M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 42 rectifié, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l'article L. 211-4 du code de l'urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« d) À la cession de la totalité des parts d'une société civile immobilière, lorsque le patrimoine de cette société est constitué par une unité foncière, bâtie ou non, dont la cession serait soumise au droit de préemption. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux communes d'exercer leur droit de préemption urbain sur des cessions de parts d'une SCI, une société civile immobilière.
En effet, dans certains cas, malheureusement, la SCI est constituée dans le but manifeste d'échapper au droit de préemption urbain, alors même que la commune souhaiterait préempter.
Je tiens à souligner que la disposition proposée est entourée de toutes les garanties. En effet, l'exercice de ce droit se fera dans les conditions du « DPU renforcé », selon lequel la commune ne peut se contenter de renvoyer aux motivations générales de la délibération qui a institué le DPU : elle est au contraire tenue de motiver précisément chaque décision de préemption ; le juge exerce d'ailleurs un contrôle très strict sur ces motivations.
M. le président. L'amendement n° 345 rectifié, présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l'article L. 211-4 du code de l'urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« d) À la cession de parts d'une société civile immobilière, lorsque le patrimoine de cette société est constitué par une unité foncière, bâtie ou non, dont la cession serait soumise au droit de préemption. »
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. L'élargissement du DPU à la cession de parts d'une société civile immobilière doit permettre de lutter contre les transactions d'immeubles constitués de logements indignes et détenus par des « marchands de sommeil ».
Les événements dramatiques survenus à Paris au cours de l'été dernier confirment l'urgence d'agir dans ce domaine : il convient d'adapter la législation, pour que les collectivités locales puissent exercer un contrôle plus efficace.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 345 rectifié ?
M. Dominique Braye, rapporteur. L'amendement présenté par M. Repentin est identique à celui que nous avions initialement déposé. Mais nous avons rectifié le nôtre pour résoudre un certain nombre de problèmes dont nous avons longuement parlé en commission.
Par conséquent, je demande à M. Repentin de bien vouloir retirer son amendement, puisqu'il est satisfait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 42 rectifié de la commission, qui vise à soumettre au droit de préemption les seules cessions de parts de SCI qui permettent réellement - j'insiste sur ce terme - de disposer d'un immeuble.
C'est cette même logique qui nous conduit à demander à M. Repentin de retirer l'amendement n° 345 rectifié, même si nous comprenons ses motivations. Sa proposition nous paraît trop large pour pouvoir répondre à l'objectif du droit de préemption. Au demeurant, nous avons eu un débat sur l'exercice de ce droit lors de la cession de la totalité d'une part de SCI et sur la nécessité d'acquérir l'intégralité de l'unité foncière.
M. le président. Monsieur Repentin, l'amendement n° 345 rectifié est-il maintenu ?
M. Thierry Repentin. M. le ministre et M. le rapporteur comprendront sans doute les raisons pour lesquelles je ne peux pas retirer cet amendement. En effet, si le DPU ne porte que sur la totalité de la cession des parts, il suffira d'en céder 99 %, puis 1 % deux ou trois mois après, pour empêcher la commune d'exercer son droit de préemption urbain.
Cela étant, en l'état actuel du droit, je ne mésestime pas la difficulté de trouver une solution. Nous ferons certes un premier pas ce soir si nous adoptons l'amendement de la commission, mais, très vite, malheureusement, ceux qui veulent échapper au droit de préemption urbain sur les cessions de parts de SCI trouveront des solutions de repli.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4, et l'amendement n° 345 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° 297 rectifié, présenté par M. Amoudry et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La commune ou l'établissement public de coopération intercommunale est fondé à exercer le droit de préemption prévu par les articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme sur l'engagement de son assemblée délibérante de réaliser des logements sociaux et en l'absence de projet de construction défini et formalisé.
La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. L'objet de cet amendement est de rendre plus efficace et plus réactif l'exercice du droit de préemption prévu aux articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme.
