M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, auteur de la question n° 608, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Madame la secrétaire d'Etat, nous avons été nombreux à être interpellés sur les difficultés que rencontrent déjà et que rencontreront demain encore les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés à but non lucratif.
Pour ces établissements, le passage aux 35 heures, que certains ont promis et que d'autres sont obligés de financer, s'est effectué de façon obligatoire, suivant des modalités fixées par des accords agréés par le ministère en 2000, entraînant la suppression de plus de 10 % des heures travaillées.
Les établissements adhérents de la Fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif, la FEHAP, ont donc été dans l'obligation d'embaucher, pour la France entière, 9 000 salariés, dont la rémunération a été assurée pour moitié par les allégements de charges de droit commun, correspondant à 2,5 % de la masse salariale, et pour moitié par un blocage des salaires des personnels, qui ont connu une minoration d'environ 2,5 % par rapport à ceux de la fonction publique hospitalière.
Or, en 2005, la suppression des allégements de charges et le souhait, bien compréhensible, que les salaires soient remis à niveau semblent ne pas devoir permettre le maintien des 9 000 postes créés en raison du passage aux 35 heures. La qualité des soins et des services au sein du secteur hospitalier privé à but non lucratif va s'en trouver gravement dépréciée.
Comme vous le savez, madame la secrétaire d'Etat, la Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2004 relatif à la sécurité sociale, avait elle aussi examiné l'assiette des cotisations maladie et famille dues par l'Etat pour les agents des trois fonctions publiques ; il apparaissait que les employeurs publics ne cotisaient pas à parité avec les employeurs privés. Or de nouvelles réformes vont être mises en place, notamment la tarification à l'activité - nous la souhaitons vivement -, qui aura bien évidemment pour conséquence l'instauration d'un tarif unique par pathologie, quel que soit le statut des établissements. Une distorsion de concurrence supplémentaire risque donc d'apparaître entre les deux types d'établissements.
C'est la raison pour laquelle nous souhaiterions savoir, madame la secrétaire d'Etat, quelles initiatives, quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour assurer au mieux la survie des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, dont nous connaissons tous l'importance pour la vie de nos communes.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Madame le sénateur, vous appelez l'attention du ministre des solidarités, de la santé et de la famille sur les difficultés particulières que rencontrent les établissements privés à but non lucratif du fait de la fin de la compensation des aides incitatives relatives à la réduction du temps de travail.
Les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés à but non lucratif ont bénéficié durant cinq années du dispositif d'aides incitatives qui avait été prévu dans la loi du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail comme contrepartie au financement de la création des emplois découlant de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail. Il n'est pas envisagé, madame le sénateur, de pérenniser ce dispositif, qui, en raison de la charge considérable que représentait le coût de la réduction du temps de travail et de ses conséquences en matière d'embauche, a été conçu, vous le savez, pour être transitoire.
Il s'agit maintenant de décider de l'accompagnement de ces établissements à la sortie des dispositifs spécifiques. Une étude a donc été menée par les services du ministère de la santé, en liaison avec les fédérations représentatives des établissements, afin de dresser un bilan de la situation et d'évaluer de manière extrêmement rigoureuse les besoins.
En ce qui concerne le secteur sanitaire, compte tenu à la fois du rôle joué par les établissements de santé privés à but non lucratif dans l'offre de soins et des difficultés budgétaires qu'ils rencontrent, notamment dans les activités de court séjour, il a été décidé de mettre en place un dispositif de soutien pour l'année 2005. Ce dispositif s'inscrira dans le passage progressif à la tarification à l'activité - vous l'avez évoquée, madame -, qui exigera de la part de certains établissements, qu'ils soient publics ou privés, d'importants efforts d'adaptation, d'importants efforts de productivité. Lors de l'élaboration de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et de l'évaluation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, des crédits reconductibles ont été réservés à ce titre sur la marge dégagée par le taux de progression de l'ondam.
Des mesures de financement spécifiques contribueront, le cas échéant, au redressement de la situation budgétaire des établissements qui se heurtent aux plus grandes difficultés, avec l'aide des agences régionales de l'hospitalisation. Un recensement précis des difficultés rencontrées par les établissements de santé privés à but non lucratif a donc été réalisé : il a déjà donné lieu en 2004 à des délégations de crédits exceptionnels, au cas par cas, dans le cadre de contrats de retour à l'équilibre.
