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CANDIDATURES À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions relatives au tourisme.
J'informe le Sénat que la commission des affaires économiques m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à cette commission mixte paritaire.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
M. le président. La séance est reprise.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l'auteur de la question de même que le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente. Je veillerai à ce que ce temps de parole soit respecté.
procédure judiciaire à l'encontre de m. georges frêche
M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le 11 février dernier, à Montpellier, (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), le président du conseil régional de Languedoc-Roussillon, M. Georges Frêche,...
M. Raymond Courrière. Et quand Jacques Blanc s'entendait avec le Front national, qu'est-ce que vous disiez ? C'est insupportable !
M. Josselin de Rohan. ...dans l'exercice de ses fonctions et en présence d'un ancien ministre apparemment sourd, muet et passif,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Regardez chez vous !
M. Josselin de Rohan. ... s'est livré à une agression inouïe à l'encontre de nos compatriotes harkis.
M. Raymond Courrière. Parlez-nous du Front national !
M. Josselin de Rohan. Ses propos injurieux et diffamatoires ont emprunté au pire des vocabulaires de sinistre mémoire ! (Signes d'assentiment sur les travées de l'UMP.)
M. Paul Raoult. Comme Sarkozy !
M. Josselin de Rohan. Nous tenons, en cette circonstance, à assurer nos compatriotes harkis, qui ont tant souffert, de notre émotion et de notre solidarité. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Les propos indignes de M. Frêche constituent une offense à l'égard non seulement des harkis, mais aussi de tous les anciens combattants d'Afrique du Nord et de la nation tout entière. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Raymond Courrière. Votre indignation est sélective ! Trop, c'est trop !
M. Josselin de Rohan. Monsieur le garde des sceaux, que compte faire le Gouvernement pour que nos compatriotes harkis obtiennent la réparation du grave préjudice moral qu'ils ont subi ? (Très bien ! et applaudissements prolongés sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les déclarations de M. Georges Frêche, le 11 février dernier à Montpellier, ont profondément blessé les harkis et leurs familles.
M. René Garrec. Pas seulement !
M. Didier Boulaud. Surtout ceux qui ont été abandonnés en 1960 !
M. Raymond Courrière. Et ceux qui ont été égorgés en Algérie ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je partage cette émotion avec l'ensemble des membres du Gouvernement.
Traiter de « sous-hommes » des hommes et des femmes est inacceptable, indigne. Ces propos peuvent contribuer à ce que certains esprits faibles ou pervers justifient leur violence par haine de l'autre.
M. Paul Raoult. Comme Sarkozy, qui veut nettoyer au Kärcher !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Ces propos sont encore plus graves quand ils émanent d'un élu, ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. D'un ministre, par exemple !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. ...d'un président de région qui oublie le respect que les anciens combattants sont en droit d'attendre des élus de la nation parce qu'ils ont risqué leur vie pour la France.
M. Didier Boulaud. C'est de Gaulle qui les a vendus !
Où était la police pour l'affaire Halimi, il y a trois semaines ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Après vous, monsieur de Rohan, je souhaite à mon tour rendre hommage à l'extrême sang-froid, au calme et à la dignité des enfants de harkis face à une telle agression.
M. Raymond Courrière. C'est à vous de garder votre sang-froid !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur de Rohan, vous avez évoqué la loi du 23 février 2005, notamment son article 5. Le législateur a en effet voulu protéger cette composante de la communauté nationale qui est trop souvent l'objet d'agressions ou d'insultes. Les propos de M. Frêche confirment que cette protection était indispensable.
Devant l'intolérable, la démocratie doit se défendre. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Didier Boulaud. Pendant trois semaines, où était la démocratie alors qu'un jeune était torturé ? Où était la police ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. C'est pourquoi j'ai immédiatement saisi, en plein accord avec M. Mékachéra, le procureur général près la cour d'appel de Montpellier afin qu'il examine les qualifications pénales pouvant être retenues et qu'il fasse vérifier la teneur exacte des propos litigieux qui ont été prononcés.
Les premiers éléments qui m'ont été communiqués confirment qu'il y a bien eu infraction. J'ai donc indiqué au procureur général susvisé qu'il lui appartenait de déclencher sans tarder l'action publique contre ceux qui ont pu se croire autorisés à injurier ou à diffamer les harkis.