Il s'agit d'éviter à la collectivité d'être obligée de disposer d'un projet complètement finalisé. Au contraire, nous estimons qu'il lui suffit de s'appuyer sur une délibération de son assemblée délibérante, précisant que le droit de préemption s'exercera dans le cadre d'un projet de réalisation de logements sociaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Les auteurs de l'amendement n° 297 rectifié visent un objectif apparemment légitime puisqu'il s'agit de permettre aux communes d'être très réactives par rapport aux évolutions du marché foncier et aux opportunités qui apparaissent en ne les obligeant pas à présenter un projet pour justifier l'exercice du droit de préemption urbain.
Tout comme M. Dubois, la commission estime que le DPU constitue effectivement un moyen d'action foncière très important pour la commune. Ce dispositif lui permet d'être informée des mutations et de pouvoir peser, le cas échéant, sur les prix afin d'éviter leur envolée.
Cela étant, monsieur Dubois, je vous rappelle que les communes ont la possibilité d'utiliser le DPU simplement pour constituer des réserves foncières, ce qui leur laisse d'ores et déjà une grande marge de manoeuvre.
Aller plus loin en supprimant totalement l'obligation imposée à la commune de présenter un projet au moment où elle préempte apparaît excessif et, en pratique, risquerait d'entraîner des dérives préjudiciables pour les propriétaires concernés.
C'est pourquoi, mon cher collègue, la commission vous demande de bien vouloir retirer l'amendement n° 297 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Dubois, le Gouvernement comprend vos préoccupations.
Toutefois, je tiens à le préciser afin que cela figure au compte rendu des débats, dès lors que le conseil municipal a prévu un programme de construction de logements ou dès lors que ces constructions sont prévues par un PLH, l'utilisation du droit de préemption ne pose pas de problème, aux termes du code de l'urbanisme, même si le programme de logements n'est ni localisé ni formalisé.
Cette précision répond en partie, me semble-t-il, à la préoccupation que vous avez exprimée, monsieur le sénateur. C'est pourquoi je me joins à M. le rapporteur pour vous demander de retirer cet amendement.
M. le président. Monsieur Dubois, l'amendement n° 297 rectifié est-il maintenu ?
M. Daniel Dubois. Étant tout à fait satisfait par les réponses que j'ai obtenues, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 297 rectifié est retiré.
L'amendement n° 382, présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau, Desessard et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le début de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 324-1 du code de l'urbanisme est ainsi rédigé :
« Ils peuvent exercer, sur délibération de leur conseil d'administration, ...(le reste sans changement). »
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Cet amendement vise à donner aux élus membres du conseil d'administration des établissements publics fonciers locaux, les EPFL, la possibilité de doter ces derniers du droit de préemption urbain. Cette mesure permettrait à ces établissements de remplir plus facilement leurs missions en matière de réserve foncière.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Mon cher collègue, aujourd'hui, rien n'empêche les communes qui le souhaitent de déléguer leur droit de préemption urbain à un établissement public foncier local, y compris sur la totalité du périmètre soumis à ce droit. Mais c'est bien aux communes qu'il appartient de prendre une telle décision.
En revanche, la possibilité pour des établissements publics d'exercer un droit de préemption sur le territoire d'une commune sans que celle-ci lui ait délégué son droit serait inédite.
Il n'apparaît pas souhaitable de s'engager dans une telle voie qui permettrait d'aller au-delà de la volonté de la commune, d'autant que cette faculté pourrait en pratique entraîner une concurrence entre la commune et l'établissement public foncier sur une même transaction.
La commission des affaires économiques émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'adoption de cet amendement aboutirait à retirer le droit de préemption aux communes et aux départements lorsqu'il existe un établissement public foncier local, puisque ce dernier pourrait exercer seul ce droit sur délibération de son conseil d'administration.
Monsieur le sénateur, je souhaite vraiment que vous acceptiez de retirer cet amendement, parce qu'il remet en cause un principe essentiel.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. Monsieur Repentin, l'amendement est-il maintenu ?
