui vient gravement polluer et la forme et le fond du débat !
Je suis persuadé que l'ensemble de cette assemblée sortirait grandie si nous en finissions avec cette disposition en votant les amendements de suppression, ce qui nous permettrait de revenir, comme ce fut le cas lors de la première lecture au Sénat et pour les raisons fondamentales que nous avons exposées, à la loi SRU dans sa rédaction actuelle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Je voudrais revenir en particulier sur l'exemple des logements du parc social construits dans les années soixante-dix.
Ma commune fait partie de celles de l'agglomération tourangelle où ils sont très nombreux. Y ayant moi-même vécu pendant vingt-deux ans, je crois pouvoir dire que je connais bien les logements de ce type.
Vous prétendez que ce sont des lieux où les gens ne bougent plus et ont envie de devenir propriétaires. Je ne vis sans doute pas dans les mêmes lieux que vous ! En tout cas, je ne connais pas les mêmes exemples que vous. En effet, les gens qui habitent ces logements sociaux des années soixante-dix, qui y vivent encore après que tous ceux qui y résidaient au début des années soixante-dix ont dû le quitter à cause de l'application du plafond de ressources qui a commencé à détruire la mixité sociale existante, y restent faute d'avoir les ressources suffisantes pour payer les loyers des nouveaux logements sociaux.
Demandent-ils à devenir propriétaires ? La question est beaucoup plus complexe : ils se demandent quelles seront leurs obligations en termes d'entretien et de remise en état et quel sera le niveau des charges, s'ils achètent leur logement, sachant qu'il est vieux de trente ans et que le parc social doit, aujourd'hui, assumer de lourdes obligations pour se mettre aux normes.
Il ne faut donc pas leurrer l'opinion en lui faisant croire que la grande ambition de ce texte, intitulé « engagement national pour le logement », est d'inviter les gens à devenir propriétaires de leur logement social. C'est se moquer du monde que de le prétendre et c'est encore se moquer du monde que de vouloir intégrer les logements ainsi rachetés par leurs locataires dans le quota des 20 % de logements sociaux.
J'ai vraiment l'impression de vivre dans d'autres lieux !
M. Gérard Delfau. C'est peut-être le cas !
M. Dominique Braye, rapporteur. Sûrement !
Mme Marie-France Beaufils. En effet, on ne sait jamais ! Il faut dire que ma commune compte 42 % de logements sociaux, ce qui n'est probablement pas le cas des communes de certains élus...
M. Dominique Braye, rapporteur. J'en ai 51 % dans la mienne !
Mme Marie-France Beaufils. Par ailleurs, il existe aujourd'hui une demande de logement social dont nous n'avons pas parlé. Les personnes âgées sont maintenant plus nombreuses et certaines d'entre elles, percevant une pension de retraite relativement modeste, ne peuvent plus assumer la charge financière que représente la propriété d'une maison, parfois avec jardin, ou même d'un appartement ; elles souhaitent donc avoir accès à un logement locatif. Le parc de logement social répond donc, là encore, à un besoin.
La proposition de M. Ollier avait, selon moi, pour seul objectif de contourner la règle des 20 % de logements sociaux, sans apporter la moindre réponse aux besoins qui sont aujourd'hui ceux des habitants de l'ensemble de nos communes.
En revanche, je ne saurais vous dire combien d'habitants de communes n'abritant pas ces 20 % de logements sociaux viennent s'installer dans les nôtres parce que l'offre en la matière y est plus large. Nous sommes en permanence saisis de telles demandes !
J'entends bien le raisonnement de Mme Desmarescaux quand elle explique que, si les gens ne peuvent pas acheter les maisons plus anciennes qu'ils occupent, ils ne pourront a fortiori pas en acheter de nouvelles. Mais, de toute façon, cet article ne résout en rien le problème : il y a cinq ou six ans, il était déjà possible de s'engager dans la construction de nouveaux logements sociaux et, si les logements existants ne permettent pas d'atteindre les 20 % alors que l'on envisage de vendre une partie du parc, c'est bien qu'il faut construire davantage pour anticiper la vente.
Je pense donc sincèrement que tous les prétextes qui nous ont été présentés pour sortir de la règle des 20 % ne servent qu'à justifier le refus de diversifier et d'augmenter l'offre de logement, notamment de logement social, dans un certain nombre de communes qui, aujourd'hui, n'atteignent pas le seuil de 20 % de logements sociaux.
