sommaire

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

1. Procès-verbal

2. Décès d'un ancien sénateur

3. Communication relative à des commissions mixtes paritaires

4. Commission mixte paritaire

5. Demande d'autorisation de missions d'information

6. Gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères. - Débat (Ordre du jour réservé.)

MM. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Yves Pozzo di Borgo, Mmes Hélène Luc, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Ferrand, Robert Del Picchia, Michel Charasse, Jean Arthuis, président de la commission des finances.

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères.

Clôture du débat.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

7. Locaux du Congrès à Versailles. - Adoption d'une proposition de loi. (Ordre du jour réservé.)

Discussion générale : MM. le président, Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication ; René Garrec, rapporteur de la commission des lois ; Jean-Claude Peyronnet.

présidence de M. Guy Fischer

MM. Yves Détraigne, Mme Bernadette Dupont, M. Michel Charasse.

Clôture de la discussion générale.

Article additionnel avant l'article 1er

Amendement no 6 de M. Michel Dreyfus-Schmidt. - M. Michel Dreyfus-Schmidt. - Retrait.

Article 1er

Amendement no 1 de la commission et sous-amendement no 11 de M. Michel Charasse ; amendement no 7 de M. Jean-Claude Peyronnet. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Peyronnet, le ministre, Michel Charasse, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Rejet du sous-amendement no 11 ; adoption de l'amendement no 1 rédigeant l'article, l'amendement no 7 devenant sans objet.

Article 2

Amendement no 8 de M. Jean-Claude Peyronnet. - M. Jean-Claude Peyronnet. - Retrait.

Adoption de l'article.

Article 3

MM. Michel Charasse, le rapporteur, le ministre.

Amendements nos 2 de la commission, 10 de M. Jean-Claude Peyronnet et 9 de M. Michel Charasse. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Peyronnet, Michel Charasse, le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet d'une demande de priorité de l'amendement no 10 ; adoption de l'amendement no 2, les amendements nos 10 et 9 devenant sans objet.

Amendement no 3 de M. Josselin de Rohan. - MM. Josselin de Rohan, le rapporteur, le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Claude Peyronnet. - Adoption.

Amendement no 4 de M. Patrice Gélard. - MM. Patrice Gélard, le rapporteur, le ministre, Michel Charasse. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Vote sur l'ensemble

MM. Josselin de Rohan, Jean-Claude Peyronnet, le ministre.

Adoption de la proposition de loi.

Suspension et reprise de la séance

8. Modification du règlement pour la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission. (Ordre du jour réservé.)

Discussion générale : MM. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois ; Bernard Frimat, Alain Lambert.

Clôture de la discussion générale.

Question préalable

Motion no 8 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. le rapporteur, Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Bernard Frimat, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. - Rejet.

Article 1er. - Adoption

Article additionnel avant l'article 2

Amendement no 4 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. le rapporteur. - Rejet.

Article 2. - Adoption

Article 3

Amendement no 1 de M. Bernard Frimat. - MM. Bernard Frimat, le rapporteur, Jean-Claude Frécon, le président de la commission, Daniel Raoul, Alain Lambert, le rapporteur général. - Rejet.

Adoption de l'article.

Article 4. - Adoption

Article additionnel avant l'article 5

Amendement no 3 de M. Bernard Frimat. - MM. Bernard Frimat, le rapporteur, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Rejet.

Article 5

Amendement no 7 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. le rapporteur. - Rejet.

Amendement no 2 de M. Michel Charasse. - MM. Bernard Frimat, le rapporteur. - Rejet.

Adoption de l'article.

Articles 6 et 7. - Adoption

Vote sur l'ensemble

M. Bernard Frimat, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Adoption de la proposition de résolution.

9. Transmission d'un projet de loi

10. Dépôt de propositions de loi

11. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution

12. Dépôt de rapports

13. Dépôt d'un rapport d'information

14. Ordre du jour

compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

DÉCÈS D'UN ANCIEN SÉNATEUR

M. le président. J'ai le regret de vous rappeler le décès de notre ancien collègue Michel Maurice-Bokanowski, qui fut sénateur des Hauts-de-Seine de 1958 à 1995.

3

COMMUNICATION RELATIVE à des coMMISSIONS MIXTES PARITAIRES

M. le président. J'informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion respectivement du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux et du projet de loi relatif à la régulation des activités postales sont parvenues, chacune, à l'adoption d'un texte commun.

4

COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Monsieur le président,

« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation sur l'énergie.

« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter le Sénat à désigner ses représentants au sein de cette commission.

« J'adresse ce jour, à M. le président de l'Assemblée nationale, une demande tendant aux mêmes fins.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération.

Signé : Jean-Pierre RAFFARIN »

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du règlement.

5

DEMANDE D'AUTORISATION De MISSIONs D'INFORMATION

M. le président. M. le président du Sénat a été saisi de deux demandes tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner des missions d'information par :

- M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, en vue de se rendre à la Réunion et à Mayotte pour y examiner la prise en charge de la périnatalité et de la petite enfance ;

- M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques et du Plan, en vue de se rendre en Lituanie et en Estonie pour étudier la situation économique de ces pays et leurs relations avec la France, notamment dans le cadre de leur récente intégration à l'Union européenne.

Le Sénat sera appelé à statuer sur ces demandes dans les formes fixées par l'article 21 du règlement.

6

gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères

Débat (Ordre du jour réservé)

M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur la gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur l'initiative du président de la commission des finances et conformément à la volonté du président du Sénat de voir affirmer, renforcer et de valoriser notre fonction de contrôle et d'évaluation des politiques publiques, nous entamons un important débat sur la gestion du patrimoine immobilier du Quai d'Orsay.

Ce débat ne peut se résumer à de simples enjeux techniques. La question, en effet, est aujourd'hui centrale, du point de vue de la commission des finances du Sénat, pour au moins quatre raisons.

La première relève du symbole. Elle tient au fait que les bâtiments du Quai d'Orsay à l'étranger, les bâtiments des ambassades certes, mais aussi et peut-être surtout des consulats, des centres culturels, des écoles françaises, constituent le premier visage que rencontrent nos interlocuteurs lorsqu'ils veulent entrer en contact avec notre pays.

Ces bâtiments donnent une certaine image de la France, qu'il s'agisse évidemment du geste architectural qui les a dessinés, mais aussi, et cela a été parfois oublié, de l'état dans lequel ils se trouvent, de l'entretien dont ils ont, ou n'ont pas, bénéficié.

La situation du patrimoine immobilier du Quai d'Orsay donne ainsi un premier signe, à l'étranger, de la santé de notre Etat et des réformes qu'il est en mesure, ou n'est pas en mesure, d'engager.

La deuxième raison est de l'ordre de la cohérence. La France a de longue date, vous le savez bien, monsieur le ministre, une diplomatie exigeante dans ses discours et dans ses actes. Cette exigence sur la scène internationale oblige le Quai d'Orsay à une réelle exemplarité dans sa gestion. Par le professionnalisme qu'elle requiert, la gestion immobilière en est une composante essentielle.

La troisième raison tient au respect des priorités du Gouvernement. Celui-ci a décidé de mener une politique plus dynamique dans la gestion du patrimoine immobilier de l'Etat, qui passe par un programme volontariste de cessions d'immeubles : 800 millions d'euros de recettes sont attendus à ce titre en 2005.

Le ministère des affaires étrangères dispose d'un parc immobilier important, d'une surface totale de l'ordre de 2,4 millions de mètres carrés, pour 90 % à l'étranger, dont il est propriétaire aux trois quarts.

L'évolution de ses missions, la nécessité de concentrer ses ressources sur un certain nombre de zones géographiques prioritaires, la nécessité, localement, de rationaliser certaines implantations, obligent le Quai d'Orsay à un vaste exercice de redéploiement et d'optimisation de son patrimoine immobilier.

Cet exercice, s'il n'est pas toujours simple, compte tenu de la très grande hétérogénéité des régimes juridiques auxquels sont soumis les bâtiments français à l'étranger, mérite d'être mené, en harmonie avec la nouvelle mission interministérielle pour la valorisation du patrimoine immobilier de l'Etat.

Enfin, la quatrième raison est liée à l'impératif de bonne gestion des deniers publics qui nous anime tous, surtout dans un contexte budgétaire contraint. De ce point de vue, dans son rapport public pour 2004, la Cour des comptes a dressé un constat très sombre. Pour y remédier, il faut s'interroger sur les raisons qui ont conduit à d'importants surcoûts dans les opérations liées, à Paris, à la réhabilitation de l'immeuble de la rue La Pérouse, et, à Berlin comme à Singapour, à la construction d'une nouvelle ambassade de France. Dans le cas de Singapour, le coût de l'opération a atteint 9,3 millions d'euros, pour un objectif initial de 4,3 millions d'euros, soit un dépassement de 117 % !

Nous disposons aujourd'hui d'un diagnostic, largement partagé, sur la fonction immobilière du ministère des affaires étrangères, diagnostic qui a été entamé en 2004 par notre ancien collègue Jacques Chaumont et que j'ai poursuivi, en 2005, en organisant plusieurs réunions de travail avec les principaux responsables en matière immobilière et budgétaire, tant au ministère des affaires étrangères qu'au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. A cet égard, je tiens à souligner, monsieur le ministre, que vos services m'ont toujours facilité les choses.

Au cours du présent débat, nous pourrons également nous appuyer sur les travaux de notre collègue député Jérôme Chartier, ainsi que sur ceux qui ont été réalisés récemment par la Cour des comptes.

En envisageant les maux dont ont pu souffrir les opérations immobilières du Quai d'Orsay, je crois que ce débat nous permettra de dessiner des pistes d'amélioration. Je formulerai, quant à moi, quelques suggestions, des remarques, mais surtout beaucoup d'interrogations, auxquelles j'espère que vous pourrez répondre, monsieur le ministre. Je sais que vous vous êtes engagés personnellement dans la réforme de la fonction immobilière de votre ministère.

Quels sont les objectifs de cette fonction immobilière ? J'en relèverai trois, qui présentent tous la caractéristique d'être non pas des objectifs en soi, mais d'être au service de la diplomatie française. Dans le nouveau jargon issu de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, la gestion immobilière relève de la « fonction soutien ».

Le premier des objectifs de cette fonction soutien consiste à accompagner l'évolution du réseau diplomatique de la France dans les pays où l'effort doit être développé comme dans ceux où les implantations peuvent être réduites.

Dans le premier cas, la coordination interministérielle doit être un impératif, de telle sorte que les services du ministère des affaires étrangères, du ministère de la défense, du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, à travers les missions économiques, et de l'éducation nationale mènent une politique immobilière à l'étranger, sinon totalement intégrée, du moins fortement concertée.

On peut regretter que tel ne soit pas toujours le cas. Ainsi, à Shanghai, ville d'importance pourtant stratégique, la mission économique a souhaité faire cavalier seul en matière immobilière, alors qu'un « campus commun » avec les services du Quai d'Orsay aurait pu être approprié.

La commission interministérielle chargée d'émettre un avis sur les opérations immobilières de l'Etat à l'étranger doit jouer un rôle accru dans ce domaine.

Dans le second cas, celui des pays où il convient de réduire les implantations du Quai d'Orsay, le désengagement en matière immobilière doit être mené avec volontarisme. Afin que ce désengagement soit aussi dynamique que possible, je pense, monsieur le ministre, qu'il est nécessaire de prévoir un intéressement intégral de votre ministère aux produits de cession de son patrimoine. Si une actualisation de la circulaire « Cresson », qui détermine le taux de retour des recettes immobilières aux ministères, devait néanmoins avoir lieu, il faudrait qu'elle intervienne le plus tôt possible, de façon que le Quai d'Orsay soit rapidement fixé sur son sort.

Le produit des cessions des actifs immobiliers du ministère des affaires étrangères a atteint 13 millions d'euros en 2004. Près de 68 millions d'euros peuvent être attendus entre 2005 et 2007, ce qui doit faire du Quai d'Orsay, mes chers collègues, un ministère pivot de la politique gouvernementale de cession d'actifs immobiliers.

En la matière, il ne peut y avoir de tabous. Il convient donc de se féliciter que le principe de la vente d'un palais florentin, certes prestigieux, mais dont le Quai d'Orsay n'avait plus l'usage, soit désormais acté.

Dans ses cessions, le Quai d'Orsay connaît certains succès. Ainsi en est-il des consulats allemands de Düsseldorf et de Hambourg, dont la vente devrait être réalisée dans de bonnes conditions.

L'échec le plus retentissant de cette politique est à trouver, lui aussi, hélas ! en Allemagne. Quinze ans après la réunification allemande, le château d'Ernich et l'ancienne chancellerie à Bonn ne sont toujours pas vendus. Pouvez-vous nous donner des éléments nouveaux, monsieur le ministre, sur la vente éventuelle de ces deux bâtiments, sachant que, selon la Cour des comptes, les frais d'entretien du château d'Ernich représentent 46.000 euros par an, alors même qu'il est inoccupé ?

Le deuxième objectif de la politique immobilière du Quai d'Orsay consiste, me semble-t-il, à trouver les moyens d'une rationalisation de ses implantations, tant à Paris que dans les grandes capitales étrangères.

Pour ce qui est de Paris, il convient d'évoquer les onze implantations du Quai d'Orsay et le projet de rationalisation dont vous avez fait état à plusieurs reprises en parlant de « site unique ». Où en est-on à ce sujet ? Quel est l'horizon budgétaire d'un tel projet ? Des études de faisabilité ont-elles déjà été réalisées, par exemple sur l'opportunité, ou l'inopportunité, de partenariats public-privé ?

En ce qui concerne les grandes capitales étrangères, il convient sans doute d'examiner plus avant les conditions de représentation de la France à Bruxelles. Là encore, vous avez sûrement des éléments à nous communiquer, monsieur le ministre.

Outre la représentation « bilatérale », plusieurs représentations de la France coexistent : auprès de l'Union européenne, après de l'OTAN et auprès de l'UEO. N'y a-t-il pas là, en matière immobilière, quelques possibilités de rationalisation ? Je suis persuadé, monsieur le ministre, que vous nous apporterez une réponse à cette question.

Par ailleurs, quels sont vos projets à Londres et à Madrid pour que nos diplomates et nos centres culturels soient logés certes dans de bonnes conditions, mais autant que faire se peut à moindre coût ?

Enfin, au Brésil, où je me rends dans quelques heures, il convient de relever le cas de la Maison de France, bâtiment surdimensionné - il ne comprend pas moins de treize étages ! -, dont les coûts d'entretien atteignent trois fois ceux des consulats d'Amérique du Nord ! (M. de Rohan s'exclame.) Faut-il en rester là, au prétexte que le bâtiment n'est pas facilement vendable en raison d'obstacles juridiques, ou bien, au contraire, poursuivre avec volonté un effort de rationalisation ? Ma mission au Brésil contribuera, je l'espère, à fournir une réponse à cet égard.

J'en viens au troisième objectif de la politique immobilière : entretenir correctement nos bâtiments. De ce point de vue, des défauts manifestes sont relevés ici et là.

Notre président souhaitera sans doute évoquer devant vous le cas de l'ambassade de France à Delhi, dont la résidence tombe littéralement en morceaux.

Le centre culturel de Libreville est en très mauvais état, m'a-t-on indiqué, alors même que le bâtiment est récent.

La fonction d'entretien des bâtiments serait-elle le parent pauvre d'une politique immobilière du Quai d'Orsay marquant sa préférence pour quelques bâtiments de prestige ?

J'ai bien noté que, dans le cadre de la LOLF, une meilleure appréhension des coûts de maintenance des bâtiments selon les « règles de la profession » applicables en matière immobilière pourrait amener, grâce à des crédits désormais évalués à l'euro près, à une réévaluation des enveloppes dédiées à l'entretien. Elles s'élèvent aujourd'hui à 40 millions d'euros pour 2,4 millions de mètres carrés. En vertu de la LOLF, des enveloppes globales seront désormais dévolues aux gestionnaires : c'est à eux qu'il appartiendra de réaliser des arbitrages pour que la fonction entretien ne soit pas négligée.

J'ai bien conscience que la politique immobilière du Quai d'Orsay intervient, je le répète, dans un cadre budgétaire contraint. Le titre V du ministère des affaires étrangères a fait l'objet de régulations budgétaires significatives au cours de ces dernières années. Néanmoins, nous le savons tous, en matière budgétaire, l'horizon radieux n'est peut-être pas inaccessible, mais il est encore lointain !

En attendant, à enveloppe constante, il faut donc établir des priorités et les hiérarchiser. Une programmation pluriannuelle est indispensable. Monsieur le ministre, quelles sont vos priorités budgétaires pour les années à venir, en matière de construction immobilière notamment ? Par exemple, la création d'un bâtiment pour les archives diplomatiques à La Courneuve est-elle à l'ordre du jour sur le plan budgétaire ?

Il faut également gérer au mieux, et de manière rigoureuse, les crédits alloués à la fonction immobilière du Quai. Pour en tirer le meilleur parti, une professionnalisation de la politique immobilière du ministère des affaires étrangères est souhaitable. Dans son rapport public pour 2004, la Cour des comptes a relevé des dysfonctionnements nombreux, conduisant à des surcoûts très significatifs dans la conduite des opérations, à des projets fréquemment modifiés et, parfois, à des contentieux. La Cour des comptes regrette une programmation d'ensemble irréaliste, une confusion dans la prise de décision, un recours excessif aux bons de commande, une expertise insuffisante en matière fiscale.

Quels remèdes envisagez-vous à ce sujet, monsieur le ministre ? N'y a-t-il pas lieu de réorganiser les services en charge de la politique immobilière du Quai d'Orsay, aujourd'hui trop éclatés ? Ne faut-il pas élargir les compétences de la commission interministérielle aux projets de construction, afin que ces derniers, très risqués sur le plan budgétaire, puissent être abordés d'un oeil neuf par des expertises extérieures au Quai et de manière collégiale ?

Une politique immobilière est nécessairement assise sur une bonne connaissance du patrimoine. Le tableau général des propriétés de l'Etat, en ce qui concerne le Quai d'Orsay, est-il enfin à jour ? Monsieur le ministre, cet outil informatisé étant, du point de vue du service des domaines, un instrument d'inventaire et non de gestion, votre ministère compte-t-il mettre en place des logiciels informatiques « interfacés » avec le tableau général des propriétés de l'Etat ? Une cellule de méthode sera-t-elle mise en place au sein des services immobiliers de Bercy ? Des programmes types peuvent-ils être définis pour les chancelleries ?

Telles sont quelques-unes des questions que je me suis posées au cours des rencontres que j'ai eues avec vos différents collaborateurs.

Je crois utile le renforcement de certaines fonctions supports de la gestion immobilière du Quai d'Orsay, notamment en matière juridique et fiscale, afin de mener les opérations avec toute l'expertise nécessaire. Dans cette perspective, je considère que Bercy doit jouer tout son rôle comme prestataire de services, afin de faciliter la gestion du domaine de l'Etat à l'étranger.

Je crois, par ailleurs, à une professionnalisation possible de la maîtrise d'ouvrage, surtout dans la perspective d'un grand projet de site unique, par apport de compétences nouvelles, internes ou extérieures à l'administration.

J'observe enfin que, au cours des entretiens que j'ai eus au Quai d'Orsay, ont été évoqués, d'une part, la possibilité d'un contrat de performance passé avec la direction du budget et, d'autre part, la mise en oeuvre, au sein du ministère, de loyers domaniaux pour les immeubles dont le Quai d'Orsay est propriétaire.

En théorie, les loyers domaniaux pourraient permettre un arbitrage optimal sur le plan économique entre acquisition et location, ainsi qu'une responsabilisation accrue des ambassadeurs dans la gestion du patrimoine dont ils ont la charge, en mettant fin à l'illusion optique de la gratuité du domaine de l'Etat.

En pratique, où en êtes-vous, monsieur le ministre, s'agissant des projets de contrat de performance et de loyers domaniaux ? Ces points ont-ils été évoqués avec Bercy ?

J'ai eu l'occasion de m'entretenir de ces sujets avec vos collaborateurs. Ces derniers m'ont fait part d'un certain nombre d'observations, s'agissant en particulier des loyers domaniaux. Il en ressort que c'est une idée parfaitement séduisante, mais qui n'est pas aussi facile à mettre en pratique que l'on pourrait l'imaginer.

Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, je souhaite voir confortée la fonction immobilière du Quai d'Orsay. Elle mérite indéniablement que des indicateurs de performance mesurant son efficience soient inscrits au sein de la future mission « action extérieure de la France », en application de la LOLF.

En effet, je ne doute pas un seul instant que le Quai d'Orsay puisse constituer, à moyen terme, un exemple pour les autres ministères sur ce point. Telle est la raison pour laquelle j'attends avec intérêt les pistes de réforme que vous voudrez bien tracer, monsieur le ministre, afin que l'immobilier du ministère des affaires étrangères rende le meilleur service possible à notre diplomatie, mais aussi à notre pays dans son ensemble. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - M. Michel Charasse applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 8 décembre dernier, lors de mon intervention sur le projet de budget du ministère des affaires étrangères pour 2005, j'ai souligné à quel point une restructuration de notre réseau diplomatique et consulaire était souhaitable, et je dirai même indispensable.

Ce sentiment est en parfaite cohérence avec perspectives que notre collègue Adrien Gouteyron a brossées à l'instant avec une grande clarté, au nom de la commission des finances. J'approuve d'ailleurs totalement le constat qu'il vient de dresser, chiffres à l'appui.

Je plaiderai, à mon tour, pour un resserrement de notre réseau diplomatique, que j'estime impératif. Ce réseau est quasiment analogue à celui des Etats-Unis, qui possèdent 257 implantations de cette nature dans le monde, la France en comptant, pour sa part, 254.

Notre pays se trouve ainsi à la tête d'un ensemble immobilier légèrement supérieur à celui de la Grande-Bretagne, qui dispose de 248 postes, et nettement plus étoffé que le réseau italien, avec 225 postes, le réseau allemand, avec 207 postes, et le réseau espagnol, avec 192 postes.

Ces chiffres, qui m'ont été fournis par vos services, monsieur le ministre, n'intègrent pas notre réseau culturel, lequel soulève des questions spécifiques et s'est déjà engagé dans une nécessaire restructuration. Je rappelle que, en additionnant les centres culturels et leurs diverses annexes et antennes, ainsi que les Alliances françaises, on dénombre environ 600 implantations françaises de ce genre de par le monde, ce qui est manifestement disproportionné au regard des moyens que notre pays peut y consacrer. C'est pourquoi il est souhaitable de commencer la rationalisation de nos implantations par ce réseau spécifique.

Notre pays a donc choisi d'avoir une représentation diplomatique pleine et entière dans la quasi-totalité des pays du monde, ce qui va de pair avec sa volonté d'universalité. C'est un choix qui est conforme aux priorités de la diplomatie française, choix que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées appuie totalement.

Toutefois, force nous est de constater que, de la volonté politique à la réalité sur le terrain, qu'il y a, suivant les cas, un décalage, une différence sensible ou même un gouffre, et que cette situation dure depuis des années. Est-ce donner une bonne image de la France que d'installer ses services à l'étranger dans des bâtiments dont le faste originel n'est plus qu'un souvenir, faute d'avoir été régulièrement entretenus, fût-ce a minima ?

Comment notre pays peut-il être perçu par des citoyens d'autres nations - hommes d'affaires, universitaires, étudiants, ou simples particuliers - qui sont reçus dans des consulats surchargés, non fonctionnels, dont les personnels sont débordés et, de ce fait, parfois un peu expéditifs dans leur accueil ?

Me viennent alors à l'esprit d'autres consulats, situés dans des pays frontaliers de la France et eux-mêmes membres de l'Union européenne, dont je peine à concevoir l'utilité, aussi fertile que puisse être mon imagination !

Je dois souligner que vous avez déjà entrepris, monsieur le ministre, une réflexion en profondeur sur ces problèmes, dont vous avez pleinement pris la mesure dès votre arrivée au ministère des affaires étrangères et que vous avez commencé de régler certains d'entre eux.

En particulier, je salue votre très judicieux projet visant à regrouper les différents locaux parisiens de votre ministère sur un site unique, plus moderne et fonctionnel. Certes, toute évolution suscite parfois quelques réticences, mais je suis sûr que cette opération, une fois accomplie, sera pleinement appréciée de tous vos personnels.

J'ai également relevé avec intérêt le projet que vous avez adopté avec votre homologue Joschka Fischer, lors du conseil des ministres franco-allemand réuni le 26 octobre 2004, à Berlin, projet qui prévoit la « co-localisation », c'est-à-dire l'usage d'un même bâtiment pour abriter les ambassades des deux pays.

Une première implantation de cet ordre est déjà en cours à Almaty, au Kazakhstan, implantation sur laquelle j'aimerais que vous nous disiez quelques mots, monsieur le ministre. En effet, je dois me rendre dans ce pays au mois de juillet prochain, et je ne manquerai d'aller constater l'efficacité de cette initiative.

D'autres opérations de ce genre pourraient être très utilement conclues avec d'autres pays européens ; je souhaiterais savoir si des discussions sont en cours en la matière.

D'autres projets ont également vu le jour, tel le regroupement possible d'un consulat et d'un centre culturel français dans un même bâtiment, ce qui permet une meilleure visibilité de la présence française, tout en réduisant les coûts de fonctionnement et d'entretien de notre patrimoine. Pourriez-vous, là encore, monsieur le ministre, dresser un premier bilan de cette initiative, que j'estime heureuse ?

Par ailleurs, il conviendrait de trouver à nos agents sur le terrain des modes de délégation présentant évidemment toutes les garanties juridiques et comptables pour procéder, après un rapide examen par des services du ministère, aux opérations de location ou même d'achat d'immeubles ou de terrains lorsqu'une opportunité se présente. Je pense notamment à un terrain bien situé à Saint-Pétersbourg, sur lequel on pourrait construire, à moindres frais, une école française.

Aujourd'hui, de plus en plus de Français vont en Russie. Dans les écoles de relations internationales, des Russes apprennent le français, une langue qu'ils parlent souvent fort bien sans être venus en France. En la matière, une forte demande s'exprime, et je souhaiterais que nous répondions présents, car il y va du rayonnement de notre pays, de notre culture. J'attache donc une grande importance à ces initiatives.

Cette opération, comme d'autres du même genre, relève parfois d'une décision qui doit être prise en quelques mois ; elle nécessite donc une grande réactivité de nos postes consulaires ; il peuvent en faire preuve pour peu que nous leur en donnions les moyens.

Serait-il envisageable de définir des modalités de décision compatibles avec la volatilité qui marque le marché immobilier dans les métropoles les plus concurrentielles ?

Enfin - et c'est sans doute, paradoxalement, le point le plus difficile -, comment parvenir à une meilleure coopération entre les différents services dont la France dispose à l'étranger, qu'ils relèvent des ministères des finances, de l'intérieur, des affaires étrangères, ou d'autres ministères encore, pour qu'ils se concertent au moins en matière immobilière ? Les frais de sécurité, notamment, qui ne cessent malheureusement de croître dans le monde, en seraient au moins réduits.

A cet égard, je souhaite, monsieur le ministre, que vous ayez un jour la tutelle de tous ces bâtiments. Nous pourrions ainsi rationaliser les coûts, car des économies d'échelle peuvent être réalisées. (MM. Robert Del Picchia et Yves Pozzo di Borgo applaudissent.)

Je sais bien que mes propos peuvent gêner quelque peu,...

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. ... mais je crois qu'il est de mon devoir de les tenir ! J'estime qu'il y a là des sources d'économies considérables. Or, nous le savons, il faut faire des économies !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Très bien!

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. Vous en ferez le meilleur usage possible, monsieur le ministre !

Notre patrimoine à l'étranger est vaste, parfois trop vaste ; il est d'une qualité architecturale très inégale. On y observe le meilleur, comme notre ambassade à Rome...

M. Michel Charasse. Elle ne nous appartient pas ! Nous sommes locataires !

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. Je ne l'ignore pas, monsieur Charasse !

... ou, dans un style plus récent, notre ambassade à Ottawa, comme le pire : soit les bâtiments de grande qualité n'ont pas bénéficié de l'entretien requis, soit ils étaient médiocres dès l'origine, le plus affligeant étant que cette médiocrité soit, de surcroît, rarement fonctionnelle !

A l'avenir, pour rendre la situation plus saine, pour financer les indispensables travaux de mise aux normes de sécurité, pour accompagner la mobilité de nos sphères d'influence, qui doivent épouser l'émergence de nouveaux pôles politiques et économiques, comme en Asie, il faut que le ministère des affaires étrangères dégage des marges de manoeuvre financières. Comme l'a souligné notre collègue Adrien Gouteyron, celles-ci proviendront, pour l'essentiel, des fruits d'une gestion plus rigoureuse de notre patrimoine immobilier. Certes, il convient de le resserrer en termes d'implantations et de valoriser la vente de bâtiments qui ne répondent plus à nos besoins actuels. Pourriez-vous, là encore, monsieur le ministre, nous donner quelques précisions sur les opérations en cours ou en projet ?

Telles sont, monsieur le ministre, les quelques remarques que je souhaitais formuler sur ce sujet majeur, à la fois pour l'image de notre pays et pour une meilleure adéquation entre des moyens financiers nécessairement limités et les budgets importants que requiert l'entretien de notre vaste réseau diplomatique et consulaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UC-UDF et du RDSE, ainsi que sur les travées socialistes.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 32 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 14 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas dans le détail sur les raisons qui nous amènent aujourd'hui à débattre du problème de la gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères.

Les rapporteurs l'ont rappelé, le récent rapport de la Cour des comptes nous a permis de relever avec précision les dysfonctionnements de cette gestion. La nécessité d'une réforme en profondeur n'est plus à démontrer.

Avant tout, je souhaiterais rappeler le contexte dans lequel s'inscrit cette démarche : il est quelque peu paradoxal que l'administration continue de manifester des manques dans la gestion et la maîtrise de la dépense publique, alors que nous, parlementaires, devant la dégradation constante des finances publiques, tirons la sirène d'alarme depuis longtemps.

Le succès de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, qui nous conduit aujourd'hui à examiner ce problème, dépendra en effet très largement de la qualité des dispositions de celle-ci et de notre volonté à la mettre en oeuvre.

Cependant, je me réjouis déjà de ce qu'elle nous permette d'accroître dès aujourd'hui le rôle du Parlement dans le domaine du suivi budgétaire.

La loi organique doit être à la hauteur des ambitions qui ont motivé son adoption, mais le Gouvernement et le Parlement, seuls, ne pourront pas satisfaire cet objectif : l'administration doit être associée en profondeur à cette démarche, en prenant conscience de son rôle et en adaptant ses méthodes de gestion et de fonctionnement, dans un objectif de rationalisation, de proportionnalité et d'efficacité des moyens par rapport aux missions et aux programmes qu'il est nécessaire de mener à bien.

A la différence de ce qui se passe dans d'autres ministères, les trois programmes de votre ministère ont des responsables différents et bien identifiés.

Dans cette optique, l'exemple de la gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères me semble très parlant.

Si la prise en compte de la nécessité de la réforme est significative et a conduit à des progrès concrets, les erreurs et les dérives de gestion n'en demeurent pas moins flagrantes.

Pour ce qui est des avancées, l'Européen convaincu que je suis trouve remarquables les progrès qui ont déjà été réalisés en matière de rationalisation de notre réseau et de notre présence diplomatique mondiale. Je pense, par exemple, aux projets de mise en commun de certains services de nos chancelleries, notamment avec l'Allemagne. Espérons que cela se fera avec d'autres partenaires.

A mon sens, c'est d'abord par des actions de ce type que sont réalisés les progrès et les améliorations à plus grande échelle dont nous avons tant besoin aujourd'hui. Concrètement, et tout particulièrement dans ce domaine, l'Europe peut et doit nous aider. Mais cela ne saurait nous empêcher de mener, monsieur le ministre, une nouvelle réflexion sur les missions des ambassades françaises dans le périmètre européen.

Dans cette perspective, à la suite du rapporteur spécial et du rapporteur pour avis, je souhaite savoir ce que prévoit le plan de modernisation et de réforme de gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères dans le domaine de la rationalisation géographique de notre présence mondiale, et ce dans le contexte de la construction d'une politique étrangère européenne.

Par ailleurs, je souhaite revenir sur les dérives que le rapport de la Cour des comptes a permis de relever. Certaines d'entre elles ont été très médiatisées, notamment les dépassements, voire l'explosion des budgets relatifs à la rénovation ou à l'acquisition de locaux d'ambassade. Ce fut le cas pour le déménagement de l'ambassade de France à Berlin ou à Singapour. Si des fautes ont été commises, des enquêtes administratives ont-elles été réalisées et des sanctions ont-elles été prises ?

M. Yves Pozzo di Borgo. Il est impossible de continuer ainsi, sans que soient désignés les responsables de ces dérives budgétaires !

Certes, le réseau diplomatique de la France à travers le monde, qui résulte de la puissance historique du pays, est l'une de nos grandes fiertés. Il est aussi une sorte de vitrine. Mais je ne suis pas sûr que vivre au-dessus de ses moyens, à l'extérieur comme à l'intérieur de ses frontières, puisse être de nature à honorer notre Etat, et les quelques voyages que j'ai effectués avec mes collègues ici présents me confortent dans ce sentiment.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous le demande : les locaux qui abritent nos représentants hors de nos frontières sont-ils bien adaptés à leurs fonctions ainsi qu'à nos capacités financières ? Les charges patrimoniales qu'ils font peser sur notre budget sont-elles justifiées ? Sont-elles en adéquation avec l'évaluation des missions des ambassades, pour autant que cette évaluation soit faite ? Le suivi des coûts relatifs à la gestion et à la mise en valeur de ce patrimoine est-il assuré de manière adaptée ?

Plus largement, les problèmes relatifs aux cessions et aux acquisitions des ministères, les arbitrages économiques et stratégiques entre location et acquisition ainsi que le manque de contrôle sur ces fonctions immobilières imposent que de véritables solutions soient apportées. De ce point de vue, l'exemple du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères me semble très révélateur.

Ainsi, le fait que le patrimoine de chaque ministère soit géré de façon indépendante empêche l'Etat, notamment le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, d'avoir une vision générale de l'état de son patrimoine et de son domaine, ce qui le prive d'un outil de gouvernance non négligeable.

C'est pourquoi je me demande si une gestion regroupée et indépendante de toutes les cessions et acquisitions patrimoniales de l'Etat, par exemple par un organisme spécialisé, ne serait pas préférable. Une professionnalisation de la fonction patrimoniale du ministère ne permettrait-elle pas de gérer de façon plus efficace le patrimoine de l'Etat, dans une démarche conjointe avec le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ou de ses représentations à l'étranger ? En particulier, il s'agirait de veiller à ce que le patrimoine soit non seulement mieux adapté aux missions des ministères, mais également mieux géré et davantage mis en valeur compte tenu de la richesse historique de certains des bâtiments concernés.

Monsieur le ministre, nos diplomates sont compétents et nous en sommes fiers. Mais l'immobilier est un métier, ce n'est pas une affaire de diplomates. Il existe en France une structure publique, la Caisse des dépôts et consignations, qui possède déjà cette expertise immobilière. C'est un bon opérateur, qui saurait sans aucun doute optimiser l'utilisation et l'exploitation des immeubles et des surfaces concernés et réduire ainsi les coûts d'exploitation.

