M. le président. L'amendement n° 289, présenté par MM. Pastor, Bel, Piras et Lejeune, Mmes Herviaux et Y. Boyer, MM. Raoult, Courteau, Trémel, Dussaut, Lise, Saunier, Teston, Repentin et Cazeau, Mme Bricq, MM. Le Pensec, Marc, S. Larcher, Collombat, Signé et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 732-56 du code rural, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - I. - Sont affiliées au régime de l'assurance vieillesse complémentaire les personnes occupées au 1er janvier 2007, ou postérieurement à cette date, en qualité de conjoint collaborateur ou d'aide familial, aux activités ou dans les exploitations, entreprises ou établissements visés aux 1° à 5° de l'article L. 722-1.
« II. - Bénéficient en outre du présent régime les conjoints collaborateurs et aides familiaux dont la retraite a pris effet :
« 1º Avant le 1er janvier 1997 et qui justifient de périodes minimum d'activité non salariée agricole et d'assurance en qualité de conjoint collaborateur ou d'aide familial accomplies à titre exclusif ou principal. Un décret précise les modalités suivant lesquelles les périodes d'assurance et les minima précédemment mentionnés sont déterminés ;
« 2º Entre le 1er janvier 1997 et le 1er janvier 2007 et qui justifient, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d'une durée d'assurance ou de périodes reconnues équivalentes au moins égale à celle requise par l'article L. 732-25 pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime d'assurance vieillesse des professions non salariées agricoles, et de périodes minimum d'assurance effectuées en qualité de conjoint collaborateur ou d'aide familial à titre exclusif ou principal. Un décret détermine les modalités de fixation des minima précédemment mentionnés. »
II. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 732-58 du code rural, après les mots : « chefs d'exploitation ou d'entreprise » sont insérés les mots : « les conjoints collaborateurs ou les aides familiaux ».
III. - Dans le premier alinéa de l'article L. 732-59 du code rural, après les mots : « chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole » sont insérés les mots : « des conjoints collaborateurs ou des aides familiaux ».
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. L'article 5 de la loi du 4 mars 2002 tendant à la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles prévoit une extension de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aux aides familiaux, sur proposition du Conseil supérieur des prestations sociales agricoles.
Cet article est la traduction des travaux préparatoires à cette loi au Parlement qui, dès 2002, prévoyaient que le régime serait appelé à évoluer vers un élargissement aux conjoints et aux aides familiaux.
L'amendement n° 289 tend donc à engager cette évolution dès maintenant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Cet amendement soulève les mêmes difficultés qu'un amendement similaire déposé par les mêmes auteurs sur cette question, s'agissant notamment des aides familiaux ; je n'y reviens donc pas.
Je vous rappelle que nous avons adopté hier soir, à l'unanimité d'ailleurs, un amendement de la commission sur les retraites des polypensionnées C'est, me semble-t-il, un excellent amendement. Nous ne pouvons pas tout faire en même temps ! En effet, cette mesure coûtera très cher,...
M. Gérard César, rapporteur. ...mais elle était justifiée, compte tenu des problèmes que rencontrent les épouses polypensionnées. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage une nouvelle fois à leur travail difficile. Nous savons à quel point elles contribuent à la marche des exploitations.
L'amendement que nous avons voté hier soir leur rend hommage.
M. Dominique Mortemousque. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 290, présenté par MM. Pastor, Bel, Piras et Lejeune, Mmes Herviaux et Y. Boyer, MM. Raoult, Courteau, Trémel, Dussaut, Lise, Saunier, Teston, Repentin et Cazeau, Mme Bricq, MM. Le Pensec, Marc, S. Larcher, Collombat, Signé et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement déposera, sur le bureau des assemblées, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport décrivant, catégorie par catégorie, l'évolution qu'il compte imprimer aux retraites agricoles au cours de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2011. Un développement particulier sera consacré aux mesures envisagées au cours de cette période, avec un effort plus important à son début, pour revaloriser les plus faibles pensions.
Ce rapport présentera les modalités de financement des différentes mesures proposées.
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Le groupe de travail sur les conjoints retraités avait envisagé de prendre en compte les années d'assurance vieillesse des parents au foyer dans la durée de la carrière agricole, d'abaisser les coefficients de minoration, de faire passer les seuils de minoration de 32,5 ans à 17,5 ans et de modifier l'obligation de réunir 37,5 années dans le régime agricole en obligation de réunir 37,5 années pour tous les régimes confondus.
Toutefois, de telles mesures ne peuvent être mises en oeuvre que de manière étalée dans le temps, comme cela avait été le cas à l'occasion du mouvement quinquennal de revalorisation 1997 - 2002.
Il convient donc, mais j'ose à peine en formuler l'idée, monsieur le rapporteur, qu'un rapport soit fait sur l'hypothèse d'un plan pluriannuel de revalorisation des petites retraites agricoles.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Je reconnais la prudence légendaire de Claude Lise. S'il ose à peine évoquer la possibilité d'un rapport, c'est qu'il sait que j'y suis allergique de façon chronique ! (Sourires.)
Cher collègue, à mon grand regret, j'émets donc un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 290.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9
I. - Après l'article 200 decies du code général des impôts, il est inséré un article 200 undecies ainsi rédigé :
« Art. 200 undecies. - I. - Les contribuables, personnes physiques, qui ont leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B et qui exercent une activité dont les revenus sont imposés dans la catégorie des bénéfices agricoles, bénéficient d'un crédit d'impôt au titre des dépenses engagées pour assurer leur remplacement pour congé entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2009 par l'emploi direct de salariés ou par le recours à des personnes mises à disposition par un tiers. Le bénéfice du crédit d'impôt est subordonné à la condition que l'activité exercée requière la présence du contribuable sur l'exploitation chaque jour de l'année et que son remplacement ne fasse pas l'objet d'une prise en charge au titre d'une autre législation.