J'ajoute que la mixité dans le parc de logement social ne pourra s'instaurer que si l'on améliore le revenu des locataires. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. André Vézinhet, pour explication de vote.
M. André Vézinhet. Je dois dire que j'ai un peu le sentiment de revivre, à quelques jours d'intervalle, ce que j'ai vécu dans cette assemblée lorsque, à propos de la loi sur l'égalité des chances, nous avons débattu du CPE. Nous aurions pu dire, à gauche, que nous ne voulions pas en entendre parler. Au lieu de cela, nous avons joué le jeu du travail parlementaire, du moins ici puisque, à l'Assemblée nationale, l'application de l'article 49-3 ne l'avait pas permis.
M. Philippe Dallier. C'est faux !
M. André Vézinhet. Et, pour tenter d'améliorer ce dispositif, nous avons déposé quatre-vingt-quatre amendements, auxquels se sont ajoutés quelques amendements du groupe UC-UDF. Tous ont été repoussés, pratiquement sans discussion.
M. Philippe Dallier. C'est encore faux !
M. André Vézinhet. Aujourd'hui, nous visons un objectif vers lequel se tournent tous les regards parce qu'il répond à un impérieux besoin : la construction de logements sociaux.
Pour obtenir les avancées consenties par la loi SRU nous avons dû nous livrer, ici comme à l'Assemblée nationale, à un véritable parcours du combattant. Les remettre aujourd'hui en cause, c'est de nouveau braquer les feux de l'actualité sur la façon dont nous traitons ce problème social, qui est éminemment important pour les Français.
La dignité de citoyen tient essentiellement à deux conditions : l'emploi et le logement. Seule leur réunion permet à certains de retrouver cette dignité à laquelle, aujourd'hui, nombre de nos concitoyens ne peuvent prétendre parce qu'ils sont privés de logement.
Il est donc choquant de « mégoter » en grignotant sur les pourcentages, en agitant le miroir aux alouettes de l'accession à la propriété. Qui ne veut pas devenir accédant à la propriété ? Il suffit d'aller, comme nous l'avons fait, comme vous l'avez peut-être fait, interroger les habitants des cités ! Croyez-vous qu'il s'en trouvera un pour vous répondre qu'il ne souhaite pas devenir propriétaire ? La réponse est aussi prévisible que si vous leur demandiez s'ils seraient d'accord pour cesser de payer des impôts...
Je ne comprends donc pas comment nous pourrions refuser de voter ici, solidairement, que nous soyons de droite ou de gauche, des amendements qui servent une grande cause. Il est impossible de revenir sur un pareil acquis !
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Il est des sujets - à l'exemple du texte auquel André Vézinhet vient de faire référence et qui est aujourd'hui largement discuté dans la rue - sur lesquels la représentation parlementaire est parfois en complet décalage avec nos concitoyens, voire avec les élus sur le terrain.
M. Dominique Braye, rapporteur. Et les chefs des partis ?
M. Thierry Repentin. Ainsi, lorsqu'on demande à nos concitoyens leur avis sur la loi qui vient d'être promulguée, mais qui ne sera pas appliquée, ils manifestent leur désaccord.
Si je le dis, c'est qu'il ressort des sondages publiés au cours des trois derniers mois, y compris par le premier producteur de « logements de Robien », dont je ne citerai pas le nom pour ne pas lui faire de publicité, qu'entre 62 % et 68 % des maires et des Français interrogés estiment que la règle des 20 % de logement sociaux est la meilleure solution pour assurer la mixité sociale.
Nos concitoyens et les maires ont-ils tort ? Non, ils ont leur propre analyse, qui est peut-être différente de la nôtre. Quoi qu'il en soit, il se trouve une nette majorité de praticiens, les maires, et de simples acteurs de la vie quotidienne, nos concitoyens, pour parler d'une même voix. Dès lors, peut-on, sur la base d'expériences individuelles, remettre en cause une opinion aussi largement partagée ? La loi ne résulte pas de l'addition de quelques cas particuliers dont nous, parlementaires, pouvons avoir connaissance ; la loi doit aussi tenir compte de l'avis de nos concitoyens et de l'avis de ceux qui la mettent en application.