Je terminerai mon intervention sur un point plus précis, et qui m'amènera à m'exprimer aussi en tant qu'élu local parisien.

Dans la plupart des cas, il est regrettable, voire pénalisant, que les décisions concernant l'implantation des ministères à Paris soient prises de façon unilatérale, sans concertation avec les collectivités et les acteurs locaux concernés ni même entre les différents ministères. Cela étant, monsieur le ministre, je n'ignore pas que, sur le projet de site unique visant à rassembler toutes les annexes du ministère des affaires étrangères, vous avez rencontré le maire de Paris et le maire du XIVe arrondissement.

A Paris, les surfaces habitables ou constructibles concernées par de tels mouvements peuvent être considérables et représenter plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés, qui suffisent à modifier les équilibres et les choix, souvent issus de compromis difficiles, opérés auparavant en matière de plan local d'urbanisme par la collectivité locale.

Ainsi, les surfaces concernées par le projet de site unique sont considérables, et, au-delà du problème de l'acquisition de nouveaux locaux de taille suffisante pour abriter ce site, se pose la question de la réaffectation des locaux qui seront abandonnés. Quel peut être alors le poids de la mairie de Paris ou des mairies d'arrondissement concernées ? Car, je m'en rends compte tous les jours, ce projet ne sera pas sans conséquences sur la configuration, notamment, du VIIe arrondissement, dont je suis conseiller municipal.

De plus, pour ce site unique, ne serait-il pas intéressant, dans un but d'optimisation financière, de nous pencher sur les possibilités que nous offre aujourd'hui la récente réforme des marchés publics ? La mise en place contrôlée d'un partenariat public-privé - M. le rapporteur spécial a évoqué cette solution - serait sans doute fort utile à la nouvelle implantation du ministère des affaires étrangères et permettrait, en outre, de réaliser d'importantes économies de gestion grâce à l'expertise des investisseurs privés dans l'investissement foncier, sur le modèle de ce qui est en cours de réalisation à La Courneuve pour les archives diplomatiques.

Dans votre réponse à la Cour des comptes, monsieur le ministre, vous affirmez que « la construction du futur ministère des affaires étrangères se fera à coût nul pour le budget de l'Etat ». Pour ma part, je m'interroge. Vous allez vendre des biens immobiliers. Pourquoi ne pas établir un partenariat, ne serait-ce qu'avec la Caisse des dépôts et consignations, laquelle s'occuperait du foncier, de la construction, et avec laquelle vous pourriez passer un contrat de leasing sur de nombreuses années, à l'instar d'ailleurs de la dette de l'Etat qui est étalée sur cinquante ans ? Je suis persuadé que, avec un tel montage, cette implantation ne serait pas « à coût nul », monsieur le ministre : vous gagneriez de l'argent et vous allégeriez le budget général de l'Etat, qui en a bien besoin !

Telles sont, monsieur le ministre, les principales interrogations dont je souhaitais vous faire part aujourd'hui. Je vous remercie d'y avoir porté attention. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et sur le banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.

Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'ordre du jour réservé est pour nous l'occasion de nous demander quelle portée il convient de donner réellement à l'activité parlementaire dans le cadre de la session unique. Ainsi, s'agissant de ce débat sur la gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères, je déplore que la commission des affaires étrangères n'ait pas eu à donner son avis.

Permettez-moi une remarque préalable. Au moment où, dans plusieurs pays du monde, la France déploie une activité diplomatique intense, dont M. le ministre nous a rendu compte lors de la dernière réunion de la commission des affaires étrangères, qu'il s'agisse du Liban, de la Palestine, de l'Afghanistan ou d'autres pays, je veux souligner que notre diplomatie est d'abord et avant tout le fait des personnels présents sur le terrain :nos ambassadeurs et consuls, au premier chef, mais aussi les autres personnels, y compris ceux des instituts culturels, des centres pour l'enseignement du français, etc. Je retire des missions auxquelles j'ai participé - au Vietnam, au Soudan, en Ethiopie... - le sentiment que, dans leur immense majorité, nos ambassadeurs ainsi que leurs collaborateurs et les services de sécurité accomplissent un travail remarquable.

Aborder le problème de la diplomatie par celui des murs, si important soit-il, ne me semble donc pas suffisant. Certes, il faut évidemment tenir compte des observations formulées par la Cour des comptes, mais il convient de ne pas oublier que, derrière ces murs, des hommes et des femmes accomplissent un travail remarquable pour faire aimer la France, développer l'amitié entre les peuples et, ainsi, oeuvrer pour la paix.

Je reviens d'une mission en Afghanistan. Vous avez d'ailleurs accepté, monsieur le ministre, de participer à une réunion de notre commission afin de nous permettre d'avoir une discussion approfondie à ce sujet. Les conditions de politique et de sécurité y sont très difficiles : cette semaine encore, plusieurs attentats ont été commis à Kaboul, faisant vingt-neuf morts. Notre ambassadeur et les personnels diplomatiques de sécurité réalisent un travail exceptionnel. Leurs très nombreuses relations nous ont permis d'organiser de multiples entretiens, de visiter l'hôpital construit par l'association de Muriel Robin, ainsi que les deux lycées Malalaï et Esteqlal, que le Sénat a aidé à financer. Je ne peux, hélas, tout citer.

Je saisis l'occasion qui m'est donnée, monsieur le ministre, pour attirer votre attention sur un problème important. Les personnels de sécurité de l'ambassade de France en Afghanistan - et sans doute dans d'autres pays - perçoivent un traitement de 40 % inférieur à celui que touchent les personnels de sécurité de nos ambassades en Autriche ou en Italie. Il y a là une anomalie, me semble-t-il. Je vous demande donc de bien vouloir examiner cette question.

En ce qui concerne les locaux de l'ambassade de France en Afghanistan, je peux vous dire qu'ils n'ont rien de luxueux !

Le débat qui nous occupe s'inscrit dans le cadre de l'article 57 de la loi organique, qui, au motif de renforcer les pouvoirs de contrôle du Parlement, établit en réalité la prééminence de la commission des finances pour l'examen de l'exécution budgétaire des lois de finances, abstraction faite a priori de critères qui pourraient découler d'une autre approche de la dépense publique, portée par une autre commission permanente de l'Assemblée nationale ou du Sénat.

L'article 57 consacre donc clairement la logique comptable, strictement comptable, qui préside désormais, en tout cas pour le moment, à la définition et à la mise en oeuvre de l'action publique.

Lorsque la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a reçu le président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, M. Jean Arthuis, j'ai fait part de ma très grande préoccupation devant le fait que nous ferions désormais appel à des concours externes. Cela ne peut se faire qu'au détriment du service public, ce que je désapprouve totalement.

D'une certaine manière, cet article 57 fait des parlementaires non les contrôleurs scrupuleux - parce qu'ils sont l'émanation du suffrage populaire - de l'action de l'Etat, mais plutôt les auxiliaires vigilants de la mise en oeuvre de la réforme de l'Etat, de la réduction de la dépense publique et de l'obsession des déficits, qui président en fait à la participation de notre pays à la construction européenne, et singulièrement à la fixation de la parité de la monnaie unique.

Après ces considérations générales, je veux revenir au cas d'espèce du présent débat, à savoir le patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères. La situation du patrimoine de ce ministère a fait l'objet, dans le rapport public de la Cour des comptes pour 2004, d'une monographie spécifique mettant en évidence une maîtrise pour le moins insuffisante d'un certain nombre de coûts.

Un exemple donné de ce qui a pu se produire sur le patrimoine concerné est l'affaire de l'ambassade de France à Berlin, dont le coût total de réalisation devrait s'établir entre 70 millions et 87 millions d'euros, soit 60 % à 100 % de plus que le devis initial. Il y a là évidemment matière à réflexion.

Il ne faudrait cependant pas tirer de ce cas d'espèce de l'ambassade de Berlin - d'autant que nous disposons toujours des locaux de l'ancienne ambassade de Bonn, ville où le prix de l'immobilier a beaucoup chuté, car la capitale est désormais Berlin - des conclusions définitives quant à une gabegie généralisée qui affecterait la gestion du patrimoine, particulièrement important au demeurant - quelque 2 millions de mètres carrés d'établissements diplomatiques français à l'étranger -, du ministère des affaires étrangères. Cela signifie qu'il faut procéder à un examen au cas par cas.

Nul doute qu'il conviendrait de mettre en place un véritable suivi budgétaire, de la conception des opérations jusqu'à leur réalisation, mais, de manière générale, ce débat ne peut nous faire oublier quelques réalités essentielles.

Notre pays joue, dans le monde, un rôle diplomatique, culturel et économique particulièrement important.

Il importe donc, naturellement, que la présence française soit assurée au mieux dans toutes les parties du globe, d'autant que beaucoup de pays continuent d'avoir des liens historiques importants avec le nôtre, et que, si mes informations sont exactes, les nombre de pays avec lesquels nous avons des relations croît d'année en année.

Il importe aussi que nous puissions offrir à nos compatriotes vivant à l'étranger des conditions d'accueil satisfaisantes dans les services du ministère, afin de maintenir et de développer les liens qu'ils peuvent entretenir avec la métropole.

Jouer un rôle dans le concert des nations a donc une contrepartie : disposer des moyens d'assurer une présence au plus près du terrain.

Par conséquent, le véritable débat est celui-ci : la France doit se doter du réseau diplomatique lui permettant de jouer pleinement son rôle, tout en se préservant des dérives que l'on a pu constater. C'est le sens de la grève des personnels des ambassades et du ministère des affaires étrangères, qui étaient animés par cette préoccupation.

Si la rigueur s'impose dans la gestion des opérations budgétaires et patrimoniales du ministère des affaires étrangères, elle doit aussi s'imposer dès lors qu'il est question du statut des personnels en poste au sein du réseau diplomatique et de la capacité que l'on peut avoir de les écouter, notamment lorsqu'il s'agit de modifier les équipements et de rendre plus efficients les services diplomatiques et consulaires.

Rien ne sert en effet d'être très vigilants en ce qui concerne la consommation des crédits ouverts au titre de la réalisation des équipements si ces équipements s'avèrent inadéquats à améliorer la qualité du service rendu aux usagers de notre réseau diplomatique.

Ce qui ressort, en fin de compte, de la controverse née du rapport de la Cour des comptes, c'est bel et bien que le ministère des affaires étrangères, outre la nécessité de porter attention à la gestion de son patrimoine immobilier, a manifestement besoin d'un plus large audit, couvrant également le statut des personnels comme les objectifs que l'on assigne à la présence française de par le monde.

Telles sont les quelques observations que nous ne pouvions manquer de formuler dans ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, deux raisons m'ont incitée à prendre part à ce débat sur la gestion immobilière du ministère des affaires étrangères.

La première est le fait que 90 % du parc immobilier de ce ministère se situe à l'étranger, de quoi intéresser, bien sûr, l'élue des Français de l'étranger que je suis.

La seconde raison est l'ampleur des difficultés auxquelles le ministère des affaires étrangères est confronté pour la gestion de ses investissements immobiliers hors de France, difficultés qui sont dues en grande partie au décalage croissant entre les besoins recensés par les postes à l'étranger et les crédits disponibles sur le titre V de son budget.

Les élus nationaux peuvent estimer, en effet, que les investissements réalisés dans nos postes et nos établissements à l'étranger sont un luxe, mais il faut bien comprendre que c'est l'image de la France qui est en jeu à travers ses représentations. Notre pays possède le deuxième réseau diplomatique et consulaire au monde, après celui des Etats-Unis. C'est un avantage, mais cela a aussi un coût. Toute la difficulté est de trouver le bon équilibre entre notre rayonnement et nos impératifs budgétaires.

Nous nous devons de rappeler que les critiques de la Cour des comptes portent essentiellement sur des opérations déjà anciennes. Il convient cependant d'en tenir compte, en assurant une programmation plus réaliste de nos opérations immobilières à l'étranger, en même temps qu'une meilleure coordination des différents intervenants.

Mais, au-delà de ces critiques, je voudrais profiter de ce débat, monsieur le ministre, pour vous manifester nos encouragements et vous dire combien nous sommes conscients de la difficulté de votre tâche dans un monde de plus en plus mouvant, où la rapidité de réaction nécessaire se marie mal avec des exigences budgétaires inévitablement contraignantes. Il faut souligner, à cet égard, les efforts déjà accomplis par le département sous l'autorité de votre prédécesseur, et que vous poursuivez excellemment. Nous disposons maintenant d'une liste précise de notre parc immobilier. C'est une base indispensable pour affronter le défi de rationalisation de nos implantations à l'étranger face aux changements géopolitiques et à l'intégration européenne.

Un contre-exemple de la nécessaire adaptation aux exigences géopolitiques serait l'abandon ou le report sine die du projet de notre nouvelle ambassade à Pékin, dont on a beaucoup parlé. Quand on sait l'importance stratégique de la Chine, un tel report ne serait-il pas un impair considérable ? La Cour des comptes a tort, me semble-t-il, de cibler le projet de campus diplomatique à Pékin et de l'inscrire dans son chapitre consacré aux « décisions insuffisamment fondées ».

On connaît, depuis plus de trente ans, la nécessité d'opérer un renforcement de notre présence diplomatique en Chine. A Paris, les Chinois ont créé un superbe centre culturel sur les quais de la Seine. Quelle image aurions-nous en Chine si nous continuions à différer la réalisation de ce projet, sans compter les surcoûts que cela générerait, bien évidemment, en termes d'immobilier ? Une bonne coordination et une meilleure maîtrise des programmes d'investissement permettraient sans doute de différer d'autres projets moins stratégiques.

En ce qui concerne notre réseau consulaire, l'effort de rationalisation est une oeuvre délicate et il faut bien comprendre la difficulté de l'exercice vis-à-vis de nos compatriotes expatriés. Chaque fois que l'on supprime un consulat, c'est comme si l'on supprimait une mairie en France.

Mme Hélène Luc. Absolument !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Nous pouvons imaginer l'émoi des Français en cas de disparition de leur mairie dans une ville comptant plusieurs milliers d'habitants.

Le consulat est le lieu de rattachement des Français de l'extérieur, qu'ils se trouvent dans l'espace européen ou en dehors. Un consulat, c'est aussi un centre de vote. (M. Michel Charasse s'exclame.) Or la réduction des implantations consulaires non seulement accentue les difficultés d'accès aux démarches administratives, mais aussi met des obstacles supplémentaires à la participation de nos compatriotes expatriés aux scrutins ; le référendum du 29 mai en est un exemple. Tant que nous n'aurons pas mis en place un système de vote électronique par Internet pour les Français de l'étranger, nous serons confrontés à ces difficultés.

Je ne nie pas qu'il soit nécessaire d'adapter notre réseau consulaire, notamment au sein de l'Union européenne, mais, à mon sens, il ne faudrait jamais opérer de suppression pure et simple de consulats sans que des solutions satisfaisantes aient été trouvées. Les fermetures ne se justifient que difficilement, même sur le territoire de l'Union européenne, dans la mesure où nos législations nationales, notamment en matière d'état civil, restent très éloignées.

Des regroupements avec nos partenaires européens pourraient d'ores et déjà être mis en oeuvre, notamment en matière de centres culturels et d'établissements d'enseignement. Du reste, cette exigence est de nature à faire avancer l'intégration européenne, que nous appelons de nos voeux. Encore faut-il que le département s'engage dans une démarche volontariste et travaille avec ses partenaires de l'Union pour remodeler les cartes consulaires dans l'intérêt de nos populations respectives. On parle beaucoup du couple franco-allemand. Comment cette entente se traduit-elle, monsieur le ministre, au moment où il est prévu de supprimer certains de nos consulats outre-Rhin ? Le ministère mène-t-il des négociations avec nos partenaires pour une coordination ou des regroupements en la matière ? A-t-on déjà déterminé les lieux où la France est la mieux placée pour prendre en charge les fonctions consulaires d'autres Etats membres et les lieux où ce sont nos partenaires qui seraient les mieux placés ? Lorsque l'on parle d'intégration européenne, c'est à ce travail qu'il faut bien sûr s'atteler. Monsieur le ministre, je ne voudrais pas, comme c'est apparemment le cas en matière de protection diplomatique et consulaire telle qu'elle est prévue au chapitre « citoyenneté » du traité de Maastricht, hors du territoire de l'Union, que ce soit systématiquement la France qui assume la charge de telles opérations.

S'agissant des établissements d'enseignement français à l'étranger, domaine où nous possédons aussi un réseau exceptionnel, on ne peut nier être confrontés aujourd'hui à une crise de croissance et d'adaptation, les moyens du ministère n'étant plus suffisants pour suivre les évolutions souhaitées. D'emblée, il faut rappeler que notre carte scolaire à l'étranger, comme cela est aussi le cas de beaucoup de nos alliances, a été dessinée au cours du dernier demi-siècle par des investissements privés provenant pour une très grande part de nos communautés françaises expatriées. Nos compatriotes se sont pris en charge pour assurer la scolarité française de leurs enfants et, par extension, nos établissements ont été ouverts aux nationaux des pays d'accueil, contribuant ainsi au rayonnement de la francophonie dans le monde.

Avec l'aide de l'Association nationale des écoles françaises à l'étranger, qui assure des prêts immobiliers avec la garantie de l'Etat, les établissements se sont implantés là où la communauté était importante et entreprenante. L'Etat s'est bien entendu substitué aux particuliers et, avec l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, a pris le relais s'agissant des investissements. Mais nous arrivons aujourd'hui à la croisée des chemins, car les communautés françaises se déplaçant d'un continent à l'autre et s'expatriant de plus en plus, il nous faut adapter ce réseau.

L'exemple du Mexique est une réussite. Les deux implantations à Mexico font du lycée franco-mexicain l'un des établissements les mieux adaptés aux besoins des Français expatriés et des Mexicains qui recherchent un enseignement de qualité. Malheureusement, le lycée ne peut accepter un grand nombre de candidatures de ces jeunes Mexicains, ce qui est un frein à la formation d'élites francophones et francophiles dans ce pays. Il nous faudrait pour cela pouvoir aider davantage le développement d'écoles annexes ; je pense en particulier à celles de Polanco et Cuernavaca.

A Londres, avec l'accroissement considérable, au cours des dernières années, des Français qui y sont implantés - leur nombre est estimé à 320 000, ce qui en fait la première ville française à l'étranger -, le lycée Charles-de-Gaulle, dont l'excellence est reconnue par tous, est devenu bien trop petit. Différentes pistes ont été envisagées au fil des ans et je vous serais infiniment reconnaissance si vous pouviez nous apporter des éléments d'informations à ce sujet.

Je me dois aussi, monsieur le ministre, de vous mettre en garde contre une rationalisation qui pourrait parfois se montrer excessive. Des exemples de démesure ont été donnés par notre excellent rapporteur Adrien Gouteyron. Mais je dois ajouter que trop souvent, dans le passé, nous avons vendu - je devrais dire « bradé », car ces biens ont été cédés à un prix très en dessous de celui du marché, et ce en dépit des appels à la prudence des élus des Français de l'étranger - des bâtiments de l'Etat qui émanaient parfois pourtant de dons de la communauté française.

En cas de modification de nos priorités, il serait à craindre, du fait de l'accroissement constant et quasi universel de l'immobilier, que nous ne puissions nous offrir de bâtiments dans des lieux appropriés à nos intérêts.

De nouveaux instruments juridiques ont été mis en place pour faciliter le financement des investissements de l'Etat ; je pense en particulier aux partenariats entre le public et le privé. Il s'agit là d'un dispositif que notre collègue André Ferrand préconise dans son rapport au Premier ministre pour la construction et l'entretien des établissements d'enseignement français à l'étranger.

Je souhaite vous interroger plus précisément, monsieur le ministre, sur la formule du crédit-bail, à laquelle ont eu recours, ces dernières années, plusieurs pays étrangers. Que pensez-vous de cette formule ? Envisagez-vous d'utiliser le crédit-bail pour certaines opérations menées par votre ministère ? Ce système offre en effet l'avantage de responsabiliser le concessionnaire privé du point de vue non seulement de la construction, mais aussi - là est tout l'intérêt de l'opération - du fonctionnement et de l'entretien des bâtiments.

En conclusion, et au-delà des points particuliers que je viens d'évoquer, je souhaite insister, au nom du groupe UMP, sur la nécessité d'assurer une véritable gestion dynamique et coordonnée du patrimoine de l'Etat.

Les dysfonctionnements constatés sur le terrain traduisent souvent l'absence d'une véritable vision stratégique. L'Etat doit adapter ses structures à l'évolution de ses missions, dans le nouveau contexte national et international. Cela concerne l'ensemble des ministères et des établissements publics.

La réforme budgétaire issue de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances vise à améliorer la gestion publique en responsabilisant les gestionnaires, en leur donnant plus de souplesse et en passant d'une logique de moyens à une logique de résultats. Cette logique d'efficacité et de performance doit s'imposer partout, y compris dans la gestion immobilière.

Les enjeux financiers sont importants, puisque la valeur des bureaux et des autres bâtiments résidentiels appartenant à l'Etat dépasse les 30 milliards d'euros et que les dépenses d'entretien et d'exploitation de son parc immobilier de bureaux s'élèvent, à elles seules, à environ 2 milliards d'euros chaque année.

L'Etat et les contribuables ont donc tout à gagner d'une rationalisation de la gestion de ce patrimoine immobilier. Celle-ci passe non seulement par une réorganisation des implantations et par la cession de certains actifs immobiliers, mais aussi par une responsabilisation des acteurs, sur le plan ministériel comme sur le plan interministériel.

Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a engagé un effort de modernisation, auquel le ministère des affaires étrangères contribue largement, ce dont nous vous remercions, monsieur le ministre. Soyez assuré que le groupe UMP sera très attentif à la poursuite et à l'amplification de cet effort, qui constitue l'un des éléments essentiels de la réforme de l'Etat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. André Ferrand.

M. André Ferrand. Monsieur le ministre, je suis certain de ne pas vous étonner en amenant à mon tour le débat sur le terrain de notre réseau d'établissements scolaires à l'étranger. C'est un sujet que vous connaissez bien et pour lequel vous manifestez un intérêt particulier, ce dont je me réjouis. Je m'en réjouis d'autant plus que je sais ainsi pouvoir compter sur votre appui pour la mise en oeuvre des recommandations contenues dans le rapport que j'ai eu l'honneur de remettre, à la fin de l'année dernière, au Premier ministre. Celui-ci m'avait en effet chargé d'identifier les voies et les moyens de diversifier les sources de financements de nos écoles à l'étranger et d'élaborer les conditions du succès d'une telle politique.

L'aspect immobilier a été au centre de notre étude. Car, qu'il s'agisse d'acquisitions, de constructions nouvelles, d'extensions, de modernisations ou, simplement, de mises au niveau minimal des conditions de sécurité, il y a, vous le savez, fort à faire.

Nous avons été étonnés de constater, au travers des quelque quarante établissements visités dans le monde, à quel point les situations étaient diverses, ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose en soi.

En revanche, nous avons déploré, en particulier, premièrement, le manque d'anticipation, qui amenait trop souvent à prendre dans la hâte, à la dernière minute, parce que la rentrée approchait, des décisions qui étaient souvent loin d'être les meilleures, deuxièmement, la rigidité des situations et des statuts, qui empêchait nombre d'établissements de pouvoir profiter pleinement de possibles soutiens extérieurs - entreprises, mécénat, participation des pays hôtes, etc. -, troisièmement, le manque de capacité d'appui et de conseils aux acteurs de terrain, souvent prêts à s'impliquer, mais qui ont besoin d'expertise.

Ce constat nous a amenés à proposer que l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, se voie déléguer la gestion de toute la partie du titre V qui la concerne, soit l'ensemble du patrimoine immobilier appartenant à l'Etat et relatif à notre réseau d'écoles à l'étranger.

Nous vous sommes particulièrement reconnaissants, monsieur le ministre, d'avoir exaucé ce voeu. Même si, à ma connaissance, le décret nécessaire n'est pas encore signé, la décision est prise et il reste maintenant à faire de cette excellente initiative un succès qui pourrait avoir valeur d'exemple.

Pour cela, il faut donner à l'AEFE les moyens financiers et humains nécessaires. Il faut que le contrôle financier, qu'il soit interne au ministère ou exercé par le ministère des finances, soit, certes, effectif, mais qu'il soit réalisé d'une manière souple et constructive. Il faut, enfin, que, dans chaque pays, pour chaque établissement, soit mis en place un « plan école » à moyen terme, afin que les responsables relèvent le nez de leur guidon et soient obligés de regarder plus loin.

La cellule immobilière à créer au sein de l'AEFE, quant à elle, devra disposer, à l'avenir, d'une façon établie, d'un budget au moins égal aux 10 millions d'euros mobilisés en 2005 par votre ministère pour les établissements scolaires.

Elle devra avoir la possibilité d'emprunter dans tous les cas où cela paraît nécessaire.

Elle devra pouvoir compter sur des professionnels experts en gestion financière et budgétaire, certes, mais surtout immobilière, sur des spécialistes en matière de bâtiments scolaires capables de conseiller et d'apporter leur appui aux initiatives de terrain.

Elle devra être capable de tirer parti de tous les partenariats potentiels, qu'il s'agisse d'établissements conventionnés ou en gestion directe.

Elle devra développer des liens avec Bruxelles et avec notre partenaire allemand, avec lequel quelques pistes prometteuses ont déjà été ouvertes.

Elle devra être réactive, capable de s'adapter à toutes les situations, et suffisamment innovante pour imaginer les solutions les mieux adaptées. Il lui faudra, en particulier, être familière des formules de partenariat entre le public et le privé, qui peuvent s'avérer très utiles et convenir dans de nombreux cas.

Enfin, il faudra, monsieur le ministre, que soient associés, dans cette expérience riche d'avenir, tous les acteurs de terrain et leurs partenaires, l'AEFE, c'est-à-dire le quartier général parisien, et les services concernés du ministère.

Avant de quitter cette tribune, je tiens à dire, une fois de plus, à quel point le rôle des ambassadeurs, des chefs de poste, est essentiel, car, très souvent, c'est de leur implication personnelle que dépend le succès. Celui-ci sera d'autant mieux assuré qu'ils auront auprès d'eux des responsables des services de coopération et d'action culturelle dont les profils seront adaptés à la « mission écoles ».

Je serais heureux, monsieur le ministre, d'avoir la confirmation qu'avec l'appui de tous les acteurs concernés telle est bien la politique que vous comptez mettre en oeuvre pour le développement de notre réseau d'écoles à l'étranger. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia.

M. Robert Del Picchia. Monsieur le ministre, je vis depuis trente-cinq ans à l'étranger et j'ai visité de très nombreux pays. Par conséquent, comme vous et comme certains de mes collègues, j'ai pu constater, sur le terrain, la richesse, mais aussi la diversité du patrimoine immobilier de la France. La gestion, très complexe, de ce patrimoine ne peut aujourd'hui être assurée que par des professionnels.

Pour illustrer la diversité de ce patrimoine, je me permettrai tout d'abord de relater une expérience personnelle intéressante.

Après être allé en Arménie rendre visite à Mme de Harting, alors ambassadeur de France dans ce pays, qui ne disposait, pour exercer ses fonctions, que d'une petite chambre d'hôtel pas chauffée, je me suis rendu à Rome, au palais Farnèse. Vous imaginez la différence ! Passer ainsi d'un extrême à l'autre était assez étonnant. Depuis, les choses ont changé en Arménie.

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Depuis, elle a quitté sa chambre ! (Sourires.)

M. Robert Del Picchia. Heureusement, et elle a d'ailleurs aussi quitté son poste ! Ses successeurs n'y travaillent plus non plus.

Je pourrais citer bien d'autres cas.

Récemment, j'étais à Copenhague, dans un palais du xviie siècle, parfaitement entretenu, qui nous coûte certainement cher, mais qui est d'une grande beauté. La porte, elle aussi du xviie siècle, a été modernisée et, depuis, elle se bloque la nuit.

En Italie, nous disposons du superbe palais Farnèse, qui n'est pas notre propriété, puisque nous avons un bail emphytéotique jusqu'en 2030 environ, mais dont l'entretien nous incombe. Dans ce palais se trouvent le plus beau bureau d'ambassadeur qui soit - il est très convoité ! - et, au deuxième étage, l'Ecole française de Rome.

Je citerai également l'historique villa Médicis, propriété de la France, qui a nécessité des travaux importants, et dans laquelle se trouve l'Académie de France à Rome, ainsi que la villa Strohl-Fern, sise sur huit hectares de terrain surplombant la place du peuple, baptisée du nom d'un Alsacien exilé qui en avait fait don à la France à condition qu'elle soit utilisée à des fins culturelles. Une partie du lycée Chateaubriand s'y trouve ; la seconde partie est installée à la Villa Patrizi. Le projet de construction d'un grand lycée Chateaubriand a été abandonné, car il a été jugé trop onéreux, trop compliqué.

A Naples se trouvent l'Institut français, avec l'Ecole française de Naples, et le bureau du consulat. A Florence, nous sommes propriétaires d'un très bel immeuble face au célèbre hôtel Excelsior, que nous devrions toutefois vendre. Qu'en est-il de cette vente éventuelle, monsieur le ministre ?

A Milan, nous sommes locataires pour le consulat, mais propriétaires pour le lycée.

A Gênes, le consulat via Garibaldi ne nous coûte rien, car il est mis à disposition par la ville.

A Turin et à Venise, nous sommes locataires.

A Palerme, nous n'avons rien.

Et j'en oublie !

Vous avez là un exemple de diversité de l'immobilier en Italie.

La question de vente et d'achat à l'étranger est toujours délicate, mais trop souvent, surtout lorsqu'il s'agit d'achat, la décision tarde trop, se faisant attendre quelquefois de longs mois, voire des années, et les prix augmentent.

J'en veux pour preuve l'exemple du lycée français de Prague : le prix de départ était de 15 millions de francs ; finalement, la vente a été conclue, longtemps après, à 24 millions de francs, et encore parce que l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger avait dégagé 6 millions de francs pour bloquer la vente. C'est un bel exemple de ce qu'il ne faut pas faire à l'étranger.

Je citerai également l'exemple malheureux de la vente du lycée français de New York, mais ni le ministère ni l'agence n'y sont pour rien. C'est en effet une société anonyme de parents d'élèves, qui en assure la gestion, qui a retardé l'achat. Entre-temps est intervenu le 11 septembre, et les prix de l'immobilier se sont effondrés. Aujourd'hui, ce lycée a quelque 98 millions de dollars de dettes.

Ces exemples montrent la difficulté qu'il y a à gérer ce patrimoine.

Il serait utile, monsieur le ministre, que le Sénat, en particulier la commission des affaires étrangères et la commission des finances, puisse obtenir une liste à jour de toutes les propriétés immobilières de la France à l'étranger. Je sais que c'est très difficile, puisque sont concernés non seulement le ministère des affaires étrangères, mais aussi celui de la culture et la Direction des relations économiques extérieures, la DREE.

A propos d'achat et de vente, un autre petit détail m'a touché de près, puisqu'il s'agissait de l'Autriche. Nous avons commis là une erreur politique, me semble-t-il.

En effet, le Land du Tyrol nous avait donné, à titre de reconnaissance envers le général Béthouart, alors haut-commissaire, deux bâtiments situés à Innsbruck pour y installer le consulat général et un institut. Nous avons, depuis, fermé le consulat général et vendu le bâtiment. Cela a été très mal perçu sur le plan politique. Nous aurions pu le rendre ou le transformer en école.

Il faudra, à l'avenir, éviter ce genre d'erreur, monsieur le ministre. Celle-ci a été commise voilà plusieurs années et, bien entendu, on ne peut pas y revenir

D'importantes économies pourraient être réalisées en Autriche, pays que je connais bien.

La France dispose de trois ambassades à Vienne. L'une, bilatérale, est située dans des locaux appartenant à la France. Il s'agit d'une belle ambassade, qui a été rénovée. Les deux autres, la représentation permanente de la France auprès de l'Office des Nations unies et des organisations internationales et la représentation de la France auprès de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l'OSCE, sont situées dans des locaux que la France loue, ce qui lui coûte cher.

La France possède à Vienne le palais Clam-Gallas, que ce même général Béthouart avait acheté en son temps. Peu entretenu, ce bâtiment n'abrite actuellement qu'un institut culturel et n'est pas très utilisé. Il faudrait 200 000 euros, m'a-t-on dit, pour le rénover.

En revanche, la France loue les locaux de son consulat, au fond d'un couloir sombre d'un immeuble du centre-ville. Il n'est pas possible de se garer à proximité, alors que le palais Clam-Gallas se trouve à côté du lycée où les parents d'élèves conduisent leurs enfants, ce qui leur faciliterait l'accès au consulat. Pourquoi ne pas installer le consulat dans ce palais et économiser ainsi les 100 000 euros que coûte la location des locaux ?

M. Michel Charasse. C'est le bon sens !

M. Robert Del Picchia. Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir étudier cette solution.

S'agissant de l'Ecole française de Pékin, à l'évidence, ce projet nous tient à coeur. Certains parents d'élèves -  des cadres de grandes entreprises pour la plupart - souhaitent que tout soit rassemblé sur un même terrain. Mais deux solutions sont envisagées : soit l'achat d'un terrain sur lequel serait construit un établissement scolaire global ; soit l'installation, à côté de l'ambassade, de l'école maternelle ou de l'école élémentaire, le lycée étant alors construit sur un autre site.

Il est important, monsieur le ministre, de tenir compte de l'avis de l'association des parents d'élèves. Ce sont en effet les parents d'élèves qui financeront en grande partie la construction de cet établissement au travers des frais de scolarité.

L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger est aujourd'hui sur le point d'emprunter, si elle ne l'a déjà fait, pour implanter un établissement au Vietnam ; Mme Joëlle Garriaud-Maylam y a fait allusion. Cela va dans la bonne direction.

J'évoquerai un autre point qui me tient à coeur : il est envisagé de construire un lycée à Belgrade, mais aucun terrain n'a encore été trouvé à cet effet. Lors de la visite du président du Parlement de Serbie-Monténégro chez le président Christian Poncelet, ce dernier s'est vu promettre d'obtenir un terrain dans les deux mois. Monsieur le ministre, à l'occasion de l'un de vos voyages ou d'une rencontre avec l'un des responsables, peut-être pourriez-vous vous informer à cet égard.

Par ailleurs, monsieur le ministre, je tiens à vous faire part de mon soutien total s'agissant de la mesure de bonne gestion que constitue le regroupement à Paris des différents sites du ministère des affaires étrangères. Ce projet suscite certainement des réticences, car les fonctionnaires n'aiment pas déménager.

M. Michel Charasse. Les ministres non plus !

M. Robert Del Picchia. Effectivement ! Le Quai d'Orsay n'est pas concerné.

Je reçois souvent des appels téléphoniques de Français de l'étranger qui doivent se rendre au ministère des affaires étrangères : ils vont au Quai d'Orsay ; on leur apprend alors qu'ils doivent se rendre rue La Pérouse, où on leur dit qu'ils doivent aller boulevard Saint-Germain. Ils sont un peu perdus ! Le regroupement des sites du ministère des affaires étrangères serait donc utile, nous en convenons tous.

Pour finir, monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner l'assurance, importante d'un point de vue financier pour l'Assemblée des Français de l'étranger -  vous en êtes le président - qu'à l'avenir on ne lui fera pas payer la location des salles de réunion du centre de conférence du ministère, comme a tenté de le faire un précédent directeur général de l'administration, ce qui avait suscité une levée de boucliers ? Certes, il a immédiatement fait marche arrière. Les Français de l'étranger ne comprendraient pas, en effet, qu'un beau ministère soit créé, mais qu'il faille payer la location des salles de réunion dans ce ministère.

Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir lancé ce projet et je vous souhaite bon courage. Car une fois le projet lancé, il sera difficile de l'arrêter, même si vous n'êtes plus à ce poste. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que représentant des Français de l'étranger, je formulerai quelques remarques sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui.

La politique immobilière du ministère des affaires étrangères traduit nécessairement la politique extérieure de la République, mais aussi la politique de la République à l'égard des Français expatriés.

A l'évidence, nous avons des représentations dans les pays avec lesquels nous entretenons des relations diplomatiques. Cela est un peu moins vrai s'agissant des consulats et des consulats généraux. Il y a en effet des consulats dans certains endroits où la communauté française ne compte que vingt ou trente membres, alors qu'il n'y a parfois ni consulat ni consulat général dans des endroits où la communauté française est pourtant importante. Un problème d'adéquation se pose donc entre la population française à l'étranger et la carte consulaire.

La carte consulaire évoluera au cours des prochaines années, sous l'influence, bien sûr, de l'intégration européenne. Nous nous orienterons, je l'espère, vers un rapprochement des consulats des pays membres de l'Union européenne. Nous sommes un peu timides en la matière !

Ainsi, nous pourrions instaurer une communauté de moyens, par exemple mettre en commun des bâtiments ou un certain nombre de prestations de services. Nous pourrions même aller plus loin et avoir des représentations croisées, comme le prévoient d'ailleurs les textes.

Il est également imaginable qu'à terme les pays hôtes qui comptent des communautés françaises ouvrent, dans les villes où celles-ci sont installées, des « maisons de la ville » destinées aux citoyens européens et leur offrant un certain nombre de prestations, à l'instar des mairies pour les nationaux.

La tendance est donc à une rationalisation de la carte consulaire et, probablement, à une densité moindre des consulats, au moins dans l'Union européenne. Toutefois, comme mes collègues, je plaide pour que la France n'abandonne pas trop de consulats : les zones où se trouvent des communautés françaises doivent conserver des représentations consulaires. Des structures plus légères qu'un consulat peuvent être envisagées : une personne recevrait les membres de la communauté française une fois par semaine. La même tendance va s'affirmer, selon moi, en dehors de l'Europe.

Nous devrions peut-être envisager une implantation un peu moins prestigieuse. En général - c'est un héritage du passé ! - les consulats se trouvent dans de très beaux bâtiments historiques. Il faudrait les placer en centre-ville, près des stations de métro, et qu'ils soient fonctionnels, à l'instar d'une administration qui offre des services à ses administrés.

Nous devons également tenir compte du développement des opérations sur Internet. Nombre des prestations des consulats pourront être réalisées par ce moyen lorsque sera sécurisée la transmission des données par voie électronique. Cela aura des répercussions sur la carte consulaire.

Je plaide pour une évolution dans ce sens de la carte consulaire. Je serais heureux de connaître votre sentiment à cet égard, monsieur le ministre. Il serait utile qu'un débat ait lieu avec les élus de l'AEFE et les représentations du personnel.

Comme mes collègues, je soutiens le regroupement des sites du ministère des affaires étrangères. A l'évidence, ce serait un facteur d'économie et de synergie entre les différents services.

Il ne faut pas oublier les Français de l'étranger, en particulier la Direction des Français à l'étranger et des étrangers en France. Et si l'Assemblée des Français de l'étranger, qui est élue au suffrage universel, disposait de locaux pour se réunir, ce serait une affirmation de son importance.

Si ma mémoire est bonne, le ministère des affaires étrangères compte quelque 12 000 fonctionnaires en France. Si l'on enlève les personnels du service central d'Etat civil de Nantes, il en reste 8 000. J'ai peine à croire que l'on puisse regrouper 8 000 personnes sur un même site !

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Il s'agit de 3 000 personnes !

M. Richard Yung. C'est plus raisonnable, encore que le regroupement de 3 000 personnes requiert un très grand bâtiment, ce qui pose un certain nombre de difficultés de conception.

M. Michel Charasse. C'est la moitié de Bercy !

M. Richard Yung. Oui, mais je ne suis pas sûr que de grands rassemblements de plus de 1 000 ou 1 500 fonctionnaires soient toujours la meilleure solution.

M. Michel Charasse. C'est plus pratique pour les grèves !

M. le président. Pourvu que ce soit moins laid que Bercy ! (Sourires.)

M. Richard Yung. Ce ne sera pas difficile !

J'évoquerai ensuite la question des établissements culturels et des établissements d'enseignement français à l'étranger. Jusqu'au moment où vous les avez séparés, monsieur le ministre, ces établissements étaient en concurrence avec les autres engagements immobiliers de votre ministère, dont ils étaient souvent les parents pauvres.

Je citerai deux exemples : d'une part, le lycée de Munich, dont un agrandissement est prévu, et au sujet duquel une décision est attendue ; d'autre part, l'Ecole française de Pékin et le lycée de Pékin, projet qui traîne depuis des années, non pas par la faute de l'administration, mais parce que le comité de gestion des parents d'élèves n'a pas su prendre une décision.

Personnellement, je pense que le projet que défend votre administration en la matière, à savoir le regroupement sur le site de l'ambassade, est la bonne solution. En outre, cela permettrait de lancer un projet franco-allemand, ce qui représenterait une avancée importante. Je soutiendrai donc ce projet.

Il est bon d'avoir affirmé l'indépendance du budget immobilier de l'agence. Mais encore faut-il que celle-ci dispose des moyens de mener sa politique immobilière, même si les parents d'élèves contribuent en grande partie au financement de ces établissements à l'étranger.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux formuler quelques brèves observations à la fin de cette discussion.

Mais auparavant, je tiens à saluer le souvenir que nous a laissé notre ancien collègue Jacques Chaumont. En effet, avant même que soit organisé ce débat, si des discussions ont eu lieu au sein de la Haute Assemblée sur le patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères et si la Cour des comptes s'y est intéressée comme elle l'a fait, c'est parce que, d'année en année, Jacques Chaumont et la commission des affaires étrangères n'ont pas cessé de se pencher sur cette question. Les premiers qui se sont intéressés à la manière un peu particulière dont a été construite notre ambassade à Berlin sont d'ailleurs Jacques Chaumont et les membres de la commission des finances. Je ne voudrais pas que ce point soit oublié dans ce débat.

Après cet hommage, j'en viens à ma première observation. Notre collègue Pozzo di Borgo a évoqué tout à l'heure les sanctions.

M. Yves Pozzo di Borgo. Eventuelles !

M. Michel Charasse. Il ne faut pas trop se faire d'illusions : il n'y a jamais de sanction dans l'Etat et il n'y en a pas plus au ministère des affaires étrangères !

Je me souviens d'une époque pendant laquelle l'aménagement des ambassades était confié à un service du Quai d'Orsay dirigé par une dame dont le surnom était « moquette ». Cette « moquette » avait la particularité de diriger parallèlement une entreprise fournisseur du ministère. La Cour des comptes a dénoncé ce fait. Que s'est-il passé ? Rien, jusqu'au jour où le ministre d'alors a demandé à Jacques Chaumont s'il ne pouvait pas lui « donner un coup de main » et faire un rapport sur le sujet, ce que notre ancien collègue a fait. Et on a fini par se débarrasser de la dame, qui est aussitôt devenue fournisseur privé du ministère ! (Rires.)

Je me souviens également d'un centre culturel en Afrique qui avait fait l'objet d'un vol par son directeur. J'ai dû menacer le ministre de l'époque d'invoquer contre lui l'article 40 du code de procédure pénale et de le dénoncer comme receleur et complice. Il faut dire que le pauvre ministre, un des prédécesseurs de Michel Barnier, n'avait même pas été prévenu, puisqu'on ne lui avait pas transmis les télégrammes l'informant de la question. On se demande donc si au Quai d'Orsay les télégrammes sont lus. En fait, on sait qu'il n'en est rien !

Par conséquent, ne parlons pas trop de sanctions. Il ne faut pas rêver !

Monsieur le ministre, compte tenu du fait que votre ministère est l'un des plus gros propriétaires de l'Etat, avec un patrimoine immobilier qui connaît une répartition mondiale, comme certains collègues l'ont dit voilà un instant, il vous faudrait surtout disposer d'un service qui ne s'occupe que de la gestion de ce patrimoine, qui ne soit pas indépendant, mais qui dispose d'une certaine autonomie à l'intérieur du ministère ; je pense à une mission permanente chargée de mettre en oeuvre un programme pluriannuel, dirigée par un inspecteur des finances, un magistrat de la Cour des comptes, et associant étroitement l'administration des domaines, directement rattachée au ministre.

Ce programme devrait d'abord comporter la liste précise de ce que l'on peut vendre immédiatement, purement et simplement, de ce que l'on peut vendre pour financer localement d'autres locaux, de ce que l'on peut acheter avec le produit des ventes, et il devrait ensuite arrêter la liste des travaux d'entretien annuels.

Je me souviens de cet ambassadeur qui me disait un jour avoir alerté le Quai d'Orsay parce qu'il devait engager 30 000 ou 40 000 francs de travaux - cela remonte à cinq ou six ans - pour réparer une fuite dans la salle de bains de la résidence. On lui a envoyé une mission de Paris, car le Quai d'Orsay ne rechigne jamais à payer des voyages chers au bout du monde, pour ausculter un bout de tuyauterie qui relevait manifestement d'un plombier local. Comme les locaux concernés se situaient en Amérique latine, on imagine les frais de voyage, qui étaient bien supérieurs au coût des travaux. Finalement, à son retour, la mission a fait réaliser des travaux, qui n'étaient pas absolument nécessaires, s'élevant à 3 millions de francs.

Je crois qu'une mission rattachée au ministre, mais relativement autonome à l'intérieur du ministère, et qui établirait la liste des opérations pluriannuelles rendrait un très grand service.

Monsieur le ministre, je vais maintenant formuler une autre observation, mais avec beaucoup de prudence : tant qu'il n'y aura pas au ministère un secrétaire général non-diplomate, qui ne soit chargé que de l'administration, à côté du secrétaire général actuel qui est trop accaparé par des tâches de politique extérieure, alors que le ministre et ses ministres délégués sont rarement présents pour des raisons professionnelles évidentes, le ministère ne sera pas géré. Il faut donc un secrétaire général non-diplomate qui ne s'occupe que de l'administration et auquel il soit interdit de traiter de politique extérieure, le secrétaire général actuel continuant à exercer ses missions. Comme il est théoriquement chargé de mener à bien parallèlement certaines tâches administratives, il n'a pas le temps de les assumer. C'est pourquoi je formule cette suggestion.

Dernière observation : toutes les propriétés de l'Etat à l'étranger devraient être sous l'autorité unique du ministre des affaires étrangères.

M. Michel Charasse. Il y a une politique étrangère en France ; il doit y avoir un seul patron du patrimoine immobilier de l'Etat, à savoir le ministre. Tant qu'on laissera « bricoler » chaque ministre dans son coin - vous pensez à l'administration des finances, mais elle n'est pas seule en cause, croyez-moi - la gestion restera pagailleuse et dispendieuse.

Monsieur le ministre, j'estime - et c'était un peu au fond le décret Sauvagnargues - qu'aucune opération immobilière à l'étranger ne devrait avoir lieu sans que l'ambassadeur en soit informé et sans que le ministre des affaires étrangères ait donné son accord. A partir de ce moment-là, nous aurons une gestion différente d'une partie importante de notre patrimoine à l'étranger. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur celles de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le ministre, je veux d'abord vous remercier d'avoir accepté ce débat sur la gestion immobilière de votre ministère, que nous avons souhaité inscrire dans le cadre de la fenêtre parlementaire mensuelle.

Cette initiative, que nous avons l'intention de réitérer, résulte d'une prise de conscience. Le rapport de Jacques Chaumont du 30 juin 2004 était assez accablant en ce qui concerne la situation du parc immobilier en Turquie. A la suite des constatations qui avaient été faites dans ce rapport, nous avions souhaité que le prédécesseur du secrétaire général vienne apporter des précisions devant la commission des finances, ce qu'il fit.

Depuis, il y a eu le rapport de la Cour des comptes et une accumulation d'observations accréditant l'idée que la gestion immobilière était traitée de façon tout à fait accessoire au sein du ministère des affaires étrangères, sans doute par d'éminents hauts fonctionnaires, mais dont la préoccupation et la compétence premières n'étaient peut-être pas la gestion immobilière.

Nous ne pouvons pas nous en tenir à des constatations successives sans que rien ne change !

Cela me fait penser à une observation que faisait tout récemment l'un des membres de la commission des finances à l'occasion d'un séminaire de réflexion sur la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances ; je sais que Mme Luc est particulièrement attachée à la bonne mise en oeuvre de ce texte. Un échange a eu lieu à propos des contrôles et l'un d'entre nous a dit, avec une certaine sagesse : une fois que l'on a réussi à faire dire à un fonctionnaire que les choses ne vont pas bien, à quoi cela sert-il si l'on n'y peut rien ? (Sourires.)

Nous ne voulons absolument pas inscrire notre engagement dans une sorte de fatalisme. Nous pensons que le Parlement peut devenir complice du dysfonctionnement de l'Etat s'il s'abstient de faire pression sur le Gouvernement pour obtenir les réformes nécessaires.

J'ai présidé récemment une délégation qui s'est rendue en Inde. Philippe Marini et moi-même en avons profité pour faire un contrôle sur place et sur pièces à l'ambassade. Nous avons alors constaté que les grandes plaques de pierre de l'immeuble se détachaient. Nous avons demandé des éclaircissements et l'ambassadeur nous a présenté une liasse de télégrammes diplomatiques relatifs à cette question. On se demande d'ailleurs si les destinataires de ces télégrammes ont toujours le temps de les lire !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La correspondance à cet égard semble débuter au mois de juillet 2001. A cette époque, l'ambassadeur a écrit au Quai d'Orsay en ces termes : « A la suite de la mission du service de l'équipement à Delhi du 13 au 15 juin 2001, je serais reconnaissant au département de bien vouloir me faire connaître les solutions qu'il a retenues pour remédier au problème critique posé par le détachement des pierres de façade de la résidence. » De très nombreux télégrammes diplomatiques ont suivi. Cet échange de correspondances est troublant pour le béotien que je suis : j'ai l'impression que l'on ne parvient pas à se comprendre. On parle de crédits d'étude, mais on ne se met jamais d'accord sur leur montant. Quatre ans plus tard, rien n'a changé, hormis le fait qu'une dizaine de plaques sont tombées, ce qui fait courir un risque sérieux à tous ceux qui peuvent se trouver aux abords de l'ambassade.

Monsieur le ministre, nous voulions porter à votre attention cette situation qui nous paraît incompréhensible.

Dans le même ordre d'idée, les services chargés de la sécurité qui se sont rendus à Delhi ont constaté que l'installation électrique du service de coopération et d'action culturelle était vétuste et qu'elle faisait courir un grave danger à tous ceux qui fréquentaient ces lieux. Les constatations et les appels au secours datent également de l'année 2001. A ce jour, rien n'a changé, semble-t-il.

Monsieur le ministre, je connais votre volonté de mettre de l'ordre dans votre maison et de traiter enfin ces questions immobilières avec une approche professionnelle et un souci d'efficacité. Pouvez-vous nous dire brièvement comment est organisée la gestion immobilière au sein de votre ministère ? Existe-t-il des délégations régionales ? Des personnels disposent-ils de crédits ou de délégations de crédits et peuvent-ils prendre des décisions sans que, systématiquement, le ministère ne soit sollicité sur des travaux quelquefois mineurs ? On a le sentiment que le centralisme absolu est la règle dans cette maison. Nous aimerions être éclairés sur ce point.

Profitant de ce passage à Delhi, nous avons voulu vérifier l'état de préparation des agents de votre ambassade s'agissant de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances. Nous avons été un peu troublés lorsque nous avons rencontré les deux agents du service comptable et financier, car ils ont été incapables de nous indiquer les instructions précises qu'ils avaient reçues, notamment en ce qui concerne le nouveau système d'information comptable et budgétaire. Ils attendaient, et ils étaient inquiets.

Monsieur le ministre, nous voudrions être sûrs que votre ministère ne considère pas la LOLF comme une mode, une peinture que l'on viendrait poser sur les structures existantes sans que ne soient engagées les nécessaires réformes.

Telles sont les quelques observations que je souhaitais formuler en complément de celles de M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial.

Ces débats, que la commission des finances souhaite susciter dans le cadre des fenêtres parlementaires mensuelles, doivent devenir aussi interactifs que possible, afin d'exercer une pression sur le Gouvernement, avec la complicité de Mme Luc, qui s'inquiète parfois de la mise en oeuvre de la LOLF et de l'article 57.

Mme Hélène Luc. Avec raison, je crois !

M. le président. Mon cher collègue, ne provoquez pas Mme Luc !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je souhaite la convertir totalement !

Mme Hélène Luc. Vous aurez du mal !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame Luc, les comptables n'auront pas le pouvoir ! En donnant une image fidèle de la situation, ils permettront aux politiques de porter des appréciations fondées sur des données factuelles. Notre seul souci, c'est d'aller dans la bonne direction.

Je vous remercie, monsieur le ministre, des réponses que vous voudrez bien nous apporter. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, messieurs les rapporteurs, voilà un débat auquel j'ai assisté avec une attention continue. Il a montré, s'il en était besoin, la vigilance avec laquelle le Sénat exerce son pouvoir de contrôle. Pour avoir siégé parmi vous il n'y a pas si longtemps, je n'en suis pas surpris. M. Charasse et le président Arthuis ont évoqué le travail remarquable réalisé par Jacques Chaumont ; je l'avais moi-même remarqué en tant que collègue.

Depuis que j'ai l'honneur d'animer ce ministère, je me tiens précisément informé du sujet que vous avez choisi de mettre aujourd'hui à l'ordre du jour. Cette question m'intéresse depuis très longtemps ; je l'ai d'ailleurs démontré lorsque, en qualité de ministre de l'environnement, j'ai eu à regrouper des fonctionnaires dispersés et à m'occuper des questions d'intendance.

Avant de parler des murs, des toits, des plaques qui tombent parfois, permettez-moi de rendre hommage à mon tour aux hommes et aux femmes qui oeuvrent derrière ces murs. Quelque 22 000 agents, français et « recrutés locaux », travaillent avec infiniment de compétences, de disponibilité, et en prenant quelquefois des risques, comme à Kaboul ou à Bagdad.

Mme Hélène Luc. Absolument !

M. Michel Barnier, ministre. Et je pourrais citer bien d'autres lieux où les fonctionnaires de l'Etat servent les intérêts de la France, participent à son influence et se mettent à la disposition des Français de l'étranger - ceux-ci sont au nombre de deux millions -, que certains d'entre vous représentent.

A ce titre, j'évoquerai un point dont vous n'avez pas eu le temps de souligner l'importance. Il s'agit des dépenses de sécurité, qu'il est impératif de ne pas réduire, notamment en ce qui concerne les établissements scolaires ou les bâtiments publics appartenant à l'Etat français dans les endroits où se posent des problèmes de sécurité. Beaucoup d'entre vous me font part régulièrement de cette préoccupation.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le patrimoine immobilier géré par le ministère des affaires étrangères représente, en France et à l'étranger, 2,4 millions de mètres carrés, pour 173 ambassades et représentations permanentes. C'est un patrimoine considérable, hérité de l'histoire diplomatique ou coloniale de notre pays. Il comprend non seulement des logements et des bureaux, mais aussi des églises, des lycées, de nombreux monuments de très grande valeur culturelle ou artistique.

M. Del Picchia a très bien décrit la diversité des utilisations dont font l'objet ces bâtiments. La gestion à travers le monde de ce patrimoine très hétérogène est soumise à plus de cent cinquante droits locaux différents, ce que l'on appellerait, dans un autre contexte, le pays d'origine. Lorsqu'on veut vendre, acheter ou louer, cela constitue un défi considérable.

Dès mon entrée en fonction, j'ai apporté une attention personnelle à cette question de l'immobilier. M. Branger, rapporteur pour avis, a parlé tout à l'heure de « resserrement ».

Je formulerai une première observation à cet égard. Bien sûr, il faut rationaliser, mais il faut aussi regarder les choses avec précaution et précision, en pensant à nos deux millions de compatriotes et à nos entreprises, qui ont besoin de ces consulats et de ces ambassades. Il importe également de penser aux situations imprévisibles : crises, guerres, catastrophes naturelles...

Au lendemain du tsunami, je me suis rendu au Sri Lanka et j'ai pu constater sur place comment une toute petite équipe d'ambassade pouvait être bien plus utile qu'on ne le pense quelquefois depuis Paris pour apporter une aide à ceux qui affrontent de grands dangers et qui se trouvent dans des situations tragiques. Je pourrais également parler de la Thaïlande ou de l'Indonésie.

Les délégués de l'Assemblée des Français de l'étranger appellent souvent mon attention sur l'utilité de conserver ces postes, même dans des pays petits ou très lointains.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je m'efforcerai d'être le plus précis possible en répondant aux questions que vous avez posées, mais je ne pourrai pas être totalement exhaustif. Je compléterai donc éventuellement ces réponses par écrit.

Plusieurs d'entre vous ont rappelé les points que la Cour des comptes avait soulevés dans son rapport public relatif à la période 1998-2002 : le choix des normes de construction, le dépassement de coût de projets sous l'effet de modifications trop nombreuses, les difficultés à établir et à tenir une programmation.

Comme Mme Joëlle Garriaud-Maylam, je pense qu'il faut tenir compte de ces observations. Avant même la parution de ce rapport, j'avais pris un certain nombre de mesures tendant à améliorer la situation sur quatre points.

Premièrement, mes services ont préparé un projet de décret modifiant le code du domaine de l'Etat, de manière à placer les opérations de construction dans le champ de compétences de la commission interministérielle des opérations immobilières de l'Etat à l'étranger. C'est précisément dans cet esprit que sont intervenus, tout à l'heure, M. Gouteyron, rapporteur spécial, et M. Branger, rapporteur pour avis.

L'intervention de cette commission, qui suit déjà les achats, les cessions et les baux, renforcera la rigueur de l'examen des projets, fixera ceux-ci de manière plus stable, donc limitera les remises en cause trop fréquentes qui ont été soulignées ici ou là, comme à Berlin, et permettra une meilleure consultation des autres ministères.

Deuxièmement, les services qui suivaient le patrimoine et ceux qui assuraient l'entretien des bâtiments et les constructions ont été fusionnés, monsieur Charasse. J'ai entendu votre remarque sur la création d'un poste spécial de secrétaire général.

M. Michel Charasse. Non-diplomate !

M. Michel Barnier, ministre. Il y a un secrétaire général qui s'intéresse à ces sujets, puis un directeur général, enfin une direction des services chargés de l'immobilier. Nous recrutons des gens qui ne sont pas diplomates, notamment des ingénieurs, afin de suivre ces questions.

Troisièmement, des normes de construction, point que M. Gouteyron a évoqué, et des programmes types ont été définis. Le programme type des chancelleries est utilisé depuis la fin de l'année 2004 ; celui des consulats sera prêt le mois prochain.

Enfin, quatrièmement, des bases informatiques de référence sont en cours de constitution.

Le ministère des affaires étrangères mène ces opérations selon des modalités innovantes, et pas seulement pour les consulats ou les ambassades. Je citerai deux exemples.

Ainsi, l'implantation des archives du ministère à La Courneuve sera menée selon un contrat associant la construction et la maintenance du site, de manière à intégrer, dès la construction, les coûts d'exploitation. C'est une forme de crédit-bail.

Monsieur Arthuis, si nous avions procédé de la sorte à New Delhi, nous n'aurions probablement pas rencontré les problèmes auxquels vous avez fait allusion et sur lesquels je reviendrai dans un instant.

Par ailleurs, la reconstruction de notre chancellerie à Tokyo s'appuiera sur un partenariat entre le public et le privé.

Je suis préoccupé par la dispersion actuelle de l'administration centrale du ministère des affaires étrangères : 3 000 personnes environ travaillent sur onze sites différents à Paris, dont huit sont la propriété du ministère. Je ne parle pas des agents qui se trouvent à Nantes et qui y resteront ; c'est du reste leur souhait.

Cette dispersion entretient un cloisonnement tout à fait regrettable entre les services, dont je suis le premier à souffrir. C'est une source de coûts de fonctionnement excessifs et de perte de temps.

Il y a cinq bureaux du courrier différents, vingt-six portes à garder. C'est pourquoi, comme M. Del Picchia et d'autres m'y ont encouragé, j'ai mis à l'étude une implantation plus compacte des services parisiens du ministère. J'agirai avec ténacité, mais en prenant toutes les précautions nécessaires, c'est-à-dire en engageant une concertation, monsieur Pozzo di Borgo.

Naturellement, mesdames, messieurs les sénateurs représentants les Français de l'étranger, je veillerai à ce qu'une place correcte soit faite à l'Assemblée des Français de l'étranger dans ce nouveau site.

M. Christian Cointat. Très bien !

M. Michel Barnier, ministre. En totale concertation avec les personnels et dans un souci de dialogue social, j'ai fixé plusieurs bornes. La première est naturellement d'ordre financier : elle consiste à valoriser les biens que nous allons vendre, afin de permettre la construction du nouveau ministère.

Le patrimoine parisien du ministère a donc fait l'objet d'une estimation par un grand cabinet de conseil. Je veillerai, monsieur Pozzo di Borgo, à ce que non seulement la mairie de Paris mais aussi chaque mairie d'arrondissement soient consultées sur les ventes effectives.

Une deuxième étude a été lancée, qui porte sur le programme d'installation : à quoi ressemblera le nouveau ministère lorsqu'il sera doté de tout ce qui lui fait défaut actuellement, par exemple une salle de crise correcte et moderne ?

Lorsque le tsunami a suscité notre mobilisation en Asie, quelque 350 agents bénévoles, immédiatement disponibles, ont travaillé dans des conditions difficiles : le ministère ne dispose ni d'une véritable salle de presse, ni d'un nombre suffisant de salles de réunion, ni de salles équipées de systèmes de traduction simultanée.

Bien sûr, nous allons conserver le Quai d'Orsay, et peut-être même l'aménager afin qu'il puisse devenir un centre de conférence et rester le lieu de réception officielle des personnalités étrangères ou européennes qui nous rendent visite. Mais on ne peut pas travailler au xxie siècle comme au xixe ! C'est pourquoi nous oeuvrons à cette modernisation. Tout cela reste naturellement suspendu à l'identification d'un site propice, à Paris ou à proximité immédiate de Paris, dans les conditions que je viens d'évoquer.

S'agissant de coordination et de cohérence, je confirme, monsieur Gouteyron, que nous mettons en place à Bruxelles, cette année, un service administratif et financier unique pour nos quatre ambassades.

Je vais plus loin : à la faveur d'une redistribution des résidences de nos ambassadeurs, sera créée au centre de Bruxelles, près du Conseil des ministres, de la Commission et du Parlement, une « maison de la France », endroit où, d'ici à la fin de l'année, les membres du Gouvernement et les parlementaires pourront recevoir ou être reçus.

A Vienne, monsieur Del Picchia, sur la base des idées que vous nous avez soumises, un effort de cohérence sera entrepris dans le même esprit.

Au-delà de ces importantes étapes, j'ai l'intention, en étroite concertation avec Thierry Breton et Jean-François Copé, de mettre en place un mode innovant de responsabilisation des ambassades, des consulats et des services de coopération, sujet évoqué par MM.  Pozzo di Borgo et Gouteyron.

Aujourd'hui, ces services sont attentifs aux surfaces et à l'état général des bâtiments qu'ils louent, mais ils n'ont pas le même souci de rigueur lorsque leurs locaux sont propriétés de l'Etat. Or occuper les biens de l'Etat n'est pas gratuit puisque la vente de ces biens pourrait contribuer au désendettement ou à des opérations immobilières indispensables.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que les ambassades, consulats et services culturels acquittent désormais un loyer pour les biens de l'Etat dont ils ont la jouissance, de manière à en percevoir le coût et à en rationaliser l'usage.

Ce système financier innovant, dont les modalités pratiques sont en cours d'élaboration et qui entrera en pratique au cours de l'exercice 2007, contribuera, monsieur Pozzo di Borgo, à optimiser les arbitrages économiques entre l'achat ou la location.

Cependant, avant même que ce système stimule la rationalisation des implantations, notre ministère aura activement contribué - et il continuera à le faire - à la politique de cession engagée par le Premier ministre : entre 2000 et 2004, les ventes de biens immobiliers ont représenté 50 millions d'euros et elles devraient s'élever à 19 millions d'euros en 2005.

J'ai naturellement noté, monsieur le rapporteur spécial, que vous souhaitiez que le ministère que je dirige dispose de la totalité du produit de ces cessions. J'espère que les autres ministères vous entendront ! En tout cas, s'ils n'étaient pas spontanément prêts à vous entendre, je ne manquerai pas de leur rapporter fidèlement cette demande du Sénat.

Dans le domaine de la gestion immobilière comme dans d'autres, les capacités du ministère des affaires étrangères à se réformer me semblent donc ne plus devoir être sous-estimées, et je suis heureux que le débat d'aujourd'hui me donne l'occasion de présenter au Sénat les progrès déjà accomplis et ceux qui sont en cours.

Avant d'aborder plus précisément quelques-uns des points que vous venez de soulever, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite vous assurer de ma disponibilité et de celle de mes collaborateurs pour procéder régulièrement avec vous à l'évaluation des réformes et des résultats obtenus.

En écho à ce qu'ont dit tour à tour MM. Yung, Branger et Pozzo di Borgo, j'exprime le souhait que l'effort de rationalisation et de cohérence ne s'accomplisse pas seulement entre nous Français, avec les moyens dont dispose l'Etat, voire avec ceux des associations que nous accompagnons et que nous soutenons, comme l'Alliance française, dont je salue le rôle ; nous devons y associer nos partenaires européens.

Sur ce point, je n'ai pas eu besoin d'être convaincu, mais la politique de mutualisation de nos moyens consulaires et peut-être même de certaines de nos ambassades prend parfois plus de temps qu'on ne le souhaiterait, raison pour laquelle avec nos collègues allemands et espagnols, notamment, nous allons relancer cette politique.

La mutualisation des moyens consulaires vaut pour des centres culturels - j'ai ainsi pu inaugurer voilà quelques mois à Ramallah, en Palestine, un centre culturel franco-allemand - et pour des lycées.

Elle vaut aussi pour certaines ambassades, comme celle que je voudrais co-localiser avec l'Allemagne au Mozambique, et, naturellement, pour les consulats, en particulier pour les consulats des pays qui appartiennent à l'espace Schengen : il faudra bien qu'un jour nous ayons - et pas seulement dans l'espace européen - un réseau de consulats communs.

M. Pozzo di Borgo a évoqué l'espace diplomatique européen et les changements que nous devrions être conduits à opérer dans nos ambassades, changements qui ne concerneront d'ailleurs pas nécessairement les seuls locaux. J'espère que la Constitution européenne sera bientôt opérationnelle.

Mme Hélène Luc. Ça, on ne le sait pas !

M. Michel Barnier, ministre. Bien sûr, madame Luc, cela dépend du peuple ! Je peux néanmoins exprimer le souhait que la Constitution européenne soit bientôt opérationnelle, car nous pourrons ainsi nous diriger vers une diplomatie commune.

M. le président. Ne comptez pas sur l'appui de Mme Luc, monsieur le ministre !

M. Michel Barnier, ministre. Je n'y compte pas, mais, pour rassurer Mme Luc, je tiens à dire que, nous, nous nous battons pour une politique étrangère commune, mais pas unique. Nous allons donc conserver des représentations diplomatiques dans les différents pays partenaires de l'Union, même si je pense qu'il faudra mutualiser progressivement les moyens s'agissant des consulats.

En tout état de cause, mesdames, messieurs les sénateurs, ce sont moins les murs que nous conserverons qui importent que ce que nous allons faire dans nos ambassades. J'estime en effet que le contenu du travail diplomatique dans les pays de l'Union doit évoluer plus vite que dans les années passées. D'ailleurs, voilà quelques jours, j'ai réuni - ce n'est pas arrivé fréquemment - à ce sujet nos vingt-quatre ambassadeurs français dans les vingt-quatre pays de l'Union et passé une journée avec eux pour qu'avec leurs équipes, tout en restant, bien sûr, chargés des relations bilatérales, ils donnent une plus grande dimension communautaire et européenne à leur mission.

Madame Luc, vous m'avez posé une question à laquelle je ne suis pas en mesure de répondre sur les conditions de traitement des personnels chargés de la sécurité à Kaboul ; je vous ferai parvenir, si vous le voulez bien, une réponse écrite dans les jours qui viennent.

Mme Hélène Luc. Je vous remercie.

M. Michel Barnier, ministre. Au sujet des co-localisations, M. le rapporteur pour avis m'a interrogé sur un point précis : je compte bien, monsieur Branger, installer ceux de nos services d'Almaty qui ne déménagent pas à Astana dans le bâtiment conforme aux normes sismiques que l'Allemagne nous a proposé.

A Mme Garriaud-Maylam, je confirme que l'extension du lycée Charles-de-Gaulle à Londres est actuellement à l'étude. Le projet privilégiera la récupération de ce qu'on appelle les mews, petits logements situés autour du lycée qui seront transformés en locaux scolaires, et la construction, qui sera facilitée, d'un bâtiment annexe. Le coût de ce projet est en cours d'évaluation. Le financement s'effectuera en partie par emprunt, mais peut-être aussi par valorisation de biens immobiliers dont nous disposons à Londres et que nous pourrions mettre en vente.

MM. Gouteyron et Arthuis, accompagnés de M. Marini, se sont rendus à New Delhi, où nous possédons un important bâtiment de 7 645 mètres carrés utiles, qui regroupe la chancellerie et les résidences. Ce bâtiment, achevé en 1986, année pourtant pas si lointaine, vieillit mal : il présente de très grandes surfaces de façade recouvertes de pierres de parement dont certaines se détachent, d'où un risque d'accident.

Un diagnostic avait été établi il y a plusieurs années et quelques mesures conservatoires avaient été prises. Une étude détaillée prévoit les premières interventions de reprise des parements en 2005 ; elle va nous permettre de connaître dans sa totalité le programme à mettre en oeuvre. Le coût estimé est de 200 000 euros pour 2005, et nous avons prévu dans le projet de budget du ministère pour 2006 de 1,2 à 1,5 million d'euros pour d'autres travaux. Cela ne suffira cependant pas, car, en 2005 et en 2006, il faudra également entreprendre des travaux portant sur la climatisation, la sécurité incendie, l'installation électrique, le logement du personnel, travaux dont le coût estimé se situe entre 400 000 et 500 000 euros.

Pour l'ambassade de Pékin, madame Garriaud-Maylam, les décisions sont prises et elles seront mises en oeuvre selon la nouvelle méthode que j'ai exposée tout à l'heure, afin d'éviter les dérives, les surcoûts ou les changements de programme, que je n'accepterai pas. Le choix de l'architecte a été fait à la fin de 2004 et les travaux seront réalisés de façon à être terminés en 2006, à l'horizon des jeux Olympiques de Pékin.