« Le crédit d'impôt est accordé, sous les mêmes conditions et à proportion des droits qu'ils détiennent, aux associés personnes physiques non salariés de sociétés ou de groupements, au sein desquels ils exercent effectivement et régulièrement une activité agricole qui requiert leur présence sur l'exploitation chaque jour de l'année et sous réserve que leur remplacement ne soit pas assuré par une personne ayant la qualité d'associé de la société ou du groupement.
« II. - Le crédit d'impôt est égal à 50 % des dépenses mentionnées au I et effectivement supportées, dans la limite par an de quatorze jours de remplacement pour congé. Pour ce calcul, le coût d'une journée de remplacement est plafonné à quarante-deux fois le taux horaire du minimum garanti mentionné à l'article L. 141-8 du code du travail. Le crédit d'impôt est accordé au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été engagées.
« III. - Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur le revenu après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué. »
II. - Au quatrième alinéa de l'article 193 du code général des impôts, la référence : « 200 septies » est remplacée par la référence : « 200 undecies ».
M. le président. L'amendement n° 320, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200 undecies du code général des impôts, après les mots:
leur remplacement
insérer les mots:
, ou celui de l'un de leurs salariés,
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 493, présenté par MM. Pastor, Bel, Piras et Lejeune, Mmes Herviaux et Y. Boyer, MM. Raoult, Courteau, Trémel, Dussaut, Lise, Saunier, Repentin, Teston et Cazeau, Mme Bricq, MM. Le Pensec, Marc, S. Larcher, Collombat, Signé et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Remplacer les deux premières phrases du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200 undecies du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée :
Le crédit d'impôt est égal à 80 % des dépenses de remplacement pour congé mentionnées au I dans la limite d'un plafond annuel égal à 294 fois le taux horaire du minimum garanti mentionné à l'article L. 141-8 du code du travail.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement vise à inciter fortement les exploitants agricoles à se faire remplacer lorsqu'ils prennent des congés. Il tend, en effet, à réduire le coût, pour les exploitants, de leur remplacement, quel que soit le nombre de jours de congé pris, tout en maintenant le même plafond de prise en charge, à savoir 910 euros.
Ainsi cette mesure, plus incitative, permettra-t-elle à un plus grand nombre d'exploitants d'accéder à de meilleures conditions de vie, sans toutefois entraîner de coût supplémentaire pour l'Etat.
M. le président. L'amendement n° 321, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200 undecies du code général des impôts, remplacer le taux :
50 %
par le taux :
75 %
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 147, présenté par MM. Vasselle et Barraux, est ainsi libellé :
I. Dans la seconde phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200 undecies du code général des impôts, après les mots :
chaque jour de l'année
insérer les mots :
sauf à ce que le contribuable justifie que le congé est motivé par le suivi d'une formation professionnelle
II. Compléter la première phrase du II du même texte par les mots :
et de 5 jours pour formation professionnelle
III. Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant de l'extension, dans certaines conditions, à tous les chefs d'exploitation agricole du bénéfice des dispositions de l'article 200 undecies du code général des impôts sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Barraux.
M. Bernard Barraux. L'article 9 instaure un crédit d'impôt à concurrence de 50 % des dépenses engagées par un chef d'exploitation agricole en vue de son remplacement pour congé.
Ce crédit d'impôt est réservé aux exploitants dont la présence sur l'exploitation est nécessaire chaque jour de l'année.
Il est proposé d'étendre le crédit d'impôt « remplacement » à tous les chefs d'exploitation lorsque le remplacement est justifié par une absence pour formation professionnelle, et ce dans la limite de cinq jours par an.
M. le président. Quel est l'avis de la commission des finances ?
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. L'amendement n° 493 vise à réduire le coût du remplacement de l'exploitant, quel que soit le nombre de jours concernés, tout en maintenant à 910 euros le plafond de prise en charge.
J'avoue ne pas avoir saisi toutes les subtilités de cet amendement. Je ne vois pas ce qu'il change ! Je compte donc sur la sagacité du Gouvernement et souhaite connaître son avis sur cet amendement.
L'amendement n° 147 vise à ajouter la formation professionnelle à la liste des cas justifiant un crédit d'impôt. L'inspiration de cette mesure est bonne, mais je souhaite également connaître l'avis du Gouvernement sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, ministre. L'article 9 est important. Il avait été présenté au Mans au printemps dernier par M. Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, au congrès de la FNSEA, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles. On avait alors pu lire dans la presse, qui ne connaît pas les réalités de la vie des exploitants, que le Gouvernement allait payer des vacances aux éleveurs. C'est vraiment méconnaître les conditions de vie des éleveurs que d'écrire ce genre de choses !
M. Gérard César, rapporteur. Tout à fait !
M. Dominique Bussereau, ministre. Mais enfin, les éleveurs ont su se défendre.
Pour répondre à M. le rapporteur pour avis, le Gouvernement ne souhaite pas augmenter le taux de prise en charge des congés. En effet, si nous l'augmentions, nous réduirions alors le nombre de jours de congés, le plafond global annuel étant de 910 euros. Chacun ici, y compris les parlementaires de l'opposition, le comprendra : l'augmentation du plafond représenterait une dépense supplémentaire pour l'Etat. Or ce projet de loi est cadré par un ensemble de ressources qui lui sont affectées.
Enfin, permettez-moi d'ores et déjà, monsieur le président, de donner mon avis sur l'amendement n° 492, qui n'a pas encore été présenté. La proposition de soumettre l'octroi d'un crédit d'impôt à des conditions de ressources rendrait le dispositif plus complexe et introduirait de nouveaux contrôles, alors que, au contraire, nous souhaitons diminuer ceux-ci.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 493 et 492.
S'agissant de l'amendement n° 147, il prie M. Barraux d'avoir l'extrême amabilité de le retirer.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote sur l'amendement n° 493.