M. Thierry Repentin. Je ne souhaite heurter personne, et surtout pas les élus locaux, étant moi-même membre de cette grande famille.
Je retire donc mon amendement.
M. Alain Vasselle. Voilà qui est sage !
M. Thierry Repentin. Je souhaite cependant préciser qu'un établissement public de coopération intercommunale peut disposer du droit de préemption par délégation des communes. Deux droits de préemption consécutifs peuvent donc coexister puisque la commune retrouvera ce droit si l'EPCI n'en fait pas usage.
M. le président. L'amendement n° 382 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 175, présenté par MM. Alduy et Baudot, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 324-2 du code de l'urbanisme sont supprimés les mots : « le préfet au vu des ».
L'amendement n° 176, présenté par MM. Alduy et Baudot, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 324-2 du code de l'urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La création d'un établissement public foncier local compétent sur le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale doté d'un programme local de l'habitat appartient de plein droit au conseil de la communauté. La délibération du conseil de la communauté portant création de l'établissement public foncier local détermine le cas échéant les modalités de coopération avec d'autres établissements publics fonciers compétents pour intervenir sur un périmètre incluant celui de l'établissement public de coopération intercommunale ».
La parole est à M. Jean-Paul Alduy, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean-Paul Alduy. Il s'agit de permettre aux établissements publics de coopération intercommunale de créer, par simple délibération du conseil de la communauté, des établissements publics fonciers locaux.
La loi leur permet d'avoir, par délégation de l'État, compétence en matière de logement. L'objectif était d'autoriser ces établissements, ces communautés d'agglomération, ces communautés urbaines, à devenir de véritables autorités organisatrices de la politique sociale du logement.
Mais une telle politique ne peut pas être menée en l'absence d'une politique foncière active et prévoyante.
Certes, la loi prévoit la création d'établissements publics fonciers d'État et, jusqu'à présent, à quelques exceptions près, ces derniers ont surtout été créés à l'échelon régional. Or le niveau régional est éloigné du terrain. De surcroît, les procédures de décision sont lourdes et longues.
Autant ces établissements publics fonciers d'État régionaux peuvent être efficaces en matière de réserve foncière à moyen et long terme sur de grands ensembles, autant, selon moi, ils n'ont généralement pas la réactivité nécessaire pour saisir certaines opportunités, par exemple lorsqu'une déclaration d'intention d'aliéner, une DIA, vise une parcelle ou un immeuble. Or de telles décisions permettent précisément de développer la politique du logement social et de mixité sociale.
Par conséquent, mes chers collègues, il vous est proposé de compléter le dispositif actuel des établissements publics fonciers qui, je le répète, sont essentiellement régionaux, en autorisant la création d'établissements publics fonciers locaux par les EPCI, qui en assureraient le contrôle.
Dans un amendement ultérieur, nous examinerons les moyens financiers de ce dispositif.
M. le président. L'amendement n° 411, présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau, Desessard et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux premières phrases du premier alinéa de l'article L. 324-2 du code de l'urbanisme sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« L'établissement public foncier est créé sur délibérations concordantes des organes délibérants d'établissements publics de coopération intercommunale, qui sont compétents en matière de schéma de cohérence territoriale, de réalisation de zones d'aménagement concerté et de programme local de l'habitat, ainsi que, le cas échéant, de conseils municipaux de communes non membres de l'un de ces établissements. ».
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Les membres de la Haute Assemblée y seront sans doute sensibles : cet amendement a pour objet de supprimer une tutelle de l'État sur une initiative des élus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Pour ce qui concerne l'amendement n° 175, comme l'a rappelé notre collègue M. Alduy, l'intervention du préfet ne paraît pas indispensable dans la mesure où un EPFL ne peut actuellement être créé que sur délibération concordante d'un établissement public de coopération intercommunale et des communes concernées. Aucune commune ne peut donc être intégrée contre son gré dans un tel établissement.
Toutefois, nous sommes bien obligés de remarquer qu'en pratique l'intervention du préfet peut être opportune pour mettre en cohérence le périmètre.
Compte tenu de tous ces éléments, la commission s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée et souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
Quant à l'amendement n° 176, il se situe dans le même esprit que le précédent. La commission s'en remet donc également à la sagesse de la Haute Assemblée, et il en est de même pour l'amendement n° 411.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Alduy, le Gouvernement a bien entendu votre message. Comme vous le soulignez, une politique foncière doit prendre en considération le cours terme et le long terme et mener des actions prospectives, voire parfois des « actions commandos ».
Une articulation doit être recherchée entre des structures gérant des enjeux de long terme et des structures plus locales traitant d'enjeux plus immédiats tels la mise en oeuvre d'une préemption sur une DIA communale.
Avec les élus, les préfets doivent réfléchir aux différents outils permettant de conduire une politique foncière efficace, pragmatique et opérationnelle, dans la perspective, évoquée par M. Repentin, de nouvelles compétences éventuellement dévolues par délégation aux EPCI.
Comme M. le rapporteur, j'insiste sur la nécessité d'assurer une certaine cohérence en la matière, afin d'éviter un éventuel désordre.
Au nom du Gouvernement, je vous propose donc d'ouvrir ensemble deux chantiers, le premier à l'échelon local, en liaison avec les préfets, le second au niveau national, pour étudier les articulations nécessaires qui doivent être trouvées entre les différents établissements publics fonciers. Une telle étude permettrait de traiter un certain nombre de sujets abordés lors des travaux de la commission.
Étant donné l'engagement que je prends au nom du Gouvernement, je souhaite, monsieur le sénateur, que vous acceptiez de retirer les amendements nos 175 et 176. Je vous garantis que le Gouvernement mettra concrètement en oeuvre la proposition que je vous ai faite, en liaison avec la commission des affaires économiques.
M. le président. Monsieur Alduy, les amendements nos 175 et 176 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Paul Alduy. La réponse de M. le ministre me satisfait.
Je souhaite cependant qu'il soit bien compris que le dispositif actuel comporte deux écueils.
Tout d'abord, un établissement public foncier régional risque de s'instituer en tuteur d'un établissement public foncier local. Il faut donc vérifier dans les statuts et les compétences de ces différents établissements publics fonciers qu'il y a bien complémentarité et non « vassalisation » de l'un par rapport à l'autre.
Par ailleurs, comme nous le verrons à l'occasion de l'examen d'un amendement ultérieur, il faudra aussi définir les moyens financiers, notamment la répartition de la taxe spéciale d'équipement entre ces différents établissements publics fonciers, pour que le système devienne réellement opérationnel.
Compte tenu de l'engagement très clair pris par M. le ministre, je retire cependant les amendements nos 175 et 176.
M. le président. Les amendements nos 175 et 176 sont retirés.
La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 411.
M. Thierry Repentin. Messieurs les ministres, vous conviendrez que nous nous trouvons dans une situation paradoxale.
Au cours du premier semestre de cette année, un groupe de travail a reçu, au Sénat, un certain nombre d'experts en matière foncière. Tous indiquaient que la situation que connaît la France aujourd'hui était due à l'absence de mise en place d'une réelle politique foncière pendant de trop nombreuses années.
Une loi a créé des outils, à savoir les établissements publics fonciers. Or la création desdits établissements nécessite une délibération des élus indiquant leur souhait de voir instaurer cet outil sur leur territoire et de le doter des moyens financiers adéquats. Mais, paradoxe, c'est l'État qui accepte ou refuse la demande des élus.
Dans certains territoires de notre pays, depuis bientôt trois ans, des délibérations ont été adoptées à l'unanimité dans les EPCI pour créer des établissements publics fonciers locaux, mais le préfet n'a toujours pas autorisé la création de ces EPFL. De ce fait, la taxe spéciale d'équipement liée à la mise en place de ces établissements n'a pas pu être levée. Des recettes ont donc déjà été perdues pendant près de trois ans. Or elles auraient permis, ces deux dernières années, d'acquérir des terrains qui seraient fort utiles aujourd'hui pour mettre en place un certain nombre de politiques, notamment celle du logement. Ce temps perdu me rend assez perplexe !