Monsieur Del Picchia, s'agissant de Florence, je vous confirme que le consulat a été fermé et que j'ai demandé que l'aile Frescobaldi du Palais Lenzi soit vendue.

Je confirme également à chacun de vous, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous disposons maintenant d'un inventaire précis et exhaustif de tous nos biens immobiliers et mobiliers.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Michel Barnier, ministre. A partir de cet inventaire, qui est consultable, vous pourrez disposer à la fin de novembre 2005 non seulement de la description précise des biens que nous possédons, mais également de leur valorisation.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Parfait !

M. Michel Barnier, ministre. MM. Gouteyron et Branger, ainsi que Mme Luc ont, comme la Cour des comptes, évoqué Berlin. Pour être précis, je vais rappeler quelques dates : il s'agit d'un projet confié en 1997 à un grand architecte français, Christian de Portzamparc ; les études ont été menées de 1997 jusqu'en 2000 ; un marché de travaux de bâtiment a été notifié à un groupement le 3 août 2000 et les travaux se sont achevés le 13 septembre 2003.

Ce projet a donné lieu à des procédures contentieuses ; elles ont été closes par une transaction d'un montant de 3,5 millions d'euros hors taxe, montant que mon ministère a réglé au groupement qui avait introduit ces procédures contentieuses. Les sommes dues au titre du marché de maîtrise d'oeuvre sont à présent acquittées. Il y a encore des réclamations de l'architecte.

Alors que le budget alloué était de 65,5 millions d'euros, le bilan financier de cette opération s'établit en définitive, compte tenu des récupérations de TVA, à 53,5 millions d'euros. J'ai cependant noté les critiques et les observations ; je le répète, les nouvelles dispositions administratives que nous avons prises devraient permettre d'éviter à l'avenir les dérives.

Enfin, M. Ferrand, que je remercie de la qualité de ses propositions, a, comme M. Del Picchia, traité des établissements scolaires et insisté sur l'importance du rôle de l'AEFE.

A cet égard, je confirme que le projet de décret modificatif relatif à l'organisation administrative, budgétaire et comptable de l'AEFE est en cours de signature. Ce texte permettra d'accroître l'autonomie de cet établissement public, et je veillerai à ce que celui-ci dispose des crédits et des moyens nécessaires pour assumer sa nouvelle compétence. (M. Robert Del Picchia applaudit.)

Monsieur Yung, la construction à Pékin d'un nouveau lycée sur une partie du terrain affecté à la construction de l'ambassade est prévue, avec l'hypothèse de conserver l'implantation actuelle du lycée et de construire sur ce terrain un bâtiment uniquement destiné au secondaire. Reste à trancher la question de savoir si le financement se fera au travers de l'association de parents d'élèves avec une subvention de l'AEFE ou si le lycée passera en gestion directe, ce qui est l'option défendue par notre ambassade. En tout état de cause, je vous remercie, monsieur le sénateur, de l'appui que vous nous apportez.

Monsieur Del Picchia, je suivrai vos recommandations s'agissant de Vienne.

Enfin, monsieur Arthuis, j'ai trop de respect pour le Parlement, dont j'ai fait partie pendant une vingtaine d'années, et pour le travail de la Cour des comptes, pour ne pas tenir compte des observations, des critiques et des recommandations qui me sont faites. Il n'y aura donc pas d'inaction.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Michel Barnier, ministre. Les choses vont changer, quand ce n'est pas déjà le cas, et je suis à votre disposition, mesdames, messieurs les sénateurs, pour procéder avec vous à l'évaluation de ces changements.

J'ai noté, monsieur Arthuis, votre remarque à propos de votre récente visite à New Delhi. La LOLF n'est pas une mode ; c'est une obligation que nous considérons, en ce qui nous concerne, avec beaucoup de volontarisme. Le Premier président de la Cour des comptes, que j'ai rencontré, voilà quinze jours, justement pour assurer le suivi de son rapport, m'a d'ailleurs donné acte du fait que le ministère des affaires étrangères a été l'un de ceux qui ont pris la LOLF à bras-le-corps avec le plus d'énergie.

Je ne cherche pas d'excuses et je ne demande pas l'indulgence, mais, s'agissant de l'information de nos agents, nous avons peut-être une circonstance atténuante : il est moins facile de mobiliser 22 000 agents éparpillés dans le monde, notamment tous ceux qui, dans chacune de nos ambassades ou chacun de nos postes à l'étranger, sont chargés des questions budgétaires et comptables, que des agents rassemblés dans un seul ministère à Paris. Quoi qu'il en soit, avec la direction générale, nous diffusons actuellement les informations et proposons les formations nécessaires aux agents compétents du ministère des affaires étrangères pour mettre en oeuvre la LOLF avec la même énergie qu'à Paris.

Je le redis donc : il n'y aura pas d'inaction et, dans le même esprit qu'aujourd'hui, je suis prêt à revenir régulièrement devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour procéder à l'évaluation des changements. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UC-UDF et du groupe socialiste.)

M. le président. Le débat est clos.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures trente-cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

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Dossier législatif : proposition de loi tendant à mettre à disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles
Discussion générale (suite)

Locaux du Congrès à Versailles

Adoption d'une proposition de loi

(Ordre du jour réservé)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à mettre à disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles
Art. additionnel avant l'art. 1er

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à mettre à la disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles (nos 288, 314).

Monsieur le ministre, mes chers collègues, sur le rapport de notre questeur René Garrec, nous allons discuter d'une proposition de loi du président de l'Assemblée nationale remettant à la disposition de l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles des locaux chargés d'histoire, au bénéfice de nombreux visiteurs.

Pour le Sénat, cette proposition s'inscrit dans la démarche discrète - à chacun sa méthode... - entreprise par nos questeurs voilà quelques mois déjà, en vue de faire en sorte que le projet « Grand Versailles » dispose de moyens supplémentaires pour l'accueil du public au château de Versailles, l'un des monuments les plus visités de France.

C'est pourquoi je tiens à me féliciter de ce que le Sénat ait décidé d'inscrire, dans les plus brefs délais, la discussion de cette proposition de loi dans le cadre de son ordre du jour réservé.

Pour autant, monsieur le ministre, vous me permettrez d'exprimer un regret : avec le conseil de questure, j'aurais préféré que nous soyons consultés en temps et en heure sur cette initiative, que par ailleurs nous approuvons, que j'approuve, contrairement à ce que j'ai pu lire ou entendre, ici et là. J'espère de celles et ceux qui sont chargés de nous informer, et non de nous « désinformer », les rectificatifs nécessaires, et je les en remercie par avance.

Cela étant, place au débat et à la discussion des amendements, qui permettront d'améliorer ou de préciser la rédaction du texte, en vue, notamment, de préserver l'autonomie des assemblées dans l'organisation des travaux du Congrès.

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président du Sénat, mesdames, messieurs les sénateurs, notre débat revêt sans aucun doute une portée historique exceptionnelle : évoquer Versailles, c'est immanquablement évoquer l'histoire de France.

A cet égard, votre rapport, monsieur Garrec, est d'abord une formidable leçon d'histoire par le vaste tableau que vous brossez des rapports de Versailles avec l'histoire parlementaire, depuis le 17 juin 1789, date à laquelle les états généraux y ont pris le nom d'« Assemblée nationale », jusqu'à nos jours, jusqu'à cette initiative parlementaire, cette proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale, le 7 avril dernier, et qui est aujourd'hui soumise à la Haute Assemblée.

Votre remarquable rapport, monsieur Garrec, puise aux sources des meilleurs historiens et du lyrisme de Michelet pour retracer les grandes heures de cette histoire. Aussi n'y reviendrai-je pas, sinon pour rappeler le caractère hautement emblématique et symbolique de ce lieu de mémoire unique, empli du vivant souvenir du « Grand Siècle », tout autant que des heures illustres de la République, qui inspira tant de poètes, que Musset, après Delille et avant Régnier, célébra ainsi, dans des vers fameux, tout imprégnés de nostalgie :

« Je ne crois pas que sur la terre

« Il soit un lieu d'arbres planté

« Plus célébré, plus visité,

« Mieux fait, plus joli, mieux hanté,

« Mieux exercé dans l'art de plaire,

« Plus examiné, plus vanté,

« Plus décrit, plus lu, plus chanté ».

Notre débat d'aujourd'hui n'est certainement pas hanté par la nostalgie. Il est marqué toutefois par le sens de l'histoire, par l'enracinement de la République parlementaire dans une continuité confirmée, depuis l'avènement de la IIIe République, qui fait de Versailles un haut lieu de cette histoire.

Celle-ci semble donner raison à la déclaration prophétique que fit Jules Ferry lorsqu'il accéda à la présidence du Sénat, ici même, le 27 février 1893 : « La véritable forme du gouvernement parlementaire n'est ni le conflit des pouvoirs, ni leur équilibre qui ressemble trop à l'impuissance. C'est l'harmonie, l'harmonie qui laisse à chacun son rôle, mais tout son rôle ». Sur le Sénat, il ajoutait : « Il n'est point l'ennemi des nouveautés [...], il faut savoir envisager les transformations nécessaires. »

Nous sommes précisément face à l'une de ces transformations nécessaires. Elle s'adresse en premier lieu aux quelque 3 millions de visiteurs annuels qui viennent du monde entier admirer le château, auxquels s'ajoutent près de 7 millions de visiteurs pour le parc.

Les 600 000 visiteurs scolaires, qui ne bénéficient actuellement d'aucune infrastructure pédagogique digne de ce nom, seront les premiers bénéficiaires des réalisations permises par l'adoption de cette proposition de loi.

Au-delà de la seule affectation de locaux supplémentaires, au-delà de nouvelles conditions, bien plus favorables, d'accueil et de visite, il en résultera une perception nouvelle du monument le plus emblématique de la France dans le monde.

Rappelons résolument, avec beaucoup d'énergie et d'obstination, que notre patrimoine et la création culturelle et artistique représentent, en termes de rayonnement, d'influence et d'emplois, un capital essentiel et nouveau.

La proposition de loi permet donc une mise en valeur nouvelle de ce monument. C'est dans le respect de la tradition républicaine, mais aussi, bien sûr, avec le souci du bon fonctionnement de l'institution parlementaire que nous devons envisager la réforme qui vous est soumise.

Celle-ci doit tenir compte des conditions maintenues d'un usage parlementaire du site de Versailles pour la réunion des Congrès, qui ont la charge suprême de modifier notre loi fondamentale. Depuis 1958, le Congrès s'est réuni à quatorze reprises pour adopter seize lois constitutionnelles ; la dernière fois, le 28 février 2005, ce fut pour décider, notamment, que les Français seraient consultés par référendum sur tout nouvel élargissement de l'Union européenne.

Le Gouvernement, s'agissant d'une initiative parlementaire qui touche à l'exercice même du pouvoir constituant, ne peut, ni ne veut, en la matière, agir sans cette harmonie chère à Jules Ferry, que j'évoquais il y a un instant.

M. Michel Charasse. Encore un Vosgien !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. En l'occurrence, l'exécutif, s'il assume pleinement les responsabilités inhérentes aux missions d'intérêt général de l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles, tient à respecter entièrement la séparation des pouvoirs et l'indispensable coopération entre, d'une part, l'Assemblée nationale, investie par le troisième alinéa de l'article 89 de la Constitution d'une responsabilité particulière dans l'organisation des Congrès, puisque « le bureau du Congrès est celui de l'Assemblée nationale », et, d'autre part, le Sénat, qui forme donc avec l'Assemblée nationale le Parlement convoqué en Congrès.

Or que constatons-nous à la lecture du texte adopté par l'Assemblée nationale le 7 avril dernier et du rapport de votre commission des lois ?

Tout d'abord, il y a, entre les deux assemblées, un accord de fond, historique, sur la mise à la disposition du public des locaux qu'elles n'utilisent que ponctuellement. La nécessité d'une période transitoire pour la mise en oeuvre du changement d'affectation des locaux fait l'objet d'un même accord, et le Gouvernement ne peut que s'en réjouir.

Je me félicite également d'un accord sur les objectifs du schéma directeur du « Grand Versailles », adopté en conseil des ministres en septembre 2003, lesquels permettront de proposer aux visiteurs de nouvelles installations d'accueil dans les espaces du rez-de-chaussée des ailes des ministres. Si vous adoptez cette proposition de loi, les centaines de milliers de visiteurs scolaires reçus en groupe pourront ainsi être accueillis, dès 2007, dans des conditions beaucoup plus favorables.

Ces nouveaux espaces dégagent en effet les surfaces techniques nécessaires pour l'accueil du public, en amont de la visite proprement dite. Je pense en particulier à l'information, à la billetterie ainsi qu'aux dispositifs prévus pour les personnes handicapées, qui font jusqu'à présent cruellement défaut.

Je ne peux que constater, ensuite, une différence d'appréciation entre la commission des lois du Sénat et l'Assemblée nationale sur l'affectation de la salle des séances du Congrès proprement dite et de ses accès aux assemblées qui y siègent. Une telle disposition introduit une exception à l'unité et à la cohérence retrouvées de l'ensemble du domaine de Versailles qui constituent le principe même de cette proposition de loi.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à réitérer devant vous l'assurance que j'ai donnée aux députés, à savoir que l'utilisation par l'établissement public du musée et du domaine de Versailles des locaux situés dans l'aile du Midi ne devra en aucun cas gêner la tenue des Congrès. Toutefois, en raison du respect du principe de séparation des pouvoirs, qui est au fondement de notre République, de l'histoire, de la tradition et de la souveraineté parlementaires, je ne puis que m'en remettre au dialogue et, au besoin, à la navette entre les deux assemblées, confiant en votre sagesse et en l'harmonie nécessaire.

C'est dans cet esprit que je m'en remettrai donc sur ce point à la sagesse de la Haute Assemblée sur les amendements proposés par sa commission des lois. S'agissant des autres amendements, je m'exprimerai, comme le veut l'usage, au cours de la discussion des articles.

J'attire enfin votre attention, dans un souci de transparence et de vérité conformes à l'esprit de la loi organique qui régit désormais nos finances publiques, sur les évaluations financières portant sur les travaux nécessaires de réparation des toitures et des façades des locaux concernés par cette proposition de loi. J'ajoute que ces travaux sont prévus depuis plusieurs années : leur montant total s'élève à 11 millions d'euros, dont 4 millions d'euros au titre de travaux urgents à réaliser d'ici à 2009.

C'est un effort, une charge, nécessaires, à la hauteur de la chance historique que représente ce texte. Je ne doute pas du soutien du Parlement pour nous permettre d'assumer cette charge et de saisir cette chance. Car ce texte nous offre, vous offre, mesdames, messieurs les sénateurs, une opportunité exceptionnelle, qui s'inscrit pleinement dans le renouveau de la politique du patrimoine que les Français appellent, à juste titre, de leurs voeux : il s'agit, en effet, de la fierté nationale et de l'attractivité de la France. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. René Garrec, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi déposée par M. Jean-Louis Debré le 3 mars 2005 et adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 7 avril dernier tend à mettre à la disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles.

L'enjeu symbolique de cette proposition de loi est indéniable. En effet, entre le Parlement et Versailles se sont constituées, au fil des hasards de l'histoire, des relations très étroites.

C'est d'abord, près du château de Louis XIV, symbole de la monarchie absolue, que se produisent les premiers mouvements de la Révolution et que se tiennent les premiers débats parlementaires.

Le 17 juin 1789, les députés du tiers état, réunis dans la salle des Menus-Plaisirs, prennent le nom d'  « Assemblée nationale ». Leur premier acte ? Fixer l'impôt !

Comme le résume Michelet, un auteur que j'aime à citer - vous l'avez souligné, monsieur le ministre - « c'était, d'un coup, condamner tout le passé, s'emparer de l'avenir. »

Trois jours plus tard, le 20 juin, les députés du tiers état se rassemblent dans la salle du Jeu de Paume, qui était, toujours selon Michelet, un « triste lieu, laid, démeublé, pauvre... Et il n'en valait que mieux ! L'Assemblée y fut pauvre et représenta ce jour-là d'autant plus le peuple. » Cette description m'a un peu choqué, même si je dois reconnaître qu'une salle de jeu de paume, sport qui s'apparente au squash, n'est pas destinée à être meublée. (Sourires.)

M. Michel Charasse. « Mangez des pommes » !

M. René Garrec, rapporteur. Dans cette salle, où ils disposent à peine d'un banc de bois, les députés font serment de « ne se séparer jamais [...] jusqu'à ce que la constitution fût établie et affermie sur des fondements solides ».

Deux mois plus tard, le 26 août 1789, les députés adoptent, à Versailles encore, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Mais, début octobre, les émeutiers ramènent le roi à Paris. L'assemblée le suit peu après, et Paris redevient, pendant plus de quatre-vingts ans, le siège des pouvoirs publics.

Le Parlement retrouve Versailles au début de la IIIe République. En effet, l'assemblée élue le 8 février 1871 siége d'abord à Bordeaux, en raison de la situation militaire. En mars de la même année, elle refuse de regagner Paris, où les émeutes de la Commune commencent à gronder.

Après avoir hésité à s'installer à Fontainebleau ou dans une autre ville, l'assemblée vote son transfert à Versailles et décide de siéger dans l'opéra du château. Le gouvernement de Thiers s'installe quant à lui dans les locaux de la préfecture.

La population de la ville triple en quelques jours. Les députés qui n'ont pas trouvé place à l'hôtel ou chez l'habitant s'installent dans la galerie des Glaces, aménagée avec des paravents et des rideaux !

La géographie parlementaire évolue encore, lors de l'installation de la IIIe République, avec les lois constitutionnelles de 1875.

En effet, l'instauration du bicamérisme impose de trouver à Versailles une salle pour chaque assemblée. L'opéra de Gabriel est alors affecté au Sénat, tandis qu'une nouvelle salle est construite dans l'aile du Midi pour la Chambre des députés.

Cette salle, qui est aujourd'hui celle du Congrès, fut construite en huit mois. Elle peut accueillir environ 1 500 personnes, parlementaires et public confondus.

La répartition actuelle des locaux des assemblées à Versailles date de cette époque.

En 1879, les deux assemblées votent leur retour à Paris. A ce titre, je citerai Gambetta, président de la Chambre des députés, ce qui fera très certainement plaisir à nos collègues de gauche : « L'assemblée souveraine, par ce vote réparateur, a resserré le lien de l'unité nationale, elle a placé le siège du Gouvernement et des Chambres au seul point du territoire d'où on gouverne avec autorité. » Cette remarque ne plaide pas en faveur des lois de décentralisation, qui auraient sans doute été prématurées ! Une telle décision met fin, en outre, aux « fatigants et quotidiens voyages » en train entre Versailles et la capitale.

Les deux chambres continueront néanmoins, jusqu'à la IVe République, de se retrouver en Assemblée nationale à Versailles, pour élire le président de la République et adopter les révisions constitutionnelles.

Depuis 1958, sénateurs et députés se réunissent en Congrès à Versailles - ce fut le cas le 28 février dernier, comme M. le ministre l'a rappelé -, pour adopter définitivement les projets de révision constitutionnelle qui ne sont pas soumis à référendum.

Ainsi, depuis 1875, Versailles est le lieu des réunions les plus solennelles du Parlement. Toutefois, d'un point de vue juridique, l'Assemblée nationale et le Sénat sont non pas propriétaires, mais affectataires des locaux que les deux assemblées utilisent au château de Versailles.

Sous la Ve République, le périmètre de cette affectation a été précisé tardivement. En effet, l'article 2 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires prévoyait seulement que « lorsque le Parlement est réuni en Congrès, les locaux dits du Congrès, sis à Versailles, lui sont affectés ».

La répartition des locaux a d'abord été précisée par voie conventionnelle. C'est d'ailleurs le Sénat qui, le premier, signe une convention avec le ministère de la culture, le 16 mars 1988.

L'Assemblée nationale conclut à son tour, le 16 mars 1995, une convention, notamment pour organiser le fonctionnement du musée de l'institution parlementaire, devenu musée des grandes heures du Parlement.

Mais ce n'est qu'en juillet 2003 que le périmètre des locaux affectés aux assemblées est précisé dans la loi.

Ces précisions sont introduites lors de l'examen du projet de loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, par le biais d'un amendement déposé par les questeurs de l'Assemblée nationale, MM. Henri Cuq, Claude Gaillard et Didier Migaud. L'article 2 modifié de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 prévoit désormais que « les locaux dits du Congrès et les autres locaux utilisés par les assemblées, sis au château de Versailles, tels qu'ils sont définis par l'annexe à la présente ordonnance, sont affectés à l'Assemblée nationale et au Sénat ».

Moins de deux ans après l'introduction de ces précisions, l'article 1er de la proposition de loi tend à supprimer l'affectation permanente aux assemblées des locaux dits du Congrès.

Cet article substitue une mise à la disposition de l'Assemblée nationale et du Sénat, en tant que de besoin et à titre gratuit, des locaux nécessaires à la tenue du Congrès.

Quelle est l'étendue des locaux qui devraient ainsi changer d'affectation ? Il s'agit au total de près de 25 000 mètres carrés, dont 4 000 mètres carrés pour les locaux du Congrès.

L'Assemblée nationale dispose d'une grande partie de l'aile du Midi, de locaux dans l'aile des ministres Sud, ainsi que du pavillon dit « des Roulettes », dans le parc.

Quant au Sénat, il est affectataire d'un ensemble de locaux d'une surface de 5 400 mètres carrés, soit un cinquième de la surface affectée au Parlement.

Ces locaux sont situés pour l'essentiel dans l'aile Nord et constitués de réserves de stockage pour les archives et le mobilier. Le Sénat dispose en outre de locaux de réception dans l'aile des ministres Nord. Ces locaux ont une vocation essentiellement fonctionnelle. Le Sénat en a toujours assumé entièrement les travaux d'entretien et de rénovation.

Soucieuse d'en faire le meilleur usage possible, la Haute Assemblée a remis les locaux qui présentaient le plus grand intérêt patrimonial au ministère de la culture. Ainsi, dès les années cinquante, il a confié l'opéra Gabriel à l'administration des Beaux-Arts.

Le Sénat a poursuivi cette démarche conventionnelle, permettant ainsi, voilà cinq ans, à l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles d'installer le service médical destiné aux visiteurs dans des locaux affectés au Sénat, dans l'aile des ministres Nord.

C'est dans cette logique que le Sénat avait engagé depuis plus d'un an des négociations avec l'établissement public, afin de faciliter la mise en oeuvre du schéma directeur d'aménagement du « Grand Versailles ».

Le Sénat était donc prêt à confier ses locaux de l'aile Nord, en particulier les anciennes cuisines Louis-Philippe, à l'établissement public, pour qu'il y installe un service de restauration de grande capacité destiné aux visiteurs.

L'adoption de la proposition de loi par l'Assemblée nationale a interrompu brutalement les négociations entamées par le Sénat.

M. le président. Monsieur le rapporteur, pardonnez-moi de vous interrompre, mais depuis combien de temps négociiez-vous ?

M. René Garrec, rapporteur. Nous négociions depuis un an et demi.

M. le président. Je vous remercie de cette précision, monsieur le rapporteur.

M. Michel Charasse. Parfois, on court plus vite que M. Debré !

M. le président. Mais discrètement !

M. Michel Charasse. Il a l'art de nous doubler !

M. René Garrec, rapporteur. Honneur aux anciens questeurs !

M. le président. Vous étiez d'ailleurs questeur à cette époque, monsieur Charasse.

M. Michel Charasse. Je ne le regrette pas !

M. le président. Je tenais à ce que la chronologie, confirmée par M. le rapporteur, figure au compte rendu, dans un souci de bonne information.

Veuillez, je vous prie, poursuivre, monsieur le rapporteur.

M. René Garrec, rapporteur. La commission des lois est favorable au changement d'affectation des locaux dans la mesure où ils pourraient être utilisés par l'établissement public pour assurer un meilleur accueil du public à Versailles.

Les représentants de l'établissement public m'ont expliqué ce qu'ils comptaient faire de ces locaux et la commission des lois a estimé que cela ne posait aucun problème. Il s'agit en effet de redonner son éclat à Versailles et d'accueillir dans de meilleures conditions ses trois millions de visiteurs annuels.

En revanche, il nous paraît indispensable de maintenir l'affectation de la salle des séances du Congrès à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Cette salle, construite pour accueillir les deux assemblées du Parlement, est un lieu de mémoire de notre histoire parlementaire ; elle a toujours été affectée aux deux assemblées. Son utilisation, comme celle de tout hémicycle parlementaire, doit relever exclusivement des assemblées qui y tiennent leurs séances.

Je vous proposerai donc, à l'article 1er, un amendement tendant à maintenir l'affectation de la salle du Congrès à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Les autres locaux nécessaires à la tenue du Congrès seraient mis à la disposition de l'Assemblée nationale et du Sénat en tant que de besoin et à titre gratuit.

Des conventions prévues à l'article 3 de la proposition de loi devraient définir les modalités de cette mise à disposition, afin de prévoir que l'établissement public ne pourra apporter à ces locaux aucune modification susceptible de gêner la tenue des Congrès du Parlement.

En outre, ce même article dispose que des conventions seront passées entre les personnes publiques intéressées pour préciser les modalités du changement d'affectation des locaux.

Ces conventions devraient définir une période transitoire, afin de permettre aux assemblées de trouver de nouveaux lieux de stockage de leurs réserves de mobilier et d'archives. Pour le Sénat, l'espace nécessaire s'élève à près de 700 mètres cubes pour les réserves de mobilier et à près d'un kilomètre linéaire pour les archives.

Par ailleurs, le Sénat devra régler le problème posé par l'affectation actuelle de trois de ses agents à la maintenance et à la surveillance des locaux de Versailles.

Enfin, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture, à l'article 3, un amendement tendant à préciser que « la salle du Congrès est réservée à ses séances et aux réunions parlementaires ». Cette précision deviendrait inutile dès lors que la salle des séances du Congrès resterait affectée à l'Assemblée nationale et au Sénat, comme le propose la commission. Je vous présenterai donc, mes chers collègues, un amendement tendant à supprimer ces dispositions.

Mes chers collègues, sous réserve de l'adoption des modifications qu'elle vous soumet, la commission des lois vous invite à voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il s'agit d'un petit texte qui ne présente qu'un intérêt limité, si ce n'est celui d'illustrer un comportement particulièrement intéressant du Parlement. Certes, ce n'est pas la première fois que se constate un moment de schizophrénie parlementaire, mais, cette fois, il me semble que l'on atteint un sommet !

Les membres de la commission des lois, préfigurant sans nul doute l'opinion de leurs collègues, ont quasi unanimement déclaré que ce texte était démagogique et, à coup sûr, précipité. Certains, me semble-t-il, l'ont même qualifié de stupide. Mais tous, y compris moi-même, nous avons dit que nous le voterions malgré tout ou, pour le moins, que nous ne nous opposerions pas sur le fond. Ainsi, les sénateurs, après les députés unanimes, soit donc l'ensemble des parlementaires vont rendre au peuple la jouissance d'une partie du patrimoine, qui, pour être d'origine monarchique, n'en est pas moins national.

Il semble qu'il y ait urgence. Le peuple serait impatient ! Quelques-uns, parmi nous, ont parlé de temps de travail, de pouvoir d'achat, d'Europe... Le peuple a répondu par un immense grondement réprobateur : « Non, ne nous égarez pas, parlons des vrais problèmes : rendez-nous l'aile Nord du palais de Versailles ! » (Sourires.)

On eut beau lui dire que cette aile présentait pour le public un intérêt limité, le peuple persista. On eut beau lui dire que les appartements des questeurs n'avaient rien de comparable avec un certain autre appartement de 600 mètres carrés de l'avenue Montaigne, le peuple répondit : « Oui, mais quand même : Versailles... ». On eut beau lui dire que, à de rares exceptions près, les questeurs n'y mettaient jamais les pieds ...

M. le président. Le président non plus !

M. Jean-Claude Peyronnet. ... et qu'une solution était en cours de discussion pour les affecter à l'établissement public, le peuple s'obstina et finit par se fâcher en trépignant : « Ils sont à nous, on les veut, et tout de suite ! » (Nouveaux sourires.)

Vos sourires, mes chers collègues, me prouvent que vous ne me croyez pas.

M. Jean-Claude Peyronnet. Et vous avez bien raison ! Seuls le président de l'Assemblée nationale et le rapporteur de cette proposition de loi à l'Assemblée nationale peuvent croire à cette fable et céder d'urgence à la démagogie de cette nuit du 4 août au petit pied. Je rappelle que, au cours de la nuit du 4 août 1789, la vraie, chacun abandonna ses biens et, surtout, ceux des autres, les nobles, la dîme, le clergé, les droits seigneuriaux. Après cette fameuse nuit, les décrets, ...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et les remords !

M. Jean-Claude Peyronnet. ... qui furent rédigés le 11 août, étaient singulièrement en retrait par rapport aux enthousiastes propositions initiales ! (Sourires.)

M. Jean-Claude Peyronnet. Puisse le Sénat, qui n'a aucune raison de s'opposer à cette proposition de loi, mettre au moins, dans sa sagesse, des limites à cette précipitation démagogique, dont la logique pourrait conduire à s'interroger sur l'opportunité de laisser le Président de la République passer quelques jours par an au Fort de Brégançon ! Pourquoi pas ?

En effet, une fois la démagogie acceptée, au moins faut-il en limiter les dégâts ! Deux sujets - pas plus - me semblent mériter notre attention.

D'abord, même sur un point de détail, on ne bafoue pas les droits du Parlement. De ce point de vue, il n'est pas acceptable que ce soit par convention que le Congrès dispose des moyens matériels et, en l'occurrence, immobiliers de sa mission. Je me félicite donc, monsieur le rapporteur, de ce que la commission des lois ait accepté ma proposition de laisser le Congrès affectataire de la salle des séances et de ses annexes. Il ne peut en être autrement !

Que nous votions finalement pour cette proposition de loi ou pour une autre, qui a été envisagée pendant un moment et qui, in fine, aboutissait au même résultat, je ne doute pas que notre assemblée plénière saura rendre au Parlement, sur un tel détail, ses droits et sa dignité.

En effet, nous ne pouvons imaginer que, dans l'intervalle des sessions, ni l'Assemblée ni le Sénat ne disposent librement de leurs hémicycles ! Il en est de même pour le Congrès, ce qui ne signifie pas que les deux assemblées soient libres de faire n'importe quoi de ces espaces.

J'en viens ainsi à mon second point, en forme de question : faut-il « sanctuariser » la salle des séances du Congrès, comme l'ont proposé mes amis socialistes de l'Assemblée nationale ? Je vois bien tout l'intérêt de cette proposition, qui éviterait d'éventuelles et fâcheuses dérives médiatiques, pour des événements people ou des soirées music-hall, telles que celles que nous avons connues dans l'hémicycle même du Sénat, au détriment du bon déroulement de nos séances. Cependant, je le dis en toute amitié, cette protection me semble exagérée, sinon un peu puérile, car cela revient à dire : « C'est à moi, tu n'as pas le droit d'y toucher ! »

Or, si un organisme international, par exemple le Conseil de l'Europe ou l'Unesco, souhaitait tenir séance dans les locaux du Congrès, je ne vois pas bien au nom de quoi on le lui refuserait. Il en serait de même pour une reconstitution historique d'événements majeurs dont cette salle des séances a été le théâtre. Tout est dans la qualité de la manifestation et le mode de sélection des demandes. Pour ces raisons, je préférerais que la règle soit bien l'affectation exclusive, mais avec une possibilité de dérogation donnée en toute transparence et collectivement.

Nous approuverons ainsi les propositions de ce petit texte, surtout si elles sont amendées, mais nous n'en serons pas plus fiers pour autant. Cette proposition de loi ne fera pas avancer le droit positif ; mais il y en a bien d'autres, c'est vrai. Surtout, elle ne grandit pas le Parlement. En effet, il est peu convenable de travailler ainsi, même si l'objet est acceptable, par pulsion démagogique, sous une hypothétique pression médiatique et sur fond de conflit de prééminence entre les deux assemblées par présidents interposés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !

(M. Guy Fischer remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen du texte qui nous est proposé aujourd'hui est très symbolique. En effet, d'une certaine manière, Versailles est le berceau du parlementarisme français, comme l'a brillamment rappelé notre collègue René Garrec, plus expert que moi sur l'histoire du Parlement. Je ne reviendrai donc pas sur les origines de l'affectation au Parlement des locaux de Versailles, et je mettrai plutôt à profit cette discussion pour formuler plusieurs observations que m'inspire cette proposition de loi.

Je dois tout d'abord confesser que c'est à l'occasion de l'examen de ce texte par l'Assemblée nationale que j'ai découvert -  d'autres sénateurs n'ayant pas encore une grande ancienneté dans la maison l'ont sans doute appris avec moi - que le Parlement disposait, de manière permanente, de 25 000 mètres carrés de locaux à Versailles. J'en ai été d'autant plus surpris quand j'ai appris que, parmi ces locaux, se trouvaient des appartements mis à la disposition de divers dignitaires des deux assemblées.

L'Etat républicain ayant vocation à être exemplaire sur l'utilisation de ses moyens, ramener la surface des locaux affectés au Congrès à ce qui est strictement nécessaire me paraît donc être la moindre des choses.

Je dois également vous faire part de l'étonnement qui a été le mien lorsque j'ai constaté que ce texte était examiné dans le cadre de notre ordre du jour réservé. Le Sénat a en effet engagé il y a près d'un an et demi - M. le président et M. Garrec l'ont rappelé - des négociations avec l'établissement public afin de faciliter la mise en oeuvre du schéma directeur d'aménagement du « Grand Versailles ». Alors, pourquoi cette précipitation à légiférer pour redistribuer ces locaux, alors que cette question allait être réglée dans un cadre plus large ?

Par ailleurs, lorsque l'on voit la fréquence croissante avec laquelle le Parlement se réunit en Congrès à Versailles - je vous rappelle que la Constitution a été révisée à onze reprises dans les dix dernières années -, il pourrait être permis de se demander s'il est bien opportun de rendre au public les pièces dont a besoin le Parlement lorsqu'il siège en Congrès. Nous ne pouvons donc qu'être favorables à l'amendement de la commission, qui semble avoir pris la mesure du phénomène de « fièvre constituante » que nous connaissons actuellement, tendant à exclure du transfert la salle des séances.

Quoi qu'il en soit de ces interrogations qui sont, me semble-t-il, légitimes et partagées par certains de mes collègues dans cette assemblée, je constate que le contenu de la proposition de loi de M. le président de l'Assemblée nationale vise des objectifs forts louables puisqu'il s'agit, d'une part, de favoriser l'accès du public au château de Versailles et de soutenir sa vocation culturelle -  encore faudra-t-il que l'établissement public dispose de moyens suffisants -, et, d'autre part, de répondre aux impératifs de modernisation de la gestion publique et de transparence des finances publiques en ne laissant à la disposition du Parlement que ce dont il a véritablement besoin.

Ce sont autant de raisons pour que le groupe de l'Union centriste-UDF vote ce texte après l'adoption des modifications prévues en commission et de l'amendement garantissant que les locaux que le Parlement s'apprête solennellement à transférer à l'établissement public de Versailles seront bel et bien destinés à l'accueil du public le plus large. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Dupont.

Mme Bernadette Dupont. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on a entendu parler de « démagogie » et de « précipitation » à propos du texte qui nous est soumis aujourd'hui. Néanmoins, en tant qu'élue de Versailles, je me réjouis particulièrement de l'examen de cette proposition de loi, qui tend à mettre à la disposition du public les locaux du château de Versailles qui appartenaient encore, pour des raisons historiques, au Parlement.