M. Jean-Marc Pastor. J'ai bien écouté les observations de M. le ministre.
Il nous semble que nous nous engageons dans un processus nouveau, s'agissant notamment des agriculteurs qui s'installent dans des zones difficiles, je pense en particulier aux zones d'élevage.
En effet, permettre aux agriculteurs, par une mesure incitative, de prendre des congés non pas durant quinze jours, mais pendant une semaine, tout en maintenant la même prise en charge globale, c'est déjà une révolution. Leur permettre de s'échapper de leur exploitation pendant une semaine, avec leur épouse, c'est leur offrir de nouvelles conditions de vie.
Il faut, me semble-t-il, procéder par étape. Commençons donc, comme nous le proposons dans l'amendement n° 493, par donner aux agriculteurs la possibilité, s'ils le souhaitent, de partir moins de quinze jours, avec le même plafond de prise en charge. Cela sera certainement plus facile pour eux.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 493.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. Monsieur Barraux, l'amendement n° 147 est-il maintenu ?
M. Bernard Barraux. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 147 est retiré.
L'amendement n° 492, présenté par MM. Pastor, Bel, Piras et Lejeune, Mmes Herviaux et Y. Boyer, MM. Raoult, Courteau, Trémel, Dussaut, Lise, Saunier, Repentin, Teston et Cazeau, Mme Bricq, MM. Le Pensec, Marc, S. Larcher, Collombat, Signé et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le III du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200 nonies du code général des impôts, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Le crédit d'impôt est accordé sous conditions de ressources définies par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. L'article 9 vise à mettre en place un système de prise en charge publique de remplaçants sur les exploitations pour aider les agriculteurs à partir en vacances.
Cette mesure a été avancée par le Gouvernement au premier chef pour des raisons sociales qui, pour être légitimes, ne doivent pas conduire à financer la prise en charge de tous les exploitants sans qu'il soit fait état de leurs possibilités financières propres.
Par ailleurs, très parcellaire du fait de sa rédaction qui en limite l'éligibilité, la mesure édictée ne se fonde que sur l'obligation de présence continuelle du bénéficiaire du crédit d'impôt sur son exploitation et non sur sa capacité financière. Or c'est bien le critère financier qui conditionne d'abord l'obligation sociale de solidarité envers le monde agricole.
Cet amendement vise ainsi à clarifier les ressorts de l'obligation de solidarité en mettant en avant les agriculteurs les plus en difficulté, ceux pour qui c'est l'incapacité financière à payer un remplaçant qui interdit la prise de vacances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission des finances ?
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis. Sur cet amendement qui vise à soumettre à conditions de ressources le bénéfice de l'exonération, la commission des finances a émis un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard César, rapporteur. Permettez-moi de revenir sur la question des quatorze jours accordés pour le remplacement des agriculteurs pratiquant l'élevage laitier.
Nous savons tous ce qu'est l'élevage laitier : dans cet hémicycle, plusieurs de nos collègues ont procédé à la traite manuellement...
M. Gérard Le Cam. Je l'ai fait !
M. Gérard César, rapporteur. Moi aussi ! Je peux donc en parler, car je connais l'astreinte que cela représente.
Il faut donc rendre hommage aux éleveurs qui pratiquent la traite deux fois par jour, et même, comme je le disais hier soir, les dimanches et les jours fériés. Pour autant, il faut souligner l'effort très important qui est consenti aujourd'hui - c'est une avancée extraordinaire ! - pour leur permettre de se faire remplacer sur l'exploitation, compte tenu des contraintes fortes qui existent en élevage laitier, et pour permettre à leurs épouses, qui elles aussi pratiquent la traite, de pouvoir les accompagner durant quelques jours de vacances.
Je partage donc absolument l'avis du rapporteur de la commission des finances et je suis tout à fait défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.
M. Gérard Le Cam. L'article 9 est particulièrement intéressant et répond à un réel besoin, comme vient de le souligner M. le rapporteur : nous connaissons tous, dans nos familles, dans notre voisinage, des exemples d'éleveurs laitiers qui sont tenus par leur travail 365 jours par an
Cela dit, le rapport de M. Antoine Herth à l'Assemblée nationale faisait état d'un besoin de 16 000 personnes aux fins de remplacement pour cette question particulière des congés, pour un équivalent temps plein de 3 900 emplois. Cela me conduit à m'interroger : qui va-t-on trouver pour assurer ces remplacements, et dans quel cadre ? On sait que les services d'aide en élevage et culture, les SDAEC, sont quasiment à saturation. Une telle disposition ne va-t-elle pas encore favoriser le développement de l'emploi précaire ?
Si cette mesure est bonne, elle soulève néanmoins un certain nombre de questions auxquelles j'aimerais bien que M. le ministre réponde.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Bussereau, ministre. Monsieur Le Cam, un débat intéressant a eu lieu à l'Assemblée nationale sur l'initiative d'un député socialiste de Charente, Jean-Claude Viollet, qui est particulièrement sensible à cette question.
Ce dernier souhaitait un monopole des services de remplacement, ce qui ne correspond pas à mon souhait. Je n'ai rien contre les services de remplacement, qui jouent d'ailleurs, dans mon département - voisin de celui de M. Viollet -, un rôle important, mais j'estime qu'il faut laisser à l'éleveur la liberté du choix de son remplaçant. Cela peut faire l'objet d'un emploi saisonnier, l'éleveur peut faire appel à un étudiant, au fils d'un voisin qui fera ce travail pendant une période de vacances, ou encore à des personnes spécialisées dans cette fonction par le biais d'un service de remplacement qui seront rémunérées, par exemple, au moyen d'un chèque emploi-service.
Nous avons laissé volontairement le choix ouvert. Je pense que les services de remplacement, qui sont bien connus dans nos départements et qui jouent un rôle essentiel, s'arrogeront - si je puis me permettre cette expression - une grande partie du marché, mais que, au choix de l'exploitant, d'autres solutions pourront être trouvées.