Je m'interroge donc sur les raisons qui justifieraient le rejet de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Alduy, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Alduy. J'ai bien entendu les remarques de M. Repentin. Toutefois, si le système n'a pas fonctionné jusqu'à ce jour, c'est en raison de l'absence de directives claires.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que ce projet de loi fera l'objet d'une deuxième lecture au Sénat. À ce moment-là, l'engagement qu'a pris M. le ministre devant nous ce soir devra être respecté : sinon, ce serait un jeu de dupes !
Dans ces conditions, monsieur Repentin, attendons la réponse que M. le ministre nous donnera en deuxième lecture afin de mener jusqu'à son terme l'idée que nous avons voulu développer l'un et l'autre ce soir.
Voilà pourquoi, s'il était maintenu, je voterais contre l'amendement n° 411.
M. le président. Monsieur Repentin, l'amendement n° 411 est-il maintenu ?
M. Thierry Repentin. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 410, présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau, Desessard et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Sauf délibération contraire du conseil régional, il est créé dans toutes les régions, avant le 1er janvier 2007, un établissement public foncier régional.
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Dans la même logique, il est suggéré, par cet amendement, de créer un établissement public foncier régional dans chaque région, sauf délibération contraire des conseils régionaux considérant que ce ne serait pas l'outil le plus pertinent à cette échelle.
Adopter cet amendement contribuerait, en tout cas, à ouvrir un débat sur ce sujet au sein de chaque conseil régional.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Il est indispensable, s'agissant de la conduite des politiques foncières, de laisser le maximum de souplesse aux élus locaux dans le choix de leurs moyens d'intervention.
Au demeurant, le périmètre départemental apparaît souvent, et à bien des égards, mieux adapté que l'échelon régional pour mener des politiques qui requièrent avant tout une très bonne connaissance des réalités locales et une grande réactivité.
Il s'agit là d'un problème qui, actuellement, soulève force débats dans de nombreuses régions et de nombreux départements, et tous les élus sont en train d'essayer de se mettre d'accord. Ce serait un très mauvais coup porté à la démocratie si la Haute Assemblée prenait une décision de cet ordre sans solliciter l'avis des élus régionaux et départementaux. (Mme Nicole Bricq proteste.)
Je suis d'avis, au contraire, qu'il convient de laisser ceux qui sont au plus près du terrain déterminer quel est le bon périmètre pour exercer cette compétence. Ainsi, dans la région d'Île-de-France - et vous savez à quel point le problème y est aigu - nous sommes un certain nombre d'élus à estimer que l'échelon départemental est manifestement bien plus adapté que celui de la région.
Mme Nicole Bricq. C'est le cas de votre département, pas de l'ensemble des départements de l'Île-de-France !
M. Dominique Braye, rapporteur. Il ne peut être question d'imposer aux élus régionaux et aux élus départementaux, qui sont actuellement en pleine négociation, le choix arbitraire et autoritaire d'un périmètre donné !
Mme Nicole Bricq. Il n'est pas arbitraire !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Si le Gouvernement approuve la création d'établissements publics fonciers, il estime cependant que cette création ne peut résulter d'une mesure générale et indifférenciée, mais qu'il faut s'adapter aux réalités territoriales, comme le soulignait M. le rapporteur.
Voilà pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. J'ai beaucoup de mal à comprendre ce débat.
Cet amendement n'a d'autre sens que de poser le problème aux différentes régions. Il leur appartiendra alors de délibérer sur le sujet, de décider de créer ou de ne pas créer un établissement public foncier ! Nous ne leur imposons aucune tutelle, aucune obligation !
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Les établissements publics fonciers sont de très bons outils, mais qu'il faut rechercher le territoire le plus pertinent pour les y installer. Est-ce la région, est-ce une communauté de communes, est-ce un groupement ? Je ne le sais pas. Je sais simplement qu'en tant qu'élu local j'ai besoin d'un tel outil pour exercer un certain nombre de compétences.
M. le ministre a pris l'engagement de mener un travail rapide sur l'organisation des établissements publics fonciers afin de pouvoir répondre aux questions qui se posent, notamment s'agissant du partage de la taxe en cas de superposition de différents établissements publics fonciers.
L'amendement de M. Repentin ne tend certes pas à imposer une quelconque tutelle, mais il contient quand même une obligation qui n'est pas du meilleur effet : « Sauf délibération contraire du conseil régional, il est créé dans toutes les régions, avant le 1er janvier 2007, un établissement public foncier régional. »
Nous devons trouver un système pour coordonner les diverses initiatives, afin que l'établissement public foncier soit, en quelque sorte, pluridisciplinaire, pour pouvoir répondre sur le terrain aux besoins en matière de logement social et de protection de l'agriculture péri-urbaine - je rappelle que nous avons adopté un texte sur ce point il y a un an - ainsi que, d'une façon générale, aux besoins en infrastructures de transport.
Ne faut-il pas prendre un peu de temps pour mettre un peu d'ordre dans tout cela ? Il ne serait pas bon de précipiter les choses, et février n'est pas très loin ! Si M. le ministre peut tenir son engagement d'ici à la deuxième lecture, nous y verrons plus clair ; sinon, nous délibérerons et déterminerons les positions à adopter.
C'est la raison pour laquelle je ne voterai pas cet amendement.
M. le président. La parole est à M. André Vézinhet, pour explication de vote.
M. André Vézinhet. J'espère ne pas ajouter à la confusion dans ce débat !
En tant que membre d'un exécutif départemental, je plaide pour qu'il soit bien affirmé dans la loi que les régions auront en ce domaine la liberté indispensable pour mener à bien leur politique du logement.
Il se trouve que, par un hasard de l'histoire, le département de l'Hérault, dont je préside le conseil général, s'est doté voilà vingt-cinq ans d'une agence grâce à laquelle il a pu mener une action foncière très délibérée, notamment à partir du prélèvement de la TDENS, la taxe départementale des espaces naturels sensibles. Ainsi, depuis déjà deux ans, nous avons prévu dans le budget du département de mettre à la disposition des communes une enveloppe foncière leur permettant d'acquérir un bien foncier gelé en attente de la réalisation de logements.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Le débat qui vient d'avoir lieu sur cet amendement montre bien que ce problème mobilise beaucoup d'élus, chacun ayant une conception relativement différente en la matière.
La loi permet d'ores et déjà la coexistence sur un même territoire de plusieurs établissements publics, régionaux et départementaux. Cette superposition est cadrée, d'ailleurs, grâce à un amendement qui avait été adopté lors de l'examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux : nous avions prévu la possibilité de lever une taxe spéciale d'équipement par ménage - qui ne pouvait dépasser vingt euros -, si bien que, sur un territoire où il y aurait par hasard un, deux ou trois établissements publics, l'appel qui serait fait sur les ménages serait, lui aussi, limité.
Je souhaite, monsieur le ministre, que vous ayez perçu ce voeu des élus locaux de pouvoir mener une politique active en matière foncière.
Je rappelle aussi que, malgré la décision qui a été prise de les créer voilà deux ou trois ans, certains établissements publics fonciers n'ont toujours pas vu le jour : les outils ne sont pas sortis de leur caisse, et ne peuvent donc pas être utilisés.
Cependant, le débat étant lancé et le Gouvernement s'étant engagé à étudier ce dossier d'ici au mois de février, par sagesse, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 410 est retiré.
L'amendement n° 246, présenté par Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l'article L. 324-8 du code de l'urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... °. - Sur délibération expresse des assemblées délibérantes des collectivités territoriales, tout ou partie du produit des taxes définies aux articles 1584 et 1594 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 246 est retiré.