Enfin, un dossier préparé par les services du ministère de la santé doit être très prochainement remis au Conseil de l'hospitalisation, qui formulera, dans le courant du mois de janvier, des recommandations sur l'objectif des dépenses d'assurance maladie commun aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie, et sur les montants régionaux des dotations annuelles complémentaires.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse. Il serait cependant souhaitable que l'étude en cours de réalisation trouve très rapidement sa conclusion et que les soutiens financiers que vous avez annoncés soient pérennisés pour un certain nombre d'années : sans cela, c'est l'ensemble des établissements du territoire qui connaîtra les difficultés actuelles.
mise hors d'usage des chaudières dravo
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, auteur de la question n° 590, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
Mme Marie-Christine Blandin. De 1956 à 1976, l'entreprise Alsthom Stein Sie, basée à Lys-Lez-Lannoy, près de Roubaix, a produit chaque année plus de 1 000 chaudières de type Dravo. Ces appareils à usage de chauffage collectif ont été largement disséminés sur l'ensemble du territoire, en particulier dans les lieux collectifs - salles de sports, salles de spectacles, églises - et sont toujours en usage.
Les fiches techniques de fabrication de ces chaudières révèlent la présence de plaques, de fibres et de cordons en amiante. Leur fonctionnement diffuse en moyenne trois à quatre fibres d'amiante par heure, alors que la norme en cours est fixée à une fibre par vingt-quatre heures.
Ces informations, qui constituent une alerte, relèvent de votre compétence en matière de santé publique, madame la secrétaire d'Etat. Il me serait donc agréable que vous puissiez nous informer des conditions dans lesquelles vos services pourraient procéder en urgence au recensement des chaudières Dravo encore en fonctionnement, les localiser précisément et prévoir leur mise hors d'usage.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Madame le sénateur, les équipements, notamment les équipements de chauffage, contenant de l'amiante sont très nombreux, de même que les matériaux utilisés jusqu'à une époque récente dans l'aménagement des locaux.
L'approche que vous préconisez, madame le sénateur, est celle que pensaient adopter les services du ministère de la santé lorsque le Conseil supérieur d'hygiène publique de France avait attiré leur attention sur la nécessité de se préoccuper de l'état de conservation et du devenir de l'amiante présent dans les bâtiments.
Une étude portant sur les matériaux avait alors été entreprise pour étudier la faisabilité et la rentabilité d'une telle démarche. Elle avait démontré qu'il était illusoire de vouloir identifier un nombre significatif de locaux concernés à partir des données fournies par les constructeurs ou par les entreprises. C'est la raison pour laquelle la réglementation adoptée pour protéger le public d'une exposition à l'amiante dans les immeubles bâtis - je me réfère au décret n° 96-97 modifié - a prévu que les propriétaires fassent un inventaire des matériaux et des équipements concernés et, en présence de matériaux friables dégradés, procèdent à des travaux ainsi qu'à la surveillance des matériaux restant en place.
Cette réglementation a procédé par étapes, s'attachant d'abord aux matériaux présentant les plus grands risques d'émission de fibres d'amiante dans l'air intérieur des locaux. Dans la mesure où il a été insisté sur les matériaux de calorifugeage, il est clair que les installations de chauffage ont fait l'objet d'une attention particulière. Les services du ministère de la santé ont confié au Centre scientifique et technique du bâtiment l'évaluation de la réglementation qui permettra d'analyser ce point.
En outre, les ministères concernés mettront l'accent sur l'information du public, en particulier sur celle des bricoleurs, ainsi que sur la compétence des diagnostiqueurs, notamment en matière de conseil des propriétaires.
Dans cette attente, le ministre de la santé n'est pas favorable à ce que l'on attire l'attention sur un équipement particulier, en l'occurrence sur les chaudières de type Dravo que vous venez d'évoquer, madame le sénateur, dans la mesure où, d'une part, nous ne disposons pas d'argument qui permette de considérer qu'ils présentent une dangerosité particulière et où, d'autre part, une telle démarche pourrait conduire à détourner d'autres équipements qui seraient tout aussi dangereux, voire davantage, l'attention des techniciens habilités à ce genre de recherche.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Les arguments à invoquer sont simples : des ouvriers sont déjà décédés ; les autres viennent d'être admis, par M. Larcher, à figurer dans le protocole des personnes exposées à l'amiante.
Je précise qu'il n'est pas question ici de matériaux inertes ou en train de se dégrader : il s'agit de véritables souffleries, très puissantes, de fibres d'amiante. Les lieux concernés sont des locaux immenses ; je pense aux locaux que vous avez tous fréquentés à l'occasion de foires-expositions ou aux églises qui ne sont chauffées que quelques heures par semaine ou quelques jours dans l'année.
Je le répète, ce sont de véritables souffleries à amiante. Ne pas vouloir s'en préoccuper me semble quelque peu étrange.
tarification des actes médicaux à la réunion
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 598, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma question concerne les graves difficultés auxquelles sont confrontés aujourd'hui les spécialistes du secteur privé de la Réunion.
Les professionnels médicaux libéraux, en particulier les chirurgiens et les anesthésistes-réanimateurs, y connaissent en effet un surhandicap par rapport à leurs collègues métropolitains, car, outre-mer, ils sont confrontés à des difficultés professionnelles plus importantes : rareté et coût de la main-d'oeuvre, notamment spécialisée ; limitation géographique et démographique du volume d'activité ; coût de l'immobilier professionnel ; coût des fournitures et consommables ; difficulté d'accès à la formation post-universitaire.
Par ailleurs, à la Réunion, les actes C, CS et B font conventionnellement l'objet d'une surrémunération, alors que les actes techniques, affectés des lettres K, KC, Z, sont cotés à la même valeur qu'en métropole, ce qui se révèle totalement inadapté et injuste compte tenu des surcoûts de main-d'oeuvre spécialisée déjà évoqués. Il en résulte une forte érosion des revenus bruts des chirurgiens et un certain déséquilibre, car la fonction publique hospitalière, elle, bénéficie d'un indice de majoration de salaire.
Cette situation est encore aggravée par la difficulté qu'éprouvent les praticiens réunionnais à contracter une assurance en responsabilité civile professionnelle.
Cet état de fait contribue lourdement à la désaffection à l'égard de l'exercice libéral dans les départements d'outre-mer. Aujourd'hui, l'exercice libéral de la chirurgie, notamment de la chirurgie générale, ne recrute plus, et nombreux sont les praticiens qui démissionnent pour travailler dans le secteur public, plus attractif. Les anesthésistes, qui se trouvent dans la même situation et sont en proie aux mêmes difficultés depuis longtemps, font de même.
Aussi les établissements privés de soin sont-ils menacés de désertification médicale. Cette tendance, qui est perceptible à l'échelon national, présente une acuité toute particulière à la Réunion.
Dans ce contexte difficile, le nouveau système de rémunération des actes médicaux intégré au plan Hôpital 2007 devrait, grâce à la mise en place de la classification commune des actes médiaux et à la tarification à l'activité, permettre de pallier partiellement l'absence de revalorisation, ces quinze dernières années, des actes techniques et chirurgicaux des spécialistes ainsi que l'inégalité de ressources entre les spécialités.
Toutefois, madame la secrétaire d'Etat, ce nouveau dispositif présente l'inconvénient majeur de ne prévoir aucune indexation des tarifs pour les DOM. Il n'est pas juste que les cabinets de spécialités, véritables micro-entreprises de santé, ne bénéficient pas de l'indexation de 30 % dont jouissent les établissements publics de soins. En effet, l'essentiel du fondement structurel des surcoûts dans les DOM - achats et charges de personnel - est identique pour l'ensemble des chirurgiens, qu'ils exercent à titre libéral ou dans un établissement public de santé. Une telle inégalité de traitement est donc totalement injustifiée.
C'est pourquoi, aujourd'hui, l'ensemble des spécialistes du secteur privé de la Réunion souhaitent que les actes de chirurgie nouvellement codifiés dans la CCAM, la classification commune des actes médicaux, soient indexés du même coefficient multiplicateur de 1,30, que les actes techniques cotés K soient indexés d'un coefficient multiplicateur de 1,20 à l'égal des actes cotés C et CS, que le MPC annexé au CS soit également indexé de 20 %, les médecins généralistes ayant bénéficié de cette mesure lors de la dernière revalorisation tarifaire des actes C.
Aussi, je vous demande, madame la secrétaire d'Etat, quelles mesures vous envisagez de mettre en oeuvre afin de remédier à cette situation.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Madame le sénateur, vous soulevez la question de l'absence dans la CCAM de tout dispositif de majoration des tarifs qui seront mentionnés dans cette classification pour les médecins spécialistes libéraux exerçant dans les départements d'outre-mer.
Dans la situation actuelle, comme vous l'indiquez, les actes de consultation et de visite sont majorés dans les territoires d'outre-mer. En revanche, les actes techniques inscrits à la nomenclature générale des actes professionnels ne font pas l'objet de majoration.
La convention qui vient d'être signée prévoit la mise en oeuvre prochaine de la CCAM. Comme vous le savez, la loi relative à l'assurance maladie confie désormais à l'UNCAM, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, le soin d'établir la CCAM, après avis notamment de la Haute autorité de santé.
Il revient également à l'UNCAM de négocier avec les syndicats représentatifs de médecins libéraux les tarifs applicables à ces actes.
La négociation conventionnelle sur ce sujet va s'ouvrir. Les syndicats de médecins souhaitent qu'elle se traduise par une revalorisation globale de la rémunération des actes techniques.
Il appartient donc à l'UNCAM et aux syndicats médicaux de trouver par la négociation ce que doit être une juste rémunération de ces actes.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, que je transmettrai aux intéressés.
Il est vraiment nécessaire de supprimer cette inégalité de traitement dans les départements d'outre-mer, d'autant qu'à la Réunion nous ne comptons que cinquante-cinq médecins spécialistes pour 100 000 habitants, ce qui est loin de la moyenne métropolitaine, qui est de quatre-vingt-huit. La différence est grande.
sécurité routière et prise de médicaments
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 566, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, alors que de très nombreux accidents peuvent être imputés en France à la prise de médicaments psychotropes, tranquillisants ou antidépresseurs, il est particulièrement étonnant qu'aujourd'hui encore il n'y ait pas de dépistage systématique des médicaments à risque lors de la survenance d'un accident, ce qui fait que nous ne disposons pas, pour l'heure, de statistiques fiables sur le nombre de Français victimes d'accidents de la route sous l'influence de tels médicaments.
En Belgique, pays proche de ma région, l'Institut pour la sécurité routière a récemment dévoilé que 15,6 % des victimes d'accidents de la route étaient sous l'influence de tranquillisants, d'antidépresseurs ou de somnifères. Aux Etats-Unis, une étude rapporte le chiffre de 20 %.
En Ecosse, une autre étude a conclu que les conducteurs sous médicaments de la classe des benzodiazépines ont davantage d'accidents, jusqu'à quatre fois plus que les autres ; les tranquillisants sont plus concernés que les somnifères et constituent un important facteur d'accidents de la route.
Aux Pays-Bas, une étude a démontré que les consommateurs de certains tranquillisants présentaient pendant les deux premières semaines de traitement un risque d'accident cinq à six fois supérieur à la normale ; il est comparable à celui d'un taux d'alcoolémie de 1 gramme par litre.
Or chacun sait bien que notre pays - il a souvent été dénoncé à ce titre - est le champion du monde en matière de consommation de médicaments psychotropes ; malgré cela aucune statistique scientifique du phénomène n'est réalisée.
De la même manière, la loi du 18 juin 1999 qui réprime la conduite sous l'influence de stupéfiants a écarté l'imputation de prise de médicaments de nature à altérer gravement le comportement du conducteur. Seul un petit pictogramme parfaitement illisible figure sur les boîtes des médicaments concernés.
Au moment où nous assistons à une traque permanente de l'automobiliste sous toutes ses formes, n'y aurait-il pas lieu de l'avertir préventivement des risques qu'il encourt et qu'il fait encourir à d'autres par l'absorption de tels médicaments ?
Dans cette affaire, on a le sentiment que, depuis bien longtemps et pour des raisons obscures, aucune véritable volonté politique ne s'est manifestée pour alerter les Français sur la très grave dangerosité de ces médicaments. Rappelons que le dictionnaire Vidal déconseille la conduite automobile pour cent trente spécialités pharmaceutiques et, parmi celles-ci, figurent douze médicaments de la classe des benzodiazépines qui présentent un risque encore plus élevé au volant. Notre ancienne collègue Marie-Claude Beaudeau, dans une intervention remarquée dans cet hémicycle, affirmait que ces derniers peuvent être à la source de drames familiaux, mais aussi à celle d'une multitude d'accidents de la circulation.
L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, qui autorise la commercialisation des médicaments, devrait engager une grande campagne d'information à destination des praticiens et des Français en attirant leur attention sur la dangerosité au volant des médicaments psychotropes.
Je compte par ailleurs sur M. le ministre de la santé afin que le Parlement puisse très rapidement disposer de statistiques fiables sur le rôle joué par les médicaments psychotropes dans la survenance des accidents de la circulation.
Je l'invite également à user de sa très grande autorité morale afin de mettre solennellement en garde nos compatriotes sur les risques de conduite après la prise de médicaments psychotropes en favorisant, notamment, l'apposition de messages d'alerte plus explicites sur les emballages des médicaments concernés.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, de nombreux médicaments, dont les psychotropes, sont susceptibles de donner lieu à des effets comme la somnolence, la perte de connaissance, les vertiges, les étourdissements, les troubles visuels, les hallucinations, les troubles auditifs, la sensation d'ébriété, avec des modifications du comportement, parfois des idées suicidaires, qui peuvent entraîner des accidents.
S'agissant en particulier des benzodiazépines, la sédation, les troubles amnésiques, la diminution de la concentration et les altérations de la fonction musculaire sont en effet autant de symptômes qui peuvent exercer une influence défavorable sur l'aptitude à conduire des véhicules. Ces effets sont d'autant plus marqués que la dose est importante, qu'il est fait usage simultanément d'alcool ou d'autres produits agissant sur le système nerveux central.
Par ailleurs, les principales maladies neurologiques et psychiatriques s'accompagnent toutes de modifications plus ou moins importantes de la cognition, de la vigilance ou de l'attention.
Depuis la directive européenne du 26 octobre 1983, les effets des médicaments sur la capacité de conduite et l'utilisation de machines sont identifiés dans une rubrique spécifique du résumé des caractéristiques du produit de l'autorisation de mise sur le marché.
La France a été l'un des premiers pays européens à compléter ces mentions par l'application du pictogramme que vous avez évoqué sur les conditionnements, mesure qui a ensuite été reprise par la directive européenne du 6 novembre 2001.
En février 2003, sur proposition du comité interministériel de la sécurité routière, la direction générale de la santé a demandé à l'AFSSAPS, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, d'évaluer la pertinence d'une gradation de ce pictogramme en fonction de la dangerosité des médicaments. Un groupe d'experts constitué par l'AFSSAPS a classé, à partir du profil pharmacodynamique des 5000 spécialités comportant actuellement un pictogramme, les effets potentiels des médicaments sur la conduite selon quatre critères : effets sur la vigilance, sur la vision, sur le comportement, sur l'équilibre et le système cardiovasculaire, etc.
Un sous-groupe d'experts chargé de l'évaluation épidémiologique du risque a étudié les données de pharmacovigilance, les données expérimentales et d'accidentologie publiées à ce jour.
S'agissant de la proportion d'accidents mortels de la circulation liés aux psychotropes, on ne dispose que de données non validées par les experts compte tenu de la difficulté à attribuer la responsabilité de l'événement au médicament ou à quantifier la part prise par le médicament dans la survenance de l'accident.
Une revue de la littérature internationale portant sur les cinq dernières années montre que l'exposition à un médicament potentiellement responsable est retrouvée chez 1 % à 10 % des accidentés de la route. Les benzodiazépines sont les substances les plus fréquemment en cause, mais peu d'autres classes ont été étudiées.
Ce sous-groupe travaille actuellement sur la faisabilité d'études permettant d'évaluer l'exposition aux médicaments des sujets responsables d'accidents et de cerner les familles thérapeutiques les plus fréquemment mises en cause.
Le groupe d'experts a proposé une méthode de gradation du pictogramme allant du niveau 0 - médicaments ne présentant aucun effet identifié - au niveau 3 - danger majeur pour la conduite automobile. Cette gradation se traduira par l'apposition sur le conditionnement d'un pictogramme décliné en trois niveaux de risque, 1 à 3, accompagné de deux phrases courtes précisant le risque encouru et la conduite pratique à tenir.
Le classement dans chacun des grades nécessite l'analyse, pour chaque médicament, du profil pharmacodynamique, de l'évaluation épidémiologique et de données complémentaires telles que le dosage, la voie d'administration, les conditions d'utilisation et de délivrance, les interactions, la pharmacocinétique, les indications.
L'examen des classes représentant a priori le risque potentiel le plus élevé, notamment celle des médicaments du système nerveux central, est en cours et devrait permettre l'apposition du nouveau pictogramme et des messages d'accompagnement sur les conditionnements de ces produits dans le milieu de l'année 2005.
Monsieur le sénateur, la France sera alors le premier pays européen à mettre en place un tel système de gradation du risque.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de ces précisions. Je constate que vous avez pris conscience des difficultés que j'ai évoquées et j'espère que la situation va s'améliorer. Cela allait presque sans dire, mais il valait mieux que nous le redisions ensemble.
difficultés des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux à but non lucratif
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, auteur de la question n° 600, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma question rejoint celle de Mme Hermange : nous avons en effet été nombreux à être saisis des difficultés financières rencontrées par les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux à but non lucratif ; il est vrai que 9 000 emplois sont en suspens.
Il est facile de dire que ces postes n'avaient pas été financés par le gouvernement précédent. En réalité, ces 9 000 emplois étaient nécessaires et les établissements insistent sur le fait qu'ils souhaitent les garder.
Il y a donc une double difficulté : d'une part, un risque social, la disparition éventuelle de ces 9 000 emplois, d'autre part, un risque sanitaire, parce que ces 9 000 emplois sont absolument indispensables.
Madame la secrétaire d'Etat, le financement de ces postes a été aidé pendant cinq années par des allègements de charges. Par ailleurs, il est tout à fait légitime d'aligner le régime de ces salariés sur celui du secteur public.
Les inquiétudes que j'éprouve touchent à la pérennisation des mesures.
Vous nous dites qu'en 2004 des crédits exceptionnels ont été débloqués et que pour 2005 un soutien a été assuré. Mais qu'adviendra-t-il de tout cela dans l'avenir ?
Je crois, pour ma part, légitime d'aider de façon pérenne ces établissements qui travaillent pour l'intérêt général.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, je ne vais pas reprendre les arguments que j'ai exposés tout à l'heure. Quant à la responsabilité du gouvernement précédent, je préfère que ce soit vous qui l'évoquiez plutôt que moi. (Sourires.)
Vous savez comme moi que la loi du 13 juin 1998 comportait un dispositif qui avait un caractère transitoire, ce caractère transitoire découlant du poids financier que représentaient ces mesures.
Par conséquent, aujourd'hui, la question est de savoir comment faire face à ce dispositif et comment en sortir.
J'ai évoqué tout à l'heure, en répondant à Mme Hermange, l'étude qui a été menée par les services du ministère de la santé, en liaison avec les fédérations représentatives des établissements. Il est en effet fondamental de dresser une évaluation de la situation à la fois précise et argumentée, car plusieurs phénomènes peuvent effectivement se cumuler pour aboutir aux difficultés rencontrées.
Par ailleurs, en ce qui concerne le secteur sanitaire, compte tenu du rôle fondamental joué par les établissements de santé privés à but non lucratif et des difficultés budgétaires que ceux-ci rencontrent, en particulier dans les activités de court séjour qui sont lourdement pénalisées, il a été décidé, je le répète, de mettre en place un dispositif de soutien pour l'année 2005.
Ce dispositif de soutien a été défini lors de l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, notamment lors de l'évaluation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Il importe de bien redire ici qu'il s'agit de crédits reconductibles, lesquels ont été réservés à ce titre sur la marge dégagée par le taux de progression de cet objectif.
Par ailleurs, des mesures de financement spécifiques ont dû être trouvées, car les problèmes se sont posés, dès 2004, pour un certain nombre d'établissements. Effectivement, des délégations de crédits exceptionnels ont déjà eu lieu en 2004, au cas par cas, dans le cadre d'un contrat de retour à l'équilibre.
En outre, un dossier préparé par les services du ministère de la santé sera prochainement soumis au Conseil de l'hospitalisation, qui nous transmettra, dès la fin du mois de janvier, ses recommandations sur l'objectif des dépenses d'assurance maladie commun à toutes les activités que j'ai évoquées tout à l'heure et sur les montants régionaux des dotations annuelles.
Comme vous pouvez donc le constater, monsieur le sénateur, nous avons su, dès 2004, remédier par ce moyen à l'urgence de la situation et envisager, par le système des crédits reconductibles, la sortie de ces dispositifs prévus par la loi de 1998.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Madame la secrétaire d'Etat, j'ai bien entendu vos propos et j'en accepte l'augure. Je souhaite toutefois que les conclusions de l'étude demandée soient connues dès la fin du mois de janvier, afin que soient mises en oeuvre très rapidement les mesures proposées.
En effet, c'est un véritable cri d'alarme que lancent les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés à but non lucratif, ce qui prouve l'urgente nécessité de prendre des mesures dans ce domaine.