Voilà les quelques éclaircissements que je puis vous apporter.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 9
M. le président. L'amendement n° 346 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Soulage et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Mouly, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 72 C du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les exploitants agricoles peuvent pratiquer une provision en vue du paiement des cotisations sociales visées aux articles L. 722-1 et suivant du code rural, lorsqu'ils sont en mesure de l'évaluer avec une approximation suffisante. »
II. - Les pertes de recettes pour l'État sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Daniel Soulage.
M. Daniel Soulage. Les cotisations sociales des non-salariés agricoles dues au titre d'une année donnée sont assises sur la moyenne des revenus professionnels des trois années précédentes ou sur la base des revenus de l'année précédente.
Rappelons que le fait générateur est constitué par l'activité de l'entreprise au 1er janvier.
Il en résulte qu'un exploitant qui a connu de bons résultats les années précédentes pourra payer une cotisation élevée sur un exercice dont le résultat est faible.
L'amendement que je vous propose a pour objet de permettre aux exploitants qui sont en mesure d'évaluer avec suffisamment de précision les cotisations dues au titre de l'année suivante de provisionner celles-ci, notamment les années où ils réalisent un bon résultat et sont ainsi plus à même de supporter la future charge.
Par nature, cette provision sera systématiquement rapportée l'année suivante.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Notre collègue Daniel Soulage pose un réel problème : provisionner les cotisations sociales, qui, nous le savons, reviennent régulièrement dans les charges de l'exploitation.
Son idée, comme toutes celles qu'il défend, est très intéressante. Même si certains aspects de cette mesure doivent être précisés, il est possible de provisionner une telle charge. A cet égard, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous poser une question dont nous avons débattu en commission : est-il possible, au titre de la dotation pour aléas, la DPA, de provisionner les charges sociales ?
Quoi qu'il en soit, la commission est favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, ministre. Sur la DPA, vous me prenez un peu au dépourvu, monsieur le rapporteur. Mais je puis vous indiquer que, selon mes collaborateurs, a priori, un tel provisionnement n'est pas possible.
Quant à l'amendement n° 346 rectifié, il est - je parle sous le contrôle d'un ancien ministre du budget - contraire aux principes élémentaires fiscaux et comptables qui nous régissent.
M. Michel Charasse. Absolument !
M. Dominique Bussereau, ministre. Sur le plan fiscal, la déduction des provisions est subordonnée, notamment, au fait que la perte ou l'achat soient probables, ce qui exclut les provisions fondées sur des risques simplement éventuels.
Or, monsieur Soulage, vous demandez qu'une provision puisse être constituée en vue de faire face à une charge qui, pour être probable, ne trouve sans doute pas son origine dans un événement survenu en cours d'exercice.
Outre que cette mesure est contraire aux principes élémentaires fiscaux et comptables, elle serait source de contentieux extraordinaires.
Enfin, il serait très difficile de la limiter aux seuls exploitants agricoles et, dès lors, le coût de cette mesure pour le budget de l'Etat serait très élevé, puisque les commerçants, les professions libérales et les entreprises pourraient demander à en bénéficier.
Je n'argumenterai pas sur la non-recevabilité de votre proposition - ce ne serait pas convenable -, mais voilà en tout cas l'esprit qui motive mon refus de votre amendement.
Pour toutes ces raisons, je vous demande donc de bien vouloir le retirer.
M. le président. Monsieur Soulage, l'amendement est-il maintenu ?
M. Daniel Soulage. Après les explications qui viennent d'être apportées, je m'incline devant le règlement et, surtout, devant l'appréciation d'un ancien ministre du budget !
M. Gérard César, rapporteur. De deux anciens ministres du budget !
M. Michel Charasse. Je n'ai fait qu'opiner !
M. Daniel Soulage. Je retire donc mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 346 rectifié est retiré.
L'amendement n° 148, présenté par MM. Vasselle et Barraux, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Après les mots « qui ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés » la fin du III de l'article 244 quater M du code général des impôts est ainsi rédigée : « est réparti entre les associés personnes physiques participant à l'exploitation au sens du 1° bis du I de l'article 156 et les associés redevables de l'impôt sur les sociétés, proportionnellement à leurs droits dans ses sociétés ou groupements. »
II. Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Barraux.
M. Bernard Barraux. La rédaction actuelle de l'article 244 quater M pénalise les sociétés de personnes ayant des associés non exploitants.
Dans cette situation, les associés exploitants perdent le bénéfice d'une quote-part du crédit d'impôt né de la formation du ou de plusieurs chefs d'entreprises, puisque les associés personnes physiques dits non exploitants ne peuvent en bénéficier.
L'amendement prévoit que le crédit d'impôt né des dépenses engagées par la société de personnes pour la formation de ses dirigeants soit intégralement partagé entre les associés exploitants.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Cette proposition a semblé tout à fait intéressante à la commission. Le problème posé est en effet réel, mais, comme il est très pointu en termes de fiscalité, j'aimerais, avant de me prononcer, connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, ministre. Nous sommes bien loin du projet de loi d'orientation et le point soulevé relève davantage d'une loi de finances.
L'article 244 quater M du code général des impôts prévoit l'octroi d'un crédit d'impôt en faveur des entreprises exposant des dépenses destinées à la formation du chef d'entreprise.
Dans le cas des sociétés de personnes, ce crédit d'impôt est réparti entre les associés au prorata des droits qu'ils détiennent. Les associés personnes physiques ne peuvent donc utiliser ce crédit d'impôt qu'à la condition qu'ils participent effectivement à l'exploitation.
Ce mode de répartition du crédit d'impôt dans le cas des sociétés de personnes est identique à celui qui existe pour la répartition du résultat de ces structures. Dans ces conditions, il est parfaitement logique que la répartition du crédit d'impôt formation entre les associés s'effectue au prorata des droits qu'ils détiennent dans la société de personnes et soit indépendante de leur participation ou non à l'exploitation.
