6

nomination de membres d'ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES

M. le président. Je rappelle que les commissions des finances et des affaires étrangères ont proposé des candidatures pour deux organismes extraparlementaires.

La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame Mme Nicole Bricq membre de l'Observatoire de la sécurité des cartes de paiement et MM. André Dulait et Yves Dauge membres du Haut Conseil de la coopération internationale.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

7

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question de même que le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.

projet d'autoroute entre pau et bordeaux

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

L'un de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, en l'occurrence M. Bernard Pons, avait lancé en 1996 un projet de liaison autoroutière entre Bordeaux et Pau via les agglomérations de Langon, en Gironde, et d'Aire-sur-Adour, dans les Landes.

Ce projet présentait alors deux ambitions : d'une part, l'amélioration des relations entre Bordeaux et le piémont pyrénéen ; d'autre part, l'ouverture et le développement de territoires enclavés.

Dans une volonté clairement affichée d'aménagement du territoire, le Gouvernement décida d'intégrer à ce projet une déviation, dite « d'Aire-sur-Adour et de Barcelonne-du-Gers », raccordant l'autoroute à la route nationale 124 en direction d'Auch et à la route départementale 935 en direction de Tarbes. Ce raccordement avait été accepté par toutes les parties prenantes dans la mesure où il permettait de compenser les inconvénients que présentait pour le Gers et les Hautes-Pyrénées un tracé autoroutier passant à l'ouest d'Aire-sur-Adour et venant se raccorder à l'autoroute A64 à l'ouest de Pau. Il devait permettre d'améliorer sensiblement la desserte de ces deux départements, qui bénéficiaient ainsi des retombées de la liaison autoroutière Bordeaux-Pau.

Cette volonté étatique fut plusieurs fois réaffirmée, notamment, le 12 novembre 2001, lorsque les préfets des Landes et du Gers déclarèrent d'utilité publique la réalisation des déviations d'Aire-sur-Adour et de Barcelonne-du-Gers raccordant les routes d'Auch et de Tarbes à l'axe autoroutier.

Or, monsieur le ministre, la délégation de service public qu'envisage actuellement votre gouvernement afin de réaliser la liaison Bordeaux-Pau ne correspond plus au projet initial, pourtant confirmé par les gouvernements successifs. La décision ministérielle du 29 mars 1996 et la déclaration d'utilité publique du 12 novembre 2001 ne sont plus respectées.

Aussi, monsieur le ministre, vous serais-je reconnaissant de veiller, lors de la délégation de service public à venir, à la réintégration au sein du projet de la déviation d'Aire-sur-Adour-Barcelonne-du-Gers, afin de nous éviter d'engager des procédures devant les juridictions administratives compétentes - procédures que, bien entendu, nous ne souhaitons pas.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, pouvez-vous réaffirmer les engagements initiaux, de façon à rassurer les élus locaux, les acteurs économiques et, plus largement, les populations du Gers et des Hautes-Pyrénées sur la permanence de la volonté de l'État de mieux desservir le piémont et les vallées pyrénéens ?

J'ajoute que les collectivités territoriales, notamment celle que j'ai l'honneur de présider, sont prêtes à participer financièrement à la réalisation de cette déviation, qui est absolument nécessaire pour le développement économique des territoires concernés. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur l'autoroute Langon-Pau, qui permettra de relier directement Bordeaux à Pau, mais aussi, vous l'avez rappelé à l'instant, de mieux desservir les territoires situés aux confins des départements des Landes, de Lot-et-Garonne, du Gers et des Hautes-Pyrénées, et de rendre les zones touristiques plus accessibles, comme elles l'attendent depuis bien longtemps.

Pour toutes ces raisons, le Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, le CIADT, a confirmé en décembre 2003 la volonté de l'État de mener cette opération à bien. Vous le savez sans doute, les candidats à la concession ont été retenus durant l'été 2004 et, depuis, une concertation a été menée. Tout récemment, à la fin de mois de décembre 2005, nous avons reçu les offres, qui sont actuellement en cours d'analyse. Nous devrions donc être en mesure de signer le contrat de concession avec le candidat qui aura été retenu dès que la déclaration d'utilité publique aura été prononcée, c'est-à-dire avant la fin de cette année 2006.

Vous me posez également une « question dans la question », si je puis dire, en évoquant la déviation de Barcelonne-du-Gers. De fait, deux projets ont fait l'objet d'une consultation unique du public : d'une part, la déviation d'Aire-sur-Adour, qui sera intégrée dans la concession en tant qu'élément de la future autoroute A65 ; d'autre part, la déviation de Barcelonne-du-Gers, sur la route nationale 124, qui ne peut pas entrer dans la concession puisque, concernant une route classique, elle ne peut être considérée comme un élément de l'autoroute. Son inclusion dans la concession pourrait donner lieu à des recours juridiques.

Pour autant, vous le savez, cette déviation est visée par le contrat de plan État-région et doit donc être réalisée au même titre que la partie autoroutière, grâce à un financement provenant, comme vous l'avez vous-même suggéré, à la fois de l'État et des différentes collectivités territoriales.

Je prends bonne note de l'intérêt simultané des deux opérations : la déviation d'Aire-sur-Adour, qui relève de la future autoroute, et celle de Barcelonne-du-Gers, qui est une route classique et qu'il nous faut réaliser dans le cadre des financements du contrat de plan. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - M. Jacques Pelletier applaudit également.)

situation en iran

M. le président. La parole est à M. Serge Vinçon.

M. Serge Vinçon. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

Le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique a adopté samedi dernier, à une très large majorité, une résolution conduisant à saisir le Conseil de sécurité des Nations unies de la question du programme nucléaire iranien.

Cette résolution rappelle les nombreux manquements de l'Iran à ses obligations découlant du TNP, le traité de non-prolifération nucléaire, ainsi que les soupçons qui en résultent quant aux ambitions exclusivement pacifiques de ce programme.

Plus de trois ans après que la communauté internationale a découvert l'ampleur des activités conduites clandestinement en Iran, cette résolution constate que ce dernier pays n'a pas saisi l'occasion qui lui était fournie de dissiper les doutes sur son intention de respecter ou non le TNP.

Monsieur le ministre, ma question est triple.

Tout d'abord, bien que Téhéran, en contradiction avec les engagements pris à l'automne 2003, ait annoncé sa décision de reprendre ses activités d'enrichissement, les négociations sont-elles totalement abandonnées ? Qu'en est-il notamment de la proposition de la Russie de réaliser sur son territoire l'enrichissement de l'uranium nécessaire aux réacteurs civils de l'Iran ?

Ensuite, qu'attend la France du Conseil de sécurité des Nations unies ? Allons-nous y avancer des propositions, en accord avec nos partenaires européens, et quelle pourrait en être la nature ?

Enfin, nous avons constaté un accord entre les cinq membres permanents sur la tenue de ce débat au Conseil de sécurité. Comment ont évolué, au cours des dernières semaines, les positions de la Russie et de la Chine, dont on peut penser qu'elles pèseront lourd dans l'attitude qu'adopteront les autorités iraniennes ?

Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous voudrez bien nous apporter sur un dossier qui, au-delà de l'Iran et de la région du Moyen-Orient, met en jeu tout l'édifice international de non-prolifération nucléaire, qu'il nous faut impérativement préserver. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, la communauté internationale découvrait brutalement en 2002 l'existence d'un programme nucléaire iranien clandestin. Bien qu'en novembre 2004 ils aient signé avec les Européens les accords de Paris, qui prévoyaient qu'ils suspendraient leurs activités nucléaires sensibles, les Iraniens ont relancé leurs activités de conversion à l'usine d'Ispahan au début du mois d'août 2005 et, surtout, d'enrichissement de l'uranium à l'usine de Natanz voilà quelques semaines.

La communauté internationale ne pouvait les laisser continuer d'avancer sans réagir. C'est la raison pour laquelle mes homologues britannique et allemand et moi-même avons proposé à la communauté internationale que le Conseil des gouverneurs de l'Agence se réunisse en session extraordinaire pour demander la saisine du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous avons été satisfaits de constater que la communauté internationale nous suivait, saisissait le Conseil de sécurité et qu'un large consensus - incluant également les États-Unis et, comme vous l'avez rappelé, la Russie et la Chine - se faisait jour. C'est donc un message d'unité et de fermeté que la communauté internationale lance directement aux autorités iraniennes.

Je déplore la réponse iranienne. Nous pensons que les autorités de Téhéran, au contraire, auraient dû saisir l'occasion qui leur étaient donnée pour montrer qu'elles choisissaient de revenir à la raison et suspendre leurs activités nucléaires sensibles, seule condition préalable, pour répondre à votre première question, monsieur le sénateur, à la reprise des négociations diplomatiques.

Car il est impossible que nous reprenions les négociations diplomatiques sans suspension claire et nette et de la conversion, et de l'enrichissement. Les Russes proposent aujourd'hui d'enrichir l'uranium iranien en Russie avant de le ramener ; les Iraniens ont jusqu'à présent répondu par la négative.

Il revient désormais au Conseil de sécurité des Nations unies d'indiquer les moyens qu'il entend exactement mettre en oeuvre pour ramener les Iraniens à la raison et, surtout, pour gérer cette très grave crise nucléaire. La balle est désormais dans le camp des Iraniens. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - M. Jacques Pelletier applaudit également.)

contrat première embauche

M. le président. La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Après l'explosion des banlieues du mois de novembre, qui fut un mélange de colère, d'appel à l'aide et de désespoir autodestructeur si l'on en juge par les cibles brûlées -  voitures, écoles et autres dispositifs publics à destination des habitants de ces quartiers populaires -, l'impératif pour le pouvoir politique était de redonner l'espoir à une jeunesse exclue du travail, des liens sociaux qu'il permet et de la sécurité matérielle qu'il procure.

Or le Gouvernement a fait le choix inverse en jouant sur la fragilité sociale de ces jeunes, qui, contraints de se débrouiller comme ils peuvent, accepteraient comme une aubaine un contrat de travail jetable chaque jour pendant deux ans. Vous utilisez le désespoir !

Vous savez pourtant que, à côté du traitement territorial, l'important pour ces jeunes est de sortir du quartier, de rencontrer d'autres personnes, de se sentir utiles dans une collectivité de production ou de service, bref, d'être formés et de travailler. L'important, pour eux, c'est aussi de pouvoir se projeter dans l'avenir pour sortir de la débrouille quotidienne, y compris de l'emploi précaire qui, déjà, leur est souvent proposé, pour envisager de mener une vie autonome, une vie de couple, de fonder une famille, de se loger, de pouvoir emprunter.

Avec votre CPE, votre « contrat première embauche », vous sécurisez les puissants et vous installez l'insécurité comme norme pour les plus fragiles, pour les jeunes, même diplômés, car, vous le savez, nombreux sont les patrons qui ne se priveront pas de cet effet d'aubaine.

Là où il y avait consensus sur le fait que la précarité était un mal à soigner, vous installez l'idée que c'est un moindre mal, vous dites à ces jeunes qu'il ne faut plus espérer le mieux, le bien, le juste.

En fait, vous profitez de la désespérance et, derrière vos arguments pragmatiques pour l'emploi des jeunes, c'est votre vieux credo, votre projet idéologique, libéral, qui vous guide. (M. Laurent Béteille s'exclame.)

Enfin, jouant toujours sur le désespoir, le fatalisme, la démoralisation, la résignation, vous brusquez les débats parlementaires avec la déclaration d'urgence...

M. Laurent Béteille. C'est lamentable !

M. David Assouline. ...et maintenant en avançant d'une semaine la discussion au Sénat, ce qui est scandaleux, vous comptez sur les vacances scolaires, espérant ainsi empêcher la mobilisation de nos concitoyens.

Mme Hélène Luc. L'examen du projet de loi n'est même pas terminé à l'Assemblée nationale !

M. David Assouline. Pourquoi, si vous êtes si sûrs d'oeuvrer au service de la population, agissez-vous en cherchant à échapper à son jugement ?

Ma question est la suivante : le Gouvernement va-t-il tenir compte des protestations citoyennes qui s'amplifient (Exclamations sur les travées de l'UMP) et du point de vue maintenant majoritaire de l'opinion, en retirant le CPE ? Quand allez-vous miser sur le potentiel de dynamisme, de créativité et d'exigence des nouvelles générations, plutôt que sur l'inverse ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Monsieur le sénateur, quand on parle de précarité, malheureusement on peut parler de la situation des jeunes de notre pays. En effet, et c'est une vraie difficulté, 23 % des jeunes sont aujourd'hui au chômage...

M. Jacques Mahéas. C'est à cause de vous ! Vous avez supprimé les emplois-jeunes !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. ...et 70 % d'entre eux accèdent à l'emploi par un contrat à durée déterminée ou par un contrat d'intérim.

Toutes les vieilles recettes, cette succession de « stages parking », d'emplois-jeunes et autres CDD, ce n'est vraiment pas la solution.

M. Charles Pasqua. Effectivement !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Comment aider les jeunes à entrer réellement dans le monde du travail avec un contrat à durée indéterminée, un CDI ?

Mesdames, messieurs les sénateurs, le contrat première embauche, c'est précisément un CDI et il offre enfin aux jeunes la possibilité d'entrer dans l'emploi avec un CDI. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. David Assouline. Ce n'est pas vrai !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Un CDI, cela signifie un droit au logement, un droit aux loisirs et le début d'une expérience professionnelle.

M. David Assouline. Pourquoi avez-vous avancé le débat au Sénat ?

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Certes, il y a une période de consolidation de deux ans, ...

M. François Marc. Elle est reconductible. !

M. Jacques Mahéas. De deux ans jusqu'à l'âge de vingt-six ans !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. ...mais elle est assortie, si besoin était, d'un préavis, d'indemnités et, surtout, d'un droit individuel à formation.

M. David Assouline. Pourquoi le débat a-t-il été avancé d'une semaine ?

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, l'heure est venue, pour notre pays, de mettre en oeuvre de véritables solutions.

Mme Hélène Luc. Le MEDEF en est assurément bien conscient !

M. David Assouline. Ce sont les patrons que vous sécurisez, et non les jeunes !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. D'ailleurs, d'autres pays d'Europe dirigés par vos amis ont commencé de le faire.

M. Jacques Mahéas. Vous dites n'importe quoi !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Je pense notamment à l'Espagne. Il faut avoir le courage d'essayer des formules novatrices, parce que les jeunes de France n'ont plus envie d'écouter des vieilles promesses qui n'apportent rien. (M. Jacques Mahéas s'exclame.)

Aujourd'hui, la seule solution, c'est un vrai contrat de travail, afin d'acquérir une expérience professionnelle, qui est le seul moyen de garantir un emploi. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Hélène Luc. C'est honteux, madame la ministre !

M. Jacques Mahéas. Quand ses enfants seront en CPE, elle verra !

Mme Hélène Luc. À quoi sert le Parlement ?

M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.

M. Jacques Mahéas. Mme Vautrin nous a mis en colère !

M. David Assouline. Elle n'a pas répondu à la question !

organismes génétiquement modifiés

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Monsieur le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, vous avez présenté, hier, en conseil des ministres, un projet de loi de transposition des directives européennes du 26 octobre 1998 et du 12 mars 2001 visant à encadrer l'utilisation des organismes génétiquement modifiés, les OGM.

Cette présentation intervient quelques jours après que l'Organisation mondiale du commerce a condamné l'Union européenne et six de ses États membres - dont la France - en raison du moratoire imposé en Europe sur les OGM entre 1998 et 2004, et après que la Commission européenne elle-même a saisi la Cour de justice des Communautés européennes en vue d'obtenir la condamnation de la France pour le retard pris dans la transposition de ces directives.

Hier après-midi, un grand quotidien national publiait un article révélant que plusieurs études font peser de nouveaux soupçons sur les effets biologiques des OGM. Cette publication redonne du crédit aux positions prises par les opposants au projet de loi, qui considèrent notamment que les expérimentations des OGM en milieu ouvert font courir un grave risque de dissémination, contraire au respect du principe de précaution désormais inscrit dans notre Constitution. L'administration est, par ailleurs dans le même article, accusée de vouloir garder le secret sur les études toxicologiques dont elle dispose.

Comme la plupart de mes collègues, je suis convaincu de l'urgente nécessité pour notre pays, qui est une des toutes premières puissances agricoles mondiales, de développer ses recherches dans le domaine des OGM à vocation agricole. Mais je suis également convaincu que ces recherches seront d'autant mieux acceptées qu'elles s'inscriront dans un cadre juridique parfaitement sécurisé et se feront en toute transparence.

Alors que, à peine connu, votre projet de loi fait l'objet d'un certain nombre de critiques, je souhaiterais que vous nous indiquiez, monsieur le ministre, comment vous comptez répondre aux craintes exprimées par une partie de la population, que, pour l'heure, ne semble pas apaiser la présentation de votre texte. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF ainsi que sur plusieurs travées de l'UMP et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur le sénateur, le débat sur les OGM est aujourd'hui souvent très passionnel et il convient d'y introduire de la rationalité, car le sujet le mérite.

Il faut sortir du flou juridique, notamment en transposant les directives européennes du 26 octobre 1998 et du 12 mars 2001.

L'Europe approche les questions environnementales et économiques d'une manière que nous approuvons, mais qui est très différente de celle d'autres régions du monde, en particulier les États-Unis.

Nous devons aussi respecter le principe de précaution, que vous avez voté très récemment et qui est effectivement inscrit dans la Constitution. Ce principe, il faut le faire nôtre et le mettre en oeuvre dans toutes les dispositions que nous adoptons.

Le projet de loi qui a été adopté en conseil des ministres prévoit un ensemble de procédures rigoureuses, de déclarations dans certains cas, d'autorisations dans d'autres, selon qu'il s'agit de produits autorisés à l'échelon européen ou d'essais et d'expérimentations, de mesures de suivi, de précautions, d'évaluations, sous le regard d'un conseil des biotechnologies assisté d'un collège scientifique, afin d'assurer l'objectivité nécessaire.

Nous devons agir dans la transparence la plus totale. Toutes les informations sans exception, tous les dossiers doivent être ouverts au public, pour que chacun se fasse sa propre opinion et puisse notamment prendre connaissance de celle de la communauté scientifique. Telles sont les dispositions contenues dans le projet de loi qui vous sera soumis.

Le sujet est important. Les biotechnologies ont un intérêt évident, en particulier pour la fabrication de médicaments et de vaccins. Récemment, une équipe a mis au point un vaccin contre le virus H5N1 grâce à la transgénèse. Ces nouvelles techniques ont aussi un intérêt pour l'agriculture, qui ne peut pas être négligé.

Nous devons évaluer leurs avantages, mais aussi leurs effets sur la santé, sur l'environnement, la biodiversité et les écosystèmes. Bref, nous devons réaliser un véritable travail de fond, d'évaluation scientifique. Il permettra, dans la plus grande transparence et de manière objective, de prendre les décisions les plus opérationnelles. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. François Marc. Ce n'est pas ce que contient votre projet de loi !

MANQUE D'EFFECTIFS DANS L'ÉDUCATION NATIONALE

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Début janvier, le ministère présentait la carte scolaire pour la rentrée prochaine. Cette année encore, les effectifs enseignants sont revus à la baisse. En septembre 2006, l'enseignement public du second degré perdra 2 083 postes.

Les académies d'Amiens, de Lille et de Nancy-Metz sont les plus durement touchées par ces suppressions de postes. L'académie de Lille enregistre, à elle seule, près du tiers des suppressions programmées à l'échelon national. En 2005, cette même académie avait été amputée de 895 postes. En trois ans, le Nord-Pas-de-Calais aura ainsi perdu quelque 2 000 enseignants.

M. Jean-Luc Miraux. Et combien d'élèves ?

M. Ivan Renar. Comment apprécier de telles décisions, qui fragilisent un peu plus des régions connaissant des taux de chômage bien supérieurs à la moyenne nationale et qui figurent en bas du classement s'agissant du taux de réussite aux épreuves du baccalauréat ?

On nous dit que ces suppressions de postes seraient « logiquement » liées à la baisse globale du nombre d'élèves. Cette tendance, due en partie au fait que des familles complètes « émigrent » à la recherche d'emplois dans des régions plus hospitalières, ne peut que s'amplifier car l'affaiblissement du service public de l'éducation ne contribuera pas à les retenir ou à renforcer l'attractivité de ces territoires.

Monsieur le ministre, il y a une grande injustice, si ce n'est du mépris, dans le fait que les académies du nord de la France servent de variable d'ajustement pour la répartition des effectifs enseignants. Jusqu'à quand va-t-on nous considérer comme les soutiers de la France ? (M. Jean-Luc Miraux s'esclaffe.)

Vous devriez entendre les élus de ces régions, qui, quelle que soit leur sensibilité politique, vous demandent de revenir sur les suppressions de postes annoncées ces dernières semaines.

Chacun sait que le résultat de l'équation « élèves en difficulté  +  suppressions de postes » n'est en rien positif. La réduction des effectifs enseignants entraîne une surcharge des classes, aggrave les conditions d'études de nos jeunes et met fin au soutien personnalisé des élèves.

Face à la violence engendrée par la misère sociale et l'échec scolaire, il est urgent de renforcer les équipes éducatives des établissements accueillant des jeunes en difficulté. Or on dégage des moyens financiers pour placer des policiers à l'école, ce qui, à l'évidence, n'est pas la bonne solution, et, alors même qu'il faudrait plus d'enseignants, on supprime des postes pour de froides raisons comptables.

Si la politique du Gouvernement est négative pour l'ensemble de notre pays, elle aggrave encore la situation de territoires socialement fragilisés, qui devraient pourtant bénéficier de mesures inégalitaires.

Puisque j'ai la parole, j'en profite pour protester contre la décision du Gouvernement de précipiter le débat sur le CPE : prévu ici même le 28 février, vous l'avancez au 23 février. Cet étranglement du débat démocratique est inacceptable, et si le fond, c'est la forme qui remonte à la surface, vous avez tout faux.

En attendant, monsieur le ministre, comment entendez-vous assurer l'égalité des chances à l'école ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, en 2006, jamais la nation n'aura fait, à démographie constante, un tel effort pour l'académie de Lille ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Paul Raoult. Monsieur le ministre, vous n'avez jamais été là-bas !

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur Renar, regardez les choses en face. Cette académie compte 36 000 élèves en moins en trois ans, dont 16 000 au cours des deux dernières années : sur le plan arithmétique, si la diminution de postes d'enseignants était proportionnelle, il y aurait eu deux fois plus de postes supprimés. Le taux d'encadrement dans les collèges sera meilleur en 2006 qu'en 2005. (Applaudissements sur les travées de l'UMP - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Hélène Luc. Monsieur le ministre, nous n'avons pas besoin d'un cours de mathématiques !

M. Gilles de Robien, ministre. En outre, monsieur le sénateur, grâce aux collèges « ambition réussite », et vous avez sans doute pris connaissance des annonces que j'ai faites, vous allez bénéficier de 113 enseignants supplémentaires,...

Mme Hélène Luc. On va recommencer à compter les élèves !

M. Paul Raoult. C'est scandaleux !

M. Gilles de Robien, ministre. ...de 339 assistants pédagogiques, de 122 000 heures de remplacement, soit 189 équivalents temps plein.

M. Paul Raoult. Il y a des classes de trente élèves dans les ZEP !

M. Gilles de Robien, ministre. Au dernier trimestre 2005, vous avez bénéficié de 2 500 emplois de vie scolaire.

M. Paul Raoult. Ce n'est pas possible !

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur Renar, l'éducation nationale, ce n'est pas seulement une question de statistiques, une question de quantité, c'est aussi une question de méthode.

M. Jacques Mahéas. À entendre le Gouvernement, il va bientôt y avoir plus d'enseignants que d'élèves !

M. Gilles de Robien, ministre. Oui, nous mettons en place une meilleure méthode de lecture.

Mme Hélène Luc. C'est au cours préparatoire qu'il faut le faire, et pour tous les enfants !

M. Gilles de Robien, ministre. Oui, nous mettons en place un socle commun de connaissances, qui sera le bagage indispensable pour que tous les jeunes sortant de l'école de la République sachent lire, écrire et compter, connaissent les nouvelles technologies et même une langue étrangère.

M. Paul Raoult. Et la suppression des classes d'insertion ?

M. Gilles de Robien, ministre. Oui, nous mettons en place les programmes personnalisés de réussite éducative, les PPRE. Oui, nous mettons en place une réforme de l'enseignement des maîtres à travers les instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM, et grâce à la formation continue des enseignants. (M. Paul Raoult s'exclame.)

Mme Hélène Luc. La réforme des IUFM a été votée, mais elle n'est pas terminée !

M. David Assouline. M. le ministre a quatre minutes de temps de parole ?

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur Renar, je conclurai ainsi : chaque fois que vous réduisez le problème de l'éducation à une vision statistique, vous nous privez d'une vraie réflexion sur l'éducation elle-même. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme Hélène Luc. C'est scandaleux !

M. Paul Raoult. Venez dans les collèges, monsieur le ministre ! Et les classes de trente élèves ?

Mme Hélène Luc. M. le ministre a repris une calculette !

collèges en zep

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et est réellement d'actualité.

Les zones d'éducation prioritaire, les ZEP, ont été mises en place en 1981. C'était une bonne idée (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC),...

M. Adrien Gouteyron. ...une idée généreuse !

M. Ivan Renar. Vous avez voté contre !

M. Adrien Gouteyron. En êtes-vous sûr ? (Oui ! sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Pas moi !

Quels ont été les résultats de cette politique ?

M. Adrien Gouteyron. Considérons d'abord les résultats d'un point de vue quantitatif.

Si je suis bien informé, quelque 5 600 écoles et 876 collèges sont actuellement classés en ZEP. Cela concerne 530 000 élèves. Près de 1 milliard d'euros sont consacrés à cette politique !

Mme Raymonde Le Texier. Ce n'est pas assez !

M. Adrien Gouteyron. Ce n'est pas rien, 1 milliard d'euros !

Quels sont les résultats ?

M. David Assouline. Le Gouvernement est là : demandez-le-lui !

M. Adrien Gouteyron. Je tiens d'abord à rendre hommage aux enseignants en fonction dans ces zones et dans ces établissements dit « difficiles ». (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Mme Valérie Létard applaudit également. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Cet hommage semble en étonner certains sur les travées de l'opposition. Mes chers collègues, pensez-vous être les seuls à entretenir de bonnes relations avec les enseignants ? Eh bien sachez que ce n'est pas le cas ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Paul Raoult. Les enseignants ont avant tout besoin de moyens !

M. Adrien Gouteyron. Pour ma part, je connais bien les enseignants. Je les ai souvent rencontrés...

M. David Assouline. Dans une autre vie !

M. Adrien Gouteyron. ...dans des fonctions antérieures, mais aussi dans mes fonctions actuelles.

M. Robert Hue. Si vous les connaissiez aussi bien que vous le prétendez, vous n'auriez pas besoin de vous justifier !

M. Adrien Gouteyron. Je sais ce qu'ils valent : j'en ai même dans ma famille ! (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Luc Mélenchon. Dans ce cas, tout n'est pas perdu ! (Sourires.)

M. le président. Monsieur Mélenchon, je vous prie d'écouter votre collègue !

M. Adrien Gouteyron. Je connais l'engagement des enseignants. Nous devons tous les en féliciter et les en remercier. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Monsieur le ministre, ne peut-on pas toutefois considérer que la situation actuelle se caractérise par une certaine dispersion des moyens, parfois par la stigmatisation des établissements et des élèves concernés, ainsi que par l'absence de prise en compte de certaines évolutions sociologiques ?

M. David Assouline. Pourquoi M. Gouteyron a-t-il le droit de s'exprimer pendant quatre minutes ?

M. Adrien Gouteyron. La réalité d'aujourd'hui n'est pas celle de 1981 !

Mes questions seront très précises, monsieur le ministre.

D'abord, quels moyens envisagez-vous...

M. Paul Raoult. Sûrement la suppression des ZEP !

M. Adrien Gouteyron. ...pour renforcer le soutien aux élèves en difficulté, où qu'ils se trouvent, en Haute-Loire comme ailleurs ?

Mme Hélène Luc. Mais puisque M. le ministre vous explique que tout va bien !

M. Adrien Gouteyron. Ensuite, comment envisagez-vous de traiter les établissements actuellement situés en ZEP, puisque vous avez présenté une autre formule ?

M. David Assouline. Maintenant, cela fait cinq minutes qu'il s'exprime ! À lui tout seul, il prend le temps imparti pour deux questions !

M. Adrien Gouteyron. Enfin, quelles marges d'expérimentation et de liberté pédagogique laisserez-vous aux enseignants de ces établissements ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Michel Mercier applaudit également.)

M. David Assouline. Il est inadmissible de dépasser ainsi son temps de parole. La règle doit être la même pour tous !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous avez raison de commencer en adressant un grand coup de chapeau aux enseignants.

Mme Hélène Luc. C'est ça ! On tire son chapeau aux enseignants, mais on leur retire les moyens !

M. Gilles de Robien, ministre. Si vous me le permettez, au-delà des enseignants, je rendrai également hommage à toutes les équipes éducatives qui travaillent dans les ZEP.

M. Paul Raoult. Alors pourquoi ne leur donnez-vous pas de moyens ?

M. Gilles de Robien, ministre. Il y a certes les enseignants, mais également les personnels sociaux et techniques, c'est-à-dire toutes celles et tous ceux qui fournissent des efforts supplémentaires et que l'on ne salue pas suffisamment.

Mme Raymonde Le Texier. Justement, parlons-en de ces personnels !

M. Gilles de Robien, ministre. Des idées généreuses, tout le monde en a. Mais nous, nous mettons les moyens en oeuvre pour qu'elles aboutissent ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Ivan Renar. Vous plaisantez ?

M. Gilles de Robien, ministre. Il a fallu attendre vingt-cinq ans pour que les moyens soient mis en place !

M. David Assouline. C'est normal : vous aviez voté contre les ZEP à l'époque !

M. Gilles de Robien, ministre. Pour les collèges « ambition réussite », nous avons déterminé des critères objectifs, afin d'éviter le saupoudrage. Celui-ci consiste à attribuer les moyens de manière dispersée à toutes les ZEP, plutôt qu'à les placer là où ils sont réellement indispensables.

M. Paul Raoult. En clair, vous voulez supprimer des collèges en ZEP !

M. Gilles de Robien, ministre. Nous avons retenu plusieurs critères, tels que l'environnement social, l'environnement scolaire et la non-réussite dans certains établissements.

C'est la raison pour laquelle nous mettons en place des méthodes supplémentaires. Permettez-moi d'en citer quelques-unes.

D'abord, des études accompagnées seront mises en place avec des assistants pédagogiques quatre fois par semaine dans les écoles et les collèges « ambition réussite ». (Très bien ! sur plusieurs travées de l'UMP.) Cela ne se faisait pas auparavant. Ces études seront accompagnées par les fameux parcours de « réussite éducative » et, en dehors des périodes scolaires, par les dispositifs contenus dans le plan Borloo.

Nous favorisons également la mixité des expériences. La plupart des professeurs qui sont nommés dans les ZEP sont jeunes et ils expriment souvent le souhait d'être épaulés par des collègues plus expérimentés. Une telle pratique existe déjà, mais elle est insuffisamment répandue. C'est la raison pour laquelle nous demanderons à 1 000 professeurs expérimentés d'épauler dans les collèges « ambition réussite » les enseignants sortant des instituts universitaires de formation des maîtres. Cela créera une véritable communauté éducative.

Vous m'avez également interrogé sur la méthode de travail.

Un comité directeur regroupant le chef d'établissement du collège, le chef d'établissement adjoint et chaque directeur d'école se réunira au moins une fois par mois pour déterminer les priorités. Cela constituera le projet éducatif qui sera ensuite soumis à l'inspecteur d'académie.

Une fois validé, le projet constituera le contrat pour les trois ans, quatre ans ou cinq ans à venir. Il sera suivi par un inspecteur général, puis fera l'objet d'une évaluation chaque année.

M. David Assouline. Cela fait cinq minutes ; c'est incroyable !

M. Gilles de Robien, ministre. Oui, monsieur Gouteyron, il y aura des mouvements en fonction des résultats. Il est normal que des collèges quittent l'éducation prioritaire si leur environnement social s'améliore ou que de nouveaux établissements puissent y entrer dans le cas contraire. C'est également cela le courage politique ! Le dispositif sera mis en oeuvre dès le 1er septembre 2006. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Jean Arthuis applaudit également.)

assurabilité des communes

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

Notre pays a vécu voilà quelques mois des moments difficiles. Le Gouvernement a été amené à décréter l'état d'urgence. Cette disposition exceptionnelle traduit à elle seule la gravité d'événements révélateurs d'une déstructuration de notre territoire et de la désespérance d'une partie de notre jeunesse.

Aucune réponse de fond n'a été apportée à la jeunesse, hormis le contrat de travail jetable, plus communément appelé CPE. Nous l'avons vu tout à l'heure.

Quant aux territoires et à leurs élus, ils attendent toujours, notamment que l'État applique la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements et l'État.

Cette loi dispose en particulier que l'État est civilement responsable des dégâts résultant des crimes et délits commis par des attroupements ou rassemblements, soit contre des personnes, soit contre des biens. Les communes devraient à défaut faire face seules aux conséquences des dégâts causés aux équipements publics, je pense notamment au mobilier urbain, aux écoles et aux gymnases. Le coût financier se situe entre 80 millions et 150 millions d'euros.

Cela représente des charges exorbitantes pour les budgets des collectivités concernées, directement lorsque les communes sont leur propre assureur et indirectement quand elles ne le sont pas.

Des désengagements d'assureurs, des hausses de primes de 15 % à 30 % selon les cas et des relèvements du plafond des franchises extravagants sont annoncés pour 2006.

À la mi-novembre, à l'Assemblée nationale, le Premier ministre assurait que vous étiez en train, monsieur le ministre, « d'étudier avec les mutuelles comment indemniser la destruction des biens, sachant que l'État apportera une aide complémentaire ».

Au Sénat, M. le ministre délégué à l'industrie confirmait que vous examineriez « avec Bercy les conditions d'indemnisation des dommages causés aux collectivités locales ».

Depuis, si une rencontre avec l'ensemble des associations d'élus et les assureurs a bien eu lieu voilà une semaine, aucun progrès n'a été réalisé. Les associations d'élus appellent unanimement l'État à appliquer la loi du 7 janvier 1983 et, devant le Conseil d'État, les assureurs poursuivent une action contre l'État.

Monsieur le ministre, saluer le « dévouement et le sens du service public » des maires, comme l'a fait M. Sarkozy,...

M. Jacques Mahéas. Pourquoi n'est-il pas là aujourd'hui ?

M. Pierre-Yves Collombat. ...vouloir renforcer leur « rôle de pivot de la cohésion sociale, de la sécurité et de la prévention » ou leur « rendre solennellement hommage » - décidément, c'est une manie -, comme l'a fait le Premier ministre, est une chose. Leur donner les moyens de mener à bien leurs missions en est une autre.

À tout le moins, il ne faut pas se cacher derrière des arguties juridiques quand les maires ont besoin que le Gouvernement leur tende la main dans des circonstances si exceptionnelles qu'elles ont nécessité la mise en oeuvre de l'état d'urgence.

Ma question est simple : le Gouvernement entend-il oui ou non tendre la main aux élus, en appliquant les dispositions de la loi du 7 janvier 1983 ? La réponse devrait pouvoir être aussi simple et je vous remercie de ne pas me renvoyer aux conclusions d'une éventuelle table ronde. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous évoquez à juste titre le coût financier des violences urbaines qui ont frappé notre pays du 27 octobre au 16 novembre dernier.

Comme vous le savez, ce coût a été, en grande partie, évalué par les assureurs. Ils nous ont communiqué le chiffre de 200 millions d'euros, dont 23 millions d'euros pour les véhicules, 100 millions pour les entreprises et 10 millions pour les commerçants et les artisans.

Concernant les collectivités locales, nous avons sollicité les préfets. Leur évaluation se situe entre 55 millions et 60 millions d'euros.

Le Gouvernement n'est donc pas resté les bras croisés s'agissant de ce dossier.

La première réaction, à la fois la plus efficace et la plus utile, a été de se préoccuper des victimes. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2006, nous avons proposé un système - vous vous en souvenez -, à savoir le remboursement immédiat du FCTVA, le fonds de compensation de la TVA, sans attendre les deux années, ce qui aurait pénalisé les communes. Cela représente un effort de 10 millions d'euros, qui ont été immédiatement injectés dans notre économie au service des collectivités locales.

M. Raymond Courrière. Et prélevés sur la dotation globale de fonctionnement !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Certains souhaitent - c'est votre cas - que l'État aille un peu plus loin et reconnaisse ses éventuelles responsabilités.

Je ferai à ce sujet trois remarques.

Tout d'abord, les dégâts recensés concernent des biens qui, dans leur immense majorité, étaient assurés.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Par conséquent, les assureurs - je le dis très simplement - ont fait preuve de réactivité et d'efficacité.

Ensuite, il ne faut pas se tromper de responsable. Le rôle de l'État était de rétablir l'ordre ; c'est ce qui a été fait. S'il y a des responsables à chercher, c'est d'abord du côté de ceux qui ont commis des exactions, et il faut tout de même le souligner. (Très bien ! sur plusieurs travées de l'UMP.)

Enfin, si certaines communes se trouvent confrontées à des difficultés particulières, rendant précaire leur équilibre financier, leur situation sera examinée au cas par cas en présence de M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, ainsi que M. le ministre délégué à l'industrie l'a rappelé à juste titre.

Vous avez évoqué la table ronde que j'ai organisée sur la demande du Premier ministre, rassemblant les assureurs et l'ensemble des associations d'élus, notamment l'Association des maires de France, l'Assemblée des départements de France, l'Association des régions de France,... et même l'Association des maires ruraux de France, ce qui était sympathique. (Sourires.)

Puisque vous avez évoqué les assureurs, permettez-moi simplement de faire état d'une lettre que m'a adressée l'un d'entre eux. Vous le connaissez sans doute, puisqu'il a été maire pendant de longues années et qu'il appartient à votre famille politique, monsieur le sénateur. Il s'agit de M. Bernard Bellec, le président de la Société mutuelle d'assurance des collectivités locales, la SMACL. Dans cette lettre, il nous remercie de la façon dont nous nous sommes saisis du dossier de l'assurabilité des collectivités territoriales. Nous n'avons visiblement pas les mêmes informations, monsieur Collombat ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

En réalité, le Gouvernement a eu trois attitudes.

M. Jacques Mahéas. Pour commencer, M. Sarkozy a lui-même allumé le feu !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. D'abord, le Gouvernement a eu une réaction rapide. Ensuite, il a su établir un dialogue efficace et constructif. Enfin, nous aboutirons à des décisions financières à la fois justes et équitables. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Jean Arthuis applaudit également.)

financement du tgv rhin-rhône

M. le président. La parole est à M. Jean-François Humbert.

M. Jean-François Humbert. Ma question s'adresse à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

Depuis la fin des années quatre-vingt, le projet de ligne à grande vitesse, LGV, Rhin-Rhône, première liaison transversale à grande vitesse envisagée en France, a nourri de nombreux débats. Il revêt en effet un caractère stratégique pour l'aménagement du territoire, en reliant notre pays à ses voisins européens immédiats que sont l'Allemagne et la Suisse.

Pendant plusieurs années, les élus de toutes les tendances politiques se sont fortement mobilisés pour faire aboutir ce projet. Je pense en particulier au président Edgar Faure et à Pierre Chantelat, mais également à Jean-Pierre Chevènement.

La décision irrévocable de réaliser cette ligne à grande vitesse n'a finalement été prise qu'au mois de décembre 2003, lors de la réunion du comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, le CIADT. Encore restait-il à mettre au point le plan de financement.

Je sais, monsieur le ministre, que vous vous êtes activement mobilisé sur ce projet, qui, en peu de mois et en dépit de sa complexité, a connu une accélération décisive. Vous avez fait savoir voilà quelques jours qu'un accord avait été finalisé concernant le plan de financement.

Pouvez-vous aujourd'hui nous confirmer ce premier aboutissement et nous préciser la date à laquelle les travaux pourront commencer ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, je me réjouis moi aussi de cet accord financier, qui, même s'il fut difficile à obtenir, illustre la bonne volonté des uns et des autres.

À cet égard, je tiens à saluer, comme vous, tous les membres de la Haute Assemblée, ainsi qu'un certain nombre d'autres élus qui, depuis de très nombreuses années, c'est vrai, se sont battus pour la réalisation de cette infrastructure, si importante pour l'ensemble nord-est et sud-est de notre pays et pour les relations entre la France et ses grands voisins, en particulier l'Allemagne.

La mise au point de ce plan, après la décision très importante prise lors du CIADT de décembre 2003, fut un peu difficile, comme c'est toujours le cas lorsqu'il s'agit de financement.

Ce plan a tout d'abord été mis au point lors de la réunion que j'avais organisée le 31 janvier dernier avec les présidents des conseils régionaux de Franche-Comté, d'Alsace et de Bourgogne. La participation de ces trois régions s'élèvera à 620 millions d'euros, en plus des 33 millions d'euros au titre des études qui avaient d'ores et déjà été engagées.

Puis, voilà quelques jours, les collectivités rhône-alpines - le Grand Lyon, le département du Rhône et la région Rhône-Alpes - ont apporté leur contribution - M. Mercier le sait -, qui s'élèvera à 66 millions d'euros. L'ensemble des participations dites régionales représente 28,7 % du total du financement.

De son côté, l'État et ses deux établissements publics, Réseau ferré de France et la SNCF, pour les infrastructures, participeront à ce financement à hauteur de 1,521 milliard d'euros, soit un peu plus de 60 % du total, dont 785 millions d'euros proviendront de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF, que vous connaissez bien.

Enfin, l'Europe et la Suisse contribueront à hauteur de 266 millions d'euros, soit un peu plus de 10 % du total.

M. Raymond Courrière. Ce n'est pas beaucoup !

M. Dominique Perben, ministre. En outre, s'agissant des infrastructures, la SNCF investira pour 850 millions d'euros en matériels roulants nécessaires pour assurer le service, ce qui n'est pas rien.

Tel est le dispositif qui a été mis au point.

Dans quelques jours, je réunirai toutes les parties au financement pour la signature formelle d'une convention.

Que va-t-il se passer maintenant ? Je rappelle que les procédures, les études du projet et les travaux archéologiques sont achevés. Les emprises foncières sont maîtrisées et les marchés de génie civil sont actuellement en cours d'ouverture et d'examen, ce qui signifie que les travaux pourront effectivement commencer dès le printemps prochain. Il s'agira d'un énorme chantier de génie civil, l'un des plus importants de ces dix dernières années. Il permettra la création directe de 6 000 emplois.

Cette ligne, qui sera le troisième grand chantier de train à grande vitesse, parallèlement à la LGV Est, que vous connaissez bien, monsieur le président, et à la LGV Aquitaine, montre à quel point l'État fait des efforts en matière d'infrastructures. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

problèmes de la filière viticole

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Monsieur le président, j'aurais voulu dire à M. le Premier ministre...

M. Raymond Courrière. Il n'est pas là !

M. Roland Courteau. ... combien l'heure était grave. Des drames humains sont en train de se nouer dans le contexte d'une crise de la viticulture sans précédent. Des hommes et des femmes sont en pleine détresse, en proie à un sentiment d'abandon, de désespérance et de colère.

Je le dis avec une extrême gravité : le Gouvernement aurait tort de ne pas prendre toute la mesure de la crise de qui frappe l'ensemble des régions viticoles françaises, tout particulièrement le Languedoc-Roussillon.

M. Roland Courteau. Mes collègues Raymond Courrière, Simon Sutour et Marcel Vidal ne me démentiront pas.

Le Gouvernement aurait tort de sous-estimer les risques d'une situation ainsi tendue à l'extrême, qui peut déboucher sur des actes désespérés. Il y va de la vie ou de la mort d'un grand nombre d'exploitations. Il y va du maintien ou de la disparition de pans entiers de notre économie.

Voilà déjà plus de trois ans, ici même, nous avons alerté le Gouvernement sur les prémices d'une crise qui s'annonçait. Mais qui nous a écoutés ? Et qui nous a entendus lorsque nous avons proposé de mettre en oeuvre une véritable politique viticole, de nature à éviter la crise qui nous frappe aujourd'hui ?

M. Roland Courteau. Hélas ! Trois ans plus tard, il n'y a toujours pas de politique viticole digne de ce nom !

Allez-vous enfin vous décider à réagir autrement que par des demi-mesures, inadaptées face à cette crise sans précédent ? Le Gouvernement a-t-il, oui ou non, la volonté de tout mettre en oeuvre pour assurer une sortie rapide et durable de la crise ?

M. Roland Courteau. Ou bien va-t-il continuer à laisser faire, à laisser aller, en considérant que les plus forts s'en sortiront toujours ? Tant pis pour les plus faibles ! Tant pis pour ce secteur d'activité, qui est pourtant un véritable fleuron de l'économie nationale !

Il y a chez nous, en Languedoc-Roussillon, des vignerons ayant la capacité et la volonté de relever ce nouveau défi et de construire un projet innovant de relance de ce secteur.

Notre viticulture a de nombreux atouts et elle a les moyens de ses ambitions, pour peu qu'on l'aide à franchir ce cap difficile. Mais est-ce vraiment dans les intentions du Gouvernement ? Nous en doutons sérieusement, mais peut-être va-t-on nous rassurer ? On ne sait jamais ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Pierre Bel. Et le ministre de l'agriculture, où est-il ?

M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, personne ne conteste la gravité de la crise viticole actuelle.

M. Jacques Mahéas. Où est le ministre de l'agriculture ?

M. François Loos, ministre délégué. Il est également incontestable que le Gouvernement a mis en place un dispositif exceptionnel pour faire face aux situations d'urgence les plus difficiles dans le secteur viticole, ...

M. Roland Courteau. Première nouvelle !

M. François Loos, ministre délégué. ...particulièrement pour le Languedoc-Roussillon : des aides à la trésorerie pour plus de 8 millions d'euros, ainsi que des prêts de consolidation...

M. Raymond Courrière. Il faut les rembourser !

M. François Loos, ministre délégué. ...et des allégements de charges pour les particuliers et les caves coopératives, à hauteur de 40 millions d'euros. Des mesures de report des charges fiscales, sociales et financières ont été arrêtées et des dégrèvements seront décidés. Les mesures d'aide à la restructuration du vignoble sont prêtes à être payées dans les prochaines semaines.

Cela étant, il y a des causes plus structurelles à la crise, car les excédents sur le marché du vin pèsent sur les prix.

M. François Loos, ministre délégué. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'apprête à demander à la Commission de nouvelles mesures exceptionnelles de distillation de crise pour tous les types de production. Il est d'ailleurs indispensable que tous les bassins de production se mobilisent.

Ce secteur n'a pas seulement besoin d'aides conjoncturelles.

M. Raymond Courrière. C'est l'avenir que vous préparez !

M. François Loos, ministre délégué. La viticulture a également besoin de perspectives.

M. François Loos, ministre délégué. C'est pourquoi le Premier ministre a demandé au ministre de l'agriculture et de la pêche...

M. Raymond Courrière. Il n'est pas là !

M. François Loos, ministre délégué. ... de préparer pour la fin du mois de mars, avec l'ensemble des professionnels concernés, une stratégie nationale de développement pour la viticulture.

M. Raymond Courrière. Il serait temps !

M. François Loos, ministre délégué. Ainsi, depuis le début de l'année, à la demande du ministre de l'agriculture et de la pêche, les comités de bassin, en particulier dans le Languedoc-Roussillon, travaillent avec les préfets à la mise au point de mesures de gestion de l'offre, de restructuration du vignoble et de préparation de l'avenir.

À partir de ce travail, dans lequel les professionnels s'investissent réellement et avec ardeur, et grâce aux moyens que permet la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006, le Gouvernement définira, avant l'été, les règles de gestion de la campagne de l'année.

Deux autres défis doivent également être relevés sans tarder : la réforme et la simplification des appellations d'origine, ainsi que l'élaboration, à l'échelon européen, de la future organisation commune du marché du vin. Ces deux rendez-vous sont essentiels si nous voulons pouvoir adapter notre production viticole aux nouveaux enjeux mondiaux.

M. Raymond Courrière. C'est trop long !

M. François Loos, ministre délégué. Nous sommes convaincus que la viticulture française dispose de tous les atouts pour s'adapter et surmonter les obstacles qui se dressent devant elle. Mais elle doit pour cela s'affranchir de ses difficultés internes et construire un projet à l'échelle nationale qui puisse s'inscrire pleinement dans un marché très internationalisé. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.- Exclamations désabusées sur les travées du groupe socialiste.)

statut des aiguilleurs du ciel

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, douze, je dis bien douze contrôleurs aériens, dans une équipe de quinze, ont provoqué en quelques heures l'annulation de trois cent vingt-deux vols, entraînant des perturbations immédiates pour trente-deux mille passagers et stoppant indirectement l'activité économique de milliers d'entreprises.

M. Christian Cointat. C'est scandaleux !

M. Philippe Dominati. Ces douze contrôleurs aériens ont reçu le soutien de M. Bernard Thibault (exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste), secrétaire général de la CGT,...

M. David Assouline. Après la casse du code du travail, celle du droit de grève ! Tout y passe ! Tout !

M. Philippe Dominati. ... au prétexte qu'ils ont déclenché leur grève sauvage par solidarité avec les manifestants contre le contrat première embauche.

Mme Hélène Luc. Elles ne vous plaisent pas, ces manifestations !

M. Philippe Dominati. Ces contrôleurs sont tous fonctionnaires et bénéficient tous d'un statut particulier...

M. Philippe Dominati. ... puisqu'ils sont tous astreints aux contraintes du service minimum.

Il faut pourtant rappeler aux Français que la profession de contrôleur aérien relève en Europe du droit privé. C'est notamment le cas en Allemagne, en Espagne, en Italie, en Grande-Bretagne, en Suisse, bref chez la plupart de nos voisins.

En France, ceux qui exercent cette profession ont la garantie de bénéficier d'un emploi à vie, apanage de notre fonction publique, mais également d'un statut particulier. (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Jean-Luc Mélenchon. Ça suffit ! Il ne sait même pas de quel métier il parle !

M. Philippe Dominati. Vous êtes gênés, je le comprends ! Vous paralysez la France avec douze syndicalistes ! (Protestations renouvelées sur les mêmes travées.)

M. Robert Hue. C'est une honte !

M. le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Seul M. Dominati a la parole. Écoutez-le !

M. Jacques Mahéas. C'est de la provocation !

M. Philippe Dominati. Selon la Cour des comptes, depuis des décennies, « la principale caractéristique des protocoles triennaux est d'être les outils d'un dialogue social déséquilibré aux conséquences financières très lourdes ».

Mais, puisqu'une douzaine de syndicalistes...

M. Jean-Luc Mélenchon. Allez, coupez-leur les mains !

M. Philippe Dominati. ... parviennent à paralyser l'activité économique de milliers d'entreprises pendant sept heures ...

M. Philippe Dominati. ... et à perturber la vie de nombreux de nos concitoyens, en faisant fi de leurs obligations, il est souhaitable de mettre fin, une fois pour toutes, ...

M. le président. Veuillez maintenant poser votre question, monsieur Dominati.

M. Philippe Dominati. ... à ce statut d'exception, qui, finalement, n'a d'autre résultat qu'un chantage permanent.

Monsieur le ministre, je vous poserai trois questions. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Nicole Bricq. C'est trop !

M. Philippe Dominati. Tout d'abord, dans l'immédiat, ces contrôleurs aériens ont-ils respecté la loi ? (Non !  sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.- Oui ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Si tel n'est pas le cas, quelles sanctions sont envisagées ?

Ensuite, si la loi a été respectée, c'est donc qu'elle est imparfaite.

M. Philippe Dominati. Dans ces conditions, allez-vous nous proposer rapidement des aménagements ou attendez-vous des initiatives parlementaires ?

M. David Assouline. Continuez la casse !

M. Philippe Dominati. Enfin, à terme, cette profession sera-t-elle, en France comme chez nos voisins, régie selon les règles du droit privé ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Robert Hue. Et voilà !

M. Paul Raoult. Il ne pense qu'à ça : virer tout le monde !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, comme vous, je considère que la grève d'avant-hier s'est déroulée dans des conditions inacceptables. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Il s'agissait en effet - il est important que chacun le sache - d'un conflit très limité, lié à l'organisation pratique du travail. Seule une équipe, sur l'ensemble de la journée de travail, était mécontente d'une décision prise par un cadre intermédiaire.

On ne peut pas déclencher une grève - et je pense que tout le monde sera d'accord sur ce point - entraînant des conséquences économiques, humaines et sociales d'une telle ampleur au seul motif qu'un problème ponctuel avec la hiérarchie n'a pas été réglé. C'est là, me semble-t-il, un détournement de l'esprit du dialogue social et de la gestion des conflits du travail dans notre pays. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) D'ailleurs, la principale organisation syndicale des contrôleurs aériens s'est élevée contre le déroulement de cette grève.

La première question que vous me posez porte sur la légalité de cette grève. L'équipe en cause, qui était de service de 6 heures à 10 heures et de 13 heures à 17 heures, a profité du préavis de grève déposé pour l'ensemble de la fonction publique pour déclencher sa propre grève. Cette grève n'est pas illégale, il n'y a pas de contestation possible sur ce point.

Vous me demandez ensuite quelles sont les sanctions prévues. Or, il n'y a pas d'illégalité, donc pas de sanctions.

Mme Hélène Luc. Est-il légal que le Gouvernement empêche le Parlement de discuter du CPE ?

M. Dominique Perben, ministre. Bien entendu, la journée de grève ne sera pas payée, c'est une évidence,...

Mme Raymonde Le Texier. Quand on peut taper sur les fonctionnaires, pourquoi s'en priver ?

M. Dominique Perben, ministre. ...mais la grève est formellement légale. Telle est la réalité juridique.

M. François Marc. Vous n'allez pas non plus casser le droit de grève, tout de même !

M. Dominique Perben, ministre. Comment les choses auraient-elles dû se passer et comment pourrait-on améliorer la situation, tel est le sens de votre dernière question.

Nous parlons ici de personnels qui font un travail extrêmement important en termes de sécurité,...

M. Dominique Perben, ministre. ... travail dont nous espérons tous qu'il est assuré dans de bonnes conditions, parce que la vie des passagers en dépend !

Quand un préavis de grève est déposé dans les formes normales - il est important que chacun sache comment cela se passe concrètement -, une discussion s'engage entre la direction générale de l'aviation civile, les organisations syndicales et les compagnies aériennes, pour fixer le niveau minimal de service à assurer. En conséquence de quoi, des astreintes sont décidées et notifiées au personnel. Avec cette procédure, les grèves se déroulent habituellement dans de bonnes conditions.

Dans le cas présent, un effet de surprise a joué, qui a empêché la mise en place du service minimum. J'ai donc demandé au directeur général de l'aviation civile de rencontrer les organisations syndicales pour étudier avec elles les moyens d'éviter à l'avenir ce type de situation qui n'est acceptable par personne et crée un préjudice pour tous, pas uniquement économique ou social. Car c'est également la perception que les Français ont du dialogue social et du rôle des organisations syndicales qui s'en trouve affectée.

Mme Hélène Luc. Quand on a un gouvernement qui agit de la sorte, il est normal que les syndicats réagissent !

M. Dominique Perben, ministre. Je pense qu'il est aussi dans l'intérêt des organisations syndicales de trouver, en accord avec le Gouvernement et les compagnies aériennes, la bonne réponse à ce type de situation. Nous allons y travailler dès maintenant. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Adrien Gouteyron. Très bonne réponse !

M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.