Par ailleurs, nous nous plaignons tous de l'absence de rotation dans le parc de logements HLM parce que, de ce fait, les commissions d'attribution ont de plus en plus de difficultés à répondre aux nouvelles demandes, ce qui explique d'ailleurs que de 1,3 million à 1,4 million de familles vivent dans l'attente d'un logement.
Il faut être conscient que, si nous favorisons la vente de logements HLM, l'accès à la propriété séduira surtout les familles qui vivent depuis longtemps dans le parc. Ce sont d'ailleurs ces mêmes familles, dont les enfants sont partis, que nous démarchons, escalier après escalier, pour les inciter, grâce à un arrangement local, à prendre un appartement plus petit et à libérer ainsi de la place pour les familles nombreuses.
Inutile de dire qu'en favorisant l'accession à la propriété du logement « habité » nous réduirons encore un peu possibilités offertes aux familles nombreuses à la recherche de grands logements puisque nous aurons installé durablement, en quelque sorte ad vitam aeternam, le couple dont les enfants habitent désormais ailleurs, le célibataire ou l'époux resté seul après le décès de son conjoint.
Enfin, je tiens à dire que la loi SRU a fixé, non pas un plafond, mais un plancher de 20 %. Pourquoi ce taux minimum ? Parce que, au moment de l'adoption de la loi SRU, en décembre 2000, la moyenne des logements sociaux en France était, dans les agglomérations, précisément de 20 % : personne n'a donc rien inventé !
Sans doute, dans certaines agglomérations, ce plancher est-il même trop bas. C'est pourquoi nous défendrons des amendements tendant à donner au représentant de l'État la possibilité de dépasser ce seuil dans les communes où la situation est très tendue.
J'ajoute que ce pourcentage doit être mis en perspective avec la vie et le revenu de nos concitoyens. Ne l'oublions pas, alors que 65 % d'entre eux peuvent prétendre à un logement social et sont en droit de nous le réclamer, nous ne leur en proposons, nous ne leur en assurons que 20 % du nombre total de logements !
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.
M. Pierre Hérisson. Notre collègue Thierry Repentin vient de faire état de statistiques, et je pense qu'il convient de les relativiser. La France, dois-je le rappeler, comprend 36 700 communes, dont 35 000 comptent moins de 3 500 habitants. Par conséquent, 82 % du territoire ne sont pas concernés par le taux de 20 % de logements sociaux.
Quant au grand spécialiste de l'application de la loi de Robien en France, je pense qu'il exploite des statistiques reposant sur des données fournies par l'ensemble des élus du territoire. Ces statistiques doivent donc être maniées avec grande précaution.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je vais vous faire une confidence : je ne me serais pas battu pour défendre l'amendement Ollier. Pour autant, je ne voterai certainement pas ces amendements de suppression !
Vous en appelez à la raison. Je crois être quelqu'un de raisonnable, mais, à vous écouter, chers collègues, je me demande si vous l'êtes ! Au cours des nombreuses heures que nous avons passées ici en première lecture, il a été dit et répété que les communes qui n'atteignent pas le seuil de 20 % de logements sociaux n'étaient pas nécessairement des communes riches, contrairement à ce que prétendait tout à l'heure encore M. Desessard. Je croyais que vous l'aviez compris ! Or nous entendons de nouveau, en deuxième lecture, le même discours, la même caricature !
De ma formation de « matheux », j'ai retenu un principe simple : il est souvent difficile de démontrer que quelque chose est vrai ; en revanche, pour démontrer que quelque chose est faux, il suffit de trouver un contre-exemple. Des contre-exemples, nous en avons cité, et je vous mets encore au défi de démontrer que ma commune est riche parce qu'elle n'abrite pas 20 % de logements sociaux !
Pourtant, vous persistez dans la caricature et vous invoquez les sondages : 62 % des Français seraient d'accord avec l'objectif de 20 % de logements sociaux. Moi aussi, je suis d'accord avec cet objectif ! Le problème, c'est que l'article 55 de la loi SRU, auquel vous tenez comme à la prunelle de vos yeux, est particulièrement injuste ! Mais vous n'en démordez pas, vous ne voulez pas évoluer, vous êtes aveuglés !
Mme Michelle Demessine. Ce qui est injuste, c'est qu'il n'y ait pas assez de logements sociaux !
M. Philippe Dallier. Il en va de même pour le contrat première embauche : vous êtes décidément passés maîtres dans l'art de faire prendre des vessies pour des lanternes ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Christian Cambon. Très bien !
M. Philippe Dallier. Vous avez fait croire aux jeunes que le CPE était synonyme de précarité. Pour ma part, je considère que 23 % de jeunes au chômage et 55 % en CDD, en stage ou en intérim représentent une plus grande précarité ! (M. Jean-Marc Todeschini proteste.)
Mme Michelle Demessine. Vous ne les avez pas convaincus !
M. Philippe Dallier. Mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition, puisque vous versez aujourd'hui de nouveau dans la caricature, je vous y laisse ! (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Le sujet est trop important pour qu'on emploie des mots à mes yeux excessifs. (M. Philippe Dallier s'exclame.)
Au terme de ce long débat, je voudrais dire que la faiblesse de l'argumentation de M. le rapporteur, la brièveté et le caractère allusif des interventions de Mme la ministre nous confortent dans l'idée que, au fond, vous regrettez la position sage que le Sénat avait prise en première lecture de ne pas toucher au quota de 20 % inscrit dans la loi SRU.
Paradoxalement, nous débattons depuis le début de l'après-midi pour 800 communes qui ne respectent pas l'article 55 de ladite loi. Ces communes ont pourtant vingt ans devant elles pour se mettre en règle et, chers collègues Philippe Dallier et Sylvie Desmarescaux, nous avons collectivement admis qu'il pouvait y avoir des exceptions, comme il y en a à toute règle. Nous souhaitons simplement que ces exceptions soient traitées dans un souci de réalisme et d'équité.
Mais le problème n'est pas là, du moins pour ceux d'entre vous qui s'expriment parfois avec véhémence : vous voulez sauver les quelques dizaines de hiérarques de droite qui, poussés par - ou poussant - leur population très ciblée, ne veulent en aucun cas respecter un principe qui est finalement entré dans l'opinion publique !
C'est dommage pour le pays, mais aussi pour le secteur associatif qui se dévoue pour le logement social. Le retentissement sera en effet considérable dans les municipalités.
Chers collègues de la majorité, la symbolique est si forte que ce vote pourrait bien avoir un effet équivalent à celui de la baisse de l'impôt sur les grandes fortunes en 1996 : la même logique vous guide, elle aura le même impact politique ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Bien entendu, je ne retirerai pas mon amendement, car, selon moi, la notion d'équilibre est essentielle en matière de logement. Sur cette question, j'essaie toujours de faire prévaloir la raison et, je le répète, le fait de prévoir deux logements locatifs sociaux pour un total de dix logements me semble correspondre à un juste équilibre.
J'ai bien compris ce que disait M. Philippe Dallier au sujet des communes qui, pour des raisons indépendantes de leur volonté, n'arrivent pas à atteindre l'objectif des 20 %. Des amendements ont été déposés pour que ces problèmes puissent être traités dans le cadre d'une commission départementale.
J'adhère pleinement aux propos de notre collègue Pierre André : la mixité n'existe plus dans certains quartiers et il faut retrouver de la diversité, notamment par le biais de la vente de logements aux locataires. Le président de notre groupe, M. Michel Mercier, l'a dit tout à l'heure, nous n'y sommes pas du tout hostiles.
En revanche, nous sommes résolument opposés à la remise en cause de l'équilibre de l'article 55 de la loi SRU, à son fondement même, par l'intégration de la construction de logements sociaux en accession à la propriété. Cela ne correspond pas à l'équilibre sociologique des collectivités, à leur vie même. Franchement, j'ai du mal à imaginer comment une commune peut fonctionner sans logement locatif social !
Je vais réaliser sept logements sociaux dans une commune rurale de 300 habitants, et avec bien des difficultés, car je peine à convaincre certains collègues que les communes rurales doivent bénéficier des mêmes avantages que les communes urbaines.