Le maire de Versailles est membre de droit du conseil d'administration de l'établissement du « Grand Versailles » et connaît toutes les exigences de sa mission et les transformations nécessaires au maintien de celle-ci.

Le vote solennel que nous nous apprêtons à émettre démontre une nouvelle fois, en dépit des remarques teintées de poujadisme de quelques esprits chagrins, la vitalité du Parlement et de nos institutions.

En effet, une fois encore, sans y être contraint en aucune manière, le Parlement prend en main son autoréforme. Nous nous souvenons qu'il y a maintenant deux ans le Sénat avait pris l'initiative de sa modernisation en réduisant la durée du mandat sénatorial de neuf ans à six ans et en abaissant l'âge d'éligibilité de trente-cinq à trente ans. Il s'agissait d'une réforme sans précédent dans la mesure où aucune institution n'avait engagé aussi profondément sa modernisation de son propre fait.

Cette fois-ci, il s'agit de transférer à l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles les 25 000 mètres carrés - et non pas hectares ! - de locaux dévolus au Parlement sis dans les ailes du château.

Cette proposition de loi n'est pas simplement généreuse. Il ne s'agit pas seulement d'un effet de communication tendant à faire la démonstration d'un Etat modeste. Cette proposition de loi s'intègre dans un projet cohérent et ambitieux de l'établissement public de Versailles pour accroître encore le rayonnement culturel du domaine de Versailles et ouvrir plus largement son espace au public : un public local, un public national, mais également un public venant du monde entier.

Le « plan patrimoine », annoncé en conseil des ministres, en septembre 2003, prévoit ainsi un financement de 135 millions d'euros jusqu'en 2009 pour développer le « Grand Versailles » qui doit s'achever en 2017.

Dans ce cadre, et compte tenu de cet objectif d'accueil de plus de 10 millions de visiteurs par an pour l'ensemble du domaine, dont 3 millions pour le seul château, il semble justifié de réaffecter les locaux du Parlement à cet établissement public afin qu'il puisse monter en puissance dans sa mission, celle de raconter l'histoire de France aux groupes scolaires comme à tous les autres visiteurs.

Certes, depuis le serment des députés du tiers état dans la salle du Jeu de Paume, Versailles est intimement lié au Parlement. C'est là qu'est née l'Assemblée nationale, le 20 juin 1789 ; c'est aussi là, de manière erratique, que le Parlement s'est retrouvé, au gré des événements de l'histoire, de mars 1871 à août 1879, loin de l'agitation parisienne. Depuis, sans vouloir pour autant abaisser la haute valeur symbolique de Versailles au sein de nos institutions, on doit constater que son rôle s'est amoindri.

Versailles n'a été que le lieu, certes non négligeable mais néanmoins sporadique, de l'élection des Présidents de la République sous la IIIe République, puis des révisions de la Constitution sous la Ve République, lorsque le peuple n'était pas appelé à procéder lui-même à cette révision par la voie référendaire.

Ne nous le cachons pas, en dépit du rôle qu'il joue depuis plus de deux cents ans dans nos institutions républicaines, Versailles demeure, pour l'immense majorité de nos concitoyens, attaché au passé monarchique absolutiste de la France.

Permettez-moi une anecdote. J'ai eu l'occasion de recevoir, au château de Versailles, des touristes japonais qui venaient chercher l'ombre de Marie-Antoinette, passionnés qu'ils étaient, comme nombre de leurs compatriotes, par ses relations avec Axel de Fersen. Cet épisode a d'ailleurs fait l'objet d'un dessin animé d'un glamour que je préfère ne pas commenter. Mais il est intéressant de savoir que, à l'étranger, le passé monarchique de la France présente encore quelque intérêt.

Dès lors, et fort de toutes ces constatations, demeurait-il encore raisonnable de maintenir tant de locaux dans le patrimoine du Parlement alors qu'ils peuvent trouver leur place dans un projet culturel d'envergure ?

De nombreuses salles présente un intérêt indéniable pour l'historien et le public. M. le rapporteur a notamment cité la possibilité de restaurer les anciennes loges de l'Opéra, autrefois situé dans le bâtiment dit « des acteurs » et aujourd'hui affecté au Sénat, afin de redonner à cette salle son objet initial de plus grand opéra de cour jamais construit.

Nous pourrions également citer le bureau du comte de Vergennes, ministre des affaires étrangères de Louis XVI, sis dans l'aile des ministres, dans le domaine du Sénat. C'est dans ce bureau tout de même qu'a été signé en 1783 le traité d'indépendance des Etats-Unis d'Amérique. Il n'est évidemment pas sans intérêt culturel et historique de l'ouvrir également à un large public.

Partageant les vues de cette proposition de loi, notre groupe soutient par ailleurs les précisions utiles apportées par M. le rapporteur, qui connaît avec une particulière acuité la situation.

D'abord, il s'agit de maintenir la seule salle du Congrès dans le patrimoine du Parlement. Monsieur le ministre, vous nous avez dit que, depuis 1958, seize révisions constitutionnelles avaient été adoptées au cours de quatorze réunions du Parlement. La salle du Congrès est un lieu de mémoire de l'histoire parlementaire de notre pays. Son entretien, son fonctionnement et son utilisation doivent relever exclusivement de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui s'y réunissent en Congrès.

Même si le Parlement se trouve « partout, là où ses membres sont réunis » pour paraphraser Mounier, il nous semble sain que cette salle reste dans la patrimoine du Parlement.

De surcroît, les salles adjacentes de l'aile du Midi, même transférées à l'établissement public du château de Versailles, doivent pouvoir être utilisées par le Parlement lors de la réunion du Congrès. De nombreuses salles sont en effet utilisées par les deux présidents, par les groupes ou par la division des scrutins. Il convient donc de préciser que les conventions devront prévoir que ces salles doivent, en vue de la préparation des Congrès, être mises à la disposition libre et gratuite du Parlement.

Dans le même esprit, nous souscrivons également à la proposition de notre collègue M. Gélard selon laquelle ces conventions devront également prévoir que les locaux attenants à la salle du Congrès, outre leur mise à disposition du Parlement en vue de l'organisation d'un Congrès, ne peuvent subir de modifications par l'établissement public qui seraient de nature à gêner le déroulement des réunions. En effet, une disposition de l'annexe de l'ordonnance de 1958, abrogée par l'article 2 de la présente proposition de loi, prévoyait cette garantie qu'il convient de maintenir.

Enfin, et surtout, oserais-je dire, nous sommes favorables à l'amendement présenté par trois présidents des groupes de la majorité sénatoriale, MM.  de Rohan, Mercier et Pelletier, dont l'objet est de garantir que des logements de fonction n'en remplaceront pas d'autres.

En effet, nombre de nos concitoyens s'insurgent contre certains avantages, il est vrai non négligeables, dont disposent certains élus. Or l'arbre ne doit pas masquer la forêt : on ne peut établir un Etat modeste en transférant les avantages que l'on aura ôtés à la première rangée aux suivantes, moins exposées médiatiquement.

Le projet culturel, auquel nous souscrivons pleinement, implique la mise à disposition du public des salles transférées, y compris la salle du Congrès ; cela apparaît dans l'intitulé même de la proposition de loi. Pour des raisons éthiques, il convient donc de préciser que les locaux transférés devront concourir exclusivement aux missions culturelles de l'établissement public de Versailles.

Sous ces quelques réserves, le groupe UMP votera ce texte qui, n'en doutons pas, donnera au projet du « Grand Versailles » une nouvelle envergure et au château du Roi-Soleil un nouveau rayonnement.

Inscrit dans l'histoire de France, Versailles doit s'inscrire dans l'avenir de la France. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dirai quelques mots en complément de ce qui a été indiqué par M. le questeur-rapporteur, René Garrec, et surtout par mon collègue et ami M. Peyronnet, de manière intelligente, avec humour et finesse.

Première observation, contrairement à ce qu'il croit peut-être, le président Debré n'a rien inventé. L'occupation partielle du château de Versailles par les assemblées a été réduite au fil du temps depuis de nombreuses années - M. Garrec l'a bien démontré dans son rapport - au fur et à mesure de l'évacuation des locaux par les assemblées, et notamment par le Sénat, à coup de négociations ponctuelles, sur tel ou tel point.

Cette occupation ne revêt donc aujourd'hui aucun caractère odieux ni scandaleux et il faut grandement solliciter l'ignorance, voire la niaiserie dans les médias, pour faire croire au peuple que nous « tenons » tout Versailles ou presque ! Le Sénat, sur ce plan, n'a de leçon à recevoir de personne !

L'ambition de la proposition votée par l'Assemblée nationale était de rendre Versailles au public. Très belle ambition, qui pourrait effectivement, monsieur Peyronnet, ressembler à une proclamation révolutionnaire.

Or je voudrais rappeler que, sauf erreur de ma part - et je parle sous le contrôle de la gracieuse Mme Albanel, présidente de l'établissement public, qui suit ce débat auprès du ministre - un tiers à peine du château est actuellement ouvert au public et que les superficies rendues ne feront pas beaucoup augmenter ce chiffre. Ne rêvons pas, ne faisons pas rêver : si l'on passe du tiers actuel au tiers de Pagnol, cela dépend de la grandeur du tiers, mais ce n'est pas un très grand tiers ! (Sourires.) Il faut donc cesser de raconter n'importe quoi aux gens.

Deuxième observation, les assemblées n'ont pas à rougir de l'occupation du château, car ce sont les parties qui leur sont réservées qui ont été entretenues avec le plus de soin au fil des ans - je ne parle pas des rénovations, des grandes opérations, etc. - et je souhaite à Mme Albanel de disposer, partout dans le château, des mêmes conditions de sécurité que celles qui ont été établies, notamment dans les locaux du Sénat, tant par les questeurs d'aujourd'hui que par les précédents.

Je me souviens, en particulier, d'une convention qui imposait au Sénat, à une certaine époque, en contrepartie d'autres choses, de procéder à la mise en sécurité, ce qui a été fait.

Troisième observation : je souhaiterais, après M. Peyronnet, insister sur le caractère quelque peu démagogique de cette proposition de loi qui pourrait, si le Sénat ne prenait pas les précautions exposées par M. le rapporteur et qui seront peut-être encore améliorées en cours de discussion, exposer les contribuables à des dépenses supplémentaires importantes.

Je m'étonne d'ailleurs, alors que le règlement de l'Assemblée nationale est extrêmement sévère sur ce point, que cette proposition de loi ne soit pas tombée sous le coup de l'article 40 de la Constitution. C'est tout de même assez curieux, ...

M. Michel Charasse. ... puisque, d'habitude, ce genre de proposition de loi fait précisément l'objet de cet article 40 invoqué d'office impitoyablement par le bureau de la commission des finances de l' Assemblée nationale. Or, cette fois, comme par hasard, celle-ci n'en a rien fait ; sans doute nos collègues de la commission des finances de l'Assemblée nationale devaient-ils être à Versailles, et, vraisemblablement, n'ont-ils rien vu !

Quoi qu'il en soit, la période transitoire est nécessaire, non pas, mes chers collègues, pour se cramponner déraisonnablement à nos locaux, mais pour épargner les contribuables et éviter l'explosion brutale des budgets des assemblées si nous devions récupérer brutalement l'ensemble de nos dépôts de Versailles - je veux parler ici non pas des appartements, mais des archives et des dépôts de matériels -, et si nous devions louer ou construire des locaux pour les accueillir.

Nous soulèverions en effet, de par l'explosion des budgets des assemblées, un véritable anti-parlementarisme, qui serait sans doute justifié, car le président Jean-Louis Debré, dans sa générosité spontanée, type nuit du 4 août, n'a sans doute pas réfléchi à cet aspect des choses, même s'il a, lui aussi, une certaine responsabilité concernant la protection de l'image de l'assemblée dont il a la charge.

En ce qui concerne les locaux actuellement à usage d'appartements, plusieurs amendements ont été déposés. Il ne faudrait pas, selon moi, se séparer de ces locaux pour les transformer à nouveau demain en appartements, mais cette fois d'une façon permanente, alors que, aujourd'hui, ils ne sont utilisés que très rarement.

Or je me suis laissé dire que quelque 800  à 1 000 personnes habitent en permanence au château : il est donc déjà bien plein ! Et ce sont autant de surfaces qui ne sont pas ouvertes au public.

Par conséquent, j'espère que le Sénat votera la disposition prévoyant que ces appartements ne pourront plus être utilisés comme tels. Pour ce qui est du château de Versailles, il trouvera facilement, me semble-t-il, à loger ses gens, d'autant, monsieur le ministre de la culture, que vous êtes à la tête d'un ministère qui détient le record des magnifiques logements de fonction destinés aux hauts fonctionnaires (M. le ministre manifeste un certain agacement) - ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Cour des comptes, par conséquent, ne voyez dans mes propos aucune attaque personnelle, il s'agit là d'une situation que vous n'avez pas créée - logements de fonction qui, généralement, sont situés dans des beaux quartiers. Mais il est vrai qu'ils sont destinés à des intellectuels qui savent lire et écrire, et que l'on ne peut donc pas loger n'importe où !

Enfin, je dois dire, mes chers collègues, que j'ai été particulièrement choqué par une déclaration récente d'un haut dignitaire du Parlement, au cours d'une émission télévisée, qui a traité les locaux de Versailles avec une désinvolture et une espèce de mépris absolument insupportables !

Or c'est, entre autres, et indépendamment même des événements historiques remontant à 1789 rappelés par notre rapporteur, dans la salle des séances de Versailles qu'a été voté en 1875 l'amendement Wallon qui a créé la République. En outre, c'est le seul lieu parlementaire où nous rendons, au sein du musée du Parlement, un hommage solennel aux quatre-vingts qui ont eu le courage, à Vichy, de s'opposer à Pétain et à Laval.

Par conséquent, ces locaux ne méritent ni cette désinvolture ni ce mépris et, pour ma part, je ne saurais accepter de tels propos ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à mettre à disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles
Art. 1er

Article additionnel avant l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

I. Le B du I de l'annexe de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est supprimé.

II. Le A du II du même texte est supprimé.

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt M. le rapporteur, également questeur du Sénat, qui a dressé un tableau de Versailles digne de Sacha Guitry ! Si Versailles m'était conté a ainsi fait l'objet d'une interprétation inédite, émanant, cette fois, de l'un de nos collègues !

En vérité, nous avons été unanimes en commission des lois pour dire que, s'agissant du château de Versailles, nous, c'est-à-dire le Parlement, « sommes ici par la volonté du peuple et nous n'en sortirons que par la force des baïonnettes ! (Sourires.)

C'est la raison pour laquelle nous avons demandé qu'il soit bien précisé que l'hémicycle est et doit rester affecté au Parlement ; nous sommes tous d'accord sur ce point.

Or une autre méthode pouvait être envisagée. En effet, il existe une ordonnance du 17 novembre 1958, remaniée en 1995, dont l'annexe date, elle, de 2003, et qui émane, en particulier - M. le ministre parlait tout à l'heure de la séparation des pouvoirs - de M. Cuq, qui était à l'époque questeur à l'Assemblée nationale et qui, aujourd'hui, est ministre chargé des relations avec le Parlement. Or cette ordonnance était parfaite. Elle prévoyait, en effet, en son article 2 : « Le Palais-Bourbon et l'hôtel de Lassay sont affectés à l'Assemblée nationale.

« Le Palais du Luxembourg, l'hôtel du Petit Luxembourg, leurs jardins et leurs dépendances historiques sont affectés au Sénat.

« Les locaux dits du Congrès et les autres locaux utilisés par les assemblées, sis au château de Versailles, tels qu'ils sont définis par l'annexe à la présente ordonnance, sont affectés à l'Assemblée nationale ou au Sénat. »

Mais nous ne demandons pas autre chose !

Quant à l'annexe, elle dresse un état descriptif des locaux affectés à Versailles à l'Assemblée nationale- c'est la première partie - ou au Sénat- c'est la deuxième partie. Ainsi l'aile des ministres Sud comprend les appartements de fonction des membres de l'Assemblée nationale, et l'aile des ministres Nord regroupe les locaux affectés à des membres du Sénat.

Dès lors, la situation est fort simple : il suffit de modifier l'annexe en en supprimant le B du I et le A du II pour que les appartements soient rendus à l'usage du public.

Par conséquent, il n'était sans doute pas utile de déposer une proposition de loi ; il suffisait de s'en remettre à cette annexe qui précise, in fine, que « en vue de faciliter la gestion du château de Versailles, des conventions peuvent être passées entre l'établissement public du musée et du domaine de Versailles et l'Assemblée nationale ou le Sénat en vue de procéder aux adaptations nécessaires ».

Une telle mesure nous paraît suffisante pour que personne ne puisse s'aviser de nous accuser de ne pas vouloir rendre les logements à l'usage du public.

Tel est l'objet de l'amendement n° 6.

Je dois à la vérité de dire que, dans le texte adopté par la commission - je veux ici rendre les armes, car notre collègue Christian Cointat a su me convaincre - l'article 1er concerne l'affectation de la salle des séances, l'article 2 vise à supprimer l'annexe de l'ordonnance et l'article 3 prévoit que « Des conventions conclues entre les personnes publiques intéressées précisent les modalités du changement d'affectation des locaux occupés par l'Assemblée nationale et le Sénat à Versailles... ». En d'autres termes, si j'ai bien compris, nous pouvons y demeurer tant qu'aucune convention n'est passée, ce qui, soit dit en passant, revient à peu près au même résultat que celui auquel j'arrivais par ma méthode.

Cette disposition permet au surplus d'adopter des amendements tendant à préciser que les locaux à usage de logements doivent cesser d'être des logements afin d'être rendus au public.

C'est la raison pour laquelle je considère que le texte finalement adopté par la commission aboutit au même résultat que celui auquel tendait l'amendement n° 6 et je retire donc ce dernier.

M. René Garrec, rapporteur. Bravo !

M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.

Art. additionnel avant l'art. 1er
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Art. 2

Article 1er

L'avant-dernier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est ainsi rédigé :

« Les locaux nécessaires à la tenue du Congrès du Parlement, sis au château de Versailles, sont, en tant que de besoin et gratuitement, mis à la disposition de l'Assemblée nationale et du Sénat. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

L'avant-dernier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« La salle des séances du Congrès et ses accès sont affectés à l'Assemblée nationale et au Sénat.

« Les autres locaux nécessaires à la tenue du Congrès du Parlement, sis au château de Versailles, sont, en tant que de besoin et gratuitement, mis à la disposition de l'Assemblée nationale et du Sénat. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Garrec, rapporteur. La commission estime que la salle des séances du Congrès ne saurait relever d'un régime de mise à disposition. En effet, sa vocation historique actuelle est d'être utilisée par les deux assemblées afin que celles-ci puissent adopter en Congrès les projets de révision constitutionnelle qui ne sont pas soumis à référendum.

Cela me paraît tout à fait clair et il est inutile de s'appesantir sur ce point.

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Peyronnet, Mme M. André, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery, MM. Collombat,  Courrière,  Dreyfus-Schmidt,  Frimat,  C. Gautier,  Mahéas,  Sueur,  Sutour,  Yung,  Charasse,  Miquel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le texte proposé par cet article pour l'avant-dernier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ajouter alinéa ainsi rédigé :

« La salle des séances et le musée du Parlement sont affectés à l'Assemblée nationale et au Sénat.

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. L'amendement n° 1 de la commission nous satisfait en partie, puisqu'il y est question, en effet, d'une affectation à l'Assemblée nationale et au Sénat de la salle des séances.

Reste la question du musée du Parlement.

On nous rétorque que ce musée, tout du moins ce qu'il contient, à défaut de ses locaux, appartient à l'Assemblée nationale, et non pas au Congrès, donc encore moins au Sénat, et que, de ce fait, nous n'avons pas le droit de légiférer sur ce sujet.

Mais qu'est-ce qui nous en empêche ? En effet, compte tenu de la navette parlementaire, rien ne nous interdit de donner notre opinion ; nous verrons bien comment la situation évoluera entre les deux assemblées.

Il ne s'agit tout de même pas d'un coup d'Etat ! C'est pourquoi je maintiens cet amendement, qui complète de façon judicieuse, selon moi, la proposition de la commission en étendant l'affectation au musée du Parlement, dont l'intérêt a été souligné tout à l'heure par mon collègue Michel Charasse.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. René Garrec, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

Je pense, monsieur Peyronnet, que ce n'est pas parce que l'Assemblée nationale a été discourtoise à notre égard que nous devons lui rendre la pareille ! Ce musée lui appartient et elle a d'ailleurs fait savoir qu'elle le transférerait à Paris. Dont acte !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. En ce qui concerne l'amendement n° 1, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.

La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale avait prévu un dispositif qui offrait évidemment toutes garanties à l'Assemblée nationale et au Sénat, réunis en Congrès, de disposer, dans des conditions de disponibilité totale, des locaux leur permettant, le cas échéant, de procéder à une révision de la Constitution.

La commission des lois du Sénat semble préférer un autre système ; soit !

S'agissant de l'amendement n° 7, l'Assemblée nationale ayant décidé son transfert à Paris, il n'y a plus lieu de s'inquiéter du musée. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.

S'agissant d'un sujet aussi sensible, je voudrais ajouter, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'il ne me paraît pas sain que cet hémicycle se fasse l'écho de fausses informations ou franchisse une étape supplémentaire sur la voie d'un poujadisme toujours regrettable !

Les logements de fonction, qui sont effectivement souvent évoqués dans des rapports divers et variés, sont, la plupart du temps, destinés aux gardiens, aux conservateurs, autrement dit à celles et ceux qui ont directement la charge de la protection de notre patrimoine.

Par conséquent, l'idée selon laquelle des centaines, voire des milliers de mètres carrés seraient affectés à des personnalités privilégiées est infondée et n'est qu'un fantasme. Je rappelle, notamment, que la présidente de l'établissement public de Versailles ne possède pas de logement de fonction et que le ministre de la culture et de la communication n'y dispose même pas d'une douche de fonction ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur l'amendement n° 1.

M. Michel Charasse. Monsieur le président, je voudrais dire d'abord à M. Donnedieu de Vabres que ce n'était pas lui qui était visé : j'ai dit cela comme cela, pour rappeler des faits connus !

Je me rappelle une époque où, étant moi-même ministre, j'avais dû taxer un conservateur du Louvre qui sous-louait son appartement de fonction : l'intéressé n'était pas ministre et doit être maintenant à la retraite depuis longtemps ; je l'ai fait payer.

Pour en revenir au sujet, je trouve notre rapporteur un peu expéditif en ce qui concerne le musée.

Il est exact que c'est l'Assemblée nationale, présidée alors par M. Seguin, qui a décidé de créer un musée du Parlement près de la salle des séances, avec expositions et représentation pour les visiteurs.

Il se trouve que ce musée du Parlement, s'il offre une large place à l'Assemblée nationale, comprend néanmoins une partie qui concerne le Sénat. Nous ne pouvons quand même pas accepter que cette partie du musée du Parlement qui concerne le Sénat soit désormais « réglée » par l'Assemblée nationale, parce que l'on sait très bien avec quelle désinvolture les décisions risquent d'êtres prises. (Mme Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.)

La place réservée au Sénat dans ce musée du Parlement n'étant déjà pas très grande, si on laisse le président de l'Assemblée nationale et son bureau s'occuper du déménagement, on est tranquille : il installera un musée de l'Assemblée nationale à l'Assemblée nationale, et nos questeurs devront dégager des sommes importantes de notre budget pour créer ici un musée du Sénat, mais je ne vois pas où !

Par conséquent, monsieur le président, je dépose un sous-amendement à l'amendement n° 1 de M. Garrec tendant à remplacer les mots : « du Congrès et ses » par les mots « du Congrès, les locaux du musée du Parlement et leurs ».

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous amendement n° 11, présenté par M. Charasse, et ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 1 pour remplacer l'avant-dernier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires par deux alinéas, remplacer les mots :

du Congrès et ses

par les mots :

du Congrès, les locaux du musée du Parlement et leurs

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Garrec, rapporteur. Avis défavorable, monsieur le président, sur ce sous-amendement comme sur l'amendement n° 7.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Même avis que celui de la commission, monsieur le président.

M. Michel Charasse. Donc, il n'y aura plus de musée pour le Sénat !

M. René Garrec, rapporteur. Mais si, dans le musée du Parlement !

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 11.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le sous-amendement de notre ami Michel Charasse reprend très exactement l'amendement n°7 de M. Peyronnet : pourquoi pas !

Cela étant dit, je ne vois pas en quoi nous serions désagréables à l'égard de l'Assemblée nationale en nous occupant du musée : au contraire ! Le texte porte non pas sur les locaux de l'Assemblée nationale mais sur les locaux du Parlement, à Versailles.

M. Michel Charasse. Exactement !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. A l'Assemblée nationale, on s'est occupé de locaux qui concernaient le Sénat ; il est normal, voire nécessaire que le Sénat s'occupe également de locaux de l'Assemblée nationale. C'est d'ailleurs bien ce que fait le texte de la commission, qui prévoit que « la salle des séances du Congrès et ses accès sont affectés à l'Assemblée nationale et au Sénat » : il est à chaque fois question des deux.

Or, vous le savez bien les uns et les autres, ce musée permet à de nombreux visiteurs du Sénat de pouvoir aller également visiter le château de Versailles. Ce musée est celui du Parlement, et non pas seulement celui de l'Assemblée nationale, même si cette dernière est seule à le gérer.

C'est pour cela qu'il est nécessaire de préciser que les locaux du musée doivent eux aussi rester affectés.

M. le ministre nous apprend que l'Assemblée nationale a décidé de ramener le musée à Paris : première nouvelle ! Où et dans quelles conditions ? On n'en sait rien.

Le moins que l'on puisse faire, c'est que l'Assemblée nationale et le Sénat en discutent, ce serait tout de même la moindre des choses, car, comme l'a parfaitement démontré Michel Charasse, le Sénat est concerné par ce musée, qui n'est ni le musée de Versailles ni celui de l'Assemblée nationale, mais qui est le musée du Parlement, et qui est donc, rappelons-le encore une fois, celui de l'Assemblée nationale aussi bien que celui du Sénat.

De surcroît, il se trouve que le seul amendement retenu par la commission émane de M. de Rohan et de deux de ses collègues présidents de groupes.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Il est excellent !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Or cet amendement dit très exactement la même chose que certains amendements que nous avions proposés et déposés depuis longtemps, à savoir que les appartements ne devaient plus être habités.

Je note également que l'amendement de notre collègue Patrice Gélard a lui aussi été retenu.

S'il faut faire partie de la majorité pour voir ses amendements retenus, nous en prendrons acte une nouvelle fois. Cependant, monsieur le rapporteur, alors que nous sommes globalement d'accord les uns avec les autres, je pense que vous pourriez retenir l'amendement de M. Peyronnet ou, plus exactement le sous-amendement qu'il est devenu sous la plume de notre collègue Michel Charasse.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Peyronnet. A la suite des propos de M. le ministre, je découvre moi aussi que le musée du Parlement serait transféré à Paris. Où ? On ne le sait pas.

Je remarque tout de même que, s'il est installé à l'Assemblée nationale, il sera loin de pouvoir recevoir les 300 000 visiteurs qu'il accueille chaque année à Versailles. L'Assemblée nationale est incapable d'absorber un tel flux.

Quant à envisager une installation ailleurs, il est de notoriété publique que, à part quelques très grands comme Orsay ou le Louvre, les musées parisiens sont peu fréquentés. Là encore, on sera très loin des 300 000 visiteurs qui fréquentent le musée du Parlement, à Versailles.

M. Henri de Raincourt. Et l'île Seguin ?

M. Jean-Claude Peyronnet. Bref, ce transfert est une mauvaise idée, et il faut le faire savoir à l'Assemblée nationale.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La numérotation des amendements - dans l'ordre chronologique de leur dépôt - prouve que, contrairement à ce que l'on a pu dire ici, l'amendement de M. de Rohan a bien été déposé avant les autres. Il est aisé de le vérifier.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et la présentation en commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. En ce qui concerne ce musée, le débat est curieux.

Je considère que ledit « musée du Parlement » n'est pas un musée, au sens où un musée doit remplir un certain nombre de critères qui font défaut ici. Il s'agirait plutôt d'une présentation de certains objets et surtout de panneaux explicatifs, essentiellement sur l'Assemblée nationale : ce n'est pas un musée !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. On l'a appelé comme cela !

M. Josselin de Rohan. C'est une exposition !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. D'accord, mais ce n'est pas un musée. C'est, certes, une présentation intéressante, qui résulte d'une initiative prise par l'Assemblée nationale à une certaine époque, mais on ne peut pas parler réellement d'un « musée » du Parlement.

Ce « musée » se trouve dans les locaux du Congrès : il y restera tant que l'Assemblée nationale n'en aura pas décidé autrement, mais, très franchement, on peut faire beaucoup mieux en matière muséographique aujourd'hui.

M. Michel Charasse. Il y a un emplacement qui est là ! Il faut garder les locaux !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 11.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. Michel Charasse. Bref, c'est Debré qui commande !

M. Henri de Raincourt. Non, c'est Garrec !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

M. Jean-Claude Peyronnet. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé et l'amendement n° 7 n'a plus d'objet.

Art. 1er
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Art. 3

Article 2

L'annexe de la même ordonnance est abrogée.

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Peyronnet, Mme M. André, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery, MM. Collombat,  Courrière,  Dreyfus-Schmidt,  Frimat,  C. Gautier,  Mahéas,  Sueur,  Sutour,  Yung,  Charasse,  Miquel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

Toutefois, les appartements affectés au logement des présidents, des questeurs et des secrétaires généraux de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui sont réaffectés à l'établissement public du château de Versailles, ne pourront plus être utilisés à usage d'appartement.

Les locaux utilisés par l'Assemblée nationale et le Sénat pour entreposer leurs archives ou des mobiliers et objets divers restent affectés aux deux assemblées jusqu'à une date qui sera fixée par chacune d'entre elle, par leurs Bureaux. Il en est de même en ce qui concerne les locaux affectés aux assemblées pour le logement des personnels chargés de la surveillance et du gardiennage du domaine affecté au Parlement au château de Versailles.

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, je retire cet amendement, deux dispositions proposées par la commission sur l'affectation des logements et sur les archives réglant la question.

M. le président. L'amendement n° 8 est retiré.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Art. 2
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 3

Des conventions conclues entre les personnes publiques intéressées précisent les modalités du changement d'affectation des locaux occupés par l'Assemblée nationale et le Sénat à Versailles ainsi que les conditions de la mise à disposition de ceux nécessaires à la tenue du Congrès du Parlement. Celles-ci prévoient que la salle du Congrès est réservée à ses séances et aux réunions parlementaires.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, sur l'article.

M. Michel Charasse. Je voudrais interroger notre rapporteur pour comprendre parfaitement la portée du texte de l'article 3. J'aurais pu déposer un amendement, mais cela peut se régler en séance, par une explication de texte.

L'article 3 prévoit que : « Des conventions conclues entre les personnes publiques intéressées précisent les modalités du changement d'affectation... ».

Il doit être bien entendu que, lorsque des conventions sont conclues dans ce domaine précis, elles sont à chaque fois signées par chacune des deux assemblées. On ne peut pas accepter que l'une des deux assemblées règle le problème pour l'autre assemblée.

Les « personnes publiques intéressées » sont, à mon avis, tout à la fois l'Assemblée nationale et le Sénat. Des conventions doivent être signées, soit particulières et propres à chaque assemblée, soit globales pour les deux assemblées ; il est bien entendu que l'Assemblée nationale ne pourra signer seule pour tout le monde dans ce dernier cas.

Monsieur le rapporteur, je souhaiterais que vous me répondiez sur ce point de façon que je sois rassuré et que l'on évite des conflits ultérieurs à ce sujet.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. René Garrec, rapporteur. Mon cher collègue, vous avez partiellement raison et je n'ai pas tout à fait tort ! (Sourires.)

Lorsqu'une convention concerne les locaux dits « du Congrès », elle concerne le Parlement, c'est à dire l'Assemblée nationale et le Sénat.

Lorsqu'il s'agit des locaux qui sont à notre disposition pour nos archives, cela concerne l'établissement public et nous.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je voudrais rassurer la Haute Assemblée, si besoin est, et dire que l'Etat respecte chacune des deux assemblées et que nous respecterons évidemment le bicamérisme pour la fixation du calendrier et la prise de dispositions précises, par voie de convention, concernant les locaux utilisés par l'Assemblée nationale ou par le Sénat.

M. Michel Charasse. C'est ce que je voulais entendre. Merci, monsieur le ministre : c'est clair, nous pourrons avoir un calendrier différent de celui de l'Assemblée nationale !

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 2, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer la seconde phrase de cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence.

L'amendement que la commission a adopté lors de l'examen de l'article 1er conserve l'affectation de la salle des séances du Congrès aux deux assemblées. Dés lors, il n'est plus nécessaire de limiter l'utilisation de cette salle au sein d'une convention qui ne la concerne plus.

J'ajouterai une précision pour que mon ami Charasse ne m'interroge pas à nouveau : l'utilisation de la salle du Congrès relèvera du bureau des deux assemblées.

M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Peyronnet, Mme M. André, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery, MM. Collombat,  Courrière,  Dreyfus-Schmidt,  Frimat,  C. Gautier,  Mahéas,  Sueur,  Sutour,  Yung,  Miquel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit la seconde phrase de cet article :

La salle des Congrès est exclusivement réservée à ses séances et aux réunions parlementaires ; toutefois, des dérogations peuvent être accordées par décision conjointe des Bureaux des assemblées.

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Il s'agit d'atténuer la « sanctuarisation » au sens où l'Assemblée nationale l'a entendue.

Je l'ai expliqué lors de la discussion générale : il n'y a pas lieu - il est même dangereux - de sanctuariser totalement un tel lieu, une telle salle.

Pour des manifestations culturelles et historiques de qualité - encore une fois, après une décision collective - il doit pouvoir y avoir des dérogations, même si la règle reste l'affectation exclusive de ce lieu aux besoins du Congrès.

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit la seconde phrase de cet article :

La salle des Congrès est exclusivement réservée à ses séances et aux réunions parlementaires.

La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. Cet amendement a pour objet de préciser que la salle du Congrès - je ne sais pas pourquoi j'ai écrit « des » - est exclusivement réservée à ses séances et aux réunions parlementaires.

A la différence de l'amendement n° 10, il n'est pas prévu d'accorder de dérogations, par exemple pour des fêtes folkloriques ou des émissions de télévision. (Sourires.)

M. Jean-Patrick Courtois. C'est une hypothèse d'école ! (Sourires.)

M. Michel Charasse. Oui, ce n'est jamais arrivé, tout au moins à Versailles...Il est donc inutile d'en parler !

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 10 et 9 ?

M. René Garrec, rapporteur. Je demande le retrait des amendements nos 10 et 9 ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

Je m'en suis expliqué tout à l'heure, le problème est réglé par la rédaction de l'amendement n° 2 de la commission : ce sont les bureaux des deux assemblées qui décideront de l'utilisation de la salle du Congrès.

Par conséquent, si l'on veut organiser une manifestation historique ou culturelle ayant pour thème, par exemple, l'histoire de la IIIe République, il sera tout à fait possible de le faire si le bureau de l'Assemblée nationale en est d'accord. Il n'y a là rien de choquant et je croyais que nous nous étions entendus avec nos collègues MM. Peyronnet et Dreyfus-Schmidt sur ce point.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je m'en remets à la sagesse du Sénat.