J'ajoute que ce mode de répartition s'applique à tous les crédits d'impôt. Le modifier pour le crédit d'impôt formation créerait un redoutable précédent, qui ne manquerait pas d'être étendu, par le biais d'autres amendements, à l'ensemble des autres crédits d'impôt, ce qui engendrerait un coût budgétaire considérable.
Pour cette raison, le Gouvernement ne peut accepter cet amendement, dont l'adoption aurait des conséquences allant tout à fait au-delà de la légitime préoccupation de ses auteurs.
M. Michel Charasse. Et la mesure serait inconstitutionnelle au regard du principe d'égalité !
M. Dominique Bussereau, ministre. En effet ! Je partage l'avis que vient d'exprimer M. Charasse sur le caractère inconstitutionnel d'une telle disposition au regard du principe d'égalité.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Je crois que M. le ministre a parfaitement répondu... avec le renfort de M. Charasse, qui est, nous le savons, un spécialiste de ces questions. Puisqu'il est inconstitutionnel, je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Barraux, l'amendement n° 148 est-il maintenu ?
M. Bernard Barraux. S'il est inconstitutionnel, il va sans dire que je le retire ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 148 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 164 rectifié, présenté par MM. Mortemousque, Vasselle et Murat, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 8 du titre Ier du livre VII du code rural est complété par une section ainsi rédigée :
« Section ... - Aide à l'emploi en agriculture
« Art. L. ... -Les employeurs relevant des professions agricoles définies aux 1° à 4° de l'article L. 722-1 du code rural peuvent bénéficier d'une aide à l'emploi pour les embauches, réalisés à compter du 1er janvier 2006, de demandeurs d'emplois sortis du système éducatif sans qualification professionnelle reconnue ou n'ayant pas acquis par expérience ou par la formation professionnelle de qualification professionnelle reconnue.
« Cette aide est égale par mois et par salarié embauché à dix pour cent du salaire minimum interprofessionnel de croissance par le nombre d'heures rémunérées par l'employeur pendant le mois considéré. Il n'y a pas lieu à versement de l'aide si le salarié embauché a déjà été titulaire d'un contrat de travail avec le même employeur durant les douze mois précédents.
« Elle est versée trimestriellement à l'employeur par le centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles selon des modalités à définir par décret.
« L'aide prévue au présent article est cumulable avec le bénéfice d'une exonération totale ou partielle de cotisations sociales ou l'application de taux spécifiques d'assiettes ou montants forfaitaires de cotisations.
« L'aide est versée pendant une durée maximale de douze mois à compter de l'embauche. En cas de suspension du contrat de travail, non rémunérée par l'employeur, cette durée est prorogée d'une durée équivalente.
« Cette aide est financée par une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Pour bénéficier de l'aide prévue au présent article, l'employeur ne doit pas avoir fait l'objet d'une condamnation relevant de l'article L. 325-1 du code du travail. »
La parole est à M. Dominique Mortemousque.
M. Dominique Mortemousque. Cet amendement vise à favoriser l'embauche dans le secteur agricole de demandeurs d'emploi non qualifiés, afin de développer la contribution du monde agricole à l'insertion de ces publics.
En effet, aujourd'hui, trop de personnes se trouvent exclues du système économique faute d'adaptation, de professionnalisation ou de qualification suffisante. Il est urgent de prendre des mesures spécifiques facilitant leur emploi, et ce le plus rapidement possible, avant qu'elles ne s'installent dans des situations d'échec, de déstabilisation sociale et psychologique, et ne viennent accroître le nombre des exclus.
Cependant, si l'agriculture est prête à accueillir des salariés n'ayant pas, à leur embauche, la connaissance des métiers agricoles, le contexte économique subi par la plupart des producteurs ne le permet pas, d'autant que l'augmentation du coût du travail, notamment à la suite de l'institution des 35 heures et de la revalorisation du SMIC, a fragilisé encore davantage des secteurs d'activité composés de très petites entreprises ayant recours à une importante main-d'oeuvre. (Mme Nicole Bricq s'exclame.) Je ne conteste pas cette augmentation du coût du travail, ma chère collègue, mais nous avons tous reconnu que le revenu agricole n'était guère élevé ! Je ne fais donc que rappeler cette situation.
L'aide à l'emploi proposée vise à permettre aux employeurs agricoles de rester compétitifs, en leur accordant une compensation couvrant la période d'adaptation et de moindre efficacité dans leur nouvel emploi agricole des personnes non qualifiées.
Tel est l'objet de notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 200 rectifié bis, présenté par Mmes Henneron, Gousseau et Rozier, MM. Grillot, Huré et Revet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 8 du titre Ier du livre VII du code rural est complété par une section ainsi rédigée :
« Section ... - Aide à l'emploi en agriculture
« Art. L. ... - Les employeurs relevant des professions définies aux 1° à 4° de l'article L. 722-1 du code rural peuvent bénéficier d'une aide à l'emploi pour les embauches, réalisées à compter du 1er janvier 2006, de demandeurs d'emplois sortis du système éducatif sans qualification professionnelle reconnue ou n'ayant pas acquis par expérience ou par la formation professionnelle de qualification professionnelle reconnue.
« Cette aide est égale par mois et par salarié embauché à dix pour cent du salaire minimum interprofessionnel de croissance par le nombre d'heures rémunérées par l'employeur pendant le mois considéré. Il n'y a pas lieu à versement de l'aide si le salarié embauché a déjà été titulaire d'un contrat de travail avec le même employeur durant les douze mois précédents.
« Elle est versée trimestriellement à l'employeur par le centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles selon des modalités à définir par décret.
« L'aide prévue au présent article est cumulable avec le bénéfice d'une exonération totale ou partielle de cotisations sociales ou l'application de taux spécifiques d'assiettes ou montants forfaitaires de cotisations.
« L'aide est versée pendant une durée maximale de douze mois à compter de l'embauche. En cas de suspension du contrat de travail, non rémunérée par l'employeur, cette durée est prorogée d'une durée équivalente.
« Cette aide est financée par une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
« Pour bénéficier de l'aide prévue au présent article, l'employeur ne doit pas avoir fait l'objet d'une condamnation relevant de l'article L. 325-1 du code du travail. »
La parole est à Mme Françoise Henneron.
Mme Françoise Henneron. Je fais miens les propos de M. Mortemousque, qui vient de défendre excellemment un amendement presque identique au nôtre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. M. Mortemousque soulève un vrai problème s'agissant de l'emploi non qualifié.
Je voudrais lui rappeler que le projet de loi comporte déjà de très nombreuses dispositions en faveur de l'emploi. Il convient de mesurer l'incidence de ces nouvelles mesures avant de prévoir d'autres dispositifs. Il me paraît important de valider d'abord ce qui nous est aujourd'hui proposé avant d'envisager d'autres mesures qui concerneraient, en particulier, l'emploi non qualifié.
Je crains, en outre, que l'adoption d'une telle mesure ne provoque de très nombreuses demandes conventionnelles.
La commission des affaires économiques demande donc à M. Mortemousque et à Mme Henneron de bien vouloir retirer leurs amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, ministre. Si ces amendements devaient être maintenus, ils tomberaient clairement sous le coup de l'article 40 de la Constitution. C'est une évidence !
Je voudrais signaler à M. Mortemousque et à Mme Henneron que des articles comportant toute une série de mesures inspirées par le rapport de M. Jacques Le Guen et concernant l'emploi des travailleurs saisonniers vont maintenant venir en discussion. Celles et ceux d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qui souhaitent une amélioration des conditions d'emploi des travailleurs occasionnels auront ainsi, me semble-t-il, satisfaction.
J'ajoute que la mise en oeuvre des dispositions présentées au travers des deux amendements induirait, dans la mesure où l'on compte un million de travailleurs saisonniers, plusieurs centaines de millions d'euros de dépenses supplémentaires.
Nous sommes donc vraiment là devant une difficulté, et je souhaite le retrait de ces amendements, même si je comprends tout à fait leur objet social.
M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote sur l'amendement n° 164 rectifié.
M. Charles Revet. Je ne partage pas tout à fait votre point de vue, monsieur le ministre, ni celui de M. le rapporteur, y compris au sujet de l'application de l'article 40 de la Constitution. (M. Michel Charasse s'exclame.)
Je ne suis pas juriste, monsieur Charasse, et je n'ai jamais été secrétaire d'Etat au budget, mais je regrette que l'on ne sache pas, dans ce pays, envisager les choses de manière globale.
En effet, que vont devenir les gens dont il s'agit ici si nous ne favorisons pas leur embauche dans le secteur agricole ? Ils seront à la charge de la société, puisqu'ils ne trouveront pas d'autre travail, et cela coûtera probablement plus cher que s'ils pouvaient être employés, par exemple, dans une exploitation agricole.
On a beaucoup parlé, tout à l'heure, de l'aspect social des problèmes qui se posent dans l'agriculture. Sans remonter trop loin dans le passé, je pose la question : que se passait-il voilà trente ou quarante ans dans nos communes ? Les gosses qui n'étaient pas en mesure de trouver un emploi étaient souvent accueillis dans les exploitations agricoles. Ils y faisaient de petits travaux, ils étaient pris en charge par la famille, dont ils faisaient quasiment partie. Sur le plan humain, cela ne valait-il pas mieux que de les placer dans des établissements où ils ne se sentent pas bien ?
Au-delà, j'ai le sentiment que le fait de toujours cloisonner les choses ne nous permet pas d'avancer. Dans la plupart des cas, les personnes dont il est ici question ne pourront s'insérer nulle part.
Certes, les techniques ont évolué dans l'agriculture.
M. Gérard César, rapporteur. Là est le problème !
M. Charles Revet. Compte tenu de l'utilisation de technologies de pointe, il est vrai que ces personnes, jeunes ou moins jeunes, ne pourraient trouver place dans certaines exploitations, mais il existe aussi des besoins en main-d'oeuvre peu qualifiée, par exemple dans l'élevage, en particulier ovin, qui joue un rôle important dans de nombreuses régions en matière d'aménagement du territoire. Ainsi, à l'heure actuelle, les cours de ferme ou les talus ne sont plus entretenus parce que les exploitants, qui souvent travaillent seuls, n'ont plus le temps d'assumer toutes les tâches.
Nous devons donc prendre en compte d'abord l'aspect humain et social, avant l'aménagement du territoire.
Je tenais à faire ces observations, car on oublie trop souvent cette dimension des problèmes. On invoque des raisons fiscales ou techniques pour expliquer qu'elle ne peut être prise en considération, et l'on place les personnes concernées dans des établissements qui ne leur conviennent pas.
Ainsi, voilà quelques années, j'ai inauguré un établissement social dans mon département de Seine-Maritime. Le conseiller général du canton de Saint-Valéry-en-Caux, me désignant un homme âgé de quarante à cinquante ans, m'a alors dit que, deux décennies plus tôt, il travaillait dans une exploitation agricole. Cette situation ne pouvant être maintenue, il a été placé dans un établissement où il tournait en rond. On l'a envoyé ensuite dans un autre établissement, où l'espace ne manquait pas, car il s'agissait d'une ancienne installation militaire. Il s'est alors mis à jardiner et a entraîné ses amis dans cette activité, qui lui permettait à nouveau de s'épanouir.
Il convient donc de prendre en compte, je le répète, l'aspect humain des choses, même si cela ne peut se faire au travers des deux amendements présentés. Tout ne se résume pas à l'économie ou à la technique, il faut aussi avoir une vision humaine et sociale des problèmes !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Pastor. Je voudrais formuler une remarque à la suite des propos de M. Revet.
Je partage pleinement le point de vue de notre collègue quand il souhaite que l'élaboration de nos lois soit davantage marquée par un souci d'humanisme.
Cependant, soyons logiques ! On nous présente aujourd'hui un projet de loi qui tend à libéraliser complètement l'activité agricole et à faire de l'exploitation agricole une entreprise. Or, parallèlement, certains de nos collègues de la majorité proposent de prendre des mesures spécifiques en faveur de l'emploi dans le secteur agricole. Je voudrais leur rappeler que le gouvernement qu'ils soutiennent se préoccupe de l'emploi et a notamment élaboré des dispositions tendant à établir de nouveaux types de contrats d'embauche. Je ne vois pas pourquoi l'entreprise, en particulier l'entreprise agricole, ne bénéficierait pas des mesures générales prises en matière d'emploi !
En tout état de cause, on ne peut pas vouloir à la fois le beurre et l'argent du beurre, préconiser l'hyperlibéralisme pour les entreprises et prendre, en même temps, des mesures particulières s'agissant de l'agriculture. Il y a là une forme d'ambiguïté.
En revanche, il est tout à fait vrai - cela est le propre de l'agriculture, non de l'entreprise - qu'il existe des activités fortement saisonnières, imposant l'instauration de dispositions spécifiques au travail saisonnier. Toutefois, il s'agit là d'une autre question, que nous aborderons tout à l'heure.
C'est la raison pour laquelle, que ces amendements soient constitutionnels ou non, que l'article 40 s'applique ou non, je souhaiterais pour ma part que l'on garde tout de même une certaine logique au regard du texte présenté.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Dans cette affaire, il y a le fond et la forme, et je ne voudrais pas que M. Revet pense que je lui cherche des noises.
Tout à l'heure, M. le ministre a évoqué l'article 40 de la Constitution, mais il ne l'a pas invoqué.
M. Gérard César, rapporteur. Exactement !
M. Michel Charasse. Pour le moment, nous en sommes là, et quand M. Revet a dit qu'il ne croyait pas que l'article 40 puisse s'appliquer en l'occurrence, je me suis exclamé, parce que je pense que, sur ce point, M. le ministre a raison. Cela étant, c'est à lui de sortir l'arme !
Sur le fond, je suis tout à fait d'accord avec ce que vient de dire mon ami Jean-Marc Pastor, et nous ne sommes pas très loin, monsieur Revet, de porter la même appréciation sur les situations dont il s'agit ici, et que nous rencontrons tous dans nos départements.
Cependant, sur la forme, mon cher collègue Revet, en tant que coauteur de l'un des amendements, vous avez pris la sage précaution, à l'avant-dernier alinéa, de prévoir le financement de la mesure présentée par une taxe particulière. Or il se trouve que cet amendement tend à créer une charge et que, aux termes de l'article 40, celle-ci n'est pas compensable, la compensation n'étant possible qu'en matière fiscale.
Si vous aviez prévu une déduction fiscale, compensée comme vous le proposez, l'article 40 ne serait pas applicable, mais il se trouve que, en l'occurrence, il l'est. C'est un problème de rédaction, monsieur Revet ! Mais vous êtes suffisamment ancien dans cette maison pour ne pas faire l'innocent et tenter de nous faire croire que vous n'auriez pas compris la mécanique de l'article 40 de la Constitution alors que, dans d'autres débats, je vous ai vu le manipuler avec une grande finesse et une grande intelligence ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, pour explication de vote.
M. Dominique Mortemousque. Je ne pensais pas que mon amendement allait susciter un tel débat !
M. Gérard César, rapporteur. Il le mérite !
M. Dominique Mortemousque. Cela étant, je souhaiterais apporter quelques précisions.
Par cet amendement, il s'agissait d'instituer une forme d'apprentissage, de rendre aptes à gérer leurs propres affaires des gens qui, aujourd'hui, ne le sont pas.
A partir de là, le débat a été élargi et M. le ministre a mis fortement l'accent sur le délicat problème de la main-d'oeuvre saisonnière. Il sait combien j'y suis sensible pour y être confronté dans mon propre département ! Je remercie donc M. le ministre de son implication en la matière.
M. le rapporteur a en outre évoqué le nouveau « package » de mesures concernant l'emploi, relayé en cela par notre collègue M. Pastor. Eh bien, nous allons l'utiliser !
Mais je ne peux m'empêcher d'ajouter quelques mots aux propos de notre collègue M. Revet, parce que, en l'écoutant, j'avais l'impression de me retrouver en culottes courtes dans nos cours de ferme.
Notre collègue a eu raison d'insister sur un point qu'il faudra que nous traitions - pas ce matin, certes - et sur lequel il nous faudra méditer. Car la Haute Assemblée, monsieur Raoult, mes chers collègues, sert aussi à réfléchir !
Ainsi, certaines personnes sont toute leur vie dans l'incapacité d'être leurs propres patrons. Avant, ils vivaient dans la maison, dans la famille, ils y étaient attachés, ils travaillaient le coin de jardin, ils taillaient le coin de haie, ils étaient contents et ils ne coûtaient rien à la société. Aujourd'hui, ces personnes, qui ont souvent perdu les racines sans lesquelles on n'a plus d'identité, sont placées dans des établissements qui coûtent très cher : combien coûte un handicapé dans une maison spécialisée, compte tenu des 35 heures, des dimanches, des jours fériés ?
Nous n'allons pas traiter cette question ce matin, mais, comme l'a plaidé tout à l'heure notre collègue M. Revet, nous devons réfléchir sur la façon dont nous pourrions insérer, demain, des jeunes dans des cours de ferme.
Il est vrai que certaines fermes dans lesquelles le travail est très technique ne peuvent le supporter, mais ce n'est pas le cas dans d'autres. Et je puis vous dire que certains, dans mon département, viennent me trouver en me disant : « Aidez-nous à insérer ces gens ; si nous n'avons pas des charges importantes, nous sommes prêts, ma femme, mes enfants et moi, à les accueillir dans la famille. » Encore faut-il qu'on leur facilite le chemin, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui !
Cela étant, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 164 rectifié est retiré.
La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote sur l'amendement n° 200 rectifié bis.
M. Paul Raoult. Nous abordons, une fois encore, un sujet important qui pose, à mon avis, la question de notre relation au travail manuel : quelle forme d'éducation entendons-nous donner à nos enfants par rapport au travail manuel, un travail pour lequel quelqu'un vend, en quelque sorte, sa force physique ? Voilà la difficulté !
Il faut bien dire que, dans notre système éducatif, aujourd'hui, l'incitation au travail purement manuel est nulle. Il nous faut aussi y penser ! Les jeunes gens âgés de dix-huit à vingt et un ans et qui sont en complet échec scolaire n'ont jamais pratiqué l'effort physique que représente le travail dans une ferme, à savoir, concrètement, pousser une brouette,...
M. Michel Charasse. Une brouette pleine, qui plus est ! (Sourires.)
M. Paul Raoult. ...manier une pelle, une pioche, une faux !
L'image idyllique que vous nous avez présentée, mes chers collègues, renvoie aux années cinquante ! Regardez autour de vous : les jeunes n'apprennent plus l'effort physique ni le travail manuel. Vous pouvez toujours accorder des déductions, vous ne trouverez pas d'amateurs pour faire le travail !
M. Dominique Mortemousque. Ce n'est pas vrai !
M. Paul Raoult. Ensuite, pensez-vous vraiment que c'est en diminuant les charges que vous allez créer une situation favorable ?
Cela fait trente ans que les gouvernements, de gauche comme de droite, diminuent les charges, et le chômage n'a pas diminué pour autant. C'est un échec ! Alors, arrêtez de penser que l'emploi ira mieux demain parce que l'on aura diminué les charges ! Je n'y crois pas !
La vraie solution, je le répète, consiste à permettre aux agriculteurs de gagner convenablement leur vie pour payer correctement des salariés.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Eh oui, comme dans le bâtiment !
M. Paul Raoult. Tant que vous penserez que c'est en diminuant les charges et en donnant des salaires dérisoires aux salariés que l'on va augmenter l'emploi, vous vous tromperez ! Cela fait trente ans que l'on raisonne à l'inverse de ce qu'il faudrait...
Nous sommes donc confrontés à deux problèmes.
Premièrement, nous rencontrons des difficultés liées à la relation au travail manuel ou physique. Ainsi, dans nos communes, il y a toujours des travaux de nettoyage à réaliser. Mais allez puiser dans la liste des RMIstes, et vous verrez combien d'amateurs vous aurez pour faire ce travail ! La relation au travail manuel constitue donc bien aujourd'hui un barrage culturel important.
Deuxièmement, je pense qu'il conviendrait de réévaluer d'abord le salaire des gens concernés.
Je reprendrai l'exemple très simple de la restauration : on nous a dit - j'ai encore les propos dans l'oreille ! - que si l'on diminuait leurs charges les restaurateurs allaient créer 60 000 emplois. J'ai pourtant lu récemment dans un rapport que quelque 10 000 emplois avaient peut-être - peut-être ! - été créés. Alors, ce n'est pas la peine d'essayer la même procédure : elle ira encore à l'échec !
M. le président. Madame Henneron, l'amendement n° 200 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Françoise Henneron. Je rejoins tout à fait les propos de mes collègues MM. Revet et Mortemousque.
M. Gérard César, rapporteur. Que nous partageons !
Mme Françoise Henneron. C'est donc avec beaucoup de regret que je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 200 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 169 rectifié, présenté par MM. Barraux et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 741-16 du code rural est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le décret fixe les taux d'abattement maximum, applicables pour une durée d'un an, aux secteurs professionnels confrontés à des difficultés économiques. »
La parole est à M. Bernard Barraux.
M. Bernard Barraux. Je viens d'entendre une plaidoirie fort intéressante, et je me dois maintenant d'intervenir en sens contraire. Il est vrai qu'il y a des amendements auxquels on croit plus ou moins,... mais je vais tout de même essayer de défendre celui-ci avec conviction. (Murmures amusés sur plusieurs travées.)
L'endettement des secteurs en difficulté aux taux les plus favorables du dispositif occasionnel - soit une exonération de 90 % pour des contrats à durée déterminée et une exonération de 100 % pour les contrats à durée indéterminée - permettrait peut-être de répondre à la généralisation de la crise économique à tous les secteurs professionnels de l'agriculture, en particulier à celui de la viticulture et des producteurs de semence.
La réalité économique des entreprises et des exploitations agricoles fait que le coût du travail est actuellement une charge trop lourde. Les augmentations successives du SMIC n'y sont-elles pas, au demeurant, étrangères ?
Il est donc nécessaire d'améliorer le dispositif d'exonération des charges des salariés saisonniers pour que toutes les entreprises agricoles visées dans le champ d'application du dispositif occasionnel bénéficient, quel que soit leur secteur d'activité, du même taux d'exonération.
Si les viticulteurs ainsi que les producteurs de semence n'obtiennent pas ce soutien, il semblerait que bon nombre d'emplois soient remis en cause dans les mois et les années à venir.
Quoi qu'il en soit, les personnes qui s'intéressent à la viticulture connaissent certainement mieux le sujet que moi parce que, dans mon secteur, il n'y a que des boeufs blancs ! (Rires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Nous avons tous noté avec quelle profonde conviction l'auteur de l'amendement défendait sa position ! (Sourires.)
Cet amendement soulève tout de même un point très important. Cela étant, la référence au décret ne permet pas d'atteindre les objectifs fixés, mais l'amendement n° 19 de la commission, que nous allons examiner dans un instant et qui prévoit l'exonération d'un certain nombre de charges pour les travailleurs occasionnels, répondra en partie aux préoccupations de M. Barraux, à qui je demande, en conséquence, de retirer son amendement.
M. Bernard Barraux. Je le retire !
M. le président. L'amendement n° 169 rectifié est retiré.