N'oublions pas qu'il faut de toute façon réaliser des équipements publics, qu'il y a des jeunes qui ne peuvent accéder à la propriété : c'est dans la perspective d'une cohérence globale de la vie de la commune qu'il faut envisager ces 20 % de logements locatifs sociaux. Nous pouvons en convenir honnêtement, cela correspond à l'équilibre nécessaire d'une vraie vie en communauté. Nous pourrions sans doute faire mieux, mais, en tout état de cause, si nous faisions moins, nous ne répondrions pas aux attentes des populations de nos communes ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Je voudrais réagir brièvement à l'intervention de M. Philippe Dallier. Qui se sent morveux se mouche ! Certaines communes n'abritent que des pavillons et n'ont aucun logement collectif sur leur territoire. Alors, que l'on ne vienne pas nous donner des leçons !
Dans une démarche républicaine, j'invite mes collègues de droite à voter ces amendements de suppression, afin de respecter l'engagement solennel pris par le Président de la République au mois de novembre dernier. Au-delà des grandes déclarations, je les enjoins de passer à la pratique et de conserver l'article 55 de la loi SRU dans toute son intégrité. Peut-être vont-ils se reprendre !
M. Philippe Dallier. Je me sentirais « morveux » de ne pas appeler mon collègue à plus de correction !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 22 et 401.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 161 :
Nombre de votants | 296 |
Nombre de suffrages exprimés | 296 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 149 |
Pour l'adoption | 128 |
Contre | 168 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 402.
M. Thierry Repentin. La discussion qui vient de se dérouler a bien mis en relief deux conceptions politiques différentes quant à ce qu'il semble nécessaire de faire pour répondre à la demande de logement de nos concitoyens.
Avec l'amendement n° 402, j'ai le sentiment qu'il s'agit entre nous d'une incompréhension technique et non d'une divergence politique.
Selon le texte actuel du projet de loi, il est institué un guichet unique « dans les communes qui le souhaitent ».
Je l'ai déjà dit, cette disposition n'a pas de caractère normatif et, par conséquent, elle n'a pas forcément sa place dans un texte de loi. Si le législateur veut néanmoins l'inscrire, nous en prenons acte.
Il reste que cette disposition ne peut s'appliquer qu'aux communes qui ne sont pas membres d'une intercommunalité ayant pris la compétence logement. En effet, d'après la loi de 1999 sur l'intercommunalité, que le Sénat a votée, l'intercommunalité fonctionne sur le principe de spécialité. Dès lors qu'une compétence est transférée, elle l'est complètement. Cela signifie qu'une municipalité faisant partie d'un EPCI doté de la compétence logement ne peut plus, en droit, mettre en place des actions en matière de logement.
Il se pourrait donc très bien qu'une commune souhaite effectivement se voir dotée d'un guichet unique sans avoir le droit de le demander puisqu'une telle demande doit émaner de l'intercommunalité !
En conséquence, si les mots « ou les établissements publics de coopération intercommunale » ne sont pas inscrits après les mots « les communes », ce projet de loi n'ouvrira pas la possibilité aux EPCI qui le souhaiteraient - et il y en aura sûrement - de mettre en place un guichet unique logement. Pourquoi les priver de cette capacité en la réservant aux communes ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 403 et 466.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 162 :
Nombre de votants | 296 |
Nombre de suffrages exprimés | 296 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 149 |
Pour l'adoption | 127 |
Contre | 169 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 300 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 360.
M. Thierry Repentin. Si cet article est adopté en l'état par le Sénat, les logements vendus à leurs occupants pourront désormais être comptabilisés dans le quota des 20 % de logements sociaux.
M. Pierre Hérisson. Vous avez dit qu'il n'y en avait pas assez !
M. Thierry Repentin. Il y en a effectivement relativement peu !
Dans la suite logique de notre argumentation, nous souhaiterions donc que cette possibilité, puisque tel est le souhait du législateur, soit exclusivement réservée à des communes ayant, par le passé, joué le jeu de la solidarité.
Pour cette raison, nous proposons de limiter cette possibilité aux communes qui disposent d'au moins 30 % de logements sociaux. De la sorte, déduction faite des logements locatifs qui auront été vendus, il restera néanmoins une part significative de logements locatifs sociaux. Les habitants de ces communes pourront ainsi espérer accéder un jour au logement locatif ou simplement changer de logement locatif.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 360.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 163 :
Nombre de votants | 296 |
Nombre de suffrages exprimés | 270 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 136 |
Pour l'adoption | 101 |
Contre | 169 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 404.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 164 :
Nombre de votants | 296 |
Nombre de suffrages exprimés | 288 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 145 |
Pour l'adoption | 127 |
Contre | 161 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Monsieur Revet, l'amendement n° 369 rectifié est-il maintenu ?
M. Charles Revet. Je vais, bien entendu, retirer mon amendement. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.).
Vous vous apprêtiez sans doute à le voter, chers collègues !
M. Robert Bret. Sinon à le reprendre ! (Sourires.)
M. Charles Revet. Tout à l'heure a été faite la distinction entre logements locatifs vendus aux locataires et l'accession sociale à la propriété avec plafond de ressources. Dans quelle catégorie, madame la ministre, faut-il placer la location-accession, qui voit le locataire ne devenir propriétaire en titre qu'au terme de ses remboursements ? Est-ce dans la catégorie dite des « cinq ans » ou dans celle des logements locatifs, jusqu'à l'apurement des comptes ?
Ce mode d'accession à la propriété me semble être celui qui sécurise le plus les personnes qui souhaitent devenir propriétaires, en particulier lorsqu'il s'agit de familles modestes, et j'ai cru comprendre qu'il était dans les intentions du Gouvernement de le développer. Il serait donc intéressant, madame la ministre, que vous nous précisiez de quelle catégorie relèvent ces logements.
Mme Michelle Demessine. Cinq ans seulement !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Il ne serait pas illogique que les logements en location-accession sociale soient comptabilisés dans les 20 % pendant la durée de la phase locative, soit quatre à cinq ans en moyenne.
M. Charles Revet. Mais leurs occupants ne sont pas propriétaires ! Ils ne le deviennent qu'au dernier remboursement !
M. le président. L'amendement n° 369 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 405.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 409 et 502 rectifié.
M. Thierry Repentin. Je voudrais insister une nouvelle fois sur les difficultés auxquelles se heurtent aujourd'hui certains maires quand ils veulent construire des logements sociaux. Ils doivent vraiment avoir d'une volonté à toute épreuve ! Dès lors que l'on en émet ne serait-ce que l'idée, avant même que le permis de construire soit signé, on est très largement sollicité par le voisinage immédiat, voire par les habitants des rues environnantes, qui viennent s'inquiéter, se demander si leur propre bien ne va pas être dévalorisé... Qui n'a jamais entendu cela dans sa permanence ?
M. Gérard Delfau. Bien sûr !
M. Thierry Repentin. Que se passera-t-il si nous ne modifions pas cet article 5 bis B, résultant de l'adoption de l'amendement Ollier par l'Assemblée nationale ? Lorsqu'un organisme de logement social opérant également dans l'accession à la propriété signera dans une commune le compromis de vente d'un terrain et que le maire sera lui-même sollicité par certains de ses concitoyens, offusqués qu'il accepte sur son territoire des logements locatifs, l'organisme en question n'aura finalement qu'une réponse à apporter : « Monsieur le maire, si vraiment les logements locatifs sociaux font peur à vos concitoyens, je vous propose de les réaliser en accession à la propriété, ce qui ne vous empêchera pas de les prendre néanmoins en compte dans les 20 % de logements sociaux ! »
M. Gérard Delfau. Eh oui !
M. Thierry Repentin. C'est une solution de facilité qui sera ainsi offerte ! Or, je le rappelle, l'article 55 de la loi SRU visait à encourager la réalisation de logements locatifs sociaux.
Les familles qui viendront habiter les logements en accession à la propriété seront-elles du même type que celles qui auraient occupé les logements locatifs sociaux initialement prévus par l'organisme ?
M. Jean Desessard. Non !
M. Thierry Repentin. Qui pourrait, en son âme et conscience, l'affirmer ? Personne !
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Cet amendement est important parce qu'il nous permet de bien montrer ce que nous voulons vraiment.
Je souhaite en préalable affirmer clairement que nous sommes tout à fait favorables à l'accession sociale à la propriété. C'est même un parcours fréquemment suivi par nos concitoyens : d'abord locataires dans le secteur social, ils souhaitent ensuite pouvoir recourir à l'accession sociale à la propriété et enfin, s'ils le peuvent, s'ils le veulent, changer de logement. Nous ne nourrissons donc pas la moindre hostilité à l'égard de l'accession sociale à la propriété.
Il faut cependant prendre en considération l'ensemble des demandes qu'expriment nos concitoyens. Une grande partie des demandeurs, et c'est heureux, ont déjà un logement, mais désirent en changer parce qu'ils se considèrent comme mal logés. En outre, en dépit de l'effort réel consenti par le Gouvernement ces dernières années en matière de financement du logement social, les demandeurs de logement locatif sont aujourd'hui très nombreux, et ce pour des raisons toutes simples : le prix de la construction, le coût du logement locatif non aidé font que beaucoup de nos concitoyens appartenant aux classes moyennes n'ont plus accès à ce secteur.
Si l'on rapporte le nombre de logements sociaux dans les communes de plus de 3 500 habitants au nombre total de logements dans ces mêmes communes, on arrive grosso modo à la proportion de 20 % pour ces derniers. Le problème n'est donc pas seulement de savoir combien de logements supplémentaires il faut construire : c'est véritablement celui de notre « vivre-ensemble » qui est posé. Sommes-nous capables, dans ce pays, de vivre ensemble même sans avoir le même niveau de revenu, les mêmes façons de vivre ? Devons-nous au contraire nous répartir dans des communautés que séparent l'argent ou bien d'autres critères ? C'est là une vraie question, et nous devons y répondre.
Pour notre part, nous demeurons fidèles au modèle social français, qui nous conduit à vivre ensemble quels que soient notre origine, notre culture et notre niveau de revenu. C'est la raison pour laquelle nous estimons qu'il nous faut aller vers cette proportion de 20 % et implanter des logements sociaux partout.
Il est indéniable que certaines municipalités rencontrent des difficultés réelles dont il faut que nous sachions tenir compte : une commune peut ne pas avoir de terrains disponibles en raison de la présence de monuments historiques, des caractéristiques du sous-sol, etc. Certains cas particuliers doivent êtres considérés comme tels, et j'espère bien que l'amendement que nous présentera tout à l'heure le rapporteur, au nom de la commission, au sujet de la création de la commission départementale déjà évoquée nous permettra de résoudre ce problème.
L'amendement adopté par l'Assemblée nationale et qui est devenu l'article 5 bis B se divise en deux parties.
La première concerne le guichet unique, et le rapporteur a signalé tout l'intérêt qu'elle présente, même si l'on n'est pas tout à fait sûr du caractère législatif de cette disposition. Nous verrons si le Conseil constitutionnel veut se prononcer sur cette question.
La seconde partie vise à définir les logements sociaux à comptabiliser au titre des 20 %. À cet égard, deux idées sont retenues.
Constitueraient d'abord des logements entrant dans les 20 % les logements sociaux anciens dont les locataires veulent se porter acquéreurs : c'est le cas qu'évoquait tout à l'heure Mme Desmarescaux. Nous sommes tout à fait d'accord pour considérer que ces logements-là doivent entrer dans les 20 %.
Sont ensuite visés les logements nouveaux en accession sociale à la propriété - à laquelle, je le répète, nous sommes tout à fait favorables - dont le financement et la construction seraient effectifs après le 1er juillet 2006.
Est-il besoin de rappeler ce qu'est aujourd'hui dans notre pays la demande de logements sociaux ? Est-il besoin de dire combien il est urgent d'y répondre ? Je note d'ailleurs, madame la ministre, que le Gouvernement consacre beaucoup de crédits à la construction de logements locatifs sociaux. Mais il faudrait qu'il nous dise en même temps où seront implantés ces nouveaux logements sociaux ! On ne va quand même pas les construire dans les communes qui comptent déjà 40 %, voire 50 % de logements sociaux !
M. Jean Desessard. Voilà !
M. Michel Mercier. Ce serait vraiment se créer de nouveaux problèmes !
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Michel Mercier. Le Gouvernement ne peut pas à la fois mener une politique de construction de logements locatifs sociaux et ne pas dire où il va les installer !
M. Jean Desessard. Bravo !
M. Michel Mercier. Je suis sûr, madame la ministre, que, dans un souci de mixité sociale, vous préféreriez, comme le disait tout à l'heure M. Pierre André, les construire dans les communes où il y a moins de logements sociaux.
