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nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires culturelles a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. André Vallet membre du conseil d'administration de la société Réseau France Outre-mer.

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Quatrième partie (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la Sécurité sociale pour 2005
Art. additionnels avant l'art. 6

Financement de la sécurité sociale pour 2005

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, adopté par l'Assemblée nationale.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus au titre III.

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ASSURANCE MALADIE

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la Sécurité sociale pour 2005
Art. additionnels avant l'art. 6 ou avant l'art. 11 ou avant l'art. 15 quater

Articles additionnels avant l'article 6

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 145, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles 35 et 36 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie sont abrogés.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Nous vous proposons de supprimer la Haute Autorité de santé, créée cet été par la loi relative à l'assurance maladie.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce sont les fossoyeurs du service de santé !

M. Guy Fischer. Cette nouvelle institution n'a rien d'original : nombreux sont les domaines où des autorités indépendantes dotées de la personnalité juridique sont devenues les dépositaires de l'essentiel du droit dans les domaines entrant dans leur champ de compétences.

Voilà donc une autorité publique supplémentaire, comme il en existe pour les télécommunications, pour l'audiovisuel, ou encore pour l'énergie.

Or l'expérience montre que, si elle permet de suivre avec une extrême précision l'évolution législative et réglementaire du secteur, notamment au regard du droit communautaire, la mise en place d'une autorité publique indépendante ne garantit aucunement le respect des principes de service public, qui sont pourtant inscrits dans notre bloc de constitutionnalité.

L'existence des autorités indépendantes pose avant toute chose une question de droit : elles se trouvent en effet dépositaires d'une partie des pouvoirs normalement conférés à l'exécutif, et leur rôle de régulation les amène bien souvent à imposer des modifications du cadre législatif ou réglementaire. Nous sommes là au coeur du problème !

Comment ne pas interpréter ainsi nombre des initiatives prises, par exemple, par l'Autorité de régulation des télécommunications ? Depuis maintenant huit ans, ses décisions portent des coups réguliers à ce qui constitue encore l'opérateur historique de téléphonie, France Télécom, sans pour autant empêcher les dérives ! Et tout cela se fait évidemment au nom de la régulation du marché, en vertu du principe de libre concurrence, d'une concurrence loyale et sincère.

Quelle est, dès lors, la portée de la mise en place d'une haute autorité de la santé ?

Comment ne pas revenir ici sur la composition du collège de la Haute Autorité de santé telle qu'elle est actuellement prévue : huit membres, désignés par le Président de la République, par les présidents de nos deux assemblées parlementaires et par le président du Conseil économique et social ?

De fait, l'indépendance des décisions de la Haute Autorité de santé ne tiendra qu'à la compétence de ses membres et non à leur mode de désignation, qui est par principe hautement politique.

Le mandat des membres de la Haute Autorité de santé sera exceptionnellement long, plus long d'ailleurs que celui de la plupart des personnalités jouissant du droit de les désigner ; de surcroît, il sera renouvelable.

En réalité, tout est fait pour que la Haute Autorité de santé apporte une forme de caution scientifique aux choix qui seront opérés en matière de protection sociale, singulièrement en matière d'assurance maladie, et qui auront sans doute bien moins à voir avec la science qu'avec la logique comptable !

De plus, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 octroie des compétences supplémentaires à cette institution et la dédouane du contrôle parlementaire.

C'est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, de la supprimer.

M. le président. L'amendement n° 150, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 161-45 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 161-45. - La Haute Autorité de santé dispose de l'autonomie financière. Son budget est arrêté par le collège sur proposition du directeur.

« Les ressources de la Haute Autorité sont constituées notamment par :

« 1° Des subventions de l'Etat ;

« 2° Une dotation globale versée dans des conditions prévues par l'article L. 174-2 ;

« 3° Le produit des redevances pour services rendus, dont les montants sont déterminés sur proposition du directeur par le collège. »

La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. Cet amendement a pour objet d'assurer l'indépendance des instances qui seront désormais regroupées au sein de la Haute Autorité de santé et qui décideront de la commercialisation et du remboursement des médicaments.

Jusqu'à présent, cette structure - je vise ici principalement l'AFSSAPS, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - était financée essentiellement par les laboratoires. En effet, l'examen du budget pour 2003 de l'Agence, tel qu'il est présenté dans son rapport d'activité annuel, permet de constater que les laboratoires lui ont versé 51,8 millions d'euros, alors que ses recettes s'élèvent à 62 millions d'euros.

En d'autres termes, l'Agence, dont on connaît le rôle déterminant dans le processus de mise sur le marché des médicaments, est financée à 90 % par les laboratoires !

Dans le même temps, la subvention de l'Etat ne cesse de diminuer puisque, en 2003, à la suite de la régulation budgétaire, elle n'a atteint que 4,9 millions d'euros, soit moins de 10 % du montant total des recettes.

Signalons au passage, pour être complet, que, ses dépenses s'étant établies à 91 millions d'euros, l'Agence a dû prélever environ 30 millions d'euros dans son fonds de trésorerie. C'est dire que l'Etat ne se soucie guère des modalités de son fonctionnement ni de son financement, alors que, je le répète, elle joue un rôle fondamental en matière de politique du médicament.