Pour éviter toute confusion, il me semble important de préciser que la salle du Congrès n'est pas « sanctuarisée » - comme c'est le cas pour les hémicycles de l'Assemblée nationale et du Sénat -, afin que la visite du public ne se trouve pas tout simplement interdite.

M. Michel Charasse. Cela relève des conventions !

M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, je souhaite rectifier notre amendement n° 10.

M. le président. Nous en sommes aux explications de vote sur l'amendement n° 2 de la commission, mon cher collègue, amendement qui fera tomber le vôtre s'il est adopté.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande donc la mise aux voix par priorité de l'amendement n° 10, monsieur le président, car, si nous sommes d'accord sur la suppression de la seconde phrase de l'article 3 et sur le fait que la salle du Congrès est exclusivement réservée à ses séances et aux réunions parlementaires, nous préférons, nous, préciser que des dérogations peuvent toutefois être accordées par décision conjointe des bureaux des assemblées.

Cela répond au souci de M. le ministre, puisque la visite du public restera possible.

Lorsque cet hémicycle a été utilisé, empêchant le Sénat de statuer le lendemain sur un texte important, ...

M. René Garrec, rapporteur. Pas du tout !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... pour une émission présentée par des animateurs ...

M. Michel Charasse. Patentés ! (Rires.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... patentés, en effet, M. le rapporteur nous a dit que l'autorisation avait été donnée non pas par décision du bureau, mais à la suite d'une décision d'une seule personne.

M. Michel Charasse. Comme pour la salle polyvalente de Remiremont !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est une raison de plus pour préciser que les dérogations pour des reconstitutions historiques, par exemple, doivent être accordées par les bureaux des assemblées.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cette demande de priorité ?

M. René Garrec, rapporteur. Nous nous sommes expliqués en commission tout à l'heure et nous maintenons l'amendement n° 2. Par conséquent, je suis défavorable à cette demande de priorité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Sagesse.

M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de priorité formulée par M. Michel Dreyfus-Schmidt.

(La priorité n'est pas ordonnée.)

M. le président. Je mets donc aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 10 et 9 n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 3, présenté par M. de Rohan, MM. Mercier, Pelletier, les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, apparentés et rattachés, et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :

Compléter, in fine, cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Celles-ci prévoient que les locaux qui ne sont plus affectés à l'Assemblée nationale et au Sénat sont destinés à l'accueil du public ou, lorsqu'ils ne s'y prêtent pas, à l'exercice par l'Etablissement public du musée et du domaine national de Versailles de ses missions, définies à l'article 2 du décret n° 95-463 du 27 avril 1995 portant création de l'Etablissement public du musée et du domaine national de Versailles, à l'exclusion de toute affectation en logements de fonction.

La parole est à M. Josselin de Rohan.

M. Josselin de Rohan. Cet amendement a simplement pour objet de préciser les conditions dans lesquelles s'opère cette libération des locaux.

Dans notre esprit, et je l'espère dans celui du Sénat, il s'agit, d'une part, de rendre à la disposition du public 25 000 mètres carrés du château de Versailles qui, à l'heure actuelle, font l'objet d'une autre affectation et, d'autre part, d'affecter à l'établissement public, selon les dispositions du décret du 27 avril 1995, les locaux qui ne pourront être accessibles à la visite, tels les combles, les sous-sols et autres greniers.

Mais nous demandons très fermement que les logements existants ne soient pas conservés comme logements affectés à des fonctionnaires, à des agents de l'établissement public ou à d'autres personnes. Ces derniers temps, nous avons beaucoup entendu parler des logements de fonction, qui font l'objet de critiques extrêmement vives. Nous estimons que ces locaux doivent être libérés non pour résoudre la crise du logement en général ou celle des fonctionnaires en particulier, mais pour être rendus au public.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. René Garrec, rapporteur. Favorable, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. L'avis du Gouvernement est naturellement favorable. Vous l'avez compris les uns et les autres, l'objectif que nous avons est bien de rendre accessibles au public les locaux restitués et de les utiliser pour un usage culturel et patrimonial du château de Versailles, et non pour des projets de logements.

Pour autant, gardons-nous quand même la possibilité, au-delà du sort de ces locaux-là, de prévoir en règle générale que, s'agissant de monuments historiques, il peut être nécessaire de loger des fonctionnaires pour raison de service, nécessité légitimée par leur disponibilité opérationnelle. Mais, dans l'état du projet, il n'est évidemment nullement question, comme je l'ai indiqué, que ces espaces soient affectés à des logements. L'Etat utilisera ces locaux pour l'accueil des scolaires et des personnes handicapées, mais aussi pour la billetterie ou autre, au titre de l'accès au public.

M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan, pour explication de vote.

M. Josselin de Rohan. Bien entendu, monsieur le ministre, il est tout à fait normal qu'il y ait à Versailles des logements pour nécessité de service ! La Conservation doit pouvoir être logée, c'est même une obligation. Ne serait-ce qu'en raison des sinistres qui, malheureusement, peuvent advenir, les responsables doivent être sur place.

Cela dit, nous estimons que la Conservation est aujourd'hui suffisamment bien logée et qu'elle n'a pas besoin de locaux supplémentaires. De plus, peut-être à la suite de campagnes, dont certaines, je le reconnais volontiers, sont démagogiques, le public accepterait très mal aujourd'hui que l'on aménage de nouveaux logements dans un château comme celui de Versailles.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. Heureusement !

M. Michel Charasse. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je suis tout à fait d'accord avec ce que vient de dire M. Josselin de Rohan, suffisamment de personnes sont déjà logées. Mais ce sont les rez-de-jardin, est-il précisé, qui doivent être ouverts au public. Et que fera-t-on des logements situés au premier étage ? Seront-ils mis à la disposition du Sénat pour lui permettre d'entreposer ses archives ou son mobilier, les locaux qu'il utilise à cette fin lui étant réclamés par ailleurs, dans l'intérêt du public ? (Sourires.) Mais ce n'est qu'un exemple !

Dans un débat sur lequel nous sommes d'accord, les uns et les autres, je regrette que soient retenus les seuls amendements présentés par les membres de la majorité et non les nôtres. Je le regrette d'autant plus que l'amendement n° 3, signé des présidents de groupes MM. de Rohan, Mercier, Pelletier, est du 4 mai 2005. Le 3 mai 2005 - le bulletin des commissions en fait foi -, votre serviteur estimait que « dans la liste des locaux affectés au Sénat à Versailles, pouvaient être supprimés les espaces utilisés à des fins de réception ou comme logements de fonction, sous réserve de préciser que ces locaux ne devraient pas, dans leur nouvelle affectation, devenir des logements de fonction ». Voilà pourquoi je me permets de revendiquer l'antériorité !

M. Jean-Patrick Courtois. Le texte du président de Rohan est mieux rédigé !

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Peyronnet. Au-delà des questions de date, je voudrais simplement indiquer que nous voterons cet amendement, qui est beaucoup plus précis que le nôtre. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai retiré tout à l'heure l'amendement n° 8.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Gélard, est ainsi libellé :

Compléter, in fine, cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Elles prévoient que les locaux de l'aile du Midi affectés à cet établissement public ne peuvent recevoir aucune modification qui serait susceptible de gêner la tenue du Congrès du Parlement.

La parole est à M. Patrice Gélard.

M. Patrice Gélard. Cet amendement vise à prévoir qu'aucune modification des locaux de l'aile du Midi ne doit gêner la tenue du Congrès du Parlement ou rendre impossible l'utilisation de ces locaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. René Garrec, rapporteur. Favorable !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Favorable !

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Il faut qu'il soit bien entendu que l'amendement de M. Gélard n'interdit pas la réalisation de certains travaux, notamment des travaux de sécurité, dès lors que cela n'empêche pas la tenue du Congrès du Parlement.

Soyons clairs : cet amendement interdit non pas la réalisation de tous les travaux, mais seulement de ceux qui sont susceptibles de gêner ou d'empêcher la tenue du Congrès du Parlement.

M. Patrice Gélard. C'est exactement ce qui est écrit dans le texte de l'amendement !

M. Michel Charasse. Certes, mais, vous savez, je me méfie des interprétations que pourraient faire les Monuments historiques ou les services de la direction départementale de l'équipement dans l'hypothèse où des permis de construire seraient nécessaires, par exemple.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Vote sur l'ensemble

Art. 3
Dossier législatif : proposition de loi tendant à mettre à disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Josselin de Rohan, pour explication de vote.

M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon groupe votera bien évidemment cette proposition de loi.

J'aurais préféré, et je ne suis pas le seul, que cette proposition intervînt dans un contexte un peu différent, qu'elle fût l'émanation de la volonté des deux assemblées. Nous restons sur un arrière-goût de carte forcée, ce qui est regrettable.

Mais peu importe, en fait, car nous sommes heureux que la nation retrouve l'usage total des locaux qui avaient été affectés au Parlement dans les conditions que l'on a rappelées.

Au fond, monsieur le ministre, je vous plains un peu. Votre ministère va hériter de locaux dont il devra désormais supporter les charges d'entretien. Il en résultera une dépense supplémentaire pour le budget de l'Etat. Je suis persuadé que vous aurez à coeur, monsieur le ministre, de continuer à entretenir ces locaux avec autant de diligence et de soin que l'a fait la représentation nationale. En restituant à l'Etat les locaux que nous occupions, monsieur le ministre, nous avons le sentiment d'avoir été de bons locataires : je tenais à ce que ce fût dit. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Michel Charasse. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur de Rohan, nous étions certes locataires, mais nous exercions tous les devoirs du propriétaire !

M. Michel Charasse. Absolument !

M. Jean-Claude Peyronnet. Désormais, c'est l'Etat, ou plutôt l'exécutif, par l'intermédiaire du ministère chargé de la culture, qui assumera les charges d'entretien, en effet très lourdes.

Mon groupe votera cette proposition de loi, qui n'a pas une grande portée juridique, mais qui présente de l'intérêt sur le plan de l'affectation des locaux et de l'évolution de l'établissement public.

J'ai déjà eu l'occasion de dire ce que je pensais de la précipitation dans laquelle nous avons travaillé et du caractère démagogique de cette proposition de loi. Je regrette que nous n'ayons pas décidé de mesures dérogatoires relatives à l'utilisation de la salle des séances, notamment s'agissant des visites. Mais la navette nous permettra peut-être de faire évoluer ce texte dans un sens conforme à nos aspirations.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le ministre de la culture et de la communication n'est en aucune manière « Monsieur désengagement de l'Etat ».

S'agissant de notre patrimoine, du capital d'avenir qu'il constitue pour le rayonnement de notre pays, le Gouvernement, fidèle à son habitude, saura faire face à ses obligations.

Je ne doute pas que, dans la période de transition, vous ferez preuve de la solidarité nécessaire pour que tout se passe dans les meilleures conditions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée à l'unanimité.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quinze.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à mettre à disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles
 

8

 
Dossier législatif : proposition de résolution modifiant le Réglement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Discussion générale (suite)

Modification du règlement pour la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances

Adoption des conclusions du rapport d'une commission

(Ordre du jour réservé)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de résolution modifiant le Réglement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Question préalable

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions de la commission des lois sur la proposition de résolution de MM. Jean Arthuis, Claude Belot, Denis Badré, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Joël Bourdin, Philippe Adnot et Philippe Marini modifiant le règlement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (nos 296, 313).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, mes chers collègues, nous sommes aujourd'hui saisis d'une proposition de résolution présentée par divers membres de la commission des finances - son président, M. Arthuis, mais aussi MM. Claude Belot, Denis Badré, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Joël Bourdin, Philippe Adnot et Philippe Marini, rapporteur général du budget - afin de modifier de nouveau le règlement du Sénat en tirant les conséquences de l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2005, de l'ensemble de la loi organique du 1er août 2001, tout en prévoyant des dispositions transitoires pour permettre l'examen selon les procédures actuelles des lois de finances afférentes aux années antérieures à 2006.

Je formulerai deux remarques préalables.

La première, mes chers collègues, est pour souligner que notre règlement n'est pas un monument dressé pour l'avenir, un monument intangible. Il doit être adapté, il doit être modernisé, et il me semble même que le jour est proche où il nous faudra le remettre sur la table dans son ensemble de façon que puissent être examinées, à terme, aussi bien les propositions de la majorité que celles de l'opposition...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah oui ! Absolument !

M. Patrice Gélard, rapporteur. ... et que nous trouvions un consensus qui aboutisse à un règlement plus efficace, plus moderne et permettant un meilleur jeu démocratique de notre assemblée.

M. Charles Revet. Tout le monde semble d'accord !

M. Patrice Gélard, rapporteur. J'ai déjà adressé ce message à M. le président du Sénat, et j'espère, monsieur le président, que vous le lui rappellerez.

M. le président. Je n'y manquerai pas, monsieur le rapporteur !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Ma seconde remarque vise à observer que, si le référendum du 29 mai 2005 est positif, nous serons amenés à renouveler de façon approfondie notre règlement pour tenir compte des nouveaux pouvoirs du Parlement en général et du Sénat en particulier. Ce sera une nouvelle occasion d'y réfléchir.

En ce qui me concerne, puisque c'est la troisième modification du règlement du Sénat sur laquelle j'interviens, j'ai une philosophie que j'espère voir partagée par vous tous, mes chers collègues : on ne réforme pas le règlement du Sénat sans un important travail en amont ni sans consensus entre l'ensemble des formations qui le composent, depuis le groupe CRC jusqu'au groupe UMP en passant par le groupe socialiste, le RDSE et l'UC-UDF. C'est ce consensus qui nous permettra de faire avancer les choses et de dépasser certaines pratiques héritées du xixe siècle qui ne sont peut-être plus tout à fait compatibles avec notre méthode de travail.

Cela étant dit, nous sommes aujourd'hui contraints par le calendrier de modifier le règlement du Sénat pour tenir compte de l'adoption de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF. Cependant, suivant en cela les auteurs du texte que nous discutons, je vous proposerai une réforme a minima. Il ne s'agit pas de bouleverser nos habitudes, de transformer profondément la façon dont nous travaillons : il s'agit de tenir compte des impératifs découlant de la LOLF sans aller au-delà.

En revanche, je m'engage personnellement à rouvrir le chantier de la rédaction du règlement si l'expérience que nous apportera la mise en oeuvre de la réforme montre que cela est nécessaire : si l'année prochaine nous constatons qu'elle n'est pas satisfaisante, nous remettrons l'ouvrage sur le métier et nous ferons en sorte de l'améliorer encore.

La proposition de résolution comprend sept articles, dont on peut estimer que cinq et demi n'apportent aucune modification en profondeur puisqu'ils visent simplement à l'actualisation de certains termes et de certaines références rendus caducs par l'entrée en vigueur de la LOLF. Ainsi, les articles 1er et 2, les paragraphes I et II de l'article 3, enfin, les articles 4, 6 et 7 ne portent que sur le vocabulaire ou sur la forme.

Deux articles innovent dans une certaine mesure, et je m'en expliquerai au moment de la discussion des amendements qui les affectent.

Il s'agit tout d'abord de l'article 3, qui vise en son paragraphe III à supprimer le dernier alinéa de l'article 46 du règlement. En effet, les dispositions de cet article, qui concernent certaines modalités de l'ancienne méthode d'adoption de la loi de finances, sont devenues tout à fait caduques et n'ont plus d'objet.

Les sénateurs de l'opposition membres de la commission des lois ont toutefois considéré qu'il y avait là un problème. Je m'efforcerai, au moment de la discussion de l'article 3, de répondre à leurs remarques et de les convaincre que, malheureusement, nous ne pouvons pas faire davantage dans le contexte actuel : il nous faut attendre d'avoir pu observer le fonctionnement des nouvelles règles pour, éventuellement, les améliorer. Dans l'immédiat, cela me paraît difficile.

Il s'agit ensuite de l'article 5, qui, dans une certaine mesure, n'est que le complément ou la réponse à la suppression du dernier alinéa de l'article 46, puisqu'il vise à institutionnaliser une habitude, une tradition qui existe depuis maintenant de nombreuses années au sein de notre maison et qui consiste à confier à la conférence des présidents la fixation des modalités particulières d'organisation de la discussion des lois de finances de l'année.

Là encore, nos collègues de l'opposition ont déposé des amendements. Certaines de leurs propositions, je dois le dire, m'ont interpellé par leur pertinence, j'y reviendrai tout à l'heure. Cependant, elles me semblent prématurées dans le contexte actuel : je le disais en préalable, nous sommes engagés dans une réforme a minima, et nous ne pouvons pas aller plus loin tant que nous ne disposons pas de l'ensemble des données de l'application de la loi organique. Je suis convaincu que la conférence des présidents - aidée en cela par la commission des finances, qui formulera les propositions sur lesquelles elle se prononcera - respectera profondément les droits démocratiques de la majorité comme de l'opposition.

Tel est, mes chers collègues, le contenu de la proposition de résolution qui vous est présentée aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Monsieur le président, mes chers collègues, nous examinons, dans la confidentialité d'une séance nocturne, une proposition de résolution qui vise à la deuxième adaptation du règlement du Sénat à la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, loi qui, issue d'une démarche parlementaire pluraliste, transforme profondément et positivement le contenu, donc le déroulement de la discussion budgétaire.

A ce jour, et c'est à nos yeux la raison essentielle de la faiblesse de cette proposition de résolution, nous ne savons encore rien du contenu de la procédure nouvelle que retiendra le Sénat. Le président de la commission des finances, lors de son audition devant les différentes commissions de la Haute Assemblée, s'est attaché à exposer les grandes dispositions de la LOLF, avec pédagogie et talent, certes, mais sans entrer dans le détail du déroulement de la discussion budgétaire, déclarant seulement « que le débat budgétaire serait considérablement enrichi et modernisé ».

La seule information dont nous disposons aujourd'hui concerne la validation par le bureau de la commission des finances des principes qui présideront à la répartition des rapports spéciaux. En effet, l'application de la LOLF entraînera une réduction du nombre de ces derniers, conséquence inévitable de la nouvelle architecture budgétaire ; il en va de même, d'ailleurs, des rapports pour avis établis par les différentes commissions.

M. Arthuis a déclaré que sera maintenue une répartition « équilibrée » entre l'ensemble des sensibilités politiques représentées au sein de la commission. Je ne peux, au nom du groupe socialiste, que m'en réjouir et espérer que cet exemple sera suivi, dans les autres commissions, pour les rapports pour avis.

Afin que soit respectée la règle instituant la mission comme unité de vote, il est prévu de poser le principe selon lequel une mission ne doit pas être partagée entre plusieurs rapports spéciaux. Toutefois, ce rapport unique pourrait être, le cas échéant, cosigné par plusieurs commissaires.

Comment un tel dispositif peut-il raisonnablement fonctionner lorsque les rapporteurs spéciaux sont de bords politiques opposés ? Peut-on envisager, au sein d'un même rapport, des analyses et des conclusions divergentes ? Comment seront garantis les droits de l'opposition dans le flou général qui préside à l'organisation de la future discussion de la loi de finances ?

C'est dans ce contexte incertain que nous examinons la proposition de résolution. Son inscription à notre ordre du jour me paraît donc prématurée.

Lorsque la conférence des présidents, le 7 avril dernier, a fixé l'ordre du jour des travaux du Sénat, le président de la commission des finances s'est engagé à soumettre ce texte. Celui-ci, déposé le 13 avril 2005, présente avant tout, à mes yeux, l'avantage de combler l'ordre du jour de la séance mensuelle réservée.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce n'est déjà pas si mal !

M. Bernard Frimat. En effet ! Cependant, nous aurions pu attendre d'en savoir plus et en débattre lors de la séance réservée du mois de juin, puisque, traditionnellement, notre assemblée discute le projet de loi de finances lors de la deuxième quinzaine du mois de novembre.

Nous examinons donc aujourd'hui un texte qui enregistre - vous le souligniez, monsieur le rapporteur - des modifications formelles évidentes. Pour le reste, compte tenu de l'absence des propositions précises d'organisation de la discussion budgétaire que nous étions pourtant en droit d'attendre du règlement d'une assemblée, il propose de s'en remettre à la conférence des présidents.

Reprenons ces deux points si vous le voulez bien, mes chers collègues.

La proposition de résolution comporte d'abord des modifications de forme, simples mesures techniques d'adaptation. Celles-ci n'appellent pas de notre part d'observation particulière.

Il nous semble toutefois que l'article 7 introduit des dispositions transitoires qui n'ont pas vocation à être inscrites dans le règlement du Sénat, car l'article 67 de la loi organique s'applique de plein droit et ne devrait pas requérir, en principe, de mesures spécifiques d'application. Ce dispositif est finalement sans conséquence et nous n'avons même pas déposé d'amendement sur ce point.

Au-delà de ces modifications formelles, il en est d'autres en revanche qui pourraient aboutir, si l'on n'y prend garde, à des restrictions de l'expression des groupes politiques, ce qui constituerait un recul par rapport à la situation actuelle.

L'exposé des motifs de la proposition de résolution, ainsi que le rapport de M. Gélard n'apportent pas de précisions sur les modalités d'organisation du débat sur la loi de finances et se contentent, comme je l'évoquais précédemment, de consacrer la pratique actuelle d'organisation de la discussion budgétaire par la conférence des présidents, sur proposition de la commission des finances.

Il semble indispensable au groupe socialiste d'obtenir, dans le règlement intérieur, la garantie que le droit d'expression de tous les membres de notre Haute Assemblée sera respecté. C'est dans cet esprit que nous avons déposé un amendement à l'article 3.

Les auteurs de la proposition de résolution suppriment purement et simplement le troisième alinéa de l'article 46 du règlement du Sénat, qui prévoit, en dehors de la discussion des amendements, ce que nous appelons le « débat sommaire sur les crédits budgétaires ».

Pour les auteurs de la proposition de résolution, dans la mesure où disparaissent la distinction entre l'unité de vote par titre et par ministère et l'unité de discussion par fascicule ministériel, la mission devenant en même temps l'unité de vote et de discussion budgétaire, « il semble préférable de ne pas figer dans le règlement les règles relatives aux prises de parole sur les crédits afin de laisser toute latitude à la conférence des présidents d'organiser la discussion et le vote des différentes missions, dans le respect de l'équilibre entre les groupes de la majorité et de l'opposition ».

On peut s'étonner que la mise à jour du règlement du Sénat puisse aboutir à supprimer un temps du débat budgétaire qui, même sommaire, offrait la possibilité aux sénateurs de tous les groupes politiques de s'exprimer.

L'argumentation que vous avez présentée selon laquelle l'unité de vote se confond dorénavant avec l'unité de discussion au sein de la mission peut évidemment être avancée pour justifier ce choix. Mais ne s'agit-il pas plutôt d'un argument d'opportunité dans la mesure où les auteurs de la proposition de résolution expriment une préférence pour ne pas « figer dans le règlement les règles relatives aux prises de parole sur les crédits des différentes missions » ?

La loi organique conserve la distinction de l'unité de vote et de l'unité de spécialité, mais elle en transforme profondément le contenu. Le principe de spécialité s'applique non plus au niveau du chapitre, mais à celui du programme ; les crédits sont en effet spécialisés par programmes, définis en quelque sorte comme une nouvelle unité de spécialisation.

Or, à ce jour, je le répète, nous ne savons rien des modalités de la discussion budgétaire, surtout de celles qui concernent la deuxième partie de la loi de finances.

A ce stade du débat, nous sommes dans l'inconnu, alors que nous savons qu'avec l'entrée en vigueur de la LOLF la forme de la séance publique doit nécessairement et sensiblement évoluer.

La discussion au niveau de la mission va-t-elle absorber tout le débat ou, au contraire, sera-t-elle réduite au minimum pour laisser plus de place au débat sur les amendements ?

En dehors de la faculté de déposer des amendements sur les programmes, sera-t-il encore possible de prendre la parole sur ces mêmes programmes ?

Nous estimons indispensable de préserver un temps de parole, même sommaire, sur les crédits ouverts sur un programme ou une dotation. En effet, le programme représente la clé de la réforme de 2001, dès lors que, posant en principe une budgétisation des crédits par objectifs, il conduit les décideurs publics, politiques ou gestionnaires, à cesser de raisonner strictement en termes de moyens.

L'examen de la loi de finances en séance publique représente un temps fort de la vie parlementaire, notamment du Sénat, et l'un des objectifs de la loi organique du 1er août 2001 vise justement à renforcer la démocratie parlementaire.

Toutefois, nous avons conscience que, au regard des 132 programmes qui vont se substituer aux 850 chapitres budgétaires, il convient de ne pas altérer la dynamique potentielle du débat. C'est la raison pour laquelle, en empruntant une démarche identique à celle des auteurs de la proposition de résolution, qui vise à assouplir les modalités de prise de parole sur les crédits, nous proposons de ne pas rendre systématiques les débats sommaires, si tous les présidents des groupes politiques en expriment le souhait.

Le constat établi par le service de la séance, et qui figure dans votre rapport, selon lequel le temps effectivement utilisé par les groupes politiques révèle une sous-consommation du temps de parole, ne peut pas être pris en compte dans le cadre de la discussion de cette proposition, car il se fonde sur une estimation générale du temps de parole indifférente au choix de la place et de la nature des interventions des sénateurs.

Notre proposition est animée par le souci de préserver l'existant en permettant à l'ensemble des sénateurs de pouvoir continuer à s'exprimer pleinement au niveau d'intervention de leur choix.

L'adoption ou le rejet de cet amendement nous permettra de juger de la réalité du désir de démocratie de la majorité sénatoriale.

Un second point retient notre attention.

Faute de pouvoir délibérer en connaissance de cause et de proposer aujourd'hui un modèle d'organisation de la discussion budgétaire, l'article 5 de la proposition de résolution vise à insérer dans le règlement du Sénat un article 47 bis -1 précisant que, pour l'application de la loi organique du 1er août 2001, les règles particulières d'organisation de la discussion de la loi de finances de l'année sont fixées par la conférence des présidents, sur proposition de la commission des finances.

Les auteurs de la proposition de résolution rappellent qu, en l'absence de dispositions spécifiques du règlement, il s'agit de la pratique actuelle pour les modalités de discussion de la loi de finances de l'année, à l'exception de la discussion des articles de la première partie et des articles non rattachés de la deuxième partie, qui répondent aux règles habituelles.

A leurs yeux, cette pratique présente l'avantage de la souplesse dans l'organisation de la discussion et il convient de la préserver et même de la conforter en lui donnant une base réglementaire.

Nous pensons nécessaire de rappeler, par souci de clarification, que cette pratique qu'il est proposé de codifier ne peut s'appliquer que sous réserve des dispositions de l'article 48 de la Constitution relatif à l'ordre du jour prioritaire.

En vertu de cet article, le Gouvernement a la faculté de déterminer et de modifier la liste des projets et propositions qu'il désire voir figurer à l'ordre du jour et de fixer l'ordre dans lequel ils seront examinés. Sur cette liste et sur cet ordre, la conférence des présidents n'a pas à se prononcer. Cette règle traduit le souci de la séparation des pouvoirs qui inspire l'ensemble de notre organisation institutionnelle.

Avant de conclure, je formulerai une dernière remarque.

M. le rapporteur n'a pas souhaité étendre le champ de la proposition de résolution à d'autres modifications que celles qui étaient proposées. Nous comprenons sa démarche. Le renvoi à la conférence des présidents pour arrêter les modalités d'organisation de la discussion de la loi de finances apparaît certes comme une solution pragmatique, mais dans le même temps il pose avec une acuité accrue la question de la juste représentation de l'opposition au sein de cette instance.

La conférence des présidents est une instance de décision. Vous codifiez l'usage. Si votre proposition de résolution est adoptée - ce que l'on ne peut exclure - la conférence des présidents va être appelée à délibérer sur le bloc de propositions émis par la commission des finances.

Les dispositions du règlement du Sénat qui prévoient que l'ordre du jour est proposé par la conférence des présidents en tenant compte de l'équilibre entre tous les groupes ne sont pas autant protectrices des droits de l'opposition qu'elles devraient l'être dans une démocratie parlementaire. En pratique, elles se révèlent insuffisantes. Si l'on se montre réellement soucieux du respect de ce principe, il convient d'en garantir l'application.

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement qui s'inspire de l'article 48-7 du règlement de l'Assemblée nationale afin de prévoir une pondération des voix plus respectueuse des droits de la minorité au sein d'une assemblée parlementaire. Elle n'existe pas au Sénat. Il importe pour nous de combler cette lacune.

Je conclus : la réforme du règlement que l'on nous propose ne constitue pas un changement majeur, je vous le concède. De nombreux progrès restent à accomplir pour faire avancer les pratiques de notre Haute Assemblée sur le difficile chemin de la démocratie interne et de la reconnaissance des droits de l'opposition.

En définitive, cette proposition refuse à l'opposition les garanties qu'elle est en droit d'attendre d'un fonctionnement démocratique. Une nouvelle fois, la majorité sénatoriale se met en situation, si elle le décide, de pouvoir pratiquer un abus de position dominante. Nous ne pouvons cautionner cette vision d'une démocratie octroyée et donc à géométrie variable.

Je veux néanmoins croire, comme M. le rapporteur le laissait entrevoir dans son intervention, que le débat sur le règlement intérieur se poursuivra en empruntant le chemin de la concertation. Mais les précédentes tentatives ont démontré que rien ne changera tant que la majorité sénatoriale refusera de reconnaître l'opposition comme une force instituée et comme une nécessité institutionnelle dans une démocratie parlementaire.

Vous nous demandez, mes chers collègues - et c'est le point essentiel de votre proposition de résolution - de faire confiance à la conférence des présidents. Les rapports entre une majorité et une opposition ne peuvent se fonder sur la confiance. Ils doivent se fonder sur le respect du fait majoritaire par l'opposition et la garantie du respect des droits de l'opposition par la majorité. Nous sommes, dans le fonctionnement du Sénat, très loin du compte.

M. le président. La parole est à M. Alain Lambert.

M. Alain Lambert. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le rôle du Parlement dans la LOLF n'est plus à rappeler, et Dieu sait s'il a dû surmonter quelques divergences de points de vue pour adopter ce texte ! Je me réjouis que le Gouvernement s'applique à faire vivre le consensus politique auquel nous sommes parvenus en 2001, grâce à une coopération quasi unique avec le Parlement pour mettre en oeuvre ce texte.

Le Sénat ne doit pas être un commentateur de la réforme : il en est le gardien, le garant. Aussi, le débat qui s'ouvre aujourd'hui est-il utile : il nous donne l'occasion de nous interroger sur la question de savoir comment nous concevons désormais notre rôle, quels nouveaux liens nous entendons nouer avec l'exécutif, comment utiliser les informations nouvelles et les pouvoirs importants que nous allons avoir et, surtout, comment moderniser le dialogue budgétaire avec le Gouvernement, notamment dans sa phase la plus solennelle que constitue le débat en séance publique.

La commission des finances, sous l'impulsion de son président, à qui je veux rendre un hommage particulier, hommage qui n'est pas de circonstance, mais qui est l'expression de ma gratitude pour son implication personnelle dans la réussite de cette réforme, a commencé à aborder ces questions à l'occasion de séminaires ou lors de discussions avec les autres commissions.

Cette réforme du règlement du Sénat constitue un premier pas nécessaire et je crois que son examen arrive au bon moment. A cette occasion, je souhaiterais évoquer la non moins nécessaire rénovation du débat de la seconde partie du projet de loi de finances.

La proposition de réforme de notre règlement vient, utilement à mes yeux, tirer les conséquences de la loi organique.

Cette réforme aborde ainsi trois types de dispositions sur lesquelles je ne reviendrai pas, le rapporteur les ayant déjà exposées excellemment, qu'il s'agisse des coordinations formelles, de l'actualisation des dispositions sur la recevabilité financière ou d'une nouvelle disposition prévoyant que la conférence des présidents décide des modalités d'organisation de la discussion du projet de loi de finances.

Je souhaite, monsieur le rapporteur, saluer votre démarche qui tient à n'apporter que les modifications les plus nécessaires, à travailler en coordination étroite avec les autres commissions de notre assemblée, avec tous les groupes politiques, et à profiter de cette réforme pour prendre acte de la pratique sur l'organisation des travaux budgétaires. Je tenais à vous adresser des compliments très sincères.

S'agissant de l'organisation des travaux budgétaires, je souhaiterais néanmoins approfondir quelque peu notre pensée.

Comme l'a évoqué dans son rapport écrit Patrice Gélard, il nous faut hâter notre réflexion en la matière. Même s'ils ne relèvent pas de notre règlement, les principes qui ont guidé en 2001 le législateur organique et sur lesquels la commission des finances et la conférence des présidents pourront s'appuyer quand il s'agira de mettre en place le débat sur le budget pour 2006 me semblent devoir être rappelés à l'occasion de cette discussion.

Au-delà de cette réforme du règlement, il nous faut porter notre regard sur l'organisation du débat relatif au budget pour 2006, qui sera le premier à être élaboré, présenté, discuté, voté et exécuté selon la loi organique.

Le premier débat budgétaire appliquant la LOLF donnera le « la ».

Souvenons-nous en effet que c'est lors de la discussion du budget de 1960, la première appliquant l'ordonnance de 1959, que s'est forgée la pratique du vote par ministères et par titres plutôt que par titres et par ministères, d'où l'importance de la pratique...

Le Parlement exerce en la matière une responsabilité particulière.

S'agissant de la modernisation du débat de seconde partie dont nous parlons depuis si longtemps, des progrès ont été accomplis, mais il faut véritablement profiter de la loi organique pour faire un pas décisif. Cette modernisation doit prendre acte de l'éclatement des budgets ministériels au profit de budgets affectés à des politiques publiques.

Il nous faut être bien conscients, les uns et les autres, qu'il n'y aura plus de discussion sur le « budget » du ministère des affaires étrangères, mais sur des politiques publiques, qu'il s'agisse de l'action extérieure de l'Etat, de l'action culturelle ou du soutien aux Français de l'étranger. Il nous faut être bien conscients qu'il n'y aura plus de discussion sur le « budget » du ministère de l'intérieur, mais sur les politiques de la sécurité, de la sécurité civile et de l'administration territoriale.

Cette prise de conscience s'impose de façon absolue.

La loi organique jalonne la piste à suivre en faisant des missions l'unité de vote des crédits. A nous de poursuivre la logique du texte en nous assurant que la mission soit aussi l'unité de discussion des crédits. Deux raisons nous guident en ce sens : premièrement, cela est pleinement cohérent avec les futurs débats d'amendements qui porteront sur les missions ; deuxièmement, il n'y a pas d'alternative crédible du point de vue de la réforme.

Il nous faut à tout prix éviter le retour à une discussion par ministères, tentation commode pour ceux qui ne veulent pas changer leurs habitudes, tentation commode pour ceux qui gèrent les agendas des ministres, tentation commode pour ceux qui craignent le dépassement des horaires.

Il nous faut notamment proscrire de façon catégorique une pratique qui consisterait à prévoir des discussions communes de missions ministérielles. L'argument de la maîtrise du temps des débats ne vaut pas à mes yeux.

La deuxième partie de la discussion du projet de loi de finances se limite aujourd'hui à une succession de monographies ministérielles dans lesquelles la majorité et le Gouvernement mettent en valeur un dixième d'augmentation des crédits ou nuancent un dixième de baisse, tandis que l'opposition - et ce n'est pas un mauvais procès que je fais à l'actuelle opposition sachant que nous sommes chacun à notre tour dans l'opposition - critique l'insuffisance des crédits, là où l'on sait l'inanité d'un propos qui néglige le contenu de la dépense.