À travers notre amendement n° 502 rectifié, nous reconnaissons donc que le Gouvernement fait un effort considérable en faveur de la construction de logements sociaux - un effort tel qu'il y en a rarement eu auparavant -, mais nous disons que ces logements sociaux, il faut bien les installer quelque part. Nous sommes tout à fait d'accord pour aider les locataires qui veulent acheter, mais on ne peut pas faire entrer dans le seuil de 20 % des logements qui ne relèvent pas du domaine social.
Cet amendement nous semble être un amendement de bon sens, à la fois efficace et respectueux du modèle social français, car, s'il n'y avait pas ce seuil de 20 %, l'effort du Gouvernement en matière de financement ne serait qu'un voeu pieux. Nous souhaitons, quant à nous, qu'il devienne une réalité. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et sur certaines travées du RDSE. - Marques d'approbation sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote.
M. Pierre Jarlier. Nous avions adopté ici en première lecture, après un long débat, une position de sagesse en maintenant l'architecture de l'article 55 de la loi SRU. J'avais d'ailleurs soutenu cette position d'équilibre en tant que rapporteur pour avis de la commission des lois.
Il avait même été convenu qu'en deuxième lecture, grâce à la contribution d'un groupe de travail, nous pourrions proposer, d'une part, d'assouplir le dispositif pour tenir compte des réalités locales et, d'autre part, de le renforcer pour inciter les communes récalcitrantes à construire des logements sociaux. C'est le sens des amendements que proposera la commission des affaires économiques et que je soutiendrai.
L'amendement de M. Ollier qu'a adopté à l'Assemblée nationale vise en particulier à atteindre plus facilement le seuil de 20 % de logements sociaux, sans pour autant augmenter l'offre locative sociale, en intégrant l'accession sociale à la propriété.
Il a une double conséquence : d'une part, il augmente la part des logements en accession sociale, ce qui, sur le fond, est plutôt positif et à quoi on ne peut qu'être favorable, mais, d'autre part, il diminue en valeur absolue l'offre locative dans la commune, ce qui aura pour effet de ralentir le rythme de construction de ce type de logements à un moment où notre pays en a le plus grand besoin.
En outre, le dispositif prévu imposera à la commune d'augmenter a contrario plus fortement le nombre de logements locatifs au bout de cinq ans pour respecter l'objectif fixé par la loi SRU, puisque le nombre total de logements de la commune augmentera à la suite de l'impulsion donnée à l'accession.
Or, aujourd'hui, la priorité est d'améliorer le plus rapidement possible les conditions de logement des plus démunis, et donc l'offre locative.
Telle est la raison pour laquelle je voterai l'amendement n° 502 rectifié, qui vise à exclure du champ de l'article 55 les logements financés au moyen d'une aide à l'accession à la propriété et à revenir ainsi à l'équilibre du texte initial de la loi SRU. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF. - M. Gérard Delfau applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Ces amendements identiques sont les plus importants de ceux que nous aurons examinés au cours de la présente séance, car, s'ils sont adoptés, ils feront pratiquement disparaître l'amendement Ollier et ils mettront fin, j'y insiste, à ce qui a été perçu comme une honte par un grand nombre d'acteurs du logement social dans notre pays.
Souvenez-vous des mots que j'ai cités tout à l'heure : « On nous a menti ».
Ce qui est en cause dans cette affaire, c'est l'engagement solennel pris par le Président de la République en faveur de la mixité sociale et pour le logement social.
Mes chers collègues, si vous considérez qu'il faut mettre en oeuvre cette mixité sociale dont la loi SRU et son article 55 sont devenus le symbole, il faut voter ces amendements, quelle que soit votre appartenance politique, car ce sera très important pour l'idée même du logement social dans notre pays et pour la place qui doit être la sienne dans l'ensemble de nos communes.
J'espère donc vivement, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, que ces amendements seront adoptés par notre Haute Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 409 et 502 rectifié.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe UC-UDF.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 165 :
Nombre de votants | 330 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 171 |
Contre | 157 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste du groupe CRC et du groupe UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
En conséquence, les amendements nos 410, 411, 412, 413 et 340 rectifié n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 5 bis B, modifié.
Mme Michelle Demessine. Le groupe CRC s'abstient.
M. le président. La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à la prochaine séance.