On peut donc aisément imaginer que nous souhaitions changer cette situation ! Tel est l'objet de l'amendement n° 150, qui tend à couper les liens financiers entre la Haute Autorité de santé aujourd'hui - hier, c'était l'AFSSAPS -, et les laboratoires, en réorientant vers l'Etat la rétribution que doivent ces derniers afin qu'elle soit reversée sous forme de subventions à la Haute Autorité de santé.

Dès lors qu'une institution dont la vocation est notamment d'évaluer le médicament en vue de sa mise sur le marché grâce à une procédure d'autorisation dépend pour son fonctionnement des firmes pharmaceutiques et non de l'Etat, on imagine aisément qu'il lui sera difficile de prendre en considération la dimension de santé publique de sa mission. Car les attributions de l'AFSSAPS hier, comme demain celles de la Haute Autorité de santé, relèvent non pas seulement d'un service rendu aux industriels, mais aussi d'une mission de service public.

Je le répète, dans un contexte où les firmes pharmaceutiques sont de plus en plus concentrées et puissantes, où la concurrence acharnée les presse d'obtenir le plus rapidement possible la mise sur le marché de leurs produits, le mode de financement actuel n'est pas acceptable.

Nous demandons donc que ces agences, grâce à un financement différent, soient plus indépendantes. Car, lorsque nous les avons créées, nous avons oublié qu'il fallait les rendre indépendantes non pas du seul pouvoir politique, mais aussi du pouvoir des laboratoires pharmaceutiques.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Je souhaite d'abord vous faire part de deux considérations.

Tout d'abord, monsieur Fischer, monsieur Autain, les amendements nos 145 et 150, comme d'ailleurs d'autres amendements que nous aurons à examiner et qui sont de la même veine, tendent à supprimer des mesures qui ont été adoptées dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie.

Vous comprendrez, mes chers collègues, qu'il est pour nous hors de question de revenir sur des dispositions qui ne sont même pas encore entrées en application. Attendez donc d'en constater les effets avant de vous livrer à la critique du fonctionnement des institutions visées ou des modalités de leur financement !

C'est la raison pour laquelle, sur ces amendements comme sur ceux qui ont un objet similaire, j'émettrai un avis défavorable au nom de la commission, et vous m'excuserez par avance si mon propos est alors un peu lapidaire.

Sur les autres amendements, en revanche, je prendrai bien entendu le temps d'expliquer les raisons pour lesquelles la commission ou bien souhaitera entendre l'avis du Gouvernement avant de se prononcer, ou bien émettra un avis favorable, ou bien demandera à leurs auteurs de les retirer.

Ma seconde considération s'adresse davantage au Gouvernement. Il faut veiller, monsieur le secrétaire d'Etat, à ce que la Haute Autorité de santé soit la plus dynamique possible, car nous avons besoin d'aller vite : elle doit faire preuve d'une réelle productivité. En effet, le succès de la réforme dépendra en partie d'elle et la responsabilité qui lui incombe dans le dispositif global est lourde.

Elle sera composée de personnalités indépendantes, aux connaissances scientifiques incontestables et reconnues, dont nous attendons qu'elles contribuent à la mise en application effective de la réforme, dans les meilleures conditions possibles et le plus rapidement possible. Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande de veiller à ce qu'elle dispose des moyens nécessaires pour réaliser un travail aussi rapide qu'efficace.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie. Je reprendrai en partie l'argumentation de M. le rapporteur : si vous souhaitez que la Haute Autorité puisse travailler efficacement et rapidement, il ne faut pas la priver de moyens. S'agissant d'une institution clé qui vise à améliorer la qualité des soins dans notre pays, je pense que tout le monde peut souscrire à cette appréciation et à cette ambition.

Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

Cela étant, monsieur le rapporteur, après avoir exprimé ces avis, je vous indique que nous donnerons droit à votre demande, parce que nous savons pertinemment que le visage définitif de la Haute Autorité s'est dessiné ici même au Sénat,...

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. ...au travers d'un certain nombre d'amendements prévoyant notamment la reprise des missions de l'ANAES, l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, ce qui illustre encore une fois la démarche de qualité qui est la vôtre. Je comprends donc tout à fait votre souci de voir cette Haute Autorité travailler vite et bien.

M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote sur l'amendement n° 145.

M. François Autain. Je voudrais faire observer très amicalement que, si l'argumentation de M. le rapporteur est recevable en ce qui concerne l'amendement n° 145 présenté par M. Fischer, elle ne l'est pas en ce qui concerne le mien. (Rires.)

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et la solidarité ?

M. Roland Muzeau. Il n'y a pas de godillots chez nous !

M. François Autain. Vous essayez d'une façon perfide de semer la zizanie entre nous, mais il n'en est rien,...

M. Roland Muzeau. Vous n'y arriverez pas !

M. François Autain. ... d'autant que les deux amendements ont été défendus ensemble.

L'amendement n° 150 ne visait pas la Haute Autorité en tant que telle - je ne la remettais nullement en question -, mais ses modalités de financement, qui sont exactement les mêmes que celles de l'ancienne Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'AFSSAPS.

Je ne remets donc pas en cause une législation que nous viendrions d'adopter. Mon propos concerne une législation beaucoup plus ancienne, qui date de 1997 : il s'agit de corriger une erreur qui a été faite à cette époque et qui a peut-être conduit à sous-estimer l'influence néfaste que pouvaient avoir les laboratoires pharmaceutiques sur l'indépendance de ces agences.

La situation est grave aujourd'hui, parce que ces agences sont devenues, me semble-t-il, les instruments dociles de ceux qui leur fournissent la majorité de leurs subsides : les laboratoires. C'est tout à fait dommageable pour la mission qui est la leur, qui consiste à tester les médicaments que fabriquent ces laboratoires.

Il y a entre ces agences et les laboratoires un lien financier incestueux, anormal, qu'il faudra un jour ou l'autre couper.

Je voulais profiter de ce débat pour en discuter avec vous, mais, après avoir entendu votre réponse, il me semble que vous n'avez pas compris ce que je voulais dire.

Il faut que vous vous prononciez sur ce lien de dépendance,...

M. Roland Muzeau. Ce serait mieux !

M. François Autain. ... car on ne peut pas être juge et partie.

M. Guy Fischer. Il faut être clair : restera-t-on sous le joug de l'industrie pharmaceutique ?

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 145.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 116, présenté par MM. Desessard, Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est créé, après l'article L. 162-3 du code de la sécurité sociale, un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Le suivi médical d'une affection de longue durée ne donne pas lieu à un paiement à l'acte à chaque consultation du médecin, mais à un paiement forfaitaire dont le montant est déterminé par conventions, dans le cadre du a) du 12° de l'article L. 162-5. ».

L'amendement n° 117, présenté par MM. Desessard, Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa (18°) de l'article L. 1625 du code de la sécurité sociale est supprimé.

La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter ces deux amendements.

Mme Gisèle Printz. L'amendement n° 116 vise à mettre fin au paiement à l'acte dans les cas d'affections de longue durée, ou ALD.

Il convient d'envisager un paiement forfaitaire du suivi médical des affections de longue durée, dont les modalités seront définies par conventionnement. Il faut mettre fin à la dérive des dépenses, due notamment à la majoration de 50 % du tarif de la visite des personnes âgées en affection de longue durée.

En effet, 62 % de l'augmentation des dépenses de soins de ville entre 2000 et 2002 sont dus aux remboursements des patients en ALD.

S'agissant de l'amendement n° 117, les dépassements d'honoraires sont injustifiables, d'autant plus que la mise en oeuvre du médecin référent n'est pas claire. En pratiquant ainsi, on prétend responsabiliser les patients. En réalité, seuls seront touchés ceux qui ont de faibles revenus. A partir de là, toutes les dérives sont possibles. Les praticiens ne seront-ils pas tentés de privilégier les patients qui leur permettent de pratiquer un dépassement d'honoraires ?

De même, les dispositions retenues instaurent une inégalité de traitement entre médecins spécialistes : ceux qui sont autorisés à effectuer des dépassements d'honoraires et ceux qui ne le sont pas.

Il est aussi à craindre que le projet tel qu'il est énoncé ne conduise à une remise en cause de la codification des actes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. S'agissant de l'amendement n° 116, le Gouvernement émet un avis défavorable parce que, en ce qui concerne les personnes en ALD, on vise avant tout à améliorer la qualité des soins et la prise en charge, avec une meilleure coordination.

Cependant, derrière cet amendement se profile l'idée sous-jacente de la remise en cause de l'un des piliers de l'exercice libéral de la médecine : la tarification à l'acte. Cela a au moins le mérite de la clarté de la part du groupe socialiste, mais nous ne pouvons en aucun cas souscrire à cette vision du système de santé.

Nous pensons pour notre part, que nous pouvons à la fois garantir à la fois l'avenir de notre système de santé et l'exercice libéral de la médecine.

En ce qui concerne l'amendement n° 117, le Gouvernement émet également un avis défavorable, dans la mesure où la coordination des soins qui sera mise en place grâce à la réforme permettra de répondre à toutes les demandes en ce sens.

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote sur l'amendement n° 116.

M. Bernard Cazeau. Monsieur le secrétaire d'Etat, les deux piliers sur lesquels repose la médecine libérale sont la liberté de choix et la liberté de prescription - que l'on réduit d'ailleurs en ce moment - et non le paiement à l'acte. Le paiement à l'acte n'a jamais fait partie des principes fondamentaux de la médecine libérale, d'autant que nous connaissons déjà quelques entorses en la matière avec le tiers payant.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 116.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 117.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 14 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 162-5-14 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-5-15 ainsi rédigé :

« Art. L. 162-5-15. - Les médecins mentionnés à l'article L. 6155-1 du code de la santé publique ainsi que les médecins salariés d'un centre de santé mentionné à l'article L. 6323-1 du même code sont identifiés par un numéro personnel distinct du numéro identifiant la structure où ils exercent leur activité.

« Ce numéro d'identification figure obligatoirement sur les documents établis en application de l'article L. 161-33 et transmis aux caisses d'assurance maladie en vue du remboursement ou de la prise en charge des soins qu'ils dispensent. »

La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet amendement tend à procéder à l'identification des médecins hospitaliers.

Dans le cadre de la mise en place en 2005 de plusieurs dispositions introduites par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie - le médecin traitant, la participation forfaitaire d'un euro, le dossier médical partagé, la montée en charge de certains projets tels que la tarification d'activités -, il nous est apparu indispensable d'identifier précisément les praticiens hospitaliers.

Or, actuellement, il faut savoir que les organismes d'assurance maladie n'ont aucun moyen de repérer personnellement ces praticiens, puisque les documents qu'ils reçoivent de ces derniers ne permettent que l'identification de l'établissement ou du centre de santé par le numéro du fichier national des établissements sanitaires et sociaux, le FINESS, inscrit sur le protocole inter-régime d'examen spécial, le PIRES, et par le cachet de l'établissement sur les autres imprimés.

Par conséquent, pour faciliter la mise en place des outils de régulation contenus dans la loi du 13 août 2004, une disposition a été introduite dans la loi relative à l'assurance maladie qui permet, en ce qui concerne les arrêts de travail, les prescriptions et les soins de longue durée, d'effectuer des contrôles aussi bien en médecine de ville qu'à l'hôpital.

Afin d'accélérer la mise en place de ces outils de régulation, il nous est apparu opportun de prévoir une identification personnelle et précise des professionnels de santé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Je comprends tout à fait la motivation de M. le rapporteur, et je considère que cet amendement important apporte des précisions en ce qui concerne l'application de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.

Si l'on choisit un médecin traitant à l'hôpital, il importe de pouvoir l'identifier, mais cette mesure concourt aussi - c'est un point important - à la mise en place d'outils identiques en médecine de ville et à l'hôpital.

Cette préoccupation n'est pas tout à fait nouvelle, puisqu'un arrêté de 1998 a déjà introduit cette nécessité d'identification, en médecine de ville comme à l'hôpital.

Cela étant, monsieur le rapporteur, il me semble important, sur un tel sujet, que l'on puisse mener une concertation d'envergure avec l'ensemble des praticiens concernés, car s'ils ont bien compris quel était le sens de la réforme, s'ils ont bien compris que les mêmes problèmes d'identification se posaient à l'hôpital, il n'en reste pas moins qu'il faut mener préalablement cette concertation, car un dispositif juridique existe déjà aujourd'hui qui permettrait, à mon sens, de répondre à votre préoccupation.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, contre l'amendement.

M. Bernard Cazeau. Je disais tout à l'heure qu'il y a actuellement une belle pagaille chez les praticiens hospitaliers. Avec son amendement, M. Vasselle n'est pas prêt d'arranger la situation !

Les médecins, qu'ils soient hospitaliers ou non, ont un numéro qui leur est attribué par le Conseil de l'ordre. Il faudrait savoir pourquoi ce numéro ne pourrait pas servir dans le cadre de l'hôpital, car il est valable, y compris pour les praticiens hospitaliers ! Ces derniers ont aussi un numéro d'inscription, qu'ils apposent éventuellement sur leur ordonnancier. Le dispositif proposé paraît donc redondant.

Par ailleurs, on sait très bien que, dans les hôpitaux, c'est souvent l'interne qui rédige les ordonnances. S'il n'est pas docteur en médecine - ce n'est pas obligatoirement le cas s'il n'a pas passé sa thèse -, quel numéro va-t-il inscrire sur l'ordonnance ?

Enfin, cette disposition semble prise dans un but de « flicage », il faut le dire ! D'ailleurs, M. le secrétaire d'Etat a bien senti qu'un tel amendement allait provoquer une tempête, puisqu'il a proposé de mener une concertation avec les praticiens concernés.

Mais je voudrais bien savoir comment on va procéder pour déterminer qui fait quoi et vérifier les montants respectifs des prescriptions de médicaments effectuées par les praticiens hospitaliers, alors que les caisses d'assurance maladie, me dit-on, n'ont aucun moyen de repérer les praticiens : elles ne font que payer ! Tout cela me paraît surréaliste et, franchement, je ne comprends pas.

Il me semble préférable de revoir ce problème dans un autre cadre, après concertation avec l'ensemble de la profession.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

M. Gilbert Barbier. Nous abordons effectivement un sujet très important qui va soulever un tollé général dans les hôpitaux.

Depuis quelque temps, il semble que les praticiens hospitaliers servent de têtes de Turc !

M. Guy Fischer. Pour une fois, nous sommes d'accord !

M. Gilbert Barbier. Oui ! Il faut bien voir comment les choses se passent à l'hôpital, et j'ai de l'expérience en la matière.

M. Cazeau le disait, on peut parfaitement identifier les prescriptions qui y sont faites. En effet, aucune ordonnance ne sort de l'hôpital sans que le nom du chef de service figure à gauche de l'en-tête. Ce dernier est responsable de toutes les prescriptions qui sont faites, que ce soit en matière de transport ou de médicaments.

Certes, il n'est pas dans son service vingt-quatre heures sur vingt-quatre : si nous savons que les trente-cinq heures, dont nous nous avons parlé tout à l'heure, ne correspondent à rien pour les médecins des hôpitaux, nous ne pouvons tout de même pas demander à ces derniers d'être présents en permanence !

Des ordonnances sont donc délivrées par des internes, par des « faisant fonction d'internes » - car, souvent, dans les hôpitaux généraux, il n'y a plus d'internes dans les services - et par des chefs de clinique qui n'ont pas, tous, passé leur thèse.

Avec cet amendement, vous allez faire endosser aux médecins hospitaliers une responsabilité civile et pénale considérable ! Dans cette affaire, le minimum serait, je crois, de mener au préalable une concertation avec eux, comme l'a souhaité M. le secrétaire d'Etat.

Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'abus dans les prescriptions, mais encore faudrait-il le démontrer, car vous savez comment les choses se passent dans les services d'urgence.

C'est un bulldozer que vous utilisez pour renverser le « mur » de l'hôpital dont parlait M. Spaeth ! (Non ! sur les travées de l'UMP.) Si ! Il s'agit d'un point capital, et je vous promets qu'à la suite de cette affaire les praticiens hospitaliers auront du mal à venir s'asseoir autour d'une table pour discuter !

Personnellement, je ne conteste pas la nécessité d'un contrôle, mais je souhaite qu'on réexamine une telle possibilité et qu'on ne l'instaure pas par le biais de cet amendement, qui a été examiné très rapidement en commission des affaires sociales.

Je dis ma parfaite opposition à cette façon de faire. On parle de concertation, de discussions, mais, depuis quelque temps, on tape - si vous me permettez l'expression - sur les praticiens hospitaliers d'une manière inadmissible.

A ce propos, je précise que notre collègue le professeur Jean-Claude Etienne, qui ne peut pas être présent en cet instant, m'a demandé d'intervenir aussi en son nom.

M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.

M. François Autain. Effectivement, pour aborder un problème comme celui-là, surtout quand on est un représentant de la majorité, je crois qu'il faut éviter d'agir par la voie d'un amendement, laquelle apparaît inévitablement comme une méthode brutale risquant de créer beaucoup plus de problèmes qu'elle n'en résoudra.

Je comprends bien ce que notre rapporteur, M. Vasselle, a derrière la tête : il s'agit de tenter de contrôler les prescriptions des médecins hospitaliers, qui sont considérables, je suis d'accord avec lui, puisqu'elles représentent 20 % de l'enveloppe des soins de ville.

Toutefois, à la différence, peut-être, de mes collègues, je ferai une distinction entre les praticiens hospitaliers qui exercent dans le cadre de leur activité hospitalière salariale et ceux qui exercent dans le cadre de leur consultation privée, car ces derniers peuvent être considérés comme des médecins libéraux et donc être soumis aux mêmes règles.

Mais il serait encore plus simple d'éviter - vous en avez parlé en évoquant le problème des agrégats - de créer des enveloppes, d'autant qu'on s'aperçoit que la frontière entre ces enveloppes est forcément poreuse. Il est vain, je crois, de vouloir séparer soins de ville et soins à l'hôpital. Il serait préférable d'agir sur les prescriptions hospitalières à travers non pas les prescripteurs, mais les producteurs de médicaments.

Cette voie, quelque peu détournée, me direz-vous, me permet d'aborder la question de la rétrocession hospitalière. Je crois, en effet, que l'on ne résoudra pas ce problème seulement par la prescription.

Je dois reconnaître que le Gouvernement a fait un effort dans ce domaine, puisqu'un amendement provisoire a été publié au mois de juin et que l'on attend un amendement définitif au mois de décembre. Mais il est certain que, si l'on parvenait à diminuer le prix exorbitant des médicaments - à l'hôpital, les nouveautés sont utilisées à l'abri de toute réglementation, puisqu'elles ne sont pas distribuées en officine -, nous ferions un pas vers la réduction de cette part de 20 % qui vous pose problème, monsieur le rapporteur, ce que je comprends très bien.

Il faut savoir - et j'en terminerait par là -, qu'en 1983 la réserve hospitalière, c'est-à-dire les médicaments prescrits à l'hôpital, a augmenté de 30 % en trois ans, puisque cette dépense est passée de 600 millions d'euros à 1,3 milliard d'euros. A cette cadence-là, il est évident que les finances de la sécurité sociale ne suffiront plus ! Par conséquent, je vous demande d'agir au niveau non plus des prescripteurs, mais des producteurs de médicaments, c'est-à-dire des firmes pharmaceutiques.

M. Guy Fischer. Voilà !

M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour explication de vote.

M. Dominique Leclerc. A ce stade du débat, je pense que le président de la commission des affaires sociales voudra sans doute intervenir. (M. le président de la commission des affaires sociales fait un signe d'assentiment.) Cet amendement a en effet été examiné en commission, certes rapidement, mais néanmoins sur le fond.

M. François Autain. C'est un bien grand mot !

M. Dominique Leclerc. Je suis étonné des amalgames qui sont pratiqués !

Derrière la prescription, nous posons avant tout le problème de la responsabilité médicale. N'étant pas moi-même médecin, je ne me permettrai pas certaines remarques que seuls ceux qui ont ce diplôme pourraient faire. Toutefois, les prescriptions des médecins, le pharmacien que je suis les subit professionnellement. Et je considère qu'il est inconcevable qu'elles soient anonymes, surtout quand elle vont à l'encontre des grandes règles de la politique de santé que nous sommes en train d'élaborer.

Certains d'entre vous font des médicaments génériques le « sauveur » de la sécurité sociale. Certes, il en faut, mais vers qui vous retournerez-vous, quand ils sont systématiquement rejetés par les médecins hospitaliers, si les prescriptions sont illisibles et anonymes ? La presse dénonce certains abus aujourd'hui, mais vers qui vous retournerez-vous, en cas de falsification d'ordonnances, si le praticien ne peut être identifié ?

On ne peut pas exiger l'application de règles à certains praticiens et non à d'autres ! La responsabilité médicale qui est derrière la prescription ne peut pas être anonyme, d'autant que, dans un service, il y a toujours un médecin responsable, ...

M. Dominique Leclerc. ... même lorsque des intervenants paramédicaux se permettent de rédiger des ordonnances. Par conséquent, je crois que notre rapporteur a raison.

Je rejoins totalement notre collègue François Autain : il n'est pas possible d'imaginer des enveloppes vraiment séparées les unes des autres. Permettez-moi à cet égard de vous lire un extrait d'article : « Selon une étude confidentielle présentée au conseil de surveillance de la CNAM, l'impact des prescriptions hospitalières sur les dépenses remboursées (...) est massif : 18 % de la pharmacie, 16,5% des arrêts de travail, 51 % des transports, 10 % de la biologie. » Par ailleurs, « le taux d'évolution des prescriptions de pharmacie des médecins hospitaliers - 19 % entre 2002 et 2003 - est trois fois supérieur à celui de l'ensemble des prescriptions - 6,4 % -, souvent montré du doigt. »

M. Bernard Cazeau. Cela n'a rien à voir !

M. Dominique Leclerc. Par conséquent, l'identification est indispensable non seulement en termes de transparence - on ne peut pas la demander aux uns et pas aux autres -, mais aussi peut-être en termes financiers dans la répartition des enveloppes, ainsi que, surtout, je tiens à le dire, en termes de responsabilité médicale. Cela me paraît essentiel ! L'anonymat est inconcevable.

M. Gilbert Barbier. Il n'y en a pas !

M. Bernard Cazeau. On va appliquer ce système aux pharmaciens !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je n'ai plus grand-chose à ajouter après l'intervention de Dominique Leclerc, qui a dit l'essentiel : si l'on est médecin, c'est que l'on est un être responsable. Lorsque l'on prescrit, on ne transmet pas la prescription sous forme anonyme ou sous le nom de l'hôpital. On assume si, un jour, un problème se pose, car on peut être appelé en responsabilité pénale. Par conséquent, il y a lieu que la prescription ne soit pas anonyme.

L'identification est-elle un élément épouvantable, criminel ? Le médecin libéral que je suis n'a jamais pensé - je n'ai même jamais eu cette idée - qu'il était identifié par un numéro comme un repris de justice ou une personne susceptible de commettre des faits délictueux ! J'ai effectivement un numéro, mais c'est celui sous lequel je suis identifié au conseil de l'Ordre, comme l'a très bien dit Bernard Cazeau.

Cela étant, nous avons jugé qu'il était nécessaire de disposer d'un numéro plus complet pour permettre une meilleure identification du médecin. Cela peut être utile, éventuellement, dans le cas des indemnités journalières, pour lesquelles, en cas d'abus, la loi prévoit que le malade et le médecin pourraient être poursuivis.

Ceux qui, aujourd'hui, sont hostiles à toute identification ne viendront pas se plaindre le jour où c'est le malade qui sera poursuivi et qui devra répondre d'un arrêt de travail abusif, et non celui qui l'aura prescrit ! Vous serez pourtant les premiers à vous plaindre si le cas se présentait...

Par conséquent, je souhaite qu'au moment du vote chacun prenne ses responsabilités. L'identification doit être comprise comme le souhait d'analyser clairement ce qui se passe à l'hôpital. Et je vous ai écoutés : tout à l'heure, à la tribune, vous étiez tous d'accord pour mieux comprendre le fonctionnement à l'hôpital, mais, curieusement, maintenant, vous avez tout oublié !

M. Bernard Cazeau. Non, c'est faux !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous ne voulez plus du tout savoir ce qui s'y passe vraiment ni connaître les habitudes de prescriptions ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)

M. François Autain. Vous ne m'avez pas écouté !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Personne n'a parlé aujourd'hui d'abus ! Nous souhaitons simplement affirmer avec Dominique Leclerc qu'il n'y a aucune honte à traiter de la même façon tous les médecins. Il n'y pas, parmi eux, des « sur-médecins » et des « sous-médecins » !

L'arrêté de 1998 prévoyait d'ailleurs que l'identification s'appliquerait à tous les médecins. Mais, curieusement, il n'a été mise en oeuvre que pour les médecins libéraux. Pourquoi ?

Enfin, pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, mais, lorsque vous nous dites qu'il suffit d'engager une concertation et de voir si l'on appliquera ensuite la mesure aux praticiens hospitaliers, cela n'a, à mon avis, pas beaucoup de sens. Il faut au contraire rappeler dans la loi le principe selon lequel tout médecin doit, à partir du moment où il prescrit, pouvoir être identifié, car il s'agit d'un acte majeur. C'est même l'un des actes humains les plus importants, car, ce faisant, le médecin détient la possibilité d'agir sur la santé, et il est responsable de la vie des autres.

Une fois inscrit ce principe dans la loi, la liberté sera donnée au ministre d'engager - parce que cela ne se fera pas en un jour - la concertation nécessaire pour l'application de son arrêté, qui, je le rappelle, date de six ans ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, après les différents propos qui ont été tenus - et pas seulement après l'intervention du président About -, rappeler la position que j'exprimais tout à l'heure.

Il y a, bien évidemment, accord sur le principe.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il faut donc adopter l'amendement !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Sans même remonter six ans en arrière, monsieur le président de la commission, permettez-moi de rappeler ce que nous avons fait il y a quelques mois.

J'étais présent à vos côtés, ici même, dans cet hémicycle, lors de l'examen du projet de loi relatif à l'assurance maladie. Nous avions alors insisté sur l'articulation et la coordination nécessaires entre la médecine de ville et l'hôpital, pour faire en sorte que les mêmes pratiques s'appliquent partout.

Je pensais avoir été clair alors, et je vous remercie de me donner l'occasion d'être plus explicite maintenant.

Il importe effectivement de savoir qui soigne qui, qui prescrit quoi, et qui prescrit quoi à qui.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est tout le problème !

M. Alain Vasselle, rapporteur. On ne parle pas d'autre chose !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Nous sommes d'accord sur ces principes, qui doivent s'appliquer bien évidemment en médecine de ville mais également à l'hôpital.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. En outre, il ne faudrait pas caricaturer les propos des uns et des autres. Il s'agit non pas de surveillance, mais tout simplement de transparence.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Exactement !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Cela étant, sans avoir moi-même l'expérience de la pratique hospitalière ou de la pratique libérale, je voudrais tout de même rappeler que l'hôpital a une spécificité, qui n'aura échappé à personne, par rapport à la médecine de ville : l'hôpital fonctionne plus souvent avec des pratiques collectives et privilégie le travail en équipes. Telle est la réalité.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Il est donc évident que la proposition de la commission, si elle était adoptée, aboutirait à modifier un certain nombre de comportements. Or il n'est pas question de refuser une telle évolution, alors même que c'est la philosophie de base de la réforme de l'assurance maladie.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Toutefois, sur un point aussi important, le Gouvernement a bien précisé son accord sur le principe, tout en s'interrogeant sur la méthode. En effet, les pratiques collectives étant, en quelque sorte, le corollaire de la pratique hospitalière, il nous semblait important d'engager cette concertation à froid et au fond.

C'est tout simplement dans cet état d'esprit que le Gouvernement a choisi de s'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.

M. Bernard Cazeau. Cette explication de vote sera presque de ma part un rappel au règlement, car nous en avons assez de subir les leçons de morale et les amalgames de M. le président de la commission des affaires sociales.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il faudra vous y habituer !

M. Bernard Cazeau. Personne n'a dit, ici, qu'il ne fallait pas faire d'économies !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je n'ai pas parlé d'économies !

M. Bernard Cazeau. Mais si ! J'ai bien entendu ce que vous avez dit !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non !

M. Bernard Cazeau. Permettez-moi tout de même de vous répondre !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ne faites pas d'amalgames !

M. Bernard Cazeau. Nous avons simplement dit que non seulement le système préconisé par M. Vasselle créera un doublon, mais qu'il sera aussi inapplicable dans certains cas. En effet, la plupart des médecins et praticiens hospitaliers auront deux numéros d'identification : lequel choisiront-ils ? De plus, le système deviendra inapplicable lorsque la prescription émanera des collaborateurs du chef de service, lequel, comme l'a souligné M. Barbier, restera le seul responsable.

Il sera impossible de poursuivre en justice un interne des hôpitaux au motif qu'il aura prescrit ce que lui ont demandé les cinq ou six praticiens hospitaliers qui l'encadrent ! En outre, comment appliquer le système proposé en médecine des urgences, notamment avec les médecins du SAMU ?

Ce que vous souhaitez instaurer est donc totalement irréalisable. Je ne comprends pas qu'un médecin puisse s'exprimer ainsi !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur Cazeau, ce que vous dites est faux. Vous oubliez simplement que tous les médecins sont appelés quelquefois à intervenir en urgence. A chaque fois, leur numéro d'identification figure sur les ordonnances qu'ils rédigent !

Les internes sont dans la même situation que les étudiants de cinquième ou sixième année qui assurent des remplacements. Pour avoir moi-même connu cette situation, je peux vous dire qu'ils agissent sous la responsabilité de leur patron, c'est-à-dire le médecin lui-même.

Mme Raymonde Le Texier. C'est ce qu'a dit M. Cazeau !

M. Bernard Cazeau. Je n'ai jamais dit le contraire !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 38 :

Nombre de votants 322
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages exprimés 158
Pour l'adoption 189
Contre 126

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 6.

L'amendement n° 97, présenté par Mme Hermange, est ainsi libellé :

Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est inséré dans le code de la sécurité sociale un article L. 162-5-16 ainsi rédigé :

« Art. L. 162-5-16. - Notamment pour qu'ils puissent consulter et enrichir le dossier médical personnel de leurs patients, les médecins mentionnés à l'article L. 61551 du code de la santé publique disposent annuellement d'un crédit personnel destiné à l'acquisition et à la maintenance d'un ordinateur personnel avec logiciel de bureautique et accès Internet. Les structures dont ils dépendent et au sein desquelles ils exercent leur assurent un accès Internet avec une bande passante équivalente à celle des fournisseurs grand public d'accès Internet à haut débit. Le financement est assuré par le fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés. »

La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Il s'agit de permettre aux professionnels de santé exerçant au sein des établissements hospitaliers d'être équipés d'ordinateurs et d'un matériel bureautique adaptés, afin de pouvoir accéder au dossier médical personnel. Or, comme je l'ai dit au cours du débat, ce n'est pas le cas aujourd'hui.

M. le secrétaire d'Etat a précisé tout à l'heure qu'un crédit destiné aux systèmes d'information avait été prévu dans le cadre du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés. Par conséquent, cet amendement devrait être accepté !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous comprenons tout à fait la démarche proposée par notre collègue Marie-Thérèse Hermange. Nous souhaitons toutefois connaître l'avis du Gouvernement avant de nous prononcer.

Certes, Mme Hermange a raison de soulever le problème, car il est sans aucun doute indispensable de mettre à niveau l'équipement informatique des établissements hospitaliers. Pour ce faire, elle propose d'attribuer une dotation personnelle à chacun des médecins exerçant dans ces établissements. S'il est normal que les médecins concernés bénéficient d'un matériel adapté, encore faudrait-il que celui-ci soit prévu dans le cadre d'un équipement global, de manière à permettre un fonctionnement en réseau et éviter ainsi les effets pervers liés à des équipements individuels.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Bien évidemment, le dossier médical personnel a vocation à s'appliquer à l'hôpital comme en médecine de ville, et c'est d'ailleurs l'un des outils privilégiés pour assurer la coordination entre ces deux secteurs.

Or nous sommes en train de construire, avec l'ensemble des acteurs concernés, toute une démarche autour du dossier médical personnel. Le cahier des charges est en voie d'élaboration, afin qu'un appel d'offres puisse être passé au tout début de l'année prochaine.

Par conséquent, l'adoption de votre amendement reviendrait à court-circuiter une telle démarche. Nous sommes tous d'accord pour doter les médecins des moyens nécessaires à la consultation et à l'alimentation du DMP. Pour autant, il faut, me semble-t-il, laisser la place à la démarche que nous entreprenons, qui est fondée sur le dialogue entre tous les acteurs, sans exception.

En outre, madame le sénateur, les investissements prévus dans le plan « Hôpital 2007 » incluent un volet « systèmes d'information », ce qui permettra notamment aux établissements de moderniser leurs équipements.

Le dossier médical personnel est l'un des outils essentiels pour lutter contre le cloisonnement, qui est l'un des maux de notre système de santé, et la démarche que nous avons entreprise est fondée sur le dialogue et la concertation.

Dans ces conditions, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi le Gouvernement émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame Hermange, l'amendement n° 97 est-il maintenu ?

Mme Marie-Thérèse Hermange. Monsieur le secrétaire d'Etat, dans la mesure où le financement des systèmes d'information fera l'objet d'un crédit du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, pourquoi ne pas permettre d'affecter ce crédit à chaque médecin hospitalier au sein des établissements ? Or, actuellement, ce n'est pas le cas.

Si vous en étiez d'accord, je serais même prête à rectifier mon amendement en supprimant le mot « personnel »...

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, ce pas simplement un problème rédactionnel : il s'agit ne pas contrecarrer la démarche que nous avons engagée.

Si vous voulez savoir si les fonds existent, la réponse est oui. Si vous voulez savoir si ces fonds sont importants, la réponse est oui : ils sont prévus dans le volet « investissements » du plan « Hôpital 2007 ».

Par votre amendement, vous souhaitez engager vous-même, d'ores et déjà, la démarche sur le DMP à l'hôpital, alors que nous sommes en train de l'élaborer avec tous les acteurs, qu'ils soient hospitaliers ou libéraux.

Par conséquent, si vous avez confiance en la concertation avec les acteurs pour mettre en place le meilleur système possible, vous devriez accepter de retirer votre amendement.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Dans ces conditions, je retire l'amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 97 est retiré.