Le temps de la deuxième partie serait beaucoup mieux utilisé s'il était organisé autour des missions, conformément à votre proposition, monsieur Arthuis.

La discussion permettrait alors d'évoquer le contenu des politiques, de débattre des problèmes précis soulevés par les contrôles et par les amendements, et cela exclusivement sous la forme de questions et de réponses. Je crois que ce serait la bonne formule !

Nous devons garder à l'esprit qu'il ne faut rien faire qui dénature l'esprit de la réforme, et notamment le développement de la logique de performance. Il faut que le Parlement s'empare de la logique de performance et structure les débats sur les dépenses autour de cette notion. Il doit ainsi s'écarter, ainsi que le prévoit la LOLF, des débats ministériels actuels pour entrer dans le coeur des politiques publiques.

L'autre volet de l'organisation des débats concerne le périmètre des compétences des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs pour avis.

Les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat ont fort heureusement, selon moi, adopté une définition des périmètres des rapports spéciaux qui se rapproche sensiblement des missions, pour ne pas dire qu'elle se cale complètement dessus, au Sénat du moins.

C'est judicieux dans la mesure où cette mesure permettra aux rapporteurs spéciaux d'exercer leur rôle dans les débats d'amendements et de s'attacher à la cohérence des missions, au nom des équilibres budgétaires et de la recherche de l'efficacité des politiques publiques.

De même, il me semble logique que les périmètres des rapports pour avis se rapprochent quant à eux des différents programmes, en tout cas des plus importants. Les commissions saisies pour avis ont, par leur connaissance fine des différentes politiques, des interlocuteurs et des dispositifs, une légitimité et une compétence particulières pour s'emparer des projets et des rapports annuels de performance, afin d'éclairer le Parlement sur la pertinence des objectifs et sur leur atteinte.

Un tel schéma d'organisation rapprochant les missions des rapporteurs spéciaux et mobilisant les rapporteurs pour avis sur les principaux programmes présente, outre sa simplicité, de nombreux avantages et devrait faire progresser la qualité de nos travaux.

Cette organisation permet de bien identifier les interlocuteurs et de nouer des relations plus étroites avec l'exécutif, notamment avec les responsables de programme ; elle permet d'associer beaucoup plus de parlementaires au suivi des politiques publiques, et ce tout au long de l'année ; elle utilise au mieux les compétences des différentes commissions et montre aux administrations que le Parlement les accompagne dans leur réforme.

Évidemment, un tel schéma destiné à se mettre en place progressivement ne devrait pas empêcher des « innovations » comme la co-signature des rapports les plus importants.

Mes chers collègues, une grande partie de la réforme dépendra de notre capacité collective à épouser la modernisation. Nous l'avons voulue en 2001. Nous avons réalisé une sorte de miracle en la souhaitant avec suffisamment d'ardeur pour l'adopter alors que les circonstances ne la favorisaient pas. Il faut donc que cet état d'esprit perdure.

Lorsque nous répartirons les rapports pour le budget pour 2006, lorsque nous organiserons les débats de deuxième partie, lorsque nous forgerons la pratique et les premiers précédents, ayons à l'esprit le signal que nous voudrons lancer à nos administrations !

En adaptant nos méthodes au nouveau cadre budgétaire, nous montrerons aux agents que nous sommes engagés dans une réforme sans précédent depuis 1959 et que le Parlement entend continuer l'oeuvre qu'il a entreprise depuis 2001. Nous montrerons que nous croyons dans cette réforme que nous avons voulue et, parce que nous l'avons voulue, que nous avons écrite et votée.

Nous avons la chance historique, en mettant en place la discussion du budget pour 2006 dans quatre mois, de rompre avec la fameuse « litanie, liturgie, léthargie » du président Edgar Faure et de refonder l'approche du Parlement en matière de finances publiques.

Cela passera par des actes simples qu'il ne faut pas manquer : discuter des missions et des programmes, et non pas des ministères ; nous pencher sur les politiques conduites, et non pas sur les pourcentages d'évolution des crédits ; répartir les rapports spéciaux et pour avis en nous calant sur la maquette et non sur des sections budgétaires qui ont plusieurs configurations gouvernementales de retard ; interroger les ministres à l'occasion de la loi de règlement sur leur action, afin d'éclairer et de soulager le débat budgétaire annuel, qui est déjà très lourd.

La mise en oeuvre de la LOLF exige des efforts très importants de la part des agents de l'administration, qui doivent réviser bon nombre de leurs méthodes et de leurs réflexes. Le Parlement doit donner l'exemple, les encourager et leur montrer la voie ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Question préalable

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de résolution modifiant le Réglement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Art. 1er

M. le président. Je suis saisi, par Mme Beaufils, MM. Foucaud et  Vera, Mmes Assassi,  Mathon et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, d'une motion n° 8, tendant à opposer la question préalable.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur les conclusions de la commission des Lois Constitutionnelles, de Législation, du Suffrage universel, du Règlement et d'Administration générale sur la proposition de résolution portant modification du règlement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (n° 313, 2004-2005).

Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, auteur de la motion.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le rapporteur, je veux bien croire que nous aurons de nouveau l'occasion de discuter d'une réforme démocratique du règlement faisant l'objet d'un consensus de tous les groupes, mais je veux dire d'emblée que nous avons été échaudés lors de la précédente tentative.

En effet, nous avons alors pu constater que la majorité ne voulait même pas accorder à l'opposition un droit d'initiative parlementaire libre et que la conférence de présidents restait maître de l'initiative parlementaire dans une assemblée qui n'a, jusqu'alors, pas connu de changement de majorité, ce qui augure mal d'une réforme consensuelle.

Nous continuons néanmoins à vouloir vous croire, monsieur le rapporteur, et nous attendons beaucoup de vos consultations.

La proposition de résolution dont nous débattons ce soir est présentée par ses auteurs comme une forme de prolongement technique de la loi organique du 1er août 2001. C'est à la fois le flou qui préside à l'application de la LOLF et le fait qu'elle ne nous semble pas améliorer les droits du Parlement qui motive le dépôt de cette question préalable.

A cet égard, je tiens d'ailleurs à rappeler que le groupe CRC avait été le seul, lors de la discussion de la loi organique, à s'opposer à l'adoption du texte rédigé de manière consensuelle par les deux Assemblées.

Contrairement à ce qui est fréquemment affirmé, rien n'est neutre dès lors que l'on parle des conditions de la discussion des lois de finances.

La loi organique illustre d'ailleurs votre conception, mes chers collègues, du rôle du Parlement dans ce qu'il a de plus essentiel, à savoir les choix de répartition des deniers publics et leur utilisation.

La plus récente histoire parlementaire a montré avec force exemples qu'il y avait souvent un décalage sensible entre la réalité constatée à l'occasion des collectifs de fin d'année et celle qu'avaient envisagée les lois de finances initiales.

J'en veux évidemment pour preuve la discussion des collectifs de fin d'année de 1998, 1999 ou 2000, dans lesquels nous avons fini par constater l'existence de plus ou moins importantes plus-values de recettes ou moins-values de dépenses qui ont modifié le solde définitif et transformé les données budgétaires initiales.

Dans un autre ordre d'idées, on ne peut aussi manquer de rappeler, mes chers collègues, que les exercices budgétaires 1994, 1995 et 1996 furent marqués par de douloureux collectifs pour lesquels tous les artifices rendus possibles par les textes furent utilisés pour compenser l'irréalisme des prévisions économiques et budgétaires des lois de finances initiales.

Le phénomène s'est reproduit en 2002 comme en 2003, avec des niveaux de déficit nettement différents de ceux qui avaient été envisagés à l'origine. Ainsi, en 2002, le dérapage budgétaire a atteint 2,3 milliards d'euros et, en 2003, au vu du collectif de fin d'année, il était de 2,9 milliards d'euros, ce qui a porté le déficit à 57 milliards d'euros, très au-dessus des 46 milliards d'euros figurant dans la loi de finances initiale.

La discussion budgétaire, sous certains aspects, est devenue quelque peu une clause de style, une sorte de passage obligé pour le Gouvernement, au cours duquel la limitation excessive du droit d'initiative parlementaire devient un obstacle à tout véritable débat d'orientation politique et de détermination de choix budgétaires réellement novateurs.

Si nous pouvons avoir des débats idéologiquement intéressants dès qu'il s'agit de l'impôt sur la fortune, de la réforme de l'impôt sur le revenu, de la fiscalité indirecte, le débat budgétaire souffre incontestablement de ne pouvoir réellement peser sur l'emploi des ressources publiques pour répondre aux aspirations de la population et aux nécessités de fonctionnement des services de l'Etat.

Si, comme vous le dites, on doit privilégier le contrôle budgétaire, à quel moment les élus de la nation auront-ils un débat avec le Gouvernement sur les orientations et le contenu des missions présentés lors de la discussion budgétaire ?

Sans être pour autant des « idéologues de la dépense », les parlementaires de la nation ne sont-ils pas en mesure d'opérer une analyse critique et pertinente de la dépense publique, analyse pouvant conduire à une utilisation différente et pourquoi pas plus efficiente de l'argent public ?

Les dépenses d'aujourd'hui sont souvent les économies de demain, quoi qu'en disent certains. Et les apparentes économies d'aujourd'hui sont parfois la source des gâchis budgétaires de demain.

L'initiative des choix budgétaires ne peut pas être réservée au seul pouvoir exécutif. C'est une question qui nous tient à coeur.

Les élus nationaux et locaux que nous sommes ont une perception du terrain et des attentes de nos concitoyens qui doit trouver son expression dans les choix budgétaires opérés in fine. A quel moment, sinon dans le débat budgétaire, peut-on le faire ?

Or, dans ce domaine, la loi organique ne donne aucun pouvoir supplémentaire au Parlement. La possibilité de créer de nouveaux programmes au sein des missions ministérielles ou interministérielles ne se détermine en effet qu'à enveloppe budgétaire constante et fermée.

En fait, l'extension des pouvoirs de contrôle du Parlement se limite à deux choses : il est plus informé des mouvements de gestion et peut déterminer l'amplitude des économies réalisables pour parvenir à l'équilibre budgétaire. Son rôle est cantonné à ces domaines.

A notre avis, le débat sur la dépense publique mériterait autre chose que la seule sophistication des outils de sa maîtrise.

La définition d'une répartition de la dépense publique en trente-quatre missions et 132 programmes serait susceptible de permettre une approche plus rationnelle et plus pertinente de la qualité de la dépense publique.

Or les premiers éléments fournis en matière d'évaluation et les indicateurs connus à ce jour suscitent des interrogations : que doit-on privilégier dès lors qu'il s'agit de gérer les affaires publiques ? Est-ce la satisfaction des besoins collectifs, qui est au coeur de l'action publique et doit la motiver, la justifier et l'accomplir, ou bien celle des comptables nationaux et européens, poursuivant sans relâche l'optimisation mesurable en termes d'économie et d'équilibre budgétaire ?

Car c'est bel et bien une simple logique comptable qui sous-tend aujourd'hui la mise en oeuvre de la loi organique et qui, demain, animera les lois de finances qui procéderont de cette dernière.

Et comment séparer la discussion en apparence technique qui nous occupe aujourd'hui de certaines dispositions du traité constitutionnel qui sera soumis à l'approbation de la population, ou à son rejet, le 29 mai prochain ?

Il me paraît utile à cet égard de citer quelques exemples précis.

Le traité établissant une Constitution pour l'Europe dispose, dans son article III-177 : « Aux fins de l'article I-3, l'action des Etats membres et de l'Union comporte, dans les conditions prévues par la Constitution, l'instauration d'une politique économique fondée sur l'étroite coordination des politiques économiques des Etats membres, le marché intérieur et la définition d'objectifs communs et conduite conformément au respect du principe d'une économie de marché ouverte où la concurrence est libre.

« Parallèlement, dans les conditions et selon les procédures prévues par la Constitution, cette action comporte une monnaie unique, l'euro, ainsi que la définition et la conduite d'une politique monétaire et d'une politique de change uniques dont l'objectif principal est de maintenir la stabilité des prix et, sans préjudice de cet objectif, de soutenir les politiques économiques générales dans l'Union, conformément au principe d'une économie de marché ouverte où la concurrence est libre. »

Citons également l'article III-184 :

« 1. Les Etats membres évitent les déficits publics excessifs.

« 2. La Commission surveille l'évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique dans les Etats membres pour déceler les erreurs manifestes. Elle examine notamment si la discipline budgétaire a été respectée, et ce sur la base des deux critères suivants :

« a) si le rapport entre le déficit public prévu ou effectif et le produit intérieur brut dépasse une valeur de référence, à moins :

« i) que le rapport n'ait diminué de manière substantielle et constante et atteint un niveau proche de la valeur de référence, ou

« ii) que le dépassement de la valeur de référence ne soit qu'exceptionnel et temporaire, et que ledit rapport ne reste proche de la valeur de référence ; ».

Je vous épargne la suite du texte, mes chers collègues, mais je vous invite à lire intégralement cet article dont la lecture est tout à fait intéressante.

M. Philippe Marini. Le débat porte sur le règlement du Sénat, ma chère collègue !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comment ne pas lier le débat qui nous occupe aujourd'hui à la réalité des engagements européens qui pèseront, si l'on n'y prend garde, sur la définition des politiques budgétaires de notre propre pays ?

Et cette soudaine rigueur quand il s'agit de la dépense publique,...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est de la sincérité !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... que dis-je, cette rigueur érigée en dogme, pour le présent et l'avenir, va de pair avec le développement de la concurrence dans tous ses aspects, qu'il s'agisse de la concurrence fiscale, du « moins-disant » social ou encore de la remise en question et du démantèlement des services publics.

La loi organique, telle qu'elle est prolongée par cette proposition de résolution modifiant le règlement du Sénat, c'est en quelque sorte la « mise en musique » d'une vassalisation de tout nouveau pouvoir de contrôle ou d'initiative du Parlement au profit de la concentration du pouvoir réel de définition des choix budgétaires au coeur des institutions et de la construction européennes actuelles. (Exclamation sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

A ceux qui pourraient nous accuser aujourd'hui de tenir un simple discours d'opportunité, je réponds en les invitant à se reporter à nos débats budgétaires les plus récents, profondément marqués dans leur essence par ce « corset » du traité de l'Union en matière de définition des politiques budgétaires, comme au débat que nous venons d'avoir sur l'utilisation des crédits du ministère des affaires étrangères.

Tout se passe, en effet, comme si l'activité parlementaire en matière budgétaire devait nous transformer en gardiens intransigeants et sourcilleux de la réduction des dépenses publiques...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On cesse de se raconter des histoires !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ...et, par voie de conséquence, cantonner l'activité des parlementaires à la mise en oeuvre la plus inflexible possible des orientations budgétaires coordonnées par la Commission européenne, institution dont chacun connaît ici le caractère totalement « démocratique » !

M. Philippe Marini. Tout cela est complètement imaginaire !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il est temps, mes chers collègues, grand temps même, de cesser d'associer justesse des choix budgétaires et réduction de la dépense publique...

M. Philippe Marini. D'où vient l'argent ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... et d'encourager cette réduction, au nom d'une orthodoxie budgétaire qui prive l'Etat de son rôle fondamental dans la réparation des attentes et des besoins.

M. Philippe Marini. Comment paie-t-on la dette ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais vous, vous réduisez l'impôt, des riches bien entendu !

Revenons quelques instants sur les termes de la proposition de résolution.

Bien que le rapport de notre collègue M. Gélard tende à nous présenter la proposition de résolution comme une avancée du droit des parlementaires,...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est vrai ! C'est bien vu !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ...force est de constater, au contraire, que c'est dans le cadre étroit fixé par l'enveloppe budgétaire des missions que pourra s'exercer ce droit.

De la même manière, il est fort probable qu'en lieu et place de la « souplesse » requise dans l'organisation des travaux par la conférence des présidents, sur proposition de la commission des finances, nous constations, dès la discussion du projet de loi de finances pour 2006, une nouvelle réduction du temps consacré aux débats de la seconde partie.

Comment ne pas pointer le fait que pratiquement le tiers du temps de parole dévolu aux différents orateurs des groupes politiques de notre Haute Assemblée n'a pas été utilisé dans la discussion de la loi de finances initiale pour 2005 ?

Comment ne pas pointer le fait que le recours à la procédure des « questions-réponses », au lieu de favoriser une dynamisation du travail parlementaire, a surtout concouru à réduire encore le temps consacré à l'analyse critique de la politique budgétaire, de la conception de ses choix jusqu'à son exécution ?

Pour l'ensemble de ces raisons nous ne pouvons bien évidemment que proposer à notre assemblée de rejeter cette proposition de résolution par l'adoption de notre motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Les auteurs de cette motion restent fidèles à eux-mêmes.

Mme Evelyne Didier. C'est déjà cela !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Ils se sont abstenus lors du vote de la loi organique, qui était le fruit d'une initiative conjointe de nos deux assemblées et qui a été adoptée par le Sénat à l'unanimité, en dehors du groupe communiste républicain et citoyen. Il y a donc une logique tout à fait naturelle dans le dépôt de cette motion tendant à opposer la question préalable.

Permettez-moi d'expliquer pourquoi j'émettrai un avis totalement défavorable sur cette motion.

Mme Evelyne Didier. On s'en doutait !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Tout d'abord, je dirai - et je réponds là à notre collègue Bernard Frimat, dont j'ai beaucoup apprécié l'intervention tout à l'heure -, que cette modification de notre règlement intervient au bon moment.

En effet, il était impossible d'attendre le mois de juin, avec un calendrier incertain que nous ne contrôlons pas, sachant que nous devons être prêts dès le mois d'octobre pour mettre en place la discussion du prochain projet de loi de finances.

Les modifications prévues par la proposition de résolution sont nécessaires et très limitées. Elles permettront d'aborder sereinement la discussion du projet de loi de finances pour 2006, sans préjuger ni exclure d'autres adaptations ultérieures de notre règlement.

Mais, surtout, je tiens à préciser que les prérogatives des parlementaires seront particulièrement étendues, et ce à un double titre.

Tout d'abord, la totalité des crédits devra être discutée « dès le premier euro », alors que, jusqu'à présent, les services votés, qui représentaient 94 % des crédits, étaient reconduits par un seul vote presque automatiquement d'une année sur l'autre. Voilà donc une amélioration notable des pouvoirs des parlementaires.

Ensuite, les amendements visant la création d'un programme ou l'augmentation des crédits d'un programme, compensés par une diminution corrélative des crédits d'un autre programme de la même mission, seront dorénavant recevables, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.

M. Philippe Marini. Absolument !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Un pouvoir très important est ainsi ouvert non seulement à la majorité, mais aussi à l'opposition, qui pourra jouer du droit d'amendement de façon beaucoup plus large qu'auparavant. Par conséquent, les droits de la minorité ne sont nullement menacés.

Il reviendra à la conférence des présidents d'organiser les modalités particulières de la discussion des lois de finances de l'année. L'élargissement du droit d'amendement des parlementaires permettra de nombreuses prises de parole sur l'ensemble des programmes.

Telles sont les raisons pour lesquelles, madame Borvo Cohen-Seat, et j'en suis désolé, je suis obligé d'émettre un avis défavorable sur votre motion tendant à opposer la question préalable.

M. Daniel Raoul. C'est un scoop !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je tiens à remercier M. Patrice Gélard de la qualité du rapport qu'il vient de présenter ce soir au Sénat sur notre proposition de résolution modifiant le règlement du Sénat en vue de préparer, dans les conditions les plus satisfaisantes, la discussion du projet de loi de finances pour 2006 selon les modalités prévues par la loi organique relative aux lois de finances.

La discussion générale a été tout à fait intéressante et, à cet égard, je saluerai tout particulièrement les interventions de MM. Bernard Frimat et Alain Lambert, qui ont rappelé les points fondamentaux de cette réforme majeure tendant à renforcer les droits du Parlement.

Mes chers collègues, cette loi organique est le fruit d'une conjonction astrale (sourires), d'une démarche suprapartisane dépassant les clivages politiques habituels ; il ne saurait donc être question de laisser accréditer l'idée selon laquelle la majorité malmènerait l'opposition.

Nous sommes, majorité et opposition, dépositaires d'un texte qui doit désormais constituer le levier de la réforme de l'Etat.

Vous avez parlé de « logique comptable », madame Borvo Cohen-Seat ? J'avoue que je suis toujours étonné par l'utilisation que vous faites de cette formule : ce sont bien les Constituants de 1789, qui, dans leur sagesse, ont posé le principe selon lequel tout agent public doit rendre compte de sa gestion !

Pour ce faire, il faut avoir quelques principes fondamentaux. L'élément nouveau de cette loi organique est le postulat selon lequel les comptes publics devront désormais être sincères. La Cour des comptes devra certifier la sincérité des informations mises en forme par le Gouvernement, qui rendra compte de sa gestion. C'est, d'ailleurs, ce devoir de certification qui nous conduit à réviser la matrice des missions.

Ainsi, la Cour des comptes sera dotée d'un nouveau statut qui la placera en quelque sorte à équidistance entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.

Le projet de loi de finances comportera donc une nouvelle mission, à savoir le conseil et le contrôle de l'action gouvernementale. Trois programmes seront rassemblés, notamment celui qui sera dévolu à la Cour des comptes, laquelle ne dépendra donc plus du ministère de l'économie et des finances, qui est, pour sa part, chargé de tenir et d'arrêter les comptes.

Je voudrais répondre à Bernard Frimat, qui a indiqué que le débat est enrichi.

Lors du vote de l'article d'équilibre, nous devrons nous prononcer solennellement sur trois nouvelles dispositions : le niveau des effectifs, le niveau du déficit et le niveau des emprunts, puisque le Parlement autorisera le Gouvernement à emprunter dans une limite qu'il aura fixée. C'est en cela que l'on peut dire effectivement que le débat est enrichi.

Je crois que nous devons nous préparer à examiner, à discuter et à voter la seconde partie du projet de loi de finances par mission.

Respectant l'esprit et la lettre de la LOLF, la commission des finances estime que les rapports spéciaux devront être présentés par mission. Nous avons organisé un séminaire de réflexion pendant deux jours, et il a été convenu qu'un certain nombre de missions pourront être rapportées par plusieurs rapporteurs spéciaux qui seront cosignataires du rapport.

Bernard Frimat s'est interrogé sur les nuances que les rapporteurs pourraient apporter en fonction de leurs convictions, mais ceux-ci rapportent au nom de la commission. Or, à un moment donné, la majorité de la commission donnera ses conclusions et le rapporteur devra respecter le point de vue qu'elle aura exprimé.

Avoir accepté le principe selon lequel plusieurs rapporteurs spéciaux, dont les convictions politiques sont différentes, pourront participer à la cosignature d'un rapport spécial constitue, me semble-t-il, une richesse. Telle est l'esquisse que nous avons tracée et, si tous les groupes politiques sont d'accord avec notre proposition, nous la mettrons en oeuvre dès le début du mois de juin.

Mes chers collègues, il était urgent de présenter cette proposition de résolution, car, dans quelques semaines, les rapporteurs spéciaux devront connaître, au même titre que les rapporteurs pour avis, le champ de leurs responsabilités, afin notamment de préparer les questionnaires qui seront adressés aux différents ministres chargés des missions sur lesquelles nous aurons à nous prononcer.

Nous souhaitons que la discussion de la seconde partie de la loi de finances soit aussi interactive que possible. Il s'agit d'une loi de finances, donc de considérations budgétaires, et non d'une succession de propos relatifs à la politique générale du Gouvernement. Nous devons rester dans un cadre budgétaire.

S'il est vrai que l'examen et le vote du projet de loi de finances initiale est un moment essentiel, puisque nous devons nous prononcer sur le consentement à l'impôt et autoriser le Gouvernement à engager des dépenses pour contribuer aux grandes missions dont il a la charge, le contrôle de l'exécution budgétaire va devenir particulièrement important.

A ce stade, nous n'avons prévu aucune disposition tendant à modifier le règlement du Sénat, mais j'imagine que nous demanderons assez rapidement à notre assemblée de tenir, au printemps, une séance spéciale, afin d'inviter les ministres, au lendemain de la clôture d'un exercice budgétaire, à venir rendre compte de leur gestion, en vertu de cette nouvelle logique qui privilégie le résultat par rapport à la culture de moyens.

Nous pouvons donc imaginer que, à brève échéance, au mois de mai ou de juin, avant que ne s'engage le débat d'orientation budgétaire, l'examen du projet de loi portant règlement définitif, qu'il faudra sans doute requalifier pour le rendre plus attractif, cessera d'être un exercice formel que nous expédions en une ou deux heures. Au contraire, pendant plusieurs jours, nous allons inviter les ministres à venir devant le Sénat rendre compte de leur gestion et expliquer pour quels motifs les objectifs qu'ils avaient fixés n'ont pas été tenus, ainsi que les raisons pour lesquelles les résultats ne sont pas à la hauteur des prévisions qu'ils avaient faites au moment où ils nous invitaient à nous prononcer favorablement sur le projet de loi de finances.

Si, à l'avenir, nous pouvons privilégier une réelle interactivité dans le dialogue entre le Gouvernement et le Parlement, nous donnerons plus de relief à la discussion.

Pour ma part - soyez-en persuadés, mes chers collègues - je me sens investi d'une responsabilité, celle de veiller à ce que tous les points de vue puissent s'exprimer et que la minorité ne se sente, en aucune façon, bafouée parce qu'elle ne disposerait pas des moyens d'exposer son point de vue sur chacune des missions et sur chacun des programmes qui seront soumis à notre examen.

Mes chers collègues, la proposition de résolution que nous vous soumettons reste modeste. Elle rend possible la mise en oeuvre de la LOLF.

Au-delà du règlement du Sénat, ce qui comptera, c'est l'engagement personnel de chacun d'entre nous. Notre objectif est clair : rendre la gestion lisible, compréhensible. Nous avons un devoir de lucidité, pour que les décisions politiques soient fondées sur des données aussi factuelles que possible et qu'ainsi nous participions à la réforme de l'Etat.

Ce n'est pas la LOLF qui réduit la dépense publique ; la LOLF est un instrument et rien d'autre. Ceux qui, majoritairement, estimeraient nécessaire d'augmenter la dépense publique pourraient le faire par le biais de la LOLF ; au contraire, une majorité pourrait, toujours en vertu de la LOLF, préconiser une meilleure maîtrise de la dépense publique. Ce n'est pas la LOLF qui définit le niveau de la dépense publique ; elle n'est, je le répète, qu'un instrument de visibilité et de lucidité, le reste étant affaire de responsabilité et de volonté politique. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.

M. Bernard Frimat. Au-delà de la motion tendant à opposer la question préalable, notre discussion présente un caractère plus général, puisque le président Arthuis a prolongé le débat que nous avons eu au cours de la discussion générale. Certes, nos collègues du groupe CRC ne sont pas intervenus alors, mais la défense de cette motion s'inscrit dans une même unité.

Pour ma part, j'exprimerai la position de mon groupe sur la motion tendant à opposer la question préalable et je tenterai, monsieur Arthuis, de poursuivre avec vous cet intéressant dialogue.

N'appartenant pas à la noble commission des finances, ...

M. Philippe Marini. Moins noble que la commission des lois !

M. Bernard Frimat. ... je plaide mon incompétence en la matière, mais j'essaierai de me hisser au niveau de cette discussion très technique.

M. Lambert et vous-même, monsieur Arthuis, plaidez pour la LOLF mais, que je sache, la LOLF date de 2001. C'est donc une oeuvre pluraliste.

Vous répondez aux questions que nous avons posées en arguant du fait que la LOLF est une bonne loi, que nous allons devoir nous servir de cet outil pour avoir une dynamique budgétaire et un budget sincère afin d'adapter les décisions publiques. Nous en sommes tout à fait d'accord ! Je ne vois d'ailleurs pas qui pourrait se réjouir d'un budget qui ne serait pas sincère ! Je vous rappelle que le groupe socialiste a voulu cette loi organique relative aux lois de finances ; nous sommes donc parfaitement à l'aise sur ce sujet.

Monsieur Arthuis, nous discutons ici non pas du contenu de la LOLF - cela pourrait faire l'objet d'un autre débat, tout aussi intéressant -, mais d'une modification du règlement intérieur du Sénat.

Nous demandons que le règlement intérieur organise la discussion budgétaire en nous donnant des garanties. Or, la proposition de résolution précise que les dispositions de la LOLF seront respectées - c'est la moindre des choses -, et que la conférence des présidents fixera les modalités d'organisation de la discussion budgétaire, ce qui ne nous donne aucune garantie.

Je ne vous fais aucun procès d'intention, monsieur Arthuis, mais nos rapports doivent être fondés non pas sur la confiance, mais sur, d'un côté, le respect du fait majoritaire et, de l'autre, la garantie des droits de l'opposition. Nous demandons que le règlement intérieur les formalise. Nous avons déposé quelques amendements en ce sens, qui ont été refusés par le rapporteur ; nous en tirerons donc logiquement les conclusions.

Comment sera organisée la discussion budgétaire ? Certes, un séminaire de réflexion a été mis en place. Jean-Claude Frécon, qui y a participé, l'a trouvé fort intéressant, mais, quelle que soit la vitesse de transmission de pensée, ses conclusions ne sont pas encore arrivées jusqu'à nous pour nourrir notre débat. De toute façon, cela ne concerne pas le règlement intérieur, puisque c'est la commission des finances qui fixe les règles d'organisation du débat budgétaire. En tout cas, tel est mon sentiment.

S'agissant de la motion tendant à opposer la question préalable, je dois dire à Nicole Borvo Cohen-Seat que je suis en accord avec elle pour défendre, au sein de notre institution, les droits de l'opposition et le fait qu'elle soit respectée, ce qui se produit de temps en temps alors qu'il faudrait que ce soit de manière continue. Ma remarque ne vaut pas uniquement pour les débats concernant la commission des finances, puisque le Sénat traite de bien d'autres questions, mais, de manière générale, comme je l'ai déjà indiqué, nous avons le sentiment de vivre une démocratie concédée.

Toutefois, bien que nous partagions votre point de vue à cet égard, madame Borvo Cohen-Seat, nous ne voterons pas la motion tendant à opposer la question préalable parce que les motivations qui la sous-tendent sont, à mes yeux, confuses et répondent aux sollicitations de l'air du temps.

Je sais bien que nous sommes tous quelque peu obsédés en ce moment par le traité constitutionnel ; nous participons à des réunions pour exprimer nos convictions. Mais comment auriez-vous fait, ma chère collègue, s'il n'y avait pas eu ce référendum ? D'un seul coup, tout un pan de votre argumentation serait tombé de lui-même.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ne vous inquiétez pas !

M. Bernard Frimat. Je respecte toutes les opinions ! Vous avez le droit de continuer de vous opposer à la construction européenne et à tous les traités ...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Au traité constitutionnel !

M. Bernard Frimat. ... qui ont été négociés au cours de l'histoire, de la construction de la Communauté économique européenne à l'Union européenne, car c'est la démocratie. Mais vous ne pouvez avancer ces arguments pour refuser un débat portant sur la modification du règlement intérieur du Sénat afin de mettre en oeuvre les dispositions de la LOLF. Je ne veux pas vous suivre, madame Borvo Cohen-Seat, dans cette gymnastique intellectuelle qui voit, dans le traité constitutionnel qui sera adopté le 29 mai, ...

M. Bernard Frimat. ... les raisons pour lesquelles la modification de notre règlement intérieur n'est pas satisfaisante.

Comme nous sommes d'accord avec vous pour défendre les droits de la minorité, que je préfère appeler l'opposition, nous nous abstiendrons sur la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je comprends tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.

M. Philippe Marini. Bien entendu, je me prononcerai contre la motion tendant à opposer la question préalable, car il y a lieu de délibérer sur cette proposition de résolution tendant à modifier notre règlement intérieur. Si nous ne le faisions pas, la discussion budgétaire ne pourrait pas être adaptée à la LOLF.

Mes chers collègues, qu'est-ce que la loi organique, sinon le retour, dans l'hémicycle, de la réalité pendant la discussion de la loi de finances ?

Nous savons tous que la discussion pratiquée selon les normes en vigueur jusqu'à présent a connu un divorce croissant par rapport à la réalité. Nous nous sommes enfermés dans un formalisme qui s'éloigne chaque année davantage des conditions concrètes de gestion des crédits publics au sein des différentes missions nécessaires à l'accomplissement de l'action de l'Etat. D'année en année, nous assistons à une désaffection croissante pour le débat budgétaire et, chaque année, les membres de la commission des finances se disent qu'il faudrait redonner à ce débat le sens des réalités.

La loi organique - nous aurons l'occasion d'y revenir et d'éprouver son intérêt comme ses limites - ne sera pas miraculeuse. Du moins permettra-t-elle de poser les bonnes questions et de responsabiliser les parlementaires que nous sommes.

Comment pourrions-nous, mon cher collègue Frimat, souhaiter que le débat budgétaire ne soit réservé qu'à quelques-uns ? Bien au contraire ! La vertu de la loi organique, si elle est bien appliquée, sera de susciter une large participation, sur l'ensemble des travées !

M. Daniel Raoul. Faites des propositions en ce sens !

M. Bernard Frimat. Inscrivez-le dans le règlement !

M. Philippe Marini. Auparavant, il faudra accepter de traverser ensemble une période expérimentale.

Permettez-moi de vous soumettre un exemple concret.

Parmi les rouages que définit la loi organique, il en est un - probablement le plus important - qui se présente de manière tout à fait différente par rapport à l'ordonnance de 1959. Il s'agit de l'article d'équilibre, qui établit la jonction entre les différents temps de la discussion budgétaire. Jusqu'à présent, cet article d'équilibre, qui prend en compte le décalage entre les dépenses et les recettes, se concluait par un vote solennel.

La nouvelle conception de la discussion budgétaire ne prévoit plus un vote, mais trois, et il faudra organiser le débat dans cette perspective. Le premier vote portera sur le décalage entre les dépenses réelles et les ressources réelles ; le deuxième vote permettra de tirer les conséquences de la gestion financière, c'est-à-dire la gestion de la dette, son évolution, les charges qu'elle entraîne, les besoins de refinancement qu'il faut honorer, et débouchera sur la décision consciente du Parlement d'autoriser le Gouvernement à recourir de nouveau à l'emprunt ; enfin, le troisième vote concernera un aspect important de la gestion publique, à savoir le niveau des effectifs des agents publics.

Trois votes, mes chers collègues, cela signifie trois débats, et non plus un ! Cela se traduira certainement par plus de prises de parole ! Il nous faudra donc expérimenter, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, la manière dont, ensemble, nous ferons progressivement vivre ces nouvelles procédures.

Dans ces conditions, est-il raisonnable, dès la première année, de tout graver dans le marbre du règlement intérieur ?

Les membres de la commission des finances à l'origine de cette proposition de résolution ont préconisé le maintien d'une certaine souplesse dans la mise en place de ce nouveau système, dont la conférence des présidents sera l'arbitre. Il ne s'agit de rien d'autre que de cela. Ils forment également le voeu que, dès cet automne, sur l'ensemble des travées, des collègues de l'opposition plus nombreux fassent valoir des arguments valables et solides,...