M. Didier Boulaud. Y compris contre ceux qui se sont pacsés avec le Front national ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je ne doute pas que la justice entendra sanctionner sans faiblesse les faits reprochés à M. Frêche. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
contrat première embauche
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Ma question s'adresse à M. le. Premier ministre.
La pauvreté et l'exclusion gagnent tous les jours un peu de terrain. C'est ce message qu'il faut lire dans la colère qui s'est manifestée d'une manière violente dans les banlieues à l'automne dernier. À cette situation alarmante, vous répondez, monsieur le Premier ministre, par un projet de loi que vous avez l'outrecuidance de baptiser « pour l'égalité des chances ».
Mais que signifie le mot « égalité » quand vous remettez profondément en question l'obligation scolaire jusqu'à seize ans ou quand vous portez de telles attaques au code du travail ?
Quelle conception bizarre avez-vous de l'égalité en installant la précarité de l'emploi, particulièrement chez les jeunes ?
Quel crédit pourra-t-on accorder à une loi votée sans concertation, contrairement aux engagements que vous aviez pris, sans participation des syndicats, des associations, des travailleurs sociaux, des enseignants, des élus qui sont sur le terrain ?
Votre dernière trouvaille, c'est le contrat première embauche, le CPE, qui, rappelons-le, concerne l'entrée des jeunes dans le monde du travail. Ce CPE, vous l'ajoutez au dernier moment, sous forme d'amendement, sans prendre l'avis du Conseil d'État.
Pourquoi donc avoir avancé le débat de quinze jours ? La ficelle est trop grosse : vous vouliez tout simplement que le Parlement débatte de ce sujet pendant les vacances scolaires ! Oh, vous n'en êtes pas à votre coup d'essai, monsieur le Premier ministre, puisque déjà en plein été 2005, par ordonnance, donc sans débat au Parlement, vous avez créé le contrat « nouvelles embauches », le CNE !
Le code du travail est gravement atteint car l'objectif non affiché du CPE, et de son grand frère le CNE, est finalement la disparition du contrat de travail à durée indéterminée pour tous les salariés, je dis bien pour « tous les salariés » !
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. Claude Domeizel. À l'Assemblée nationale, vous avez bâillonné les députés en utilisant une nouvelle fois le fameux article 49-3 de la Constitution. En mettant brutalement fin au débat, vous affichez au grand jour votre conception méprisante de la démocratie sociale et politique ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Vous ne manquez pas d'air !
M. Claude Domeizel. Ici, au Sénat, c'est à la sauvette que sont menés les préparatifs du débat. Ainsi, les auditions se font au pas de charge ; en commission, l'opposition n'obtient aucune réponse à ses questions Le Sénat accepte même de délibérer sans attendre les conclusions de la mission d'information sénatoriale sur les politiques conduites envers les quartiers. Cette mission devient ainsi de la poudre aux yeux.
Hier, pour hâter un peu plus le pas, l'ordre du jour du Sénat a subi un tripatouillage, que nous condamnons.
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Domeizel !
M. Claude Domeizel. Inadmissibles sont ces méthodes qui font fi de la représentation nationale, qui contournent le Parlement !
M. Alain Gournac. La question !
M. Claude Domeizel. Vous avez peur, peur de la rue, peur de l'opposition !
MM. Josselin de Rohan et Alain Gournac. La question !
M. Claude Domeizel. Monsieur le Premier ministre, la précipitation, mais aussi l'absence d'écoute, je dirai même votre incapacité d'écoute, jouent toujours de mauvais tours.
M. le président. Posez votre question, mon cher collègue !
MM. Jean-Claude Carle et Alain Gournac. Coupez !
M. Claude Domeizel. C'est vrai pour le CPE, pour l'apprentissage à quatorze ans, comme c'est vrai pour le désamiantage du Clemenceau.
Jusqu'où irez-vous dans cette escalade du mépris ?
M. le président. Votre question, je vous prie !
M. Claude Domeizel. Nos concitoyens attendent des réponses à la hauteur de la gravité d'une situation que vous avez créée depuis quatre ans. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le sénateur, je n'ai pas vraiment compris quelle était votre question ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Carle. Nous non plus !
M. Claude Domeizel. Je peux la répéter ! Elle s'adresse à M. le Premier ministre !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Entre l'évocation du Clemenceau, du désamiantage, de l'escalade, de la méthodologie sénatoriale, je m'y perds ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
En revanche, je peux vous dire que les jeunes qui sont en butte à des discriminations en matière de logement, d'emploi, en raison de CV trop souvent ciblés, à l'entrée des boîtes de nuit,...
M. Jacques Mahéas. Ils vont l'être en plus dans le domaine du travail !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...ces jeunes qui enchaînent contrats d'intérim et stages attendent des réponses que le projet de loi pour l'égalité des chances prétend apporter.
Mme Hélène Luc. Pas celles que vous donnez !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Ce texte est examiné actuellement par le Sénat. Malgré quelques tentatives un peu compliquées d'obstruction, le débat se poursuit dans la sérénité.
Permettez-moi de remercier, d'une part, M. le rapporteur,...
M. David Assouline. On n'a pas le rapport !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...qui a pu entendre les uns et les autres (Protestations sur les travées du groupe socialiste. - Applaudissements sur les travées de l'UMP.), les organisations de la jeunesse, les syndicats, et, d'autre part, les quatre rapporteurs pour avis...
M. Didier Boulaud. Montrez-nous le rapport !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...qui ont formulé des propositions extrêmement importantes, notamment en matière de discriminations. La commission des lois, en particulier, a déposé des amendements essentiels.
M. Didier Boulaud. Où est le rapport parlementaire ?
M. Didier Boulaud. Donnez-nous le rapport parlementaire ; nous y avons droit !
M. Paul Raoult. Et Sarkozy l'alimente !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Le Premier ministre et le Gouvernement vous proposent, par ce texte, des solutions courageuses, innovantes, dans la droite ligne de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations, dont nous disposons enfin.
M. Robert Del Picchia. Très bien !
M. David Assouline. Le CPE !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. La France est le dernier pays d'Europe à disposer d'une autorité de ce genre ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
chikungunya
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, à l'heure où je vous parle, l'épidémie de chikungunya poursuit son expansion sur l'île de la Réunion et se répand dans les îles voisines. La situation est alarmante.
M. Didier Boulaud. Que fait le Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Payet. Le bilan dressé par l'Institut de veille sanitaire est sans concession : on attribuerait à cette maladie le décès de soixante-dix-sept personnes, dont quatre étaient âgées de moins de vingt ans.
M. Didier Boulaud. Rendez des comptes !
Mme Anne-Marie Payet. Pour autant, le lien direct entre cette maladie virale, transmise par le moustique, et les décès reste mal identifié.
Plus de 130 000 Réunionnais sur 785 000 ont déjà été atteints et la contamination se poursuit au rythme de 25 000 nouveaux cas par semaine.
M. Didier Boulaud. Si nous avions agi comme vous, qu'aurions-nous entendu !
Mme Anne-Marie Payet. Le chikungunya provoque des douleurs physiques insupportables. Les symptômes de la maladie sont dangereux pour la vie des plus faibles et peuvent avoir des incidences psychologiques graves sur les personnes contaminées.
En plus de ces drames humains intolérables, c'est toute l'économie de l'île, déjà très fragile, qui est mise à mal.
En outre, aujourd'hui, la maladie semble évoluer et les contaminations ne diminuent pas, l'éradication des moustiques n'étant pas facilitée par les conditions météorologiques.
Monsieur le ministre, actuellement, le Gouvernement se mobilise pleinement sur ce sujet très préoccupant...
M. Didier Boulaud. Il était temps !
Mme Anne-Marie Payet. ... et près de 9 millions d'euros ont déjà été débloqués pour ce combat. Vous avez annoncé avec le ministre de la recherche, M. François Goulard, le déploiement d'une équipe de chercheurs sur l'île. Nous attendons que vous nous donniez des informations précises sur leur programme de recherche, les axes qui seront privilégiés et les pistes qu'ils comptent exploiter.
En effet, le traitement de la maladie doit impérativement être amélioré en ce qui concerne tant les symptômes que la prévention. Surtout, la maladie est très mal connue, les mécanismes de contamination sont complexes et la violence de l'épidémie a surpris tout le monde.
M. Didier Boulaud. Surtout le Gouvernement !
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le ministre, concernant ce dernier point, nous souhaitons que vous précisiez la liste des mesures d'urgence que vous venez d'annoncer, dans la droite ligne des conclusions de la mission Flahaut. Ainsi, la mise à disposition de répulsifs et de matériels de démoustication est urgente et nécessaire, surtout pour les personnes les plus défavorisées. Aucun Réunionnais ne doit, encore aujourd'hui, être démuni face à l'expansion de la maladie. (Applaudissements.)
M. Didier Boulaud. C'est la faute à qui ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Madame la sénatrice, je tiens, tout d'abord, à souligner le sens des responsabilités avec lequel, chaque fois, les parlementaires de la Réunion s'expriment sur ce sujet.
Mme Nicole Bricq. Cela fait des mois que l'on en parle !
M. Xavier Bertrand, ministre. Ce sens des responsabilités est à la hauteur du courage et de la dignité des Réunionnaises et des Réunionnais face à cette épreuve avant tout humaine. Je tenais à le préciser, comme je l'ai fait à l'Assemblée nationale.
Vous souhaitez que, sur l'île de la Réunion comme en métropole, toute la lumière soit faite et que toute la transparence possible soit apportée sur la réalité de cette épidémie.
M. Yannick Bodin. Cela va être dur !
M. Jacques Mahéas. Il y a du retard à l'allumage !
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous l'avez demandé : c'est le droit élémentaire des Réunionnaises et des Réunionnais que de savoir les choses. M. le Premier ministre a lui aussi souhaité que cette affaire soit traitée avec la plus totale transparence.
Oui, aujourd'hui, nous savons que, contrairement à ce qu'affirmaient les scientifiques, à savoir que le virus de la fièvre chikungunya ne tuait pas, le décès de soixante dix-sept personnes y est lié, directement ou non.
Il faut reconnaître aussi que, même si nous sommes au XXIe siècle, nul, sur la planète, n'en sait plus que nous sur le chikungunya. Nous pourrions faire la même remarque pour la dengue et le virus West Nile aux États-Unis. Nous devons développer notre connaissance et notre compréhension de tous ces virus et de toutes ces maladies émergentes pour pouvoir les combattre plus efficacement.
Cela dit, il n'est pas question d'attendre que l'hiver austral offre un répit aux Réunionnaises et aux Réunionnais. Voilà pourquoi M. le Premier ministre a souhaité que, dès le retour des chercheurs que François Goulard et moi-même avons envoyés en mission, nous nous employions sans délai à continuer ce combat. Il a insisté, notamment, pour que les produits de démoustication soient distribués gratuitement aux personnes les plus fragiles, à savoir les personnes âgées, les femmes enceintes et les nouveaux-nés.
Nous avons, nous, souhaité aller au-delà, en étendant cette mesure aux enfants. En effet, les derniers cas recensés nous amènent à faire plus que ce qui nous a été demandé.
Par ailleurs, je recevrai au ministère, dans une heure et demie, l'ensemble des représentants des laboratoires pharmaceutiques implantés sur notre territoire pour leur demander de chercher, dans toute la pharmacopée existante, des médicaments visant non pas seulement à prendre en charge la douleur - de tels produits sont déjà utilisés - mais également à enrayer l'évolution du chikungunya.
Nous allons aussi mettre en place, notamment sur l'île, tous les moyens qui seront nécessaires, comme nous l'avons fait à chaque fois que cela nous a été demandé depuis le mois d'avril 2005, pour que soient développés les programmes hospitaliers de recherche clinique devant nous permettre de comprendre comment et pourquoi ce virus passe de la mère à l'enfant dans de telles conditions, apparaît, disparaît et revient chez les mêmes personnes en l'espace de quelques semaines.
Les Réunionnaises et les Réunionnais veulent toute la transparence possible ; ils l'ont. Ils font appel à la solidarité nationale : c'est aussi pour cette raison que M. le Premier ministre se rendra en personne, dès la fin de la semaine, sur l'île de la Réunion.
Je tiens, une fois encore, à saluer le remarquable sens des responsabilités dont font preuve les Réunionnaises et les Réunionnais dans l'épreuve qu'ils traversent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
bénéfices des grandes entreprises
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
Cette séance de questions d'actualité au Gouvernement se déroule le jour même où nous commençons l'examen du projet de loi relatif à l'égalité des chances.
Ce projet de loi, dont le titre trompeur sonne comme un slogan publicitaire, contient des mesures de régression sociale,...
M. Josselin de Rohan. Cela commence bien !
Mme Évelyne Didier. ...comme l'apprentissage dès l'âge de quatorze ans, l'abaissement à quinze ans de l'âge légal du travail de nuit pour les mineurs et, surtout, le contrat première embauche, un contrat au rabais pour les jeunes de moins de vingt-six ans qui étend à deux ans la période d'essai durant laquelle le salarié peut être renvoyé sans le moindre motif.
Dans le même temps, les premiers cas de licenciement de personnes sous contrat nouvelles embauches sont intervenus, donnant raison à tous ceux qui ont dénoncé de telles propositions.
M. Robert Hue. Absolument !
Mme Évelyne Didier. C'est l'arbitraire pour les patrons, la précarité pour les salariés et le démantèlement du code du travail.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme Évelyne Didier. Nous aurons l'occasion de nous expliquer sur ce sujet au cours des prochains jours, à moins que le Gouvernement ne trouve un nouvel artifice pour empêcher le débat parlementaire et faire passer ce texte en force. Nous verrons bien !
Cependant, vous ne ferez pas taire les jeunes, en particulier, qui, aujourd'hui et demain, manifesteront contre l'avenir précaire que vous leur réservez.
Mme Hélène Luc. Très bien !
Mme Évelyne Didier. Dans le même temps, des sommes colossales sont versées aux actionnaires, des concentrations se préparent à grands coups d'OPA, annonçant des licenciements massifs dans des domaines comme l'énergie ou les télécommunications. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Pour ne prendre qu'un exemple, Total annonce un bénéfice record de 12 milliards d'euros en 2005, en hausse de 31 %, alors même que le groupe refuse les investissements nécessaires en France et que les consommateurs, dont les revenus n'augmentent pas, paient le carburant au prix fort.
M. Robert Hue. Absolument !
Mme Évelyne Didier. Les profits d'aujourd'hui ne sont plus les emplois de demain.
Comme l'année dernière, les groupes du CAC 40 pulvérisent leurs records financiers, alors que les salaires réels régressent et que les suppressions d'emplois se multiplient.
Aussi, ma question est la suivante : quelles mesures prévoyez-vous afin qu'une part de ces profits soit utilisée pour répartir plus équitablement les richesses créées par l'activité économique ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Madame la sénatrice, vous venez de faire allusion aux bénéfices annoncés par la société Total.
M. Guy Fischer. Entre autres ! Il y a aussi France Télécom.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Ses bénéfices s'élèvent à 12 milliards d'euros. Dans le même temps, Exxon Mobil annonce 30 milliards d'euros, Shell, 25 milliards d'euros, Texaco, 14 milliards d'euros. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Ne devrions-nous pas nous réjouir que des entreprises françaises soient performantes et capables de « relever le challenge », si je puis dire, face aux grandes entreprises américaines ou britanniques ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Comment imaginer notre économie sans cette capacité ?
Mme Éliane Assassi. Et les salariés ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est honteux !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Vous me demandez ce que le Gouvernement envisage « afin qu'une part de ces profits soit utilisée pour répartir plus équitablement les richesses créées par l'activité économique ».
Mme Hélène Luc. Que les salariés participent !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Réaliser des profits importants conduit à se poser les questions suivantes : quelle part pour l'investissement ? Quelle part pour l'actionnaire ?
M. Yves Coquelle. Quelle part pour les salariés ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Quelle part pour les salariés de l'entreprise, qui contribuent à la création de cette richesse ?
M. le Premier ministre a demandé, voilà plusieurs mois, pour ainsi dire dès qu'il a pris ses fonctions, aux ministres du pôle de cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, Thierry Breton et moi-même, de réfléchir à la relance de la participation et de proposer des mesures en ce sens.
M. Guy Fischer. C'est long à venir !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Un texte visant à la relance de la participation sera présenté au Conseil supérieur de la participation dans quelques jours, sous la présidence de M. le Premier ministre lui-même. C'est dire l'importance qu'il y attache.
Il s'articule autour de trois idées.
La première concerne les dividendes du travail et est le fruit à la fois du travail fait ici par notre ancien collègue Jean Chérioux, du rapport de MM. Jacques Godfrain et François Cornut-Gentille et des réflexions du président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, M. Patrick Ollier : les actionnaires devront décider si les profits seront redistribués sous forme de participation ou sous forme d'actions.
Mme Hélène Luc. Il faut investir pour l'emploi !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. La deuxième idée est qu'il faut favoriser l'intéressement de projets et pas seulement l'intéressement financier, car l'intéressement de projets suppose l'association du salarié aux objectifs et aux résultats de l'entreprise. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Enfin, la troisième idée est qu'il faut lancer une réflexion autour de l'actionnariat salarié. Réfléchissons, par exemple, au raid contre la Société générale !
M. Didier Boulaud. Ils ont pourtant ramassé des sous !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le « pacte d'actionnaires salariés » est sans doute l'une des réponses dont nous avons besoin.
Voilà pourquoi M. le Premier ministre a fait de la relance et de la modernité de la participation la vraie réponse moderne à la question du partage des fruits de la croissance. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. David Assouline. Il est énervé ! Calmez-vous ! Il reste une semaine pour l'examen du CPE : il faut tenir !
M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
C'est aujourd'hui la date d'un triste et pénible anniversaire, puisque voilà quatre années, jour pour jour, qu'une de nos compatriotes a été enlevée : c'est, en effet, depuis le 23 février 2002 qu'Ingrid Betancourt, parlementaire de Colombie, est retenue en otage par les FARC, les forces armées révolutionnaires de Colombie, la plus ancienne guérilla d'Amérique latine.
Ce groupe armé s'est reconverti dans le trafic de drogue et la prise d'otages.
Avec Ingrid Betancourt et Clara Rojas, sa directrice de campagne enlevée le même jour, ce sont près de 1 400 otages, prisonniers eux aussi des FARC, qui vivent l'insoutenable et subissent une captivité interminable et de plus en plus incompréhensible.
Les négociations entre les FARC, la Colombie et la France sont difficiles. Voilà quelques semaines, une dernière tentative sur la base de la création d'une « zone démilitarisée » pour permettre l'échange de cinquante-neuf otages des FARC, parmi lesquels Ingrid Betancourt et Clara Rojas, contre quelque cinq cents guérilleros détenus dans les prisons colombiennes, a échoué.
Alors qu'Ingrid Betancourt entame, précisément aujourd'hui, sa cinquième année de détention et que sa famille vit dans l'attente d'une « preuve de vie », une vidéo promise par les FARC, quelles sont, monsieur le ministre, les informations que vous êtes en mesure de nous communiquer ?
Quelles sont les orientations prises par notre diplomatie pour parvenir à sa libération prochaine et à celle de tous les otages ?
Plus largement, monsieur le ministre, notre pays, connu pour sa vocation en matière de droits de l'homme et de respect de la dignité humaine, ne pourrait-il pas être à l'origine, à l'échelon international, de l'adoption et de la reconnaissance juridique en droit international de la notion d'otages civils ?
De même, ne pourrait-on pas faire progresser la législation en rendant imprescriptible l'acte d'enlèvement et en permettant des condamnations par contumace ?
C'est l'un des objectifs de l'association Otages du Monde, qui a besoin du soutien politique, moral et financier le plus large possible de la part de tous, plus particulièrement de notre Gouvernement.
Enfin, je tiens à rappeler que, à seize heures, une manifestation organisée par le groupe d'amitié France-Amérique du Sud en faveur d'Ingrid Betancourt est organisée et qu'une photo de notre compatriote sera affichée sur les grilles du jardin du Luxembourg. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, cela fait en effet quatre ans aujourd'hui qu'Ingrid Betancourt et Clara Rojas ont été kidnappées par les forces armées révolutionnaires de Colombie.
Je tiens, avant tout, à saluer le courage d'Ingrid Betancourt et la dignité de son combat pour la paix.
Je veux également assurer de mon soutien personnel, de celui de l'ensemble du Gouvernement mais aussi de tous les Français, la famille d'Ingrid Betancourt, particulièrement ses enfants, Mélanie et Lorenzo, ainsi que tous ses amis, qui l'attendent depuis maintenant quatre ans.
Enfin, je tiens à dire devant la Haute Assemblée combien le Gouvernement est déterminé et motivé pour libérer Ingrid Betancourt.
Je me suis rendu en Colombie le 26 janvier dernier et j'y ai rencontré le président Uribe. Pour la première fois, les autorités colombiennes ont accepté la proposition de la France, associée à l'Espagne et à la Suisse, tendant à favoriser les négociations entre les autorités colombiennes et les FARC en vue d'aboutir à un accord humanitaire.
Il revient désormais aux FARC d'apporter une réponse qui sera, je l'espère, constructive. Elles montreront ainsi qu'elles peuvent aussi être des interlocuteurs crédibles.
Mais au-delà du cas d'Ingrid Betancourt, nous devons penser à tous les otages et les aider. En effet, pour nous, Français, qui sommes issus du pays des droits de l'homme, il n'y a pas pire situation que celle d'un innocent privé de liberté.
Par ailleurs, je reste à votre disposition, monsieur le sénateur, pour étudier avec vous les propositions que vous m'avez soumises. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)