M. Bernard Frimat. Toujours ! (Sourires.)

M. Philippe Marini. ... auxquels les membres de la majorité, présents en plus grand nombre, naturellement, (nouveaux sourires) répondront par des raisonnements encore meilleurs,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sera difficile !

M. Philippe Marini. ...de telle sorte que la confrontation soit fructueuse. C'est en cela que résidera le succès de cette réforme. Pour en arriver là, il nous faut trouver ensemble des dispositions procédurales.

Acceptons cette phase de mise en oeuvre de la LOLF, l'organisation se perfectionnera, en quelque sorte, en marchant !

Au cours de ces deux derniers jours - notre collègue Jean-Claude Frécon a partagé avec nous ces moments -, nous avons abordé des points très techniques et avons tenté de répartir les tâches au sein de la commission des finances. Nous l'avons fait dans un souci d'ouverture, en essayant d'exploiter le potentiel dont sont porteurs ces nouveaux textes. De la même manière, il nous faudra, en appliquant la même méthode participative et ouverte, faire vivre la discussion budgétaire selon la loi organique, par l'intermédiaire du présent règlement.

C'est la raison pour laquelle il est indispensable de rejeter cette motion tendant à opposer la question préalable. Si elle était adoptée, tout s'arrêterait ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Je mets aux voix la motion n° 8, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet de la proposition de résolution.

(La motion n'est pas adoptée.)

M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion des articles.

Question préalable
Dossier législatif : proposition de résolution modifiant le Réglement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Art. additionnel avant l'art. 2

Article 1er

Dans l'alinéa 5 de l'article 18 du règlement du Sénat, les mots : « au budget particulier » sont remplacés par les mots : « aux crédits ».

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Art. 1er
Dossier législatif : proposition de résolution modifiant le Réglement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Art. 2

Article additionnel avant l'article 2

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Les deux dernières phrases du premier alinéa (1) de l'article 45 du règlement du Sénat sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « L'irrecevabilité est soumise au vote, après débat, où sont autorisés à prendre part l'auteur de l'amendement, l'auteur de l'exception, et un sénateur de chaque groupe. »

II. - Le deuxième alinéa (2) du même article est supprimé.

III. - En conséquence, dans le troisième alinéa (3) du même article, les mots : « par les alinéas 1 et 2 du présent article » sont remplacés par le mot : « ci-dessus ».

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La question de la recevabilité financière se pose de manière récurrente dans le cadre de nos débats, ne serait-ce que parce que les principes constitutionnels de recevabilité ont conduit, depuis 1959, à une sensible réduction des droits des parlementaires.

Si l'on peut comprendre l'esprit de la recevabilité financière, force est de constater que son usage apparaît clairement comme le moyen d'escamoter la controverse dans la discussion des projets de loi ou des projet de loi de finances.

L'invocation de l'irrecevabilité financière, sans autre forme de procès, dispense d'être confronté à la contradiction sur certains sujets considérés comme épineux.

Nous estimons, pour notre part, - nous l'avons dit maintes fois, mais je tiens à le répéter- qu'il faut donner tout son relief à la question de la recevabilité financière, qui doit faire l'objet d'une véritable discussion.

Cet amendement vise donc clairement, sans remettre en question le principe même de la recevabilité financière, à faire de l'usage de l'article 40 de la Constitution un moment nécessaire du débat parlementaire, en donnant à l'auteur de l'amendement soumis à cette application, puis à celui ou à celle qui a invoqué l'article 40 de la Constitution et enfin à un membre de chaque groupe parlementaire la possibilité d'apporter son propre éclairage sur la question soulevée.

Comme vous avez tous le souci des droits du Parlement, je pense, mes chers collègues, que cet amendement vous agréera et que vous aurez à coeur de l'adopter.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement a pour objet de confier au Sénat lui-même, et non plus à la commission des finances, le soin d'apprécier la recevabilité financière des amendements, en prévoyant un vote en séance publique après un débat faisant intervenir l'auteur de l'amendement, l'auteur de l'exception d'irrecevabilité et un sénateur de chaque groupe.

Les auteurs de cet amendement soulèvent le problème de la question de la recevabilité financière d'un amendement et veulent faire intervenir des considérations de fait et non d'opportunité politique.

La commission des finances dispose de l'expertise nécessaire pour statuer sur les exceptions d'irrecevabilité fondées sur l'article 45 du règlement de notre assemblée.

L'amendement n° 4 encourt, selon moi, la censure du Conseil constitutionnel. Son adoption pourrait se traduire par la remise en cause de règles actuellement plus favorables aux initiatives parlementaires que celles du règlement de l'Assemblée nationale.

Au Sénat, tous les amendements sont enregistrés et distribués, sauf ceux qui, afférents à un projet de loi de finances, tendent à porter un crédit budgétaire au-delà du montant prévu par le Gouvernement. Ils sont mis en discussion, sauf si la commission des finances, saisie d'une exception d'irrecevabilité soulevée par le Gouvernement, la commission saisie au fond ou un sénateur constate, en séance, leur irrecevabilité au regard des règles posées par l'article 40 de la Constitution ou des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances.

A l'Assemblée nationale, en revanche, les amendements sont systématiquement examinés en amont par la commission des finances et ne peuvent être enregistrés et distribués si cette dernière constate leur irrecevabilité.

Cet amendement tend à proposer une solution qui risque de nous entraîner vers des orientations que l'ensemble des sénateurs ne souhaitent pas. C'est la raison pour laquelle j'en demande le retrait ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. Madame Borvo Cohen-Seat, l'amendement n° 4 est-il maintenu ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets donc aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel avant l'art. 2
Dossier législatif : proposition de résolution modifiant le Réglement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Art. 3

Article 2

Dans l'alinéa 4 de l'article 45 du même règlement, les mots : « l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique » sont remplacés par les mots : « la loi organique ».  - (Adopté.)

Art. 2
Dossier législatif : proposition de résolution modifiant le Réglement du Sénat pour la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Art. 4

Article 3

I.- Dans l'alinéa 1 de l'article 46 du même règlement, les mots : « l'article 41 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique » sont remplacés par les mots : « l'article 43 de la loi organique ».

II.- Dans l'alinéa 2 du même article, les mots : « un crédit budgétaire » sont remplacés par les mots : « les crédits d'une mission ».

III.- Le dernier alinéa (alinéa 3) du même article est abrogé.

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par MM. Frimat,  Massion,  Dreyfus-Schmidt,  Masseret et  Peyronnet, Mme Bricq, MM. Miquel,  Charasse et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le III de cet article :

III. La première phrase du dernier alinéa (alinéa 3) est ainsi rédigée : « Les crédits ouverts sur un programme ou une dotation ne peuvent être l'objet que d'un débat sommaire, sauf accord contraire de tous les présidents des groupes politiques. »

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. L'ordonnance du 2 janvier 1959 permet actuellement l'organisation, au sein de la discussion budgétaire, d'un débat, certes très sommaire, sur les titres.

J'ai bien compris que la modification technique supprimait en quelque sorte le support qui donnait lieu à ce débat sommaire. Je vous en donne acte. Au demeurant, tel qu'il existait, ce débat offrait à tout sénateur, quel que soit son groupe, la possibilité de s'inscrire pour prendre la parole sur les titres, de la même façon qu'il peut le faire sur un article. Une telle organisation donnait de la souplesse au débat, puisque chaque parlementaire jouissait en quelque sorte d'un droit individuel à la parole.

Je veux bien vous croire lorsque vous affirmez que vous ne souhaitez pas supprimer ces possibilités et que le débat sera enrichi, modernisé, puisqu'il y aura trois votes. Chaque fois qu'il est question de l'article d'équilibre, vous vous lancez dans un plaidoyer « pro-LOLF ». Je ne peux que m'en réjouir : je le considère comme un hommage rendu au gouvernement qui a présidé à l'élaboration de ce projet de loi et au travail pluraliste qui a été accompli !

Mais là n'est pas la question. Pour l'instant, il s'agit du règlement du Sénat, plus précisément de l'organisation de la discussion budgétaire, et non de la LOLF, elle-même ! Or, justement, dans la nouvelle organisation de la discussion que vous proposez, ce droit individuel accordé à chaque parlementaire, cette niche ou cette fenêtre d'expression - choisissez la métaphore qui vous semblera la plus appropriée -, disparaît. J'ai beaucoup de mal à comprendre en quoi cette disparition est un progrès, un enrichissement, voire une modernisation.

L'amendement n°1 vise à rétablir cette possibilité. A quel moment de la procédure l'inscrire ? Il nous semble que le plus logique serait de la prévoir lors de l'examen des crédits ouverts sur un programme ou une dotation.

Je reconnais qu'il n'est peut-être pas nécessaire d'organiser un débat sommaire sur les 132 programmes. Vous voulez utiliser la conférence des présidents de manière pragmatique parce qu'il ne faut pas figer les choses la première année et que nous ignorons comment tout cela va être organisé. Bien, mais dès lors nous ne devrions rien faire et accepter de remettre notre sort entre des mains dans lesquelles nous n'avons qu'une confiance limitée !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oh !

M. Bernard Frimat. Il ne s'agit nullement d'une attaque personnelle, monsieur le président Hyest ! Je constate simplement que, même pour des gens momentanément distraits, l'équilibre politique de la conférence des présidents n'est pas absolument identique, si je puis utiliser cette litote, à l'équilibre politique de l'assemblée. Mais nous aurons l'occasion d'y revenir.

Donc, sur ce point, ce que nous vous demandons, c'est de recréer cette petite fenêtre de liberté et de la situer au niveau du programme. Et si un accord unanime intervient pour considérer qu'un certain nombre de programmes ne méritent pas cette fenêtre, on pourra à ce moment-là, pragmatiquement, avec souplesse, dans l'esprit qui vous anime, adopter cette solution que vous préconisez.

Voilà l'esprit qui sous-tend cet amendement. Chaque parlementaire, et donc aussi les parlementaires de l'opposition, disposait de ce droit individuel. Vous êtes animés des meilleures intentions du monde, ...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est vrai !

M. Bernard Frimat. ...mais l'enfer n'en est-il pas pavé ?

J'attends que vous me démontriez que la suppression d'un droit individuel d'expression est un progrès dans un débat démocratique. Si vous y parvenez, alors, je retirerai cet amendement !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit effectivement d'un amendement intéressant,...

M. Daniel Raoul. Ça commence mal ! (Sourires.)

M. Patrice Gélard, rapporteur. ...qui m'a interpellé et qui m'a conduit à examiner encore plus attentivement la LOLF. Mais il ne correspond pas à la nouvelle structure...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Voilà !

M. Patrice Gélard, rapporteur. ...ni aux délais d'examen des lois de finances.

En premier lieu, les missions constitueront l'unité de vote.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !

M. Patrice Gélard, rapporteur. En principe, il n'y a donc pas lieu de prévoir un débat sommaire sur chaque programme ou chaque dotation. Au demeurant, on peut s'interroger sur la signification de l'expression « débat sommaire ». L'élargissement du droit d'amendement des parlementaires, dont j'ai parlé tout à l'heure, leur permettra de s'exprimer bien plus largement qu'à l'heure actuelle. Les droits de l'opposition ne sont donc nullement remis en cause.

En second lieu, 132 programmes devraient se substituer aux 850 chapitres budgétaires actuels. La loi organique impose au Sénat d'examiner en première lecture le projet de loi de finances de l'année dans un délai de vingt jours - il ne faut pas l'oublier. Donc, si on multiplie sur chacun des programmes et sur chacune des dotations les temps de parole, alors qu'ils doivent, au contraire, glisser au niveau de la mission, nous ne tiendrons pas le calendrier.

Prévoir un débat sur chaque programme ou chaque dotation, sauf accord unanime, un accord particulièrement difficile à obtenir, des présidents des groupes politiques, reviendrait à prendre le risque de dépasser le délai et, à tout le moins, de rendre les débats moins vivants. (M. Bernard Frimat lève les bras au ciel.)

De surcroît, l'amendement proposé ne prévoit pas de modulation de la durée des débats en fonction de l'importance des crédits. La mission « justice », que nous connaissons bien, est ainsi plus importante que le budget annexe des Journaux officiels. Va-t-on consacrer autant de temps à l'un et à l'autre ?

Telles sont les raisons pour lesquelles, tout en reconnaissant que la question de l'organisation de débats sur les programmes méritera d'être examinée, il me semble dangereux de figer dès à présent dans le règlement la discussion budgétaire. Mieux vaut, comme le prévoit la proposition de résolution, laisser à la conférence des présidents le soin de fixer les modalités particulières de son organisation pour l'année à venir. Nous verrons ensuite s'il est nécessaire de revenir sur cette disposition.

M. Philippe Marini. Tout à fait !

M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est pourquoi je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. A défaut, je serai obligé d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Frimat, l'amendement n° 1 est-il maintenu ?

M. Bernard Frimat. Vos explications, monsieur Gélard, n'ont pas de portée. Nous défendons un droit qui pouvait être utilisé par tous les sénateurs, y compris par ceux de l'opposition. La disposition que vous nous proposez constitue manifestement un recul.

Je veux bien entendre votre argumentation, mais il faudrait pouvoir nous dire très précisément quelles sont les possibilités dont nous disposerons dans la discussion budgétaire. Or, à ce jour, nous ne savons rien. Dans ces conditions, ne voulant pas donner: de chèque en blanc, nous maintenons l'amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Frécon, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Frécon. Il ne faut pas utiliser tantôt un argument et tantôt l'argument contraire. Tout à l'heure, à l'occasion de l'examen de la motion tendant à opposer la question préalable, M. le rapporteur général a dit : il faut de la souplesse la première année. Nous allons dans ce sens. En effet, au lieu de prévoir dès à présent des dispositions « cadenassant » la discussion, nous demandons, pour cette première année, que s'applique une règle proche de celle que nous appliquions les années précédentes, puisque la discussion portera non plus sur des titres mais sur des programmes. Ainsi, chacun d'entre nous pourra exprimer sa position.

M. Philippe Marini. Ce sera le cas !

M. Jean-Claude Frécon. C'est cela la souplesse. Pendant deux jours, vous l'avez rappelé tout à l'heure, monsieur le président de la commission des finances, nous avons essayé de mettre au point des méthodes de travail. Nous ne sommes pas arrivés à tout définir, car nous n'avons pas encore une connaissance exacte de la manière dont cela va se passer. C'est en forgeant que l'on devient forgeron ; c'est en avançant que nous cadrerons. Ne « cadenassons » pas avant, essayons d'avoir de la souplesse.

Pour ma part, je voterai cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est une discussion tout à fait intéressante. Je comprends les motivations qui sous-tendent l'amendement que vient de présenter notre collègue Bernard Frimat, mais je salue aussi l'autorité de la commission des lois et de son rapporteur, qui nous a rappelé fort opportunément que désormais l'unité de vote, c'est la mission.

Cher collègue Jean-Claude Frécon, nous nous sommes interrogés en commission des finances pour savoir si les rapporteurs spéciaux devaient être des rapporteurs spéciaux par programme ou des rapporteurs spéciaux par mission. Au terme d'un débat auquel chacun d'entre nous a participé, nous sommes convenus que maintenir des rapports spéciaux par programme, ce n'était pas respecter la LOLF, qui est le fruit d'une réflexion et d'un vote suprapartisans.

Nous voulons être respectueux de la LOLF. Dès lors, nous avons choisi le vote par mission, et non par programme. Par conséquent, on peut avoir des développements extrêmement pertinents sur tel ou tel programme, mais ce qui compte, c'est d'avoir une opinion sur la mission. On votera dès le premier euro sur les crédits de la mission, et non pas programme par programme. Les amendements s'y prêteront. C'est l'ensemble qui fera l'objet d'un vote.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Effectivement !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Qu'il soit bien clair, chers collègues, que le temps qui était consacré jusqu'à maintenant aux discussions sur les articles et sur les titres sera réparti entre les différentes missions ; ceux qui souhaitent s'exprimer sur un programme particulier pourront le faire, mais dans le cadre d'une discussion qui concernera la mission.

Naturellement, on ne peut, dans un règlement, dire aujourd'hui quel temps sera consacré à la mission « Journaux officiels ». Vous avez évoqué trente-quatre missions, ce sont les trente-quatre missions du budget général, auxquelles il faut ajouter trois missions « budgets annexes » et dix missions « comptes spéciaux du Trésor ».

Donc, nous répartirons ce temps en fonction du poids relatif des crédits. La proposition que je ferai, au nom de la commission des finances et au terme d'une réflexion qui aura lieu en son sein, sera soumise à la conférence des présidents, avec, il est vrai, un certain pragmatisme. Et comme l'a dit M. Patrice Gélard, au terme de cette première discussion de la loi de finances, nous ferons un bilan et nous verrons bien ce qui est perfectible.

Encore une fois, l'opposition pourra s'exprimer comme elle l'entend. Je ne voudrais pas laisser accréditer l'idée selon laquelle on réduirait les droits de l'opposition au motif qu'on écarterait a priori des prises de parole sur les programmes. On pourra s'exprimer sur les programmes, mais à l'occasion de la discussion sur la mission. C'est la raison pour laquelle je souhaite le retrait de l'amendement ; à défaut, je voterai contre.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. J'ai bien entendu les explications du président Arthuis. Ce que nous défendons, ce ne sont pas seulement les droits de l'opposition, ou de la minorité, ce sont les droits de l'ensemble des sénateurs.

Convenez que, sur les titres, nous pouvions intervenir sans limite. Je ne dirai pas que cela permettait des manoeuvres d'obstruction...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce n'était pas toujours constructif !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. En effet !

M. Daniel Raoul. Ce n'était pas toujours constructif, je vous l'accorde, et je peux plaider coupable dans quelques cas !

S'agissant des missions, vous conviendrez que chaque sénateur doit avoir le moyen de s'exprimer. Si vous aviez traduit dans la proposition de résolution la suggestion que vous venez de faire oralement, peut-être notre attitude aurait-elle été différente ce soir.

M. le président. La parole est à M. Alain Lambert, pour explication de vote.

M. Alain Lambert. Je suis sûr que Bernard Frimat et les collègues qui se sont exprimés sont d'une totale bonne foi. Pour autant, je crains qu'ils ne prennent pas en compte la chronologie de la discussion de la loi organique. Au départ, le concept de mission n'existait pas ; nous ne l'avions pas envisagé. C'est Henri Emmanuelli, alors président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui l'a exigé afin qu'il soit possible, sur l'initiative du Parlement, d'opérer des transferts de crédits entre programmes. L'unité de vote a été fixée au niveau de la mission. Aussi, il est logique que ce soit à ce niveau que le débat ait lieu.

En revanche, vous le savez, il sera possible de déposer autant d'amendements que l'on voudra sur les programmes.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Eh oui !

M. Alain Lambert. Quand on sait que tout auteur d'amendement bénéficie de cinq minutes pour le présenter et que nous disposons tous de cinq minutes pour expliquer notre vote, les tentatives d'obstruction risqueraient de faire déraper terriblement la discussion budgétaire. Donc, si votre préoccupation, c'est la possibilité de vous exprimer, je vous dis avec la même bonne foi que celle dont je vous ai crédités que votre amendement n'atteint pas l'objectif que vous visez.

Pour que cette loi organique soit adoptée, nous avons dû nous faire confiance. Continuons dans cette voie, refusons la défiance qui nous ferait sortir du chemin de confiance sur lequel nous nous sommes engagés.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.

M. Philippe Marini. Je voudrais convaincre nos collègues que tout membre de cette assemblée pourra s'exprimer sur tout programme, comme cela vient d'être dit, en exerçant le droit d'amendement.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Evidemment !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Effectivement !

M. Philippe Marini. Ce droit d'amendement sera plus large. En effet, sur un programme, il suffira de suggérer une augmentation, même indicative, qui soit gagée par une diminution sur un autre programme - vous trouverez des méthodes pour y parvenir -, ou de faire l'inverse, pour avoir la possibilité de s'exprimer, ce qui permettra à d'autres collègues d'expliquer leur vote. Donc, même si votre proposition n'est pas retenue, si vous le voulez, si nous le voulons, si l'ensemble de nos collègues le veulent, des débats auront bien lieu sur les programmes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Art. 3
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Art. additionnel avant l'art. 5

Article 4

Dans l'alinéa 1 de l'article 47 bis du même règlement, les mots : « l'article 40 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique » sont remplacés par les mots : « l'article 42 de la loi organique ».  - (Adopté.)

Art. 4
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Art. 5

Article additionnel avant l'article 5

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par MM. Frimat,  Dreyfus-Schmidt,  Massion,  Masseret,  Peyronnet et  Miquel, Mme Bricq, M. Charasse et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article 29 du même Règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ... - Dans les votes émis au sein de la Conférence des présidents sur les propositions qui lui sont soumises par ses membres, il est attribué aux présidents des groupes politiques un nombre de voix égal au nombre des membres de leur groupe après défalcation des autres membres de la Conférence. »  

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Charles Revet. Après avoir entendu autant d'arguments, il pourrait le retirer !

M. Bernard Frimat. Minuit est l'heure du crime ; ce n'est pas forcément l'heure du rêve, cher Charles Revet ! (Sourires.)

Par cet amendement, nous essayons de nous situer dans votre logique, mes chers collègues.

M. le rapporteur nous a dit qu'il ne s'agissait pas de remettre en chantier l'ensemble de notre règlement intérieur, mais, faute de pouvoir nous donner ce soir, au-delà d'assurances dont le procès-verbal fera foi, des renseignements sur l'organisation des discussions budgétaires, il nous renvoie à la conférence des présidents.

Or, l'examen de la composition de la conférence des présidents - loin de nous l'idée de mettre en cause les personnes qui la composent ou de vouloir, d'une quelconque façon, leur enlever la possibilité de s'exprimer dans cette discussion, que nous devinons passionnante, sur l'organisation de la discussion budgétaire ! - fait apparaître une telle distorsion par rapport à la composition politique du Sénat, qu'il nous semble nécessaire de prévoir que ladite conférence, dont vous codifiez les attributions dans le règlement, s'exprime en respectant les poids politiques relatifs de notre assemblée.

C'est la raison pour laquelle, nous inspirant de l'article 48-7 du règlement de l'Assemblée nationale, nous proposons qu'il soit « attribué aux présidents des groupes politiques un nombre de voix égal au nombre des membres de leur groupe après défalcation des autres membres de la conférence ».

Cela ne prive aucun des membres de la conférence des présidents du droit de s'exprimer, mais cela signifie que, au moment où la conférence des présidents s'apprêtera à prendre une décision, celle-ci pourra être prise conformément à la réalité politique de notre assemblée.

J'entends, depuis tout à l'heure, avec beaucoup d'intérêt, tout ce que vous avez dit, les uns et les autres, sur la nécessité de faire participer l'ensemble des sénateurs et, donc, de respecter l'opposition.

Or, dans la commission au sein de laquelle je siège, les possibilités d'accroître le rôle de l'opposition sont infinies, puisqu'aucun rapport, sur quelque sujet que ce soit, n'est confié à cette dernière ! Nous avons, certes, la grande satisfaction juridique d'avoir devant nous des espaces de progression infinis, mais nous avons aussi le sentiment désagréable d'être dans une commission, à savoir la commission des lois, dont la conception du pluralisme et du respect de l'opposition nous est totalement étrangère.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Une fois encore, il s'agit d'un amendement intéressant.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. M. le rapporteur, trouve tout intéressant, ce soir !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'attribuer aux présidents des groupes politiques, au sein de la conférence des présidents, un nombre de voix égal au nombre des membres de leur groupe après défalcation des autres membres de ladite conférence. Il tend, en fait, à la reprise d'une pratique qui a cours à l'Assemblée nationale. Au demeurant, il pose un problème en ce qui concerne notre assemblée.

Tout d'abord, en effet, cet amendement dépasse largement l'objet de la présente réforme puisqu'il concerne l'ensemble des décisions prises par la conférence des présidents.

Ensuite, il ne semble pas souhaitable de transposer au Sénat le dispositif retenu par l'article 48-7 du règlement de l'Assemblée nationale, et ce au moins pour deux raisons.

En premier lieu, les décisions prises au sein de la conférence des présidents sont marquées au Sénat par la recherche d'un consensus. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Robert Bret. C'est un scoop !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Attribuer aux présidents des groupes politiques un nombre de voix égal au nombre des membres de leur groupe reviendrait à remettre en cause cette logique de la recherche du consensus au profit d'une logique de vote entre majorité et opposition qui, à mon avis, n'améliorerait pas la situation de l'opposition.

En second lieu, les présidents de commission défendent, au sein de la conférence des présidents, les intérêts de leur commission, qui sont parfois différents de ceux de leur groupe.

Cet amendement aurait pour conséquence de remettre en cause l'équilibre actuel.

Aussi, sans être tout à fait hostile à cette proposition, j'estime que la concertation n'est pas encore mûre sur cette question et qu'elle doit se poursuivre.

C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Frimat, votre amendement est-il maintenu ?

M. Bernard Frimat. Je crains, monsieur le président, que mes réponses du mercredi ne soient aussi monotones que mes réponses du mardi ! (Sourires.)

Je maintiens évidemment cet amendement. Je suis sensible aux efforts de M. le rapporteur pour trouver nos propositions intéressantes. Je sens le drame intérieur qu'il vit à ne pas pouvoir nous donner satisfaction, et j'espère que la soirée ne se prolongera pas trop afin que la tension qu'il subit ne devienne pas intolérable. (Nouveaux sourires.)

Il nous a dit que nous avions raison : dont acte ; mais qu'il ne pouvait accéder à notre demande : dont acte !

Nous connaissons tous la composition de la conférence des présidents : Mme Nicole Borvo Cohen-Seat y siège en tant que présidente de son groupe ; quatre représentants de l'opposition actuelle y participent également, ce qui est peu par rapport au nombre impressionnant de représentants de la majorité.

Ce n'est donc pas une instance de consensus. D'ailleurs, contrairement à ce que vous faites semblant de croire, notre assemblée ne fonctionne pas sur le mode du consensus. Comme je l'ai démontré pour la commission des lois, elle pratique, de manière générale, l'abus de position dominante, attitude que nous dénonçons vigoureusement. Nous refuserons toujours de voir un consensus dans ce qui n'est que la concession de miettes de démocratie. (M. Marini et M. le président de la commission des lois protestent.)

Je maintiens cet amendement, parce que cette petite tentative d'instaurer une plus grande équité ne privera personne de la parole, ne privera aucun président de commission de dire ce qu'il a à dire. Je sais bien que la majorité absolue n'est plus garantie à un seul groupe, mais trouver une majorité ne doit pas être insurmontable pour vous, mes chers collègues, si nous en croyons des événements récents... (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je ne vois pas ce que cela changerait au résultat !

M. Philippe Marini. Cela ferait plus de voix au groupe UMP !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je vais voter pour cet amendement.

Monsieur le rapporteur, vous conviendrez que, malgré les bonnes paroles que vous prenez soin de tenir sur chaque amendement,...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Excellentes paroles !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ...vos propos augurent mal d'un consensus futur sur une réforme du règlement.

En effet, affirmer que les décisions de la conférence des présidents sont obtenues par consensus...

M. Patrice Gélard, rapporteur. Par la recherche du consensus !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ...plutôt que par votes, c'est une vue de l'esprit.

Dois-je rappeler une fois encore que la majorité sénatoriale s'est absolument refusée à ce que les membres de l'opposition disposent du droit d'initiative parlementaire, comme c'est le cas à l'Assemblée nationale ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ils en disposent ! Ils en abusent !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'était lors de l'examen d'une précédente réforme éventuelle de notre règlement.

Je tiens à signaler, pour illustrer ce prétendu consensus, que, au cours des deux dernières séances mensuelles consacrées à l'ordre du jour réservé, aucune proposition émanant de l'opposition n'a été prise en compte.

Comment peut-on parler de consensus dans ces conditions ? Il faudrait au moins que l'opposition puisse défendre en toute liberté des propositions de loi !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est autre chose !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je crois donc que nous aurons beaucoup de mal à nous mettre d'accord sur une réforme du règlement qui irait dans le sens d'un renforcement des droits de l'opposition.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel avant l'art. 5
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Art. 6

Article 5

Après l'article 47 bis du même règlement, il est inséré un article 47 bis-1 ainsi rédigé :

« Article 47 bis-1 .- Pour l'application des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances, la Conférence des présidents fixe, sur la proposition de la commission des Finances, les modalités particulières d'organisation de la discussion de la loi de finances de l'année. »

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour insérer un article 47 bis-1 dans le Règlement du Sénat, après les mots :

de la discussion

insérer les mots :

générale en séance publique

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Par cet amendement, nous souhaitons nous assurer que la conférence des présidents accorde dans ses décisions, et après examen des propositions de la commission des finances, toute son importance à la discussion en séance publique des crédits de chacune des missions budgétaires.

Les droits de la minorité, comme la faculté de présenter toute observation sur l'utilisation des deniers publics, doivent être préservés grâce à une organisation des travaux qui réponde au souci d'en permettre la plus nette expression.

Nous ne voulons pas que la discussion en séance publique se réduise comme peau de chagrin ; nous souhaitons au contraire qu'elle continue de permettre à tous les sénateurs qui le souhaitent de s'exprimer publiquement de plein droit.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. L'article 29 bis du règlement du Sénat donne d'ores et déjà compétence à la conférence des présidents pour organiser la discussion générale des textes soumis au Sénat et fixer, dans le cadre des séances prévues à l'ordre du jour, la durée globale du temps dont disposeront les orateurs des divers groupes ne figurant sur la liste d'aucun groupe. Il est donc inutile de prévoir une disposition spécifique pour les lois de finances.

L'adoption de cet amendement aurait pour conséquence de remettre en cause la pratique actuelle d'une organisation par la conférence des présidents des modalités particulières de discussion des articles de la loi de finances. Or il importe de rendre plus vivants les débats sur la loi de finances, sous peine de conforter la maxime d'Edgar Faure qu'Alain Lambert a citée tout à l'heure : « Liturgie, litanie, léthargie ».

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par MM. Charasse,  Frimat,  Massion,  Dreyfus-Schmidt,  Masseret,  Peyronnet et  Miquel, Mme Bricq et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter in fine le texte proposé par cet article pour insérer un article 47 bis-1 dans le Règlement du Sénat par les mots :

« , sous réserve des dispositions de l'article 48 de la Constitution ».

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Je serai très bref, monsieur le président. En effet, le premier signataire de cet amendement est Michel Charasse. Or chacun sait, dans cette assemblée, qu'on ne remplace pas Michel Charasse ! (Sourires.) Je me contenterai donc de préciser l'esprit de cet amendement.

La volonté de la majorité sénatoriale étant de codifier la pratique actuelle et de donner à la conférence des présidents le pouvoir réglementaire d'organiser la discussion budgétaire, Michel Charasse et le groupe socialiste souhaitent rappeler, même si cela peut sembler superfétatoire - cela va toujours mieux en le disant ! -, que ce pouvoir s'exerce sous réserve des dispositions de l'article 48 de la Constitution. Nous souhaitons en effet que cette précision fonctionne comme un rappel permanent pour ceux qui auront à organiser la discussion budgétaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement est totalement inutile !

M. Patrice Gélard, rapporteur. L'article 48 de la Constitution s'impose quoi qu'il arrive : il n'est pas besoin de le répéter.

C'est la raison pour laquelle je vous prie, monsieur Frimat, de bien vouloir retirer cet amendement. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Frimat, l'amendement n° 2 est-il maintenu ?

M. Bernard Frimat. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Art. 5
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Art. 7

Article 6

Dans le dernier alinéa (alinéa 5) de l'article 47 quater du même règlement, les mots : « l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique » sont remplacés par les mots : « la loi organique ».  - (Adopté.)

Art. 6
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 7

Les modifications apportées au règlement du Sénat par la présente résolution ne s'appliquent pas à l'examen des lois de finances afférentes aux années 2004 et 2005.  - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

Art. 7
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix les conclusions de la commission des lois sur la proposition de résolution n° 296, je donne la parole à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.

M. Bernard Frimat. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je serai très bref.

Nous avons exprimé au cours de la discussion générale le sentiment de notre groupe. Nous avons présenté des amendements pour essayer de parvenir à un accord, vous les avez tous refusés. Nous vous avons demandé des garanties, vous nous les avez refusées.

Il ne s'agit pas ce soir de voter la loi organique relative aux lois de finances, que nous revendiquons, il s'agit de voter une proposition de résolution tendant à modifier le règlement intérieur du Sénat.

Compte tenu de l'accueil que vous avez réservé à nos propositions, en dépit de vos bonnes intentions, nous sommes malheureusement contraints de voter contre votre proposition de résolution, en formant le voeu que, un jour, le règlement intérieur puisse s'ouvrir à un soupçon de démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix les conclusions du rapport de la commission des lois sur la proposition de résolution n° 296.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le groupe CRC vote contre.

(La proposition de résolution est adoptée.)

M. le président. En application de l'article 61, alinéa 1, de la Constitution, cette résolution sera soumise, avant sa mise en application, au Conseil constitutionnel.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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9

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la justice.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 333, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

10

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. André Vallet une proposition de loi modifiant les articles L. 338 et L. 338-1 et instituant un article L. 338-2 du Code électoral concernant la mise en place d'un nouveau mode de scrutin pour les élections régionales.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 326, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

J'ai reçu de M. Nicolas About une proposition de loi visant à prolonger la déductibilité de la pension alimentaire versée par un parent séparé ou divorcé pour l'entretien de son enfant lorsque celui-ci devient majeur tout en restant rattaché au foyer fiscal de son autre parent.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 331, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

11

TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant le Fonds de solidarité de l'Union européenne.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2870 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de décision du Conseil relative au respect des conditions fixées à l'article 3 du protocole additionnel à l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la Roumanie, d'autre part, en ce qui concerne une prorogation de la période prévue à l'article 9, paragraphe 4, du protocole n° 2 de l'accord européen.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2871 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition pour un règlement du Conseil portant modification du règlement (CE) n° 1466/97 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2872 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2873 et distribué.

12

DÉPÖT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Pierre Hérisson, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la régulation des activités postales.

Le rapport sera imprimé sous le n° 327 et distribué.

J'ai reçu de M. André Lardeux, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.

Le rapport sera imprimé sous le n° 328 et distribué.

J'ai reçu un rapport déposé par M. Henri Revol, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur le risque épidémique, établi par M. Jean-Pierre Door, député, et Mme Marie-Christine Blandin, sénatrice, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Le rapport sera imprimé sous le n° 332 et distribué.

13

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Jacques Hyest, M. Christian Cointat et M. Simon Sutour, un rapport d'information fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale à la suite d'une mission effectuée en Guadeloupe, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin du 9 au 14 décembre 2004.

Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 329 et distribué.

14

ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui mercredi 11 mai 2005, à quinze heures et le soir :

Discussion du projet de loi (n° 237, 2004-2005) relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif ;

Rapport (n° 293, 2004-2005) fait par M. Bernard Murat, au nom de la commission des affaires culturelles.

Avis (n° 317, 2004-2005) de Mme Sylvie Desmarescaux, fait au nom de la commission des affaires sociales.

Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.

Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.

Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements

Projet de loi organique modifiant la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République (n° 305, 2004-2005) ;

Projet de loi modifiant la loi n° 82 471 du 7 juin 1982 relative à l'assemblée des Français à l'étranger (n° 306, 2004-2005) ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 11 mai 2005, à dix-sept heures ;

Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 11 mai 2005, à seize heures.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 11 mai 2005, à zéro heure vingt.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD