sommaire
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
Question de M. Paul Natali. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Paul Natali.
evolution du budget de l'institut français du pétrole
Question de M. Pierre Laffitte. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Pierre Laffitte.
indemnisation des anciens prisonniers de guerre
Question de M. Bernard Piras. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Bernard Piras.
réforme de la taxe professionnelle
Question de M. Claude Biwer. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Claude Biwer.
avenir de l'usine de production de chlore de saint-auban
Question de M. Claude Domeizel. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Claude Domeizel.
maintien des cabines téléphoniques en zones rurales
Question de M. Michel Teston. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Michel Teston.
présence des services publics en zone rurale
Question de M. René-Pierre Signé. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Didier Boulaud, en remplacement de M. René-Pierre Signé.
conséquences de l'arrêt des activités minières en lorraine
Question de M. Jean-Marc Todeschini. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Jean-Marc Todeschini.
Question de M. Jean-Pierre Godefroy. - MM. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Jean-Pierre Godefroy.
eaux destinées à la consommation humaine
Question de M. Bernard Murat. - Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées ; M. Georges Mouly, en remplacement de M. Bernard Murat.
Question de M. Didier Boulaud. - Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées ; M. Didier Boulaud.
Suspension et reprise de la séance
réforme des plaques d'immatriculation
Question de M. Philippe Leroy. - MM. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur ; Philippe Leroy.
transports de fonds en zone rurale
Question de M. Bruno Sido. - MM. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur ; Bruno Sido.
aménagement de la rn 102 reliant la vallée du rhône à l'autoroute a75
Question de M. Jean Boyer. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Jean Boyer.
situation de la mutuelle de prévoyance et de l'habitat à la réunion
Question de Mme Anne-Marie Payet. - Mmes Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer ; Anne-Marie Payet.
retraites agricoles complémentaires
Question de M. Roland Courteau. - MM. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales ; Roland Courteau.
conséquences des fermetures de consulats
Question de Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales ; Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Suspension et reprise de la séance
présidence de M. Philippe Richert
4. Financement de la sécurité sociale pour 2005. - Discussion d'un projet de loi
MM. le président, Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale ; Mmes Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance ; Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées ; Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat aux personnes âgées ; MM. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie ; André Lardeux, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille ; Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse ; Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances ; le président de la commission, Bernard Cazeau, Paul Blanc, Jean-Marie Vanlerenberghe, Guy Fischer, Gilbert Barbier, Mme Claire-Lise Campion, M. Adrien Gouteyron.
M. le président de la commission.
Suspension et reprise de la séance
présidence de M. Roland du Luart
MM. François Fortassin, Claude Domeizel, André Vantomme.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre, Mme la ministre.
Motion no 137 de Mme Nicole Borvo. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Demande de renvoi à la commission
Motion no 136 de Mme Raymonde Le Texier. - Mme Raymonde Le Texier, MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
M. le président.
Articles additionnels avant l'article 2
Amendement no 103 de M. Bernard Cazeau. - MM. Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre, François Autain, le président de la commission. - Rejet.
Amendement no 104 de M. Bernard Cazeau. - MM. Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre, Guy Fischer. - Rejet.
Amendement no 141 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Amendement no 139 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Amendement no 140 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Amendement no 142 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur. - Rejet.
Amendement no 143 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Amendement no 106 de M. Bernard Cazeau. - MM. Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Rejet.
Amendement no 144 de M. Guy Fischer. - M. François Autain. - Rejet.
Amendement no 57 rectifié bis de M. Jean-Paul Alduy. - MM. Jean-Paul Alduy, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Retrait.
Amendement no 102 rectifié de M. Jean-Pierre Godefroy et sous-amendement no 246 de M. Michel Mercier. - MM. Jean-Pierre Godefroy, Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre, Michel Mercier. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.
Amendement no 212 rectifié bis de M. Jean-Jacques Jégou. - MM. Jean-Jacques Jégou, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre. - Adoption.
Amendement no 42 rectifié de M. Alain Gournac, repris par le Gouvernement. - MM. le ministre, Alain Vasselle, rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 10 de la commission et 30 de M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le rapporteur pour avis, le ministre. - Retrait de l'amendement no 10 ; adoption de l'amendement no 30.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 2 bis
Amendement no 59 rectifié bis de M. Jean-Marc Juilhard. - MM. Jean-Marc Juilhard, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 11 de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels avant l'article 3
Amendement no 108 de M. Claude Domeizel. - MM. Claude Domeizel, Alain Vasselle, rapporteur ; Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat, M. Guy Fischer. - Rejet.
Amendement no 109 de M. Bernard Cazeau. - MM. Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. - Rejet.
M. Guy Fischer.
Amendement no 110 de M. Bernard Cazeau. - MM. Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat ; MM. Michel Mercier, le président de la commission. - Retrait.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 3
Amendement no 12 rectifié de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat ; le président de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos 111 et 112 de M. Bernard Cazeau. - MM. Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Rejet des deux amendements.
Article additionnel après l'article 5
Amendement no 113 de M. Bernard Cazeau. - MM. Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article additionnel après l'article 5 ou avant l'article 6
Amendements nos 148 de M. Guy Fischer et 114 de M. Bernard Cazeau. - MM. Guy Fischer, Bernard Cazeau, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Rejet des deux amendements.
Articles additionnels après l'article 5
Amendements nos 213 à 215 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Retrait des amendements nos 214 et 215 ; adoption de l'amendement no 213 insérant un article additionnel.
Amendement no 216 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement no 13 de la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 5 bis
Amendement no 100 de M. François Autain. - MM. François Autain, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat ; le rapporteur pour avis. - Rejet.
M. Guy Fischer.
Adoption de l'article.
Articles 32 et 32 bis. - Adoption
Amendements nos 200 de M. Guy Fischer, 65 rectifié de M. Paul Blanc, repris par la commission, et 27 de la commission. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement no 200 ; adoption des amendements nos 65 rectifié et 27.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 46 rectifié de M. Alain Gournac, repris par la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 28 de la commission et 39 de M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le rapporteur pour avis, Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement no 39 ; adoption de l'amendement no 28 supprimant l'article ;
M. Guy Fischer.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 35
Amendements nos 233 et 234 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Retrait des deux amendements.
Renvoi de la suite de la discussion.
5. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
6. Dépôt d'un rapport d'information
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Questions orales
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
Portée du décret du 6 juillet 2004 relatif aux subventions de l'Etat pour les projets d'investissement
M. le président. La parole est à M. Paul Natali, auteur de la question n° 565, adressée à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Paul Natali. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le décret n° 2004-658 du 6 juillet 2004, pris pour l'application des dispositions de l'article 10 du décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999 relatif aux subventions de l'Etat pour les projets d'investissement.
Aux termes de l'article 1er du décret du 6 juillet 2004, « le montant de la subvention de l'Etat peut avoir pour effet de porter le montant des aides publiques jusqu'à 90 % du montant prévisionnel de la dépense subventionnable pour les projets d'investissement réalisés par les établissements publics de coopération intercommunale de Corse à fiscalité propre ou par les communes membres d'un tel établissement lorsque le projet d'investissement n'entre pas dans le champ de compétence communautaire ».
Les projets d'investissement pouvant bénéficier de ce taux sont, selon l'article 2 dudit décret, ceux qui sont réalisés en matière d'eau potable et d'assainissement, d'élimination des déchets, de protection contre les incendies de forêts et de voirie communale, autrement dit des sujets extrêmement importants et sensibles pour les communes corses.
Or, en réservant aux EPCI ou aux communes membres d'un EPCI l'application de cette disposition très favorable, l'Etat pénalise lourdement la quasi-totalité des communes de Corse, puisque les EPCI à fiscalité propre sont très peu nombreux sur l'île. Il s'agit donc d'une injustice, sauf à interpréter cette disposition comme une pression exercée sur les petites communes pour les contraindre à constituer des EPCI à fiscalité propre.
Par conséquent, je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si le Gouvernement accepterait d'étendre le bénéfice des mesures du décret n° 2004-658 aux autres communes ou aux autres catégories d'établissement public, ce qui serait une mesure équitable et juste.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, qui m'a chargé de vous transmettre les éléments de réponse qui vont suivre. Je prie également MM. Biwer, Piras, Domeizel et Godefroy d'accepter par avance les mêmes excuses.
Par un décret du 6 juillet 2004, une dérogation aux dispositions du décret du 16 décembre 1999 relatif aux subventions publiques a été introduite pour la Corse. Elle permet, pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou pour les communes membres, d'obtenir un montant d'aides publiques allant jusqu' à 90 % pour les investissements réalisés en matière d'eau et d'assainissement, d'élimination des déchets, de protection contre les incendies de forêts et de voirie communale.
Ce décret avait été demandé par les collectivités locales de Corse, notamment par les associations de maires. La dérogation qu'il prévoit a une origine précise : elle tire les conséquences du fait que le principal handicap financier des communes de Corse est, en réalité, leur petite taille ; elle est donc précisément conçue pour encourager la création de ces différentes intercommunalités, dont chacun s'accorde à reconnaître qu'elles font aujourd'hui lourdement défaut à la Corse, ce qui handicape son développement local.
Dès la phase initiale d'élaboration de ce décret, au premier semestre 2004, il a été souligné un point primordial : la situation financière des communes de Corse est globalement comparable, voire parfois plus favorable que la moyenne nationale. Une étude réalisée à l'époque établissait clairement qu'en matière d'équilibre financier général, de marge d'emprunt, de dotations aux investissements, la situation des communes corses était plutôt favorable. A l'inverse, le coût des personnels, élevé, conduisait à des charges de fonctionnement supérieures aux moyennes.
Une étude beaucoup plus complète et précise menée par la trésorerie générale confirme et amplifie ces conclusions provisoires.
En réalité, ce que ces diverses études ont aujourd'hui démontré, c'est la totale validité des analyses qui avaient conduit aux limitations prévues par le décret. Ainsi, la situation financière des communes de Corse est globalement correcte, en tout cas comparable à celle de leur strate de population ; en revanche, il est tout aussi clair qu'une vraie difficulté réside dans la taille réduite de ces collectivités, 360 communes pour 260 000 habitants donnant une moyenne, si l'on retire Ajaccio et Bastia, de l'ordre de 500 habitants par commune. Le nombre de communes dont la population est inférieure à 100 habitants, et parfois sur un territoire assez vaste, est également important.
Face à ce problème de taille critique, la seule solution viable est l'intercommunalité.
Pour cet ensemble de raisons, monsieur le sénateur, il n'est pas envisagé dans l'immédiat d'étendre le bénéfice des mesures du décret aux autres communes et aux autres catégories d'établissement public.
M. le président. La parole est à M. Paul Natali.
M. Paul Natali. Une étude a effectivement été menée, mais ses résultats sont, je pense, erronés.
Il s'agit vraiment d'une injustice car, en Corse, la population réside plutôt dans les communes du littoral, comme le montre le nombre d'habitants au kilomètre carré.
Quand on regarde la situation de l'ensemble des communes de l'intérieur, c'est-à-dire 250 sur un total de 360 communes, on constate que l'intercommunalité ne peut pas fonctionner, sauf pour des communes d'une certaine importance, qui ont donc des bases fiscales, ce qui leur permet de couvrir les besoins des petites communes.
Aujourd'hui, cette situation bloque tout un ensemble de syndicats intercommunaux à vocation multiple ou à vocation unique, car nombre de cantons - je pense notamment à l'un d'entre eux qui comprend 24 communes - ne comptent que 1 500 à 1 800 habitants. Peut-être, me direz-vous, y a-t-il plus d'inscrits sur les listes électorales. (Sourires.)
Plus sérieusement, monsieur le ministre, comment peut- on, dans ces conditions, mettre en place une intercommunalité ? Les maires, que je rencontre souvent, se demandent si l'intercommunalité n'est pas, en fait, un moyen de gérer la misère, car que faire d'autre quand il n'y a ni bases fiscales ni recettes fiscales ?
Une intercommunalité, c'est un regroupement de communes qui vont bénéficier de petites mesures supplémentaires. Or, compte tenu de l'éparpillement des petites communes à travers un canton, il n'y a pas assez de moyens financiers pour assumer une véritable gestion, d'où le refus des maires de créer des communautés de communes.
La question mérite, à mon sens, une autre approche statistique qui permettrait sans doute de faire apparaître que, si l'ensemble des grandes communes du littoral ont des capacités financières, car elles ont des bases fiscales importantes, les communes de l'intérieur, elles, ne disposent pas de tels moyens pour mettre en place l'intercommunalité. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle 10 % seulement de ces 360 communes appartiennent à une communauté de communes.
Voilà donc bien la preuve qu'il faut modifier la réglementation afin de permettre aux autres communes de répondre à leurs besoins permanents en jouant de la fiscalité directe, c'est-à-dire la fiscalité propre, comme de la fiscalité indirecte. La fiscalité indirecte permettrait aux SIVU et aux SIVOM d'étendre leurs investissements et de profiter des mesures décidées.
évolution du budget de l'Institut français du pétrole
M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, auteur de la question n° 555, adressée à M. le ministre délégué à l'industrie.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le ministre, trois raisons justifient une augmentation des moyens de l'Institut français du pétrole.
D'abord, les problèmes énergétiques de la planète deviennent de plus en plus importants, en particulier s'agissant des ressources pétrolières, ce qui donne tout son prix à la recherche parapétrolière.
Ensuite, la préoccupation du développement durable conduit à limiter les émissions de gaz carbonique et à essayer de capter ces émissions pour réinjecter le gaz carbonique dans le sol.
Enfin, la qualité des innovations réalisées par cet institut a placé la France, grâce à une action continue et tenace dans le domaine de l'énergie, à un niveau internationalement reconnu, au deuxième rang après les Etats-Unis pour ce qui est du parapétrolier.
L'innovation étant considérée, à juste titre, comme une priorité, il est tout à fait anormal que le projet de budget pour 2005 prévoie une diminution des moyens affectés à l'Institut français du pétrole.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, M. Patrick Devedjian, que je vous prie de bien vouloir excuser, m'a chargé de vous transmettre les éléments de réponse qui vont suivre. Je prie d'ores et déjà MM. Teston, Boulaud et Todeschini d'accepter les mêmes excuses.
Le projet de loi de finances pour 2005 prévoit, pour l'Institut français du pétrole, une dotation publique de 192 millions d'euros. Cette dotation a été arrêtée en accord avec le ministère de la recherche, qui est responsable du budget civil de recherche et développement. Elle se situe, certes, à un niveau inférieur à celui qui avait été atteint en 2003, mais la diminution atteint seulement 4 %.
Par ailleurs, cette diminution de la dotation budgétaire attribuée à l'Institut français du pétrole est à mettre en perspective et rapportée à l'ensemble des ressources de l'Institut. Il convient, en particulier, de considérer le montant des ressources propres, qui devrait atteindre environ 90 millions d'euros en 2004 et qui est en progression constante depuis dix ans. Ainsi, en 1994, les ressources propres de l'Institut s'élevaient à 51,1 millions d'euros et représentaient 22,6 % des recettes totales de l'Institut ; en 2003, elles se sont élevées à 91,3 millions d'euros, soit 31,3 % des recettes totales.
A la progression des ressources propres s'ajoutent les efforts réalisés par l'Institut pour contenir ses charges récurrentes, efforts dont la poursuite devrait permettre de dégager certaines marges de manoeuvre.
Ainsi, en 2003, les frais de fonctionnement de l'Institut, hors personnel, ont été réduits de 13 %, soit 15,7 millions d'euros, par rapport au budget prévisionnel présenté en 2002.
Enfin, une comparaison de la situation de l'Institut par rapport aux autres organismes de recherche n'est pertinente que si elle est effectuée sur une base pluriannuelle. Dans ces conditions, il apparaît clairement que l'Institut ne fait pas l'objet d'un traitement défavorable.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le ministre, votre réponse suscite d'autres questions. Est-il de bonne politique de pénaliser ceux qui sont performants en ponctionnant le fruit d'efforts grâce auxquels la France à acquis une position respectable ? Car, faut-il le préciser, si notre territoire national ne recèle pas les ressources pétrolières nécessaires, en revanche, dans le domaine du parapétrolier, il occupe une place importante.
Le fait que l'Institut français du pétrole augmente ses ressources propres ne prouve-t-il pas qu'il est bien géré ? Et c'est au moment où ce domaine devient crucial pour l'avenir de l'humanité que l'on décide une diminution de la dotation de l'Institut ? J'avoue ne pas comprendre, même si le ministère de la recherche est d'accord et même si je connais, par ailleurs, les contraintes budgétaires globales qui sont les nôtres.
La priorité devrait tout de même être donnée à l'innovation, et l'Institut français du pétrole a démontré que les découvertes d'un certain nombre de ses filiales étaient parmi les plus rentables sur le marché.
indemnisation des anciens prisonniers de guerre
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, auteur de la question n° 550, adressée à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Bernard Piras. Ma question porte sur une circulaire du 23 février 2000 prévoyant l'indemnisation des anciens prisonniers français de l'armée de libération nationale, pendant la guerre d'Algérie. Ce dispositif prévoit l'extension des dispositions des décrets n° 73-74 du 18 janvier 1974 et n° 81-314 du 6 avril 1981, pris en application de la loi n° 83-1109 du 21 décembre 1983 relative aux conditions d'indemnisation des invalidités résultant d'infirmités et maladies contractées par les militaires ou assimilés au cours de leur captivité subie dans les camps à régime sévère.
J'ai saisi M. le ministre délégué aux anciens combattants en faveur d'une personne de mon département qui n'arrivait pas à obtenir cette indemnité alors qu'elle remplissait toutes les conditions requises.
Il m'a alors été répondu que « la liste de ces camps, annexée au décret du 18 janvier 1973, ayant été complétée non par un texte de même nature mais par une circulaire, le ministère de l'économie et des finances a estimé que ce dispositif ne reposait sur aucun fondement juridique ».
Vous en conviendrez, cette situation n'est pas admissible, car ce sont les bénéficiaires potentiels de cette indemnité qui ont à subir les conséquences préjudiciables de ce dysfonctionnement.
C'est la raison pour laquelle j'aimerais connaître les dispositions que le Gouvernement envisage de prendre afin que ces anciens prisonniers puissent rapidement percevoir l'indemnité à laquelle ils ont droit.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, vous évoquez la situation de certains prisonniers de guerre auxquels une indemnisation aurait été refusée par les services du ministère chargé des anciens combattants.
Les textes auxquels vous faites référence permettent, en effet, d'indemniser, au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en raison de leur nature, des infirmités attribuées à la captivité dans les camps à régime sévère, selon des conditions dérogatoires aux règles du droit commun.
Ce régime ne s'applique toutefois qu'aux prisonniers qui ont été détenus dans de tels camps, dont la liste est expressément limitative. Or les camps de prisonniers ou les prisons de l'armée de libération nationale, l'ALN, ou du front de libération nationale, le FLN, ne figurent pas au nombre des camps à régime sévère énumérés, et aucune loi ni aucun règlement existant ne les inclut dans cette liste.
La question est d'autant plus délicate que des crédits supplémentaires ont été spécifiquement ouverts pour les anciens prisonniers de l'ALN dans la loi de finances pour 2000. En effet, le vote de ces crédits n'emporte pas l'ouverture du droit à pension et c'est pour ces raisons, exclusivement d'ordre juridique, que le service des pensions de Nantes a été conduit à suspendre l'approbation des quelques propositions de pensions d'invalidité d'une direction interdépartementale des anciens combattants.
La reconnaissance de ces droits à pension en faveur des intéressés nécessite bien évidemment que l'on modifie les textes. Le ministre délégué aux anciens combattants présentera, dès le 18 novembre, c'est-à-dire après-demain, lors de l'examen par l'Assemblée nationale des crédits consacrés aux anciens combattants pour 2005 , un amendement spécifique afin que ces anciens prisonniers puissent rapidement percevoir l'indemnité à laquelle ils ont effectivement droit.
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Je souhaiterais simplement dire à M. le ministre que seule la dernière partie de son intervention me concernait ; nous aurions pu nous dispenser du reste...
M. Bernard Piras. Je vous remercie, monsieur le ministre, mais nous resterons vigilants. Si l'amendement déposé lors de la discussion du projet de loi de finances est adopté, nous serons satisfaits. Sinon, nous monterons une nouvelle fois au créneau pour obtenir satisfaction, car il serait tout de même anormal que certaines personnes ayant été détenues dans des camps ne soient pas soumises aux mêmes conditions indemnitaires que d'autres.
réforme de la taxe professionnelle
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 554, adressée à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'annonce faite voici quelques mois de l'exonération de la taxe professionnelle payée par les entreprises sur les investissements qu'elles réalisent pendant une période de dix-huit mois a suscité un vent d'inquiétude chez les élus locaux. Ces derniers se demandent si cette mesure ne va pas préfigurer la suppression pure et simple d'une taxe qui représente à l'heure actuelle une part importante des ressources propres des collectivités territoriales et une part essentielle, voire, dans certains cas, exclusive, de celles des groupements à fiscalité propre.
Cette inquiétude a été aggravée par l'annonce, plus récente, d'une éventuelle exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les exploitants agricoles.
Au fil de ces annonces, les élus se demandent ce qu'il va bien pouvoir rester de la fiscalité directe locale !
S'agissant de la taxe professionnelle, le Gouvernement nous a quelque peu rassurés en affirmant qu'il s'agissait non pas de la supprimer mais de la remplacer par un dispositif moins pénalisant pour les entreprises. Aussi a-t-il confié à une commission d'experts présidée par M. Fouquet le soin de formuler des propositions dans ce sens.
Un premier rapport d'étape vient d'être publié mais comporte une critique sévère de l'assiette actuelle et propose plusieurs pistes de réforme. A cet effet, dix mécanismes de substitution ont été simulés, lesquels entraînent, fatalement, des transferts de cotisations entre un nombre plus ou moins important d'entreprises.
Cela a d'ailleurs fait dire à notre éminent collègue Philippe Marini que réformer la taxe professionnelle en allégeant la charge sur l'industrie sans pour autant mécontenter les autres secteurs reviendrait à inventer la pierre philosophale ! (Sourires.) Il a ajouté au demeurant que, selon lui, la taxe professionnelle était très difficile, voire impossible à réformer.
Je regrette que le Gouvernement n'ait pas pris l'attache de spécialistes de la fiscalité locale avant de décider d'appliquer une exonération de taxe professionnelle pour les nouveaux investissements. En effet, outre le fait que ces experts n'auraient pas manqué de le mettre en garde sur la difficulté de réformer cet impôt, ils auraient également pu l'éclairer sur les très nombreuses et sérieuses études soulignant, contrairement aux déclarations comminatoires et répétées des organisations professionnelles, que la fiscalité locale ne semble jouer qu'un rôle secondaire dans les installations d'entreprises.
J'observe, par exemple, que, dans les zones franches urbaines, l'exonération de la taxe professionnelle n'est presque rien en comparaison de l'exonération des charges sociales, puisqu'elles peuvent représenter respectivement 2,8 % et 19,3 % de la valeur ajoutée.
Je doute que cette mesure d'exonération temporaire puisse freiner les délocalisations d'entreprises, notamment celles des services.
Je rappelle enfin que, sur un produit global de taxe professionnelle de 35,8 milliards d'euros, c'est, au fil des exonérations et compensations diverses, l'Etat qui, avec 13,8 milliards d'euros, est devenu le plus gros contributeur. Je crains qu'il n'en soit de même demain pour la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
Cette suppression de la taxe professionnelle revient finalement à annuler aussi les efforts de certaines communes qui se sont battues pour fixer au plus bas leur taux de taxe professionnelle. Cela s'apparente à une prime aux moins bons gestionnaires communaux !
Dans ces conditions, puisque le Gouvernement s'est engagé dans un processus de réforme de la taxe professionnelle, pouvez-nous nous dire quelles mesures le Gouvernement compte prendre afin que la nouvelle taxe professionnelle devienne, sans mécontenter personne, un impôt « moderne, localisable et équitable » ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, je constate avec plaisir que vos derniers mots ne sont rien d'autre que l'objectif de cette réforme.
Le rapport d'étape auquel vous faites référence a été établi par la commission de réforme de la taxe professionnelle installée le 16 octobre 2004 par le Premier ministre. Elle doit rendre son rapport définitif avant la fin de l'année.
Depuis l'automne, cette commission a examiné plusieurs simulations de scénarios de réforme. Une première famille de scénarios reprend le principe de la taxation des facteurs de production en l'aménageant. Une deuxième famille substitue à l'assiette actuelle un « solde de gestion » : chiffre d'affaires, valeur ajoutée ou excédent brut d'exploitation. Enfin, une troisième famille de travaux examine les effets d'une assiette mixte, composée de la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière imposée à un taux local, d'une part, et d'un solde de gestion imposé à un taux national ou local, selon le cas, d'autre part.
A quelques exceptions près, ces simulations font apparaître d'importants transferts entre secteurs d'activités et entre entreprises selon leur taille ainsi que, dans une moindre mesure toutefois, des modifications dans la répartition de l'impôt entre les collectivités et leurs groupements. La commission va développer plusieurs de ces scénarios, notamment en vue de limiter l'ampleur de ces transferts.
Dans ce contexte, vous comprendrez qu'il n'est pas possible de vous indiquer quelles seront les orientations retenues en définitive par le Gouvernement : compte tenu de la difficulté de l'exercice, il convient de laisser la commission achever ses travaux en toute sérénité. En fonction des conclusions du rapport définitif, un projet de loi réformant la taxe professionnelle pourrait être soumis au Parlement au cours du premier semestre 2005. Bien entendu, ce texte serait conforme aux dispositions constitutionnelles relatives à l'autonomie financière des collectivités territoriales.
Dans l'immédiat, afin d'accompagner plus durablement la croissance de l'investissement et de l'emploi en France, l'article 68 du projet de loi de finances pour 2005 prévoit de proroger jusqu'au 31 décembre 2005 la date limite des investissements ouvrant droit au dégrèvement de taxe professionnelle institué par la loi du 9 août 2004.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous venez d'apporter et des intentions que vous affichez, tout en prenant acte du fait que la réflexion est encore en cours.
Avec la décentralisation, nous récupérerons sans doute certains pouvoirs, mais pas la totalité des moyens qui les accompagnent. C'est l'une des causes de notre inquiétude.
Je ne suis pas un décentralisateur forcené, car je considère que c'est à l'échelon de l'Etat que s'opèrent les meilleures péréquations. Mais nous devons assumer pour demain la responsabilité qui nous incombe, car je ne souhaiterais pas que la France ne compte bientôt plus qu'une seule commune. Encore que cela permettrait peut-être aux communes rurales de percevoir la même dotation globale de fonctionnement que Paris, ce qui ne serait pas rien considérant qu'actuellement la différence va du simple au double. Mais je ne pense pas que ce soit l'intérêt du pays !
avenir de l'usine de production de chlore de saint-auban
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, auteur de la question n° 574, adressée à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les conséquences graves d'une modification du périmètre industriel du groupe TotalFina.
A la suite de la création de la société Arkema, l'usine de Saint-Auban, principal employeur des Alpes-de-Haute-Provence, est menacée.
La production française de chlore, qui représente actuellement près de 6 000 emplois, dont près de 800 sont actuellement occupés par les salariés de l'usine de Saint-Auban, dans les Alpes-de-Haute-Provence, se situe au sixième rang mondial, derrière les Etats-Unis, le Japon, l'Allemagne, la Russie et la Chine. L'usage du chlore est multiple, puisqu'il a des applications en pharmacie, pour l'hygiène, le traitement de l'eau et la fabrication des PVC, notamment.
La direction nationale s'est engagée auprès du Gouvernement à ne pas licencier et à effectuer les importants investissements nécessaires pour maintenir l'activité de l'usine de Saint-Auban et pour permettre la mise en conformité de l'entreprise en matière de respect de l'environnement, ainsi que me l'avait indiqué, le 25 février 2004, au Sénat, Mme Fontaine, alors ministre déléguée à l'industrie.
Malgré nos demandes répétées depuis des mois, nous n'avons obtenu aucune garantie sur la pérennité du site et des emplois.
Au moment où le il se préoccupe des délocalisations, que compte faire le Gouvernement pour apporter enfin les réponses demandées par les syndicats et les élus et pour garantir la pérennité de l'outil industriel ? Est-il disposé à intervenir directement pour proposer une solution qui permettrait le maintien des emplois des fournisseurs, notamment aux Salins de Giraud, le sel étant la matière première essentielle pour la production de chlore ?
Je précise enfin que les deux députés du département des Alpes-de-Haute-Provence, Jean-Louis Bianco, socialiste, et Daniel Spagnou, membre de l'UMP, ont posé à l'Assemblée nationale une question identique à la mienne, afin de manifester notre unité dans la défense de l'usine de Saint-Auban. Mais il semble que, depuis, les choses aient évolué.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, nous savons toute l'importance économique que l'usine de Saint-Auban revêt pour les Alpes-de-Haute-Provence : avec 726 salariés, elle est la première usine du département.
Cette usine fait partie, avec de nombreux autres actifs chimiques du groupe Total, de la nouvelle entité, dénommée « Arkema », qui a vocation, à terme, à être séparée de la maison mère, celle-ci souhaitant se recentrer sur son métier pétrolier.
La création d'Arkema doit être considérée positivement, car elle rompt avec la tendance à la « cession par appartements » de la chimie de Total que l'on a pu voir se dessiner au cours des dernières années.
Au lieu de cela, Total prend l'initiative de créer un groupe à part entière, de taille comparable à celle des autres acteurs français et européens et, surtout, doté d'un bilan très peu endetté, ce qui lui permettra de prendre une part active aux mouvements à venir dans le monde de la chimie.
Certains craignent que la création d'Arkema ne soit l'occasion pour Total d'externaliser des délocalisations ou des passifs environnementaux : nous ne pensons pas, et l'Etat y veillera, que ce soit l'intention des dirigeants du groupe.
Si cette opération constitue une source d'inquiétude, notamment au sein des organisations syndicales, c'est d'abord parce qu'elle est synonyme de changement. Il ne faut pourtant pas se cacher la vérité sur la chimie française : c'est une industrie qui a un besoin urgent de mutation.
Sur le plan mondial, l'industrie chimique, qui était une industrie d'innovation et de croissance, est devenue une industrie mature. Cette industrie connaît actuellement la phase de redistribution massive des cartes qui prévaut partout dans le monde, et la France, dont la chimie est plutôt morcelée et moins compétitive qu'ailleurs, n'est pas en position de force, malgré sa longue histoire industrielle.
Précisément, le rôle de l'Etat est d'aider l'ensemble des acteurs à se projeter vers l'avenir. C'est dans ce sens que M. Patrick Devedjian a créé un groupe stratégique sur la chimie en septembre dernier.
En ce qui concerne l'usine de Saint-Auban, aucune décision n'a été prise pour l'instant par Arkema. L'activité « chlore » du groupe, activité dont les résultats sont peu favorables, fait l'objet d'un plan d'ensemble qui sera dévoilé au début de l'année prochaine.
Total s'était engagé à ne pas licencier, et cet engagement a pour l'instant été tenu. L'Etat continuera d'être très attentif au traitement social du site.
Sur le plan environnemental, la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement mène des discussions actives avec l'entreprise. Les investissements, d'un montant de 3 millions d'euros, qui ont été réalisés en 2002 et en 2003 pour le traitement des sols pollués ont été suivis d'effets qui ont pu être constatés. Les investissements programmés pour les prochaines années s'élèvent à 35 millions d'euros.
Enfin, parce qu'il est important de sortir au plus vite du flou et de l'incertitude qui pèsent sur l'avenir du site de Saint-Auban, le ministre délégué à l'industrie, M. Patrick Devedjian, compte rencontrer très prochainement les dirigeants du groupe pour leur demander d'éclaircir leurs positions, afin que les salariés et les élus puissent disposer de la visibilité qui leur manque sur l'avenir de ce site.
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, et j'ai bien entendu - cela me rassure un peu ! - que le ministre doit rencontrer les responsables d'Arkema et de Total.
J'ignore cependant si tout cela parviendra à apaiser les inquiétudes de la population des Alpes-de-Haute-Provence. Je vous rappelle, monsieur le ministre, que, le 5 novembre dernier, 2 500 personnes - pour un département comme le nôtre, c'est important ! - se sont réunies sur la place principale de Saint-Auban pour exprimer leur détermination à voir cette usine de production de chlore maintenue.
Ces personnes restent d'autant plus résolues que, au lendemain de cette manifestation exceptionnellement massive, la direction d'Arkema a publié un communiqué équivoque qui, en renvoyant la présentation d'un plan d'action au premier semestre de l'année prochaine, nous a laissés un peu plus dubitatifs encore .
maintien des cabines téléphoniques en zones rurales
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, auteur de la question n° 560, adressée à M. le ministre délégué à l'industrie.
M. Michel Teston. Monsieur le ministre, mes chers collègues, l'équipement du territoire en cabines téléphoniques peut apparaître aujourd'hui à certains comme un charmant archaïsme coloré de nostalgie pour une époque révolue. Je peux vous garantir que tel n'est pas le cas et que ces équipements sont indispensables à la continuité du service public et au maintien de la cohésion du territoire, dans l'esprit de la péréquation tarifaire. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le législateur a tenu à prévoir, pour l'opérateur chargé du service universel, des obligations précises en la matière.
Ainsi, parmi les services définis à l'article L. 35-1 du code des postes et communications électroniques et à l'article 6 du cahier des charges approuvé par le décret n° 96-1225 du 27 décembre 1996, l'opérateur doit, notamment, assurer l'accès de tous à des cabines téléphoniques publiques installées sur le domaine public.
Cependant, France Télécom a récemment fait savoir à plusieurs maires ardéchois que des cabines situées sur le territoire de leur commune mais dont la rentabilité serait insuffisante allaient être supprimées. Outre l'application stricte des dispositions minimales prévues au cahier des charges, à savoir une cabine par commune, l'opérateur avance comme justification le motif du développement de la téléphonie mobile.
Pourtant, l'opérateur historique sait parfaitement que la couverture en téléphonie mobile ne pourra pas être assurée avant plusieurs années dans de nombreuses communes. En outre, cet argument néglige le fait que la téléphonie mobile n'apportera pas forcément les mêmes services que les cabines publiques.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaite savoir quelles mesurer le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour rappeler l'opérateur historique à ses obligations de service universel, dont il est d'ailleurs dédommagé par les autres opérateurs, et pour s'assurer que la recherche de la rentabilité ne conduira pas France Télécom à renoncer à une bonne couverture du territoire.
En effet, en secteur rural, il n'est pas acceptable que l'amélioration progressive de la desserte en téléphonie mobile se traduise systématiquement par la suppression de cabines téléphoniques.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, le nombre de cabines téléphoniques situées sur le domaine public est actuellement légèrement supérieur à 160 000 ; il décroît régulièrement depuis 1999, année où le parc avait dépassé 209 000.
En raison du développement considérable de la téléphonie mobile, le trafic des publiphones a diminué très sensiblement ces dernières années, ce qui a conduit France Télécom à réduire et à redéployer son parc de cabines. Cette évolution n'est pas choquante, à la condition, bien entendu, que les obligations de service universel soient pleinement respectées.
Les obligations de service universel garantissent le maintien d'un parc de cabines suffisant dans les zones rurales et dans les plus petites communes. Le cahier des charges de France Télécom précise que chaque commune doit disposer d'au moins un publiphone ; de plus, dans les communes où le nombre d'habitants est compris entre 1 000 et 10 000, France Télécom doit implanter un publiphone par tranche de 1 500 habitants au-dessus du premier millier.
En pratique, les obligations de service universel portent donc sur un parc de 49 000 cabines, alors qu'environ 63 000 publiphones sont installés dans les communes de moins de 10 000 habitants.
France Télécom s'est engagée à ce qu'aucune installation de publiphone ne soit remise en cause si cela devait la conduire à ne plus respecter les obligations de service universel. Elle assure également qu'une concertation est menée avec les maires chaque fois qu'elle envisage de démonter des publiphones qui sont en surplus par rapport aux obligations de service universel.
Pour l'avenir, la loi du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom a maintenu dans les obligations de service universel la desserte du territoire en publiphones installés sur le domaine public.
Le décret d'application, qui sera publié très prochainement, reconduit pour l'essentiel les obligations antérieures en matière de publiphonie. Il maintient en particulier l'obligation d'installer au moins un publiphone par commune et prévoit une obligation renforcée dans les communes de moins de 2 500 habitants, qui sont grosso modo celles qui ne sont pas encore couvertes par la téléphonie mobile.
Le ministre délégué à l'industrie lancera très prochainement les appels à candidatures pour l'attribution des missions de service universel. L'un de ces appels à candidatures portera sur la desserte du territoire en publiphones installés sur le domaine public. La désignation, à l'issue de la procédure, d'un opérateur chargé d'assurer cette composante du service universel sera l'occasion de réaffirmer solennellement les obligations en matière de publiphonie, quel que soit l'opérateur finalement retenu.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Je remercie M. le ministre de sa réponse.
Je persiste néanmoins à demander qu'il soit mis un terme à la suppression des cabines téléphoniques dans toutes les zones où la desserte en téléphonie mobile n'est pas effective. Car, monsieur le ministre, une partie non négligeable du territoire reste encore à couvrir, et tout le monde sait que, bien souvent, ce sont les collectivités territoriales qui, pour assurer cette desserte, sont amenées à se substituer, en maîtrise d'ouvrage, aux opérateurs de téléphonie mobile.
Par la suite, des cabines téléphoniques seront encore nécessaires, et il faudra en maintenir en certains lieux. Je demande donc également que la liste de ces lieux soit établie, le moment venu, en parfaite concertation, dans chaque département, entre le représentant de l'Etat, le représentant des collectivités territoriales et l'opérateur France Télécom.
Présence des services publics en zone rurale
M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud, en remplacement de M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 549, adressée à M. le ministre délégué à l'industrie.
M. Didier Boulaud. Monsieur le ministre, je vous prie d'excuser l'absence de mon collègue et ami René-Pierre Signé, qui, légèrement souffrant, m'a demandé de le remplacer, ce que je fais d'autant plus volontiers que je partage pleinement sa préoccupation.
M. Signé et moi-même souhaitons attirer l'attention de M. le ministre délégué à l'industrie sur le contenu du « plan d'évolution du réseau » que vient d'adopter la direction de La Poste, dans la lignée du contrat de plan signé en juin 1998, et de la loi de régulation postale.
Personne ne le conteste aujourd'hui, y compris dans les rangs des organisations syndicales, La Poste doit adapter son offre de services en tenant compte de l'évolution démographique et de l'activité économique. Articulé autour du concept de « zones de vie », ce plan, qui entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2005, suscite cependant l'inquiétude des élus des zones rurales.
C'est ainsi que, dans le département de la Nièvre, seuls 65 bureaux de postes de plein exercice subsisteront, contre 101 actuellement. Quant à la solution constituée par les agences postales communales, elle revient de fait à alourdir encore un peu plus les charges des communes.
Pour ce qui est des points Poste, les conditions de confidentialité ne semblent pas être réunies ; en outre, ils ne pourront proposer les mêmes services en étant considérés comme des centres de profit.
De la même manière, l'avenir d'EDF soulève quelques inquiétudes.
Le réseau de transport d'électricité, RTE, est déjà quasi privatisé, à 49 %. Le réseau de distribution confié le plus souvent à des syndicats départementaux est, quant à lui, menacé, des points d'accueil supprimés, les délais de dépannage et de réparation sensiblement allongés.
Reste la péréquation, dernière garantie du service public. Pourra-t-elle résister encore longtemps à l'insertion des capitaux privés dans le capital d'EDF ?
En conséquence, monsieur le ministre, comment le Gouvernement compte-t-il, après la mise en oeuvre de la concertation indispensable avec les élus locaux et les associations d'usagers, tenir compte de leurs demandes et veiller au maintien d'un service public effectif et efficace, notamment en zone rurale ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, La Poste est un acteur majeur de l'aménagement du territoire grâce à une présence forte sur le territoire.
A la demande du Gouvernement, le président de La Poste s'est engagé solennellement à maintenir une présence postale de 17 000 points de contact à l'échelon non seulement national, mais aussi départemental.
En effet, ni le Gouvernement ni les Français n'auraient compris que La Poste déserte les zones rurales. Elle y demeurera donc, mais à travers des structures plus diversifiées que celles qui existent aujourd'hui. Il faut citer à cet égard les agences postales communales, les points Poste ou les bureaux de proximité.
Le département de la Nièvre compte, depuis de nombreuses années, 137 points de contact postaux, 68 bureaux de plein exercice, 40 bureaux annexes, 3 agences postales tenues par des particuliers, 18 agences postales communales et 8 points Poste.
Ainsi que le Gouvernement l'avait rappelé au président de La Poste, tout projet local d'évolution de la présence postale dans la Nièvre, comme d'ailleurs dans tout autre département, devra être précédé d'une concertation avec les élus locaux.
S'agissant des conditions financières relatives aux agences postales communales, La Poste devrait annoncer, lors du congrès des maires, le lancement d'une nouvelle convention fixant désormais l'indemnité compensatrice sur la base d'un forfait de 35 euros par heure avec un minimum annuel de 5 250 euros.
Vous avez également soulevé, monsieur le sénateur, la question de la confidentialité des points Poste.
Il faut savoir que les commerçants qui gèrent ces points Poste s'engagent contractuellement à respecter les dispositions du code pénal en matière de secret professionnel et du code des PTT sur le secret des correspondances. Par ailleurs, ces commerçants n'ont absolument pas accès aux comptes chèques postaux, les fameux CCP, des clients.
Mesdames, messieurs les sénateurs, La Poste, ce grand service public de proximité apprécié des Français, doit rester un grand service public ; le Gouvernement y sera particulièrement attentif.
En ce qui concerne le réseau public de transport d'électricité, la filialisation, demandée par la directive européenne de juin 2003, est prévue par la loi du 9 août 2004, tout en garantissant que le capital « est détenu en totalité par EDF, l'Etat ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au service public ». Dès lors, aucune privatisation ne peut avoir lieu.
Pour ce qui est de la distribution, la loi du 10 février 2000 a renforcé le rôle confié aux communes ou à leurs groupements dans l'organisation de la distribution publique d'électricité et conforté le Fonds d'amortissement des charges d'électrification, qui permet de pérenniser des ressources importantes au bénéfice des syndicats d'électrification, afin d'améliorer la qualité de l'électricité et l'esthétique des réseaux en zone rurale.
A cet égard, les enquêtes réalisées périodiquement au sein de conférences départementales réunissant les collectivités, les gestionnaires de réseaux de distribution et les services de l'Etat montrent une nette amélioration de la situation en termes de qualité.
Par ailleurs, la part des implantations d'EDF-Gaz de France Distribution en zone rurale se stabilise à un niveau satisfaisant et environ 85% de la population nationale se situent à moins de dix minutes d'un point d'accueil clientèle ou d'un site d'intervention.
La gestion des dépannages au sein d'EDF-Gaz de France Distribution est en cours de réorganisation. Le Gouvernement veillera à ce que cette réorganisation ne s'opère pas au détriment de la sécurité, notamment pour les demandes d'intervention en urgence, en cas de fuite de gaz, par exemple.
Le prochain contrat de service public entre l'Etat et EDF fixera des objectifs de résultat à EDF en matière de service aux usagers, quelle que soit leur situation géographique, et maintiendra l'obligation d'une concertation avec les collectivités préalablement à toute réorganisation importante de ses implantations.
Enfin, le choix de la péréquation tarifaire pour l'acheminement de l'électricité a été proposé par la Commission de régulation de l'énergie au Gouvernement, qui l'a accepté. Le tarif d'utilisation des réseaux publics de transport et de distribution est donc péréqué depuis 2002.
M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud.
M. Didier Boulaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, même si j'en pressentais la teneur.
S'il nous a paru nécessaire, à mon collègue René-Pierre Signé et à moi-même, de poser cette question, qui a été déjà soulevée à de multiples reprises, c'est pour insister sur l'inquiétude réelle des élus.
En effet, nous sommes au bord d'une crise grave entre l'Etat et des élus qui sont las de la disparité entre le discours officiel sur le monde rural et la réalité. Ainsi, chacun a pu constater que, dans la Creuse, 260 élus ont démissionné au mois d'octobre et que, par ailleurs, 6 000 communes ont délibéré pour protester contre les dispositions prises, qui amputent le service public.
Le Gouvernement, monsieur le ministre, mesure sans aucun doute la différence qui existe entre le maintien du service public et le maintien des services publics : ce n'est pas la même chose pour les usagers !
Confier les activités de La Poste à un commerce ou les mettre à la charge des communes n'est pas une opération des plus valorisantes. Or La Poste, les perceptions, les gendarmeries, les hôpitaux, les écoles, les services d'accueil, EDF, tout y passe !
Là où un dialogue et une négociation seraient nécessaires, on se trouve devant des décisions arrêtées.
Alors, on accuse l'Europe ! Mais les Européens doivent maîtriser leur avenir en termes de politique énergétique, de télécommunications ou de transport sans s'en remettre au seul marché, et, que je sache, la modification du statut d'EDF n'a pas été exigée par Bruxelles, mais correspond bien à une logique ultralibérale !
La modernisation des services publics est inséparable de leur défense. Pour notre part, nous militons pour des services efficaces - adaptables, certes, à l'évolution des techniques - qui devraient être regroupés au sein d'un grand service public, si l'on veut que l'aménagement du territoire ne se résume pas à de simples discours.
Or, si La Poste doit devenir un établissement financier de plein exercice, si EDF doit s'ouvrir à des capitaux privés, notre inquiétude est bel et bien justifiée. Des règles très strictes doivent être établies - à quand la loi postale, par exemple ? - si l'on ne veut pas que la situation évolue vers le « tout marché » qui, de notre point de vue, entraînerait la disparition des services publics tels que nous voulons les maintenir dans les zones rurales.
Conséquences de l'arrêt des activités minières en Lorraine
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la question n° 575, adressée à M. le ministre délégué à l'industrie.
M. Jean-Marc Todeschini. Je souhaite ici attirer l'attention de M. le ministre délégué à l'industrie sur les craintes persistantes des populations et des élus liées à l'arrêt de l'activité minière du bassin nord-lorrain.
J'anticipe probablement une partie du débat qui aura lieu, ici même, le 24 novembre prochain, mais, quand j'ai déposé cette question, ce débat n'était pas encore inscrit à l'ordre du jour des travaux du Sénat.
En Moselle, élus locaux et associations se battent depuis de nombreuses années maintenant pour refuser l'ennoyage et demander la poursuite de l'exhaure et le comblement des zones à risque.
Je ne puis que regretter le comportement des pouvoirs publics à l'égard de ce dossier. Souvent « baladés » par les différents ministres chargés de l'industrie, élus locaux et associations sont aujourd'hui complètement ignorés lors des très rares conférences interdépartementales permanentes sur les conséquences de l'arrêt des activités minières. En effet, toutes les mesures prises l'ont été sans aucune concertation avec les représentants des populations du bassin nord-lorrain.
En plein milieu de l'été, le Gouvernement, par la voix du préfet de région, a annoncé l'arrêt du pompage pour le 1er novembre 2005. Cette annonce ne fait que confirmer les craintes des populations. En effet, pour le Gouvernement, l'ennoyage semble irrémédiable, alors qu'il risque d'accélérer les effondrements. Des familles, propriétaires de leur habitat, vont ainsi être expropriées sans que soit pris en compte le drame humain évident qu'elles subissent.
Dans certaines communes, la partie du territoire sujette à affaissement brutal est importante. A Ottange, par exemple, ce sont près de 22% du territoire de la commune qui se situent en zone d'effondrement, ou fontis.
De par cette décision, le Gouvernement, qui choisit volontairement d'abandonner les zones sinistrées à leur triste sort, fait abstraction des efforts fournis par les collectivités, notamment par le conseil régional de Lorraine. L'intervention financière décidée par la nouvelle majorité de gauche du conseil régional de Lorraine devait rendre possible le non-ennoyage.
J'aimerais savoir quand seront pris en compte les intérêts des populations du bassin nord-lorrain, ces populations dont je me fais ici le relais et qui attendent des réponses précises à leurs interrogations récurrentes.
Je souhaiterais savoir si l'annonce du préfet que j'ai mentionnée précédemment représente une décision définitive.
Devant ce scénario, pouvez-vous m'indiquer, monsieur le ministre, quels travaux de consolidation et de sécurité le Gouvernement entend effectuer dans ces secteurs à risque ?
A ce titre, qu'en est-il de l'élaboration du plan de prévention des risques miniers et de la réalisation des consolidations possibles ?
Enfin, je souhaiterais connaître les mesures nouvelles d'accompagnement que le Gouvernement entend prendre pour venir en aide aux habitants qui seront expulsés ainsi qu'aux communes qui vont perdre une partie de la taxe d'habitation et de la taxe foncière sur le bâti. Or les produits de ces taxes, chacun le sait, constituent des ressources nécessaires au maintien du niveau des dépenses de fonctionnement et à la poursuite du développement de ces communes. Bien souvent, ce développement ne pourra se faire que sur une partie de leur territoire, le reste étant situé dans des zones à risque, ce qui entraîne, là aussi, des surcoûts importants.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, toutes les mines fermées dans le monde ont subi, à des échéances diverses, un processus d'ennoyage.
Dans le cas des mines de fer de Lorraine, et plus particulièrement pour le bassin nord, l'Etat s'est entouré de plusieurs collèges d'experts nationaux et internationaux qui ont réalisé de nombreuses études, expertises et contre-expertises, dans les domaines tant de la géologie que de l'hydrogéologie ou de la géotechnique, afin d'évaluer les effets possibles de l'ennoyage de ce bassin.
A cet égard, les deux différés d'ennoyage successifs ont été mis à profit, d'une part, pour préciser les résultats de ces expertises, et, d'autre part, pour procéder à l'expropriation, par mesure de sécurité, d'une vingtaine de familles de la commune de Fontoy résidant dans une zone identifiée par les experts comme étant la seule du bassin nord à comporter un risque d'effondrement brutal, susceptible de mettre en jeu la sécurité des personnes.
De ce point de vue, le dernier différé d'ennoyage est limité au 30 novembre 2005 au plus tard, ce qui permettra de garantir le bon déroulement de la procédure d'expropriation, sans pour autant exposer inutilement la sécurité des personnes qui seront amenées à maintenir le dispositif de pompage au fond de galeries minières désormais très anciennes.
Le financement de ce différé d'ennoyage fait l'objet d'un accord entre la région Lorraine, le département de la Moselle et l'Etat.
Les études d'aléa réalisées sur les zones urbaines du bassin nord sont désormais toutes achevées. Mise à part la zone à risque d'effondrement brutal de Fontoy, aucun autre secteur n'a été identifié comme pouvant subir un tel phénomène. Si d'autres zones en revanche ont été identifiées comme présentant un risque d'affaissement progressif, l'identification du risque ne signifie pas que le phénomène se produira nécessairement.
Par ailleurs, ce type d'affaissement n'est pas de nature à mettre en cause la sécurité des personnes : s'il devait se produire, il pourrait induire des dommages sur les biens immobiliers pour lesquels un dispositif d'indemnisation permettant la réparation intégrale des dommages a été mis en place.
S'agissant plus précisément d'Ottange, d'une part, aucune zone à risque d'effondrement brutal n'a été repérée et, d'autre part, les zones de fontis se situent dans les affleurements, donc hors périmètre d'ennoyage. En cas de nécessité, il existe des possibilités d'intervention, notamment pour procéder à des comblements, comme c'est le cas à Thil.
Concernant l'équilibre financier des communes touchées par des mesures d'expropriation, les moyens mis en oeuvre à Fontoy constituent un exemple de la manière dont tous les acteurs, y compris l'Etat, peuvent se mobiliser, en l'occurrence pour aider la commune à créer un nouveau lotissement susceptible d'accueillir l'ensemble des familles expropriées.
Enfin, sachez que les préfets de Meurthe-et-Moselle et de Moselle ont prescrit cinq plans de prévention des risques miniers, PPRM, couvrant vingt-cinq communes et l'intégralité de la zone du bassin ferrifère nord concernée par l'ennoyage à venir. Ces plans devraient être approuvés avant la fin de l'année 2005.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Je serai bref, puisque M. Philippe Leroy, président du conseil général de Moselle, a déposé une question qui nous permettra de revenir sur le sujet.
Monsieur le ministre, votre réponse ne me satisfait pas, même si, comme vous l'avez rappelé, à Fontoy, tous les partenaires concernés se sont en effet mobilisés.
Vous affirmez que l'Etat assure la réparation intégrale des dommages. Si tel était le cas, ce serait formidable. Mais il suffit de se rendre Roncourt ou à Moyeuvre, là où les galeries ont déjà été ennoyées, pour constater qu'il n'en est pas ainsi.
Pour l'heure, monsieur le ministre, je tiens à attirer l'attention du Gouvernement sur la psychose que vivent les populations menacées d'expropriation.
Sur ce point, votre réponse est claire : l'année à venir doit être mise à profit non pas pour engager des travaux de consolidation, comme cela avait été évoqué, mais pour permettre des expropriations. C'est bien ce que craignent les populations, d'autant que, dans certains secteurs, des consolidations pourraient être effectuées. Certains membres de l'actuelle majorité se sont par ailleurs engagés à ce qu'il n'y ait pas d'ennoyage avant consolidation.
En tout état de cause, il s'agit d'une question majeure pour la Moselle et pour la Lorraine en général, car des problèmes identiques se poseront avec l'abandon des mines du bassin houiller.
Restructuration des douanes
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, auteur de la question n° 576, adressée à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer l'attention de M. le ministre d'Etat sur la restructuration en cours du service des douanes : 172 postes ont déjà été supprimés en 2004 ; le projet de budget pour 2005 prévoit à nouveau la suppression de 174 emplois ; plusieurs sites administratifs ont d'ores et déjà été fermés et d'autres sont menacés.
Dans le Nord-Cotentin, les menaces - qui ont motivé ma question - sont devenues une réalité, puisque, et je viens de l'apprendre, lors d'une réunion qui a eu lieu le 9 novembre, la Direction générale des douanes a décidé que les brigades de recherche de Cherbourg - cinq emplois - et de Caen - six emplois - seraient purement et simplement supprimées. Quant à la recette des douanes de Cherbourg - dix emplois -, elle reste menacée à l'horizon 2006.
Monsieur le ministre, si cette décision était confirmée, ses conséquences seraient dramatiques à plusieurs égards.
Tout d'abord, il s'agit d'un coup supplémentaire porté au bassin d'emploi de Cherbourg, qui vit actuellement des moments difficiles. Ensuite, il s'agit d'une grave atteinte au service public douanier.
En effet, l'unité du service douanier à Cherbourg a prouvé en 2004 que l'implantation des douanes à Cherbourg était une nécessité. La brigade de recherche de Cherbourg a obtenu des résultats remarquables - dont l'administration a tiré un fort parti médiatique - en matière de lutte contre la fraude, de trafics de stupéfiants et de cigarettes ou encore de lutte contre la contrefaçon, notamment.
Un audit de l'inspection des services, commandé par la Direction générale des douanes, ne fait d'ailleurs que le confirmer.
Incontestablement, le service public douanier est un atout pour le port de Cherbourg. Pourtant, depuis dix ans, ce sont vingt postes de douanier qui ont progressivement été supprimés dans le Nord-Cotentin, sans compter les effectifs implantés - six postes - de la brigade de surveillance nautique, qui n'ont jamais été pourvus.
Avec la récente disparition de l'antenne du service de répression des fraudes, la transformation de l'antenne de la Banque de France en bureau d'accueil et les menaces qui pèsent sur les centres des impôts, c'est l'ensemble du service public économique et financier qui est remis en cause dans le Nord-Cotentin, alors que la communauté urbaine de Cherbourg, je le rappelle, compte 100 000 habitants.
Toutes ces décisions sont incomprises, tant par les personnels, les élus que les habitants, alors que la fraude et les trafics en tout genre ne cessent de se développer sur nos côtes.
Monsieur le ministre, dans la perspective de la prochaine réunion prévue le 30 novembre à la Direction générale des douanes, je vous demande solennellement le maintien du service des douanes de Cherbourg.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, non, le Gouvernement ne remet pas en cause le service public économique et financier, pas plus dans le Nord-Cotentin qu'ailleurs.
Au contraire, son objectif est de conserver, voire d'accroître l'efficacité de ce service, dans un environnement qui ne cesse d'évoluer, ce qui exige d'adapter une organisation souvent très ancienne et qui, du fait de son éclatement, ne rend plus forcément les services que l'on est en droit d'attendre d'elle.
De ce point de vue, l'immobilisme nous condamnerait à ne plus aussi bien accomplir les missions qui doivent être celles des services publics au regard des besoins d'aujourd'hui.
Votre inquiétude, monsieur le sénateur, concerne plus particulièrement les douanes. Il est vrai que cette direction est engagée dans un processus de modernisation qui est devenu indispensable pour lui permettre de faire face à de nouveaux flux et bassins de fraude.
Sur le plan national, cette réorganisation se fait à effectif constant, pour la partie surveillance, l'objectif étant de constituer des services regroupés, dotés de moyens modernes, qui sont le gage d'interventions sécurisées et plus performantes, et recentrés sur le coeur de métier de la douane, c'est-à-dire la police de la marchandise et la lutte contre la fraude.
En Basse-Normandie, le pilotage se fera à partir de la direction régionale, implantée à Caen. Une réflexion est actuellement en cours sur le positionnement des unités de recherche de Cherbourg et de Caen, dans le cadre de la réorganisation nationale du réseau de recherche : son maillage territorial doit être revu en fonction de l'évolution des courants de la grande fraude.
En tout état de cause, le maintien du bureau de Cherbourg, qui est chargé du dédouanement des marchandises transitant par le port, n'est pas remis en question : le lien de proximité entre la douane et les usagers sera donc préservé.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, permettez-moi d'insister sur l'importance de la présence d'une unité de recherche à Cherbourg.
En effet, le port transmanche de Cherbourg vient immédiatement après celui de Calais. Cette seule référence suffit à imaginer les difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
Par ailleurs, Cherbourg est, avec Cannes, le premier port français de plaisance en termes de passage.
En outre, Cherbourg, située sur le rail maritime, est en quelque sorte une ville frontière avec la Grande-Bretagne, même si la frontière est un peu large...
Cette position nous expose à des problèmes de trafic. D'ailleurs, la brigade de Cherbourg a obtenu de remarquables résultats, notamment en matière de lutte contre le trafic de cigarettes. Il en est de même pour la police de l'air aux frontières s'agissant des passages clandestins vers le Royaume-Uni.
Dans ces conditions, désarmer les services de l'Etat sur le port de Cherbourg, parce que c'est bien ce qui va se produire, d'autant que les effectifs de la brigade nautique n'ont pas augmenté, constitue, selon moi, une grave erreur.
Il nous reste du temps d'ici à la réunion du 30 novembre. J'insiste beaucoup pour que nous mettions ce délai à profit pour réviser la stratégie envisagée. Encore une fois, il faut impérativement maintenir une brigade des douanes dans le Nord-Cotentin.
Eaux destinées à la consommation humaine
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, en remplacement de M. Bernard Murat, auteur de la question n° 537, transmise à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'Etat, je me fais volontiers le porte-parole de mon collègue et ami Bernard Murat, d'autant que je partage pleinement son inquiétude s'agissant de la qualité des eaux destinées à la consommation humaine.
Cette question vise à attirer l'attention du Gouvernement sur les difficultés financières rencontrées par les petites communes rurales pour mettre en oeuvre le décret du 20 décembre 2001 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine, à l'exclusion des eaux minérales naturelles.
En effet, depuis le 25 décembre dernier, les exigences de qualité de l'eau distribuée ont été modifiées et les services déconcentrés de l'Etat ont informé les maires qui effectuaient des captages de la nécessité de se mettre en conformité avec ces nouvelles normes.
Or c'est là que réside le problème. En effet, la mise en application du décret pris en la matière, en multipliant les analyses, engendre une augmentation considérable des coûts, surtout pour les petites communes qui comptent plusieurs captages.
Ainsi, la commune de Chaumeil, en Corrèze, qui compte 219 habitants, verrait sa facture annuelle passer de 2 286 euros à 9 250 euros, soit une augmentation de 400 % ! A Saint-Germain-Lavolps, pour prendre l'exemple d'une commune située dans un autre secteur du département, le budget « eau » subirait une hausse de 40 %.
Le coût des nouvelles mesures proposées au titre du traitement est donc exorbitant pour les petites communes au regard du caractère restrictif, en tout cas contraignant, de ces normes et l'échelon communal, en milieu rural, n'est peut-être pas adapté pour supporter de telles charges.
De fait, il semble primordial de préconiser des mesures particulières afin que les communes des zones rurales puissent assurer la distribution à leurs habitants d'une eau de qualité, dans des conditions conformes à la modicité de leurs budgets. C'est pourquoi je vous demande, madame la secrétaire d'Etat, de m'indiquer quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, la question de M. le sénateur-maire Bernard Murat évoque en effet les difficultés que rencontrent les petites collectivités rurales pour assumer le coût du contrôle sanitaire des eaux distribuées, conformément aux dispositions du code de la santé publique.
Je vous indique d'emblée, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est très attaché à ce que tous les consommateurs disposent d'une eau du robinet respectant en permanence les critères de potabilité.
Le code de la santé publique transpose la directive européenne du 3 novembre 1998 et établit le programme de contrôle de la qualité de l'eau potable. Ces nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 25 décembre 2003.
La fréquence des analyses effectuées par les petites communes, qui était auparavant insuffisante s'agissant de paramètres tels que les pesticides, a été augmentée. Cela permet désormais de contrôler suffisamment la qualité de l'eau tout en limitant les conséquences financières des analyses. En effet, les analyses les plus coûteuses ne sont à réaliser que deux fois tous les cinq ans en moyenne. Cette fréquence peut d'ailleurs être diminuée lorsque les risques de pollution sont faibles.
Pour certaines petites communes, en particulier celles de moins de 500 habitants, l'augmentation relative du prix de l'eau peut se révéler difficile à expliquer aux contribuables.
Cette augmentation doit cependant être relativisée, car dans nombre de ces communes, malgré l'augmentation du coût du contrôle, le prix de l'eau reste inférieur ou égal au prix moyen de l'eau potable en France.
Par ailleurs, ces petites communes, dont les deux tiers n'ont pas encore établi de périmètres de protection de leurs captages, pourtant obligatoires, peuvent, il faut le rappeler, bénéficier d'une subvention de l'agence de l'eau et, le cas échéant, des conseils généraux pour l'instauration des périmètres de protection, qui comprend une analyse complète de la qualité de l'eau. Cela diminue d'autant le coût du contrôle réglementaire.
Enfin, je tiens à souligner le rôle important que peut jouer l'intercommunalité dans la gestion des services d'eau potable pour obtenir des économies d'échelle et faire face aux besoins de modernisation du service.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'Etat, je suis heureux que la réponse du Gouvernement me soit transmise par votre voix autorisée, vous qui connaissez bien, et c'est une litote, la situation de notre département !
Personne ne conteste la nécessité des contrôles, qui sont la condition d'une eau de qualité.
Votre réponse comporte deux éléments positifs : la fréquence des analyses pourrait, dans certains cas, être réduite, et les communes de moins de 500 habitants peuvent obtenir des subventions de la part de l'agence de l'eau et du conseil général. Tout cela va en effet dans le bon sens.
Je doute cependant que cela puisse nous donner totalement satisfaction, car, quand bien même les coûts ne seraient supérieurs que de 40 % - mais on a vu que l'augmentation pouvait aller jusqu'à 400 % - cela resterait impressionnant. Certes, l'intercommunalité pourrait constituer une partie de la solution. C'est sans doute une voie qu'il est opportun d'emprunter en la matière.
pénurie de médecins
M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud, auteur de la question n° 552, adressée à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.
M. Didier Boulaud. Madame le secrétaire d'Etat, de nombreux rapports ont fait état de la pénurie de médecins en France qui s'aggravera au cours des dix prochaines années. Le Gouvernement, ou plutôt les gouvernements, conscients des difficultés que rencontrera la population pour l'accès aux soins, ont décidé justement, mais avec retard, de relever le numerus clausus, décision dont les effets ne seront perceptibles que dans une dizaine d'années.
Pendant la période transitoire qui s'annonce, le départ en retraite prévisible des médecins renforcera une pénurie déjà sensible dans de nombreux départements, en particulier dans celui de la Nièvre, que j'ai l'honneur de représenter.
Cette pénurie touche la médecine libérale, qui, dans certains cantons, n'est plus à même d'assurer la permanence des soins. La même pénurie frappe également de plein fouet, et c'est tout aussi grave, sinon plus, le service public hospitalier, en dépit des mesures incitatives mises en place ici ou là, notamment la prime spécifique pour les postes à recrutement prioritaire ou le concours spécial pour les praticiens adjoints contractuels.
Ainsi, le centre hospitalier de Nevers, dont j'ai l'honneur de présider le conseil d'administration, et qui est aussi le site pivot du département de la Nièvre, n'est plus en mesure de recruter les praticiens hospitaliers nécessaires à son bon fonctionnement pour garantir la permanence des soins. Tel est notamment le cas en radiologie, en néonatalogie, en pédopsychiatrie ou pour les urgences. En radiologie, deux postes seulement sont pourvus sur les six existant au schéma. Pour ce qui est des urgences, seuls 3 postes sont pourvus sur les 8,2 prévus par le schéma directeur. Il en va de même en pédopsychiatrie, en néonatologie, avec des risques à venir en anesthésie, en gynéco-obstétrique et en néphrologie.
Ce phénomène est amplifié par les distorsions de rémunérations qui existent entre le secteur public et le secteur privé. En imagerie médicale, par exemple, on a vu partir des praticiens hospitaliers publics vers le secteur privé, et ce dans la même ville.
A terme, cette pénurie fait courir de graves risques à la population par défaut d'accès aux soins et met en péril la pérennité même du service public. Ces risques sont accrus également par l'éloignement géographique du centre hospitalier de Nevers des sites pivots d'autres départements, notamment des centres hospitaliers les plus proches, celui de Dijon, à plus de 200 kilomètres, celui de Clermont-Ferrand, à plus de 150 kilomètres, ou celui de Paris, à 235 kilomètres.
Je souhaite donc savoir comment le ministère de la santé et le Gouvernement envisagent de réagir pour pallier cette insécurité sanitaire et quels moyens ils comptent mettre en oeuvre, dans des délais nécessairement rapprochés, pour garantir à la population nivernaise l'accès aux soins, et à des soins de qualité.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité attirer l'attention du ministre de la santé et de la protection sociale sur la pénurie de médecins que connaît en effet notre pays.
Le ministre est conscient de la situation, et le Gouvernement met en oeuvre un certain nombre de mesures concrètes pour y faire face.
II s'agit tout d'abord de mesures d'attractivité pour le système hospitalier public.
Je citerai en premier lieu à la prime d'engagement de servir sur un poste défini à recrutement prioritaire, dans les zones géographiques déficitaires.
Vient ensuite la revalorisation de l'ensemble des rémunérations des praticiens hospitaliers, avec des grilles plus attractives et des indemnités d'engagement de service public exclusif.
Enfin, la politique de réorganisation hospitalière, dans le cadre du projet « Hôpital 2007 », doit conduire à une utilisation optimale des ressources médicales, avec une approche territoriale des besoins de santé.
En outre, les départs à la retraite massifs de médecins, autour de 2015, vont s'accompagner d'une diminution de la démographie médicale. Ce différentiel entre les arrivées de nouveaux médecins et les départs est la conséquence directe d'un numerus clausus trop restrictif.
Les simulations réalisées par le ministère de la santé et les travaux de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé montrent que seul le relèvement du numerus clausus permettra de stabiliser les effectifs médicaux à l'horizon 2015. A cette date, la proportion de femmes médecins sera de 50%.
C'est pourquoi le ministre de la santé et de la protection sociale a souhaité un numerus clausus de 7000 étudiants en médecine.
Par ailleurs, il est exact que la répartition géographique est inégale et que certaines zones sont plus durement touchées que d'autres par cette baisse démographique.
Il s'agit d'un phénomène complexe qui ne touche pas seulement la médecine et les soins mais qui affecte l'ensemble des services publics. Il convient que l'Observatoire de la démographie des professions de santé, en concertation avec les syndicats d'étudiants en médecine, les professionnels et les doyens, fasse des propositions pour pallier cet état de fait.
Enfin, l'article 135 de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique prévoit la mise en place d'un dispositif de prolongation d'activité des praticiens - visés à l'article L. 6152- 1 du code de la santé publique - après la limite d'âge qui leur est opposable, dans la limite de trente-six mois maximum, sous réserve d'aptitude médicale.
Ce dispositif entrera en vigueur à compter de la date de publication du décret d'application qui est actuellement en cours d'examen au cabinet du ministre de la santé.
M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud.
M. Didier Boulaud. Ces mesures à venir sont intéressantes, madame la secrétaire d'Etat, et je vous remercie de les avoir détaillées dans votre réponse. Cependant, nous allons être confrontés, en particulier dans l'établissement que je préside, à l'urgence. Demain, un certains nombre de services seront dépourvus de praticiens hospitaliers, et donc contraints à la fermeture.
Vos propos sont encourageants, mais, confrontés à cette carence de praticiens hospitaliers, les hôpitaux font feu de tout bois en recourant à des contrats temporaires en général très coûteux.
Par ailleurs, je relève une contradiction entre la réalité et ce qui nous est proposé. En effet, le ministre de la santé a demandé aux établissements publics de réaliser 850 millions d'euros d'économie. Or l'hôpital de Nevers, mais ce n'est qu'un exemple, se trouve dans l'incapacité de réaliser ces économies, étant obligé de payer des anesthésistes contractuels à des prix défiant toute concurrence. Cette pratique est susceptible de se reproduire dans le cas des urgences et de la pédopsychiatrie. C'est un non-sens !
Comment peut-on dans le même temps nous enjoindre de réaliser des économies et nous obliger, pour assurer la continuité du service, à dépenser, à notre plus grand regret, des sommes très importantes ?
Depuis des années, la situation en Bourgogne est très difficile, malgré quelques rattrapages, hélas insuffisants. L'hôpital de Nevers connaît aujourd'hui un déficit de 10 millions d'euros. Il en sera de même pour six ou sept grands établissements hospitaliers de Bourgogne. Ce n'est donc pas le moment opportun pour nous demander d'économiser 850 millions d'euros.
Madame la secrétaire d'Etat, vous avez fait allusion, à juste titre, à la nécessité, pour les centres hospitaliers universitaires, de venir en aide aux territoires les plus déshérités. C'est vrai, en particulier, du CHU de Dijon, que l'on aimerait voir déployer ses efforts en direction des hôpitaux périrégionaux. Cela n'est malheureusement pas encore le cas, en dépit de l'importance des effectifs des CHU comparés à leurs besoins. Les doyens ont ici un rôle majeur à jouer.
J'ajoute que notre agence régionale de l'hospitalisation attend encore son directeur. Pour une région comme la nôtre ! Depuis que l'ARH a été mise en place, nous avons vu passer trois directeurs, en coup de vent. Le dernier n'est resté qu'un an et demi, et nous nous retrouvons aujourd'hui sans interlocuteur susceptible de régler ces problèmes.
Je vous remercie encore de votre réponse, madame la secrétaire d'Etat, mais je veux que cette question soit un véritable cri d'alerte, car des services seront probablement fermés.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à onze heures.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy, auteur de la question n° 545, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Philippe Leroy. Je tiens à attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les réformes qu'il est prévu d'apporter au système français d'immatriculation des véhicules.
Le système actuel est arrivé au bout de ses possibilités ; il faut donc le réformer. Il semblerait que l'administration envisage un système d'immatriculation modernisé - deux lettres, trois chiffres, deux lettres - expérimenté d'ailleurs sur certains points du territoire. Ce système ne ferait plus mention du département de résidence du propriétaire du véhicule.
Nous nous trouverions progressivement avec un parc automobile calqué sur ceux de nos voisins européens. Cet anonymat nouveau nous priverait de plaisirs intenses. Cela interdirait à nos compatriotes de province de traiter les 75 de Parisiens et me priverait du bonheur d'être qualifié d'Allemand quand je rencontre des difficultés pour garer mon véhicule à Nancy ! (Sourires.)
De même, nous perdrions toute la saveur de ces leçons de géographie improvisées qui nous permettaient, tout en faisant réviser leurs départements à nos enfants, de leur apprendre la France et sa diversité. C'est en somme une partie de notre identité qui disparaîtrait.
Ne voyez rien de ringard dans mon propos, monsieur le ministre : de nombreux Français souhaitent voir maintenus sur les plaques d'immatriculation des véhicules des signes tangibles d'appartenance à un territoire, au lieu de ces suites de chiffres aussi neutres et sans saveur que des numéros de sécurité sociale qui sont envisagées.
Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2005 prévoit qu'une partie des taxes additionnelles sur les contrats d'assurance automobile sera versée aux départements pour compenser, par exemple, les frais des services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS. Ensuite, on supprimera la DGF pour transmettre aux départements une partie du produit de ces taxes sur les assurances. Or la répartition entre les départements se ferait en fonction du nombre de véhicules localisés. L'administration sera donc tenue de continuer à identifier le département de résidence du propriétaire du véhicule.
Par conséquent, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas trouver un système d'immatriculation nous permettant de conserver pour nos véhicules cette marque de rattachement à un territoire, cette identification locale.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué le « Parisien du 75 », l'« Allemand » à Nancy. Eh bien, vous avez devant vous le « paysan de Paris », jugement sans appel que me vaut mon immatriculation dans le 77 ! (Sourires.)
M. le président. L'humour a sa place dans cet hémicycle !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Cela étant, monsieur le sénateur, même si vous le posez avec l'humour que l'on vous connaît, le problème est bien réel.
Nos concitoyens nous demandent de simplifier les contraintes administratives qui pèsent sur eux, notamment pour l'obtention du certificat d'immatriculation. Il nous incombe en conséquence de réformer ce système ce qui, vous le savez, a donné lieu à une réflexion menée en liaison avec le ministère chargé des transports et avec les représentants des professionnels de l'automobile, y compris les équipementiers.
Le Gouvernement a pour principal objectif de simplifier les démarches administratives auxquelles sont soumis les automobilistes pour obtenir un certificat d'immatriculation ou en faire modifier la teneur, et je parle sous le contrôle de M. le ministre de l'équipement, puisque nous réfléchissons ensemble sur ces sujets.
Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, il est envisagé d'attribuer à chaque véhicule d'ici à 2007 ou 2008, un numéro d'immatriculation à vie, depuis sa première mise en circulation jusqu'à sa destruction, quelles que soient l'identité et l'adresse de son propriétaire.
Grâce à la mise en place d'un dispositif centralisé de production des cartes grises et au développement de la télétransmission, les usagers pourront passer par le vendeur pour l'immatriculation du véhicule. Cela correspond à une modernisation très forte de notre administration nationale. En effet, ce dispositif concernerait aussi bien les véhicules neufs que les véhicules d'occasion achetés auprès des professionnels.
L'immatriculation est destinée à être attribuée dans une série nationale chronologique sans lien avec le lieu de résidence du propriétaire et donc sans référence départementale.
En même temps, le Gouvernement est parfaitement conscient de l'attachement des Français au département ou à la région dont ils sont originaires, en l'occurrence le département pour ce qui concerne les plaques d'immatriculation, et c'est ce qui fait que, susceptibilité mise à part, le côté « paysan de Paris » a, malgré tout, un côté sympathique !
Il est donc prévu de laisser au propriétaire la faculté de faire apposer sur les plaques minéralogiques avant et arrière du véhicule, dans le prolongement du numéro d'immatriculation proprement dit, un référent local portant sur le département ou la région administrative de son choix. Cette proposition, qui constitue un bon compromis, est de nature à concilier les différentes contraintes que vous avez évoquées.
Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, notre projet n'a pas pour objet d'empêcher nos concitoyens d'exprimer leur attachement à leur département ou à leur région au travers de la plaque minéralogique de leur véhicule. Au contraire, il s'inscrit dans le souci légitime de la modernisation de l'administration française auquel nos concitoyens, comme vous-même, monsieur le sénateur, sont très attachés.
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy.
M. Philippe Leroy. Monsieur le ministre, je vous remercie de l'esprit d'ouverture dont votre gouvernement fait preuve.
Je voudrais néanmoins attirer votre attention sur la façon dont sera opérée, dès l'année prochaine, l'affectation des véhicules à chacun des départements pour la répartition des taxes additionnelles sur les contrats d'assurance. Cet aspect, même s'il peut paraître secondaire, mérite attention.
Ensuite, dans le sens des propositions que vous formulez avec M. le ministre chargé des transports, je souhaiterais une incitation plus forte que le seul volontariat, de façon que cette possibilité de mentionner le numéro du département n'apparaisse pas comme une invitation à la plus grande fantaisie, les uns choisissant l'anonymat total, les autres, au contraire, faisant figurer, pourquoi pas, le numéro du département où ils ont l'habitude de passer leurs vacances ou, pour des raisons diplomatiques, celui du département de leur belle-mère...
Si l'on veut faire figurer un numéro de département sur la plaque d'immatriculation d'un véhicule, je propose qu'il s'agisse du département de résidence du propriétaire.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Monsieur le sénateur, j'ai bien noté votre proposition et j'en rendrai compte aux groupes de travail que nous avons constitués.
Transports de fonds en zone rurale
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 556, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Bruno Sido. Monsieur le ministre, je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur les conséquences de l'application du décret n° 2004-295 du 29 mars 2004 sur l'activité des petites agences bancaires situées notamment en zone rurale.
Cette nouvelle réglementation du transport de fonds, dont l'objet, parfaitement légitime, est d'assurer une meilleure sécurité aux agents en charge du transfert, à la suite d'une sinistre série d'attaques à main armée, met en lumière la dangerosité de l'exercice de leurs fonctions et ne peut qu'être approuvée et soutenue dans son principe.
Sa stricte application, cependant, pourrait avoir des conséquences graves sur l'activité des petites agences bancaires situées en zone rurale, dont la clientèle est constituée principalement de personnes âgées et de commerçants.
II est en effet prévu que les transports de fonds par des employés des établissements bancaires soient interdits, supprimant ainsi le ramassage d'espèces et la démarche d'encaissement à domicile.
Par ailleurs, les petites agences ne pourront plus effectuer d'opérations de caisse, sauf si elles sont équipées d'une installation complète de sécurité permettant d'accueillir les transporteurs de fonds et de stocker les espèces. Or la plupart d'entre elles ne pouvant pas justifier d'un volume d'opérations susceptible d'amortir les investissements nécessaires, cela entraînerait de facto une fermeture par manque de moyens.
Je suis bien conscient de la nécessité d'assurer une plus grande sécurité aux transporteurs de fonds et, pour ce faire, d'édicter des règles qui ne peuvent souffrir d'exceptions. Il me semble cependant tout à fait souhaitable, et non contradictoire, que des mesures d'assouplissement soient envisagées concernant ces petites agences bancaires rurales qui ont recours à leurs propres employés pour rendre le meilleur service aux personnes qui ne peuvent se déplacer ou aux commerçants voisins.
La politique de rationalisation des postes et des perceptions en zone rurale est déjà suffisamment difficile à expliquer aux habitants et aux élus. Il serait, dans ce contexte, particulièrement bienvenu que le Gouvernement, conformément à l'esprit de la loi actuellement en débat sur le développement des territoires ruraux, fasse ici un effort de prise en compte des spécificités de ces territoires.
Donner au monde rural les moyens de son avenir est une impérieuse nécessité. Les campagnes, fragiles, - le Gouvernement l'a d'ailleurs bien compris - ont grand besoin qu'on les aide au moyen d'outils adaptés, de leviers économiques qui leur permettront de préserver les services publics et privés.
C'est dans cet esprit, monsieur le ministre, que je vous demande si le Gouvernement envisage d'intégrer au dispositif en question une petite dose de pragmatisme. Comme vous le savez, les petits ruisseaux font les grandes rivières, et il y va ici du développement des territoires ruraux.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur. Monsieur le sénateur, toute notre action est empreinte de pragmatisme. Rien ne serait pire que d'en appeler à l'idéologie et au dogme alors même que nous savons bien que nous avons chaque fois à faire face à des problèmes spécifiques et que les situations en zone rurale ne sont pas les mêmes selon qu'il s'agit de secteurs périurbains ou de secteurs purement ruraux. C'est tout l'enjeu du travail que nous accomplissons ensemble.
Pour ce qui concerne l'état de la réglementation en matière de transports de fonds, vous exprimez vos préoccupations à propos des conséquences de l'application du décret du 29 mars 2004 sur l'activité des petites agences bancaires situées en zone rurale.
Ce décret élargit la possibilité de recourir aux véhicules banalisés pour le transport de valeurs. Il est donc sans incidence sur le maintien ou la fermeture d'établissements bancaires.
Ce décret a fait l'objet d'une intense concertation. La réglementation en vigueur résulte de compromis très difficiles à obtenir, mais notre démarche est tout entière inspirée du pragmatisme dont je parlais à l'instant, parce qu'il est absolument indispensable que, dans ce domaine, chacun puisse trouver des éléments de consensus. Or il y avait beaucoup de monde autour de la table : les syndicats de transporteurs de fonds, les employeurs, les donneurs d'ordre et les représentants du ministère de l'intérieur.
Je vous le dis tout net, il n'est pas facile de proposer aujourd'hui de revenir sur un accord consensuel et, encore une fois, empreint de pragmatisme.
Il faut bien avoir à l'esprit que les règles applicables aux transports de fonds par les salariés des donneurs d'ordre n'ont été modifiées ni par la loi de mars 2003 ni par le décret de 2004.
L'interdiction du transport de fonds par des employés des établissements bancaires relève de principes posés par un décret antérieur, datant du 28 avril 2000. Ce n'est donc pas une nouveauté pour les établissements bancaires, qui se sont déjà adaptés à cette contrainte.
Pour ce qui est des installations de sécurité nécessaires à l'accueil des transporteurs de fonds, là encore, la palette de solutions proposée par le décret de décembre 2000 est large.
Le sas isolé n'est pas l'unique dispositif autorisé. Des trappons permettant l'accostage latéral ou l'accolement du véhicule sont autorisés. En outre, si ces installations ne peuvent pas être réalisées, d'autres dispositifs plus souples peuvent être combinés : le coffre ou le guichet sécurisé, le système de vidéosurveillance, le système d'alarme.
Là encore, le décret de mars 2004 n'a rien changé à la réglementation existante. Par conséquent, même si certaines banques justifient par cet argument leurs décisions de fermeture, je ne suis pas dupe : la loi pour la sécurité intérieure et ce décret d'application ne sont pas la cause des fermetures d'agences.
Les clients sont néanmoins en droit de se demander si tout cela n'obéit pas plutôt à une logique de rentabilité : c'est un sujet plus vaste qui concerne l'attractivité de nos territoires.
Comme tous nos concitoyens, vous avez encore en mémoire la trop longue liste des attaques menées contre les convoyeurs de fonds, notamment entre 1998 et 2002, et vous vous rappelez les vastes mouvements de protestation des transporteurs qui en ont résulté.
Au cours de cette période, trente-sept convoyeurs de fonds ont été blessés et douze ont payé de leur vie l'exercice d'un métier périlleux. Pour éviter la répétition de ces agressions aux conséquences tragiques, nous devons nous montrer intransigeants sur l'application des règles de sécurité : il n'est pas question de nous contenter d'une « sécurité au rabais ».
Enfin, monsieur le sénateur, puisque vous avez évoqué les fermetures de services publics en milieu rural, je tiens à revenir sur le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.
Le Gouvernement avait donné un avis très favorable à un amendement du Sénat visant à améliorer la concertation et à donner aux préfets de nouveaux pouvoirs pour « initier toute action visant à garantir que l'offre d'accès aux services publics est adaptée aux caractéristiques des territoires, concourt à leur attractivité et au maintien de leurs équilibres ». C'est sur cela que nous allons nous appuyer pour faire en sorte que l'attractivité des services publics en zone rurale soit désormais une priorité absolue. Dans ce domaine, nous aurons grand besoin de la représentation parlementaire qui, sur le terrain, joue un rôle précieux, et je sais que c'est particulièrement vrai dans votre cas, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.
M. Bruno Sido. Monsieur le ministre, je n'ai jamais prétendu que le décret en question était la cause des fermetures d'agences. Mais, comme tout un chacun dans cet hémicycle, je note que, trop souvent, des services au public ferment, et les banques en font partie, la réglementation les y contraignant parfois, car la rentabilité n'est pas suffisante eu égard aux équipements imposés.
Monsieur le ministre, j'ai noté que vous faisiez preuve de pragmatisme, ce dont je n'ai jamais douté, et que des adaptations en fonction des nécessités locales étaient envisageables, sinon possibles. Il faudra, je pense, en discuter avec les préfets pour que, finalement, les agences ne ferment pas.
Aujourd'hui, les populations vivant dans les zones rurales assistent à un véritable bouleversement de l'organisation du territoire : les postes ferment les unes après les autres, même si certaines sont transformées en « points Poste », les perceptions se réorganisent... Mon seul souci était d'attirer votre attention afin que vous n'en rajoutiez pas ! Mais je vous remercie, monsieur le ministre, de votre ouverture d'esprit.
Aménagement de la RN 102 reliant la vallée du Rhône à l'autoroute A 75
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 570, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.
M. Jean Boyer. Monsieur le ministre, je suis très sensible à votre présence ce matin, et je sais qu'il en est de même pour M. Adrien Gouteyron, qui occupe actuellement le fauteuil de la présidence et que j'associerai à mon propos.
Monsieur le ministre, les perspectives liées à la décentralisation et aux transferts de compétences suscitent des interrogations sur le devenir de certains axes de communication. L'avenir de la RN 102, notamment, véritable trait d'union entre la vallée du Rhône et l'autoroute A 75, avec la traversée des départements de l'Ardèche et de la Haute-Loire, suscite des espoirs, mais aussi des inquiétudes.
Si l'on peut se réjouir du classement de cette transversale comme grande liaison d'aménagement du territoire par le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire du 18 décembre 2003, on doit s'interroger sur le devenir immédiat de cet axe majeur pour l'aménagement de notre territoire, ainsi que sur les perspectives d'aménagement et de sécurisation.
Depuis plus de vingt ans, en effet, aucun aménagement structurel n'a été programmé sur cet itinéraire, accentuant sa dangerosité. Les accidents mortels se sont multipliés, comme le rappellent chaque jour les silhouettes dressées au bord des routes.
Cette transversale revêt une importance capitale entre la vallée du Rhône, au bord de l'asphyxie, et Clermont-Ferrand puis Paris, via Le Puy-en-Velay et Brioude.
Sur ce dernier tronçon, les chiffres parlent d'eux -mêmes : plus de 15 000 véhicules par jour en période de pointe ! En onze ans, la circulation a augmenté de 27% et nous avons eu malheureusement à constater, durant la même période, 422 accidents, dont 68 mortels. Le tronçon Le Puy-en-Velay - Brioude est le plus prioritaire.
Cette liaison, inscrite sur la carte des infrastructures routières à l'horizon 2025, laisse perplexe l'ensemble des élus et des acteurs du monde économique. S'agit-il de la date de commencement des travaux - si l'on se fait l'avocat du diable ! - ou de leur date d'achèvement ?
Monsieur le ministre, je souhaite connaître précisément le calendrier permettant de croire à la sécurisation de cet itinéraire essentiel, au coeur de régions enclavées, aux handicaps naturels particulièrement lourds.
Par ailleurs, la participation de l'Etat est-elle d'ores et déjà programmée sur des aménagements classés prioritaires ? Relevant de la seule compétence de l'Etat, le financement de certaines opérations de sécurisation devra-t-il être assuré exclusivement dans le cadre de son budget ou, au contraire, s'appuiera-t-il sur une contractualisation avec la région et le département ?
Il s'agit, monsieur le ministre, de questions essentielles pour les femmes et les hommes, de plus en plus nombreux, qui empruntent quotidiennement cette route.
Je vous remercie par avance de votre réponse.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, je suis moi aussi très heureux d'être présent pour répondre à votre question, car je connais l'importance de cet axe de circulation particulièrement fréquenté et très accidentogène.
Dans le cadre de la politique nationale engagée en faveur de la sécurité routière, nous devons consacrer des efforts spécifiques pour certaines parties du territoire qui se signalent par une particulière dangerosité et des statistiques très préoccupantes.
Vous avez appelé mon attention sur la RN 102, qui relie le couloir rhodanien à l'autoroute A 75, plus particulièrement sur la partie située en Haute-Loire. D'une certaine manière, le Gouvernement a bien compris l'intérêt que présente cette route pour la Haute-Loire et l'Ardèche puisqu'il l'a classée grande liaison d'aménagement du territoire lors du CIADT du 18 décembre 2003.
A cette occasion, nous avons pris un certain nombre de décisions concernant de grandes infrastructures, de grands classements et, parallèlement, nous avons prévu les moyens financiers nécessaires avec la création de l'agence pour le financement des infrastructures de transport, l'AFIT, dont nous reparlerons à l'occasion de la discussion budgétaire dans quelques jours.
Un important aménagement est prévu sur la section comprise entre l'A 75 et le Puy-en-Velay ; il s'agit du contournement, sur treize kilomètres, de Brioude, Vieille-Brioude et Largelier.
Une première phase a été mise en service en 1998. Les travaux de la seconde phase ont débuté à la fin de l'année 2002 avec les ouvrages d'art courants. Les terrassements sont en cours depuis juin 2003 et le viaduc sur la Vendage devrait être achevé d'ici à 2005. La mise en service en totalité du contournement doit pouvoir intervenir en 2006.
Sur la section comprise entre Brioude et le Puy-en-Velay, les discussions menées lors de l'élaboration du contrat de plan entre l'Etat et la région Auvergne n'ont pas permis d'inscrire de financement. C'est un fait que l'on peut tous regretter, mais je vous ferai une proposition d'ouverture à la fin de mon intervention.
Pour répondre sans délai au souci - qui est aussi le vôtre - de sécurisation de cet itinéraire, il est prévu, dans le plan régional d'aménagement de sécurité, le PRAS, la réalisation du giratoire de Coubladour, à l'intersection de la route nationale 102 et de la route départementale 906. Les travaux débuteront au printemps prochain.
D'autres points d'accumulation d'accidents méritent d'être traités avant la fin du contrat de plan ; ils sont en cours d'étude et il conviendra, en 2005, de préciser leur programmation, que nous suivrons ensemble.
Je peux d'ores et déjà vous dire - ce sont les dernières nouvelles annoncées, voilà dix jours à peine, en Corse, par le Premier ministre -, sur la relance du volet routier des contrats de plan, que 300 millions d'autorisations de programme supplémentaires et 150 millions d'euros de crédits de paiement peuvent laisser espérer une certaine accélération du traitement des points les plus accidentogènes. Nous pouvons d'autant plus nous réjouir de cette nouvelle que ce n'est pas rien, à l'heure actuelle, de sortir 150 millions de crédits de paiements, en euros surtout !
Une étude est lancée pour définir les aménagements souhaitables sur cet axe. Nous devons en particulier examiner la mise à deux fois deux voies de l'ensemble de la section A 75 - Brioude sur dix kilomètres, compte tenu des trafics atteints : 13 000 véhicules par jour. Au-delà de Brioude, en direction du Puy, nous devons également réfléchir aux opérations supplémentaires à engager au-delà du XIIe plan pour adapter cet itinéraire à la croissance progressive du trafic.
En tout état de cause, le financement de ces aménagements devra trouver sa place dans le cadre des prochains contrats de plan, à moins, monsieur le sénateur - et c'est là que je fais l'ouverture importante à laquelle je faisais allusion tout à l'heure -, qu'il y ait un consensus entre les parties signataires du contrat de plan, notamment eu égard aux crédits qui viennent d'être annoncés par le Premier ministre.
Je suis tout à fait ouvert à des propositions de modifications, à l'intérieur de la même enveloppe bien sûr, qui seraient destinées à privilégier certains tronçons de cette voirie à grande circulation au détriment de projets dont les études seraient moins avancées, de façon, là encore, à améliorer la sécurité.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre insistance, qui est tout à fait justifiée. Là encore, je suis tout à fait ouvert à la possibilité de modifier par avenant le contrat de plan pour accélérer certains aménagements particulièrement dignes d'intérêt, sur le plan notamment de la sécurité routière.
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Ma réponse sera courte, mais sincère : je vous remercie, monsieur le ministre. Nous avons pu constater que vous aviez examiné le dossier, que vous aviez pris en compte toutes les difficultés et mesurer la nécessité, pour ne pas dire l'urgence, d'agir.
Permettez-moi, enfin, de vous rappeler que, sur l'initiative d'Adrien Gouteyron, nous avons demandé à vous rencontrer, et nous souhaitons que cela se fasse le plus rapidement possible.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez raison de me le rappeler. Je vous promets que, dans les quatre semaines qui viennent, nous aurons le plaisir de nous rencontrer et de discuter encore plus concrètement de voirie, notamment de celle-ci.
situation de la mutuelle de prévoyance et de l'habitat à la Réunion
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 558, transmise à Mme la ministre de l'outre-mer.
Mme Anne-Marie Payet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'outre-mer et concerne les graves difficultés auxquelles est confrontée aujourd'hui la Mutuelle de prévoyance et de l'habitat de la Réunion, la MPHR.
Par le biais de ses garanties « Emprunteur » et « Cautionnement », cet organisme a permis, depuis le début de son activité en 1988, à plus de 2 000 familles réunionnaises de devenir propriétaires de leur logement social, qu'il s'agisse d'un logement évolutif social, LES, ou d'un logement très social, LTS.
A la suite de la réforme du code de la mutualité par l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001, les dispositions en vigueur depuis le 1er janvier 2003 ont imposé à la MPHR de nouvelles obligations.
Ces dernières ont été partiellement mises en oeuvre. Ainsi, il a été procédé à la création d'une mutuelle dédiée, la Mutuelle pour l'insertion par le logement, la MIL, qui gère l'activité de cautionnement, devenue incompatible avec les autres activités de la mutuelle, à savoir la garantie « Emprunteur » et la couverture des frais d'obsèques.
Etant dans l'impossibilité d'atteindre les nouvelles garanties financières exigées, qui sont extrêmement importantes, la MPHR a signé un contrat collectif avec une mutuelle agréée, afin d'être en mesure de poursuivre ses activités dans le nouveau cadre réglementaire.
S'agissant de la MIL, les démarches entreprises auprès de structures mutualistes ou d'assurances, en vue de concrétiser une mise en conformité dans le même sens, sont restées vaines. Aujourd'hui, la MIL se trouve donc dans une situation extrêmement périlleuse, puisqu'elle risque tout simplement de disparaître.
Dans une telle éventualité, les conséquences seraient désastreuses.
En effet, des centaines de familles bénéficiant de la garantie de cautionnement devraient affronter de graves difficultés, car elles ont encore devant elles de nombreuses échéances de remboursement de leurs emprunts.
Par ailleurs, toute possibilité de reprise de la vente des LTS serait gravement compromise, dans la mesure où il n'existe pas, dans notre département, d'autres structures susceptibles de proposer les mêmes garanties de cautionnement dans le cadre d'emprunts de familles défavorisées pour l'accession à la propriété de leur logement social.
Or il est également urgent de régulariser la situation de ces familles qui ne sont pas encore propriétaires. En effet, la plus grande majorité d'entre elles occupent ces logements depuis plus de quinze ans, voire vingt ans, et plus les années passent, moins elles sont éligibles à des prêts.
L'accession à la propriété constitue un moyen d'insertion sociale des familles défavorisées.
Madame la ministre, la Mutuelle d'insertion par le logement a déposé une demande de dérogation auprès des services compétents, afin d'être en mesure de poursuivre ses activités. J'aimerais savoir quelle suite vous envisagez de réserver à cette demande.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Madame Payet, je vais essayer d'apporter quelques éléments de réponse au problème que vous avez évoqué de manière tout à fait légitime.
Vous attirez mon attention sur le risque que font peser les difficultés actuelles de la Mutuelle pour l'insertion par le logement de la Réunion, la MIL, sur l'accession au logement des plus défavorisés.
A ce jour, en effet, la MIL n'a pu satisfaire aux critères de sécurité financière en vigueur depuis le 1er janvier 2003 à la suite de la réforme du code de la mutualité.
La Mutuelle pour l'insertion par le logement ne peut, il est vrai, exercer son activité de cautionnement que si elle dispose des fonds propres nécessaires pour garantir qu'elle peut faire face à ses engagements ou si, à défaut, elle conclut une convention de substitution avec un autre organisme mutualiste capable d'en porter le risque financier.
Vous craignez qu'une éventuelle défaillance de la MIL ne remette en cause la garantie qu'elle est censée apporter aux familles modestes en matière d'accession à la propriété.
J'ai immédiatement saisi les services de mon collègue Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, qui détient la compétence relative aux mutuelles régies par le code de la mutualité. Il convient, en effet, que les organes représentatifs de la mutualité puissent rechercher toutes les solutions adaptées pour éviter des conséquences qui pourraient se révéler tout à fait catastrophiques.
Le dossier a notamment été transmis à la commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance, qui veille, dans l'intérêt des assurés, à la bonne marche des organismes pratiquant une activité d'assurance en France.
Madame la sénatrice, je peux vous assurer que je suis ce dossier avec beaucoup d'attention, en liaison avec Philippe Douste-Blazy. Nous allons évidemment tout faire pour que les assurés ne subissent aucune conséquence dommageable, afin de ne pas accroître la précarité de ceux qui ont tellement besoin de ce système d'assurance.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse qui, par sa clarté, est de nature à rassurer les professionnels réunionnais ; je la transmettrai aux intéressés.
retraites agricoles complémentaires
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 541, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
M. Roland Courteau. Une nouvelle fois, et après avoir rencontré récemment une délégation d'anciens exploitants de mon département, je souhaite qu'un point précis puisse être fait sur les conditions de la mise en oeuvre de la retraite complémentaire obligatoire des agriculteurs instituée par la loi du 4 mars 2002 tendant à la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.
Je souhaite rappeler très rapidement le problème qui nous est posé par le décret n° 2003-146. En effet, son application fait apparaître deux catégories de retraités : d'une part, ceux qui ont pris leur retraite avant le 1er janvier 1997 et qui doivent justifier de trente-deux ans et demi d'activité agricole non salariée, dont dix-sept ans et demi en qualité de chef d'exploitation à titre exclusif ou principal ; d'autre part, ceux qui ont pris leur retraite après le 1er janvier 1997 et qui doivent simplement justifier de trente-sept ans et demi de cotisation, tous régimes confondus, dont dix-sept ans et demi en qualité de chef d'exploitation.
L'application de ces dispositions dans le département de l'Aude « élimine » 12 200 retraités sur 15 525. C'est dire ! En Languedoc-Roussillon, 58 512 anciens exploitants, sur les 73 000 retraités agricoles que compte la région, sont écartés du bénéfice de la retraite complémentaire.
Comment une telle situation ne susciterait-elle pas colère et incompréhension ?
En janvier dernier, j'avais insisté sur le caractère particulièrement ubuesque et injuste d'un tel dispositif, en citant des exemples précis. Je n'y reviens pas, d'autant que M. le ministre de l'agriculture m'avait semblé en prendre bonne note. Il m'avait d'ailleurs répondu en ces termes : « Sur ce point, le Gouvernement reste ouvert à la discussion. Lors de l'élaboration de la loi de finances pour 2005, dans le cadre des arbitrages qui concerneront mon ministère, (...) nous pourrons tenter de résoudre les problèmes que vous avez illustrés de manière fort éclairante au moyen de cas individuels. Cela montre une fois de plus que, lorsqu'on met en place des règles, la situation individuelle des personnes peut faire apparaître la nécessité d'apporter un certain nombre d'améliorations. » On ne saurait mieux dire...
Rendez-vous était donc pris, semble-t-il, pour la période de préparation du projet de loi de finances pour 2005. Par conséquent, j'ai déposé ma question orale le 5 août dernier, c'est-à-dire le plus en amont possible de cette préparation budgétaire, et j'interviens aujourd'hui, à quelques jours seulement de la discussion budgétaire, ici, au Sénat.
Deux solutions sont proposées au Gouvernement.
La première consisterait à laisser aux anciens exploitants le libre choix de l'une ou de l'autre des conditions fixées par le décret. La seconde consisterait à accorder aux anciens exploitants la retraite complémentaire au prorata de leur carrière. Ainsi, celui qui aurait cotisé durant trente ans pourrait percevoir les trente trente-septièmes de la retraite complémentaire. Dans la même logique, celui qui aurait cotisé vingt ans percevrait les vingt trente-septièmes de la retraite complémentaire, et ainsi de suite.
Voilà deux solutions pour sortir de l'injustice, monsieur le secrétaire d'Etat. Quoi qu'il en soit, il faut modifier ce décret « couperet » qui écarte un nombre considérable d'anciens exploitants du bénéfice des dispositions d'une loi que nous, parlementaires, avions adoptée à l'unanimité. Nous considérions, en effet, qu'il s'agissait là, précisément, d'une avancée sociale majeure, porteuse de justice et d'équité. Or, du fait de l'application de ce décret, nous ne retrouvons ni l'équité ni la justice.
Pour conclure, je le rappelle encore une fois, en l'espèce, nous traitons de la situation d'hommes et de femmes parmi les plus âgés des anciens exploitants, qui ont travaillé durement toute leur vie.
Pouvez-vous donc me confirmer aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, que, conformément aux propos que M. le ministre de l'agriculture a tenus en janvier dernier, nous allons avancer, enfin, dans le traitement de cet important dossier.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur Courteau, vous m'interrogez sur la question de l'accès au régime de retraite complémentaire obligatoire agricole. J'ai été sensible à vos propos, car c'est un sujet que je connais bien et qui concerne nombre de personnes, y compris dans le département dont je suis originaire.
Le Gouvernement est particulièrement conscient des problèmes qui se posent en la matière et il a déjà beaucoup agi pour améliorer les retraites agricoles, dans le prolongement, d'ailleurs, du travail mené par des gouvernements différents, respectivement ceux de MM. Balladur, Juppé et Jospin.
M. Roland Courteau. C'est exact !
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. En l'occurrence, c'est le gouvernement conduit par M. Jean-Pierre Raffarin qui a mis en oeuvre la retraite complémentaire obligatoire des exploitants agricoles, prévue par la loi du 4 mars 2002, en assurant son financement. Nous avons ainsi rendu réels des droits qui n'étaient encore que virtuels au début de cette législature.
Par ailleurs, nous avons mis en place la mensualisation des retraites agricoles.
En réalité, monsieur le sénateur, le décret que vous évoquez ne fait que préciser, comme il se doit, la loi du 4 mars 2002 préparée par le gouvernement de M. Lionel Jospin. C'est bien cette loi qui prévoit, dans son article 2, la différenciation des conditions d'accès aux droits gratuits de retraite complémentaire, entre les assurés retraités avant le 1er janvier 1997 et ceux qui le sont devenus après cette date. Vous avez d'ailleurs vous-même rappelé que cette loi avait été adoptée à l'unanimité.
Je dois également vous préciser que l'article 4 du décret permet l'attribution de points gratuits de retraite complémentaire obligatoire, au prorata du nombre d'années effectuées en qualité de chef d'exploitation par les assurés. C'est une vraie avancée, notamment pour les retraités qui n'ont jamais cotisé à ce régime complémentaire.
Cependant, le dispositif prévu a aussi, bien sûr, un coût. Si le nouveau régime obligatoire implique, comme tout régime de retraite complémentaire, la contribution des assurés, il a conduit l'Etat à prendre ses responsabilités, par le biais d'une participation financière importante, afin de corriger le déséquilibre de la démographie agricole.
Nous sommes, comme vous, particulièrement attachés à l'amélioration de la protection sociale agricole et à la poursuite de l'évolution des retraites agricoles. Notre ambition doit se situer dans l'action, mais elle doit répondre également à un souci d'équité, en tenant compte, je suis obligé de le dire, des équilibres économiques et des réalités financières de notre pays. Il faut donc agir étape par étape. A cet égard, je vous ai rappelé les décisions très importantes qui ont été mises en oeuvre par le gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin.
S'agissant, plus précisément, de la suite du calendrier et de l'évolution de la retraite complémentaire obligatoire pour les agriculteurs, nous travaillons actuellement, M. Hervé Gaymard et moi-même, avec les organisations professionnelles agricoles et avec les associations de retraités - j'en recevrai moi-même une bientôt -, sur l'amélioration des prestations pour les retraites de base et sur les retraites complémentaires. Nous sommes tout à fait déterminés à décider des évolutions importantes, avant la fin de cette législature, pour progresser sur ce dossier.
J'ai bien noté les deux possibilités que vous avez évoquées, c'est-à-dire soit le libre choix de l'une ou l'autre des conditions fixées par décret, soit le choix de la proratisation complète. J'étudierai moi-même ces propositions et je suis prêt à en reparler avec vous. Nous confronterons nos propositions avec celles des professionnels concernés.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous dire que je suis également tout à fait conscient de la situation en Languedoc-Roussillon. Nous devons avancer, pas à pas. Il faut, d'une part, tenir compte du principe d'équité, dans le respect des textes existants ; les décrets ne sont d'ailleurs jamais que l'application des lois votées. Il faut, d'autre part, tenir compte des contraintes budgétaires qui s'imposent au Gouvernement, comme à l'ensemble du pays.
conséquences des fermetures de consulats
M. le président. La parole est à Monique Cerisier-ben Guiga, auteur de la question n° 571, adressée à M. le ministre des affaires étrangères.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le secrétaire d'Etat, les circonstances font que je voudrais, tout d'abord, rendre hommage au ministère des affaires étrangères, et tout particulièrement à la direction des Français de l'étranger et au consulat de France à Abidjan. Ils ont fait face avec efficacité aux conséquences de la crise ivoirienne, dramatiques pour nos compatriotes.
Je remercie tous les personnels du ministère qui se sont portés volontaires pour participer à la cellule de crise, tous les chefs de service qui ont passé de longues nuits à Roissy, tous les services de l'Etat et ceux de la Seine-Saint-Denis qui ont organisé l'accueil de plus de 5 000 personnes, et ce en moins d'une semaine, avec l'aide de bénévoles de la Croix-Rouge et du Secours catholique, mobilisés par centaines.
Cet hommage sincère prononcé, je dois faire état de mon désaccord non seulement sur un point particulier, à savoir la fermeture de consulats programmée en Allemagne, en Afrique et en Amérique latine, mais aussi, plus généralement, sur le plan de réduction du dispositif diplomatique, culturel et consulaire.
Mes deux propos ne sont pas sans lien. C'est parce que le ministère des affaires étrangères enracine son action dans le concret, dans le travail consulaire, qu'il dispose de tant d'agents aguerris, dévoués, aptes à gérer des situations de crise telles que celle que nous connaissons en ce moment.
C'est pourquoi je m'attache, aujourd'hui, aux conséquences de ces fermetures non seulement sur le plan proprement consulaire, mais aussi sur le plan diplomatique. Les consulats prétendument d'« influence » sont, de mon point de vue, une notion vide de sens. Ainsi, comment le président du land de Bade-Wurtemberg, par exemple, pourrait-il jamais voir un interlocuteur dans le directeur du centre culturel français, fût-il décoré du titre de consul ?
L'influence d'un diplomate, comme celle de n'importe quel responsable administratif, découle de l'importance de la structure qu'il dirige. Or une coquille vide n'est pas un lieu de pouvoir. Des protestations se font entendre depuis plusieurs mois de la part de nos partenaires allemands, gabonais - je pense à PortGentil -, mais aussi malgaches et brésiliens. Tous ressentent cruellement l'abîme qui sépare les grandes déclarations diplomatiques de la politique de terrain.
Pour les usagers nationaux des pays situés hors de l'Europe, la fermeture de nos postes diplomatiques aura forcément des conséquences en matière de demande de visas. Eloigner volontairement le lieu de dépôt des demandes de visas, c'est empêcher les déplacements en France des citoyens, étudiants et hommes d'affaires, et c'est fermer la porte de la France à des amis et à des partenaires.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande donc de transmettre cet appel à M. le ministre des affaires étrangères : il faut revoir le plan de restructuration du réseau diplomatique et consulaire, parce qu'il met à mal nos relations privilégiées avec des pays tels que l'Allemagne, le Gabon, ou encore le Brésil. Je le répète, ce plan prive notre outil diplomatique de dimensions humaines, nées de la proximité et du travail de terrain, dont l'actualité vient de mettre l'importance en relief.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Michel Barnier, qui m'a demandé de bien vouloir le représenter, car il est retenu à l'Assemblée nationale pour présenter la partie du projet de loi de finances pour 2005 relative à son ministère. Par ailleurs, Mme Claudie Haigneré est à Strasbourg, M. Renaud Muselier est auditionné par la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et M. Xavier Darcos est retenu par le Conseil d'orientation stratégique et de programmation du CICID, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement. Ainsi aucun ministre de ce pôle n'était-il disponible aujourd'hui ! Mais, étant moi-même sensible à ces questions, c'est bien volontiers que je vous réponds aujourd'hui.
Tout d'abord, madame Cerisier-ben Guiga, je m'associe, au nom du Gouvernement, à l'hommage que vous avez tenu à rendre au personnel du ministère des affaires étrangères en Côte-d'Ivoire et à Paris, ainsi qu'aux services de l'Etat implantés en Seine-Saint-Denis. Comme vous, le Gouvernement a témoigné du rôle majeur qu'ont joué tous nos agents lors des événements douloureux qui viennent de se dérouler.
Vous vous inquiétez - et c'est l'objet de votre question, madame le sénateur - de l'évolution des postes consulaires.
A cet égard, je vous répondrai que l'influence d'un diplomate ne dépend pas uniquement de l'importance de la structure qu'il dirige. L'équation personnelle, l'entregent, l'habileté à se constituer des réseaux de personnalités influentes, la capacité à comprendre et à analyser les réalités locales - nous sommes loin de la simple « coquille » que vous évoquiez tout à l'heure - permettent à chacun d'être écouté et reconnu par les responsables du pays dans lequel il se trouve.
Ce qui importe, ce n'est pas la taille du poste, mais c'est le statut qui est reconnu à celui qui l'occupe par la convention de Vienne sur les relations consulaires, sans oublier la dimension personnelle que je viens d'évoquer et que le Quai d'Orsay a toujours cherché à mettre en avant.
Au-delà de ces considérations générales tenant presque à la philosophie de notre représentation à l'étranger, je soulignerai trois points.
Premièrement, en ce qui concerne les visas, les chefs de poste consulaire cités conservent un rôle suffisant pour continuer à exercer une réelle influence, et nous l'avons fait savoir aux autorités locales. Nous estimons aujourd'hui que les consuls d'influence peuvent participer de façon dynamique à la politique des visas dans leur circonscription consulaire. Il leur appartient de définir dans cette perspective, en liaison avec le consul de rattachement responsable de la délivrance des visas, les conditions précises dans lesquelles ils entendent s'impliquer dans le processus et favoriser des publics « ciblés ». Des instructions en ce sens ont été adressées aux chefs de poste concernés.
Deuxièmement, d'une manière générale, nous devons aujourd'hui nous inscrire dans une démarche résolument européenne. A l'intérieur de l'Union européenne, les administrations locales tendront à se substituer progressivement, vous le savez, aux consulats des Etats membres. A l'extérieur de l'Union, il faut engager dès à présent des opérations de « colocalisation », consistant à mettre en place des consulats uniques relevant d'un pays partenaire mais dotés de moyens et de personnels mutualisés. Tel est le sens des premières décisions arrêtées lors du conseil des ministres franco-allemand du 26 octobre 2004, qui visent à enclencher une nouvelle dynamique en matière de coopération consulaire au niveau européen.
Troisièmement, M. Michel Barnier m'a demandé de vous préciser que le réaménagement du réseau consulaire n'a entraîné, en 2004, la modification du champ d'activité que de quelques postes, situés à Alexandrie. Il faut donc relativiser les conséquences de cette décision, qui se justifiait par des raisons évidentes en termes d'organisation de l'administration. En 2005, le nombre des postes concernés par ces mesures ne devrait pas être supérieur à celui de 2004.
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre réponse.
Je tiens simplement à souligner que, si l'on décide la fermeture, chaque année, de quatre, cinq ou six postes dans des villes aussi importantes qu'Osaka, c'est pour mieux faire marche arrière ensuite ! Je prendrai un exemple : nous avons assisté, impuissants, à la fermeture du consulat de Melbourne, voilà moins de huit ans, malgré toutes nos protestations. Or, aujourd'hui, contrainte et forcée, la France doit rouvrir ce consulat, car il est impossible que nous n'ayons pas de représentation à Melbourne ! Heureusement, pour ce poste, les moyens seront mutualisés avec l'Allemagne.
Je ne dis pas qu'il faut garder en l'état toutes les structures ; pour autant, à partir du moment où Cologne est la quatrième ville d'Allemagne et le Bade-Wurtemberg, le land le plus francophile de ce pays, je souhaite simplement que, avant de nous priver de toute représentation consulaire dans la Ruhr, on y réfléchisse à deux fois ! On ne nomme pas des fonctionnaires de seconde catégorie à des postes pareils !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous le savez bien, quel fonctionnaire de direction irait prendre un poste où il n'aurait personne à diriger ?
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Philippe Richert.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Prestation de serment d'un juge à la Haute Cour de justice et d'un juge à la Cour de justice de la République
M. le président. Les juges à la Haute cour de justice et à la Cour de justice de la République qui n'ont pu prêter serment lors des séances du mardi 26 octobre et mercredi 3 novembre vont être appelés à prêter devant le Sénat le serment prévu par les lois organiques.
Je vais donner lecture de la formule du serment. Il sera procédé ensuite à l'appel nominal des juges. Je les prie de bien vouloir se lever, lorsque leur nom sera appelé, et de répondre, en levant la main droite, par les mots : « Je le jure ».
Voici la formule du serment : « Je jure et promets de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes, et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat ».
(Successivement, M. Laurent Béteille, juge titulaire à la Cour de justice de la République, et M. Roland Courteau, juge titulaire à la Haute cour de justice, se lèvent à l'appel de leur nom et disent, en levant la main droite : « Je le jure ».)
M. le président. Acte est donné par le Sénat du serment qui vient d'être prêté devant lui.
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Financement de la sécurité sociale pour 2005
Discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, adopté par l'Assemblée nationale. [N°s 53, 57 et 5.]
Avant de commencer la discussion générale, je vous rappelle, mes chers collègues, que la conférence des présidents a retenu des modalités particulières de discussion du présent projet de loi.
Motion d'ordre
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d'Etat, mes chers collègues, avant que ne s'ouvre la discussion générale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, je souhaite présenter à nos collègues l'organisation que nous avons envisagée pour l'examen de ce texte et que la conférence des présidents a bien voulu accepter.
Conformément à la pratique instituée voilà deux ans, nous souhaitons favoriser les discussions thématiques permettant d'isoler certaines dépenses en fonction de l'intérêt particulier qu'elles présentent d'un texte à l'autre.
Cette année, notre choix s'est porté, d'une part, sur l'assurance maladie, ce qui est naturel puisqu'elle constitue le coeur du projet - nous y consacrerons la journée de demain, en insistant particulièrement sur l'hôpital - et, d'autre part, sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles, notamment en raison de la question spécifique de l'amiante ; nous aborderons ce thème jeudi prochain.
En conséquence, les articles du projet de loi ont été rattachés à la partie spécifique de la discussion générale qui les concerne. Cela nous conduit à découper le projet de loi « en tranches », sans rien changer à son déroulement logique, afin de permettre à chacun d'entre nous de bien identifier le moment où il souhaite intervenir.
M. Paul Blanc. Très bien !
M. le président. Conformément aux propositions que vient de faire M. le président de la commission des affaires sociales, je soumets au Sénat une motion d'ordre concernant l'organisation de la discussion des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 :
Mardi 16 novembre, le soir :
Equilibres financiers :
Titre II (Dispositions relatives aux ressources) : articles 2 à 5 bis, soit sept articles ;
Titre V (Objectifs de dépenses révisés pour 2004) : article 31 ;
Titre VI (Mesures diverses et dispositions relatives à la trésorerie) : articles 32 à 35, soit six articles.
Mercredi 17 novembre, à quinze heures et le soir :
Débat organisé sur l'assurance maladie :
Titre III (Dispositions relatives à l'assurance maladie) : articles 6 à 18, soit dix-sept articles.
Jeudi 18 novembre, à neuf heures trente :
Débat organisé sur les accidents du travail et les maladies professionnelles :
Section 1 du titre IV (Branche accidents du travail et maladies professionnelles) : articles 19 à 23, soit six articles ;
L'après-midi et le soir :
Suite éventuelle de l'examen des articles 19 à 23 :
Section 2 du titre IV (Branche familles) : articles 24 A à 27, soit cinq articles ;
Section 3 du titre IV (Branche vieillesse) : articles 28 à 30, soit trois articles ;
Titre Ier (Orientation et objectif de la politique de santé et de sécurité sociale) : article 1er et annexe ;
Titre Ier bis (Contrôle de l'application des lois de financement de sécurité sociale) : articles 1er bis à 1er quinquies, soit quatre articles.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cette proposition d'agenda ?
M. le président. Il n'y a pas d'opposition ?...
En conséquence, cette proposition d'agenda est adoptée et les priorités et les réserves correspondantes sont ordonnées.
Discussion générale
M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 intervient dans un contexte particulier puisqu'il fait suite à trois grandes réformes sociales mises en oeuvre par le Gouvernement.
Tout d'abord, voilà un peu plus de trois mois, était promulguée la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.
Ensuite, en juin, vous avez voté la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
Enfin, la loi réformant notre système de retraites est entrée en application au cours de cette année à la suite de la publication de nombreux décrets.
Ces réformes fondamentales pour notre pays nous ont conduits à vous proposer un texte plutôt court et resserré, car la priorité est aujourd'hui la mise en oeuvre effective de l'ensemble de ces réformes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il y a deux ans, la sécurité sociale, à laquelle vous êtes tous ici profondément attachés, s'enfonçait dans une crise financière et institutionnelle. Chacun décrivait alors les réformes nécessaires, mais difficiles, voire impossibles à mettre en oeuvre.
En deux ans, nous avons assumé nos responsabilités et rassuré les Français sur l'avenir de notre sécurité sociale. Nous avons sauvegardé notre retraite par répartition, alors que certains disaient que nous allions la remettre en cause.
M. Guy Fischer. On va le répéter !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Nous avons construit les bases d'un système plus juste et plus solidaire. Car, dans ce type de situation, c'est l'immobilisme qui est le pire ennemi.
M. Laurent Béteille. Bravo !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Nous avons rénové la politique familiale pour l'adapter aux besoins de notre société ; Marie-Josée Roig vous en parlera.
Nous avons aussi refondé la politique de santé publique en donnant toute sa place à la prévention.
La création des groupements régionaux de santé publique, les GRSP, va permettre de rassembler les énergies au niveau régional pour atteindre les objectifs de santé publique. Nous poursuivons également, avec le plan « Hôpital 2007 », une modernisation en profondeur de l'hôpital : un plan d'investissement exceptionnel s'accompagne d'une modernisation de la gestion interne des établissements.
Nous avons enfin engagé une réforme structurelle de l'assurance maladie pour garantir sa pérennité.
Ces réformes vont permettre de consolider notre modèle de protection sociale en renforçant les droits des assurés.
L'effort engagé pour la mise en oeuvre de l'ensemble de ces réformes est très important. Il s'agit désormais de traduire celles-ci en changements effectifs pour nos concitoyens.
M. Roland Muzeau. Sur le dos des salariés ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Le déficit de la sécurité sociale devrait atteindre plus de 14 milliards d'euros en 2004, ce qui est considérable. Ce déficit est d'abord dû à l'atonie des recettes.
En 2004, la sécurité sociale ne bénéficiera encore que faiblement du redémarrage de la croissance du début de cette année : la masse salariale ne devrait augmenter que de 2,6 %.
Nous sommes en progrès par rapport à 2003 : la croissance n'atteignait que 1,7 %. Cela reste néanmoins très insuffisant pour faire face au dynamisme des dépenses.
En 2004, ce dynamisme des dépenses concerne d'abord l'assurance maladie. Il conduit à un déficit supérieur à 13 milliards d'euros, ce qui représente le point le plus bas jamais atteint par cette branche.
Nous aurons l'occasion de débattre plus précisément de l'assurance maladie demain après-midi. Je m'en tiendrai donc aux lignes directrices de notre action.
Ce sont précisément ces chiffres qui imposent la réforme de l'assurance maladie. L'un des objets de cette réforme consiste à freiner la tendance forte des dépenses, car celle-ci ne correspond probablement pas à la réalité des besoins de santé de la population, comme le notent de nombreux observateurs, notamment la Cour de comptes.
On nous disait que cette réforme n'était pas possible, alors qu'il y avait 13 milliards d'euros de déficit, soit 23 000 euros par minute. Il fallait réagir !
Certes, nous avions bien la solution de la maîtrise comptable, mais celle-ci consistait simplement à remettre en cause la médecine à la française et à transformer les médecins en salariés.
J'ai pris connaissance des notes établies par les différents ministères. Pour ma part, je ne veux remettre en cause ni la médecine à la française, ni le paiement à l'acte, ni la liberté d'installation ou de prescription, ni la liberté pour tout malade de choisir son médecin.
En revanche, je suis favorable à une politique de contrôle des arrêts maladie de courte durée et de longue durée. J'ai d'ailleurs le plaisir d'annoncer à votre Haute Assemblée une baisse des arrêts maladie de courte durée et des indemnités journalières, et ce pour la première fois depuis trente ans, grâce à la mise en oeuvre de cette politique de contrôle systématique.
L'année 2005 marquera un redressement sensible des comptes de la sécurité sociale, puisque le déficit de l'assurance maladie devrait s'élever à environ 8 milliards d'euros. Cela reste évidemment insuffisant, mais c'est un premier pas dans la bonne direction. Comme nous l'avons toujours dit, le retour à l'équilibre ne peut se faire d'un coup de baguette magique ; il sera donc progressif : l'année 2005 n'est qu'une première étape.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cette amélioration de 5 milliards d'euros de la branche maladie est, certes, quelque peu atténuée par le déficit important que devrait connaître la branche vieillesse du régime général en 2005 : près de 1,4 milliard d'euros.
Ce déséquilibre est surtout dû à une mesure que vous avez votée : la prise en charge de la mesure relative au départ anticipé des travailleurs âgés, mesure d'équité et de justice sociale. Son coût - 1,3 milliard d'euros en 2005 - pèse sur les comptes de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, la CNAV, alors même que la réforme des retraites ne produira ses effets positifs sur les comptes qu'à moyen terme.
Nous pouvons néanmoins nous réjouir que plus de 130 000 personnes qui ont commencé à travailler très jeunes, en exerçant des métiers souvent pénibles, aient pu, dès 2004, cesser leur activité.
S'agissant des pensions de réversion, j'ai saisi le Conseil d'orientation des retraites, le COR, afin qu'il examine la situation des droits dérivés en tenant compte de la nécessité d'assurer aux veuves et aux veufs la stabilité de leurs ressources et de maintenir un niveau de retraite digne, dans le respect du contrat intergénérationnel.
Le COR vient de remettre son avis et nous sommes en train de l'étudier. Nous allons, dans les tous prochains jours, engager les discussions avec les partenaires sociaux pour envisager très rapidement, sur la base de cet avis, les solutions à apporter.
D'ailleurs, mardi prochain aura lieu une réunion interministérielle autour de M. le Premier ministre, afin de déterminer la façon dont nous pouvons régler le plus vite possible ce problème. Nous ne laisserons pas entamer le pouvoir d'achat des veuves et des veufs.
MM. Adrien Gouteyron et Charles Pasqua. Très bien !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. En effet, ils ont travaillé toute leur vie et ils méritent que leur pouvoir d'achat soit sauvegardé. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Guy Fischer. Alors, pourquoi le décret ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Le deuxième point important du volet « retraites » de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 a trait à l'intégration financière du régime spécial de retraite des industries électro-gazières au régime général. C'est évidemment une opération importante du fait à la fois des montants financiers en jeu et de la complexité d'une telle intégration.
Dans ce processus, le Gouvernement s'est fixé trois objectifs : d'abord, la sécurisation des droits des salariés des industries électro-gazières ; ensuite, la neutralité de l'opération pour le régime général ; enfin - et cet impératif n'est pas le moins important - la clarté et la transparence.
La gestion de la soulte payée par les entreprises électro-gazières pour accompagner l'intégration du régime, dans son affectation comme dans ses versements successifs, doit s'effectuer au travers de circuits financiers garantissant la transparence de l'opération.
Les discussions entre la CNAV, le Gouvernement et les entreprises électro-gazières ont abouti à un montant de soulte de 7,7 milliards d'euros, auxquels s'ajoute la prise en charge par le fonds social vieillesse, le FSV, des avantages familiaux du régime, sur le modèle de ce qui se fait pour le régime général.
J'ai la conviction que l'équilibre auquel nous sommes parvenus garantit effectivement la neutralité financière de cette opération pour la CNAV. C'est évidemment un point très important.
S'agissant des flux financiers, le texte voté par l'Assemblée nationale intègre les dispositions prévues dans l'accord intervenu entre les différents partenaires. Il prévoit d'abord le versement, en 2005, de 40 % de la soulte au fonds de réserve pour les retraites, ce montant étant bloqué jusqu'en 2020. Il prévoit ensuite qu'une part de la contribution tarifaire sera versée chaque année à la CNAV pour un montant global représentant 60 % de la soulte.
Ce mécanisme, s'il est complexe, repose sur l'adhésion des acteurs concernés, la CNAV comme les entreprises électro-gazières. Il garantit la transparence de l'opération d'adossement.
Le dernier point que je souhaitais aborder et qui rejoint le thème de la transparence est celui de la certification des comptes de la sécurité sociale.
Les organismes de sécurité sociale ont beaucoup progressé ces dernières années pour améliorer la qualité des comptes. La Cour des comptes a souligné ces progrès tout en relevant ceux qui restaient à accomplir. Comme je l'ai dit encore récemment à Xavier Bertrand, je souhaite que nous nous engagions, dans la logique de ce que prévoit la loi organique relative aux lois de finances, dans une procédure de certification dont les contours seront précisés progressivement. Le PLFSS pour 20005 marquera l'engagement dans cette procédure, qui me semble indispensable et qui est chère à M. Vasselle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Roland Muzeau. C'est bien de se réjouir !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 traduit l'impact des réformes ambitieuses que le Gouvernement conduit. Par ces réformes, le Gouvernement montre son attachement à la préservation et à l'adaptation de notre système de protection sociale. II s'est engagé dans un processus de consolidation et de responsabilisation des acteurs de la sécurité sociale. Il revient maintenant à ces derniers, que ce soit dans le domaine des retraites ou dans celui de la santé, de l'accompagner en prenant en charge les marges nouvelles d'action pour faire prévaloir les comportements collectifs respectueux de notre intérêt national.
Récemment, le Premier ministre et le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avaient décidé, à la demande du Président de la République, de baisser les impôts. Les impôts ont baissé et les prélèvements obligatoires ont augmenté, car les prélèvements sociaux ont augmenté.
M. Roland Muzeau. Donc, les Français payent plus !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. C'est grâce aux réformes de l'assurance maladie et des retraites que nous pourrons aboutir à une responsabilisation, ce qui constitue un enjeu majeur pour l'avenir de notre pays sur le plan à la fois économique et social. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
Mme Nicole Borvo. Ce sont toujours les mêmes qui payent !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, il me revient naturellement de vous présenter les aspects du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui relèvent du ministère de la famille et de l'enfance.
J'évoquerai tout d'abord les mesures prévues par ce texte.
La première mesure concerne l'entretien de santé personnalisé, qui, même s'il figure dans la partie relative à la branche maladie, constitue la mise en oeuvre de l'une des principales mesures de la Conférence de la famille du 29 juin dernier.
Il s'agira d'un entretien qui aura lieu au niveau de la classe de cinquième : le médecin interrogera l'adolescent sur son état de santé et sur son environnement. Ce sera l'occasion d'identifier ses souffrances psychiques et de relever d'éventuelles situations de maltraitance.
Cet entretien de santé sera proposé sans reste à charge pour les familles : l'article 11 du PLFSS permet l'exonération du ticket modérateur.
La deuxième mesure sur laquelle je veux insister est relative au doublement de la prime à l'adoption, qui passera de 812 à 1 624 euros dés le 1er janvier 2005.
Cette disposition s'inscrit dans le cadre de la réforme de l'adoption internationale. Comme les parents en quête d'adoption doivent supporter des coûts spécifiques en raison de démarches onéreuses, il est légitime qu'il en soit tenu compte.
Même si le doublement de cette prime est loin de couvrir le prix d'un déplacement à l'étranger, c'est une reconnaissance que le Gouvernement a voulu marquer envers ces familles.
La troisième mesure, qui est inscrite à l'article 25 du projet de loi, tend à réformer les modalités de financement de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF. Deux enveloppes, dont les conditions d'évolution ont été adaptées de manière à favoriser une meilleure maîtrise financière, seront désormais très clairement identifiées : la première couvrira les missions fondamentales de I'UNAF qui découlent de la loi, notamment la représentation des familles ; la seconde enveloppe financera les actions qui lui sont confiées, en tant qu'opérateur, par l'Etat ; je pense notamment au soutien à la parentalité ou aux services aux familles.
Enfin, la quatrième mesure - elle est inscrite à l'article 26 du projet de loi - a trait au taux de transfert au fonds de solidarité vieillesse au titre des majorations de pension pour enfant : ce taux a été maintenu à 60 %. J'ai veillé, en particulier, à ce qu'aucune ponction nouvelle ne soit opérée sur la branche famille en 2005 ; je sais que beaucoup d'entre vous y tenaient.
S'agissant plus généralement des comptes de la branche famille, le quasi-retour à l'équilibre en 2005 m'amène à vous rappeler, s'il en était besoin, que la situation financière de la branche est fondamentalement saine et que ses ressources sont tout à fait en cohérence avec ses besoins de financement.
J'en viens aux orientations antérieures dont le PLFSS va poursuivre la mise en oeuvre.
En plus des mesures législatives que je viens d'évoquer, le PLFSS pour 2005 permet de continuer et de renforcer notre action en faveur de la petite enfance.
Je suis en effet très attentive à la montée en puissance de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, en particulier à l'élargissement du nombre de familles concernées - plus de 200.000 aujourd'hui - et aux améliorations des aides à la garde. Cette montée en charge représente 850 millions d'euros supplémentaires, dont 350 millions seront versés en 2005 aux parents de jeunes enfants.
C'est un effort considérable en faveur des familles dont le pouvoir d'achat est ainsi accru.
En matière de petite enfance, le développement de l'offre de garde sera largement poursuivi.
Ce sera le cas avec la rénovation du statut des assistants maternels et familiaux. Ce texte est inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale les 21 et 22 décembre prochains. La branche famille prendra en charge plusieurs cotisations des assistants maternels pour un coût de 50 millions d'euros.
Enfin, le PLFSS pour 2005 a budgété la montée en puissance du plan de création de vingt mille nouvelles places de crèches avec 20 millions d'euros de dépenses effectives - effectives, mais non limitatives, j'y insiste - dès 2005.
Pour conclure, je considère que ce PLFSS pour 2005 permet de poursuivre notre politique de conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle tout en prévoyant des mesures concrètes dès 2005 dans les domaines de l'adolescence et de l'adoption. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, la politique à l'égard des personnes handicapées, chantier présidentiel, fait l'objet d'efforts financiers importants de la part du Gouvernement depuis plus de deux ans.
M. Roland Muzeau. On l'a vu...
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. L'effort public en faveur des personnes handicapées avoisine, mesdames, messieurs les sénateurs, les 30 milliards d'euros.
Depuis 1995, date de changement de base de la comptabilité nationale, cet effort représente une part remarquablement constante aussi bien de la dépense de protection sociale - 6,2% - que de la richesse nationale mesurée par le PIB : 1,8 %.
Sur ces 30 milliards d'euros, près de 14 milliards d'euros sont constitués de prestations sociales en faveur des personnes handicapées relevant de la loi du 30 juin 1975.
J'espère que la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances permettra, à l'avenir, un examen par le Parlement de la totalité de l'effort collectif en faveur des personnes handicapées et de sa performance.
Je vous présente aujourd'hui, mesdames, messieurs les sénateurs, les crédits inscrits au titre de l'ONDAM « personnes handicapées » du PLFSS, qui représentent 21,6 % seulement de cet effort global de 30 milliards d'euros.
En 2005, l'ONDAM « médicosocial » continuera de progresser, mais cette progression sera limitée du fait de l'intervention de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA.
Ce sont 330 millions d'euros supplémentaires pour le secteur du handicap que le Gouvernement vous propose d'inscrire à l'ONDAM, l'objectif total de dépenses étant de 6,5 milliards d'euros. Cela permettra la poursuite de la mise en oeuvre du plan de création de places en établissements.
En moyenne, toutes les semaines, cent places supplémentaires sont donc ouvertes sur l'ensemble du territoire national dans les établissements financés par l'assurance maladie. Elles permettent d'offrir une solution à de nombreuses personnes qui en étaient dépourvues et viennent s'ajouter aux quelque soixante places en moyenne qui sont créées chaque semaine dans les centres d'aide par le travail.
Cette politique s'inscrit dans la grande réforme de solidarité pour les personnes dépendantes, en raison de leur âge et de leur handicap, annoncée par le Premier ministre le 6 novembre 2003. La création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie par la loi du 30 juin 2004 en est une première traduction.
Comme vous avez pu le constater lors de la seconde lecture du projet de loi, le Gouvernement a choisi de procéder à une réforme institutionnelle qui concilie deux exigences principales.
La première exigence, c'est le maintien de l'unicité de l'assurance maladie, puisque le Parlement continuera à voter les ONDAM « médicosociaux » relatifs aux personnes âgées et aux personnes handicapées, en prenant chaque année les mesures nouvelles nécessaires pour conforter notre politique médicalisée d'accueil, en institution comme en milieu ouvert, et de maintien à domicile.
La seconde exigence, c'est un pilotage unifié tant à l'échelon national, avec l'extension des missions confiées à la CNSA, qu'à l'échelon local, en faisant du département le chef de file de la solvabilisation de la demande des personnes âgées et des personnes handicapées.
L'effet vertueux de la mise en place de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie se traduira dès 2005 par une modération de la progression de l'ONDAM - la CNSA contribuera à hauteur de 110 millions d'euros aux créations de places en établissements et en services médicosociaux - et, comme l'a préconisé la Cour des comptes dans un récent rapport, par un meilleur pilotage du risque dépendance, qui doit faciliter une vision globale et enfin cohérente de la politique relative à la dépendance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat.
Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a décidé, en novembre 2003, d'engager une action très forte et très déterminée en faveur des personnes dépendantes et, en particulier, des personnes âgées en situation de perte d'autonomie.
Je souhaite insister, à cet instant, sur le travail accompli par mon prédécesseur, Hubert Falco : il a permis de dégager des financements d'un niveau sans précédent pour l'APA et pour la médicalisation des établissements et services pour personnes âgées. M. Falco et Mme Montchamp ont fait voter, avec votre appui, la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Il s'agit là d'une étape essentielle dans la réforme de la prise en compte de la dépendance et de la prise en charge de nos aînés.
Les crédits prévus dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 constitueront la traduction concrète à la fois de la deuxième année de mise en oeuvre du plan « vieillissement et solidarité », qui porte sur la période 2004-2007, et de la mise en place de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
En effet, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, créée par la loi du 30 juin 2004, a vocation à financer des actions en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées.
Pour l'année 2004, la loi du 30 juin dernier a prévu le schéma financier de la CNSA et les charges qui lui sont attribuées, ce qui a permis d'allouer 155 millions d'euros aux établissements et services pour personnes âgées dès le second semestre de 2004.
Bien qu'il ne s'agisse pas de crédits relevant de la loi de financement de la sécurité sociale, je rappellerai que ce dispositif permet en outre un financement de l'APA à hauteur de 800 millions d'euros : 400 millions d'euros pour le remboursement de l'emprunt souscrit en 2003 et 400 millions d'euros supplémentaires, qui compléteront les crédits déjà apportés par l'Etat au titre de la solidarité envers les départements. Ainsi, la sauvegarde et le financement de l'APA seront enfin assurés.
Par ailleurs, il fallait mettre en place des dispositions à compter de l'année 2005, puisque l'article 13 de la loi du 30 juin 2004 distingue simplement plusieurs sections, en prévoyant la répartition des recettes de la caisse, mais sans préciser la nature des actions qui seront financées.
Il convient donc de définir dès à présent, pour 2005, la nature des dépenses afférentes à la section « personnes âgées » et à la section « personnes handicapées » : tel est l'objet de l'article 3 du PLFSS.
Cet article prévoit que 48 % des produits de la section « personnes âgées » seront consacrés à la médicalisation des établissements et services pour personnes âgées : en fonction de la recette du 0,3 % sur la journée de solidarité en 2005, cela devrait permettre de dégager environ 370 millions d'euros. Cette somme servira, d'une part, à faire entrer dans la base de financement les 155 millions d'euros dégagés en 2004 et, d'autre part, à financer les mesures pour 2005, à hauteur de quelque 215 millions d'euros.
Les dispositions du PLFSS anticipent la réforme définitive de la CNSA, prévue dans la loi pour l'égalité des droits et des chances, la citoyenneté et la participation des personnes handicapées défendue par Mme Montchamp et qui a été débattue en deuxième lecture ici même, voilà quelques jours.
M. Roland Muzeau. Elle a été massacrée !
Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat. La réforme reposera sur la conciliation de la demande d'équité sur tout le territoire - à laquelle nos concitoyens sont à juste titre très attachés - et du souci de la proximité, garantissant une gestion proche des gens que seules les collectivités locales peuvent assurer.
A cette fin, les missions qui seront confiées aux conseils généraux seront équilibrées par un rôle puissant de régulation confié, à l'échelon national, à la CNSA, relayée sur le plan local par un système de délégation d'enveloppes dont l'Etat assurera la cohérence, dans une démarche contractuelle avec les conseils généraux.
Cette réforme s'articulera en outre avec les missions confiées à l'assurance maladie.
Il ne s'agit pas, en effet, de traiter de l'ensemble des questions relatives à la protection sociale des personnes âgées : en tant que malades, ces dernières continueront à bénéficier du même régime d'assurance maladie que tous nos concitoyens.
Il ne s'agit que de traiter de la prise en charge de la dépendance, qui ne concerne pas toutes les personnes âgées.
La Caisse aura ainsi un champ d'intervention couvrant tous les aspects du financement par l'Etat de la dépendance : la contribution au financement de l'APA, la médicalisation et les forfaits soins des établissements et services, les politiques d'études et de prévention.
Les crédits provenant de l'ONDAM, qui regrouperont ceux de l'ONDAM « classique » et ceux qui résulteront directement de la recette liée à la journée de solidarité, devront continuer à faire l'objet d'un débat et d'un vote au Parlement.
Par conséquent, mesdames, messieurs les sénateurs, ce nouveau dispositif permet de maintenir l'universalité de la sécurité sociale, à laquelle le Gouvernement est très attaché, comme le rappelait voilà quelques instants M. Philippe Douste-Blazy.
Le financement de ce plan ne reposera pas sur les seuls crédits dégagés par la contribution de solidarité de 0,3 % et affectés à la CNSA.
En effet, environ 210 millions d'euros complémentaires seront prévus pour la médicalisation des établissements et services dans l'ONDAM pour 2005.
Ainsi, au total, au titre du financement direct par la CNSA et des mesures complémentaires apportées par l'ONDAM, ce sont quelque 425 millions d'euros qui seront consacrés en 2005 à la mise en oeuvre du plan « vieillissement et solidarité ». Globalement, les crédits affectés aux personnes âgées au travers du PLFSS médicosocial, provenant de la CNSA et de l'ONDAM proprement dit, augmentent de plus de 11 %, pour atteindre 4,2 milliards d'euros.
Cela traduit la poursuite d'un effort exceptionnel en faveur des personnes âgées, voulu par le Gouvernement et le ministre de la santé et de la protection sociale.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat. Je souhaite rappeler en effet que les montants dédiés à l'ONDAM « personnes âgées » ont progressé de 900 millions d'euros en cinq ans, entre 1997 et 2002, et de 1,3 milliard d'euros en trois ans, entre 2002 et 2005.
Cela permettra, notamment en 2005, de poursuivre la médicalisation des établissements par la signature de conventions tripartites et le renforcement de l'encadrement en personnels soignants dans les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes. Parallèlement à la mission MARTHE, mission d'appui de la réforme de la tarification d'hébergement en établissement, je vais d'ailleurs relancer ce chantier des conventions tripartites. Vous connaissez l'objectif : il faut aujourd'hui aller plus loin ; nous devons continuer non seulement à signer des conventions, mais aussi à discuter, dans l'intérêt de nos établissements.
Cela contribuera à la mise en place d'une politique que je souhaite tout particulièrement développer : celle qui a trait aux services à la personne.
Le maintien à domicile correspond au souhait de la majorité de nos concitoyens et des familles. C'est ainsi que, en 2005 comme en 2004, ces crédits permettront de financer 2125 nouvelles places d'accueil de jour et 1125 places d'hébergement temporaire, dont le développement contribue grandement à favoriser le nécessaire répit que sont en droit d'attendre les familles qui font le choix de s'occuper à domicile de personnes âgées atteintes de maladies, notamment dégénératives. Elles ont besoin de pouvoir « souffler » de temps à autre.
Ce volet médical du maintien à domicile sera également développé par le biais de la création, en 2005, de 4250 nouvelles places en services de soins infirmiers à domicile. C'est là aussi un moyen d'oeuvrer en faveur de la proximité.
MM. Philippe Douste-Blazy, ministre, et Michel Mercier. Très bien !
Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat. Plus largement, je considère que le service à la personne doit aussi être renforcé au moyen de nouvelles approches, sur lesquelles nous travaillons. Nous devrions être en mesure de proposer un plan au premier trimestre de 2005.
Le maintien à domicile concerne en effet près de 85 % des personnes très âgées puisque, au-delà de soixante-quinze ans, elles sont près de quatre millions dans ce cas, dont 445 000 environ sont accueillies dans des institutions.
Répondre aux attentes de nos concitoyens et faire face aux enjeux démographiques des années à venir, cela implique de développer une offre de qualité permettant de créer de nouveaux emplois attrayants et qualifiés et d'ouvrir de réelles perspectives de carrière au service des personnes âgées : c'est là un pari incontestablement ambitieux, parce que le gagner contribuera à faire émerger des gisements d'emplois et surtout parce qu'il s'inscrit dans une politique d'anticipation des évolutions démographiques et d'adéquation aux aspirations de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur. (M. Paul Blanc applaudit.)
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d'Etat, mes chers collègues, je commencerai ma présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale en indiquant qu'il s'agit là, sans aucun doute, du dernier exercice du genre, puisque, lors de l'examen du projet de loi relatif à l'assurance maladie, le Gouvernement a pris devant la Haute Assemblée l'engagement, confirmé voilà quelques instants par M. le ministre, de présenter un projet de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.
Dans cette perspective, outre les enjeux concernant les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, la commission des affaires sociales du Sénat s'est interrogée sur les pistes qui pourraient guider notre réflexion en vue de la réforme annoncée.
Nous savons tous combien est difficile la situation des comptes sociaux, dont les contours ont déjà été dessinés par M. le ministre. Afin de ne pas retarder le moment où vous interviendrez, mes chers collègues, je me bornerai à vous livrer quelques éléments d'appréciation.
Je commencerai par dresser quatre constats.
Premier constat : le déficit de 14 milliards d'euros que nous enregistrons cette année est le plus élevé jamais atteint par les organismes de sécurité sociale. Ce fait n'est contesté sur aucune travée de cet hémicycle.
M. François Autain. Il est très fort !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Toutefois, la situation ne me paraît pas plus grave, globalement, que celle que nous avons connue voilà dix ans. A l'époque, mes chers collègues, les quatre branches du régime général accusaient en effet un déficit total de 10 milliards d'euros. Certes, ce montant est un peu inférieur à celui que nous constatons cette année, mais tout de même ! Nous sommes aujourd'hui confrontés aux difficultés de la seule assurance maladie.
Deuxième constat : le dérapage de l'ONDAM sera, en 2004, d'une moindre ampleur que l'année précédente. J'espère que nos collègues de l'opposition sauront faire preuve d'objectivité sur ce point.
Les éléments dont nous disposons sur l'exécution finale laissent entendre que le dépassement réel pourrait être inférieur à l'objectif révisé de 2004 tel que le prévoit le projet de loi.
Compte tenu de la baisse sensible des dépenses en cette fin d'année, le Gouvernement a sans doute été un peu pessimiste quant au résultat, mais il vaut mieux se retrouver dans cette situation plutôt que d'avoir prévu des diminutions de dépenses plus importantes.
La réalisation finale dépendra non seulement de la décélération des dépenses de santé, mais également du résultat des négociations conventionnelles actuelles. Lorsque j'ai fait état de ces dépenses en commission des affaires sociales, certains de nos collègues de l'opposition n'ont pas manqué de dire que celles-ci pourraient présenter un caractère inflationniste en fonction du résultat des accords conventionnels, de la discussion des honoraires des médecins, etc. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Troisième constat : chaque année, depuis trois ans, la tendance est nettement à l'infléchissement des dépenses de santé.
Je rappelle à ceux de nos collègues qui ne sont pas au fait de cette question que nous réduisons régulièrement l'ONDAM réalisé de près d'un point : 7,2 % en 2002 - c'était le résultat de l'ONDAM voté sous la majorité précédente -6,4 % en 2003 et 5,2% en 2004.
Pour mémoire, je précise que, sous la précédente législature, l'ONDAM réalisé était passé de 1,5 % en 1997 à 7,2 % en 2002.
M. François Autain. En 2002, ce n'était pas l'opposition d'aujourd'hui : c'était vous !
M. Alain Vasselle, rapporteur. L'ONDAM de 1997 a été le seul à avoir été respecté.
M. François Autain. Et l'augmentation des honoraires !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur Autain, en 2002, ce sont les dépenses effectivement constatées, à la suite de l'ONDAM fixé sous le gouvernement de M. Jospin, qui ont été votées ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Guy Fischer. C'était la campagne électorale !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Si vous avez fait de l'électoralisme au travers du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale, mes chers collègues, vous avez une part de responsabilité !
M. Guy Fischer. Non, c'est vous !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Mon dernier constat a trait aux recettes de la sécurité sociale. Les trois quarts du dérapage constaté dans les équilibres financiers de la sécurité sociale sont imputables à une moindre progression des cotisations.
La croissance économique a atteint, finalement, un niveau supérieur à celui qui était escompté, puisque nous étions partis d'une base de 1,7 % : en réalité, elle devrait s'élever à environ 2,5 % à la fin de l'année.
Mais alors que le PIB augmente, cette hausse ne se traduit pas par un accroissement de la masse salariale. Nous n'en ressentirons les effets que dans le courant de l'année 2005. Ce décalage entraîne un manque à gagner non négligeable pour les régimes sociaux.
La crise financière de grande ampleur subie par les comptes sociaux en 2004 était prévue. Elle n'était en elle-même acceptable et acceptée que parce qu'elle constituait le prix d'une réforme négociée, fondée sur une rupture délibérée avec les traditionnels plans d'économie ou de rationnement comptables des dépenses de santé précédemment mis en oeuvre. Le Gouvernement en a rappelé les enjeux, et c'est sur les bases de cette réforme que se reconstruira désormais l'équilibre financier de la sécurité sociale.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 traduit une première étape dans ce processus. L'objectif de contenir le déficit à 10 milliards d'euros pour le régime général, soit une réduction de 30 %, me semble réaliste.
M. Bernard Cazeau. On verra !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Même si des problèmes particuliers apparaissent çà et là dans les autres branches, les difficultés restent globalement concentrées sur l'assurance maladie. La branche famille enregistrera un très léger déficit, ainsi que la branche vieillesse, l'effet démographique n'étant plus porteur.
En recettes, les prélèvements nouveaux décidés dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie concernent la CSG et la C3S : ils alimenteront notre système de soins par environ 3 milliards d'euros, auxquels il faut ajouter le milliard d'euros dû à la rétrocession d'une fraction des droits sur les tabacs. Cela représente une petite partie de ce que nous pouvions escompter ; nous nous en étions expliqués avec le Gouvernement au mois de juillet dernier, je n'y reviens donc pas.
La situation de l'assurance maladie sera améliorée par les mesures d'organisation et de fonctionnement du système de soins. Les 2,2 milliards d'euros d'économies prévus se ventilent de la façon suivante : 1 milliard d'euros concerne la maîtrise médicalisée ; 0,3 milliard d'euros a trait à l'allègement des dépenses relatives aux indemnités journalières ; 0,7 milliard d'euros est relatif au plan « médicaments » ; enfin, 0,2 milliard d'euros concerne la modernisation de la gestion hospitalière. J'espère ainsi répondre à MM. Autain et Fischer qui s'étaient interrogés en commission des affaires sociales sur les économies réelles que nous pouvions escompter en matière de dépenses d'assurance maladie.
Il faut bien entendu y ajouter le paiement du fameux euro symbolique et l'augmentation du forfait journalier. Ces deux dernières mesures devraient se traduire par un allègement des dépenses de l'ordre de 700 millions d'euros.
Pour toutes ces raisons, la croissance de l'ONDAM a été fixée à 3,2 %. Ce taux est donc en net fléchissement par rapport à l'ONDAM de l'année dernière. Ce taux aurait été, tendanciellement, de 3,7 %, la baisse de 0,5 % correspondant à l'euro payé par les assurés sociaux.
En tenant compte des 2,2 milliards d'euros d'économies de dépenses potentielles que nous espérons, l'ONDAM se situerait à 5 % : il serait très nettement supérieur à celui qui a été voté l'année dernière, mais inférieur à celui qui est réellement constaté cette année.
Au vu des éléments d'information dont nous disposons, cet ONDAM paraît réaliste. Aussi puis-je espérer être exaucé en formulant le voeu de ne pas voir la procédure d'alerte pour dépassement de l'ONDAM mise en oeuvre en 2005.
M. Bernard Cazeau. Eh oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je voudrais à présent, en marge de la situation du régime général, vous livrer quelques analyses sur l'évolution des fonds concourant au financement de la protection sociale.
Le fonds de solidarité vieillesse et le fonds de financement des prestations sociales agricoles accuseront, à la fin de l'année prochaine, 5 milliards d'euros de déficit cumulé. Les raisons en sont connues. Il s'agit, pour le premier, des conséquences du financement des 35 heures, notamment de la perte, par ce fonds, du produit des droits sur les alcools qui lui étaient attribués. Car on s'est servi du fonds de solidarité vieillesse au moment où, la conjoncture étant favorable, il dégageait des excédents.
A l'époque, Martine Aubry et Elisabeth Guigou avaient considéré que l'on pouvait puiser dans les réserves de ce fonds pour financer le dispositif des 35 heures. Le Gouvernement n'ayant pas les moyens d'appliquer sa politique, un certain nombre de recettes de la sécurité sociale ont été détournées. Depuis, nous traînons le déficit de la sécurité sociale comme un boulet.
M. Paul Blanc. Tout à fait !
M. Alain Vasselle, rapporteur. L'actuel gouvernement n'a même pas pu compenser à l'euro près ces pertes de recettes, qui se chiffrent à environ 3,5 milliards d'euros par an.
Dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie, nous avons généreusement bénéficié de 1 milliard d'euros. J'évoquerai tout à l'heure les compensations, afin de faire le point sur la situation actuelle.
S'agissant du fonds de financement des prestations sociales agricoles, ces difficultés confirment qu'il ne pourra pas atteindre l'équilibre sans subvention de l'État.
La situation de ces deux fonds est néanmoins problématique : leur déficit, qui n'apparaît tel quel ni en loi de finances ni en loi de financement, pèse in fine sur la trésorerie des régimes, notamment de la CNAV et de la MSA.
A partir du moment où le FSV se trouve en déficit, il ne peut pas verser à la CNAV les fonds dont il ne dispose pas. Dans ces conditions, la CNAV doit supporter une partie des dépenses dites « de solidarité », qui correspondent aux dépenses non contributives, ce qui, bien entendu, aggrave sa situation financière.
Le fonds de réserve des retraites, qui est aussi une création du gouvernement de M. Jospin, pose un problème de nature tout à fait différente. Il a été conçu comme un alibi à l'absence de réforme des retraites.
M. Paul Blanc. Eh oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Ce gouvernement voulait gagner du temps : il disait prendre mesures pour assurer, à terme, l'équilibre de la branche vieillesse. En 2010, ce fonds devait compter 1 000 milliards de francs. Des recettes devaient lui être affectées afin d'atteindre l'objectif. Parmi les recettes figuraient notamment les excédents du FSV. On sait ce qu'il en est de ces excédents : le trou s'est creusé ! D'autres mesures -privatisations, la téléphonie mobile - devaient générer des recettes nouvelles.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. L'UMTS !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Les licences UMTS devaient effectivement permettre de financer le fonds de réserve des retraites. Cela n'a pas été le cas !
M. Paul Blanc. Demain, on rasera gratis !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Aujourd'hui, 5 milliards d'euros sont généreusement prévus dans le fonds de réserve des retraites, alors que 150 milliards d'euros seront nécessaires en 2010.
Telle est la situation, mes chers collègues ! Il est désormais acquis que le plan de financement initial concernant le fonds de réserve des retraites était fantaisiste. Qui en doutait véritablement ? Nous l'avions dénoncé, mais Mme Guigou feignait de nous entendre.
Par conséquent, la commission des affaires sociales s'interroge sur la stratégie des pouvoirs publics s'agissant du fonds de réserve des retraites : quelles sont les intentions du Gouvernement ?
J'en viens à présent aux relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, notamment au respect du principe de la compensation, par l'Etat, des pertes de recettes sociales qu'il décide. Ce principe, adopté dans le cadre de la loi Veil de 1994, visait à compenser au franc près l'ensemble des mesures d'allégement de charges qui étaient décidées par le Gouvernement.
La loi de financement de la sécurité sociale de 2004 a supprimé le FOREC, de façon vertueuse, c'est-à-dire en procédant à la « rebudgétisation » des recettes et des charges de cet organisme. Nous nous étions alors félicités de la suppression de ce symbole du financement des 35 heures par la sécurité sociale.
Qu'en est-il à présent ? Je ne souhaiterais pas, pour ma part, que cette suppression se traduise par une nouvelle dérive consistant à gonfler, dans les comptes des organismes sociaux, des créances à recouvrer sur l'Etat, qui se révèleraient finalement ne devoir jamais être honorées. C'est un peu la crainte que nous pouvons avoir aujourd'hui.
Ces créances existent déjà au titre des exercices passés. La Cour des comptes a estimé leur montant à 1,3 milliard d'euros au 1er janvier 2004. Or la création ou le renforcement récent de dispositifs d'exonération, qui ne trouvent pas leur contrepartie financière en loi de finances, pourraient nourrir le sentiment que leur montant va encore augmenter.
Il s'agit, en premier lieu, des fameux « contrats d'avenir », qui ont été adoptés dans le cadre du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale. Ils se substituent aux contrats emploi-solidarité, les CES, et aux contrats emploi consolidé, les CEC, qui faisaient l'objet de mesures d'allégement de charges. Ces allégements n'avaient pas été compensés, mais, du fait du changement de statut de ces contrats, ils devraient l'être par application de la loi de 1994, sauf si une disposition dérogatoire était adoptée par voie législative sur l'initiative du Gouvernement, afin d'éviter que cette compensation n'ait lieu. Or nous n'avons pas constaté de mesure allant dans ce sens.
Les sommes pourraient s'élever à 200 millions d'euros en 2004, 800 millions d'euros en 2005 et 1,4 milliard d'euros en 2007.
M. Roland Muzeau. L'Etat n'assume pas !
M. Guy Fischer. Mais il donne des leçons !
M. Alain Vasselle, rapporteur. J'aimerais que M. le ministre nous fasse part des intentions du Gouvernement dans ce domaine.
J'observe d'ailleurs que ce dispositif n'est pas isolé. Le Sénat discutera le 24 novembre prochain - nous n'avons pas eu l'occasion d'en débattre en commission des affaires sociales - d'une proposition de loi portant diverses dispositions relatives au sport professionnel...
M. Roland Muzeau. On sait d'où elle vient !
M. Alain Vasselle, rapporteur. ...et prévoyant que la part de rémunération des sportifs correspondant à l'exploitation collective de leur image n'est pas soumise à cotisation.
M. Guy Fischer. C'est une honte !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cette mesure, qui entre dans le champ de compensation, ne trouvera pas sa contrepartie : elle représentera 200 millions d'euros de moins dans le budget du ministère des sports.
M. Roland Muzeau. C'est scandaleux !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Dans le même ordre d'idée, deux autres mesures figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et dans le projet de loi de finances : le transfert, au fonds de financement de la couverture maladie universelle, la CMU, de la taxe sur les boissons, d'une part, et les règles relatives aux cotisations employeurs des maîtres de l'enseignement privé, d'autre part.
Le transfert des droits sur les alcools à la CMU intervient en compensation d'un allègement de dépenses au bénéfice de la CNAM résultant du transfert aux régions du coût de la formation des infirmières et aides soignantes. Ce transfert entraîne un manque à gagner de l'ordre de 80 millions d'euros pour la CNAM, qui n'est pas compensé.
En ce qui concerne les cotisations d'assurance maladie, le taux des employeurs du privé est fixé à 12,8 points, alors que celui de l'Etat s'élève à 9,7 points Le basculement des cotisations se traduira donc, pour la sécurité sociale, par une diminution des recettes de 20 millions d'euros.
L'addition est vite faite : au total, cela représentera, simplement pour l'exercice 2004-2005, près de 1 milliard d'euros.
L'année dernière, à l'occasion de la réforme de l'assurance maladie, on nous a généreusement donné 1 milliard d'euros, mais il est aujourd'hui neutralisé par les dépenses.
L'Etat s'en sort très bien ! Les fonctionnaires de Bercy ont bien manoeuvré ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Quel réquisitoire !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur le ministre, vous avez eu raison, tout à l'heure, de nous dire que des mesures devront être prises dans le cadre de la loi organique afin d'éviter que ce type de comportement ne subsiste.
Certains journaux, notamment un quotidien du soir, ont mal interprété les appréciations de la commission des affaires sociales (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) sur le respect de l'ONDAM au titre de l'exercice 2002 et des dépenses de santé : ils ont cru que la commission considérait que cet objectif ne serait pas respecté, car j'ai fait allusion, dans le rapport de la commission, au problème lié à l'absence de compensation.
Mais, dans ce rapport, je n'ai pas dit autre chose que ceci : si la loi organique était adoptée en imposant à l'Etat le principe de compensation, il y aurait un risque de censure par le Conseil constitutionnel dans l'hypothèse où celui-ci ne s'y conformerait pas. Mais cette remarque ne concernait pas le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui nous est présenté par le Gouvernement.
Je tenais à apporter cette correction, afin d'éviter tout malentendu sur le sujet.
Je terminerai mon propos par quelques développements sur la future réforme de la loi organique.
La commission des affaires sociales travaille sur cette question depuis déjà quelques années. C'est en effet mon collègue Charles Descours qui avait déposé une proposition de loi organique sur le sujet en 1999. La commission avait étudié, dans le cadre d'un groupe de travail auquel vous avez été associés, mes chers collègues de l'opposition, les moyens d'améliorer le contenu et la présentation des lois de financement, « outil essentiel et instrument perfectible » d'appréhension des finances sociales.
Le domaine est un peu technique. Je vous renvoie donc, mes chers collègues, à mon rapport écrit pour plus de précisions.
La redéfinition des agrégats que nous votons est sans doute le premier travail auquel nous devons nous atteler. J'évoquerai seulement quelques points clefs.
Tout d'abord, la présentation des recettes est aujourd'hui tributaire du choix opéré par le législateur organique de 1996, qui opta pour la présentation par catégorie. La construction des comptes d'alors le justifiait sans aucun doute. Mais cette présentation souffre d'un défaut majeur : elle rend impossible la confrontation du champ des recettes avec celui des dépenses lors du vote de la loi de financement.
Les progrès réalisés depuis lors nous permettent d'envisager sérieusement, pour le futur, une présentation des recettes par branche et par régime.
La révision devra également constituer l'occasion de mieux articuler le partage des recettes entre loi de finances et loi de financement.
L'année dernière, nous avons été confrontés à une difficulté majeure s'agissant des droits sur les tabacs, car la loi de financement fixe l'assiette et le taux d'une taxe et la loi de finances procède à sa répartition. Cette situation ne contribue ni à la transparence, ni à la lisibilité, ni à la bonne compréhension des lois de financement et des lois de finances.
Les objectifs de dépenses des différentes branches ne constitueront pas non plus des ensembles satisfaisants tant que le Parlement ne sera pas en mesure de discerner clairement trois éléments fondamentalement différents : la gestion du risque, c'est-à-dire les dépenses qui correspondent à la gestion administrative, l'action sociale et les prestations.
L'ONDAM concentre l'essentiel des griefs qui ont été formulés sur les lois de financement.
Je me bornerai à formuler deux souhaits.
Le premier est celui d'une meilleure coordination entre l'ONDAM et l'objectif de dépenses de la branche maladie, sans pour autant préconiser la suppression de l'un au profit de l'autre.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cela me semble en effet nécessaire afin de distinguer ce qui relève, d'une part, de la dépense d'assurance maladie et, d'autre part, des coûts d'un bon fonctionnement des régimes, notamment l'action sociale et la gestion administrative.
Mon second souhait est celui d'une meilleure ventilation de cet objectif à travers des sous-enveloppes. On a trop souvent dénoncé l'absence de connaissance des différents ONDAM : l'ONDAM « hôpital », l'ONDAM « médicaments », etc.
M. François Autain. Parlez-nous des médicaments !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Ce travail de définition sera sans aucun doute complexe en raison de la porosité, de la « fongibilité », en quelque sorte, de ces différentes sous-enveloppes. J'insiste néanmoins sur la nécessité de débattre successivement des moyens de la médecine de ville, du médicament, de l'hôpital, du médicosocial et de conclure nos discussions par un vote.
La redéfinition des prévisions de recettes et des objectifs de dépenses devrait faciliter la définition d'un solde pour la sécurité sociale. Le législateur organique a, par défaut, organisé l'absence d'équilibre des lois de financement, le périmètre des recettes ne correspondant pas à celui des dépenses. Dans l'hypothèse de la réforme de ces agrégats, il me semble donc envisageable de construire un équilibre général du « périmètre des lois de financement de la sécurité sociale ».
Au-delà de la refonte des agrégats, se pose la question de l'extension de la compétence des lois de financement. Réduit aux seuls objectifs des régimes de base de plus de 20 000 ressortissants - ce n'est pas rien, je vous l'accorde - le périmètre des lois de financement mérite d'être réexaminé.
Il s'agit, en premier lieu, de la prise en charge de l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, qui est désormais institutionnalisée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Les dépenses et recettes de ce volet de la protection sociale n'apparaissent ni en loi de finances ni en en loi de financement de la sécurité sociale. Le fait que le législateur n'ait pas fait de l'autonomie un cinquième risque de la sécurité sociale suffit-il à repousser l'idée d'un examen des comptes de la CNSA en loi de financement ? Ce point reste à trancher.
Il s'agit, en second lieu, de la place réservée à la protection sociale agricole : la suppression du budget annexe des prestations sociales agricoles, le BAPSA, s'est traduite par la disparition du débat traditionnel qui avait lieu à l'occasion de la loi de finances. Un cadre spécifique à la discussion de la protection sociale agricole me paraît devoir être imaginé en loi de financement.
Je conclurai cette présentation en disant un mot de la nécessaire refonte des modalités d'examen des lois de financement.
Premièrement, il me paraît nécessaire de clarifier l'environnement institutionnel des finances sociales : tout d'abord, en articulant la loi de financement avec les événements de la protection sociale - la commission des comptes de la sécurité sociale, la conférence annuelle de la famille ; ensuite, en prévoyant, au printemps, un débat sur le financement de la sécurité sociale. Un débat sur les prélèvements obligatoires est, certes, utile, mais un débat sur le financement de la sécurité sociale l'est tout autant. Cela nous permettrait d'intervenir en amont sur la l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il s'agit d'ailleurs d'un engagement qui avait été pris par le Gouvernement en 1996 mais qui n'a jamais été tenu.
Deuxièmement, l'amélioration des annexes explicatives constitue l'une des priorités d'une réforme de la loi organique. Leur fiabilité conditionne la qualité du contrôle parlementaire, qui est essentiel. A minima, il faudrait créer une annexe consacrée aux recettes construite sur le modèle des voies et moyens, instaurer un récapitulatif fiable des mesures nouvelles, ce qui n'est pas le cas de l'annexe C actuelle, et disposer d'un document propre aux agrégats de dépenses détaillant le contenu par catégorie, par régime et par branche.
Dans la plupart des cas, ces informations sont disponibles, ne serait-ce que parce qu'elles figurent dans d'autres documents, tel le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, mais elles nécessitent un effort de retraitement minutieux et relativement contraignant. La lisibilité et la cohérence des lois de financement sont donc à ce prix.
Mes chers collègues, cette reforme entraînera nécessairement un allongement des délais consacrés à l'examen des lois de financement. Mais rapportés à l'ampleur des enjeux financiers, ceux-là sont actuellement très courts.
Je vous rappellerais deux chiffres : demain, nous consacrerons trois heures à débattre à la branche maladie, qui absorbe 150 milliards d'euros ; c'est le temps qui sera consacré, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances, au budget des anciens combattants, qui représente 3,4 milliards d'euros. Les chiffres parlent d'eux-mêmes !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Il ne faut pas les opposer, mais un cadre aussi réduit conduit nécessairement à opérer des choix entre des sujets d'égale importance.
La dilatation de la loi de financement aurait pour contrepartie de réduire le nombre des projets de loi inscrits à l'ordre du jour lors de la première partie de la session. Le Gouvernement est-il prêt à accomplir cet effort ? Pour ma part, je l'appelle de tous mes voeux.
Telles sont les différentes observations que je souhaitais formuler au nom de la commission des affaires sociales, au titre des équilibres financiers, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.
Ces informations vous ont peut-être paru quelque peu fastidieuses, mes chers collègues, mais elles étaient nécessaires. Je vous invite à vous reporter à mon rapport écrit : vous y trouverez un éclairage plus fin. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. André Lardeux, rapporteur.
M. André Lardeux, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d'Etat, mes chers collègues, après cinq années d'excédents, la branche famille n'est désormais plus épargnée par les difficultés financières.
L'année 2004 devrait ainsi enregistrer un déficit de près de 183 millions d'euros, les recettes ayant augmenté moins que prévu et les dépenses ayant crû plus rapidement. Ce léger dérapage s'explique globalement par une conjoncture économique difficile, donc favorable à l'augmentation des prestations sous condition de ressources ; il résulte aussi d'un calibrage trop imprécis de la nouvelle prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, établi l'an dernier.
La branche devrait de nouveau connaître un déficit en 2005, mais limité cette fois à 31 millions d'euros. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale tend en effet à rétablir l'équilibre des comptes en tablant sur une augmentation de 3,2 % pour les recettes, grâce au retour de la croissance, et de 2,9 % seulement pour les dépenses.
Si ces prévisions se réalisent et si l'embellie économique se maintient, le retour à une situation excédentaire des comptes de la branche famille est envisageable à compter de 2006.
La progression des recettes devrait résulter d'une augmentation de 3,5 % de la contribution sociale généralisée, car la croissance a pour conséquence d'accroître le rendement du point de CSG : celui-ci passerait de 8,9 milliards d'euros en 2003 à 9,6 milliards d'euros en 2005, soit une augmentation de 7,4 % sur deux ans.
Les cotisations sociales, qui représentent près de 60 % des recettes de la branche, devraient conserver leur taux d'augmentation habituel, soit 3 %.
Troisième source de recettes, les remboursements de l'Etat à la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, pour les prestations qu'elle sert pour son compte, devraient atteindre 5,9 milliards d'euros en 2005. Cette dernière ressource est toutefois peu fiable, dans la mesure où près du tiers de cette somme est versé par l'Etat en année n +1, au détriment de la trésorerie de la CNAF, ce que notre commission dénonce d'ailleurs chaque année.
Or cette situation ne va pas s'améliorer puisque, à compter de 2005, l'Etat remboursera à la CNAF, selon un schéma identique, les prestations légales et l'action sociale familiale collective des fonctionnaires. C'est déjà ainsi qu'il procède pour la PAJE et les aides au logement versées aux agents de l'Etat.
Cette mesure nouvelle concerne 430 000 nouveaux allocataires : seule l'action sociale individuelle devrait rester du ressort de l'Etat, les plafonds de ressources requis actuellement pour les fonctionnaires étant supérieurs à ceux des CAF.
En transférant cette charge à la CNAF, l'Etat devrait pouvoir économiser l'équivalent de six cents emplois. Le coût de cette opération est estimé, pour 2005, à 80 millions d'euros pour la CNAF, pris en charge par l'Etat grâce à une augmentation de son taux de cotisation de 5,2 % à 5,3 %.
La commission des affaires sociales n'est pas hostile à cette mesure, mais elle souhaite vivement qu'elle constitue une opération neutre pour la branche famille. Il conviendra donc de veiller, madame la ministre, à ce que l'Etat rembourse rapidement son dû à la CNAF, y compris en ce qui concerne les frais de gestion.
Les dépenses de la branche consistent, à 70 %, en des prestations légales, pour un total de 35 milliards d'euros en 2005.
Ces prestations légales augmentent faiblement, ce qui s'explique par le fait que les prestations d'entretien continuent de baisser en raison de la transformation des structures familiales, notamment de la diminution de la taille moyenne des familles résultant des séparations. La CNAF sert donc de plus en plus de prestations à des familles d'un à deux enfants, alors que c'est à partir de trois enfants que leur montant augmente sensiblement.
Enfin, si les entrées d'enfants dans le dispositif ont été numériquement importantes ces dernières années, elles ont été compensées par les sorties, tout aussi nombreuses, des générations nées au début des années quatre-vingt.
L'analyse de l'évolution des prestations d'entretien est toutefois délicate cette année en raison de la mise en place de la PAJE : curieusement, cette prestation est non pas comptabilisée dans la rubrique « prestations d'entretien », mais constitue une catégorie propre. En outre, son instauration a entraîné la diminution mécanique des deux autres prestations d'entretien qu'elle a remplacées : l'allocation pour jeune enfant, l'APJE, et l'allocation d'adoption.
En définitive, les dépenses de la branche famille consacrées aux prestations légales sont en recul par rapport à celles qui sont consacrées à l'action sociale et aux aides au logement versées aux familles les plus modestes.
Ce constat est renforcé par le poids grandissant des prestations légales versées sous condition de ressources, qui représentent désormais plus de la moitié du volume des prestations en 2004. Une conclusion semble s'imposer : la politique familiale se détourne d'une action en faveur de l'ensemble des familles.
La commission des affaires sociales comprend la légitimité d'une redistribution en faveur des familles les plus modestes, mais elle souhaite rappeler la vocation universelle de la politique familiale, symbolisée par les allocations familiales qui sont versées à toutes les familles sans condition de ressources.
Pour développer ce caractère universel, il est aujourd'hui nécessaire, madame la ministre, d'engager une réflexion sur les missions de la branche famille et de revaloriser plus largement la base mensuelle des allocations familiales, la BMAF, pour permettre une augmentation générale de l'ensemble des prestations. Celles-ci n'ont pas été revalorisées au-delà du taux d'inflation depuis 1997, même lorsque des périodes de croissance favorable auraient permis de l'envisager. En 2005, de nouveau, la hausse de la BMAF est fixée à 2,2 %, ce qui correspond à l'inflation et pas davantage.
Dans ce contexte financier moins favorable, la branche famille doit désormais arbitrer entre ses choix. C'est d'autant plus préoccupant que sa marge de manoeuvre est singulièrement réduite par les charges indues qu'elle supporte.
La plus coûteuse de ces dépenses indues concerne la prise en charge des majorations de pension de retraite pour enfants depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Celles-ci sont versées par le fonds de solidarité vieillesse, en tant qu'avantage vieillesse, comme un juste retour accordé aux parents qui ont contribué, en élevant au moins trois enfants, à l'équilibre des régimes de retraite par répartition. La CNAF lui restitue ensuite une fraction de cette majoration, soit 60 % depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.
Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale a maintenu ce taux à 60 %, ce qui correspond à un versement de 1,97 milliard d'euros, en hausse de 1,9 % par rapport à 2004 en raison de l'augmentation du nombre de départs à la retraite.
La commission approuve, bien entendu, le fait que ce taux de prise en charge ait été maintenu au même niveau en 2005, et non pas augmenté, mais elle déplore une fois encore cette utilisation abusive des moyens de la branche, au détriment des mesures qui pourraient être prises en faveur des familles.
Dans ce contexte, la CNAF a porté sa priorité sur l'accueil de l'enfant et sur l'aide aux familles défavorisées, ce que confirment les dispositions du présent texte.
En 2004, la mesure phare a été l'institution de la PAJE, afin d'aider financièrement les familles à la naissance ou à l'adoption d'un enfant, puis de les assister pour en assurer la garde. Cette prestation est versée désormais à 90 % des familles, soit 200 000 bénéficiaires de plus que dans le précédent système.
La deuxième étape en faveur de l'accueil de l'enfant consistera, en 2005, à réformer le système d'adoption.
En vingt ans, le nombre d'adoptions internationales a quadruplé en France : il atteignait, en 2003, le chiffre record de 3 995 enfants. Malgré cette progression, ce sont au mieux 5 000 enfants qui sont adoptés chaque année. Or 23 000 familles sont à ce jour en attente d'adoption et 8 000 nouveaux agréments sont délivrés chaque année.
Ce constat a conduit à l'élaboration d'une réforme, articulée autour des objectifs suivants : améliorer les procédures pour mieux aider les candidats à l'adoption ; rendre plus lisible le dispositif d'adoption internationale afin de faciliter les démarches des familles - une agence française de l'adoption sera créée et 3 millions d'euros sont inscrits à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2005 ; mieux associer le réseau consulaire aux procédures et favoriser le développement des actions de coopération en matière de protection de l'enfance ; enfin, améliorer la prise en charge, le suivi et la santé des enfants adoptés.
En outre, le présent PLFSS propose de doubler la prime à l'adoption et de la porter à 1 600 euros, pour un coût total de 2 millions d'euros, afin de tenir compte du coût des démarches entreprises par les familles adoptantes.
La troisième piste choisie pour favoriser l'accueil de l'enfant consiste à développer l'offre de garde, d'abord en réformant le statut des assistants maternels pour rendre ce métier plus attrayant grâce au projet de loi qui est en cours d'examen.
S'agissant de l'offre de garde collective, les dernières années ont été marquées par l'application de deux dispositifs.
D'une part, trois fonds exceptionnels pour la création de places de crèches ont été successivement institués depuis 2000. Le troisième système d'aide à l'investissement pour la petite enfance, doté de 160 millions d'euros, a été mis en place au mois d'avril 2004. Les résultats sont très positifs : au 31 juillet 2004, 475 millions d'euros avaient globalement été engagés, sur près de 3 200 projets, permettant le financement de plus de 70 000 places. En 2005, 761 projets seront mis en oeuvre et financés à hauteur de 78 millions d'euros.
D'autre part, l'aide aux crèches privées a également été développée. Ces structures peuvent recevoir des subventions des CAF et sont éligibles au crédit d'impôt « famille » institué par l'article 98 de la loi de finances de 2004.
Outre l'accueil de l'enfant, la branche famille a aussi choisi de développer l'aide aux familles défavorisées au travers de l'action sociale des CAF : 8 % des dépenses de la branche. Au total, le fonds national d'action sociale devrait dépasser, en 2005, 3,1 milliards d'euros, soit une augmentation de 3,2 %.
Deux domaines de l'action sociale ont été particulièrement encouragés en 2004 et seront renforcés en 2005 : l'information des familles, avec l'installation des « points info familles », et la médiation familiale.
A cet égard, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 prévoit une réforme du mode de financement de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, en charge d'une partie de l'action sociale. Cette réforme s'appuie sur les travaux menés par le ministère de la famille et de l'enfance, en lien avec l'UNAF, et sur les observations de la Cour des comptes.
Le fonds spécial de l'UNAF, soit 24,3 millions d'euros en 2005, se décomposera en deux enveloppes. La première - 80 % de la dotation - permettra de financer les quatre missions traditionnelles de l'UNAF, à savoir la représentation des familles et l'appui au développement de la vie associative, l'émission d'avis aux pouvoirs publics, les actions en justice et la gestion des services d'intérêt général.
Le solde permettra de financer des actions nouvelles liées à la politique familiale, dont le contenu sera précisé par une convention conclue entre l'UNAF et le ministère de la famille.
La commission des affaires sociales a considéré parfaitement justifié l'esprit de clarification et de transparence qui a présidé à cette réforme.
Après les prestations légales et l'action sociale, les aides au logement constituent le troisième domaine d'intervention de la branche famille et concernent plus de 20 % de ses dépenses. La branche devrait participer à leur financement à hauteur de 6,6 milliards d'euros en 2005, soit autant qu'en 2004.
Cette stabilité du niveau de dépenses ne résulte pas seulement des effets positifs de l'amélioration de la conjoncture économique. En réalité, les aides au logement ont fait l'objet de mesures d'économie. Je pense, notamment, aux aides de faible montant qui ne seront désormais plus versées lorsqu'elles seront inférieures non plus à 15 euros mais à 24 euros ; cette mesure va exclure environ 75 000 familles du bénéfice de ces aides.
A cet égard, nous avons estimé qu'une réflexion pourrait être menée pour prévoir un versement annuel de l'aide au logement lorsque la mensualité est inférieure à 24 euros. Nous souhaitons, madame la ministre, que cette mesure puisse être rapidement mise à l'étude, et j'observe que des amendements ont d'ores et déjà été déposés en ce sens.
Après l'accueil et la garde des jeunes enfants et l'aide aux familles défavorisées, la branche famille aborde d'autres grands thèmes : la jeunesse, la démographie et les familles fragiles, qui constituent autant de défis pour notre société. Elle doit aussi préparer sa propre évolution en modernisant ses instruments de gestion dans la nouvelle convention d'objectifs et de gestion qui sera négociée avec l'Etat en 2005 pour les quatre années à venir.
La conférence de la famille de juin 2004 a été consacrée à l'adolescence. Elle a prévu différentes mesures orientées vers trois objectifs que je juge fondamentaux : valoriser l'engagement personnel, prévenir les comportements à risques et développer l'autonomie de l'adolescent. Il se trouve, par chance, que ces mesures n'emportent pas de réelles conséquences financières sur les comptes de la branche en 2005.
Vous avez choisi, madame la ministre, de travailler sur les thèmes de la démographie et des familles défavorisées en 2005. A ce titre, nous souhaitons apporter notre soutien à la préparation de la prochaine conférence de la famille par une participation active aux travaux préliminaires.
Pour mener à bien ces grands projets de la politique familiale, les ressources financières nécessaires devront être dégagées. Vous comprendrez, mes chers collègues, que la commission des affaires sociales soit particulièrement demandeuse d'un rapide retour à l'équilibre de la branche, et surtout d'une clarification des charges de la CNAF.
Sous réserve de cette observation, la commission a adopté les dispositions relatives à la famille du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le système français d'assurance vieillesse, bâti à la Libération sur les principes de répartition, de contributivité et d'équité, participe du pacte social de notre pays.
Depuis l'échec du plan Juppé en 1995, sa préservation était menacée par la tentation de l'immobilisme, par une contestation largement irrationnelle du principe même de la réforme, par une crispation sur tous les corporatismes et par un consensus national implicite sur les cessations précoces d'activité.
Or les échéances démographiques sont inéluctables. Le vieillissement de la population tend mécaniquement à dégrader le rapport entre le nombre des retraités et celui des cotisants amenés à financer leurs pensions.
Avec 12 millions de retraités aujourd'hui et 20 millions en 2020, comment faire l'économie d'une vraie réforme ?
Une autre solution aurait pu consister à recourir à l'emprunt pour financer les prestations sociales. Mais c'est un réflexe à courte vue : le recours à la dette n'est pas indolore. Il n'aurait fait que transférer la charge des retraites sur d'autres, plus tard. Accepter un déficit structurel de l'assurance vieillesse aurait conduit à faire porter sur les générations futures notre actuel bien-être.
L'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 me donne aujourd'hui l'opportunité de présenter un premier bilan de la réforme des retraites votée l'an dernier ; c'est aussi l'occasion pour nous d'envisager quelles devront être les prochaines étapes pour consolider, à long terme, la branche vieillesse de la sécurité sociale ; je vous proposerai enfin, mes chers collègues, de nous pencher sur l'emploi des séniors pour inverser la tendance à la cessation précoce d'activité professionnelle qui existe dans notre pays.
Le premier point que je souhaite aborder est le bilan de la réforme des retraites votée voici un an, qui est encourageant.
Ce texte a amorcé des changements structurels et a apporté de vraies améliorations au moment où le choc démographique annoncé ces dernières années a commencé à faire sentir ses effets et au moment où le régime spécial de retraites des industries électriques et gazières a dû être adapté en raison de contraintes comptables internationales.
Cette réforme des retraites a été dans un premier temps généreuse, et je me place ici sur le plan des chiffres et des faits et non sur celui de la polémique. L'objectif principal du texte était d'anticiper les déséquilibres financiers futurs.
Ainsi, dans ce contexte difficile, le dispositif des carrières longues permettra cette année à plus de 130 000 personnes ayant commencé à travailler à quatorze ans, à quinze ans ou à seize ans de partir à la retraite dès cinquante-six ans, cinquante-sept ans ou cinquante-huit ans.
Cette avancée majeure a un coût, qui est évalué à 1,3 milliard d'euros pour la seule année 2005. Nous continuons néanmoins de croire à la justice de cette mesure puisque le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale transpose ce dispositif du secteur privé aux trois fonctions publiques.
Dans un premier temps, la réforme des retraites a donc créé de nombreuses dépenses supplémentaires. S'agissant du régime général, à l'horizon de l'année 2020, on peut citer la revalorisation du minimum contributif, qui coûtera 600 millions d'euros par an, le dispositif « carrières longues », qui coûtera 300 millions d'euros par an, ainsi que les mesures en faveur des pluripensionnés, qui coûtera 900 millions d'euros par an. Pour la fonction publique, il s'agit de la création du régime de retraite complémentaire, dont le coût annuel est estimé à 800 millions d'euros.
Au-delà de ces observations, on peut considérer cette réforme comme positive, car elle marque l'amorce de changements structurels. Les mesures réglementaires ont été prises pour qu'elle entre pleinement en application, à quelques réserves près.
J'observe également avec satisfaction que, quelques semaines à peine après son lancement, plus de 600 000 plans d'épargne retraite populaire ont été souscrits.
Autre changement significatif : la suppression progressive du mécanisme des transferts financiers entre régimes spéciaux, la surcompensation, dont nous avions régulièrement souligné les effets pervers.
Je mentionnerai enfin l'accord entre les partenaires sociaux intervenu le 13 novembre 2003 pour la gestion des régimes de retraite complémentaires AGIRC et ARRCO, qui constitue, pour eux, le pendant de la loi du 21 août 2003.
L'année écoulée a été dominée par un second dossier dont le règlement ne pouvait plus attendre : la réforme du financement du régime de retraite spécial des industries électriques et gazières.
Sans changement, l'entrée en vigueur, au 1er janvier 2005, de nouvelles normes comptables internationales aurait obligé EDF et GDF à provisionner la totalité de leurs engagements de retraite, et ce pour près de 80 milliards d'euros, c'est-à-dire trois fois plus que leurs fonds propres.
La solution inédite retenue a consisté à préserver le niveau de prestations, y compris pour l'avenir, tout en adossant le régime spécial sur les régimes de retraite de droit commun.
Mes chers collègues, vous vous rappelez certainement que la commission des affaires sociales s'était fermement prononcée en faveur de la neutralité de cette opération pour les assurés sociaux du secteur privé, dont le régime est deux fois moins favorable que celui des gaziers et des électriciens.
Les engagements pris par le Gouvernement ont été tenus : la soulte qui sera acquittée par EDF et GDF a été calculée sur la base la plus juste - celle de la méthode prospective - et s'élève à 7,7 milliards d'euros pour la seule Caisse nationale de l'assurance maladie, la CNAM.
Le deuxième point que je souhaite développer aujourd'hui n'est plus descriptif mais prospectif : la réforme essentielle est derrière nous, mais des efforts doivent encore être produits pour la consolider.
A court terme, deux priorités s'imposent : rétablir la situation financière du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, et trouver de nouvelles ressources pour le Fonds de réserve pour les retraites, le F2R.
A plus long terme, il faut rappeler que la loi Fillon a pour échéance l'horizon de l'année 2020 et qu'elle ne réglera pas, à elle seule, tous les problèmes posés par le vieillissement de la population.
A court terme, je le répète, il s'agit en premier lieu de sauvegarder le FSV, qui prend en charge les avantages non contributifs de l'assurance vieillesse.
Face à un taux de chômage qui demeure élevé et compte tenu du coût croissant des avantages familiaux, ses résultats n'ont cessé de se dégrader. Le déficit prévu en 2005 est de 1,18 milliard d'euros.
Il s'agit en second lieu du F2R. Dès sa conception, cet organisme s'est vu assigner un objectif ambitieux : détenir 150 milliards d'euros de réserves en 2020, grâce à des financements essentiellement exceptionnels qui se sont taris, comme les licences téléphoniques UMTS.
Aujourd'hui, le F2R en est réduit à sa seule ressource fixe : la quote-part de 65 % de la taxe de 2 % sur les revenus des capitaux. Sur cette base réduite, il détiendra au mieux 56 milliards d'euros en 2020. Il faut donc désormais ou bien lui donner un second souffle, en lui affectant de futures recettes de privatisation, ou bien s'interroger sur sa légitimité et réfléchir à l'utilité de son maintien.
M. Claude Domeizel. C'est une question de volonté !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. A moyen et long termes, au-delà de la limite de 2020, des mesures doivent être préparées pour faire face à un vieillissement de la population qui fera sentir ses effets jusqu'en 2040, voire au-delà.
Par ailleurs, nous savons que la réforme de 2003 ne couvre qu'environ 40 % du besoin global de financement. Le solde repose sur le scénario macro-économique d'une baisse du taux de chômage - de 5 % à l'horizon de l'année 2020 - autorisant un transfert des excédents de l'assurance chômage vers la branche vieillesse.
Enfin, il faut tenir compte des engagements hors bilan, qui correspondent aux retraites des fonctionnaires : 850 milliards d'euros, dont pas un euros n'a été provisionné.
En conséquence, il est clair que la réforme de 2003 n'était que la première étape d'un processus de consolidation.
Il nous faut aussi désamorcer quelques bombes potentielles. Je pense, par exemple, au déséquilibre des régimes spéciaux ou au régime des agents publics de La Poste, qui n'ont pas davantage été provisionnés.
Comment faire face à 18 milliards d'euros d'engagement à la RATP, à 57 milliards d'euros à La Poste et peut-être à 70 milliards d'euros à la SNCF ? La généralisation du schéma d'adossement retenu pour les industries électriques et gazières, les IEG, justifié par les caractéristiques spécifiques d'EDF et GDF, ne me semble pas être ici la bonne solution.
Je pense aussi à certaines failles du code des pensions civiles et militaires de retraite, notamment à deux d'entre elles.
La première est l'indemnité temporaire majorant la pension des fonctionnaires qui résident outre-mer : elle atteint jusqu'à 75 % en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. Dans son rapport pour 2003, la Cour des comptes a sévèrement critiqué ce dispositif réglementaire datant de 1952 : pour 20 000 bénéficiaires, dont le nombre augmente rapidement, le coût annuel est aujourd'hui de 181,5 millions d'euros !
La commission des finances du Sénat avait établi le même diagnostic. Nous nous félicitons en particulier des démarches entreprises l'an dernier par son président, Jean Arthuis, et par son rapporteur général, Philippe Marini, visant à remettre à plat ce dispositif que nous jugeons également, pour notre part, injustifié. Nous regrettons que l'amendement qu'ils avaient déposé lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2004 n'ait pas abouti. Nous ne trouverions pas illégitime que ces décrets soient prochainement abrogés.
La seconde faille est l'application par le juge administratif français de la jurisprudence européenne sur l'égalité des hommes et des femmes en matière de liquidation de pension de retraite pour les parents de trois enfants et qui attestent de quinze ans de services, point qui a été relevé aussi par la Cour des compte. Une loi de 1924 réservait cet avantage familial aux mères ; le juge l'a étendu aux pères.
Or, dans la fonction publique, un départ en retraite sur six intervient sur cette base à un âge moyen de cinquante et un ans, mais parfois dès trente-cinq ans ou quarante ans ! La généralisation du dispositif dénature et surtout menace cet avantage familial, car 30 % des hommes dans la fonction publique sont pères de trois enfants. On crée ainsi un nouveau mécanisme de préretraite qui coûterait 1,3 milliard d'euros par an en régime de croisière. Ce niveau de dépense est bien entendu insoutenable ; il peut remettre en cause la pérennité de la mesure pour les femmes, en rendant son abrogation pour tous inévitable.
Dernier domaine où la réflexion doit être anticipée : les négociations à venir sur la pénibilité.
Ce concept recouvre une réalité incontestable, mais il faudra le définir avec beaucoup de subtilité pour qu'il ne remette pas en cause l'allongement de la durée d'activité décidé par la réforme de 2003.
Je reviendrai enfin brièvement sur des thèmes chers à commission des affaires sociales : le renforcement de la transparence et l'amélioration des règles de fonctionnement de l'assurance vieillesse.
Je n'évoquerai, à ce titre, que trois impératifs : repenser les règles de la compensation démographique entre les régimes ; mettre en place, comme nous le demandons depuis un certain nombre d'années, pour les fonctionnaires de l'État, une véritable caisse de retraite, comme la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL, qui assure ce rôle depuis 1945 pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers ; enfin, améliorer le fonctionnement du service des pensions de l'État.
Au total, le chantier des retraites est loin d'être clos.
J'en viens à mon troisième point : le législateur ne peut pas tout faire. La loi du 21 août 2003 ne constituait qu'une condition nécessaire, mais non suffisante, au succès de la réforme.
M. Roland Muzeau. Forcément, elle n'était pas financée !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Les trente-cinq heures non plus n'étaient pas financées !
M. Roland Muzeau. Il fallait faire mieux !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il faut faire évoluer les comportements, notamment sur deux points : le taux d'emploi des séniors et les préretraites, que certains qualifient de « drogue dure » de l'économie française.
La cessation précoce d'activité, conçue comme exceptionnelle au début des années 1980, s'est institutionnalisée et généralisée.
Le « stock » des préretraites, au sens large, dépasse ainsi aujourd'hui 480 000 bénéficiaires, soit l'équivalent d'une classe d'âge née pendant la Seconde Guerre mondiale !
Cette situation résulte, on le sait, d'un consensus national implicite entre les employeurs, les salariés et les syndicats. Or le résultat de cette intention partagée est incompatible avec l'intérêt général du pays.
Selon une étude réalisée sur l'ensemble des pays de l'OCDE, son coût d'opportunité pour notre économie pourrait dépasser 10 % de la richesse nationale potentielle.
Avec seulement 40 % de personnes actives parmi les personnes âgées de 55 à 64 ans, notre pays se classe presque au dernier rang des pays européens avant la Belgique et le Luxembourg.
Il faut donc renforcer la politique « anti-préretraites ». La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a déjà marqué une inflexion majeure dans ce domaine : les dispositifs existants ont été recentrés sur la pénibilité et les préretraites « maison » financièrement pénalisées. Mais l'impact de ces mesures se trouve, dans l'immédiat, contrarié par les effets du dispositif « carrières longues ». Surtout, le taux de chômage, aujourd'hui stabilisé autour de 10 % de la population active, explique la persistance mezza voce d'une politique de retrait d'activité.
Pourtant, des expériences réussies menées dans d'autres pays industrialisés - la Finlande notamment - montrent qu'il est possible d'accroître le taux d'activité des séniors.
Le dernier rapport du Conseil d'orientation des retraites évoque l'amorce d'une remontée en France depuis 1996. Toutefois, il tempère aussitôt cette évolution positive en l'expliquant pour moitié par des facteurs démographiques. Les témoignages des directeurs des ressources humaines des grandes entreprises françaises tendent aussi à relativiser ce timide jugement optimiste. Lors d'un récent colloque organisé à ce sujet, j'ai pu mesurer l'inquiétude des spécialistes du droit du travail face à la lenteur des changements de comportement.
Au terme de mon propos, je souhaite vous faire part, mes chers collègues, d'une double conviction fondée sur mon expérience des trois dernières années, au cours desquelles j'ai eu l'honneur de rapporter pour la commission des affaires sociales l'ensemble des textes de loi consacrés aux retraites.
Ma première conviction, c'est que nous n'aurons en réalité jamais fini de réformer les retraites. Après une décennie d'immobilisme, il nous faut organiser le pilotage de l'assurance vieillesse par des ajustements réguliers, raisonnables et de long terme.
Ma deuxième conviction, c'est que la logique de la réforme de 2003 n'est qu'accessoirement comptable et financière. Son ambition est d'éviter l'apparition de conflits de génération ou l'opposition entre les ressortissants du régime général et de la fonction publique, sans même évoquer ceux des régimes spéciaux.
Je crois au vrai choix de la solidarité et de l'équité et au refus des corporatismes : ce sont les termes nobles d'un débat politique fondamental que le Parlement en général, notre assemblée en particulier, s'honorera de conduire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, madame, monsieur le secrétaire d'Etat, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 est un texte d'ampleur limitée, comme l'a dit Philippe Douste-Blazy tout à l'heure. En effet, il fait suite aux votes de trois réformes sociales : la réforme des retraites, la réforme de l'assurance maladie, la réforme du financement de la solidarité nationale pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
Nous sommes dans un contexte de dégradation financière sans précédent des comptes de la sécurité sociale. Le régime général connaîtra en effet en 2004 son déficit le plus élevé jamais atteint après trois années de dégradation exponentielle. Son solde financier est en effet passé d'un excédent de 1,2 milliard d'euros en 2001 à un déficit de 14 milliards d'euros en 2004, soit une détérioration moyenne de 5 milliards d'euros par an sur la période.
Ce déficit est presque exclusivement concentré sur la branche maladie du régime général, même si, pour la première fois depuis dix ans, toutes les branches seront déficitaires en 2004.
De plus, il faut s'inquiéter de la situation particulièrement dégradée du régime de protection sociale agricole, qui devrait connaître un besoin de financement de l'ordre de 900 millions d'euros en 2004 et de 1,5 milliard d'euros en 2005. Je rappelle que, à compter du 1er janvier 2005, le nouveau Fonds de financement des prestations des non-salariés agricoles, le FFIPSA, qui a le statut d'un établissement public administratif, reprendra les attributions du traditionnel BAPSA.
Le plafond d'avances de trésorerie de ce régime sera au demeurant relevé de manière importante en 2005, puisqu'il passera de 4,1 milliards d'euros à 6,2 milliards d'euros, ce qui donnera au FFIPSA une capacité d'emprunt plus importante. En revanche, le plafond d'avances de trésorerie du régime général sera ramené de 33 milliards d'euros à 13 milliards d'euros.
Cette dégradation des comptes sociaux a eu des conséquences inéluctables en termes d'évolution des prélèvements sociaux. Les prélèvements sociaux constituent en effet une part croissante du PIB puisqu'ils représentaient 20,5 % en 1997 et 21,8 % en 2003. Cette part devrait s'établir en 2004 à 20,5 % et à 20,6 % en 2005, en raison notamment de mesures de changement de périmètre liées à la disparition du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC.
Les administrations de sécurité sociale captent aujourd'hui près de la moitié de nos prélèvements obligatoires, qui représenteront 43,7 % du PIB en 2005, ce qui témoigne du besoin de financement engendré par les dépenses sociales de notre pays.
A travers ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, le Gouvernement se propose de relever le défi de l'amélioration des comptes sociaux et s'inscrit dans le droit-fil des réformes sociales déjà mises en oeuvre. Ces réformes suffiront-elles à assurer la « soutenabilité » à moyen terme de nos finances sociales ? Qu'il me soit aujourd'hui permis d'en douter.
Deux mesures de recettes contenues dans ce projet de loi méritent notre attention.
D'une part, les mutuelles et les institutions de prévoyance seront placées sur un pied d'égalité avec les institutions financières au regard de l'assujettissement à la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, la fameuse C3S, alors que l'assujettissement à cette contribution variait jusqu'à présent en fonction de la forme juridique de l'organisme concerné. Je rappelle que le produit total de la C3S atteint 3,33 milliards d'euros en 2004.
D'autre part, un nouvel article introduit par l'Assemblée nationale prévoit une mesure de coordination avec le projet de loi de finances pour 2005, qui fixe la répartition du produit du droit de consommation sur les tabacs. La Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, devrait ainsi, conformément aux dispositions de la loi relative à l'assurance maladie, voir le produit qui lui est affecté majoré. Elle recevra ainsi 32,5 % du produit du droit de consommation sur les tabacs, soit 3,07 milliards d'euros. Cette évolution se fait au détriment de la part affectée à l'Etat, qui passera de 25,91 % à 14,83 %.
Toutefois, le produit total du droit de consommation sur les tabacs a progressé bien moins que prévu en 2004, puisqu'il devrait s'élever à 9,25 milliards d'euros alors que 10 milliards d'euros étaient attendus. Faut-il s'en plaindre ? La campagne anti-tabac a porté ses fruits, mais c'est le financement même de la sécurité sociale par le tabac qui est en cause.
Par ailleurs, la part affectée à la CNAMTS a été majorée de 90 millions d'euros pour compenser partiellement le transfert, prévu par l'article 77 du projet de loi de finances, du produit de la contribution sur les boissons alcooliques de plus de 25 degrés au fonds de financement de la CMU, qui devrait atteindre 370 millions d'euros en 2005.
Quant aux objectifs de dépenses fixés dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, ils s'établissent à 361,7 milliards d'euros, en augmentation de 4,2 % par rapport aux objectifs révisés pour 2004. L'évolution de l'objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité, décès apparaît particulièrement optimiste. En effet, une grande incertitude pèse aujourd'hui sur le rendement des mesures de maîtrise médicalisée contenues dans la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.
Je voudrais maintenant vous présenter rapidement la situation de chacune des branches de la sécurité sociale. Toutefois, je n'insisterai ni sur la branche maladie ni sur la branche accident du travail, qui feront, demain, l'objet d'un débat ici même.
La commission des comptes de la sécurité sociale évalue le déficit de la branche maladie à 13,2 milliards d'euros en 2004. Il devrait s'améliorer en 2005 pour atteindre 8 milliards d'euros.
Cette branche a été en constant déficit depuis le début des années quatre-vingt-dix. Toutefois, la dégradation du solde de l'assurance maladie s'est accélérée depuis la fin de cette décennie. En effet, le déficit de l'assurance maladie était inférieur à 1 milliard d'euros en 1999, il atteignait environ 2 milliards d'euros en 2000 et en 2001. Il a augmenté de près de 4 milliards d'euros chaque année depuis 2002, pour atteindre un record historique en 2004.
Même au plus fort de la croissance économique, l'assurance maladie n'a jamais retrouvé un solde positif ; c'est pourquoi on peut estimer que son niveau de déficit interdit aujourd'hui tout retour spontané à l'équilibre. Cette branche est en effet confrontée avant tout à une crise de dépenses liée, notamment, au comportement des différents acteurs, à l'allongement de la durée de vie de la population et au progrès technique, qui entraînent une accélération particulièrement vive du rythme de progression de l'ONDAM. Cette crise de dépenses est en outre aggravée par le ralentissement de la conjoncture économique, qui a rendu moins dynamique l'assiette des cotisations sociales, à savoir la masse salariale, créant par là même un effet de ciseau entre recettes et dépenses.
Toutefois, la décélération du rythme de progression des dépenses d'assurance maladie constatée en 2003 et en 2004 est encourageante.
Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, le Gouvernement a choisi de fixer la progression de l'ONDAM à 3,2 % par rapport à l'ONDAM pour 2004 rebasé. Cette prévision me parait très optimiste, voire irréaliste, dans la mesure où une grande incertitude pèse encore aujourd'hui sur le rendement des mesures de maîtrise médicalisée mises en oeuvre par la loi du 13 août 2004. Effectivement, leur réussite suppose des efforts importants de tous les acteurs et un changement des comportements qui devraient porter leurs fruits sur le long terme, même si nous notons en fin d'année une amélioration notable.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Les mesures nouvelles contenues dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, s'agissant de la branche maladie, sont d'ampleur limitée. Elles visent notamment à permettre l'application, dans tous les établissements de santé, de la réforme portant tarification à l'activité mise en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.
Je reviendrai plus longuement sur l'avenir de l'assurance maladie demain, lors du débat spécifique consacré à cette question.
En ce qui concerne la branche accident du travail et maladies professionnelles, je voudrais simplement souligner qu'elle connaîtra un déficit important et croissant, puisqu'il devrait s'élever à 704 millions d'euros en 2005, après avoir atteint 505 millions d'euros en 2004. Ce déficit est accentué par le poids des contributions au fonds de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante, le FCAATA, et au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, qui sont toujours plus lourdes et qui progressent de 200 millions d'euros en 2005 pour s'établir à 800 millions d'euros.
Les comptes de la branche famille sont en excédent depuis 1999. Cet excédent s'élevait à 1 milliard d'euros en 2002 et à 400 millions d'euros en 2003 ; cette branche devrait néanmoins être déficitaire de près de 200 millions d'euros en 2004 et retrouver un équilibre précaire en 2005.
L'année dernière, la loi de financement de la sécurité sociale avait créé la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, dans un but de simplification.
La PAJE a un coût élevé puisqu'elle devrait se traduire pas une dépense nouvelle de 140 millions d'euros pour la branche famille en 2004 et d'environ 850 millions d'euros par an à compter de 2007.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 est assez pauvre s'agissant des mesures en faveur de la branche famille. En effet, le doublement de la prime d'adoption et la réforme du mode de financement de l'Union nationale des associations familiales sont les principales dispositions concernées.
La branche vieillesse connaîtra également un déficit de 70 millions d'euros en 2004 et de 1,5 milliard d'euros en 2005. La montée en puissance des retraites anticipées dans le régime général devrait se poursuivre ; elles représentent un coût de 630 millions d'euros en 2004 et de 1,3 milliard d'euros en 2005.
Cette mesure de départ anticipé à la retraite sera également progressivement étendue aux fonctionnaires, selon les mêmes modalités que celles qui sont retenues pour le régime général par l'article 29 du présent projet de loi et l'article 73 du projet de loi de finances pour 2005 : cela devrait représenter en 2005 une charge nouvelle de 68 millions d'euros pour la caisse de retraite de la fonction publique territoriale et hospitalière et de 70 millions d'euros pour l'Etat.
Je voudrais insister sur la situation difficile que connaîtra le Fonds de solidarité vieillesse, dont le déficit approchera 1,2 milliard d'euros en 2005, après avoir atteint 429 millions d'euros en 2004. Son déficit cumulé devrait atteindre près de 2,7 milliards d'euros en 2005, ce qui est très préoccupant et pose à la fois un problème de flux et un problème de stock.
En outre, le dispositif de compromis retenu sur la soulte des industries électriques et gazières, IEG, sur lequel je voudrais maintenant faire le point, contribuera à accroître ses difficultés.
L'article 28 du présent projet de loi, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale, tient compte du compromis trouvé par le Gouvernement avec la Caisse nationale d'assurance vieillesse au sujet de l'adossement du régime des IEG au régime général.
Sans entrer dans les détails techniques de calcul, je dirai simplement que la soulte des IEG correspondra à un « droit d'entrée » de 7,7 milliards d'euros, auxquels s'ajoutera 1,3 milliard d'euros de prestations familiales remboursées à la CNAVTS par le FSV, soit 9 milliards d'euros. Il faut préciser que ces données ne figurent pas dans le présent projet de loi.
Le versement de la soulte sera étalé dans le temps et payé de la façon suivante.
Un versement initial de 40 % de la soulte, soit 3,08 milliards d'euros en valeur 2005, sera confié au Fonds de réserve des retraites, pour être placé jusqu'en 2020 ; en 2020, la CNAVTS recouvrera son capital de 3,08 milliards d'euros, majoré des intérêts capitalisés depuis 2005.
Le solde de 4,62 milliards d'euros sera versé de façon échelonnée par la Caisse nationale des industries électriques et gazières, la CNIEG, à la CNAV pendant vingt ans, de 2005 à 2024.
L'article 28 du présent projet de loi précise que « les versements directs à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés sont garantis par l'Etat dans des conditions définies en loi de finances ». Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, obtenir des précisions sur ce point lors de la discussion en séance publique.
Le Fonds de réserve pour les retraites assurera la gestion d'une partie de la soulte dans les mêmes conditions que celles qui sont applicables aux autres actifs, sans qu'elle soit retracée dans une section ad hoc, mais les résultats de la gestion de cette partie de la contribution sont retracés chaque année dans l'annexe des comptes du fonds, ce qui paraît pertinent, dans la mesure où ce dispositif favorise l'efficacité de la gestion, alors que la séparation comptable et financière de la gestion de la soulte des autres réserves du fonds aurait été source de complication.
Quant aux autres réserves du fonds de réserve, je me contenterai d'indiquer qu'elles devraient s'élever à 20,9 milliards d'euros vers 2005.
En conclusion, je m'interroge sur la pertinence actuelle du cadre organique des lois de financement de la sécurité sociale, défini voilà plus de huit ans. Si, en 1996, l'instauration de ce nouvel instrument financier législatif a constitué une amélioration indéniable, force est de constater que cet instrument a aujourd'hui vécu et que nous avons atteint les limites de cet exercice parlementaire annuel.
Mme Hélène Luc. Qu'est-ce que cela veut dire ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Je vais vous l'expliquer, ma chère collègue.
La commission des finances du Sénat, forte de son expérience acquise lors de la rénovation du cadre organique relatif aux lois de finances, sera en mesure d'apporter une contribution utile au débat concernant l'indispensable réforme des dispositions organiques relatives aux lois de financement de la sécurité sociale. Je souhaite que les deux commissions compétentes de notre assemblée travaillent main dans la main pour moderniser un débat et un cadre législatif devenus obsolètes.
Mme Hélène Luc. Cette discussion, pour vous, c'est encore trop ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances a émis un avis favorable sur l'adoption du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur le contenu des communications des rapporteurs qui m'ont précédé et qui ont exposé avec talent le contexte et les enjeux du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.
Dans le contexte financier difficile que fut celui de ces dernières années, le Gouvernement n'a pas économisé ses efforts en matière sociale : sauvegarde des retraites et de l'assurance maladie, nouveaux droits pour les personnes handicapées et les personnes âgées, ambition nouvelle pour la cohésion sociale. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Hélène Luc. Soyez plus modeste !
M. Nicolas About, président la commission des affaires sociales. Je sais que cela vous choque...
M. Guy Fischer. Oui !
M. Nicolas About, président la commission des affaires sociales. ... parce que vous aimeriez bien avoir le monopole du coeur, mais vous ne l'avez pas !
Le bilan du Gouvernement en matière sociale, chacun le sait, est digne d'éloges.
Dans ce contexte agité, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui constitue une sorte de respiration qui nous donne l'occasion de mettre en perspective nos travaux passés et de préparer l'avenir.
Je présenterai brièvement demain les axes de travail retenus par la commission des affaires sociales sur l'assurance maladie.
Nous souhaitons contribuer au « service après vote », monsieur le secrétaire d'Etat, et avancer dans la voie tracée par la réforme, car nous avons le sentiment que beaucoup reste à faire.
M. Guy Fischer. Ça, c'est sûr !
M. Roland Muzeau. Tout reste à faire !
M. Nicolas About, président la commission des affaires sociales. Je me contenterai pour l'heure de demander au Gouvernement de nous faire connaître sa position sur un sujet d'importance : il s'agit des lois de financement de la sécurité sociale.
Alain Vasselle a résumé brillamment les grandes lignes de l'ambition que nourrit la commission des affaires sociales pour la réforme du cadre organique des lois de financement. Je n'y reviendrai pas.
En revanche, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai été saisi de quelques interrogations à la lecture de nos travaux de mercredi dernier et des propos tenus par le président de la commission des finances dans le cadre du débat relatif aux prélèvements obligatoires et à leur évolution. Celui-ci a plaidé pour l'intégration de la loi de financement dans la loi de finances, en disant : « peut-être pourrons-nous même discuter en même temps du budget de l'État et du budget de la protection sociale ».
Cette perspective est parfaitement envisageable, « réenvisageable » devrais-je plutôt dire : elle correspond en effet à un retour en arrière de dix ans, à une époque où les comptes de la sécurité sociale étaient examinés dans le cadre du budget du ministère des affaires sociales, de la santé et de la ville et où le temps consacré à cet examen n'était pas plus important que celui qui était réservé au budget des anciens combattants, ainsi que vous le rappeliez, monsieur le rapporteur. (M. Alain Vasselle, rapporteur, acquiesce.)
Les documents d'archive de notre commission témoignent de nos débats d'alors, au cours desquels M. Douste-Blasy répondait aux questions de Charles Descours, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, Jean Arthuis étant à l'époque rapporteur général du budget.
Cette discussion globale, « consolidée » ou « combinée », n'a pas permis d'éviter la crise majeure des comptes sociaux constatée alors pour les quatre branches et non pour la seule assurance maladie.
Le retour à un modèle que nous avons déjà écarté par le passé serait-il un gage de progrès ?
M. Guy Fischer. Mettez-vous d'accord !
M. Nicolas About, président la commission des affaires sociales. Personnellement, je n'en suis pas convaincu, mais je souhaiterais connaître la position du Gouvernement. Celui-ci souhaite-t-il fondre la loi de financement de la sécurité sociale dans la loi de finances ou, au contraire, souhaite-t-il progresser vers le renforcement des lois de financement ?
Dans cette dernière hypothèse, il faudra, mes chers collègues, que nous nous adaptions et que nous fassions un peu plus de place à cet instrument alors amélioré.
Mon souhait, en tant que président de la commission des affaires sociales, est de voir chacun de nos collègues s'approprier ces moments réservés aux préoccupations premières de nos concitoyens : la protection de leur santé, la garantie de leur retraite, l'assurance d'être aidé ans leurs responsabilités familiales.
Pour la troisième année consécutive, la conférence des présidents a bien voulu, et je l'en remercie, accéder à la demande de la commission des affaires sociales et organiser l'examen du projet de loi de financement par discussion thématique afin que nous concentrions notre attention sur les points chauds, à savoir, cette année, l'hôpital et la branche accidents du travail - maladies professionnelles. Je m'en félicite et je souhaite que nos collègues puissent pleinement profiter de cette clarification de présentation pour animer ces débats.
J'attire enfin l'attention du Gouvernement sur le fait que nous comptons sur son appui pour que la commission puisse exercer ses compétences en matière de contrôle et d'évaluation.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien !
M. Nicolas About, président la commission des affaires sociales. Beaucoup dépend du Sénat et de son bureau, je le sais. Le président Christian Poncelet connaît nos propositions et nos souhaits en la matière. La réforme de la loi organique serait l'occasion d'y accéder. Mais le Sénat ne peut pas tout, monsieur le secrétaire d'Etat.
Nous avons dernièrement reçu le Premier président de la Cour des comptes, ainsi que les magistrats de la 6e chambre. Je me félicite d'ailleurs de l'attention avec laquelle ceux-ci étudient nos demandes, mais cette attention trouve ses bornes dans les moyens de la Cour, qui, malheureusement, ne sont pas illimités.
N'oublions pas, mes chers collègues, que le code des juridictions financières offre à la commission des affaires sociales les mêmes facultés de recourir aux enquêtes de la Cour dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale que celles qui sont offertes à la commission des finances dans le cadre du projet de loi de finances.
La commission des finances a bénéficié d'une assistance utile et importante ; la Cour lui a déjà communiqué les résultats de neuf enquêtes et devrait en rendre quatre prochainement.
La commission des affaires sociales a des ambitions plus modestes, mais pas moins efficaces. Convaincue que « le mieux est l'ennemi du bien », elle se satisferait d'une demande d'enquête annuelle aboutie chaque année. Mais il semble que les moyens dont dispose la 6e chambre de la Cour des comptes ne permettent pas un tel rendez-vous à la fréquence d'une fois par an.
Seul le Gouvernement pourrait résoudre cette difficulté dans le cadre du budget, en dotant la Cour des moyens d'exercer cette compétence « d'assistance au Parlement dans l'évaluation des lois de financement de la sécurité sociale ». J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que le Gouvernement pourra accéder à ce voeu. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 76 minutes ;
Groupe socialiste, 49 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 20 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 15 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Madame la ministre, madame, monsieur le secrétaire d'Etat, nous partageons un constat quant à l'action du Gouvernement : nous considérons que l'action du Gouvernement est résolument sans précédent.
Mais je crains que nous n'entendions sous un même vocable deux réalités bien différentes. Vous estimez que la politique menée permet enfin de corriger les handicaps structurels du système de sécurité sociale tout en en préservant l'essence ; nous estimons que la politique du Gouvernement présente le risque d'une transformation profonde de la nature de la sécurité sociale et qu'elle ne prépare pas l'avenir.
Si nous n'y prenons garde, demain, la prise en charge collective des risques de l'existence sera drastiquement réduite. Alors que notre sécurité sociale vacille, rien de significatif, malheureusement, n'est prévu dans ce budget pour éviter qu'elle ne s'effondre.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 qui nous est soumis inquiète plus qu'il ne rassure. Il n'y a finalement que le MEDEF qui y trouve son compte, puisqu'il a décidé de réitérer sa participation aux instances de régulation de la sécurité sociale. Ce retour, d'ailleurs, ne trompe personne, il a très certainement été négocié.
Nos concitoyens, et principalement les salariés, ont quant à eux de bonnes raisons d'être inquiets des réformes à I'oeuvre, qui se traduiront pour eux, au mieux, par plus de prélèvements aujourd'hui, par une couverture sociale diminuée demain, au pire, par une faillite progressive de la sécurité sociale et une dérive vers un système d'assurances individualisées.
M. Alain Vasselle, rapporteur. On n'en est pas là !
M. Bernard Cazeau. Quelles sont les raisons d'une telle dégradation des comptes sociaux ? Sommes-nous sur la voie d'une amélioration ? Les projets du Gouvernement préparent-ils l'avenir ?
Telles sont les questions que nos concitoyens nous posent. Je crains qu'ils ne trouvent pas, dans les dispositions du présent texte, de réponse à la mesure des enjeux.
L'inquiétude atteint en effet son paroxysme en raison du déficit calamiteux prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.
Tous les régimes sont dans le rouge : 14,8 milliards d'euros de déficit pour le régime général, dont 13,2 milliards d'euros pour celui de l'assurance maladie qui, comme d'habitude, se taille la part du lion.
Même les régimes vieillesse, familles et accidents du travail sont déficitaires.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Si vous aviez engagé la réforme des retraites, nous n'en serions peut-être pas là !
M. Bernard Cazeau. Les promesses n'ont pourtant pas fait défaut depuis le début de la présente législature, à l'occasion des trois lois dernièrement votée : je veux parler de la loi portant réforme des retraites, de la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées et de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.
Loin des objectifs annoncés, monsieur le secrétaire d'Etat, le grand soir de la réforme tant promise par le Gouvernement n'aura pas lieu en 2005. La dégradation inexorable des comptes que nous constatons cette année constitue la preuve tragique de l'échec de la politique économique et sociale du Gouvernement.
La formation du déficit du régime général entre 2003 et 2004 en est un exemple révélateur. En effet, alors que les dépenses progressaient aveuglément de 5,8 % durant cette période, les recettes n'évoluaient pour leur part que de 2,9 % en raison d'une croissance limitée de la masse salariale, sur laquelle sont assises les deux tiers des recettes du régime général.
Le constat est sur ce point unanime : une politique qui engendre du chômage entraîne irrémédiablement une détérioration des comptes sociaux.
Le problème de la France, à ce jour, est bien celui du développement économique et de l'emploi.
Dans ces domaines, la stratégie du Gouvernement s'est avérée être un échec patent : la baisse de la fiscalité pesant sur les plus riches n'a pas favorisé l'investissement ; de même, la dérégulation du marché du travail n'a pas favorisé les embauches.
L'équilibre des régimes sociaux s'en ressent : dans un contexte de hausse importante des dépenses, l'effet de ciseaux joue à plein.
Ce cercle vicieux, dépressionnaire et cumulatif, qui, ainsi que l'attestent les chiffres qui nous sont présentés cette année, atteint son paroxysme, s'est enclenché dès votre arrivée aux responsabilités : la dynamique française de croissance et de créations d'emplois s'est enrayée, la priorité politique donnée à la maîtrise des dépenses de santé a été délaissée et la recherche de justice sociale dans la conduite des réformes et la gestion des finances publiques a été remisée aux oubliettes.
M. Guy Fischer. C'est la vérité !
M. Bernard Cazeau. Aujourd'hui, aucun élément économique ne permet raisonnablement de croire en un retournement de ces fâcheuses tendances.
La prévision de croissance sur laquelle vous fondez vos recettes, basée sur une évolution de 2,5 % du produit intérieur brut, telle que prévue dans la loi de finances 2005, n'est en rien garantie, ne serait-ce que parce que ladite loi de finances sous-estime de 30 % le cours du baril de pétrole par rapport à son cours actuel - de ce fait, la croissance n'atteindra que 0,1 % ce trimestre.
Plus foncièrement, la croissance de 4 % de la masse salariale que vous envisagez n'est nullement acquise. Vous fondant sur cette progression, vous extrapolez la hausse du SMIC consentie le 1er juillet à l'ensemble des salariés, ce qui, vous le savez, ne sera pas le cas puisque seuls 13 % d'entre eux en bénéficieront.
Compte tenu de la hausse du chômage et du rapport de force défavorable aux négociations salariales sur le marché du travail, rien d'extraordinaire n'est à attendre en matière d'évolutions salariales en 2005.
Cela nous rassure sur au moins un point : les conjoncturistes de votre ministère ne sont pas les mêmes que ceux du patronat, qui, pour leur part, ne voient pas d'un très bon oeil la croissance de la masse salariale en 2005 !
Aussi les promesses de réduction des déficits prévues dans votre projet de loi me paraissent-elles bien hypothéquées.
Pour la troisième année consécutive, on nous explique que nous allons voir ce que nous allons voir et que le renflouement des budgets sociaux est imminent !
La vérité est double : vos projections relèvent de la spéculation plus que de phénomènes avérés et l'essentiel des progrès réalisés le seront au détriment des salariés et des générations futures.
Selon vos projections, le déficit des régimes de base devrait atteindre 10,8 milliards d'euros en 2005 contre 14,8 milliards d'euros cette année. C'est essentiellement par la réduction du déficit de l'assurance maladie que vous réussissez cette ébauche de redressement, puisque le solde négatif de cette branche passerait de 13,2 milliards d'euros en 2004 à 7,9 milliards d'euros en 2005, soit une réduction de l'ordre de 5,3 milliards d'euros.
Pendant ce temps, les branches vieillesse et accidents du travail voient leurs déficits se généraliser tandis que la branche familles, pour la première fois depuis longtemps, est déficitaire et devrait péniblement, dites-vous, parvenir à l'équilibre en 2005.
Le miracle du rétablissement des comptes repose donc sur la branche maladie, laquelle connaîtra en 2005, selon vos prévisions, une franche rupture avec l'évolution des trois dernières années, les dépenses devant enfin croître moins vite que les recettes.
La réforme de l'assurance maladie, supposée atteindre la plénitude de son effet en 2007, commencerait donc dès 2005 à porter ses fruits.
M. Bernard Cazeau. J'en conviens en ce qui concerne les recettes, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est-à-dire celles qui correspondent à de nouveaux prélèvements ou à des déremboursements,...
M. Bernard Cazeau. ...déremboursements que M. Vasselle a baptisés - non sans un certain penchant pour l'euphémisme - « mesures de responsabilisation de l'usager » !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas lui le ministre ! (Sourires.)
M. Bernard Cazeau. Ce sont donc ces nouvelles mesures qui vont régler vos problèmes !
Au demeurant, permettez-moi de douter de la validité de vos prévisions pour ce qui concerne la réduction des dépenses.
J'aurai l'occasion d'expliciter ce propos lorsque nous en viendrons demain à l'examen détaillé des mesures contenues dans le texte sur l'assurance maladie.
Je déplore que vous succombiez à votre tour, monsieur le secrétaire d'Etat, au mirage de la méthode Coué, qui a emporté M. Mattei, l'éminent prédécesseur de M. Douste-Blazy !
Les mots ont leur limite. Les économies que vous attribuez à la « maîtrise médicalisée » ou au virtuel - du moins pour l'instant - « dossier médical partagé » peineront à trouver une traduction concrète, faute d'outils de régulation adaptés.
Attendre la restauration des équilibres financiers de l'assurance maladie d'un soudain « changement des comportements » des professions de santé me paraît être un pari sinon voué à l'échec, à tout le moins risqué.
M. Bernard Cazeau. Je suis rejoint en cela par une partie de votre majorité à l'Assemblée nationale, qui estime que vos chiffres ne sont pas crédibles, allant même, à l'instar de M. Préel, jusqu'à les qualifier de « pifométriques ».
Dans ces conditions, la maquette budgétaire qui nous est soumise est sujette à caution.
En ce qui concerne les branches familles et accidents du travail, la situation s'est nettement dégradée. La branche vieillesse, quant à elle, prend l'eau malgré les artifices comptables utilisés pour colmater les fuites dans l'urgence : il se vérifie ainsi chaque jour que nous étions fondés à critiquer l'absence de financement de la réforme des retraites, notamment des départs anticipés. Je n'insiste pas car mes collègues vous diront tout à l'heure tout le bien qu'ils en pensent !
Je dirai cependant un mot sur le déficit de certains fonds et caisses spécifiques.
Le fonds de solidarité vieillesse, le FSV, et la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL, connaissent une situation catastrophique, alors même que les besoins sociaux auxquels ils répondent sont absolument incontournables. Qui oserait s'en prendre aux modestes droits ouverts par le minimum vieillesse ?
Le déficit du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA, successeur du BAPSA, qui atteindra 1,5 milliard d'euros en 2005, est une illustration significative. La responsabilité en incombe, juge-t-on, à la démographie du régime - 630 000 cotisants pour 1 900 000 bénéficiaires. Toutefois, cette situation devrait perdurer puisque chaque année 50 000 agriculteurs âgés quittent le régime tandis que 30 000 seulement l'intègrent. Compte tenu de la pyramide des âges, le différentiel s'amplifiera au fil des années.
On ne peut que déplorer que rien ne soit prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, hormis une augmentation à 6,2 milliards d'euros de ses possibilités d'emprunt, pour assurer la viabilité de ce régime fondamental pour le monde agricole.
Que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d'Etat, pour assurer la pérennité financière du FFIPSA et répondre aux légitimes attentes des retraités agricoles, qui demandent désormais que leur statut et celui de leurs conjoints évoluent et qui exigent dès maintenant un effort de solidarité nationale en leur faveur ?
Quant à l'hôpital public, nous aurons l'occasion de l'évoquer au fil de nos débats. De brûlantes questions se posent à son sujet.
Je me contenterai de reprendre les remarques qui ont été faites par M. Jean-Marie Spaeth, ancien président de la CNAM, devant la commission des affaires sociales : « L'hôpital est fermé à l'assurance maladie et pourtant cette dernière paye tout ; la caisse est illégitime dans les hôpitaux publics. »
Les exemples sont nombreux. Prenons celui des médicaments : plus de 20 % d'entre eux en valeur sont délivrés de manière anonyme et sans contrôle par les médecins hospitaliers.
Monsieur le secrétaire d'Etat, pour l'hôpital comme pour la ville, il est nécessaire de développer des références et des règles communes. (M. le secrétaire d'Etat acquiesce.)
M. Bernard Cazeau. Vous approuvez, mais vous ne le faites pas !
M. Bernard Cazeau. Un Etat juge et partie laisse toujours se développer une importante marge d'appréciation, d'autant que, en ce domaine, la communauté scientifique a toujours été très réticente, il est vrai, à assumer une véritable responsabilité.
Le volontarisme des paroles ne fait pas une politique. Derrière les discours rassurants et les paravents de la communication d'Etat...
M. Paul Blanc. C'est un expert qui parle ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Bernard Cazeau. ...la vérité demeure, et elle n'est pas réjouissante. Cette vérité, votre vérité, celle de votre Gouvernement, c'est la politique des déficits, du laisser-aller, ce qui me désole, croyez-le bien.
Les faits sont là : les prélèvements sociaux sur les ménages ont été fortement alourdis tandis que les ménages aisés bénéficiaient de baisses d'impôts, et les comptes ne se sont améliorés que très marginalement.
Laisser croire à nos concitoyens, par des effets de manches médiatiques, que le financement de notre protection sociale est réglé à l'aide de quelques mesures de rafistolage, relève d'une tromperie éhontée.
Le comble de l'hypocrisie comptable est atteint avec la reprise de la dette de l'assurance maladie par la caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, aux termes de l'article 76 de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.
Vous avez pris le parti de gommer artificiellement une partie du passif - pour une bagatelle comprise entre 35 milliards et 50 milliards d'euros - en prolongeant la durée de vie de la contribution au remboursement de la dette sociale, la CRDS. Cela signifie que vous avez opté pour un report des échecs actuels sur les générations futures.
Le Gouvernement illustre là sa bien étrange conception de la solidarité entre les générations.
Si les nouveaux-nés étaient appelés à voter, monsieur le secrétaire d'Etat (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.), je crois qu'ils ne porteraient pas leurs suffrages sur votre camp, car c'est un lourd fardeau que vous leur infligez là.
Pour ma part, je souhaite qu'ils fassent état de leurs récriminations à leurs parents. A charge pour ces derniers de manifester leur mécontentement par les moyens appropriés quand l'occasion leur en sera offerte !
En ce qui nous concerne, nous n'attendrons pas plus longtemps pour vous confirmer que nous ne voterons pas un texte qui non seulement manque de sincérité, mais encore - le rapporteur l'a dit, votre majorité l'a dit, et je l'ai lu dans un journal du soir - manque de rigueur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc. Monsieur le président, madame la ministre, madame, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous sommes chargés d'examiner aujourd'hui est le neuvième depuis l'instauration des lois de financement en 1996. Avec 365,5 milliards d'euros, il est aujourd'hui supérieur au budget de l'Etat ; il faut le rappeler car nos concitoyens ont tendance à l'oublier. C'est dire son importance ! Nul ne peut donc raisonnablement soutenir que notre pays n'assume pas le coût d'un système de santé, de retraite ou d'aide aux familles digne d'un grand Etat développé.
Quel est le contexte ?
Comme l'a rappelé tout à l'heure M. Philippe Douste-Blazy, ce projet de loi est très largement déterminé par trois réformes que le Gouvernement nous avait proposées et que nous avons très favorablement accueillies. Je fais naturellement référence à la loi portant réforme des retraites, que nous avons adoptée en 2003, ainsi qu'à la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées et à la loi relative à l'assurance maladie, que nous avons toutes deux adoptées au cours de la dernière session parlementaire.
Ce projet de loi s'intègre ainsi parfaitement dans le cadre de la refondation de notre politique de protection sociale que le Gouvernement a engagée avec beaucoup de détermination, mettant en évidence le fait que la lutte contre les gaspillages, par un changement des comportements, réduirait nos déficits et financerait les priorités sociales nouvelles.
Quelles sont les principales dispositions de ce texte ?
Après tant de réformes indispensables, ce projet de loi ne comporte certes pas de nouvelles mesures exceptionnelles, mais il comprend des mesures structurelles en faveur de la sauvegarde de notre système de santé. De surcroît, le texte qui nous est proposé n'est pas avare de mesures fortes, aussi bien en termes sociaux qu'en termes budgétaires.
Malgré tous ces efforts, l'ensemble des régimes devrait accuser un déficit prévisionnel de 10,5 milliards d'euros. Toutefois, les récentes réformes et le projet de financement de la sécurité sociale qui nous est soumis devraient contribuer à retrouver un équilibre moins précaire.
C'est dans ce contexte que le Gouvernement a décidé de fixer l'évolution de l'ONDAM à 3,2 % pour 2005, représentant un montant de 134,9 milliards d'euros. Cet objectif est particulièrement volontariste, et non pas seulement velléitaire comme certains le qualifient à tort.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Paul Blanc. Par ailleurs, le projet de loi garantit une base légale à l'assujettissement des institutions financières à la contribution sociale de solidarité des sociétés, redéfinit les missions de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, précise les modalités de mise en oeuvre de la tarification à l'activité, exonère du ticket modérateur les entretiens de santé des élèves de cinquième, crée une contribution sur les entreprises ayant exposé leurs salariés à l'amiante, majore la prime d'adoption, prévoit la mise en oeuvre de la réforme du régime de retraite des industries électriques et gazières, enfin, adapte le dispositif de départ à la retraite anticipée aux fonctionnaires des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière.
Nous le savons tous, les comptes de la sécurité sociale pour 2004 ne sont pas à la hauteur de nos espérances. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Néanmoins, le Gouvernement a choisi de ne pas redresser artificiellement les mauvais comptes de 2004 par des méthodes purement comptables, comme certains ont su le faire en d'autres temps.
M. Roland Muzeau. Des noms ! Des noms !
M. Paul Blanc. Suivez mon regard. (L'orateur se tourne vers la gauche de l'hémicycle.)
M. Roland Muzeau. Regardez plutôt à droite !
M. Paul Blanc. Selon les indications de la commission des comptes de la sécurité sociale, les comptes de 2005 devraient être meilleurs, en amélioration de 3,9 milliards d'euros.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Effectivement !
M. Paul Blanc. Cette évolution résulte notamment d'une augmentation de 5 % des recettes qui s'élèvent à 350,5 milliards d'euros.
Quelles sont ces recettes ?
Les principales dispositions relatives aux recettes qui nous sont présentées dans le projet de loi sont les suivantes : assujettissement des institutions financières à la contribution sociale de solidarité des sociétés, dite C3S ; fixation de la participation de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, aux régimes d'assurance maladie pour 2005 ; enfin, certification des comptes de la sécurité sociale.
S'agissant de la C3S, non seulement le projet de loi qui nous est soumis comble le vide juridique que la loi du 3 décembre 2002 avait créé en supprimant la contribution des institutions, dite CIF, sur les dépenses et charges engagées, mais il va plus loin : outre les établissements de crédit et les entreprises régies par le code des assurances, il inclut les mutuelles et les institutions de prévoyance. Cette mesure vient clore un vieux débat sur les distorsions de concurrence provoquées par la situation antérieure.
Néanmoins, en contrepartie, le projet de loi limite le champ de l'assiette applicable aux différents assujettis. En effet, il vient très logiquement retirer de la base imposable toutes les actions dites « vertueuses » de ces différentes structures. Indirectement, les établissements non mutualistes auparavant exemptés de C3S continueront à l'être pour la majeure partie de leurs activités. En contrepartie, les entreprises d'assurance sont incitées à respecter un certain nombre de règles de bonne conduite afin de bénéficier de tous ces avantages fiscaux. Cette restriction de l'assiette de la C3S conduit à une baisse de 9 millions d'euros de la C3S dont sont redevables les entreprises d'assurance et les établissements de crédit.
Finalement, les bénéficiaires sont les signataires des contrats de protection sociale et de prévoyance, et nous ne pouvons que nous en féliciter.
Par ailleurs, la loi a encadré pour l'année 2004 le schéma financier de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, et les charges qui lui sont attribuées. A compter de l'année 2005, la nature des dépenses afférentes à la section « personnes âgées » et à la section « personnes handicapées » de la caisse sera clairement définie. L'enjeu est de taille, vous en conviendrez, face au défi de la dépendance et au droit à la compensation que nous avons voté récemment. Seront ainsi distinguées avec clarté les responsabilités respectives de l'assurance maladie et de la CNSA. Cette disposition qui figure à l'article 3 du projet de loi doit permettre le versement par la CNSA d'une participation d'un montant d'environ 480 millions d'euros dès 2005.
L'affectation ainsi programmée pour 2005 des recettes aux sections « personnes âgées » et « personnes handicapées » est en parfaite cohérence avec la définition de l'architecture de la CNSA, telle que nous l'avons votée dans le projet de loi sur le handicap.
Enfin, nous ne pouvons que nous féliciter d'avoir à discuter l'article 34, qui vise à mettre en oeuvre une véritable certification des comptes de la sécurité sociale au niveau tant local que national. Il s'agit en effet de créer une obligation légale pour les caisses nationales de vérifier et de valider les comptes des organismes locaux. Il s'agit également de créer une obligation à la charge des organismes nationaux de transmettre leurs comptes annuels au ministère concerné et à la Cour des comptes. A cet égard, un amendement proposé par la commission vient compléter utilement cette disposition.
Pour 2005, l'analyse des ressources par la commission des comptes de la sécurité sociale montre que nous pouvons et devons être optimistes quant aux résultats escomptés pour les comptes de la sécurité sociale. L'équilibre de ceux-ci sera bien évidemment lié à la maîtrise des dépenses.
J'en viens donc aux dépenses.
Si la branche famille et la branche accidents du travail ne présentent que peu de difficultés à court terme, il n'en est pas de même pour la branche vieillesse et la branche de l'assurance maladie.
Cette année, les comptes de l'assurance vieillesse doivent être examinés à travers le prisme de la soulte d'EDF et de GDF qui lui est versée en contrepartie de l'adossement de leur régime de base de retraite sur le régime général, point qui a été largement exposé par notre collègue Dominique Leclerc. Toutefois, le choc démographique n'est plus très éloigné et les prochaines années seront de plus en plus difficiles malgré la courageuse réforme des retraites adoptée il y a dix-huit mois, qui ne donnera son plein effet que progressivement.
En outre, je suis très préoccupé par la situation financière du Fonds de solidarité vieillesse. En effet, cette année, ce fonds est encore déficitaire de plus de 2 milliards d'euros. Or ses missions sont essentielles pour l'équilibre de notre protection sociale. Celui-ci devrait être garanti par l'Etat. Nous connaissons l'état des finances de la France, qui ne permet pas actuellement une telle prise en charge. Pour autant, nous ne ferons pas l'économie, tôt ou tard, d'une réflexion sur son financement, et notamment sur la réaffectation des droits sur les alcools à laquelle ce fonds pourrait prétendre.
S'agissant des dépenses de l'assurance maladie, dont la croissance est moins facile à appréhender que celle de la branche vieillesse, le projet de loi traduit les aménagements législatifs nécessaires à l'application de la réforme adoptée cet été. Cette réforme, n'en déplaise à ses détracteurs, permettra de soigner mieux en dépensant mieux.
M. Paul Blanc. Les chiffres diffusés en cette fin d'année par la Caisse nationale d'assurance maladie sont encourageants. Ainsi, la consommation des médicaments génériques représente désormais plus de 12 % du volume des ventes. La consommation d'antibiotiques, grâce à la campagne engagée ces deux dernières années, a diminué de 16 % en deux ans. Les indemnités journalières croissent bien moins vite que les années précédentes.
C'est donc bien l'illustration d'une prise de conscience, d'un changement des comportements. Dans ce cadre, grâce aux décrets qui ont été publiés et à ceux qui paraîtront prochainement, les effets de la réforme de l'assurance maladie devraient se faire sentir dès 2005. Je ne souhaite pas anticiper sur le débat de demain, mais je tiens à souligner que l'avenir de notre système d'assurance maladie dépend de la réussite de la réforme, et je voudrais que chacun ici soit bien conscient de cet état de fait.
Je vois d'autres signes positifs dans le retour autour de la table du conseil d'administration de la CNAM de tous les partenaires sociaux. Cela devrait, je l'espère, permettre une reprise et, surtout, la conclusion des négociations conventionnelles avec les différents professionnels de santé.
Enfin, je souhaite aborder le volet familial avec une attention toute particulière.
Comme l'a rappelé notre collègue André Lardeux, la branche famille est aujourd'hui appelée à répondre à de nouveaux défis, ceux de la jeunesse, de la démographie et des famille fragiles. Ces défis sont d'autant plus difficiles à relever qu'il y va de l'avenir de notre société.
Alors que la Conférence de la famille en 2004 a été consacrée à l'adolescence, Mme Marie-Josée Roig a choisi de travailler en 2005 sur les questions de démographie et des familles défavorisées. Je ne peux que la remercier de lancer ce chantier encore trop souvent ignoré, en attendant de la Conférence qu'elle permette au Gouvernement de poursuivre une politique familiale toujours plus universelle.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Bravo !
M. Paul Blanc. A l'aube de cette vaste entreprise, je tiens à revenir sur l'enjeu fondamental que représente la réussite d'une politique familiale centrée sur la jeunesse. Jusqu'à l'année dernière les politiques familiales successives s'étaient peu penchées sur les besoins spécifiques à cet âge. Pourtant, cet âge charnière est une période décisive pour le développement de l'être humain, entre l'enfance, pour laquelle le Gouvernement a récemment entrepris de courageuses réformes, et l'âge adulte, qui constitue le centre d'intérêt majeur de nos discussions.
C'est pourquoi je souhaite tout particulièrement faire remarquer le travail considérable qui a été effectué par les groupes de travail de la Conférence de la famille de 2004. En effet, douze mesures ont été proposées et approuvées lors de la Conférence de la famille en 2004. Elles suivent toutes la même ligne directrice, articulée autour des valeurs de liberté, d'autonomie et de responsabilité. Ces mesures apportent enfin des réponses adaptées, de manière que « l'adolescence soit une période exaltante : celle de tous les enthousiasmes, de toutes les utopies et de toutes les générosités », comme l'a rappelé Mme Roig.
C'est donc avec beaucoup d'enthousiasme que j'attends une mise en oeuvre rapide de ces propositions, d'autant qu'elles ne devraient avoir que des conséquences financières limitées.
Pour terminer, je voudrais souligner l'importance de l'examen des lois de financement de la sécurité sociale, qui permet au Parlement, et tout particulièrement à notre commission des affaires sociales et à nos rapporteurs, d'examiner au fond les comptes de la sécurité sociale.
Les conditions de ce débat peuvent être améliorées, ainsi que M Alain Vasselle l'a proposé. Je remercie M. le ministre de bien vouloir y accorder la plus grande attention, dans la perspective de l'examen de la loi organique par le Parlement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, le projet de loi de financement de la sécurité sociale a le mérite d'être bref : il ne comprend que trente-cinq articles, auxquels il faut ajouter un rapport annexé, et ne fait que mettre en oeuvre ou rappeler les dispositions déjà votées par le Parlement en 2003 pour les retraites et en 2004 pour l'assurance maladie ou la santé publique.
Ce texte confirme les orientations structurelles, mais ne nous apporte pas, il est vrai, de solutions nouvelles. Face à un déficit de 14 milliards d'euros du régime général, votre projet de loi, monsieur le ministre, ne fait qu'enrayer de manière insuffisante - vous l'avez vous-même souligné tout à l'heure - une dérive dangereuse.
Soyons honnêtes et parlons franc... même s'il ne s'agit que d'euros. (Sourires.) Nous vous reconnaissons, monsieur le ministre, l'immense mérite de ne pas avoir mené la politique de l'autruche, comme avait pu le faire la précédente majorité.
M. François Autain. Et M. Mattei, qu'a-t-il fait ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Vous avez posé de vraies questions et suggéré des voies de réforme pour y répondre.
M. Guy Fischer. Vous allez voir quand je vais intervenir !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous ne nous faites pas peur ! (Sourires.)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Mais reconnaissons, comme chacun s'accorde à le penser, qu'une partie seulement du chemin est derrière nous. A ce titre, le cas de la branche maladie, qui totalise plus des neuf dixièmes du déficit total de la sécurité sociale, est emblématique. La réforme du 13 août dernier ne portait que sur 45 % des dépenses. Elle ne traitait que de l'ambulatoire et du médicament sans s'attaquer à l'ensemble du système hospitalier.
L'impression dominante est que l'on ne maîtrise pas intellectuellement le système. D'ailleurs, comment résoudre un déficit permanent lorsque l'on se prive d'intervenir sur 55 % des dépenses ?
Pourtant, dans le domaine hospitalier, des économies sont possibles. Pour ne prendre qu'un exemple, je citerai la mise en place dans mon département d'un numéro 15 bis avec des médecins libéraux qui a sensiblement désengorgé les urgences. Il est aussi indispensable de rationaliser la gestion et les projets médicaux hospitaliers.
Enfin, il est urgent de revoir la gouvernance des hôpitaux publics. Le pouvoir de décision ne devrait-il pas être mieux partagé entre les médecins et les agents administratifs dans le cadre d'un directoire à l'autonomie accrue ? L'assurance maladie ne devrait-elle pas exercer un pouvoir de contrôle plus incisif ?
Ma collègue Valérie Létard développera ces différents points demain, lors du débat consacré à la santé. Elle traitera aussi du report des charges des hôpitaux insuffisamment pris en compte dans votre projet, ainsi que de la disparition de l'allégement des charges pour les établissements sanitaires privés instauré lors du passage aux 35 heures.
Un autre problème n'est pas traité : celui de la démographie médicale. Je ne pense pas un instant que vous pensiez l'utiliser pour résoudre le déficit de l'assurance maladie : moins de médecins, moins de soins, moins de dépenses. Alors comment comptez-vous faire, monsieur le ministre, face à ce problème ?
Lors de l'examen de la réforme de l'assurance maladie, le Sénat avait adopté, sur l'initiative du groupe de l'Union centriste, un amendement tendant à moduler la rémunération des médecins qui s'installeraient dans des déserts médicaux. Où en est la mise en oeuvre de ce premier jalon d'une politique destinée à rééquilibrer l'offre de soins ?
Continuons à parler franc, monsieur le ministre. Vous savez très bien que les lois sur les retraites et la santé ne permettront pas de faire face aux besoins de financement à venir, d'autant que les chiffres annoncés à la représentation nationale sont très largement sous-estimés ou... surestimés.
Prenons l'exemple de l'ONDAM que vous nous proposez de voter. Un affichage à 3,2 % est irréaliste, tout le monde en convient. Avec un point de plus, nous serions certainement plus proches de la réalité. Une telle sous-estimation alimente la technique du « rebasage » et fait perdre au vote du Parlement et au projet gouvernemental toute leur crédibilité. C'est justement ce qu'il faut éviter. Face à une situation aussi difficile, nous pensons que notre système de protection sociale a un besoin urgent, d'une part, de transparence et, d'autre part, de refonte de son financement.
La transparence, question majeure, est directement liée à la nécessaire réforme du cadre organique du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il faut réformer les ordonnances de 1996. Nous nous félicitons que le Gouvernement ait pris l'engagement de le faire. La mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances pour le budget de l'Etat était une occasion à saisir.
Il faut aussi exploiter les synergies qui peuvent naître entre les deux textes pour transposer aux lois de financement de la sécurité sociale le principe de sincérité budgétaire ou, dans le même ordre d'idée, pour instaurer de vrais budgets annexes de la sécurité sociale et shunter toute tentative de débudgétisation de dépenses sociales.
Il nous faut aussi traduire le principe d'équilibre. Il est anormal que le Parlement ne se prononce pas explicitement sur le montant de la subvention d'équilibre qu'il est prêt à assumer.
Telles sont les grandes lignes qui, à notre avis, devront présider à la réforme à venir.
Quoi qu'il en soit, au-delà du cadre juridique, le mode de financement de la sécurité sociale ne nous semble plus adapté au monde actuel.
Alors que la logique de notre protection sociale est une logique de solidarité, celle-ci est toujours financée sur la base de principes assuranciels. En d'autres termes, nous ne voyons pas pourquoi la sécurité sociale continue d'être principalement financée par des cotisations assises sur le travail.
Ce système est d'autant plus regrettable qu'il conduit à des effets récessifs. Le conserver n'est-il pas anti-économique dans un univers de plus en plus concurrentiel ? Aussi le débat portant sur le projet de loi est-il directement lié à la discussion que nous avons eu la semaine dernière ici même sur l'évolution des prélèvements obligatoires.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Il est temps de réfléchir à un déplacement - qui peut être progressif - de la charge sociale de la production vers la consommation.
Tout cela mérite une réflexion approfondie que nous regrettons, pour notre part, de ne pas trouver dans le rapport annexé. Nous nous félicitons néanmoins que M. le ministre de l'économie et des finances se soit engagé ici même, lors du débat relatif à l'évolution des prélèvements obligatoires, à ouvrir sans délai le chantier de la TVA sociale.
Puisqu'il n'est question, pour l'heure, que de nous prononcer sur les aménagements qui nous sont proposés dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, attelons-nous à cette tâche dans un esprit constructif.
Le groupe de l'Union centriste considère le texte qui nous est soumis comme porteur de certaines mesures intéressantes : c'est le cas, par exemple, du doublement de la prime d'adoption.
Au demeurant, ce projet de loi est, à plusieurs égards, perfectible. Aussi présenterons-nous au cours de son examen un certain nombre d'amendements tendant à lutter contre la désertification médicale, à créer une caisse spécifique pour les accidents du travail et les maladies professionnelles ou encore à améliorer la situation des agriculteurs en termes de protection sociale.
Nous insisterons aussi sur la nécessité d'introduire plus d'équité dans le dispositif des pensions de réversion. C'est une question qui nous tient à coeur. Vous y accordez également, monsieur le ministre, une certaine importance ; vous y avez même déjà apporté une réponse par avance.
De même profiterons-nous de l'examen de ce projet de loi pour réclamer le rétablissement de l'aide personnalisée au logement pour les sommes comprises entre 15 et 24 euros, aide qui a été supprimée par un décret publié en mai dernier.
Nous avons également repris un amendement présenté par la commission qui nous semble très important. Il s'agit du contrôle des médecins hospitaliers, dont nous ne contestons pas l'excellence, mais qui n'ont pas moins de responsabilités et de devoirs que les médecins libéraux.
Enfin, vous me permettrez, monsieur le ministre, de conclure mon intervention par une interrogation. Depuis la création de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, qui n'est censée couvrir que l'aide à domicile des personnes dépendantes, les crédits d'action sociale accordés par les caisses de retraite aux personnes non dépendantes au titre de l'aide à domicile ou de l'aide ménagère ne cessent de diminuer. Quelle est l'opinion du Gouvernement sur cette évolution de la politique des caisses ? Est-il prévu d'y remédier ?
Sur ces différents points, nous espérons être entendus et obtenir des réponses. A défaut, le scepticisme que nous inspire certaines dispositions de votre projet de loi pourrait prendre le pas sur la reconnaissance du caractère louable de vos intentions. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 ne comporte rien d'original par rapport aux précédents. Oscillant entre étatisation et privatisation rampante de notre système de protection sociale, il constitue une étape supplémentaire dans la réduction drastique des ressources de la sécurité sociale et la culpabilisation des assurés.
Chacun sait que les besoins non satisfaits en matière de prise en charge des assurés sont immenses. L'inégalité d'accès aux soins s'aggrave, au détriment des plus démunis, qui sont les plus touchés. Cette situation est préoccupante et mérite d'être évoquée.
Au lieu de rechercher des réponses innovantes, des propositions de financements qui permettraient de donner de nouveaux moyens à notre sécurité sociale - sur ce point, nous divergeons totalement de l'orateur qui m'a précédé -, des réformes qui permettraient d'améliorer la prise en charge des dépenses de santé, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, dont vous êtes l'initiateur, monsieur le ministre, vise à faire des économies sur le dos du plus grand nombre, c'est-à-dire des assurés.
Ce projet vise en effet à faire payer toujours plus les assurés sociaux par une augmentation de la contribution sociale généralisée, la CSG, de la contribution au remboursement de la dette sociale, la CRDS, et des taxes en tout genre, et non à prendre l'argent où il est, là où se créent les richesses, fondement même du financement historique de la sécurité sociale.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Ah bon ? Il y a des réserves cachées quelque part ?
M. Guy Fischer. Eh oui, les profits ont explosé, notamment pour un certain nombre de grandes entreprises industrielles et d'importants groupes bancaires. La réalité n'est pas du tout celle que vous dites.
A contrario, vous vous êtes obstinés à rejeter toutes les propositions de financement, préférant multiplier les mesures de restriction, de sanction, de pénalisation et de contrôle à l'encontre des assurés sociaux comme des professionnels de santé.
Une telle attitude obstinée nous autorise à mettre en doute le bien-fondé de votre démarche comme votre attachement aux principes de notre protection sociale. En effet, non seulement les besoins actuels ne sont pas couverts, mais maintenant vous vous appliquez à faire des économies sur ceux qui le sont.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous faisons des économies sur des dépenses injustifiées. Ce n'est pas la même chose !
M. Guy Fischer. Evoquons brièvement la situation de la sécurité sociale depuis votre arrivée au Gouvernement.
Le régime de sécurité sociale connaissait un déficit de 3,4 milliards d'euros en 2002 ; il est de plus de 14 milliards d'euros cette année. Pour la branche maladie, vous avez pris le pouvoir avec un déficit de 6,1 milliards d'euros ; il est passé à 13,2 milliards d'euros cette année.
M. Alain Vasselle, rapporteur. C'est l'héritage ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Non, ce n'est pas l'héritage ! C'est la mauvaise gestion !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Pas du tout ! Ce sont les 35 heures !
M. Guy Fischer. Depuis votre arrivée, le déficit du régime général a quasiment quintuplé et celui de la branche maladie a doublé.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Grâce aux trente-cinq heures !
M. Guy Fischer. Mais vous ne pourrez pas toujours invoquer cet argument. C'est fini !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous les payons encore.
M. Guy Fischer. Ce sinistre record s'explique par votre entêtement à refuser de réformer l'assiette des cotisations visant à augmenter les recettes de la sécurité sociale. Alors, bien entendu, il s'agit de faire payer toujours les mêmes !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Et la C3S ?
M. Guy Fischer. Vous savez bien que c'est une simple égratignure.
Alors, que faut-il retenir du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 ?
Ce projet de loi poursuit les orientations engagées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004. Il met en oeuvre les différentes ordonnances : celles qui découlent du plan « hôpital 2007 », de la réforme de l'assurance maladie, de la privatisation d'EDF-GDF, pour ce qui est des retraites des électriciens et gaziers du pays. Ce projet de loi peaufine le travail des différentes lois relatives à l'organisation et aux prestations de sécurité sociale, en s'efforçant de réduire la part des ressources qui pourraient leur être consacrées.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale reste dans la stratégie énoncée lors de la réforme de l'assurance maladie : l'équilibre viendra du changement des comportements des assurés sociaux et d'une accentuation de la maîtrise des dépenses.
M. le ministre évoque la maîtrise médicalisée. Mais, de toute évidence, personne n'est dupe : il s'agit de la maîtrise comptable. Les conséquences de ce choix sont évidemment lourdes pour les assurés sociaux, qui vont découvrir mois après mois quelles seront les conséquences des lois qui ont été votées et auxquelles, fort justement, nous nous sommes opposés. Bien entendu, les conséquences de ce choix sont lourdes pour les assurés sociaux, qui vont voir s'élargir à nouveau les économies réalisées sur les prestations.
A titre d'exemple, je citerai d'abord les économies sur les affections de longue durée. Il y a une volonté de culpabiliser les personnes âgées mais aussi les médecins, qui auraient ouvert les vannes. En fait, c'est au détriment des personnes âgées que vous ferez ces 800 millions d'euros d'économie.
L'économie sur les arrêts de travail et les diminutions des indemnités journalières s'élève au total à 300 millions d'euros. On prétend qu'il y aurait des abus. Mais ces abus sont marginaux, monsieur Vasselle.
M. Alain Vasselle, rapporteur Vous reconnaissez qu'il y en a !
M. Guy Fischer. Vous, monsieur le rapporteur, vous stigmatisez la plupart des français !
M. Alain Vasselle., rapporteur. Vous noircissez le tableau à des fins politiciennes.
M. Guy Fischer. François Autain reviendra demain sur le problème de l'hôpital. Mais, je tiens à dire d'ores et déjà que 850 millions d'économies sont annoncées, auxquelles s'ajoutent des déficits de trésorerie de 850 millions.
Au lieu de discuter avec les directeurs des établissements, avec les professeurs qui s'insurgent contre certaines mesures, avec les personnels, vous imposez une marche forcée.
M. Alain Vasselle. Quelle caricature !
M. Guy Fischer. Non ce n'est pas de la caricature. Jamais autant d'établissements de soins n'ont été fermés, jamais autant de lits n'ont été supprimés que durant les cinq dernières années. Cela pose un réel problème pour l'accès aux soins.
M. François Autain. Absolument !
M. Nicolas About., président de la commission des affaires sociales. Elisabeth Guigou avait commencé.
M. Guy Fischer. Alors que la dette de la sécurité sociale avoisine 33 milliards d'euros, calée à 50 milliards d'euros si l'on englobe les années 2005 et 2006, les dispositions diverses de trésoreries s'inscrivent dans ce schéma. Elles se bornent à un renforcement de la répression - glissement de compétence, en matière de recouvrement, de l'ACOSS vers les URSAFF - et à une intransigeance dans les contentieux. A quoi il faut ajouter un renforcement des pouvoirs de contrôle sur les assurés sociaux bénéficiant de prestations dans les établissements de santé, au moyen d'une redéfinition pratique du rôle des caisses nationales de sécurité sociale, telle que l'a envisagé le projet de loi de réforme de l'assurance maladie.
L'assistance publique des hôpitaux de Paris vient d'annoncer de son côté la suppression de 4000 postes. De toute part, prévalent des réductions considérables d'emplois, à l'image de ce qui se passe dans les différents services publics.
Concernant l'hôpital plus particulièrement, au delà de l'étranglement financier des établissements auquel vous ne répondez pas, vous programmez la poursuite du plan « hôpital 2007 », ce qui amplifiera de toute évidence ses difficultés.
Vous proposez la mise en oeuvre de la tarification à l'activité dans les établissements de santé publics et privés malgré l'opposition de plus en plus ouverte des personnels hospitaliers, médicaux ou administratifs et en dépit des mises en doute explicites des responsables des pôles hospitaliers quant à l'efficacité du dispositif. Mais vous préférez ne pas les entendre.
Ce plan a des conséquences multiples et néfastes. Il entraîne la suppression de 20% à 30% des plateaux techniques et favorise la recherche de pratiques au détriment de la prise en charge globale du malade. Il met en place des pôles de compétence en quête de rentabilité et ouvre la voie vers un déséquilibre dans la couverture nationale en établissements de santé, accentuant ainsi la désertification et les inégalités régionales. Et les aberrations ne manquent pas, comme celle qu'a rapportée Louis Souvet.
Sourds aux témoignages inquiets des professionnels attachés au service public hospitalier et malgré les expériences fâcheuses de certains pays voisins, vous persévérez dans l'engrenage qui entraînera la fin des spécificités de nos établissements. Je pense particulièrement aux missions de service public de l'hôpital proposant un accueil et des soins de qualité pour tous, mais aussi à la recherche et à la formation de jeunes médecins et personnels soignants.
Dans cette politique de limitation autoritaire des dépenses de santé, vous avez volontairement fixé un objectif national des dépenses d'assurances maladie trop faible qui sera sans aucun doute dépassé puisqu'il ne tient pas compte de la réalité.
En effet, le projet de loi de financement de la sécurité sociale fixe à 134,9 milliards d'euros l'objectif national des dépenses d'assurance maladie pour 2005, soit une progression de 3,2% par rapport à 2004.
La conséquence de cette politique financière est évidente : aucune recette nouvelle n'est envisagée sérieusement. Mais cela n'empêche pas le Gouvernement d'escompter 20 milliards de recettes supplémentaires pour 2005. A l'évidence, ce sont les assurés sociaux qui en paieront les conséquences.
Concernant la branche famille, vous poursuivez votre politique d'individualisation de la prise en charge de la petite enfance.
Le doublement de la prime à la naissance pour les familles adoptantes répond très certainement à une attente. Mais le considérer comme un élément d'une politique en faveur des familles est pour le moins démagogique si on en juge par son impact quantitatif.
En revanche, il convient de souligner que, cette année encore, vous n'envisagez rien de significatif pour la prise en charge collective de la petite enfance, alors que ce secteur manque de moyens de fonctionnement suffisants au regard du nombre de demandes des familles.
Quant à la branche vieillesse, vous tirez très logiquement les conséquences catastrophiques de la réforme des retraites et de la privatisation annoncée des entreprises publiques. Vous financiarisez, par l'intermédiaire du fonds de réserve des retraites, la soulte que EDF et GDF doivent verser à la CNAV pour les retraites futures. Vous soumettez ainsi les comptes de la CNAV à un jeu boursier que l'on sait très dangereux.
Vous n'ignorez pourtant pas que la CNAV a rendu un avis négatif et a voté à l'unanimité une motion concernant la soulte du régime de retraites des industries électriques et gazières.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ils ont obtenu ce qu'ils réclamaient.
M. Guy Fischer. Par ailleurs, votre projet organise un départ en retraite anticipé pour les carrières longues des fonctionnaires des collectivités locales dans des conditions inacceptables, sans même prévoir leur remplacement.
M. Guy Fischer. L'objectif visé à long terme est bien la suppression de 300 000 fonctionnaires ; n'ayons pas peur de le dire. Pour répondre à vos ambitions de réduction du déficit public, vous prenez ainsi le risque énorme de déséquilibrer et de paralyser le fonctionnement des administrations locales.
Vous ne craignez pas de tenir deux langages : vous manifestez à la campagne contre la suppression des services publics et vous votez ici les lois qui suppriment ces services publics.
En définitive, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est la concrétisation d'un objectif de remise en cause de notre système solidaire de sécurité sociale. Il s'inscrit d'ailleurs dans un plan plus vaste de démantèlement de l'ordre public national.
Atomisation du code du travail, privatisation des services publics, destruction des fondements solidaires de notre système de protection sociale - retraites, santé, assurance chômage : depuis votre prise de pouvoir, vous n'avez fait que dynamiter l'ordre social public,...
Mme Christiane Hummel. Dynamiser ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. ...au nom d'une libéralisation outrancière visant à introduire la flexibilité et la régulation marchande dans tous les pans de l'organisation sociale. Notre système de retraite par répartition mérite de vivre ; nous le défendrons.
Vous vous apprêtez à faire la même chose avec notre système de sécurité sociale. Vous êtes sur le point de le soumettre, sans le dire, à la voie assurancielle ; cela mérite discussion.
En fait, en opposition à l'intérêt général, pour répondre aux ambitions des grands groupes d'assurance qui attendent, vous avez installé, sous la férule de l'Etat, les conditions d'une privatisation de cette couverture socialisée de santé.
Je ne vois rien d'étonnant à cela, puisque votre ambition est de liquider un à un les services publics en les privatisant et en substituant à l'intérêt général les intérêts privés des marchés financiers.
Ne comptez pas sur nous pour soutenir cette véritable marche forcée vers la déréglementation sociale, au mépris des besoins économiques et sociaux de nos concitoyens.
Vous l'avez compris, mes chers collègues, nous voterons évidemment contre ce projet de loi. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après le tableau apocalyptique tracé par M. Fischer,...
M. Guy Fischer. C'est la réalité !
M. Gilbert Barbier. ...je vais essayer de considérer les choses un peu plus concrètement.
Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale intervient au terme d'une année marquée par une nouvelle dégradation de l'ensemble des comptes sociaux. Le solde du régime général devrait atteindre sont point le plus bas, avec un déficit de près de 14 milliards d'euros.
Ce déficit, dont l'essentiel résulte de la situation de la branche maladie, est certes dû en partie à la faiblesse de la croissance au cours de ces dernières années, mais aussi et surtout à l'irrésistible ascension des dépenses remboursables.
Dans ce contexte, la question se pose d'une éventuelle modification du mode de financement afin de donner une assise moins cyclique, plus dynamique aux recettes de la sécurité sociale.
De ce point de vue, le débat sur la réforme des cotisations sociales patronales, en particulier la prise en compte de la notion de valeur ajoutée, s'il n'est pas dépourvu d'intérêt intellectuel, ne semble toutefois pas répondre aux véritables besoins.
Quoi qu'il en soit, dans l'attente d'une assiette miracle, il paraît préférable de s'attacher à maîtriser les dépenses remboursables plutôt qu'à ajuster les recettes à celles-ci, car, comme l'a dit avec raison notre rapporteur Alain Vasselle, les arbres ne peuvent monter jusqu'au ciel ! Le poids des prélèvements sociaux est déjà lourd : il ne pourra s'accroître indéfiniment sans pénaliser la croissance et l'emploi.
La réforme de l'assurance maladie, engagée par le Gouvernement, se caractérise justement par le refus d'un simple redressement financier.
Le volet recettes y est secondaire, puisqu'il ne représente qu'un tiers des sommes concernées. L'essentiel de l'ajustement passe par des réformes de structures et des changements de comportement.
Près de 10 milliards d'euros d'économies sont attendus, d'ici à 2007 du médecin référant, du dossier médical personnalisé, du renforcement du contrôle des indemnités journalières, du développement des médicaments génériques ou encore de la modernisation de l'hôpital.
Ce refus d'un ajustement brutal par la baisse des prestations ou par la hausse des prélèvements se retrouve aussi dans la réforme des retraites qui a été engagée en 2003.
Le choix du Gouvernement a été celui d'un allongement graduel de la durée de cotisations tout en préservant une liberté de choix quant à l'âge de départ à la retraite.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 intègre les conséquences financières de ces deux réformes ainsi que celles de la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
Cette loi, à l'instar de la réforme des retraites, doit se traduire par des dépenses supplémentaires. En revanche, il est prévu de réduire le déficit de la branche maladie de 13,2 milliards à 8 milliards d'euros dès cette année.
Il est vrai que, même en l'absence d'efforts des acteurs de la santé, l'assurance maladie devrait bénéficier des effets mécaniques de la réforme ; je pense notamment aux recettes nouvelles procurées par l'élargissement de l'assiette et la hausse du taux de la CSG, ainsi que par l'augmentation du forfait hospitalier.
S'agissant des mesures d'économies, je serai peut-être un peu moins optimiste que le Gouvernement. En effet, ce dernier compte sur 1 milliard d'euros d'économies de la maîtrise médicalisée. Or les outils seront-ils tous en place en 2005 ?
M. Gilbert Barbier. Par ailleurs, le lancement du dossier médical personnalisé, qui me paraît être l'outil le plus efficace, nécessitera du temps et une forte implication des professionnels.
La contribution forfaitaire d'un euro par acte médical à la charge du patient doit entraîner 600 millions d'euros d'économies. Les caisses seront-elles techniquement en mesure de la prélever dès le 1er janvier ? (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'assentiment.)
S'agissant des médicaments, l'économie attendue est de 700 millions d'euros. Or, s'il est vrai que de nombreux médicaments deviennent « généricables », il est non moins vrai que nous sommes en attente de nouvelles molécules qui risquent d'être très onéreuses.
Par ailleurs, vous avez fixé l'augmentation de l'ONDAM pour 2005 à 3,2% par rapport à 2004. Il s'agit là d'un objectif assez volontariste, mais il est nécessaire que vous affichiez votre détermination sous peine de décrédibiliser votre action.
Cet objectif intègre-t-il le coût de certaines mesures annoncées telles que la mise en oeuvre de la classification commune des actes médicaux, la CCAM, technique, la revalorisation des astreintes médicales et chirurgicales, celle des praticiens hospitaliers ou l'augmentation du KCC chirurgical ?
Comme vous le savez, l'ONDAM prévu pour 2004 n'a pas été plus respecté que les précédents.
Sans éprouver quelque nostalgie que ce soit pour la maîtrise comptable, on peut affirmer qu'un objectif de dépenses dont le dépassement n'entraîne aucune conséquence semble bien difficile à faire respecter.
La réforme du 13 août a prévu que, en cas de dépassement de l'ONDAM de plus de 0,75%, un comité d'alerte en informe le Gouvernement et le Parlement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Gilbert Barbier. Or quelles mesures pourra-t-on prendre, sinon une hausse des cotisations ?
Une modification des lois de financement de la sécurité sociale paraît indispensable et urgente ; vous en avez d'ailleurs exprimé le voeu, monsieur le secrétaire d'Etat. Cette modification doit répondre à un triple objectif : promouvoir un débat politique portant sur les orientations mises en oeuvre, permettre une perception claire des comptes, présenter une vision prospective des actions et de l'équilibre de la sécurité sociale.
Il y aurait évidemment bien d'autres choses à dire, notamment sur l'hôpital, mais nous en parlerons plus longuement demain, lors du débat consacré exclusivement à l'assurance maladie, dont la réforme, qui a commencé à se mettre en place, mérite d'être confortée.
M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2005 est bien décevant, notamment en ce qui concerne les familles : pas la moindre ambition pour la politique familiale ; aucune évolution positive ; aucune mesure phare, excepté le doublement de la prime d'adoption ; pas de mesures spécifiques pour les familles en difficulté, en situation de précarité.
Bien au contraire, les aides au logement, destinées à prévenir la pauvreté et l'exclusion, et dont l'importance est prépondérante pour les familles en situation difficile, se trouvent modifiées, risquant de ce fait de fragiliser encore plus ces familles.
La question primordiale de l'adolescence est laissée de côté, alors que la France compte aujourd'hui 5 400 000 jeunes âgés de onze à dix-sept ans. A cet égard, nous nous souvenons tous que les Conférences de la famille de 2002 et 2004 avaient affiché, dans ce domaine, des objectifs ambitieux.
Que sont-ils devenus ?
Pour la première fois depuis 1998, l'année 2004 devrait être celle du déficit de la branche famille, résultat de la dégradation sans précédent des comptes et du laxisme du Gouvernement en matière de politique économique.
Nous veillerons à ce que le budget de l'action sociale ne pâtisse pas de ce déficit ; nous veillerons à ce que, sous couvert de mesures dites « techniques », de nombreuses familles ne soient pas exclues de l'accès aux prestations.
Car c'est bien ce déficit, pourtant annoncé dès 2003, qui explique la pauvreté des mesures en direction des familles que vous nous avez proposées depuis. C'est bien ce déficit cumulé qui a conduit le Gouvernement à faire des économies au détriment de la politique familiale.
En effet, aujourd'hui, nous pouvons observer que ce projet contient nombre de mesures d'économie qui pénalisent fortement les familles modestes.
Au demeurant, cette politique restrictive n'est pas nouvelle. Dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, nous observions les méfaits de la PAJE, la prestation d'accueil du jeune enfant, que nous dénoncions ici même il y a pratiquement un an jour pour jour.
Cette PAJE, qui était présentée par le Gouvernement comme un grand progrès, a en réalité durci les conditions requises pour bénéficier de l'allocation du libre choix d'activité.
Dorénavant, pour pouvoir en bénéficier, les mères de trois enfants et plus doivent avoir travaillé deux ans dans les cinq ans qui précèdent chacune des naissances, alors qu'il leur suffisait auparavant d'avoir travaillé deux ans dans les dix ans qui précédaient la troisième naissance.
Où est le progrès ? Nous voyons plutôt une régression !
Un bilan du dispositif PAJE devait être dressé en septembre 2004, ce qui n'a pas été fait. Nous attendons toujours cette étude ; nous y porterons une particulière attention.
De plus, en 2004, la réforme de la prestation d'accueil du jeune enfant a failli remettre en cause gravement l'API, l'allocation de parent isolé. En effet, l'instauration, depuis le `1er janvier 2004, de la PAJE lésait les mères isolées les plus pauvres touchant l'API. L'allocation allouée aux mères avec un enfant né après le 1er janvier 2004 aurait, en effet, pu être diminuée de 1 300 euros par rapport à celle dont bénéficiaient les mères avec un enfant né avant cette date. Ce sont ainsi 400 000 jeunes mères qui auraient été lourdement pénalisées et 50 millions d'euros économisés !
On peut se demander si, sous couvert de réformer l'accueil du jeune enfant, le Gouvernement n'a pas voulu, là encore, faire des économies au détriment des mères isolées.
On ne voit encore que restrictions et économies en matière d'aides au logement.
Ce sont 75 000 familles qui seront exclues des aides au logement dès lors que les aides de faible montant ne seront plus versées, le minimum passant de 15 euros à 24 euros.
C'est ainsi qu'une famille de deux enfants vivant avec un salaire mensuel net de 1 900 euros ne bénéficiera désormais plus de cette aide.
La raison en serait les coûts de gestion ! Permettez-nous de nous interroger !
En effet, n'aurait-il pas été possible de diminuer ces coûts de gestion en effectuant un seul versement annuel ? M. Lardeux, alors rapporteur de la commission des affaires sociales, avait en son temps fait cette suggestion.
Non, il s'agit bien d'économies, effectuées, cette fois, au détriment des familles des classes moyennes.
Il en va de même pour la revalorisation des plafonds de ressources.
C'est ainsi que, aux termes de deux décrets signés au coeur de l'été, le 15 juillet dernier, les frais de garde des enfants ne seront plus déductibles des ressources pour bénéficier des prestations familiales.
Jusqu'à présent, les familles qui faisaient garder leurs enfants de moins de sept ans pouvaient déduire de leurs revenus 762 euros. Depuis juillet, c'est terminé !
Ainsi, 100 000 familles sont directement touchées par cette mesure, qui permet au Gouvernement de réaliser 40 millions d'euros d'économies !
Ces revalorisations toucheront aussi les 6 000 familles des classes moyennes qui se situaient à la limite du droit à l'allocation de rentrée scolaire ou à l'allocation pour jeune enfant et qui vont perdre, dans le premier cas, 257 euros par enfant et, dans le second cas, 161 euros par mois.
Economies encore : les droits des chômeurs ne seront réexaminés que deux mois après la perte de leur emploi. Cette mesure concernera 80 000 familles et permettra au Gouvernement de « gagner » 20 millions d'euros !
Quant aux veuves et aux veufs, nous savons déjà, depuis le décret du mois d'août relatif aux pensions de réversion, qu'ils risquent de se retrouver dans des situations catastrophiques. Nous attendons du Gouvernement qu'il revienne sur ces dispositions qui leur portent gravement préjudice.
Toutes ces mesures d'économie contrastent fortement avec les cadeaux fiscaux destinés à privilégier les familles les plus aisées, celles qui emploient, par exemple, une personne à leur domicile, cadeaux fiscaux qui vont concerner moins de 40 000 familles très aisées. En effet, pour bénéficier pleinement de cette réduction d'impôt, il faudra disposer d'un niveau de revenus permettant d'engager 15 000 euros de dépenses sur l'année, soit 1 250 euros par mois !
A titre d'exemple, cette mesure aura pour effet de rendre non imposable un couple avec deux enfants disposant d'un revenu imposable mensuel de presque 4 600 euros, soit 55 000 euros par an. Ces chiffres sont éloquents !
Nous regrettons vivement que la politique menée précédemment par le gouvernement de gauche en faveur des structures collectives d'accueil du jeune enfant ne soit pas poursuivie.
Le manque de mesures dont fait preuve ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est l'illustration du choix du Gouvernement, qui consiste à privilégier les modes de garde individuels au détriment des modes de garde collectifs.
Nous aurons l'occasion dans quelques jours, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, de revenir à nouveau sur la progression très faible des prestations d'aide à la garde des enfants, qui n'est que de 0,1%, progression qu'il faut comparer à celle de 2,9% atteinte en 2001 et à celle de 5,6% atteinte en 2002.
Je le répète, alors que les prestations logement et les prestations familiales jouent un rôle majeur dans la prévention de la pauvreté et de l'exclusion, le Gouvernement a délibérément choisi, à travers toutes les mesures d'économie dont je viens de parler, de fragiliser les familles modestes.
Ces décisions viennent contredire les intentions affichées par le Gouvernement, il y a quelques jours à peine, autour de la médiatisation du projet de loi pour la cohésion sociale !
Le sort des familles fragilisées est renvoyé à la prochaine Conférence de la famille. Pourquoi attendre encore, alors que le Conseil de l'emploi des revenus et des coûts, le CERC, dans un rapport du 21 janvier dernier, a souligné qu'un à deux millions d'enfants peuvent être considérés comme pauvres aujourd'hui en France et que le taux de pauvreté des enfants augmente avec l'âge, les transferts sociaux étant plus efficaces pour les jeunes enfants que pour les adolescents !
Je n'omettrai pas d'évoquer l'inadaptation de la politique familiale actuelle destinée à aider les familles à financer les études des adolescents, ni la dégradation de la situation financière des étudiants, dont 100 000 vivent dans la précarité.
A aucun moment, le Gouvernement n'a voulu se saisir de ces questions. Madame la ministre, permettez-moi de vous dire notre désaccord sur ce choix.
Le projet de loi sur la cohésion sociale, que le Sénat vient d'examiner, aurait pu être le support permettant de prendre les mesures destinées à améliorer la situation de ces enfants et de ces jeunes. Pourquoi attendre le printemps 2005 alors qu'il y a urgence ?
En 2005, la CNAF devra faire face à une importante augmentation du nombre de ses allocataires puisqu'elle devra prendre en charge la gestion des prestations familiales des fonctionnaires.
Cette mesure concerne à terme 430 000 nouveaux allocataires et est évaluée par la CNAF elle-même à 80 millions d'euros pour 2005.
Nous veillerons à ce que ce transfert n'implique pas une nouvelle dégradation des comptes de la branche famille. En effet, nous ne savons pas encore comment l'Etat compensera les cotisations « employeurs ».
J'en arrive aux quelques mesures proposées par le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La première concerne l'allocation d'adoption, qui est doublée pour atteindre 1 624 euros.
Cette mesure, certes intéressante, reste néanmoins symbolique pour les familles concernées, notamment pour celles qui envisagent d'adopter un enfant étranger - elles représentaient 70% des familles adoptives en 2003 - puisque vous avez vous-même évalué, madame la ministre, le coût de cette adoption à 12 000 euros.
Mme Claire-Lise Campion. La Conférence de la famille de juin dernier a institué un entretien de santé personnalisé pour les jeunes qui sont en classe de cinquième. L'article 11 du présent projet de loi prévoit que cet examen sera réalisé par des médecins libéraux, avec information des médecins scolaires. Il prévoit également l'exonération du ticket modérateur dans le cadre des consultations de prévention destinées aux mineurs.
Toutes ces dispositions mériteraient d'être précisées, notamment quant aux procédures d'échanges d'informations. A-t-on mené une concertation avec les représentants de la médecine libérale ? Il semblerait que ce ne soit pas le cas !
Mme Claire-Lise Campion. Cette intention louable risque de rester un voeu pieux. N'est-ce pas plutôt un habillage qui permet de pallier la faiblesse des effectifs des services de médecine scolaire, l'absence de médecins, d'infirmières et d'assistantes sociales dans les établissements ? Il aurait fallu se donner les moyens de rendre cette mesure véritablement efficace, l'objectif étant bien, dans un souci de prévention des comportements à risques, d'accompagner les jeunes adolescents dans ces moments psychologiquement difficiles et d'éviter que ne surviennent des situations dramatiques. Nous proposerons un amendement sur ce sujet.
L'article 25 vise à réformer le mode de financement de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF. Il est proposé de créer un fonds spécial comprenant deux enveloppes : la première est destinée à financer les missions traditionnelles de l'UNAF; la seconde est prévue pour les actions nouvelles liées à la politique familiale.
Madame la ministre, pourriez-vous préciser davantage le contenu que vous entendez donner à cette réforme ? Je pense notamment aux modalités de répartition des fonds entre les associations familiales.
Pauvreté des mesures annoncées, absence d'ambition pour les familles ! Depuis juin 2002, vous avez laissé filer les déficits, renoncé à toute politique de soutien de la croissance économique et de l'emploi, abandonné toute démarche d'aide en direction des plus défavorisés, refusé toute réforme de l'organisation de l'offre de soins et reporté les déficits accumulés et à venir sur les générations futures. Le pacte social est totalement remis en cause.
Vous avez choisi une démarche libérale : pour réduire le poids des déficits publics, vous proposez de transférer le poids des dépenses de sécurité sociale vers des financements individuels.
La loi sur les retraites de 2003, la loi sur l'assurance maladie de 2004, les mesures sur la famille que vous avez prises depuis deux ans n'ont fait que mettre en application les choix d'une protection sociale à deux vitesses, d'une politique familiale qui profite aux familles les plus aisées et multiplie les évictions.
On est loin des soldes positifs de la branche famille qui ont permis de financer un fonds d'investissement pour les crèches, de favoriser la parité parentale, de simplifier les aides au logement, de pérenniser l'indexation des prestations familiales sur le coût de la vie, d'abonder le fonds social pour les cantines. On est loin de la solidarité par un soutien aux familles les plus déshéritées, de l'intégration et de l'accompagnement des enfants, mais aussi et surtout de l'égalité de tous au sein de la famille.
Nous n'approuvons pas votre démarche. Nous ne pouvons accepter vos choix. Nous voterons donc contre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, à ce stade de notre débat, je ne reviendrai pas sur les excellentes présentations qui viennent d'être faites par M. le ministre et MM. les rapporteurs. Je me limiterai à formuler quelques observations.
Je tiens tout d'abord à souligner, après M. le ministre, que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale s'inscrit, en quelque sorte, dans le sillage de trois réformes sociales majeures et courageuses mises en oeuvre par le Gouvernement.
Il s'agit d'abord de la réforme des retraites. Comme l'a indiqué M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse, la réforme de 2003 n'est que la première étape d'un processus, mais c'est une étape capitale, essentielle.
Il s'agit ensuite de la réforme de l'assurance maladie, puis de la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
Je tiens à mon tour à relever que le Gouvernement s'est refusé à appliquer l'adage malicieux d'un de nos grands humoristes : « Pourquoi remettre au lendemain ce que l'on peut faire après-demain ? » (Sourires.)
Nos compatriotes doivent mesurer l'importance du budget de la sécurité sociale en ayant présent à l'esprit qu'il est supérieur à celui de l'Etat et que l'effort de la nation en ce domaine - effort que nous ne regrettons pas, bien entendu - est considérable.
Le point le plus préoccupant est sans conteste le déficit prévisionnel, historique si l'on peut dire, de l'assurance maladie. Il est à lui seul supérieur à celui de l'ensemble du régime général en 1995 qui, on s'en souvient, avait conduit à la création de la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES.
Le déficit de la seule année 2004 équivaut à la totalité de la dette accumulée entre 1996 et 1998, qui entraîna la prolongation pour cinq ans de la durée de vie de la CADES. Cette dette, issue de l'accumulation des déficits, pèse sur les comptes courants de la branche : 500 millions d'euros d'intérêts sont prévus en 2004.
Toutefois, nous avons des raisons d'espérer une amélioration. La Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, confirme un infléchissement très significatif de l'évolution des dépenses de soins. Elles devraient augmenter de 4,5 % cette année alors qu'elles ont progressé de 5,9 % en 2001, de 7,2 % en 2002 et de 6,2 % en 2003.
A cet égard, tout le monde en convient, l'année 2005 sera décisive pour tous les acteurs.
En effet, la réforme ne prendra corps qu'à la suite des accords conventionnels que concluront les représentants des professions de santé. Il faudra par ailleurs que les patients eux-mêmes, les bénéficiaires, comprennent que la réforme vise non pas à leur imposer des contraintes supplémentaires, mais seulement à sanctionner certains abus...
M. Alain Vasselle, rapporteur. Exactement.
M. Adrien Gouteyron. ...et que son objectif principal est de préserver notre régime de sécurité sociale. Un sursaut, une prise de conscience sont indispensables.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien ! Voilà qui contraste avec les propos de M. Fischer.
M. Adrien Gouteyron. J'ai beaucoup d'estime pour M. Fischer, il le sait, mais je peux ne pas toujours être d'accord avec lui.
M. Michel Mercier. Il est rare que vous votiez avec lui ! (Sourires.)
M. Adrien Gouteyron. Au début de notre discussion, M. le ministre a évoqué la diminution des sommes versées au titre des indemnités journalières et la réduction du nombre des arrêts de maladie de courte durée. C'est un signe encourageant. Nous sommes nombreux dans cette enceinte à l'avoir souligné. Il ne s'agit pas de porter atteinte à un droit. Il s'agit de faire en sorte que notre système de sécurité sociale ne souffre pas d'abus insupportables.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout à fait !
M. Adrien Gouteyron. Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de relever un point très important pour la mobilisation de l'opinion. Notre pays pâtit trop souvent, après le vote d'une loi, de l'attente interminable des décrets d'application, qui, souvent, ne paraissent finalement pas. C'est pourquoi nous apprécions que le Gouvernement, en l'occurrence, ait veillé à la publication rapide des décrets d'application.
M. Adrien Gouteyron. Je crois savoir qu'avant la fin de l'année près de 90 %, voire de 95 % des décrets d'application auront été publiés. Je salue l'effort du ministre de la santé et je salue, s'il me le permet, l'effort de M. Xavier Bertrand, ici présent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Le fait est suffisamment nouveau pour que nous le signalions. Si l'on veut marquer l'opinion, il faut des signes comme celui-là.
Je ne rappellerai pas que la dégradation des comptes alourdit chaque année davantage la part des prélèvements sociaux, lesquels représentent près de la moitié des prélèvements obligatoires, cela a déjà été dit.
Puis-je cependant mettre un bémol à mes propos, monsieur le secrétaire d'Etat, ou exprimer une légère crainte ? En tant que rapporteur pour avis de la commission des finances, j'avais fait remarquer que la mise au point du dossier médical personnalisé était peut-être plus compliquée qu'on ne le laissait entendre à l'époque. Si vous pouvez, monsieur le secrétaire d'Etat, nous en dire davantage à ce sujet, nous enregistrerons vos propos avec la plus grande attention, parce que, comme le rappelait M. Barbier à l'instant, cet aspect constitue évidemment un élément extrêmement fort de la réforme.
Je dirai quelques mots de l'hôpital, qui, on le sait, répond à un besoin social considérable,...
M. François Autain. Tout à fait !
M. Guy Fischer. Dont acte !
M. Adrien Gouteyron. ...besoin que ressentent profondément tous les Français - et non pas vous seuls, mes chers collègues qui siégez à gauche de l'hémicycle ! Il doit répondre à sa vocation d'accueil de la souffrance, d'écoute, de qualité de soins, d'égal accès pour tous. A ce titre, il mérite une attention tout à fait particulière des pouvoirs publics, je veux dire du Gouvernement, bien sûr, mais aussi du Parlement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !
M. Adrien Gouteyron. L'hôpital, je le rappelle, représente la moitié des dépenses de l'ONDAM et connaît dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous examinons aujourd'hui un taux de progression de 3,6 %, contre 3,2 % pour l'ONDAM global.
En raison tant de sa vocation sociale que de la part qu'il représente dans les dépenses, l'hôpital mérite que nous lui accordions une considération tout à fait particulière.
Je veux bien sûr relever l'importance du plan « hôpital 2007 », voulu par le Président de la République et mis en oeuvre par le Gouvernement, plan pour lequel doivent être mobilisés 10 milliards d'euros destinés à moderniser les locaux et les équipements hospitaliers.
Si vous le permettez, monsieur le secrétaire d'Etat, je vais vous poser quelques questions. Elles vous paraîtront peut-être trop précises, mais elles m'ont été soufflées, je dois l'avouer, par quelques responsables hospitaliers.
Je veux d'abord vous faire part de quelques craintes sur le financement des mesures nouvelles, qui ne paraît pas toujours intégralement assuré.
M. François Autain. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Adrien Gouteyron. En effet, si des crédits sont accordés à l'hôpital, on demande aux établissements de consentir des efforts budgétaires qui ne sont pas toujours faciles à réaliser.
Je veux aussi attirer votre attention sur les conséquences de ce que l'on appelle le « reclassement professionnel », la revalorisation des professions hospitalières. On me dit que les crédits accordés à ce titre ne correspondent pas aux besoins et qu'un effort parfois très significatif est demandé aux établissements hospitaliers. J'aimerais que vous nous indiquiez ce que vous en pensez.
Par ailleurs, on signale souvent, et l'on a raison, que les hôpitaux peuvent faire des économies sur leurs achats.
M. François Autain. Sur les achats de médicaments ?
M. Adrien Gouteyron. Ce point est incontestable, et nous souhaitons que ces économies soient effectives. Au demeurant, si j'en crois les indications que j'ai pu obtenir, elles commencent à le devenir. Mais je voudrais souligner que les hôpitaux sont freinés dans leur démarche par la réglementation relative aux marchés publics, qui leur impose - comme aux autres, certes - des délais importants et des lourdeurs quelquefois difficiles à surmonter.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, il faudrait tout de même que le Gouvernement veuille bien considérer le caractère anormal de la taxe sur les salaires. (M. Guy Fischer applaudit.) Non seulement les hôpitaux sont soumis à la TVA, mais ils paient aussi la taxe sur les salaires : d'une certaine manière, le budget de l'Etat appelle une participation du budget de l'assurance maladie !
Cela suscite des interrogations, voire des inquiétudes dans les établissements.
J'indiquerai, pour conclure cette intervention quelque peu disparate, que, bien entendu, je voterai le projet de loi de financement de la sécurité sociale en saluant les efforts du Gouvernement, mais en l'invitant à poursuivre ses efforts tout en portant son attention sur les quelques points que je me suis permis de lui signaler. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la réforme de l'assurance maladie était non seulement nécessaire, mais elle était attendue par tous.
Vous parlez de réforme ambitieuse, de renforcement des contrôles, fort bien !
Le déficit de l'assurance maladie s'est creusé de façon très importante passant d'un peu plus de 2 milliards d'euros en 2001 à plus de 13 milliards d'euros en 2004, mais les gens sont-ils mieux soignés en 2004 qu'en 2001 ?
M. François Fortassin. Vous avez des certitudes, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. François Fortassin. Nous en avons beaucoup moins !
Par ailleurs, vous affirmez que le déficit ne sera plus que de 8 milliards d'euros en 2005.
M. François Fortassin. Nous ne sommes pas convaincus par les mesures que vous allez prendre pour le réduire...
M. François Fortassin. ...d'autant plus que je fonde mon argumentation sur un rapport sévère de la Cour des comptes...
M. Paul Blanc. Ah...
M. François Fortassin. ...où l'on parle notamment d'une régulation toujours insuffisante des dépenses de l'assurance maladie, d'efforts de maîtrise de contrôle très loin des enjeux, d'affections de longue durée dont les dépenses ont cru de plus de 40 % entre 2000 et 2003, de 60 000 produits et prestations remboursables sur lesquels il y a peu ou pas de contrôle - l'augmentation est de 42 % - de transports des malades qui ont connu une croissance de 50 à 60 %, d'arrêts de travail en très forte augmentation - ceux de plus de trois mois ont augmenté de plus de 40 % - d'absence de sanctions réelles, de systèmes de contrôle peu opérants.
En ce qui concerne les médicaments, c'est encore mieux. L'achat au meilleur prix n'est pas la priorité et je relève la phrase suivante : « La présence des représentants de l'Etat dans l'industrie pharmaceutique au sein de l'instance chargée d'apprécier la valeur médico-scientifique des produits s'inscrit en contradiction avec la volonté de renforcer la légitimité, l'objectivité et l'efficacité de l'expertise. »
Il existe, dans ce domaine, un mélange des genres considérable.
S'agissant de la fiscalité sur les médicaments, on dit qu'elle est instable, fragile, d'un faible rendement, puisque celui-ci ne dépasse pas 2 % du chiffre d'affaires : beaucoup de sociétés et de particuliers voudraient avoir ce niveau d'imposition ! Quant aux taxes, elles restent modestes.
Enfin, l'information des prescripteurs reste lacunaire. J'avais eu en son temps l'occasion de vous dire, monsieur le secrétaire d'Etat, que des laboratoires font pression - attitude hautement scandaleuse - sur leurs visiteurs médicaux pour qu'ils n'aillent pas chez les médecins peu prescripteurs.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Heureusement, sinon ils prescriraient encore plus !
M. François Fortassin. C'est une manière de voir !
Autrement dit, ce que l'on aurait aimé dans cette réforme, c'est que vous commenciez par suivre toutes les préconisations de la Cour des comptes.
Je ne nie pas que la loi contienne de bonnes mesures,...
M. François Fortassin. ...mais elles sont beaucoup trop ponctuelles.
Le dossier médical partagé en est une, les améliorations de la carte Vitale également, même si elles ne vont pas assez loin. Toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, en faisant appel au civisme, vous faites preuve d'un angélisme touchant mais peu efficace.
M. Paul Blanc. C'est normal, à Lourdes !
M. François Fortassin. Vous voulez responsabiliser l'ensemble des partenaires, notamment les patients et les médecins, mais il ne suffit pas d'exercer une profession noble pour être vertueux. Pensez-vous freiner le nomadisme médical avec 1 euro ?
M. Paul Blanc. Avec le dossier médical !
M. François Fortassin. A mon avis, ce n'est pas une bonne mesure.
Je ferai ensuite une comparaison qui va peut-être être mal acceptée mais peu importe, nous avons la liberté de parole :...
M. François Fortassin. ...c'est comme si vous demandiez au ministre de l'intérieur, afin de diminuer le nombre des accidents de la route, de faire appel au civisme et, pendant six mois, d'interdire aux gendarmes de verbaliser les excès de vitesse et de supprimer les alcootests.
A l'évidence, quand vous faites appel au civisme sans prévoir la moindre sanction, vous êtes « à côté de la plaque ». (M. Paul Blanc rit.)
Si des sanctions étaient prévues, nous applaudirions votre sens des responsabilités.
M. Paul Blanc. Vous protesteriez !
M. François Fortassin. Mes chers collègues, vous comprendrez que je ne puisse pas m'associer à cette réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'an dernier à pareille époque, alors que nous attendions la fameuse loi sur la réforme de l'assurance maladie, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 ne contenait que des « mesurettes ».
La loi de financement pour 2004 devait être une loi de stabilisation du déficit ; ce fut, en fait, l'amorce de l'abandon de notre système de solidarité nationale issu de 1945.
Aujourd'hui, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, après la réforme de l'assurance maladie, présente un caractère très restreint. Vous l'avez dit vous-même, c'est un projet de loi « resserré ». Le texte est en fait vidé de toute substantifique moelle. Il continue la fuite en avant des déficits que vous avez amorcée depuis que vous êtes aux commandes.
Le déficit du régime général s'établit à 11,5 milliards d'euros en 2003, soit plus du triple de celui de 2002, et, fait nouveau, toutes les branches voient leur solde se dégrader.
Le déficit de la branche maladie, qui a presque doublé en deux ans, devient tristement historique en 2004 : 14 milliards d'euros !
Je ne reviendrai pas sur votre choix optimiste de fixer un taux de progression des dépenses de santé à 3,2 %. Mes collègues ont largement développé ce thème.
Comment pouvez-vous tabler sur une augmentation des recettes assise sur une progression de la masse salariale de 4 % alors que le chômage reste stable, voire augmente légèrement ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, comme je le fais tous les ans, je vais évoquer plus particulièrement la partie « vieillesse » du projet de loi. Mais, hors branche vieillesse, je tiens à vous annoncer dès maintenant que le groupe socialiste propose de rétablir le lundi de Pentecôte parmi les jours fériés. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mme Gisèle Printz. Bravo !
M. Claude Domeizel. Les faits sont là pour prouver, en effet, l'inefficacité de la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et handicapées et, surtout, les difficultés de sa mise en oeuvre.
Mais revenons à la branche vieillesse.
Au cours du débat de l'été 2003, nous avons émis les plus grandes réserves sur la loi portant réforme des retraites. Les exemples de son inadaptation totale ne manquent pas.
A mauvaise loi, mauvais décret. Le décret du 24 août 2004 - encore une fois, au moment où nos concitoyens sont en vacances - réforme l'assurance veuvage et les pensions de réversion en pénalisant du même coup particulièrement les femmes.
Quel tollé ! Vous ne comptiez pas sur la vigilance des partenaires sociaux.
Conscient que vous aviez commis une « bourde »,...
M. Guy Fischer. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Claude Domeizel. ... vous avez aussitôt essayé de vous rattraper. Vous vous êtes engagé dans une négociation, mais là, il s'agissait de négocier un virage à 360 degrés.
Croyant vous sortir de cette mauvaise posture, vous vous êtes dit : demandons l'avis du Conseil d'orientation des retraites, le COR. Vous avez tout faux, car votre demande n'entre pas dans les missions du COR qui a pour vocation d'éclairer le débat sur les perspectives à long et moyen terme.
M. Claude Domeizel. Certes, de par la loi, le Conseil d'orientation des retraites peut être appelé, monsieur le secrétaire d'Etat, à émettre des avis sur des sujets ponctuels, mais pas dans ce cas, pour deux raisons.
La première, c'est qu'il s'agit d'un sujet complexe qui doit s'inscrire dans une réflexion plus large sur les avantages familiaux et conjugaux
La seconde raison, c'est qu'il est pour le moins osé de consulter le Conseil d'orientation des retraites sur un texte déjà publié, donc en théorie bien préparé, après avoir requis les avis nécessaires.
Consulter le Conseil d'orientation des retraites après publication prouve que vous cherchez un alibi. Voilà que ce conseil est appelé à donner une appréciation sur un texte déjà signé par le Premier ministre, le ministre de l'économie et des finances, le ministre de l'agriculture et vous-même. C'est une situation surréaliste !
Hier, 15 novembre, à l'issue de sa réunion extraordinaire, le Conseil d'orientation des retraites a publié un communiqué. Je me permets de vous lire une phrase de sa conclusion : « Le Conseil d'orientation des retraites n'estimerait pas déraisonnable d'aller dans le sens qui est unanimement souhaité, c'est-à-dire vers une exclusion des pensions de réversion complémentaires et des revenus du patrimoine. »
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce sera fait !
M. Claude Domeizel. Oui, mais il aurait peut-être fallu consulter les partenaires avant !
Je reviendrai sur la question des pensions de réversion dans la discussion des articles en formulant des propositions concrètes et peut-être beaucoup plus radicales.
Que constatons-nous plus généralement dans la branche vieillesse ? La dégradation du solde de cette branche, amorcée en 2003, s'accentue. Le déficit de la CNAV devrait être de 71 millions d'euros en 2004 et atteindre 1,4 milliard d'euros en 2005. Selon le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, ce déficit serait dû aux départs anticipés des salariés ayant effectué une carrière longue. Mais encore faut-il rappeler que la réforme de la compensation de 2003 fait supporter à la CNAVTS une charge supplémentaire de 850 millions d'euros.
S'agissant des départs anticipés pour ceux qui ont commencé à travailler très jeunes, rappelons-nous que les décrets d'application de cette mesure, dans le privé, avaient suscité une grande déception, tant les conditions pour en bénéficier étaient restrictives. Sur 800 000 personnes potentiellement concernées, de 200 000 à 250 000 seulement pourront finalement profiter du dispositif entre 2005 et 2008.
L'article 29 de cette loi étend le bénéfice de cette mesure aux fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Nous formulerons des propositions plus équitables, car les critères sont encore plus draconiens que pour le privé. Dans le projet de loi de finances pour 2005, des amendements identiques seront proposés par le groupe socialiste pour les fonctionnaires de l'Etat.
Le deuxième article de votre projet de loi relatif à la partie vieillesse traite des conditions de versement de la soulte que la Caisse nationale des industries électriques et gazières doit verser à la CNAVTS. Le régime de retraite des agents EDF - GDF étant désormais adossé au régime général, la mesure doit être financièrement neutre pour la CNAV.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
M. Claude Domeizel. Je n'insisterai pas sur les raisons détournées qui vous ont conduits à adopter le changement de statut juridique des entreprises EDF - GDF, ni sur les effets collatéraux de cette nouvelle gestion des retraites.
J'avais largement interpellé le ministre en charge sur les conditions de l'adossement du régime spécial au régime général. Je voudrais saluer la perspicacité du conseil d'administration de la CNAV, particulièrement de sa présidente Danièle Karniewicz, pour être parvenu à un accord conclu in extremis sur les modalités du versement de la soulte à la CNAVTS, même si le solde sera versé de façon échelonnée pendant vingt ans, et non vingt-cinq ans comme le souhaitait la CNAV.
Quant au financement des droits spécifiques qui relèveront de la contribution tarifaire, ce sont bien les consommateurs qui paieront.
Mais, au-delà des conditions de versement de cette soulte, les plus avertis ont bien compris qu'il s'agissait d'un tour de passe-passe budgétaire permettant à M. Sarkozy, pendant qu'il est encore au ministère des finances, de réduire le déficit public, conformément aux engagements européens.
M. François Fillon, votre prédécesseur, avait présenté la réforme des retraites comme une loi de progrès.
M. Claude Domeizel. L'application de tous les jours démontre le contraire, qu'il s'agisse des réversions, du rachat des annuités ou des longues carrières, ou, pour les fonctionnaires, de la suppression des bonifications pour enfant.
La réforme Raffarin - Fillon coûte cher aux femmes, pour qui la retraite à taux plein sera encore plus difficile à atteindre, les femmes, déjà largement désavantagées par la réforme Balladur de 1993, les femmes, qui représentent 86 % des smicards, deux tiers des salariés à temps partiel, et qui ne sont que 14 % à bénéficier de la mesure des retraites anticipées pour carrières longues !
Combien d'entre nous sont interpellés par des femmes qui réalisent aujourd'hui ce qu'elles ont perdu à travers la réforme de l'été 2003 ?
Monsieur le ministre, la branche vieillesse de ce projet de loi, sans ambition, présente d'autres caractéristiques : une baisse du pouvoir d'achat des retraités, rien sur le minimum contributif, un fonds de réserve de retraite sacrifié puisque aucune mesure n'a été prévue pour l'abonder, ce qui illustre la volonté délibérée du Gouvernement - votre volonté - de saper la retraite par répartition.
En conclusion, je vous fais part de mon indignation et de ma tristesse. Ce projet de loi se caractérise par son manque d'envergure. C'est pourquoi mes collègues socialistes et moi-même ne pourrons accréditer une telle imposture. S'il n'est pas profondément amélioré, nous voterons contre votre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il sera amélioré !
M. le président. La parole est à M. André Vantomme.
M. André Vantomme. Le principe de l'examen par le Parlement des comptes de la sécurité sociale a été formalisé dans l'article 34 de la Constitution.
Au regard de votre projet de loi, monsieur le ministre, il appartient au Parlement de contrôler l'évolution annuelle des dépenses et des recettes de la sécurité sociale, d'apprécier le déficit prévisionnel et les moyens de nature à assurer l'équilibre des comptes, mais aussi de se prononcer sur les orientations des politiques de la santé, de la famille et de l'assurance vieillesse.
Les sénateurs socialistes ont eu la possibilité de vous faire part de leur désaccord et de leurs craintes au regard de votre politique. Partageant leur propos, je n'y reviendrai pas, souhaitant m'exprimer plus spécifiquement sur deux problèmes : le développement de la médecine nucléaire et la place de la psychiatrie dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Le premier point que je souhaite aborder à l'occasion de ce débat concerne la médecine nucléaire.
L'an dernier, j'avais appelé l'attention de votre prédécesseur sur le retard de notre pays dans ce domaine, notamment au regard du nombre de tomographes à émission de positons.
Le tomographe à émission de positons oeuvre dans trois grands domaines médicaux : la cancérologie, la cardiologie et la neurologie. Ce matériel de haute technologie utilise la scintigraphie, technique médicale qui informe sur le fonctionnement d'un organe et pas seulement sur sa forme.
La scintigraphie permet d'approcher par l'image les anomalies biologiques et moléculaires caractéristiques d'un processus pathologique, et non plus seulement les déformations anatomiques tardives que la maladie fera subir à l'organe touché.
Inutile de dire, monsieur le ministre, que le corps médical trouve beaucoup de satisfactions et fonde beaucoup d'espoirs dans l'utilisation de cet équipement pour affronter les maladies.
En réponse à la question que je lui posais sur les mesures envisagées pour accélérer l'équipement de notre pays en tomographes à émission de positons et résorber son retard par rapport à d'autres pays, M. Mattei m'avait indiqué que l'objectif était d'acquérir soixante-quinze appareils avant la fin de 2007.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous préciser si cet objectif est aussi le vôtre, ce qui a été fait en 2004 dans ce domaine et ce qui est prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 ?
Le second point que je souhaite aborder concerne la place de la psychiatrie dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Voilà quelques jours, un grand journal du soir titrait : « Dépression, anxiété, suicide : les chiffres d'un mal français ».
L'article relate les résultats d'une enquête conduite par l'Organisation mondiale de la santé avec l'aide de votre ministère sur le thème : « Santé mentale en population générale ». Menée auprès de 36 000 personnes, de 1999 à 2003, les résultats de cette enquête sont jugés spectaculaires et inquiétants.
Trois pourcentages illustrent ce mal-être : 11 % des personnes interrogées ont été repérées comme ayant connu un épisode dépressif dans les deux semaines précédant l'enquête ; 12,8 % ont affirmé souffrir d'anxiété généralisée et 0,7 % déclarent avoir fait une tentative de suicide récemment.
Face à ce constat, étayé par une étude d'importance menée avec la collaboration de vos services, monsieur le ministre, nous nous devons de réagir.
Réagir, c'est d'abord nous interroger : la réponse de la politique de santé publique est-elle adaptée aux situations rencontrées face aux souffrances psychiques et à la maladie mentale ?
La santé, cette formidable exigence sociale, se manifeste tout au long de la vie, du tout début à l'extrême fin, avec des exigences de plus en plus fortes, de plus en plus appréciées et jugées par nos concitoyens.
La psychiatrie s'inscrit pleinement dans cette exigence sociétale. Elle est de plus en plus sollicitée.
Prenons l'exemple des hôpitaux psychiatriques. Que constatons-nous ? Plusieurs éléments : augmentation des admissions, saturation des taux d'occupation dans les zones urbaines, montée inexorable du taux de patients hospitalisés sous contrainte, accroissement des événements de violence et de l'insécurité...
Mais l'évolution de la santé mentale ne saurait être appréciée uniquement au regard de l'hospitalisation. Pardonnez-moi de vous imposer quelques chiffes à l'appui de cette opinion.
En 1999, 1 100 000 personnes adultes ont été soignées dans les secteurs de psychiatrie générale, dont 86 % en ambulatoire, 11 % à temps partiel et 27 % en hospitalisation à temps complet.
En 2000, 432 000 enfants et adolescents ont été soignés dans les secteurs de psychiatrie infanto- juvéniles, soit 97 % en ambulatoire, 10 % à temps partiel et 3 % à temps complet.
Il serait présomptueux de ma part de vouloir, dans le temps limité qui m'est imparti, dresser un bilan exhaustif des dispositions prises pour le développement de la santé mentale et de la psychiatrie.
En revanche, une question majeure se pose : le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 prévoit-il des moyens nécessaires et suffisants pour la santé mentale et la psychiatrie ?
La réponse à cette question, monsieur le ministre, n'est pas simple. Elle se complique surtout à partir du moment où l'on constate que l'ONDAM 2005 mélange les soins de suite et de réadaptation avec la psychiatrie.
A plusieurs reprises, les professionnels responsables de secteurs de santé mentale ont solennellement appelé votre attention sur la nécessité de disposer d'informations et de garanties sur le financement national de la discipline psychiatrique, la grande oubliée des priorités de santé publique.
Monsieur le ministre, pourquoi ne pas dire clairement quels moyens sont affectés aux personnes souffrant de troubles psychiques ? Cette façon de faire permettrait de disposer d'éléments objectifs pour apprécier les mesures nouvelles nécessaires et éviter un détournement vers d'autres secteurs plus visibles médiatiquement.
L'enveloppe des soins des personnes souffrant de troubles psychiatriques mérite mieux que d'être une variable d'ajustement d'autres besoins. Il vous appartient de proposer que les arbitrages nationaux rendus soient clairs et transparents au moyen de l'identification d'un ONDAM 2005 spécifique pour la psychiatrie.
De grâce ! Evitons des transferts d'activités de médecine, chirurgie, obstétrique - MCO - vers les soins de suite et de réadaptation - SSR -, intervenant notamment dans le secteur privé lucratif, dans le cadre de la « boite noire » constituée actuellement par l'ONDAM commun aux soins de suite et de réadaptation et à la psychiatrie.
Agir autrement reviendrait, dans l'opacité, à pénaliser une nouvelle fois une psychiatrie oubliée des arbitrages budgétaires et victime d'opérations de recomposition qui lui sont étrangères.
Nous déposerons des amendements pour ce faire, en insistant une nouvelle fois sur l'importance du sujet. La psychiatrie est sollicitée pour un champ immense. Aux pathologies qui relèvent spécifiquement de la psychiatrie s'ajoute le vaste domaine de la souffrance psychique. La santé mentale est au coeur des problématiques de cohésion sociale, du décloisonnement entre le sanitaire et le social et des valeurs du service public hospitalier. Tout cela mérite sûrement un ONDAM spécifique.
Monsieur le ministre, cette reconnaissance spécifique de la place de la psychiatrie dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale est d'autant plus nécessaire que ce secteur de la médecine souffre d'une augmentation constante de demande de soins de la part de nos concitoyens.
M. André Vantomme. Ainsi, 1 % de la population générale connaît des troubles psychiatriques sévères ; 20 % de la population souffre d'un épisode dépressif majeur au cours de son existence ; le handicap psychique concerne 600 000 personnes en France, dont la moitié est suivie en psychiatrie dans des dispositifs extra-hospitaliers.
La CNAM a publié récemment les résultats d'une enquête sur les arrêts maladie d'une durée de deux à quatre mois, menée sur une population de 7 500 assurés sociaux affiliés au régime général, toutes catégories sociales confondues. D'après cette enquête, les principaux motifs d'arrêts de travail sont liés, pour 15 % d'entre eux, à des troubles mentaux et du comportement, dont les deux tiers sont des épisodes dépressifs.
Une autre statistique préoccupante est la forte augmentation du nombre d'hospitalisations sous contrainte. Les spécialistes y voient le signe d'une désorganisation du système de suivi psychiatrique en France. Cette situation reflète un manque de moyens qui se traduit par des hospitalisations à répétition.
Face à ce constat, monsieur le ministre, pourquoi n'avez-vous pas présenté, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, un plan pour le développement de la psychiatrie et la promotion de la santé mentale ? Nous aurions pu l'espérer, d'autant qu'un certain nombre de propositions intéressantes peuvent être trouvées dans le rapport Cléry-Melin.
Comme le souligne fort bien la Fédération hospitalière de France, « cette situation aboutit au paradoxe d'une discipline qui est à la fois confrontée à une forte augmentation et à une diversification des besoins de soins depuis plusieurs années, et qui est en même temps l'éternelle oubliée au moment des arbitrages budgétaires et de la conception de programmes d'action pluriannuels ».
Il est urgent, monsieur le ministre, de mettre en place un plan de développement de la psychiatrie et de promotion de la santé mentale ouvert à une large consultation, en ce qui concerne notamment la prise en charge au long cours des patients présentant des pathologies psychiatriques sévères, l'articulation entre le sanitaire et le médico-social, le développement de la pédopsychiatrie et la prise en charge de la dépression.
Il est également urgent, monsieur le ministre, notamment pour la psychiatrie, de réduire les effets néfastes des disparités régionales en matière d'offre de soins. Du fait de l'impossibilité de mettre en place le PMSI, le programme de médicalisation des systèmes d'information hospitaliers, dans le domaine de la psychiatrie, les établissements hospitaliers concernés fonctionnent toujours avec le système de la dotation globale. La tarification à l'activité sera donc, pour eux, inopérante.
Pour trouver des solutions efficaces aux disparités régionales aggravées par une pénurie médicale et paramédicale, il vous a été demandé d'étendre certaines mesures incitatives telles que les primes d'installation ou les bourses au bénéfice des régions particulièrement défavorisées. Vous vous y êtes, jusqu'à présent, opposé. Plus grave encore, dans certaines régions pourtant favorisées, vos services tolèrent des interprétations du statut de la fonction publique hospitalière qui renforcent encore les disparités régionales.
Monsieur le ministre, votre prédécesseur, en abandonnant le concept de maîtrise comptable des dépenses de santé pour celui de maîtrise médicalisée, a fait un grand pas qui mérite d'être salué et qui en appelle d'autres.
Les politiques contestables engendrées par la maîtrise comptable, à l'image du numerus clausus ou de la fermeture d'écoles d'infirmières, sont aujourd'hui révisées. C'est une bonne chose, mais il faudra du temps pour rétablir la démographie médicale et paramédicale.
La situation présente est difficile et nécessite une intervention, notamment pour la psychiatrie.
Je souhaite sincèrement, madame, messieurs les ministres, que nos réflexions puissent contribuer à votre action. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Messieurs Vasselle et About, je souhaite tout d'abord vous confirmer l'engagement du Gouvernement à l'égard de la réforme de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.
Cette réforme visera prioritairement à améliorer la visibilité des lois de financement grâce à un vote par branche, à placer ces lois dans un cadre pluriannuel, à engager une démarche « objectifs-résultats » et à affirmer, dans la loi organique, le principe de compensation des exonérations de charges par la sécurité sociale, principe auquel M. Vasselle tient tout particulièrement.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien, monsieur le ministre !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Monsieur Vasselle, je vous confirme aussi que les prévisions de réalisation de l'ONDAM pour 2004 sont prudentes. Elles enregistrent les premiers signes du ralentissement des dépenses que nous observons depuis le printemps.
Chaque fois qu'une réforme est mise en oeuvre, il faut, certes, tenir compte de l'effet psychologique qu'elle induit. Malgré tout, en l'espèce, nous avons mis en place les outils pour modifier le comportement des Français et des professions de santé.
Je ne crois pas qu'il faille réviser les objectifs fixés dans le projet de loi, même si je n'exclus pas de bonnes surprises. Au demeurant, on ne peut pas, à la fois, nous soupçonner de sous-estimer l'ONDAM pour 2005 et nous reprocher notre prudence sur les chiffres de 2004.
Je vous remercie, monsieur Vasselle, d'avoir souligné que l'ONDAM pour 2005 était réaliste ; nous aurons l'occasion d'en parler plus précisément demain.
Par ailleurs, vous avez relevé les difficultés du FIPSA et du FSV. La situation financière de ces deux fonds retient, évidemment, toute l'attention du Gouvernement.
S'agissant du FIPSA, nous avons demandé à trois inspections générales - l'inspection générale des finances, l'inspection générale des affaires sanitaires et sociales et l'inspection générale de l'agriculture - d'analyser les causes structurelles de son déficit. Cette analyse nous permettra d'apporter des réponses elles aussi structurelles à ses difficultés.
Sur le FSV, vous avez vous-même rappelé les causes des déséquilibres actuels.
En ce qui concerne le fonds de réserve pour les retraites, je précise qu'il disposera, à la fin de 2005, de 20 milliards d'euros de réserves. Compte tenu de la situation actuelle des finances publiques, il était difficile, me semble-t-il, de faire plus. Le Gouvernement reste attaché au rôle joué par ce fonds, même s'il ne constitue évidemment pas la seule réponse aux problèmes de financement des retraites.
En outre, monsieur Vasselle, vous connaissez notre attachement au principe de compensation des exonérations et des transferts de charges, qui garantit un pilotage cohérent des finances publiques. Sur les sujets précis relevant de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous aurons l'occasion de débattre. Au demeurant, je ne crois pas que les dispositions auxquelles vous avez fait allusion remettent fondamentalement en cause ce principe.
Vous avez précisé également vos attentes concernant la réforme de la loi organique. En toute franchise, celles-ci me semblent rejoindre les objectifs que j'ai indiqués. Quoi qu'il en soit, le Gouvernement souhaite un débat très ouvert sur le sujet, qu'il s'agisse du périmètre des agrégats ou, plus largement, des lois de financement.
Je vous confirme, enfin, que le Gouvernement est prêt à envisager les modalités permettant de donner au Parlement plus de temps pour examiner les projets de lois de financement rénovés.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout baigne ! (Sourires.)
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Monsieur Jégou, en 2005, en effet, nous engagerons le redressement des comptes de la sécurité sociale, qui sera, certes, progressif, nous l'avons d'ailleurs toujours dit. Comme vous l'avez souligné, la tache n'est pas facile, mais les différentes réformes votées depuis deux ans ont permis de constituer le socle de ce redressement.
Par ailleurs, je partage votre analyse sur la « crise des dépenses » que vous avez évoquée. C'est à partir de cette analyse que nous avons construit un plan de 15 milliards d'euros pour assurer le retour à l'équilibre, dont 10 milliards d'euros sont affectés au volet « dépenses ».
J'aurai l'occasion, demain, de préciser les conditions de l'élaboration de l'ONDAM pour 2005, qui me semble crédible.
Vous avez également rappelé, monsieur Jégou, les différents flux de financement liés à l'opération d'adossement du régime des industries électriques et gazières. Ces flux sont décrits à l'article 28 et traduits dans les agrégats du projet de loi. Ils ont fait l'objet d'une concertation étroite avec la Caisse nationale d'assurance vieillesse et les industries électriques et gazières, qu'il s'agisse, d'ailleurs, de la mise en réserve d'une partie de la soulte au fonds de réserve pour les retraites, ou des versements annuels entre la Caisse des industries électriques et gazières et la Caisse nationale d'assurance vieillesse. Certes, les flux sont complexes, mais ils sont la garantie d'une opération transparente.
Monsieur le président de la commission des affaires sociales, je suis certain que la réforme de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale nous permettra d'assurer une meilleure articulation entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale. La réalisation de cet objectif est nécessaire non seulement pour le Gouvernement, par rapport au pilotage des finances publiques, mais aussi pour le Parlement.
Je l'ai dit tout à l'heure : tandis que les impôts baissaient, les prélèvement obligatoires ont augmenté, et ce en raison de la détérioration des comptes sociaux.
Malgré tout, je ne crois pas qu'il faille aboutir à une fusion des deux instruments que constituent la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, comme vous avez semblé l'évoquer.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Moi non plus !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien ! C'est l'évidence ! Au demeurant, nous ne l'avons pas demandée.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. La question du rôle joué par la Cour des comptes devra aussi être posée ; le Gouvernement n'a pas de tabou à ce sujet.
Monsieur Leclerc, vous avez évoqué la réforme des retraites issue de la loi du 21 août 2003, qui a permis de sauvegarder l'assurance vieillesse et de réaffirmer le principe de solidarité entre les générations, c'est-à-dire la cohésion sociale dans notre pays et le refus des corporatismes.
La réforme des retraites n'est pas seulement financière ; elle est aussi et surtout un renforcement de la justice sociale. En témoignent, comme vous l'avez rappelé, les 130 000 bénéficiaires du dispositif relatif aux carrières longues qui pourront accéder, dès 2004, à la retraite de façon anticipée.
La réforme des retraites a également permis une prise de conscience collective sur les perspectives démographiques de notre pays, ainsi que sur l'intérêt, pour chacun, de compléter sa pension de retraite par de l'épargne retraite. A cet égard, je me rappelle que le gouvernement de Lionel Jospin avait choisi de commander un rapport à M. Charpin. Pour notre part, nous avons préféré élaborer un projet de loi.
Les mécanismes introduits par la réforme, à savoir la retraite anticipée, la décote et la surcote, le PERP - plan d'épargne retraite populaire -, le PERCO - plan d'épargne pour la retraite collectif - contribuent ainsi à introduire plus de liberté et de souplesse dans l'accès à la retraite.
Malgré ces importantes améliorations, vous avez rappelé à juste titre, monsieur Leclerc, que la situation de l'assurance vieillesse justifie une attention continue. Le récent accord sur la réforme du financement du régime spécial des industries électriques et gazières en est un exemple.
Il en va de même concernant la cessation précoce d'activité. La réforme des retraites a marqué une inflexion dans ce domaine, mais il est important que le taux d'activité des seniors s'élève significativement dans les années à venir. En effet, la France est l'un des pays européens qui a le taux d'inactivité le plus important chez les personnes âgées de plus de cinquante-cinq ans, ce qui est évidemment tout à fait anormal. Il s'agit d'un enjeu de taille pour notre société face au défi que représente le vieillissement démographique de notre pays.
Au total, je vous remercie, monsieur Leclerc, d'avoir bien voulu souligner l'esprit de solidarité collective et de responsabilité individuelle qui sous-tend la réforme de l'assurance vieillesse.
Monsieur Cazeau, le MEDEF avait décidé de ne plus siéger au sein des organismes de sécurité sociale, en raison, notamment, du mépris du paritarisme et du détournement des recettes de la sécurité sociale pour financer les 35 heures. Si le patronat a souhaité revenir au sein des instances de gestion de l'assurance maladie, c'est parce que, justement, nous avons rénové le paritarisme.
Nous avons en effet souhaité moderniser la gouvernance des caisses. Même si vous refusez de l'admettre, les réformes structurelles de ce type engagées par le Gouvernement permettent d'opérer le redressement des comptes. Telle est la réalité, monsieur Cazeau. Dans ce projet de loi, il n'y a aucune sous-estimation des dépenses et aucune surestimation des recettes : tout est parfaitement transparent.
Nous n'attendons pas que le changement des comportements dont vous parlez se produise tout seul. Notre réforme crée les conditions de ce changement. Elle permettra la promotion des bonnes pratiques, la responsabilisation des acteurs et la mise en place de tous les outils pour lutter, sur le terrain, contre les abus.
Ainsi l'apposition d'une photographie d'identité sur la carte Vitale permettra-t-elle d'identifier les fraudeurs. Je ne vois pas pourquoi cela vous gêne ni pourquoi il serait anormal de contrôler les arrêts maladie de courte durée.
Mme Raymonde Le Texier. C'est ridicule !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Chaque année, on recense 212 millions de journées non travaillées à la suite d'un arrêt maladie ! Nous ne sommes pas opposés aux arrêts maladie ; nous souhaitons simplement qu'ils ne soient pas synonymes de RTT ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Vous avez repris, monsieur Cazeau, les propos de M. Jean-Marie Spaeth, selon lequel « l'hôpital est fermé à l'assurance maladie ». Mais en participant au conseil de l'hospitalisation et en cosignant les accords de bon usage des soins à l'hôpital, l'assurance maladie va justement devenir un véritable partenaire de l'hôpital. Nous n'avons pas voulu laisser la médecine libérale d'un côté et la médecine hospitalière publique de l'autre. Au contraire, nous cherchons à éviter que ces deux secteurs se tournent le dos, en demandant aux ARH et aux URCAM de travailler ensemble.
En réalité, monsieur Cazeau, vous ne semblez pas tenir compte des avancées de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.
Monsieur Paul Blanc, je vous remercie de votre soutien. Comme le Gouvernement, vous êtes optimiste sur l'avenir de la sécurité sociale. Ce n'est pas la méthode Coué, c'est le résultat de notre détermination et de votre appui. En effet, comme vous l'avez souligné, différents indicateurs relatifs à l'assurance maladie montrent que nous avons raison, ensemble, d'être optimistes.
J'évoquerai demain la mise en oeuvre de la réforme pour faire avec vous un point d'étape.
Monsieur Vanlerenberghe, vous avez raison de dire que nous n'avons fait qu'une partie du chemin s'agissant de la modernisation de notre système de sécurité sociale et du redressement de ses comptes.
Bien que la phase actuelle de mise en oeuvre de ces réformes soit particulièrement exigeante, nous respectons notre feuille de route. Nous nous sommes en effet engagés à ce que 80 % à 90 % des décrets d'application de la loi relative à l'assurance maladie soient prêts au 31 décembre 2004, alors que cette loi, je le rappelle, a été votée en août dernier. Je souhaite, à ce propos, saluer l'action menée par M. Xavier Bertrand dans ce domaine.
S'agissant de l'hôpital et de la démographie médicale, j'aurai l'occasion de vous montrer demain à quel point la réforme engagée par le Gouvernement est cohérente puisqu'elle englobe l'ensemble de l'organisation des soins.
J'espère, monsieur Vanlerenberghe, que le débat permettra de dissiper votre scepticisme sur certaines mesures. Ainsi, en ce qui concerne le dossier médical personnel, nous faisons tout pour qu'il soit complètement mis en place d'ici à 2007.
Quoi qu'il en soit, le dossier médical personnel n'appartiendra ni à une clinique, ni à un hôpital, ni à un médecin : il sera propre à chaque malade, qui passera du secteur public au secteur privé, et du médecin spécialiste au médecin généraliste, et ainsi de suite. Il s'agit donc d'une réforme globale.
Monsieur Fischer, je ne crois pas que l'enjeu, aujourd'hui, soit la recherche de recettes nouvelles. Le niveau élevé des prélèvements obligatoires nous montre bien que les marges de manoeuvre, de ce côté, n'existent pas. Il s'agit bien davantage de maîtriser les dépenses.
Sur les affections de longue durée, je souhaite apporter une rectification à ce que vous avez dit. Tout comme vous, je suis très attaché à leur prise en charge à 100 %. Mais j'espère que vous serez d'accord avec moi pour dire qu'une telle prise en charge doit concerner les soins en rapport avec l'affection. C'est d'ailleurs l'objet même du dispositif des ALD !
Vous continuez à nous prêter des intentions de démantèlement de la sécurité sociale, alors qu'il s'agit exactement du contraire : c'est parce que nous ne voulons ni de la privatisation de la sécurité sociale ni de son étatisation que nous menons cette réforme de l'assurance maladie. Chaque jour, vous pouvez constater que nous oeuvrons pour la préservation d'une sécurité sociale solidaire. A cet égard, l'immobilisme constaté entre 1997 et 2002 a été particulièrement dangereux.
Monsieur Barbier, je veux vous rassurer sur un point : nous serons prêts, en 2005, pour mettre en oeuvre les différentes mesures prévues à cette date, en particulier la contribution forfaitaire de un euro.
S'agissant de la réforme de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le projet du Gouvernement, qui permettra une clarification du vote et une mise en perspective pluriannuelle, me semble répondre à vos attentes.
Monsieur Gouteyron, vous avez vous aussi souligné les motifs qui permettent d'être optimiste s'agissant du redressement des comptes de l'assurance maladie. Vous avez raison, l'année 2005 sera décisive, car nous verrons si les acteurs s'emparent des outils de la réforme et si les changements de comportement que nous pressentons se confirment. Ce sera l'année de vérité.
Comme vous l'avez souligné, nous attachons une attention toute particulière à ce que les décrets soient publiés très rapidement, je le disais à l'instant. J'aurai l'occasion de faire le point demain sur ce sujet. Environ 25 % des textes réglementaires sont déjà prêts et nous nous engageons à en produire entre 85 % et 90 % avant la fin de cette année.
Vous vous êtes également inquiété du financement des mesures nouvelles à l'hôpital.
Les mesures nouvelles de santé publique, en particulier le plan « cancer » et le plan « périnatalité », sont une priorité pour le Gouvernement, et je peux vous assurer, monsieur le sénateur, que nous sommes très vigilants quant à leur financement : elles représentent ainsi plus de 1 % sur les 3,6 % de l'ONDAM hospitalier pour 2005. Ces crédits « fléchés » pour le financement des mesures nouvelles seront particulièrement suivis par les ARH.
Il faut savoir que, chaque fois qu'un plan est élaboré et financé - je pense par exemple au plan « Alzheimer », plutôt bien construit, de Bernard Kouchner ou au plan « urgence » de Jean-François Mattei - il est ensuite envoyé aux ARH et aux directeurs d'hôpitaux. Les crédits sont alors affectés à la cardiologie ou aux services spécialisés, qui sont souvent les mieux représentés à la CME, la commission médicale d'établissement ! Pour les urgences, la gériatrie ou les plans tels que le plan « périnatalité », il ne reste plus rien, alors que le Parlement a voté des crédits en leur faveur.
J'ai donc demandé qu'un point soit fait tous les six mois avec les ARH, région par région, afin de vérifier que l'argent voté a bien été affecté sur le terrain à ce à quoi il était destiné. C'est aussi cela le politique !
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Quant aux mesures de revalorisation des professions hospitalières, elles ont été entièrement financées depuis 2002. Elles ont fait l'objet de financements successifs à hauteur de 1,02 % de l'ONDAM hospitalier en 2002, de 0,73 % en 2003 et de 0,82 % en 2004. La direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, la DHOS, réalise une évaluation régulière de ces mesures dans le cadre du bilan annuel de la campagne budgétaire.
Par ailleurs, monsieur Gouteyron, vous avez évoqué les économies liées aux achats et aux marchés publics.
Le plan d'économie sur les achats à l'hôpital est également rendu possible par la réforme du code des marchés publics applicable depuis le décret du 7 janvier 2004, qui a simplifié la procédure d'achat public en préservant l'égalité d'accès à la commande publique.
Pour ma part, j'ai rencontré un certain nombre de directeurs d'hôpitaux. Par ailleurs, ayant exercé les fonctions de maire, en particulier d'une grande ville, je peux vous dire que, lorsqu'une commune fait déjeuner 22 000 jeunes enfants cinq jours par semaine, elle fait appel à une centrale d'achat et achète des pommes de terre pour toutes les cantines implantées dans ses quartiers, ce qui lui permet de bénéficier de prix réduits. Les cantines ne font pas leurs achats séparément !
Eh bien, figurez-vous qu'il n'existe pas de politique d'achats groupés pour les hôpitaux publics, en particulier s'agissant de l'informatique et de la vie quotidienne ! Or je pense qu'il serait normal qu'une telle politique soit mise en oeuvre dans les hôpitaux publics. La DHOS estime qu'il serait possible de réaliser 750 à 800 millions d'euros d'économie d'ici à trois ans, et ce uniquement grâce à une politique d'achats groupés.
A titre d'exemple, le seuil des marchés publics a été relevé de 90 000 à 230 000 euros pour les fournitures et les services, permettant aux hôpitaux de recourir plus facilement aux marchés négociés, qui garantissent un meilleur résultat économique.
Enfin, monsieur Gouteyron, concernant la suppression de la taxe sur les salaires, le Gouvernement est attentif à toute mesure susceptible d'alléger les charges des établissements de santé, mais il n'est pas favorable à ce que cet allégement s'opère au détriment du budget de l'Etat. Or une telle mesure pourrait difficilement être limitée aux seuls hôpitaux puisque d'autres établissements comme les banques, les assurances et les mutuelles sont aussi soumis à la taxe sur les salaires.
Monsieur Fortassin, vous vous êtes inquiété de notre capacité à réduire durablement le déficit de l'assurance maladie par des mesures concrètes.
Rassurez-vous ! Les premiers résultats positifs apparaissent déjà, qu'il s'agisse de la stabilité des indemnités journalières, que je viens d'évoquer, ou, plus généralement, des prestations versées par l'assurance maladie et dont le rythme de progression est redevenu plus raisonnable.
Cependant, vous avez raison, l'effort doit être poursuivi. Nous sommes d'ailleurs déterminés à mettre en oeuvre l'ensemble des mesures votées par le Parlement cet été. Il est possible, c'est vrai, qu'un effet psychologique doive être pris en compte en 2005. Nous devrons donc attendre l'année 2006 pour savoir si le comportement des Français a réellement changé, ce que je crois profondément.
Monsieur Domeizel, la consultation du Conseil d'orientation des retraites sur les pensions de réversion montre que le Gouvernement a souhaité consulter les acteurs concernés. C'est cela le respect du dialogue social et des partenaires sociaux !
M. Claude Domeizel. Ils ont été consultés après coup !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Sur la base de l'avis du COR, le Gouvernement va engager une concertation pour définir la solution adéquate. Cet après-midi, M. Bertrand a déjà rencontré des partenaires sociaux et nous allons continuer ensemble dans cette voie.
De la même façon, nous avons écouté les responsables de la Caisse nationale d'assurance vieillesse au sujet de la soulte des industries électriques et gazières.
Monsieur Vantomme, vous avez abordé un sujet qui m'est cher, à savoir les TEP scans, les tomographes par émission de positons.
Avant l'été, j'ai effectivement permis que l'on fixe à soixante-quinze le nombre de TEP scans « autorisables ». Mais les projets sont longs à mettre en oeuvre. Actuellement, une soixantaine de TEP scans sont autorisés et une quarantaine sont opérationnels. Comme vous pouvez le constater, nous atteindrons l'objectif de soixante-quinze TEP scans opérationnels avant la fin de l'année 2007.
Je partage votre souci d'un développement d'une politique de santé mentale adaptée aux besoins de nos concitoyens. Je présenterai d'ailleurs très prochainement un plan sur la dépression.
Les défis sont très nombreux. Mes services continuent de travailler à l'élaboration d'un plan global destiné à y répondre.
Avec l'accord des professionnels concernés, j'ai également demandé une définition de la valorisation de l'activité psychiatrique, afin de rémunérer plus justement cette activité, ce qui répond, je crois, à la question que vous posez avec raison sur la pratique de la médecine psychiatrique. Les services de pédopsychiatrie, en particulier, méritent d'être renforcés dans notre pays.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, veuillez m'excuser si j'ai été un peu long, mais je souhaitais vous remercier de la qualité des remarques que vous avez, les uns et les autres, formulées.
Nous aurons l'occasion, demain, de beaucoup reparler de l'assurance maladie. Je tiens cependant à vous dire, aujourd'hui, que je crois à la réforme engagée. En effet, à mon sens, la maîtrise comptable n'était pas la solution ; il fallait une maîtrise médicalisée fondée sur un climat de confiance entre les Français et le Gouvernement, mais aussi entre les professions de santé et le Gouvernement. Il était impossible de faire une réforme contre les professions de santé ! Il fallait la mener avec eux, dans la confiance. A ce titre, les premiers résultats prouvent que nous avions raison. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance. Monsieur le président, je répondrai à quelques-uns des intervenants.
Monsieur le rapporteur André Lardeux, vous avez dressé un panorama complet de la branche famille et des mesures contenues dans ce projet de loi de financement, et je vous en remercie.
S'agissant des allocations logement, je comprends votre préoccupation. Certes, la taille de la famille est déjà un critère qui entre en considération dans la détermination du niveau de l'aide au logement. Pour autant, nous allons travailler, dans le cadre de la Conférence de la famille 2005, à une meilleure prise en compte de la présence de l'enfant pour le calcul de l'aide. Une remise à plat des barèmes sera étudiée à cette occasion.
J'ai bien noté votre souhait d'associer la représentation nationale à ces travaux : ce sera le cas cette année comme ce le fût l'an dernier.
Vous avez évoqué le transfert de la gestion des prestations familiales des agents de l'Etat aux caisses d'allocations familiales. Je tiens à vous préciser que j'ai veillé à ce que l'Etat compense les dépenses qu'il avait précédemment à sa charge, c'est-à-dire la prestation de service crèches.
Les agents de l'Etat vont, en outre, bénéficier de nouvelles actions - je pense aux centres de loisirs - mais pas de l'action sociale individuelle, qui restera à la charge de l'Etat. C'est pourquoi il a été retenu un taux intermédiaire de 5,3 %, se situant entre 5,2 % pour l'Etat actuellement et 5,4 % pour les salariés du régime général.
J'ajoute que la question des moyens de gestion de la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, comme je l'ai indiqué lors de son conseil d'administration, sera abordée dans le cadre de la prochaine convention d'objectifs et de gestion.
S'agissant de la Conférence de la famille 2005, j'attache comme vous beaucoup d'importance aux aspects sociétaux de la politique familiale. J'ai ainsi souhaité que cette Conférence aborde la situation des familles fragiles ou fragilisées, dans tous les cas vulnérables, que sont les familles dont les enfants sont élevés par un seul parent - nous savons que les foyers monoparentaux cumulent un certain nombre de handicaps - ou dont la situation économique des parents s'est brutalement dégradée.
La Conférence de la famille 2005 traitera également des enjeux démographiques. Ma préoccupation est d'aider chaque couple à réaliser ses projets de vie en terme de nombre d'enfants désirés, l'arrivée d'un enfant ne devant en aucun cas fragiliser la famille, quelle qu'elle soit.
S'agissant de l'universalité de la politique familiale, cette politique doit bien entendu profiter à toutes les familles sans exception. A cet égard, je souhaite rappeler que la création de la PAJE, la prestation d'accueil du jeune enfant, a permis de faire tendre à nouveau les aides à l'accueil du jeune enfant vers cette dimension universelle que vous avez appelée de vos voeux.
Vous l'avez évoqué, 90 % des familles peuvent désormais bénéficier de la PAJE, soit 200 000 familles supplémentaires.
Monsieur Jégou, le doublement de la prime d'adoption est une mesure importante, qui s'insère dans la réforme mise en place pour mieux aider les familles adoptantes.
J'ai dit, dans mon propos initial, que cette mesure ne visait pas forcément à compenser les frais engagés par certains parents adoptants, amenés à se déplacer à l'étranger, mais qu'elle traduit l'intérêt du Gouvernement à leur égard.
D'autres formules pourront être trouvées pour aider les parents. La création de l'AFA, l'Agence française de l'adoption, doit permettre d'ores et déjà de faciliter les déplacements à l'étranger et de raccourcir les séjours grâce à la mise en place d'accueils consulaires organisés.
En outre, la montée en puissance de la PAJE portera à 350 millions d'euros les financements supplémentaires destinés aux familles en 2005, contre 140 millions en 2004. Cet effort financier très important permettra d'accroître le pouvoir d'achat des familles.
Sur le plan de la cohérence de la politique familiale, j'ajoute que la PAJE est une mesure structurante de l'offre de garde : elle améliore les prestations individuelles existantes, elle met l'accent sur les moyens collectifs de garde avec le plan crèches de 200 000 places nouvelles et elle facilite l'implication des entreprises pour diversifier et élargir les structures de garde.
Monsieur Paul Blanc, je vous remercie pour votre soutien et pour l'intérêt que vous avez porté aux travaux préparatoires de la Conférence de la famille 2004 et aux mesures annoncées ensuite.
Cette Conférence a permis de rendre plus lisible la politique en faveur des adolescents. Nous avons privilégié une approche globale de l'adolescence, ce qui a d'ailleurs été reconnu par l'ensemble des partenaires sociaux et des mouvements familiaux lors de la Conférence de la famille du 29 juin dernier.
En effet, nous avons pris des mesures valorisant l'engagement personnel des adolescents, en favorisant leur entrée dans la vie associative ou leur engagement civique. Nous faciliterons leur accès à des jobs de vacances pour stimuler leur connaissance du monde du travail grâce à une exonération inscrite au projet de loi de finances pour 2005. Nous allons également favoriser leur accès aux activités culturelles et de loisirs.
Sur le plan de la santé, le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit la mise en oeuvre des entretiens de santé en classe de cinquième. Je serai amenée à y revenir tout à l'heure en répondant à une oratrice.
Enfin, la généralisation des maisons de l'adolescence illustre notre volonté de ne pas enfermer les problèmes de l'adolescence dans une approche uniquement médicale, car ces maisons ont vocation à répondre à l'ensemble des attentes des adolescents et de leur famille en matière de soins, d'écoute et d'information.
Le projet de loi de finances pour 2005 prévoit à cet égard des financements nouveaux pour aider au démarrage de ces structures. Des appels à projets émanant de mon ministère sont actuellement lancés.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, la mise en oeuvre des mesures préconisées lors de la Conférence de la famille 2004 est bien engagée et nous souhaitons votre participation, ainsi que celle d'un certain nombre de vos collègues, aux réflexions préparatoires à la Conférence de la famille 2005.
Madame Campion, vous avez évoqué le financement des associations familiales.
Dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale sont créées deux enveloppes pour le financement du fonctionnement des unions familiales, d'une part, et de leurs interventions, d'autre part. Notre objectif est la maîtrise financière et la clarification, et surtout pas la remise en cause de ces unions.
S'agissant de l'évolution de l'APE, l'allocation parentale d'éducation, la mise en place du complément d'activité de la PAJE est très positive, quoi que vous en disiez.
Premièrement, cette aide profite désormais aux parents qui ont un premier enfant : c'est une évolution majeure, dix ans après l'ouverture de l'APE aux enfants de rang 2.
Deuxièmement, cette aide a été augmentée significativement de 15 % pour les parents qui exercent une activité professionnelle à temps partiel.
Enfin, la règle qui exige que les mères aient eu deux années d'activité professionnelle n'est pas aussi stricte que vous avez bien voulu le dire, car les périodes de congé maternité, les périodes de formation ou encore les périodes de chômage sont également prises en compte.
Vous avez souhaité un bilan de la PAJE. Je vous le donne bien volontiers.
Les CAF ont été en mesure de verser la PAJE, sans délai, dès le début du mois de janvier 2004, conformément aux engagements pris.
Le nombre de primes à la naissance ou à l'adoption, versées chaque mois depuis le début de l'année, est d'environ 50 000.
Plus de 550 000 familles ont bénéficié de l'allocation de base, dont plus de 1 000 au titre d'une adoption.
Dans 43 % des cas, l'allocation de base est versée pour la naissance d'un premier enfant.
Enfin, 75 000 familles ont perçu le complément d'activité, dont 25 % pour le premier enfant, 46 % pour le deuxième et 29 % pour un enfant de rang 3 ou plus.
Dans un cas sur cinq, la prestation est perçue à taux réduit, car le parent bénéficiaire a choisi le travail à temps partiel plutôt que l'arrêt total d'activité. Ce choix est plus fréquent pour l'enfant de rang 1, soit 28 % des cas, que pour l'enfant de rang 2, soit 23 % des cas, ou de rang 3 ou plus, soit 13 % des cas.
S'agissant du complément de libre choix du mode de garde, le chiffre de 100 000 bénéficiaires a été atteint le 26 octobre dernier : nous avons accueilli la personne concernée au Puy-en-Velay.
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
Mme Marie-Josée Roig, ministre. La PAJE, qui a contribué à revaloriser le montant des aides perçues par les familles et à simplifier les démarches administratives, va nécessairement dynamiser l'embauche dans le secteur des assistantes maternelles. On sait, par exemple, que le chèque emploi service a permis la création de 100 000 emplois nouveaux grâce aux modes simplifiés de déclaration qu'il met en oeuvre.
Grâce à la PAJE, fin septembre 2004, plus de 48 000 salariés avaient déjà été embauchés, dont 45 000 assistantes maternelles et 3 000 salariés à domicile.
J'ajoute qu'aucun mode de garde en particulier n'est privilégié par rapport à un autre : toutes les familles sont aidées, quels que soient leurs revenus et quel que soit leur choix de garde pour leur enfant. En effet, la PAJE offre une solution pour chaque parent, qu'il souhaite s'arrêter de travailler ou seulement réduire son activité professionnelle.
Le principe essentiel qui a inspiré la réforme des aides à l'accueil du jeune enfant a consisté à rendre équivalent pour chaque famille le coût des principaux modes de garde, c'est-à-dire la crèche et l'assistante maternelle, qui concernent aujourd'hui près de 800 000 enfants de moins de trois ans.
Désormais, le coût de ces deux modes de garde est approximativement le même et représente en moyenne 12 % des revenus d'une famille, quel que soit le montant de ces revenus.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par Mme Borvo, MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'une motion n° 137, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2005 (n° 53, 2004-2005).
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Guy Fischer, auteur de la motion.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une fois encore, le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui nous est soumis ne peut appeler, par la présentation de cette motion tendant à opposer la question préalable, qu'un rejet global des dispositions qu'il contient.
Il serait même presque inutile, à l'issue de la discussion générale, de revenir encore plus précisément sur quelques-unes de ces dispositions. En effet, ce projet paraît accuser cette année un caractère profondément technique, dénué de tout élément de réforme ou véritablement spectaculaire, l'essentiel ayant été fait : c'est une sorte de projet de loi tout à fait ordinaire, si l'on peut dire.
Pour autant, ce dont il est question aujourd'hui, ce n'est pas seulement d'un dispositif purement technique, susceptible de motiver un large consensus de la représentation nationale, c'est de la mise en oeuvre, comptable et surtout financière, des deux « réformes » dont nous avons eu l'occasion de débattre au cours de ces deux dernières années, au détour de sessions extraordinaires à plus d'un titre, portant d'abord sur le devenir de notre assurance vieillesse et ensuite sur celui de notre assurance maladie.
Mais ce qui revient aussi fortement dans nos débats, ce qui sous-tend leur contenu, ce qui est bel et bien l'essentiel, de notre point de vue, c'est la question suivante : que devient en réalité le droit du Parlement à débattre de la protection sociale dans une loi de financement aussi étroitement bornée que celle dont nous aurons, à défaut d'adopter cette question préalable, à discuter ?
Je ferai donc en préliminaire un petit rappel historique sur ce que le gouvernement en place de 1995 à 1997, dans la foulée du plan Juppé, a voulu faire des lois de financement.
A l'époque, M. Hervé Gaymard, ministre délégué, déclarait : « Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez examiner le projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale. Il est inutile d'insister auprès de vous sur l'importance de ce texte, qui se situe au coeur de la réforme de la sécurité sociale.
« Vous savez également à quel point il est nécessaire que la première des lois de financement de la sécurité sociale puisse être présentée au Parlement dès l'automne prochain. Loin de remettre en cause la réforme, les chiffres récemment publiés par la commission des comptes de la sécurité sociale soulignent l'impérieuse nécessité de conduire le navire à bon port.
« Au-delà des aléas de la conjoncture, le redressement des comptes et la sauvegarde de notre système de sécurité sociale exigent courage, constance et persévérance. Comme toute réforme de structure, la réforme de la sécurité sociale doit être jugée sur le long terme.
« Mais aucune solution durable et réaliste n'est plus concevable en ce domaine sans que la représentation nationale soit mise en mesure d'effectuer régulièrement et solennellement les choix fondamentaux.
« Il appartiendra ensuite aux pouvoirs publics, aux partenaires sociaux, aux professions de santé et, en définitive, aux assurés sociaux de faire leurs les objectifs que vous voterez. En effet, seul le Parlement dispose de la légitimité qui permettra d'arbitrer sereinement entre les exigences de protection sociale de nos concitoyens et les contraintes économiques et financières qui s'imposent à tous. »
Le moins que l'on puisse dire, une fois rappelée cette conception générale des lois de financement, c'est que nous en sommes loin aujourd'hui.
Après quelques années de répit, dues à la relance de l'activité économique entre 1997 et 2001, la protection sociale se retrouve de nouveau, et singulièrement depuis 2002, dans une situation financière préoccupante, puisque tout a basculé dans le déficit.
Et quelles réponses nous a proposé votre Gouvernement ?
Sur le plan comptable et financier, l'augmentation des prélèvements sur les ménages et la réduction de la quotité des remboursements.
Sur le plan institutionnel, une sophistication approfondie du contrôle technocratique qui s'accentuera par le biais du renforcement des pouvoirs des directeurs d'agences régionales d'hospitalisation, la création de la Haute autorité de santé et in fine la négation des droits de la représentation nationale, celle-ci n'étant habilitée qu'à observer cette montée en puissance de la technocratie sociale...
M. le ministre continuait : « Il en va ainsi de la conception des lois de financement : il s'agira de lois courtes, qui comporteront une double dimension politique et financière. En effet, ces deux caractéristiques les distinguent des lois de finances. »
M. Gaymard a d'ailleurs précisé, à la suite de l'interrogation de M. le président de la commission des affaires sociales, qu'il n'était pas question de fusionner la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Vous êtes d'accord, monsieur Fischer ?
M. Guy Fischer. Je poursuis la citation de M. Gaymard : « Ce seront des lois courtes, tout d'abord. Il n'est en effet pas question de retracer avec précision l'ensemble des comptes des organismes de sécurité sociale.
« Les dépenses de la sécurité sociale ne sont pas assimilables à des crédits limitatifs, et les objectifs votés par le législateur seront déclinés avec l'ensemble des acteurs de notre protection sociale.
« Par ailleurs, la dimension politique des lois de financement est fondamentale. Le Parlement doit être mis en mesure d'approuver les orientations politiques qui fondent les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses.
« Quel sens aurait le vote de prévisions de recettes et d'objectifs de dépenses si le Parlement n'était conduit à se prononcer au préalable sur les orientations et les objectifs de la politique de santé et de sécurité sociale qui les sous-tendent ? »
Cette citation est significative et pleine de sens !
S'agissant de la brièveté, nous sommes assez loin du compte, au vu de la floraison intéressante d'articles divers que nous avons pu observer ces dernières années lors de la discussion des lois de financement.
Pour preuve, la loi de financement pour 2003 comportait 68 articles et la loi de financement pour 2004 en comptait 76.
Le présent texte, s'il est adopté plus ou moins en l'état, dépasserait probablement la cinquantaine d'articles.
Mais, au-delà, comment ne pas également mettre en évidence quelques points essentiels ?
La première loi de financement de la sécurité sociale date effectivement de l'automne 1996. Et, depuis, nous en débattons régulièrement, l'exercice faisant partie du programme imposé de nos nuits de fin d'année.
Or, depuis cette date, comment ne pas regretter, encore et toujours, que la démocratie sociale soit autant en panne qu'il y a vingt ans ? Voilà en effet vingt ans que les assurés sociaux eux-mêmes, premiers concernés par le devenir de notre système de sécurité sociale, sont exclus de toute possibilité de dire leur mot, parce qu'on n'a plus, depuis cette date, organisé d'élections aux conseils d'administration des caisses.
Les agriculteurs, eux, tiennent comme à la prunelle de leurs yeux à l'élection. Chaque fois que nous participons aux réunions organisées par Mme la présidente de la mutualité sociale agricole, nous le constatons. Outre qu'elle est la base, la source de la proximité, l'élection nourrit la vie de la mutualité sociale agricole, n'est-ce pas, monsieur Juilhard ?
M. Jean-Marc Juilhard. Tout à fait.
M. Guy Fischer. Il pourrait en être de même pour les assurés sociaux.
Aujourd'hui le cadre institutionnel prive la représentation nationale de tout rôle réel d'impulsion dans les choix opérés en matière de protection sociale, ces droits étant, à notre sens, confisqués par des autorités prétendument indépendantes, mais soumises in fine aux impératifs comptables et financiers dont nous avons maintes fois dénoncé les dangers, et prive les assurés sociaux de tout poids au travers de mandants qu'ils auraient élus.
En effet, comment ne pas rappeler, et cela ne fait pas nécessairement la une de l'actualité de cette rentrée parlementaire, que la traduction concrète de cette loi de financement et des réformes dont elle constitue la mise en musique, c'est la hausse de la CSG, qui touchera des millions de Français de diverses catégories ? Ils l'ignorent encore. Pour les salariés comme pour les retraités, c'est la réduction des remboursements et la forfaitisation -on y viendra, bien que M. le ministre s'en défende - prétendument pédagogique, du coût de la médecine de ville au travers du paiement d'un euro par visite.
Notre protection sociale est à la croisée des chemins. Tout ce qui a été fait depuis vingt ans, notamment ces deux dernières années, concourt à dégrader le lien entre la population et le système de protection sociale, noyant ses fondements humanistes et solidaires dans une logique comptable, fortement individualiste, source de nouvelles inégalités dans l'exercice des droits constitutionnels à la santé, à la protection de l'enfance et de la famille, à celle des personnes âgées.
De ce point de vue, à notre sens, la présente loi persiste et signe. Comment ne pas également souligner que, sur les plans strictement comptable et financier, l'accroissement des difficultés de la protection sociale va de pair avec la montée en puissance des recettes fiscales affectées à son financement ? C'est comme si la rupture progressive du lien entre, d'une part, le lieu de création de richesses, l'entreprise, et, d'autre part, la sécurité sociale ne conduisait in fine à cette dégradation. Certains diront que je radote, que je suis ringard... (Exclamations.)
M. Paul Blanc. Péché avoué est à demi pardonné !
M. Guy Fischer. Une véritable réforme de la protection sociale doit recouvrer, de manière évidente, d'autres caractéristiques.
Force est de constater que certains, en cette matière, ne manquent pas d'imagination.
Pas plus tard que la semaine dernière, certains de nos éminents collègues de la majorité sénatoriale, membres de la commission des finances, ont poussé les feux de la mise en place de la TVA sociale, dispositif qui détacherait encore un peu plus le financement de la protection sociale du lieu de création de richesses et ferait, pour le salarié, de l'acte de consommer une occasion de payer deux fois sa protection sociale. Le débat a lieu, M. Vanlerenberghe l'a souligné, c'est l'une de ses propositions.
Pour ce qui nous concerne, c'est d'une tout autre réforme dont a besoin notre système de protection sociale.
Cette réforme revenant sur le contenu de la réforme des retraites, dont nous retrouvons cette année, par le dispositif mis en place pour la soulte EDF ou la retraite anticipée des agents des collectivités territoriales, une nouvelle traduction, et sur celle de l'assurance maladie, on doit d'abord s'accorder sur des objectifs fondamentaux visant à l'universalité des prestations servies, à la qualité des soins, à l'égalité entre les assurés, au renforcement continu des solidarités intergénérationnelles et interprofessionnelles.
S'agissant des ressources de la protection sociale, cette réforme doit sortir de manière déterminée des politiques de fiscalisation des ressources aujourd'hui largement développées et dont le pendant est in fine l'abaissement des garanties collectives.
Le meilleur exemple ne nous est-il pas fourni par notre système d'allocations familiales, largement fiscalisé, et qui vient, entre autres mesures, de se voir imposer une réforme des aides personnelles au logement qui en réduit la portée pour les ménages allocataires ?
C'est en ce sens qu'il est grand temps de penser à une réforme du financement de la protection sociale tendant notamment à la modulation des cotisations perçues à partir de l'entreprise et favorisant la création d'emplois et de richesses au détriment des stratégies fondées sur la recherche de la rentabilité financière de court terme, dont les dégâts sociaux sont à l'origine d'une bonne part des recettes insuffisantes de notre protection sociale. C'est l'explosion de la précarité !
En cette période de relative incertitude économique - la croissance n'étant manifestement pas à la base d'une amélioration de la situation de l'emploi, loin de là, il n'y a que le Premier ministre pour réaffirmer le taux de 2,5 % en 2005 ! - la qualité de notre système de sécurité sociale est déterminante pour renforcer et consolider le lien social, prévenir les exclusions et assurer, pour chacun, le plein exercice de ses droits.
Cette loi de financement tourne le dos à ces exigences fondamentales et ne répond pas aux besoins collectifs de la population.
C'est donc tout naturellement que nous ne pouvons que vous inviter à adopter cette question préalable conduisant au rejet de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Personne ne s'étonnera que la commission des affaires sociales soit défavorable à l'adoption de la question préalable défendue par notre collègue M. Fischer.
Pour ma part, je relèverai simplement qu'il a plaidé très fortement en faveur du vote d'une future loi organique.
Je pense que le rendez-vous qui nous sera fixé par le Gouvernement d'ici à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine nous permettra de recueillir sur l'ensemble des bancs de l'assemblée une quasi-unanimité pour voter la loi organique, y compris de la part de M. Fischer et de ses amis.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Certainement !
M. Guy Fischer. On en reparlera !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Merci d'avance !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout le reste de son propos était un procès d'intention et une critique nous amenant aux antipodes de ce que nous proposons et de ce que propose le Gouvernement.
Chacun comprendra qu'il n'est pas possible de suivre M. Fischer dans ses propositions, notamment dans le vote de la question préalable. C'est pourquoi la commission est défavorable à cette motion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. L'avis est très proche de celui de M. le rapporteur. En effet, monsieur Fischer, avec la nouvelle gouvernance de l'assurance maladie, nous redonnons de la légitimité au paritarisme - que nous avons même rénové - et à la démocratie sociale dans la gestion de la sécurité sociale.
Oui, monsieur Fischer, le financement de la sécurité sociale évolue suivant la logique d'universalisation de la couverture. Cela ne me paraît pas scandaleux, bien au contraire.
S'il est toujours utile de réfléchir au financement de la sécurité sociale et à ses évolutions, je ne crois pas que les solutions que vous proposez répondent aux besoins de notre système : prévoir toujours plus de dépenses et toujours plus de prélèvements obligatoires ne me paraît pas pertinent.
J'émets donc un avis défavorable sur cette motion tendant à opposer la question préalable.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 137, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
(La motion n'est pas adoptée.)
Demande de renvoi à la commission
M. le président. Je suis saisi, par Mme Le Texier, MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n° 136, tendant au renvoi à la commission.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires sociales, le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2005 (n° 53, 20042005).
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier, auteur de la motion.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à mon grand regret, je crains de devoir répéter ce qui a déjà été dit par de précédents intervenants, mais il me revient de combattre à mon tour un projet de loi inadapté, injuste, voire dangereux.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est si mal conçu que, à l'Assemblée nationale, les députés appartenant à l'UDF ont refusé de voter en faveur de son adoption,...
Mme Raymonde Le Texier. ...tandis que les économistes de la santé doutent de sa pertinence et critiquent tant l'analyse des difficultés que les remèdes choisis.
Mais surtout, les Français redoutent que ce gouvernement ne soutienne le pilier de notre pacte social dont il s'agit ici comme la corde soutient le pendu. Au vu des mines réjouies et gourmandes des dirigeants des systèmes d'assurance privée et des responsables de l'industrie pharmaceutique, on ne peut s'empêcher de partager ce sentiment...
Cela étant, nous sommes ici avant tout pour faire oeuvre de raison. Or force est de constater que lorsque l'on s'éloigne du sentiment pour interroger les faits, ceux-ci confirment les appréhensions et redoublent les craintes.
Que penser, en effet, d'un projet de loi conçu selon une logique purement comptable, qui met en scène le déficit de façon dramatique sans en analyser les causes ? Que dire d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui ne s'appuie sur aucun objectif en matière de politique de santé publique, ne trace aucune perspective pour l'avenir, n'établit même pas de solution de financement pérenne ? Que comprendre d'un texte qui, plutôt que de répondre à des problèmes, préfère désigner des coupables ? Nul n'ignore à quel point le choix d'un bouc émissaire permet de faire l'économie des vraies réformes de structure. Puisque le lobby de l'industrie pharmaceutique et des praticiens est puissant, on a choisi de stigmatiser les assurés sociaux.
A défaut d'être juste, le choix est habile. Nous sommes tous des assurés sociaux, mais, tout le monde le sait, celui qui triche, c'est toujours l'autre. C'est toujours à cause de l'autre que l'on est moins bien remboursé, que le régime va mal... Si ce n'est pas là une manière de casser la solidarité, cela y ressemble fort.
Cependant, nous ne doutons pas que des solutions de remplacement existent : les assurances privées sont là pour prendre le relais et substituer à la protection collective et à la justice sociale la couverture individuelle et l'intérêt personnel.
Monsieur le ministre, la présentation aux représentants du peuple d'un projet injuste socialement, inefficace financièrement et inadapté au regard des enjeux pourrait susciter l'ironie. Malheureusement, la considération que nous avons pour vos capacités, loin de nous conduire à penser que vous n'êtes pas à la hauteur de la situation, nous convainc de vos mauvaises intentions. (M. le ministre sourit.)
Ce projet de loi, ni fait ni à faire, nous donne à penser que tout cela, loin d'être le fruit d'une indigence politique, est voulu, orienté, orchestré.
Mme Raymonde Le Texier. Le but est le suivant : organiser la faillite du système pour mieux livrer au marché un secteur stratégique et rentable, quitte à laisser sur le bord de la route une partie de nos concitoyens.
Mme Raymonde Le Texier. L'examen des faits est, à cet égard, probant. Vous employez d'ailleurs une tactique simple mais redoutable. Un vieux proverbe dit : « Qui veut tuer son chien l'accuse de la rage. » ; votre mise en scène mélodramatique du déficit m'y fait penser. Parler de trou « abyssal », affirmer qu'il se creuserait au rythme de 23 000 euros par minute, c'est non pas une manière saine d'aborder les difficultés, mais une façon brutale de susciter la peur.
Mme Raymonde Le Texier. Or de la peur naît la soumission. En évoquant le pire, on contraint les gens à accepter n'importe quoi, au nom de la préservation du système.
Mme Raymonde Le Texier. Pourtant, nul ne conteste la nécessité de réformer notre système de sécurité sociale. Mais alors que nous posons la question du maintien du principe de solidarité, du sens de la réforme, du mode de financement, vous n'abordez les problèmes qu'en termes d'économies de services, sous un angle purement comptable. A l'examen objectif, vous avez préféré la posture idéologique. Toutefois, à vouloir maîtriser les dépenses sans toucher aux ressources, vous faites oeuvre de liquidateur plus que de gestionnaire, et en instruisant à charge contre les assurés sociaux, vous faites surtout l'impasse sur l'étude de sources de financement durables et équitables.
C'est ce constat qui a motivé le dépôt de cette demande de renvoi à la commission. Ainsi, la collecte des recettes auprès des entreprises est notoirement insuffisante. Les exonérations de cotisations et de charges représentent aujourd'hui près de 20 milliards d'euros. Or, puisque l'on demande aux citoyens de revoir leur contribution à la hausse, pourquoi les entreprises ne participeraient-elles pas à l'effort collectif ? N'est-il pas temps à présent d'accroître les cotisations sociales prélevées sur les bénéfices et d'en affecter directement le produit à l'assurance maladie ?
Vous vous gardez également d'évaluer l'incidence de l'aggravation du chômage sur le déséquilibre des comptes. Une telle attitude est étonnante lorsque l'on sait que 100 000 emplois créés représentent un milliard et demi d'euros de recettes supplémentaires, soit l'équivalent de ce que rapporterait un point d'augmentation de la masse salariale. D'ailleurs, l'amélioration des comptes de la sécurité sociale entre 1997 et 2001 est à porter au crédit de la politique volontariste en matière d'emploi menée par le gouvernement Jospin.
Quant à la théorie selon laquelle la baisse des charges des entreprises viserait à réduire le coût du travail pour mieux relancer l'emploi, elle ne se vérifie guère dans les faits. Malgré la multiplication des allégements fiscaux consentis, le nombre des chômeurs ne cesse d'augmenter. Est-il juste que les assurés sociaux paient pour les échecs de votre politique et supportent les conséquences de votre obstination dans l'erreur ?
S'agissant de l'augmentation de la productivité, elle a surtout permis l'accroissement considérable des profits financiers, au détriment des salaires et des cotisations sociales. Ces derniers représentaient 80 % du PIB il y a vingt ans ; aujourd'hui, leur part est inférieure à 70 %. Cette différence représente 150 milliards d'euros.
Enfin, comment comprendre la culpabilisation des patients, devant l'indulgence dont vous faites preuve envers certaines professions de santé et l'industrie pharmaceutique ? D'un côté, on augmente la CSG, la CRDS et le forfait hospitalier, on réclame une franchise de 1 euro, on dérembourse les médicaments et on restreint l'accès aux soins ; de l'autre, on renonce à toute tentative de maîtrise médicalisée des dépenses, on revalorise actes et tarifs sans contrepartie et on ne s'interroge jamais sur le scandale que constitue la notion de secteur conventionné à honoraires libres. Là encore, aucune piste n'a été explorée.
Quant à l'industrie pharmaceutique, dont la puissance du lobby explique manifestement l'opacité de fonctionnement, elle réussit une fois encore à échapper au débat sur le prix du médicament, le coût de la recherche et la qualité de l'innovation.
Les politiques de prévention, sources d'économies à terme, sont réduites à la portion congrue. La mise en place d'une politique volontariste de santé publique à l'école ou au travail, axe susceptible de permettre une évolution durable des comportements, est pour sa part oubliée.
Le pire, c'est que si le menu est maigre et indigeste, ses effets en vue de la diminution de l'addition sont négligeables, certaines mesures annoncées se révélant même fort onéreuses dans un premier temps.
C'est ainsi que l'idée de la franchise de 1 euro s'avère délicate, voire impossible, à mettre en oeuvre, et que le projet de dossier partagé, pour intéressant qu'il soit, n'en est pas moins coûteux à mettre en place.
Il en va de même pour votre politique hospitalière : vos annonces concernant les économies projetées sont non seulement fantaisistes, mais choquantes. Monsieur le ministre, aucun Français n'ignore que la situation des hôpitaux est pour le moins tendue, voire à la limite de la rupture dans certains départements, le Val-d'Oise, par exemple, dont je suis l'élue. Peut-être l'ignorez-vous : malgré les efforts constants des administrateurs et du personnel, le déficit de l'hôpital d'Argenteuil atteint 17 millions d'euros. Mais après tout, qu'est-ce que 17 millions d'euros, quand on sait que le déficit cumulé de l'ensemble des hôpitaux s'élève cette année à 650 millions d'euros ?
L'écart entre le montant des crédits accordés et les besoins pour assurer la simple reconduction des moyens s'accroît de plus en plus. Oui, monsieur le ministre, l'hôpital connaît aujourd'hui un sous-financement qui atteint ses limites. Or vous, vous voulez faire mieux avec moins ! Ce n'est pas crédible. D'ailleurs, la Fédération hospitalière de France a été très claire sur ce point. Alors que vous annoncez 850 millions d'euros d'économies sur trois ans, dont 150 millions d'euros en 2005, cela en jouant uniquement sur la politique d'achat, elle dénonce une extrapolation fondée sur une étude qui concerne dix hôpitaux représentant moins de 2 % des achats. D'accord pour réaliser des économies à partir d'une meilleure politique d'achat, la Fédération hospitalière de France réclame néanmoins que « les objectifs soient sérieux ».
Le taux de progression des dépenses de santé que vous avez défini n'est d'ailleurs pas plus pertinent que vos objectifs d'économies au détriment de l'hôpital public. Vous l'avez fixé à 3,2 %, alors qu'il s'établit en tendance, ces dernières années, à environ 5,5 %. La Cour des comptes n'a pas manqué de relever son caractère fantasmatique : « l'ampleur de l'accélération de certaines dépenses d'assurance maladie est d'autant plus préoccupante que les efforts de maîtrise et de contrôle sont loin d'être à la hauteur des enjeux ».
Bref, avec des projections en matière de dépenses aussi sous-évaluées, ce plan sans perspective politique ne répond même pas au problème du déficit. Celui-ci est évalué à 10 milliards d'euros pour les années 2005 et 2006, et à 15 milliards d'euros pour 2007. Dans ces conditions, qui va payer ? A cette question, par l'inanité de votre plan, vous répondez : nos enfants et nos petits-enfants. Voici ce qu'en dit l'économiste de la santé Jean de Kervasdoué : « Ce qui est nouveau, c'est que l'Etat se défausse d'avance pour les déficits futurs. Il croit tellement peu à son plan qu'il le fait financer par les générations futures. »
Ainsi, monsieur le ministre, votre projet de loi de financement de la sécurité sociale n'est pas seulement irréaliste, il est aussi désinvolte, tronqué et injuste. Oserai-je le dire : si nous sommes aujourd'hui au bord du gouffre, avec de telles réformes, nous allons faire demain un grand pas en avant...
Pourtant, vous aviez les moyens de réaliser une réforme à la fois ambitieuse et juste, à la hauteur des enjeux. En effet, le rapport du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie établit un diagnostic clair et partagé. Il est dommage que votre réponse ne l'ait pas pris en compte.
Nos propositions, quant à elles, s'appuient à la fois sur ce diagnostic et sur les motifs de l'ordonnance du 4 octobre 1945, texte fondateur de notre sécurité sociale. Elles visent à réaffirmer la solidarité entre les personnes, les générations et les territoires, en instaurant une vraie politique de santé publique, en relançant le travail sur la prévention, en rééquilibrant la couverture du territoire national par les établissements de santé, en mettant en oeuvre la maîtrise médicalisée des dépenses, en stabilisant les sources de financement, en élargissant la contribution des entreprises, et surtout en mettant en place une vraie politique de lutte contre le chômage...
Ces pistes de travail, nous venons de vous les présenter. Parce que la sécurité sociale est un pilier de notre contrat social, laisser filer les déficits pour mieux justifier une privatisation pour cause de faillite constitue une menace pour la stabilité de notre société. C'est pourquoi, plus qu'une affaire de procédure, renvoyer ce projet de loi à la commission est une question de responsabilité, un acte qui conditionne l'avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. L'avis de la commission sera le même que pour la motion tendant à opposer la question préalable précédemment exposée par M. Fischer, la demande de renvoi à la commission formulée par Mme Le Texier ne m'apparaissant pas mieux fondée.
Les propos tenus par Mme Le Texier pendant quinze minutes ont permis à chacun de se rendre compte qu'il ne s'agissait pas réellement d'une demande de renvoi à la commission, mais que c'était plutôt une occasion pour le groupe socialiste de prolonger la discussion générale et d'émettre encore des avis complémentaires. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Paul Blanc. Eh oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Mes chers collègues, la motion tendant au renvoi à la commission n'est pas fondée. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Autant j'ai trouvé la teneur générale de l'intervention de M. Fischer argumentée et sérieuse, même si je n'étais pas d'accord avec lui, autant je suis surpris par ce que je viens d'entendre.
Madame la sénatrice, comment osez-vous reprocher au ministre de la santé et de la protection sociale de dire que le déficit est de 23 000 euros par minute et faire croire que c'est pour culpabiliser les Français ? Je ne cherche à culpabiliser personne. Je dis simplement la vérité.
Ce n'est pas parce que, entre 1997 et 2002, vous n'avez rien fait que nous n'allons pas agir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) La vérité fait mal, c'est vrai !
Je peux comprendre que le plan que nous avons mis en place ne corresponde pas à celui que vous souhaitiez - cela s'appelle la démocratie -, mais il fallait un plan.
Il convient, bien évidemment, d'aider l'hôpital. D'ailleurs, nous allons lui apporter plus de 2 milliards d'euros cette année. Mais si l'on peut réaliser des économies - sans pour autant rationner les dépenses -, il faut les faire.
Tout euro public dépensé doit être efficace. Ce n'est pas pour moi, ce n'est pas pour les comptes de la nation, ce n'est pas pour le pacte de stabilité, c'est tout simplement pour les malades. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à la motion tendant au renvoi à la commission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 136, tendant au renvoi à la commission.
(La motion n'est pas adoptée.)
M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion des articles.
Mes chers collègues, conformément à la motion d'ordre, que nous avons adoptée en début d'après-midi, nous allons maintenant aborder les articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 concernant les équilibres financiers et figurant dans les titre II, V et VI.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
Article additionnel avant l'article 2
M. le président. L'amendement n° 103, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport du Gouvernement sur l'affectation des droits sur l'alcool et sur le tabac en direction de l'assurance maladie est transmis au Parlement le 1er septembre de chaque année.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. La dernière loi relative à l'assurance maladie, qui a été votée cet été, a prévu, via la loi de finances, de transférer 1 milliard d'euros de droits sur les tabacs à l'assurance maladie. Mais ce transfert reste bien en deçà de la demande du reversement des quelque 10 milliards d'euros de taxes sur les tabacs et alcools, comme le notait d'ailleurs M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis du projet de loi relatif à l'assurance maladie.
M. Bernard Perrut, rapporteur à l'Assemblée nationale, note lui-même : « Les droits sur les tabacs : un bon exemple de mauvaise visibilité des comptes sociaux ».
L'article 77 du projet de loi de finances pour 2005 prévoit par ailleurs d'affecter au budget de l'Etat l'intégralité du rendement de la cotisation sur les boissons alcooliques de plus de 25 degrés, précédemment affectée à l'assurance maladie. Il s'agit de financer des mesures nouvelles du fonds de financement de la CMU.
Comme le souligne M. Alain Vasselle dans son rapport, qui contient d'excellentes remarques - vous voyez, monsieur le rapporteur que, de temps en temps, nous vous rendons hommage -, cette mesure n'est pas sans incidence sur l'assurance maladie, puisqu'elle la privera d'une recette historique de 370 millions d'euros.
Monsieur le ministre, vos mesures sont sournoises. Mais je ne veux pas insister. Vous cherchez des recettes, vous pouvez constater que le groupe socialiste vous y aide.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est gentil de sa part !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Mon cher collègue, votre proposition n'est ni réaliste ni équilibrée. S'il fallait transférer les 8 milliards d'euros de droits sur les alcools et les 2 milliards d'euros de droits sur les tabacs, il faudrait bien trouver une compensation pour le budget de l'Etat.
Le Gouvernement a déjà démontré sa volonté d'aller dans la direction que vous souhaitez, puisque les droits sur les tabacs ont été, pour une bonne part, affectés à toutes les dépenses. Cela étant, tout ne peut pas se faire du jour au lendemain et d'un seul coup. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales a considéré qu'elle ne pouvait pas vous suivre. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je suis tout à fait d'accord avec M. le rapporteur.
En effet, pour les socialistes, c'est assez facile : il suffit d'augmenter les impôts. Si l'on transférait les recettes des droits sur les alcools et les tabacs vers l'assurance maladie, il faudrait augmenter les impôts pour trouver ce qui manquerait au budget de l'Etat. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.
M. Bernard Cazeau. Il ne faut pas confondre la demande et l'explication de la demande. L'amendement n° 103 vise à ce que soit transmis au Parlement un rapport sur l'affectation des droits sur les alcools et les tabacs.
Monsieur le ministre, j'ai également une vision réaliste vis-à-vis d'un certain nombre de choses. Entre 1 milliard et 10 milliards, la marge est tout de même grande !
Je trouve très paradoxal les effets de manches de M. Vasselle sur ce sujet. Pour ma part, je demande seulement qu'un rapport soit transmis au Parlement le 1er septembre de chaque année ; je ne demande pas que l'on passe aux actes d'emblée.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Monsieur le ministre, je ne comprends pas que vous vous opposiez à cet amendement, que, bien entendu, nous soutiendrons. En effet, comme l'indiquait très justement M. Cazeau, il s'agit simplement d'un rapport destiné à suivre l'affectation des droits sur l'alcool et sur les tabacs dans les années qui viennent.
Le fait de détourner le produit de cette taxe de son objet - nous ne sommes pas les seuls à faire cette observation - ne doit pas perdurer. Je vous fais d'ailleurs remarquer que l'année où l'on vous a reproché de n'avoir pas procédé à ce transfert vers la CNAM, c'est précisément celle où le Gouvernement a réduit les impôts. Il ne s'agit pas ici de les augmenter, il faut simplement ne pas les réduire.
La réduction à laquelle vous avez procédé l'année dernière, à savoir à peu près 10 milliards d'euros, correspondait exactement aux recettes des droits sur l'alcool et sur les tabacs. Il suffisait donc de ne pas réduire les impôts l'année dernière pour que le produit de cette taxe soit entièrement affecté à la CNAM. Je regrette que vous n'ayez pas fait ce choix, car nous ne serions pas obligés aujourd'hui d'en débattre.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je veux simplement dire à l'auteur de l'amendement que celui-ci est déjà pleinement satisfait par l'annexe « jaune » relative au bilan des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
La répartition des droits sur les alcools et les tabacs est établie sur trois ans. Je ne vois donc pas du tout ce qu'apporterait cet amendement !
M. Paul Blanc. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 104, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - L'article 72 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie est abrogé.
II - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle à l'impôt de solidarité sur la fortune.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Cet amendement vise à supprimer l'élargissement de l'assiette de la CSG et de la CRDS pour les salariés et les chômeurs ainsi que les augmentations de CSG sur les retraites imposables.
Dans le cadre de la loi du 13 août dernier, l'assiette de la CSG et de la CRDS a été portée à 97 % de la rémunération, ce qui correspond dans les faits à une augmentation sournoise du taux de ces contributions pour les travailleurs et les chômeurs.
Alors que le Gouvernement s'était engagé à ne pas augmenter la CSG sur les revenus d'activité, l'élargissement de l'assiette équivaut à une hausse de 0,16 point du taux. Or cette mesure permet au Gouvernement d'affirmer que son taux n'augmente pas, puisqu'il reste inchangé.
Dans le même temps, le Gouvernement augmente de 0,4 point le taux de la CSG sur les pensions de retraite, d'invalidité et sur l'allocation de préretraite.
Alors que la loi Fillon sur les retraites se traduira par une baisse de 20 % à 30 % des pensions de retraite dans les prochaines décennies, cette hausse de la CSG entraînera une nouvelle baisse du pouvoir d'achat des retraités.
Nous considérons que ces mesures sont iniques, et nous souhaitons y remédier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je dis tout de suite au Sénat, ce qui me permettra d'être beaucoup plus bref par la suite, que plusieurs amendements présentent un caractère récurrent. Ceux-ci reviennent sur des dispositions qui ont été adoptées dans le cadre de la loi relative à l'assurance maladie.
Le Sénat n'ayant pas varié de position à cet égard, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 104 comme sur la plupart de ceux qui suivront.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Nous allons bien entendu voter cet amendement, car, de toute évidence, le Gouvernement, notamment en ce qui concerne les conséquences fiscales de sa réforme d'août 2004, a masqué la réalité aux Français.
Nous sommes dans une période où les bénéfices de la croissance ne sont pas répartis. On le voit bien dans les négociations ayant trait aux augmentations de salaires, où le pied reste vraiment bloqué sur le frein.
Ces prélèvements supplémentaires, qui touchent tout le monde - les actifs, les chômeurs, les retraités imposables -, alors que tout est pratiquement bloqué, contribueront à accroître la baisse de pouvoir d'achat. Cela revient à faire financer cette réforme essentiellement par les salariés, les retraités et les chômeurs.
M. le président. L'amendement n° 141, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre VII du titre III du livre 1er du code de la sécurité sociale est complété par une section ainsi rédigée :
« Section...
Contribution sur les revenus financiers des entreprises.
« Art. L... . - Une contribution assise sur le montant net des revenus de capitaux mobiliers, des plus-values, gains en capital et profits réalisés sur les opérations menées sur titres, les opérations menées sur les marchés réglementés et sur les marchés à terme d'instruments financiers et marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables est versée par les sociétés, les entreprises et autres personnes morales, assujetties en France à la déclaration de l'impôt sur les sociétés, au titre de l'article 206 du code général des impôts.
« Pour les sociétés placées sous le régime de l'article 233 A du code général des impôts, la contribution est due par la société mère.
« Le taux de cette contribution sociale sur les revenus financiers des entreprises est fixé à 10 %. La contribution sociale est contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles que les cotisations sociales. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Mes chers collègues, vous êtes un certain nombre à connaître cet amendement. En effet, en le défendant, nous faisons preuve d'une certaine constance, comme nous l'avons également fait s'agissant des amendements concernant la modulation des cotisations patronales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. L'avis de la commission sera aussi d'une certaine constance !
M. Guy Fischer. Nous reprocher la constance de notre position serait à mon avis oublier le fondement de cet amendement.
Je rappellerai tout d'abord que le financement de la protection sociale est, pour l'essentiel, assis sur une base de calcul de cotisations fondée sur les salaires - quand bien même c'est non pas un prélèvement sur les salaires mais plutôt une utilisation de la valeur ajoutée créée - et qu'il représente de plus en plus, aujourd'hui, l'affectation de recettes fiscales ou assimilées, telle la CSG ou la CRDS.
Si l'on part, comme nous, du postulat d'une protection sociale financée pour l'essentiel à partir des revenus du travail, on peut alors considérer comme relativement injuste que les autres revenus ne soient pas mis plus à contribution pour le bien de la collectivité.
Le basculement de la cotisation d'assurance maladie des salariés sur la contribution sociale généralisée a constitué, dans les faits, une première expérience d'alourdissement relatif de la contribution des revenus financiers au financement de la protection sociale. Mais les revenus financiers des entreprises, produits de leurs placements ou de leurs participations, échappent largement à tout concours à ce financement.
Cette situation est préjudiciable à plus d'un titre : elle prive en effet la protection sociale de ressources non négligeables ; elle incite les entreprises à pratiquer plus largement encore restructurations juridiques et comptables et substitution du capital au travail.
Mettre aujourd'hui à contribution les revenus financiers des entreprises au-delà des recettes que la protection sociale pourrait en tirer permettrait de modifier le comportement des agents économiques, de favoriser la durabilité des ressources de la protection sociale, et ainsi de contribuer à cette oeuvre permanente de solidarité.
Nous souhaitons donc vivement l'adoption de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 105, présenté par MM. Desessard, Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- L'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans des conditions prévues par la loi de finances, le produit de la taxe générale sur les activités polluantes visée aux articles 266 sexies à 266 terdecies du code des douanes est également affecté aux ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès, à partir du 1er janvier 2005. »
II- Les pertes de recettes qui incomberaient à l'Etat du fait de cette augmentation des recettes de l'assurance-maladie sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des recettes de l'impôt visé à l'article 885 A, dans des conditions prévues par la loi de finances, à partir du 1er janvier 2006.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 139, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de ces cotisations est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale, ratio pour le contrôle duquel sont associés le comité d'entreprise, ou à défaut, les délégués du personnel. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement n'a pas d'autre objet que de traduire une position constante de notre part. En effet, voilà désormais plusieurs années que se pose avec force la question d'un financement pérenne de la sécurité sociale, appuyé sur une modernisation de ses ressources et une meilleure prise en compte de l'évolution de la réalité économique.
Cet amendement vise donc à apporter des ressources nouvelles et durables à la sécurité sociale au moyen d'une modulation des cotisations sociales patronales selon le ratio masse salariale/valeur ajoutée de l'entreprise.
Plutôt que de se lamenter sur le déficit de l'assurance maladie, d'imposer de moindres remboursements et de plus hauts prélèvements aux assurés sociaux, il nous semble nécessaire d'examiner la question sous un autre angle.
S'attacher aux ressources ne signifie pas que l'on mésestime l'enjeu des dépenses, bien au contraire. Cela implique de prendre acte des motifs du déséquilibre financier de la sécurité sociale, qui ne s'explique pas autrement que par les besoins croissants de la population française en matière de sécurité sociale et les évolutions technologiques ; il faut faire face aux risques sociaux !
Pour autant, assurer une meilleure fluidité des ressources de la protection sociale implique naturellement de s'interroger sur la pertinence des stratégies jusqu'ici suivies - je pense plus particulièrement aux allégements de cotisations sur les bas salaires qui, selon nous, ne créent pas d'emploi - et de leur préférer une modulation des cotisations sociales des entreprises.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 140, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de ces cotisations est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale, ratio pour le contrôle duquel sont associés le comité d'entreprise, ou à défaut, les délégués du personnel. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise également, s'agissant cette fois du financement des prestations familiales, à moduler les cotisations sociales des entreprises en fonction de l'utilisation de la valeur ajoutée qu'elles peuvent réaliser dans leur gestion quotidienne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 142, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le 1° de l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale, les mots : « proportionnelle à l'ensemble des rémunérations ou gains perçus par les salariés des professions non agricoles » sont remplacés par les mots : « modulés pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale, ratio pour le contrôle duquel sont associés le comité d'entreprise, ou à défaut, les délégués du personnel. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement porte également, comme les deux amendements précédents, sur la modulation des cotisations sociales des entreprises, système a priori plus judicieux que l'allégement des cotisations sociales, dont la pertinence en termes d'emplois n'a jusqu'ici pas été prouvée.
Nous constatons aujourd'hui un effondrement des salaires, lesquels sont tous tirés vers le bas - même ceux des salariés les plus qualifiés - et une explosion de la précarité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 143, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les dispositions de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale sont abrogées.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à revenir sur le principe des exonérations et allégements de cotisations sociales accordés sans contrepartie.
Je me suis livré à une étude toute particulière de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, dont les deux premiers paragraphes sont ainsi rédigés :
« I. - Les cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des maladies professionnelles et des allocations familiales qui sont assises sur les gains et rémunérations tels que définis à l'article L. 242-1, versés au cours d'un mois civil aux salariés, font l'objet d'une réduction.
« II. - Cette réduction est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L. 351-4 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L. 351-12 du même code [...]. »
Comme vous le constatez vous-mêmes, c'est assez obscur !
L'article porte donc sur la réduction dégressive des cotisations sur les salaires, qu'il est prévu dans un premier temps de recentrer sur les plus bas salaires et qui constitue clairement une véritable incitation à la pratique des rémunérations faibles.
En effet, la réduction dégressive des cotisations sur les salaires, c'est la non-reconnaissance des qualifications réelles des salariés, c'est l'ouverture de la trappe à bas salaires et c'est un poids particulièrement élevé pesant sur les politiques publiques en matière d'emploi et d'insertion professionnelle !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 106, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'affectation de la totalité du produit des droits prévus à l'article 403 du code général des impôts sera effectuée dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2004.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Cet amendement fait suite à ma précédente demande de rapport concernant les transferts sur les comptes sociaux des droits sur l'alcool et le tabac.
Je remercie d'ailleurs M. le président de la commission qui, avec beaucoup de condescendance, m'a fait part de l'existence d'un jaune budgétaire ! J'avais en effet déjà vu ce dernier, d'ailleurs squelettique, mais je demandais un rapport, ce qui n'est pas tout à fait la même chose !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Dont acte.
M. Bernard Cazeau. Cet amendement tend à affecter aux ressources d'assurance maladie la totalité des sommes perçues au titre des droits sur les alcools. Je précise qu'il s'agit d'impôts déjà perçus, et non de nouveaux impôts.
Monsieur le ministre, les produits qui peuvent avoir des conséquences sur la santé doivent participer au financement de celle-ci. C'est un principe essentiel de santé publique, et cela nous ramène au débat que nous avions voilà quelques jours et à votre position un peu en zigzag sur la loi Evin.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur Cazeau, je comprends votre démarche tendant à une affectation des droits sur l'alcool aux finances de l'assurance maladie, avec pour arrière-pensée des objectifs de santé publique. Tout cela peut se défendre, bien entendu.
Mais, comme je l'indiquais déjà tout à l'heure, un tel amendement n'est pas adoptable en l'état. En effet, je ne peux pas, en ma qualité de rapporteur chargé des équilibres financiers, d'un côté, dénoncer l'insuffisance des compensations faites au dépens du budget de la sécurité sociale et, de l'autre, accepter la création d'une affectation sans prévoir en compensation le manque à gagner que représenterait pour le budget de l'Etat cette recette correspondant aux droits sur les alcools. Il convient que notre démarche reste cohérente.
Toutefois, j'attends bien entendu que cette cohérence soit réciproquement partagée par les finances à l'égard du budget de la sécurité sociale.
Je rappelle que cette recette était à l'origine affectée au budget de l'Etat ; puis, voilà une dizaine d'années, le produit des droits sur les alcools a été affecté au fonds de solidarité vieillesse pour financer des dépenses non contributives concernant le minimum vieillesse.
Ensuite, c'est bien la majorité à laquelle vous apparteniez et le gouvernement que vous souteniez qui ont affecté les droits alcool au financement des 35 heures. Il est donc un peu facile aujourd'hui de préconiser l'affectation de ces droits à l'assurance maladie : que ne l'avez-vous fait au moment où vous en aviez la possibilité !
Pour notre part, nous sommes d'accord sur les objectifs, si ce n'est que nous ne pouvons le faire que progressivement et non pas brutalement.
Telle est la réponse que je tenais à faire à M. Cazeau. S'il avait eu un peu de mémoire, il aurait sans doute évité de déposer un tel amendement !
M. Josselin de Rohan. Très bien !
M. Bernard Cazeau. Il n'y avait pas 13 milliards d'euros de déficits !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Le déficit s'élevait tout de même à quelques milliards d'euros !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 107, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- L'affectation de la totalité du produit de la taxe prévue à l'article 235 ter ZC du code général des impôts sera effectuée dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2004.
II- Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par un relèvement des taux de l'impôt de solidarité sur la fortune définis à l'article 885 V du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 107 est retiré.
L'amendement n° 144, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l'article 235 ter ZC du code général des impôts, le chiffre : « 3,3 » est remplacé par le chiffre : « 5 ».
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. La contribution sociale sur les bénéfices des sociétés est l'un des outils de financement de la politique d'allégement des cotisations sociales. Nous estimons que cet outil est insuffisamment efficace puisqu'il ne rapporterait, en 2005, qu'un milliard d'euros, soit une somme relativement faible par rapport au total des ressources mobilisées à ce titre : elle ne représenterait qu'un seizième du montant de la dépense budgétaire programmée.
Tel est le sens de cet amendement qui tend à dégager environ 500 millions d'euros supplémentaires de recettes pour le financement des politiques incitatives à l'emploi.
Il ne risque pas de remettre en question de manière insupportable la situation de nos entreprises qui, eu égard au sens de la contribution sociale, seront en dernière instance destinataires du produit de cette majoration. Nous ne proposons en effet, in fine, que d'organiser la solidarité entre les entreprises à fort rendement capitalistique et celles qui accomplissent des efforts spécifiques en matière de création d'emplois.
Nous vous invitons, naturellement, à adopter cet amendement de pure redistribution en faveur de l'emploi. Développer l'emploi, c'est accroître les ressources de la sécurité sociale. En ce sens, cet amendement devrait être compris par l'ensemble de mes collègues puisque tous nos efforts convergent pour essayer de trouver des recettes nouvelles afin de réduire le déficit de la sécurité sociale.
Par conséquent, je ne comprendrais pas, mes chers collègues, que vous ne soyez pas favorables à cet amendement qui a justement pour objet d'augmenter les ressources de la sécurité sociale, certes de manière indirecte, puisqu'il s'agit en l'occurrence de promouvoir l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 57 rectifié bis, présenté par MM. Alduy, Biwer et Billard, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 575 G du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 575-G - Les tabacs manufacturés ne peuvent circuler, après leur vente au détail, par quantité supérieure à 200 unités pour les cigarettes, 100 unités pour les cigarillos, 50 unités pour les cigares, 250 grammes pour le tabac à fumer, sans un document mentionné au II de l'article 302 M. »
La parole est à M. Jean-Paul Alduy.
M. Jean-Paul Alduy. Cet amendement vise à combattre le trafic de tabac dans les zones frontalières. Ce trafic prend des proportions considérables et met en péril le plan gouvernemental de lutte contre le tabagisme, fondé notamment sur une augmentation importante du prix du tabac.
Il met par ailleurs en péril le réseau des buralistes, à qui l'on demande de plus en plus d'assurer des missions de service public dans les quartiers sensibles ou dans les zones rurales.
Par conséquent, en attendant le jour lointain où les prix du tabac seront harmonisés au niveau européen, nous proposons de modifier l'article 575 G du code général des impôts qui fixe à deux kilogrammes le seuil au-dessus duquel on peut réglementer la circulation du tabac, ces deux kilogrammes étant considérés comme une consommation personnelle. Lorsque le voyage entre le Perthus et Perpignan est effectué vingt fois dans la journée, la consommation personnelle devient relativement lourde !
Je propose donc que ces deux kilogrammes de tabac autorisés soient réduits à 200 cigarettes, 100 cigarillos, 50 cigares et 250 grammes de tabac à fumer. Le principe est d'abaisser ce seuil qui n'a strictement rien à voir avec une consommation personnelle et qui ouvre une brèche dans le plan de lutte contre le tabagisme. Ce trafic ne se limite plus aux zones frontalières : il concerne également, de plus en plus, l'intérieur du pays.
M. le président. Dimanche dernier, M6 a en effet diffusé une émission extrêmement intéressante sur Perpignan à ce sujet.
L'amendement n° 203, présenté par M. Longuet, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les tabacs manufacturés ne peuvent circuler, après leur vente au détail, par quantité supérieure à 200 unités pour les cigarettes, 100 unités pour les cigarillos, 50 unités pour les cigares, 250 grammes pour le tabac à fumer, sans un document mentionné au II de l'article 302 M du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas défendu.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 57 rectifié bis ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Alduy a raison de souligner cette difficulté majeure à laquelle notre pays est confronté et dont la commission des affaires sociales est tout à fait consciente.
La situation que nous connaissons dans les zones frontalières n'est pas acceptable, surtout en termes de santé publique en ce qui concerne la consommation de tabac. Nous nous heurtons simplement à un problème important : la position des autorités communautaires à l'égard du droit européen.
La commission des affaires sociales partage l'objectif visé par M. Alduy, mais elle souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement pour savoir quelle suite réserver à cette demande. Il conviendrait sans doute de parvenir à une harmonisation du droit communautaire en la matière avec les autres pays.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Monsieur Alduy, je connais particulièrement bien ce sujet et vous avez totalement raison sur le fond. Il faut donc trouver une solution en termes d'harmonisation européenne : nous ne pouvons pas contrevenir à la législation européenne.
D'autres pays doivent connaître, comme nous, des problèmes transfrontaliers. Evidemment, tous les pays ne sont pas concernés, en l'occurrence l'Espagne. Il importerait donc de mener une réflexion à l'échelon européen sur ce sujet.
Je proposerai que cette question soit inscrite à l'ordre du jour du prochain Conseil européen, car nous ne pouvons pas continuer ainsi ; les conséquences de cette situation sont effrayantes ; je le vois bien à Toulouse.
Je suis donc défavorable à cet amendement pour des raisons d'harmonisation européenne, mais je comprends très bien les motivations de fond de ses auteurs.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Alduy ?
M. Jean-Paul Alduy. Dans ces conditions, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 57 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 102 rectifié, présenté par MM. Godefroy et Cazeau, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans le deuxième alinéa de l'article L. 3511-2 du code de la santé publique, le chiffre : « dixneuf » est remplacé par le chiffre : « vingt ».
II. Cette disposition entrera en vigueur dans un délai de 6 mois à compter de la promulgation de cette loi.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 31 juillet 2003 visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes, le conditionnement des cigarettes manufacturées est limité aux paquets d'au moins dix-neuf cigarettes.
Depuis, on assiste à une multiplication délibérée des références en paquets de dix-neuf cigarettes, paquets qui affichent logiquement un prix inférieur de 5 % par rapport aux paquets de vingt cigarettes. Ces fabricants veulent en fait contourner une autre disposition introduite l'été dernier par le Sénat concernant l'interdiction des prix promotionnels. L'ensemble des sénateurs avait alors jugé ces pratiques contraires aux objectifs de la politique de santé publique.
Depuis l'adoption de la loi relative à la politique de santé publique en juillet dernier, l'homologation des prix des cigarettes manufacturées est conditionnée au respect d'un seuil de référence calculé à partir d'un pourcentage fixé par décret appliqué au prix moyen des cigarettes sur le marché.
Le décret d'application publié le 13 septembre 2004 fixe à 95 % du prix moyen le seuil en dessous duquel le prix de vente proposé par un fabricant ne peut être homologué par les autorités. En septembre, le prix moyen s'élevait à 4,69 euros pour vingt cigarettes ; le prix en dessous duquel les prix ne peuvent être homologués s'établit alors à 4,46 euros pour vingt cigarettes.
Le glissement généralisé vers les paquets de dix-neuf cigarettes cache une guerre des prix déguisée. Le conditionnement en paquet de dix-neuf cigarettes a en réalité pour seul objectif de rendre artificiellement attrayant l'achat du paquet de cigarettes, notamment pour les jeunes, particulièrement sensibles à l'argument du prix. Cette manoeuvre contourne clairement l'esprit de la politique de santé publique.
Il est à noter que la fixation de la contenance des paquets à un minimum de vingt cigarettes ne heurte pas le droit communautaire, qui prévoit que chaque pays peut fixer ou privilégier tour à tour des formats différents pour des raisons de santé publique.
C'est pourquoi il convient de limiter à vingt cigarettes au minimum les paquets vendus en France, tout en aménageant une période transitoire pour permettre aux fabricants de s'adapter à cette nouvelle règle.
M. le président. Le sous-amendement n° 246, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Dans le II du texte proposé par l'amendement 102 rectifié, remplacer le chiffre :
6
par le chiffre :
8
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Nous nous associons pleinement aux propos que vient de tenir M. Godefroy : il s'agit d'un détournement caractérisé de la loi.
Nous proposons simplement de porter de six à huit mois le délai d'entrée en vigueur de la disposition proposée, afin de laisser le temps aux fabricants de s'adapter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission n'est pas insensible à un amendement sous-tendu par un objectif de santé publique. Nous avons été amenés à constater que la mise en vente de paquets de dix-neuf cigarettes visait à capter une partie de la clientèle des jeunes, car, évidemment, un paquet de dix-neuf cigarettes coûte moins cher qu'un paquet de vingt.
Un phénomène similaire se produit compte tenu du différentiel de prix qui existe entre le tabac à rouler et les paquets de cigarettes : on constate un déplacement de la consommation vers le tabac à rouler.
M. Jean-Pierre Godefroy. C'est vrai !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Il a été envisagé de rapprocher les prix du tabac à rouler de ceux des paquets de cigarettes, mais cette proposition pose des problèmes au regard des moratoires qui ont été adoptés l'année dernière, sur décision du Gouvernement, à l'issue des nombreuses négociations qui ont été menées à ce sujet, notamment avec les buralistes.
Il semblerait plus prudent de demander au Gouvernement d'engager le plus rapidement possible une concertation avec les buralistes, afin de trouver une solution répondant à notre objectif de santé publique tout en ne mettant pas à mal la situation économique de ceux-ci. Le sous-amendement présenté par nos collègues du groupe de l'Union centriste allait d'ailleurs dans ce sens, puisqu'il prévoyait de porter le délai de six à huit mois pour faciliter la mise en oeuvre de cette mesure de santé publique.
La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement., mais elle s'en remettrait plutôt à la sagesse de la Haute Assemblée à la fois sur l'amendement et sur le sous-amendement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Cet amendement s'inscrit dans le cadre du plan cancer conduit par le Gouvernement : moins on fume, mieux c'est ! D'ailleurs, c'est l'actuel gouvernement qui a augmenté le prix du tabac.
On compte aujourd'hui deux millions de fumeurs de moins. Ce sont autant de risques de cancers du poumon, de la vessie ou des voies aérodigestives supérieures qui diminuent.
Toutefois, je ne suis pas favorable à cet amendement, et ce pour deux raisons.
En premier lieu, il constitue indéniablement un « cavalier social » qui ne peut avoir sa place dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale sans encourir la censure du Conseil constitutionnel.
En second lieu, nous avons récemment fait voter une loi, celle du 31 juillet 2003, visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes, qui a déjà supprimé les paquets de moins de dix-neuf cigarettes.
Telles sont les deux raisons pour lesquelles j'émets un avis défavorable sur cet amendement, même si je peux comprendre les raisons de santé publique qui le motivent.
En conséquence, je me demande si nous ne devrions pas étudier cette proposition à une autre occasion.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, ce problème a été soulevé à l'Assemblée nationale et M. Xavier Bertrand, qui avait déjà souligné le risque d'inconstitutionnalité, avait émis un avis plutôt favorable.
Je suppose donc que vous avez eu le temps d'étudier la question depuis.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je suis persuadé que ce risque n'est pas réel. On pourrait certes argumenter, monsieur le ministre, mais quand bien même il le serait, on est en droit de penser, puisqu'il s'agit d'une question de santé publique, que ce ne serait pas très grave ni bien méchant : ça ne porterait pas à conséquence et la punition ne serait pas trop sévère.
M. Jean-Pierre Godefroy. Il existe d'ailleurs une jurisprudence sociale au sujet d'un article d'une loi de financement de la sécurité sociale qui, en 2002, plaide en faveur du fait que le Conseil constitutionnel ne rejetterait pas du tout cet amendement.
M. le président. Monsieur Mercier, le sous-amendement n° 246 est-il maintenu ?
M. Michel Mercier. Oui, si l'amendement est voté, il faut qu'il soit sous-amendé !
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 246.
(Le sous-amendement est adopté à l'unanimité.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 102 rectifié.
(L'amendement est adopté à l'unanimité.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 2.
Article 2
I. - Le 9° de l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 9° Des organismes suivants, non mentionnés aux 1° à 8° : établissements et entreprises exerçant l'activité définie à l'article L. 511-1 du code monétaire et financier et relevant des chapitres Ier à VII ainsi que de la section 2 du chapitre VIII du titre Ier du livre V du même code, entreprises d'assurance, de capitalisation et de réassurance de toute nature régies par le code des assurances, mutuelles et unions de mutuelles relevant du livre II du code de la mutualité, institutions de prévoyance et unions d'institutions de prévoyance relevant du titre III du livre IX du présent code et institutions de prévoyance relevant du II de l'article L. 727-2 du code rural ; ».
II. - Au quatrième alinéa de l'article L. 651-5 du même code, les mots : « d'exploitation générale, résultant des » sont remplacés par les mots : « de résultat, conforme aux ».
III. - Il est inséré, après le quatrième alinéa de l'article L. 651-5 du même code, trois alinéas ainsi rédigés :
« Pour les mutuelles et unions de mutuelles relevant du livre II du code de la mutualité, institutions de prévoyance et unions d'institutions de prévoyance relevant du titre III du livre IX du présent code et institutions de prévoyance relevant de la section 4 du chapitre II du titre II du livre VII du code rural, l'assiette de la contribution sociale de solidarité est constituée, pour leur activité principale, par les cotisations, primes et acceptations de l'exercice, nettes de cessions et de rétrocessions, telles qu'elles ressortent du compte de résultat, conforme aux dispositions relatives à la comptabilité des mutuelles et institutions de prévoyance.
« Pour les redevables mentionnés aux deux alinéas précédents, ne sont comprises dans le chiffre d'affaires retenu pour asseoir la contribution ni les cotisations, primes et acceptations provenant de contrats exonérés de la taxe sur les conventions d'assurances en application des 15° et 16° de l'article 995 du code général des impôts, ni les remises de gestion qui leur sont versées dans le cadre de leur activité définie au 4° de l'article L. 111-1 du code de la mutualité.
« Pour les redevables mentionnés au cinquième alinéa, ne sont pas comprises dans le chiffre d'affaires retenu pour asseoir la contribution les subventions accordées par le fonds prévu à l'article L. 421-1 du code de la mutualité. »
IV. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur pour la contribution due à compter du 1er janvier 2005.
M. le président. L'amendement n° 212 rectifié, présenté par M. Jégou et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
I - Après le I de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - Dans le huitième alinéa de l'article L. 651-3 du code de la sécurité sociale, les mots : « au 9° de » sont remplacés par le mot : « à » et les mots : « 20 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit » sont remplacés par les mots : « L. 51130 du code monétaire et financier ».
II - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant de la déduction de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés pour les établissements de crédits affiliés à un organe central est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement tend à clarifier un point du code de la sécurité sociale.
Les réseaux bancaires coopératifs sont assujettis à la C3S. Cependant, afin d'éviter un phénomène de double imposition du chiffre d'affaires pour les banques adhérentes à un même organe central, l'article L. 651-3 du code de la sécurité sociale institue à leur profit un mécanisme de déduction de la base imposable de la part du chiffre d'affaires correspondant à des intérêts reçus à raison d'opération de centralisation.
Or la rédaction actuelle de cet article conduit les caisses des organes centraux à faire une interprétation très restrictive de cet article et à interdire aux établissements visés qui ont adopté une forme commerciale d'opérer la déduction à laquelle ils ont pourtant droit.
Le présent amendement a donc pour objet d'écarter toute ambiguïté.
La modification proposée vise, en effet, à clarifier le texte et à sécuriser l'application de cette déduction aux redevables affiliés à l'un des organes centraux mentionnés à l'article L. 511-30 du code monétaire et financier, c'est-à-dire la Caisse nationale de crédit agricole, la Banque fédérale des banques populaires, la Confédération nationale du crédit mutuel, la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance ainsi que la Chambre syndicale des sociétés anonymes de crédit immobilier.
Ce faisant, il ne s'agira que de rejoindre l'esprit de la loi du 4 août 1995, qui avait introduit dans le code les mesures visant à éviter la double imposition de la C3S.
J'ajoute, par ailleurs, que cet amendement a recueilli, par courrier, l'agrément de M. le ministre d'Etat de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je suis favorable à cet amendement.
Les groupes bancaires coopératifs ou mutualistes effectuent, en raison de leur mode d'organisation, des prix internes. Il serait absurde d'intégrer les intérêts associés à ces opérations au chiffre d'affaire imposable à la C3S.
Je souligne que, en 1995, le législateur a neutralisé les doubles taxations qui en résultent. Toutefois, l'évolution du statut juridique de certains des établissements concernés a eu pour conséquence d'assujettir de nouveau les prêts internes à la C3S en raison d'une rédaction trop restrictive du texte actuel.
Cet amendement permet de corriger cette incohérence, conformément à la volonté initiale du législateur. J'y suis donc tout à fait favorable et je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 212 rectifié bis.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par MM. Gournac et Murat, est ainsi libellé :
A la fin de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour insérer trois alinéas après le quatrième alinéa de l'article L. 6515 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots :
les remises de gestion qui leur sont versées dans le cadre de leur activité définie au 4° de l'article L. 1111 du code de la mutualité
par les mots :
les remises qui leur sont versées dans le cadre de leur participation à la gestion d'un régime légal d'assurance maladie et maternité
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 42 rectifié.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Cet amendement améliore la rédaction du texte initial.
Il vise à exclure de l'assiette de la C3S les remises de gestion versées aux organismes chargés, par délégation, de la gestion d'un régime d'assurance maladie, quels que soient leurs statuts. C'est ce point qui est important.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 2 bis
Après l'article L. 256-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 256-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 256-5. - Les caisses de sécurité sociale peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, faire usage des prérogatives reconnues aux organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 10, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. L'article 2 bis a été ajouté au texte par l'Assemblée nationale et concerne les sommes indûment versées.
La question se pose réellement pour les branches famille et vieillesse : faut-il étendre les procédures propres au recouvrement des cotisations aux pensions et aux allocations familiales ?
La commission des affaires sociales s'interroge, car des procédures sont déjà en vigueur sur ce sujet. Souvent d'ailleurs, une solution amiable est trouvée et il est procédé à des retenues sur les prestations futures.
Nous ne voudrions pas qu'une telle mesure soit mal perçue par les usagers. C'est la raison pour laquelle il ne nous a pas paru judicieux d'adopter une disposition de cette nature, d'autant que les dispositions actuelles de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale permettent de satisfaire la demande de nos collègues.
Nous demandons donc la suppression de cet article 2 bis.
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le texte proposé par cet article pour l'article L. 256-5 du code de la sécurité sociale:
« Art. L. 256-5. - Les organismes de sécurité sociale peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, engager une action en recouvrement dans les conditions prévues aux sixième à huitième alinéas de l'article L. 133-4. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Cet amendement est quelque peu différent de l'amendement n° 10, puisqu'il vise à mettre en cohérence l'article 2 bis avec les dispositions de l'article 15 bis du projet de loi.
Je rappelle que, aux termes de l'article 2 bis, les caisses de sécurité sociale peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, faire usage des prérogatives reconnues aux organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale, en particulier de ne plus avoir à attendre une décision de justice pour obtenir un titre exécutoire.
Il a été reconnu que cette disposition était très vague. La commission des finances vous propose donc de la modifier afin d'aligner la procédure de récupération des indus sur celle fixée à l'article 15 bis du présent projet de loi pour le recouvrement des indus auprès du professionnel ou de l'établissement à l'origine de l'inobservation des règles de tarification ou de facturation prévues à l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, qui résulte d'ailleurs d'un amendement du député M. Yves Bur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je constate que M. Jégou a fait un effort rédactionnel qui m'apparaît de meilleure facture - je prie M. Bur de m'en excuser s'il lit le compte rendu de nos débats - que celui qui a été réalisé par la commission des finances de l'Assemblée nationale. Notre collègue Jean-Jacques Jégou, en venant au Sénat, a constaté combien notre assemblée réalisait un travail de très bonne qualité !
En tout état de cause, je préfère l'amendement n° 10 de la commission des affaires sociales. Cela étant, si le Gouvernement considère que l'amendement de la commission des finances pourrait être de nature à réaliser un compromis entre la proposition de notre collègue de l'Assemblée nationale et celle de la commission des affaires sociales du Sénat, je suis tout disposé à me rallier à l'amendement de M. Jégou.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. La rédaction proposée par M. Jégou pour cet article prévoyant en faveur des organismes une procédure de recouvrement rapide et sûre des indus auprès des assurés et allocataires, tout en respectant une procédure contradictoire, me paraît totalement cohérente avec la rédaction de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale visant la récupération des indus par les caisses d'assurance maladie auprès des professionnels de santé des établissements.
Cet article 2 bis résulte d'une initiative parlementaire. Il est vrai que, au départ, le Gouvernement n'estimait pas indispensable que soit apportée une telle précision. En conséquence, il s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur Vasselle, l'amendement n° 10 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Non, je le retire, monsieur le président.
Je remercie M. Jégou de faciliter par avance le travail de la commission mixte paritaire. J'ose espérer que M. Bur saura se rallier à un ancien collègue de l'Assemblée nationale devenu rapporteur pour avis de la commission des finances au Sénat.
M. le président. J'apprécie le geste de la commission des affaires sociales en faveur de la commission des finances.
L'amendement n° 10 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 30.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié.
(L'article 2 bis est adopté.)
.
Article additionnel après l'article 2 bis
M. le président. L'amendement n° 59 rectifié, présenté par MM. Juilhard et Murat et Mme Henneron, est ainsi libellé :
Après l'article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 725-3 du code rural, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les organismes de la mutualité sociale agricole peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, faire usage des prérogatives reconnues aux organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale. »
La parole est à M. Jean-Marc Juilhard.
M. Jean-Marc Juilhard. L'article 2 bis, introduit en première lecture à l'Assemblée Nationale, facilite et accélère la récupération des indus en renforçant les prérogatives des caisses du régime général.
En effet, la procédure de récupération de l'indu est alignée sur celle du recouvrement des cotisations de sécurité sociale et permet ainsi d'avoir un titre exécutoire sans attendre une décision de justice.
Cette mesure de meilleure utilisation des moyens publics doit trouver également application dans le régime agricole.
Tel est l'objet du présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Juilhard, en qualité de spécialiste de la mutualité sociale agricole, dépose, avec M. Murat et Mme Henneron, un amendement tout à fait digne d'intérêt. La commission des affaires sociales serait prête à l'accepter si notre collègue consent à prendre en considération le vote intervenu précédemment sur l'amendement de notre collègue M. Jégou.
Nous proposons la rédaction suivante : « Les organismes de la mutualité sociale agricole peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, engager une action en recouvrement dans les conditions prévues aux sixième à huitième alinéas de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale. »
Sous réserve de cette rectification, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. M. Juilhard, acceptez-vous de modifier votre amendement dans le sens souhaité par M. le rapporteur ?
M. Jean-Marc Juilhard. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 59 rectifié bis, présenté par MM. Juilhard et Murat et Mme Henneron, et ainsi libellé :
Après l'article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 725-3 du code rural, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les organismes de la mutualité sociale agricole peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, engager une action en recouvrement dans les conditions prévues aux sixième à huitième alinéas de l'article L.133-4 du code de la sécurité sociale. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Dans la mesure où cet amendement est rectifié, le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 bis.
Article 2 ter
I. - L'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Dans la dernière phrase du septième alinéa, les montants : « 760 ? » et « 76 ? » sont remplacés respectivement par les montants : « 910 ? » et « 91 ? » ;
2° Après le septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 2006, les montants mentionnés à l'alinéa précédent sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, pour tenir compte de l'évolution prévisionnelle des prix de l'année civile en cours. »
II. - L'article L. 454-1 du même code est ainsi modifié :
1° Dans la dernière phrase du huitième alinéa, les montants : « 760 ? » et « 76 ? » sont remplacés respectivement par les montants : « 910 ? » et « 91 ? » ;
2° Après le huitième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 2006, les montants mentionnés à l'alinéa précédent sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, pour tenir compte de l'évolution prévisionnelle des prix de l'année civile en cours. »
III. - L'assureur du tiers responsable est tenu d'informer, s'il peut être identifié, l'organisme d'assurance maladie complémentaire de la personne victime de la survenue des lésions causées par un tiers dans des conditions fixées par décret. La méconnaissance de cette obligation d'information donne lieu à paiement d'une indemnité forfaitaire déterminée par le même décret.
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I - Le septième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces limites sont revalorisées chaque année par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. »
II - Dans le huitième alinéa de l'article L. 454-1 du même code, les mots : « d'un montant maximum de 760 euros et d'un montant minimum de 76 euros » sont remplacés par les mots : « des montants maximum et minimum prévus au septième alinéa de l'article L. 376-1 ».
III - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er janvier 2005.
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet article, dû à l'initiative de M. Yves Bur, rapporteur de la commission des finances de l'Assemblée nationale, vise à procéder à la réévaluation de l'indemnité de procédure perçue par les organismes de sécurité sociale dans le cadre de recours contre tiers. Plutôt que de procéder à des revalorisations par à-coups, la commission propose de les lisser dans le temps, en prévoyant une indexation régulière des indemnités à verser aux organismes de sécurité sociale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. L'Assemblée nationale a proposé de majorer de 20 % l'indemnité de gestion payée par les assureurs aux caisses dans le cadre de l'exercice par ces dernières du recours contre tiers. Le montant de cette indemnité n'ayant pas été réévalué depuis 1996, le Gouvernement a considéré qu'il s'agissait d'une mesure de bon sens.
Toutefois, monsieur le rapporteur, vous savez également que, concernant le recours contre tiers, une concertation est actuellement en cours avec les différentes parties en présence afin d'améliorer les dispositions du protocole d'accord entre les assureurs et les caisses, ce qui assurera un règlement plus rapide des indemnités des victimes et des créances des caisses.
Compte tenu de ces deux éléments et du fait que l'impact n'est pas neutre, le Gouvernement ne peut que s'en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. En conséquence, l'article 2 ter est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 2 ter
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par M. P. Blanc, est ainsi libellé :
Après l'article 2 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article 572 du code général des impôts est in fine complété par la phrase ainsi rédigée :
« Le prix de détail des tabacs de fine coupe destinés à rouler les cigarettes, exprimé aux 1 000 grammes, ne peut pas être homologué s'il est inférieur au montant correspondant à 65 % du seuil en dessous duquel le prix de détail des cigarettes ne peut pas être homologué ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
Articles additionnels avant l'article 3
M. le président. L'amendement n° 108, présenté par MM. Domeizel, Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger, Demontes et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles L. 212-16 et L. 212-17 du code du travail sont abrogés.
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. La journée de solidarité... Jamais une loi n'avait soulevé autant d'oppositions, y compris dans les rangs de la majorité !
C'est une mesure injuste puisqu'elle repose uniquement sur les salariés - ils seront en effet les seuls à payer pour une mesure de solidarité -, c'est-à-dire sur les deux cinquièmes de la population.
Cette mesure est également injuste dans la mesure où, si elle est imposée au secteur privé comme au secteur public, ce dernier ne génère aucune plus-value et, de ce fait, est davantage pénalisé.
C'est une mesure économiquement inadaptée ; il semblerait même d'après certains avis autorisés qu'elle pourrait entraîner de 20 000 à 30 000 chômeurs supplémentaires.
Cette mesure va créer un transfert de charges vers les collectivités territoriales qui viendra s'ajouter aux transferts actuels du RMI, du RMA, des personnels ATOSS, etc.
Les transports scolaires constitueront une dépense supplémentaire pour les collectivités. Il faudra adapter le travail du personnel communal à l'ouverture des classes. Il faudra chaque année consulter le comité technique paritaire départemental ou local, parce que chaque collectivité a la possibilité de changer chaque année la date de la journée de solidarité. Certains envisagent de répartir l'effort de solidarité sur l'année, certains envisagent de le reporter sur le 8 mai. Or, en 2005, le 8 mai tombera un dimanche ; la notion de journée de solidarité se diluera petit à petit et perdra tout son sens.
La mesure crée une confusion sur le territoire national puisque le lundi de Pentecôte sera chômé dans certaines académies mais pas dans d'autres. Dans une même ville, les entreprises et les écoles risquent même de ne pas adopter la même date; il va donc falloir surmonter de nombreuses difficultés. Cette décision nuira ainsi aux rassemblements familiaux, aux manifestations sportives, culturelles et spirituelles et perturber fortement les régions touristiques.
Enfin, cette mesure peut être apparentée à un détournement de fonds. Le Gouvernement parle d'un ONDAM des personnes âgées, mais cette dénomination lui permet de gonfler artificiellement ses annonces pour le secteur des personnes âgées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale.
En effet, si l'on considère l'objectif des dépenses pour 2005 pour les personnes âgées, qui est prévu en hausse de 11 %, sur les 425 millions d'euros de moyens nouveaux annoncés par rapport à 2004, 210 millions sont issus de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, le reste provenant du financement de l'assurance maladie.
En ce qui concerne l'ONDAM pour les personnes handicapées, c'est la même chose, car, sur les 330 millions d'euros supplémentaires, 110 millions proviennent de la CNSA.
Cette journée de solidarité sera donc utilisée par le Gouvernement pour financer le déficit de la sécurité sociale et non la politique en direction des personnes âgées handicapées.
Compte tenu de ces différentes raisons et du bazar crée par la journée de solidarité, il me paraît urgent de réintégrer le lundi de Pentecôte dans les jours fériés. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous avons déjà largement débattu de cette question ; la position du Sénat est connue ; la commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 108, qui revient sur la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées : il supprime une recette et, ce faisant, il déséquilibre le financement des actions prévues par cette loi.
Plus fondamentalement, la journée de solidarité a été instituée afin de réaliser une grande avancée sociale (Exclamations sur les travées du groupe CRC) en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées sans pour autant creuser le déficit et l'endettement public.
Il s'agit d'une nouvelle forme de solidarité. Avec la suppression d'un jour férié, les salariés contribueront à l'amélioration de la protection sociale par leur travail et non par une baisse de leur pouvoir d'achat. Ainsi, le surcroît de valeur ajoutée servira au financement des dépenses par le biais d'une hausse affectée des cotisations patronales.
M. François Autain. Je ne sais pas si elle croit vraiment à ce qu'elle dit !
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. Madame la secrétaire d'Etat, faites un petit effort ! Tout à l'heure, M. le ministre nous a expliqué que le Gouvernement allait reconsidérer les dispositions sur les pensions de réversion. Alors, revenez donc sur cette journée de solidarité qui est absolument ridicule ; d'ailleurs, un grand nombre de parlementaires, y compris sur les travées de la majorité, sont favorables à la suppression de cette disposition et au retour du lundi de Pentecôte parmi les jours fériés ; ils sont d'ailleurs intervenus à cet effet auprès du Gouvernement.
Vous pourriez donc, madame la secrétaire d'Etat, consentir dès maintenant cet effort, même si l'on nous reprochera peut-être d'avoir adopté cet amendement nuitamment.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Nous voterons cet amendement, car nous avions déposé le même en juillet dernier, à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à l'assurance maladie. Je ne répéterai donc pas les arguments développés par Claude Domeizel, arguments que les membres du groupe CRC ont d'ailleurs déjà eu l'occasion de présenter.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Perseverare !
M. le président. L'amendement n° 109, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La prise en charge des soins par l'assurance maladie est assurée sans distinction liée à l'âge ou au handicap, conformément aux principes de solidarité nationale et d'universalité rappelés à l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale et quel que soit le domicile ou le substitut de domicile des assurés sociaux.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Il s'agit d'un amendement de précision qui fait suite à un amendement déposé par le Gouvernement lors de l'examen du projet de loi relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
Il vise à insérer avant l'article 3 les mots : « quel que soit le domicile ou le substitut de domicile des assurés sociaux ». En effet, il est opportun de réaffirmer ici que les soins aux personnes âgées et aux personnes handicapées restent bien du ressort de l'assurance maladie et non de la CNSA.
Il est nécessaire pour ce faire de poser le principe selon lequel les soins donnés aux personnes âgées et handicapées, tant au domicile qu'en établissement et quel que soit le lieu, demeurent à la charge de l'assurance maladie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet amendement est satisfait, et la commission demande donc à ses auteurs de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Cazeau, l'amendement est-il maintenu?
M. Bernard Cazeau. Oui, monsieur le président, car il ne me semble pas satisfait.
En effet, je demande que soient ajoutés à la formule : « La prise en charge des soins par l'assurance maladie est assurée sans distinction liée à l'âge ou au handicap, conformément aux principes de solidarité nationale et d'universalité rappelés à l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale » les mots suivants : « et quel que soit le domicile ou le substitut du domicile des assurés sociaux ».
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. J'invite notre collègue Bernard Cazeau à se reporter à l'article L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale, qui dispose ceci « La nation affirme son attachement au caractère universel, obligatoire et solidaire de l'assurance maladie ». Cela concerne donc à la fois les personnes handicapées et les personnes âgées sans condition d'âge.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 109.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3
I. - Le deuxième alinéa (1°) de l'article 13 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées est complété par les mots : « 48 % des produits de cette section sont affectés au financement, par les régimes obligatoires de base de l'assurance maladie, des établissements et services mentionnés au 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles et au 2° de l'article L. 6111-2 du code de la santé publique en 2005 ; ».
II. - Le troisième alinéa (2°) du même article est complété par les mots : « 15 % des produits de cette section sont affectés au financement par les régimes obligatoires de base de l'assurance maladie des établissements et services mentionnés aux 2°, 3°, 7° et 11° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles en 2005 ; ».
La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Cet article est important, car il fixe le montant de la contribution apportée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, au financement du volet médico-social de l'ONDAM.
M. Alain Vasselle, dans son rapport écrit, indique que le présent projet de loi prévoit l'affectation d'une somme « au financement, par les régimes obligatoires de base de l'assurance maladie, des établissements [...] », et qu'il s'agit d'une contribution de la caisse au financement de l'ONDAM médico-social. Il ajoute ceci : « On pourrait en conclure la substitution des crédits de la CNSA à ceux de l'assurance maladie, concrétisant un désengagement de cette dernière du secteur médico-social. En l'absence d'informations fiables sur la répartition finale de l'ONDAM, votre commission ne peut trancher. »
Je profite de l'examen de l'article 3, qui permet le versement d'une participation de la CNSA au financement des régimes obligatoires de base de l'assurance maladie, pour réitérer ma demande de clarification, s'agissant notamment des dépenses relevant de l'assurance maladie au titre des soins concernant les personnes âgées, les personnes handicapées et celles qui sont couvertes par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie au titre de la prise en charge de la perte d'autonomie.
Cette question maintes fois abordée à l'occasion de textes ayant trait respectivement à l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, à la réforme de l'assurance maladie et, plus récemment, lors de l'examen en première lecture à l'Assemblée nationale du présent projet de loi, continue de nous préoccuper.
Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à nous interroger sur les responsabilités respectives de la CNSA, de l'assurance maladie et des collectivités territoriales, en l'occurrence le conseil général, ou à craindre que la création de ladite caisse, improprement dénommée, celle-ci ne s'inscrivant pas dans le champ de la sécurité sociale, ne permette pas véritablement d'améliorer la prise en charge de la perte d'autonomie mais cache un désengagement de l'assurance maladie à l'égard des personnes âgées et des personnes handicapées.
Nos collègues du palais Bourbon ont profité du PLFSS pour tenter d'obtenir du Gouvernement un certain nombre de garanties. Yves Bur, rapporteur pour avis, a défendu un amendement définissant pour 2005 la nature des dépenses afférentes à la section des personnes âgées et à la section des personnes handicapées, répondant ainsi, mais en partie seulement, à notre exigence de voir les soins aux personnes en perte d'autonomie, quel que soit leur âge, rester du ressort de l'assurance maladie.
Il reste, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous n'avez pas donné votre accord à une autre proposition de nature à lever toute ambiguïté sur les compétences respectives de la CNSA et de l'assurance maladie. Je fais référence à l'amendement précisant que, dans les établissements médico-sociaux accueillant des personnes âgées ou handicapées, la rémunération des professionnels inscrits au code de la santé publique et de leurs collaborateurs, les matériels et les traitements prescrits sont financés par les régimes obligatoires de l'assurance maladie.
Cette proposition de financement par l'ONDAM de tous les métiers de la santé que les sénateurs communistes ont portée cet été lors du débat sur l'assurance maladie, comme d'autres parlementaires d'ailleurs, est toujours d'actualité, selon la fédération hospitalière de France.
Vous me direz, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'entre-temps le Sénat a examiné en deuxième lecture le projet de loi sur le handicap. Outre le fait que le Gouvernement en a effectivement profité pour déposer une série d'amendements restrictifs sur la question de l'accessibilité des transports et des lieux publics ou sur les délégations possibles de soins, notamment, fâchant ainsi les associations et les infirmières, il a également saisi cette occasion pour mettre en place le dispositif institutionnel de la CNSA au mépris de l'engagement pris d'une seconde loi et de l'avis négatif des organismes de sécurité sociale.
Certes, le principe d'universalité de l'assurance maladie a été confirmé. Pour autant, aucune garantie réelle n'a été posée contre de futurs transferts de financements. La frontière entre ce qui relève du domaine de la santé et ce qui relève du domaine social reste à définir.
Si nous continuons à voter l'ONDAM médico-social, ces crédits seront transférés à la CNSA, qui les répartira en fonction des programmes interdépartementaux de prise en charge des handicaps et de la perte d'autonomie. Non seulement ce dispositif est d'une complexité redoutable, comme vous l'avez noté, monsieur le rapporteur, mais, de surcroît, il augmente les risques d'un démantèlement de la sécurité sociale.
Quelle est la légitimité de la CNSA pour gérer l'essentiel de l'ONDAM médico-social, une fraction de l'ONDAM sanitaire pour les unités de séjour de longue durée et la contribution de 0,3 % au titre de la journée de solidarité ? De quels moyens disposerons-nous pour vérifier l'affectation de ce nouveau prélèvement aux établissements médico-sociaux ?
Des voix s'élèvent déjà aujourd'hui pour tenter de savoir pourquoi le prélèvement de 40 % sur la contribution de 0,3 % provenant du jour férié et affectée à la médicalisation des établissements médico-sociaux a été réduite de moitié.
Dans ces conditions, vous comprendrez, mes chers collègues, qu'il nous soit impossible de nous contenter de la réponse faite par d'aucuns aux critiques formulées.
Le fait que, cette année, la CNSA apporte 480 millions d'euros à l'ONDAM médico-social ne saurait suffire en soi. Pour nous, ce résultat seul ne compte pas.
En tout état de cause, cette mobilisation de moyens supplémentaires sans commune mesure avec les chiffres annoncés par le Premier ministre au lendemain de la canicule -850 millions d'euros par an - ne peut justifier les moyens utilisés pour y parvenir.
Nous continuons de regretter vivement que ce gouvernement, par ses choix, qu'il s'agisse du mode de financement retenu - le jour férié - ou de l'architecture institutionnelle privilégiée - une agence - se soit interdit la seule réponse à hauteur des besoins des personnes en situation de handicap, à savoir l'intégration de ce risque nouveau qu'est la perte d'autonomie dans le champ de la sécurité sociale.
Monsieur le président, veuillez m'excuser d'avoir été un peu long, mais la complexité et l'importance des questions soulevées le justifiait.
M. le président. L'amendement n° 110, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 2006, dans les établissements et services mentionnés au 3°, 6° et 7° et 11° de l'article L 312-1 du code de l'aide sociale et de la famille et au 2° de l'article L. 61112 du code de la santé publique, la rémunération des professionnels inscrits au code de la santé publique, de même que celle des professionnels qui collaborent avec les auxiliaires médicaux (aides-soignants, aides médico-psychologiques), leurs prescriptions et les matériels qui leur sont nécessaires figurant dans une liste arrêtée par décret, ressortissent du financement par les régimes obligatoires de base de l'assurance-maladie. »
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Monsieur le président, mon collègue Guy Fischer, par son exposé très complet, a déjà bien entamé le débat sur l'article 3 du projet de loi, dont cet amendement n'est qu'une des conséquences.
L'amendement n° 110 prévoit que soient clairement distinguées les responsabilités respectives de l'assurance maladie et de la CNSA en indiquant que la rémunération des professionnels inscrits au code de la santé publique de même que celle des professionnels qui collaborent avec les auxiliaires médicaux, leurs prescriptions éventuelles et les matériels qui leur sont nécessaires ressortissent exclusivement à l'assurance maladie.
Cet amendement s'inscrit donc parfaitement dans le propos de M. Fischer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je remercie M. Cazeau de la brièveté de son propos après le long exposé de notre collègue M. Fischer.
Il est tout à fait légitime que les parlementaires s'interrogent sur la frontière qui doit exister entre les crédits de la CNSA et ceux de l'assurance maladie. Il serait intéressant d'entendre le Gouvernement sur ce point.
C'est d'ailleurs, messieurs Fischer et Cazeau, une des raisons pour lesquelles je plaide vigoureusement, en ma qualité de rapporteur chargé des équilibres financiers, pour une mise en oeuvre la plus rapide possible de la loi organique. Celle-ci nous permettra, si nous allons jusqu'au bout de ce que nous souhaitons, de connaître avec exactitude non seulement les comptes de la CNSA, parce que nous les suivrons à la fois en dépenses et en recettes, mais également les sous-enveloppes de l'ONDAM, notamment de l'ONDAM médico-social.
Il est vrai qu'aujourd'hui il n'est pas toujours évident de connaître la frontière précise entre l'un et l'autre et entre les différentes sous-enveloppes. La porosité, la fongibilité actuelle justifie certaines de nos interrogations. Mais je ne voudrais pas tomber dans le procès d'intention à l'égard du Gouvernement sur cet aspect des choses.
Voilà où nous en sommes aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales, espérant obtenir assez rapidement une réponse positive à toutes ses interrogations, n'a pas jugé utile d'adopter cet amendement n° 110. Mais nous gardons la main avec la réforme prévue par la loi organique, à laquelle nous aspirons fortement depuis un moment.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. Messieurs Fischer et Cazeau, je souhaiterai revenir sur plusieurs points.
L'amendement n° 110 prévoit une modification, à compter du 1er janvier 2006, qui est contraire aux dispositions votées en deuxième lecture par le Sénat à l'article 26 nonies du projet de loi pour l'égalité des droits, des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Cet article prévoit un taux plancher pour la contribution de la CNSA au financement de la prestation de compensation. A ce titre, il apporte déjà des garanties sur la prise en charge de la prestation de compensation individuelle.
Au-delà de ce point précis, j'aborderai deux aspects.
D'abord, monsieur Fischer, je vous remercie d'avoir, dans votre exposé, présenté une synthèse de la loi pour l'égalité des droits, des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Pour autant, monsieur le sénateur, le Sénat s'étant prononcé sur ce texte en deuxième lecture, nous sommes de ce fait au-delà du débat qui, par ailleurs, a été très large, très nourri, ce dont, bien entendu, je me félicite grandement.
Par ailleurs, pour répondre sur le fond à l'amendement n° 110, je rappelle que le principe même de la création de la CNSA, c'est la clarification des lignes budgétaires en direction des politiques pour la dépendance des personnes âgées et des personnes handicapées. Grâce à la CNSA, nous pouvons aujourd'hui raisonner sur des périmètres budgétaires consolidés, dans l'attente, en effet, des avancées que permettra également la LOLF en termes de clarification.
Mais nous sommes d'ores et déjà en mesure d'affirmer que l'on travaillera sur un ONDAM médico-social isolé, fléché, à destination de ces politiques, ce qui apporte aux personnes âgées et aux personnes handicapées de véritables garanties sur la mise en oeuvre, d'une part, de la prestation de compensation et, d'autre part, de la politique de création de places dans laquelle le Gouvernement s'est engagé en prévoyant la création d'une centaine de places environ par semaine.
Pour ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Les choses m'apparaissent un peu complexes, et, avant de pouvoir me prononcer sur cet article 3, je souhaiterais obtenir de la part du Gouvernement quelques éclaircissements, car je n'ai pas tout compris.
M. Guy Fischer. Si même vous, vous n'avez pas compris !
M. Michel Mercier. Les recettes de la Caisse nationale de solidarité seront réparties entre les différents ayants droit, tels qu'ils ont été définis par la loi voilà quelques mois. Or les dispositifs qui permettaient aux établissements médico-sociaux de pallier les conséquences des 35 heures sont désormais supprimés, ce qui va se traduire par une augmentation des dépenses en prix de journée pouvant atteindre 195,62 millions d'euros, qui est le montant qu'a indiqué tout à l'heure le Gouvernement. Cela, au moins, je l'ai compris !
En l'absence de système permettant de financer ces dépenses, il appartiendra aux autorités chargées d'établir les tarifs, c'est-à-dire aux départements, de prendre en charge ces 195,62 millions d'euros. Si je me trompe, ce que j'espère, je voudrais que le Gouvernement me dise où, ailleurs que dans la poche du contribuable, je vais pouvoir trouver cette somme afin de pallier les conséquences de la suppression des dispositifs qui visaient à financer la mise en oeuvre des 35 heures pour les établissements médico-sociaux de forme associative ou privée et habilités à l'aide sociale. (M. Daniel Raoul approuve.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat, qui voudra sans doute rassurer M. Mercier, dont je comprends qu'il s'interroge....
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. Monsieur Mercier, vous posez le problème de la sortie des dispositifs concernant les 35 heures, qui affecte les charges de fonctionnement des établissements et amène effectivement à se poser la question du rebasage de ces établissements.
J'ai demandé aux services compétents de procéder à une estimation de la situation - dont nous avons héritée, il faut quand même le rappeler -, et qui nécessite que nous adoptions sur ces points une approche extrêmement précise et quantifiée.
Les systèmes d'information dont nous disposons aujourd'hui - et dont nous avons également hérité -, ne permettent pas d'avoir une vision en temps réel de la situation des établissements et des besoins.
J'ai donc diligenté une étude particulière sur cette question afin de connaître la nature des besoins. Parallèlement, vous le savez aussi, monsieur le sénateur, nous ne pouvons pas nous désengager du plan de création de places, étant donné l'importance de la demande et du retard de notre pays pour faire face à la situation parfois tragique des personnes auxquelles aucune solution n'est proposée.
Il nous faut donc prendre le temps de l'analyse et de l'étude et, dans certains cas, sans doute, imaginer localement un étalement dans le temps.
Je vois là effectivement tout l'intérêt de la programmation interdépartementale, qui permettra d'avoir une meilleure approche territoriale des besoins et d'optimiser la montée en charge des créations de places.
Cela nous sera d'autant plus aisé que, dans le même temps, il nous faudra trouver les ressources humaines nécessaires pour accompagner cette création de places.
Si nous ne mettons pas en oeuvre le « plan métiers », prévu par la loi, nous nous trouverons dans une situation paradoxale où nous aurons les financements, mais pas les ressources.
En 2005, nous pourrons tout à la fois réaliser le diagnostic dont nous avons besoin pour aborder volontairement et courageusement la question du rebasage, poursuivre l'effort de montée en charge auquel contribue le CNSA à hauteur de 300 millions d'euros - consacrés à la création de places - et, en fin de compte, faire apparaître des solutions en matière de ressources humaines pour budgétiser les créations de places.
Cependant, cette démarche n'est pas immédiate. Nous avons la possibilité de conduire ces opérations de manière simultanée.
C'est la réponse que je suis en mesure de vous faire. Nous avons donc fait le choix, pour 2005, de privilégier la poursuite de la création de places, avec des aménagements locaux quand les besoins budgétaires se font sentir, pour répondre aux attentes des personnes les plus lourdement handicapées.
M. le président. Je n'ai pas le sentiment que M. Mercier ait été tout à fait rassuré sur le financement de ces 196 millions d'euros. (Sourires.)
M. Michel Mercier. Monsieur le président, vous l'êtes encore moins ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. M. Mercier se demande toujours où on va trouver l'argent.
Il suffit que, dans la loi organique, on rattache le budget de la CNSA au projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Nous y veillerons lors de la discussion de la future loi organique.
Mme la secrétaire d'Etat a tenté d'apporter une réponse.
M. Guy Fischer. Seulement tenté !
M. Michel Mercier. Je la remercie ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Je vous sens aussi inquiet que moi, monsieur le président. Cependant, il m'est plus facile de m'exprimer que vous.
Je remercie Mme la secrétaire d'Etat, qui a bien compris ma question bien qu'elle ait répondu à une autre question. (Rires.)
Je comprends qu'il en soit parfois ainsi.
Les collectivités locales, notamment les départements, devenant les principaux acteurs dans le domaine social, devront trouver les recettes correspondant à leurs dépenses.
On peut toujours prévoir des dépenses. Encore faut-il dégager des recettes.
Je m'inquiète à l'idée qu'il ne reste plus aux départements que la seule taxe d'habitation, seul prélèvement dont ils peuvent fixer librement le taux, pour effectuer les ajustements.
Je comprends parfaitement que Mme la secrétaire d'Etat ne puisse pas sortir de sa poche la réponse.
La somme de 195,62 millions d'euros est très importante. Un étalement pourrait être prévu et le Gouvernement pourrait associer les départements aux négociations engagées par les organisations pour mettre fin au gel des salaires, consécutif à la mise en place des 35 heures.
Les presque 200 millions d'euros vont ponctionner l'augmentation de la DGF versée aux départements. Qu'on ne puisse pas apporter une réponse, je le conçois. Cependant, d'ici aux votes du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances, il faut essayer d'y voir plus clair.
A compter du 1er janvier, les départements devront prendre les arrêtés tarifaires destinés à couvrir le prix de journée.
M. About me dit que, si je vote la future loi organique, cela ira mieux à l'avenir.
En attendant, il faut trouver une solution. Il me semblait nécessaire, compte tenu de l'importance de la somme en jeu, qu'on puisse évoquer cette question.
M. le président. Je vous suis très reconnaissant d'avoir apporté ces précisions.
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Mercier a sensibilisé le Gouvernement, le Parlement et la commission des affaires sociales sur la compensation nécessaire de cette charge nouvelle.
Peut-être pourrions-nous faire nôtre cette réflexion dans la mesure où, ainsi que j'ai cru le comprendre, le président du Sénat veut mettre en place un observatoire destiné à mesurer les conséquences de la mise en oeuvre des nouvelles lois de décentralisation, du moins l'acte II de la décentralisation. Vous savez qu'une réforme constitutionnelle est intervenue,...
M. François Autain. C'est mieux qu'une loi organique !
M. Alain Vasselle, rapporteur. ...garantissant aux collectivités la compensation intégrale des charges nouvelles dont elles vont hériter dans le cadre du transfert de compétences.
Dans la mesure où la création de la CNSA est postérieure au vote des lois de décentralisation, ne pourriez-vous pas, monsieur Mercier, mener une réflexion dans cette direction ? Peut-être pourrions-nous organiser un tour de table avec le Gouvernement pour étudier la manière dont l'Etat pourrait compenser aux départements la charge éventuelle résultant de la mise en oeuvre de la prestation autonomie ?
Vous avez plusieurs cordes à votre arc avec la loi organique, la loi de décentralisation et, demain, l'observatoire.
M. le président. On voit combien coûte cher l'imprévision dont on a fait preuve il y a quelques années, dans le domaine social, avec la loi sur les 35 heures. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.
M. Bernard Cazeau. Je n'ai pas encore bien compris quels étaient les rôles respectifs de l'assurance maladie et de la CNSA.
MM. Vasselle et About renvoient le débat à la réforme de la loi organique.
M. Alain Vasselle, rapporteur. C'est pour la fin de l'année !
M. Bernard Cazeau. Je veux bien retirer mon amendement, mais je reviendrai à la charge sur le sujet avec mes collègues de l'assemblée des départements de France.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est bien !
M. le président. L'amendement n° 110 est retiré.
Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans l'avant dernier alinéa (1°) de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21,42 % » est remplacé par le taux : « 32,50 % »
II. - L'article L. 245-7 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après les mots : « travailleurs salariés » sont insérés les mots : « et du fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture maladie universelle du risque maladie mentionné à l'article L. 862-1 » ;
2° Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
Le produit de cette cotisation est ainsi réparti :
a) 20 % sont affectés à la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés ;
b) 80 % sont affectés au fonds de financement mentionné au premier alinéa.
III. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux sommes à percevoir à compter du 1er janvier 2005.
IV - Les pertes de recettes résultant, pour les organismes de sécurité sociale, des dispositions du présent article sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet amendement vise à assurer à la CNAM la compensation intégrale de la charge qui va résulter pour elle du financement de la CMU après le transfert aux régions des écoles d'infirmières et d'aides-soignantes.
Le Gouvernement a prévu dans le dispositif une compensation partielle, mais nous nous sommes aperçus qu'il manquait quelques euros pour que cette opération soit complètement neutre pour l'assurance maladie.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, qui comprend deux parties. La première vise à déplacer les dispositions de l'article 5 bis par cohérence, car des dispositions relatives aux recettes ne peuvent se situer après les articles relatifs aux prévisions de recettes. La seconde partie de cet amendement vise à assurer la compensation intégrale pour la CNAMTS de l'affection de la cotisation sur les boissons alcoolisées au fonds de financement de la CMU à compter de 2005.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier. Cela ne doit pas être facile à expliquer !
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. C'est pour que la Haute Assemblée soit informée et qu'elle puisse ainsi se prononcer avec tous les éléments qui lui seront fournis par le Gouvernement, monsieur Mercier.
L'amendement déposé par le rapporteur pose donc la question du transfert de la cotisation sur les alcools de plus de 25 degrés de la CNAMTS vers le fonds CMU.
Vous indiquez, monsieur le rapporteur, que ce transfert, prévu à l'article 77 du projet de loi de finances, n'est pas totalement compensé.
Je tiens à rappeler la justification de cette mesure de transfert de recettes : il s'agit d'assurer la compensation financière de la décentralisation des écoles de formation des professionnels paramédicaux et des sages-femmes.
Vous le savez, le transfert du financement de ces écoles vers les régions, prévu par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, nécessite d'organiser la compensation financière en question entre la sécurité sociale, qui en assurait jusqu'alors le financement à travers la dotation globale hospitalière, et les régions.
Par souci de simplification - souci qui nous rassemble, les uns et les autres -, la compensation financière auprès des régions sera effectuée directement par l'Etat. La sécurité sociale assurera, quant à elle, la compensation financière auprès de l'Etat du coût du transfert de la charge des écoles de formation, évalué à 356 millions d'euros en année pleine pour 2005.
L'affectation de la cotisation sur les alcools de plus de 25 degrés, actuellement recette de la CNAMTS, au fonds CMU vise donc à assurer de façon définitive la compensation financière du transfert vers les régions du financement des écoles de formation.
Pour l'année 2005, la décentralisation du financement des écoles de formation n'intervenant que le 1er juillet, donc juste au milieu de l'année, l'assurance maladie ne réalisera des économies que sur six mois. Le projet de loi de finances prévoit toutefois d'affecter une part supplémentaire des droits sur les tabacs à la CNAMTS à hauteur de 90 millions d'euros.
Dès 2006, la CNAMTS réalisera des économies en année pleine. Le transfert de la cotisation sur les alcools de plus de 25 degrés correspondra donc à une moindre dépense d'un montant équivalent pour l'assurance maladie.
Le Gouvernement a donc recherché la stabilité dans le temps en transférant une recette et non en versant une dotation révisable chaque année, ce qui correspond bien souvent au souhait légitime des acteurs locaux.
Toute mesure d'ajustement année par année irait à l'encontre de l'objectif de stabilité et de rationalité dans les transferts financiers entre l'Etat et la sécurité sociale, objectif que nous partageons.
En conséquence, le Gouvernement souhaite que cet amendement soit modifié afin qu'il ne comporte plus que les paragraphes I et III. Si tel n'est pas le cas, je demanderai à la commission de bien vouloir le retirer. A défaut, je serai contraint d'en préconiser le rejet.
Cela étant dit, monsieur le rapporteur, nous rejoignons pleinement la préoccupation qui est la vôtre : assurer la cohérence du texte de loi. Les dispositions de l'article 5 bis devraient à juste titre se trouver après l'article 3, c'est-à-dire avant les articles sur les agrégats de recettes.
C'est pourquoi je fais cette proposition.
M. le président. La commission est-elle sensible à l'appel du Gouvernement...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Sans enthousiasme !
M. Guy Fischer. On le sent bien !
M. le président. ...et souhaite-elle rectifier l'amendement dans le sens souhaité par M. le secrétaire d'Etat ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Malgré les explications très précises et techniques de M. le secrétaire d'Etat, dont nous le remercions, les comptes n'y sont pas. Pour ma part, en qualité de rapporteur et conformément au mandat qui m'a été donné par la commission des affaires sociales, je suis prêt à aller dans le sens souhaité par le Gouvernement si celui-ci prend clairement devant la Haute Assemblée l'engagement de compenser intégralement, à l'euro près, au moins sur l'exercice 2006 ce que nous ne retrouvons pas sur l'exercice 2005.
Si cette compensation intégrale est assurée à terme, cela peut être un élément de conciliation avec le Gouvernement. En revanche, si M. le secrétaire d'Etat n'est pas en mesure de prendre cet engagement devant nous, je ne peux que maintenir notre amendement en l'état afin que nous examinions ce point en commission mixte paritaire avec nos collègues de l'Assemblée nationale.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, avez-vous la possibilité de rassurer M. le rapporteur ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Je ne sais pas si cela suffira pour rassurer M. le rapporteur, mais je tiens à l'assurer que, pour l'année 2006, la compensation sera bel et bien intégrale.
Pour l'année 2005, nous essaierons de faire aussi bien, étant entendu que nous trouverons peut-être des recettes supplémentaires pour assurer cette compensation dès l'année prochaine. En tout cas, vous me l'avez demandée pour 2006 : je peux vous répondre favorablement, monsieur le rapporteur.
M. le président. Donc, la commission accepte de rectifier son amendement ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. M. le secrétaire d'Etat a réussi à nous persuader de ce que nous savions, à savoir qu'en 2006 il n'y avait pas de problème ! (Sourires.) Le problème portait sur 2005.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Effectivement, la question posée habilement portait sur 2006. Nous sommes convaincus de la justesse de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, et c'est pourquoi nous rectifions l'amendement en ne maintenant que les paragraphes I et III.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. J'ajouterai simplement que nous reviendrons à la charge en 2005 si nous constatons que les engagements de M. le secrétaire d'Etat ne sont pas respectés,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, et M. Michel Mercier. Il ne les a pas pris ! (Sourires.)
M. Alain Vasselle, rapporteur. ...et alors nous maintiendrons l'amendement.
M. le président. Vous commencez à réagir comme un rapporteur général ! (Sourires.)
Je suis donc saisi d'un amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans l'avant dernier alinéa (1°) de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21,42 % » est remplacé par le taux : « 32,50 % »
II. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux sommes à percevoir à compter du 1er janvier 2005.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
L'amendement n° 111, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présentera au Parlement avant le 30 juin 2005 un rapport sur les conditions de création d'un fonds d'investissement pour les établissements publics sociaux et médico-sociaux.
L'amendement n° 112, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport du Gouvernement sur les conditions de participation des personnes à la prise en charge de leur dépendance est transmis au Parlement le 31 janvier 2005. Ce rapport présentera en particulier les conséquences de la baisse du seuil de revenus à partir duquel la personne bénéficiaire de l'allocation personnalisée d'autonomie participe au plan d'aide.
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour défendre ces deux amendements.
M. Bernard Cazeau. Par l'amendement n° 111, nous demandons au Gouvernement de nous éclairer, à travers un rapport qu'il pourrait présenter au Parlement avant le 30 juin 2005, sur les conditions de création d'un fonds d'investissement pour les établissements publics sociaux et médico-sociaux, sachant que les besoins en ce domaine sont urgents et nombreux.
Quant à l'amendement n° 112, il prévoit un rapport concernant plus particulièrement l'APA à domicile. Le Gouvernement a en effet abaissé de 949 euros à 623 euros le seuil de revenus à partir duquel la personne bénéficiaire de l'APA participe elle-même à ses propres dépenses. Il a fait également passer le « ticket modérateur » de chaque bénéficiaire en moyenne de 5 % à 12 %. L'injustice de cette décision a été renforcée par la hausse de la réduction d'impôt pour l'emploi d'une personne à domicile, qui ne bénéficie qu'aux personnes imposables ayant des revenus élevés.
Cet amendement a donc pour objet de demander au Gouvernement un rapport sur les conditions de participation des personnes à la prise en charge de leur dépendance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Il est défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 112.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 4
Pour 2005, les prévisions de recettes, par catégorie, de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement sont fixées aux montants suivants :
(En milliards d'euros) |
|
Cotisations effectives |
189,8 |
Cotisations fictives |
34,1 |
Cotisations prises en charge par l'Etat |
21,2 |
Autres contributions publiques |
11,8 |
Impôts et taxes affectés |
85,4 |
Transferts reçus |
0,6 |
Revenus des capitaux |
1,0 |
Autres ressources |
6,7 |
Total des recettes |
350,5 |
- (Adopté.)
Article 5
Pour 2004, les prévisions révisées de recettes, par catégorie, de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement sont fixées aux montants suivants :
(En milliards d'euros) |
|
Cotisations effectives |
185,5 |
Cotisations fictives |
31,8 |
Cotisations prises en charge par l'Etat |
19,7 |
Autres contributions publiques |
11,4 |
Impôts et taxes affectés |
80,1 |
Transferts reçus |
0,2 |
Revenus des capitaux |
0,9 |
Autres ressources |
3,7 |
Total des recettes |
333,3 |
- (Adopté.)
Article additionnel après l'article 5
M. le président. L'amendement n° 113, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le gouvernement présentera au Parlement avant le 1er mars 2005 un rapport sur la mise en oeuvre du plan cancer.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Nous avions considéré comme positifs de nombreux éléments du plan cancer, qui reprend d'ailleurs des dispositions qui avaient été mises en oeuvre par M. Bernard Kouchner ; je pense, en particulier, au cancer du sein.
Nous avions cependant émis des doutes, notamment sur l'opportunité de créer l'Institut national du cancer, qui obéissait plus à des influences courtisanes qu'à une réflexion scientifique. Nous nous inquiétons de son fonctionnement, de son opacité et de son coût. Nous souhaiterions avoir des indications sur l'orientation et le pilotage de ce dossier, sur le rôle des ARH.
Un certain nombre de mesures sont affectées au plan cancer. Nous aimerions savoir ce qui relève du budget de l'Etat et ce qui dépend de l'assurance maladie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable, car cet amendement est satisfait par la loi relative à la santé publique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Je ne sais pas si cela donnera satisfaction à M. Cazeau, mais cet amendement est en effet satisfait.
L'Institut national du cancer, qui a pour mission de coordonner les actions de lutte contre le cancer et qui sera mis en place au début de l'année 2005, est d'ores et déjà chargé d'établir un rapport d'activité annuel transmis au Gouvernement et au Parlement.
Le Gouvernement souhaite donc que cet amendement soit retiré. A défaut, il demandera au Sénat de le rejeter.
M. le président. Monsieur Cazeau, l'amendement n° 113 est-il maintenu ?
M. Bernard Cazeau. Non, monsieur le président, je le retire. Je fais confiance à M. le secrétaire d'Etat.
M. le président. Vous lui faites confiance et vous avez raison !
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. J'essaierai d'être à la hauteur de cette confiance, monsieur Cazeau.
M. le président. L'amendement n° 113 est retiré.
Article additionnel après l'article 5 ou avant l'article 6
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 148, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale est abrogé.
II. - La perte de recettes est compensée par le relèvement à due concurrence de la contribution visée au L. 1366 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Il s'agit de l'avant-dernier amendement que nous présentons ce soir.
Le forfait journalier est supporté par les personnes admises dans des établissements hospitaliers ou médico-sociaux, à l'exclusion d'un certain nombre. Ce forfait n'est pas pris en charge par les régimes obligatoires de protection sociale, sauf dans le cas des enfants et adolescents handicapés hébergés dans des établissements d'éducation spéciale ou professionnelle, des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles, des bénéficiaires de l'assurance maternité et des bénéficiaires de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre.
Le forfait journalier peut être modulé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, en fonction de l'un ou de plusieurs des critères suivants : catégorie de l'établissement, nature du service, durée du séjour. Ses différents montants sont fixés par arrêté.
Le forfait journalier s'impute à due concurrence sur la participation laissée éventuellement à la charge des assurés par leurs régimes respectifs d'assurance maladie, lorsque le montant de cette participation est supérieur ou égal à celui du forfait journalier.
Le forfait journalier peut être pris en charge par le régime local d'assurance maladie dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
Instauré en 1987, sous le gouvernement Chirac -Balladur - Juppé, ce forfait journalier constitue, pour les établissements hospitaliers, une recette certes non négligeable, mais plus que discutable.
Le temps passant, les choses ne vont pas de ce point de vue en s'améliorant, ne serait-ce que parce que le plan « Hôpital 2007 » prévoit que, d'ici à 2007, le montant du forfait passera de 13 à 17 euros pour chaque assuré hospitalisé.
On sait que le dispositif connaît, fort heureusement, un certain nombre d'exceptions. Mais l'existence du forfait hospitalier pose un problème majeur pour les assurés disposant de revenus très modestes, notamment ceux qui ne sont pas pourvus d'une couverture complémentaire, et est, au fil du temps, devenu l'objet d'un important contentieux de recouvrement.
Que l'on ne s'y trompe pas et qu'on ne l'oublie jamais, ce sont bien souvent in fine les services sociaux des collectivités territoriales qui assument la prise en charge financière de ce forfait, faute pour les assurés de pouvoir y faire face correctement.
De fait, le forfait, précisément en raison de son caractère forfaitaire, pose d'incontestables problèmes de justice dans son application concrète.
Il en est de même pour les dispositions du code de la sécurité sociale portant sur la facturation de la médecine de ville.
En tout état de cause, l'augmentation très forte du forfait n'est qu'un pis-aller pour financer la modernisation de nos établissements hospitaliers et améliorer la situation.
Pour l'ensemble de ces raisons, nous demandons la suppression du forfait hospitalier.
M. le président. L'amendement n° 114, présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Campion, Le Texier, Printz, Schillinger et Demontes, M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le forfait hospitalier supporté par les personnes admises dans des établissements sociaux et médico-sociaux est fixé à 13 euros par jour.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Cet amendement a trait, lui aussi, au forfait hospitalier.
Pour ce qui nous concerne, nous demandons sa stabilisation à 13 euros. En effet, le Gouvernement, qui a déjà augmenté ce forfait, prévoit que celui-ci augmentera de un euro tous les ans jusqu'en 2007.
Nous considérons que le niveau d'ores et déjà atteint est extrêmement pénalisant, comme le montre la situation que vivent certaines personnes, notamment des personnes âgées, et plus particulièrement en milieu rural, où le montant des retraites est faible.
Nous demandons donc, à travers cet amendement, que l'on fixe une bonne fois pour toutes ce forfait à 13 euros. Ce plafond nous paraît largement suffisant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Vous savez que l'hospitalisation a un coût, pris en charge bien évidemment par l'assurance maladie. Les dépenses hôtelières s'élèvent à environ 80 euros par jour et le forfait journalier est, en règle générale, la seule participation qui est acquittée par les assurés sociaux lors d'une hospitalisation, puisque la plupart des séjours sont exonérés de ticket modérateur.
Par ailleurs, monsieur Fischer, en rejetant l'amendement que vous présentez, nous allons vous empêcher de revenir sur une mesure qui avait été instaurée par M. Ralite, alors ministre de la santé. (Sourires.) Je ne voudrais pas, en effet, que vous vous mettiez en porte à faux par rapport à une philosophie qui vous a guidé ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Pour ces différentes raisons, le Gouvernement demande le rejet de ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 114.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels après l'article 5
M. le président. L'amendement n° 213, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans l'intitulé de la soussection 2 de la section I du chapitre II du titre II du code du travail et dans les articles L. 122318 à L. 122320 de ladite soussection, est substitué au mot : « vendanges », le mot : « récoltes ».
II. - La perte des recettes pour les régimes sociaux est compensée à due concurrence par une augmentation des cotisations mentionnées aux articles L. 1361, L. 1366, L. 1367, L. 13671 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps les amendements n°s 214 et 215.
Les filières agricoles à forte intensité de main -d'oeuvre se trouvent aujourd'hui confrontées à une pénurie qui s'explique en grande partie par des charges salariales et patronales trop élevées.
Parmi les solutions opérationnelles qui sont disponibles, l'extension du contrat « vendanges » aux travaux de récoltes permettrait d'offrir un cadre d'embauche plus souple pour des travailleurs en général très peu qualifiés.
Dans le cadre de ce contrat, le travailleur occasionnel ne paie pas ou paie peu de cotisations d'assurances sociales, ce qui rend évidemment sa rémunération plus attractive. Quant à l'employeur, il bénéficie d'un taux réduit de cotisations patronales pouvant atteindre 90 %.
Ce dispositif, qui est en vigueur depuis 2002, a fait ses preuves dans la filière vitivinicole. Nous nous proposons donc, par l'amendement n° 213, de l'étendre à l'ensemble des récoltes agricoles.
L'amendement n° 214 vise à assimiler le contrat « vendanges » - ou le contrat « récoltes », si l'amendement n° 213 est adopté -, à un contrat de travail.
L'amendement n° 215 permettrait d'augmenter la durée pendant laquelle les emplois saisonniers bénéficient de taux réduits pour les cotisations d'assurances sociales.
M. le président. L'amendement n° 214, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 122320 du code du travail, est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. .... - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 3413, le contrat vendanges peut être assimilé au contrat de travail prévu à l'article L. 3412 qui permet l'entrée en France d'un étranger pour exercer une activité salariée, sous réserve que l'étranger présente les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur et un certificat médical. »
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 215, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 74116 du code rural est ainsi modifié :
1° Dans la dernière phrase du premier alinéa, les mots : « fixé par décret », sont remplacés par les mots : « de 154 jours calendaires consécutifs ou non. »
2° Dans le deuxième alinéa, les mots : « ainsi que la durée maximale d'emploi » sont supprimés.
II. - La perte des recettes pour les régimes sociaux est compensée à due concurrence par une augmentation des cotisations mentionnées aux articles L. 1361, L. 1366, L. 1367, L. 13671 du code de la sécurité sociale.
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Etant rapporteur de la commission des affaires sociales au moment de l'examen de l'amendement « vendanges », qui avait été déposé préalablement à l'Assemblée nationale, je crois me souvenir que le Gouvernement n'était pas très favorable à son adoption. Il n'avait donc pas été possible, à l'époque, de revenir sur la disposition que l'Assemblée nationale et le Sénat avaient retenue.
Aujourd'hui, vous proposez d'élargir le dispositif du contrat « vendanges » à l'ensemble des activités agricoles de récoltes. Je vous rappelle que j'avais moi-même déposé, à l'époque, un amendement visant à permettre aux saisonniers souhaitant être embauchés pour l'élevage ou les récoltes dans les régions de grande culture de bénéficier de cette mesure. Malheureusement, le Gouvernement avait émis un avis défavorable sur cet amendement et le Sénat ne l'avait pas adopté.
Compte tenu de la position que la commission des affaires sociales avait prise en son temps, nous n'émettons aucune objection à votre proposition. Mais ce qui nous importe - vous l'aurez compris, car c'est mon souci depuis le départ -, c'est que nous obtenions l'assurance de la compensation, donc de l'allègement de ces charges au profit de la caisse de sécurité sociale. Si le Gouvernement accepte de nous donner cette garantie, la commission des affaires sociales est prête à émettre un avis favorable sur l'amendement n°213 ainsi que, par voie de conséquence, sur l'amendement n° 215.
En revanche, les dispositions de l'amendement n° 214 relèvent du droit du travail et sont totalement étrangères au champ du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cet amendement s'apparente donc à un cavalier. C'est pourquoi nous ne pouvons qu'émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Monsieur Vanlerenberghe, je suis au regret de vous dire que le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n°s 213, 214 et 215, pour des raisons qui tiennent davantage aux dispositions existantes qu'aux motivations de leurs auteurs. En effet, ces préoccupations sont parfaitement légitimes et partagées par un grand nombre de départements.
Concernant l'amendement n° 213, il faut souligner que les employeurs du secteur agricole peuvent, comme les autres employeurs, bénéficier de mesures de réduction des cotisations patronales de sécurité sociale. D'une part, ils peuvent appliquer la réduction générale dégressive sur les bas et moyens salaires. D'autre part, ils peuvent bénéficier, s'ils remplissent les conditions requises, de mesures ciblées sur certains publics ou sur certains territoires, telles que les zones de revitalisation rurale.
Je voudrais également vous indiquer que le ministère de l'agriculture étudie actuellement, avec la Mutualité sociale agricole, la MSA, et les professionnels, dans quelle mesure une extension du dispositif actuel pourrait être envisagée sans porter atteinte aux grands équilibres budgétaires.
Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 215.
Je rappelle que les employeurs du secteur agricole peuvent déjà bénéficier de toute une panoplie d'exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale qui réduisent le coût du travail.
Par ailleurs, le Gouvernement vient de décider d'apporter des aides substantielles d'urgence aux professionnels durement touchés par la crise que connaît actuellement le secteur des fruits et légumes en termes de trésorerie, de prêts de consolidation, d'étalement des cotisations sociales personnelles et de mesures structurelles, pour un montant global de 71 millions d'euros. Cet effort considérable traduit bien l'attention particulière que porte le Gouvernement à ce secteur en difficulté. Monsieur le sénateur, sachez que nous partageons ce souci.
Sur l'amendement n° 214, le Gouvernement émet également un avis défavorable. Si l'article L. 341-3 du code du travail interdit l'introduction de salariés étrangers dans le cadre d'un contrat de travail temporaire, les entreprises agricoles françaises qui ne trouvent pas suffisamment de main -d'oeuvre pour les travaux saisonniers, notamment de vendanges, peuvent faire appel à des travailleurs étrangers par le canal de l'Office des migrations internationales.
M. le président. Monsieur Vanlerenberghe, compte tenu de ces explications, les amendements sont-ils maintenus?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Concernant l'amendement n° 214, je comprends parfaitement l'explication qui a été donnée selon laquelle ces dispositions relèvent du droit du travail. En conséquence, je retire cet amendement.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. S'agissant des amendements n°s 213 et 215, il m'a été répondu que des possibilités étaient offertes par le droit actuel. Pour ma part, je ne les connais pas précisément et je pense qu'il ne serait pas mauvais de donner un signal fort.
Tout à l'heure, M. Vasselle rappelait justement les débats qui avaient eu lieu au Sénat lors de l'examen de l'amendement « vendanges ». Il s'agit, à mes yeux, d'un signal fort donné à des professions à faible qualification dont le manque se fait aujourd'hui cruellement ressentir dans notre pays.
Il me paraît important que le Gouvernement soutienne d'une façon particulière l'effort réalisé. Il faut savoir que des associations d'insertion jouent souvent le rôle de relais pour envoyer des travailleurs faiblement qualifiés sur les lieux de récoltes.
Selon moi, le Gouvernement et le Sénat seraient bien inspirés de voter cet amendement. Puisqu'il s'impose, je le maintiens.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d'abord vous remercier d'avoir accepté de retirer l'amendement n° 214 et d'avoir ainsi manifesté votre compréhension.
Nous partageons, me semble-t-il, la même préoccupation.
En ce qui concerne l'amendement n° 215, je voudrais vous dire que le Gouvernement a déjà prévu un dispositif important, qui est un accompagnement. Et ce que vous demandez va bien au-delà du simple geste.
Avec les 71 millions d'euros qui accompagnent ce dispositif, le Gouvernement vise avant tout - comme vous, j'en suis persuadé - à pérenniser l'emploi des salariés agricoles. Or, l'adoption de cet amendement, tendant à instituer la règle des 154 jours, entraînerait une précarisation de ces salariés. Je ne pense pas que ce soit ce que vous souhaitiez, monsieur le sénateur, bien au contraire ! En effet, étendre l'exonération à 154 jours permettrait aux employeurs d'appliquer également l'exonération à des salariés permanents, ce qui n'est pas dans la logique du dispositif, qui vise à favoriser l'embauche des travailleurs saisonniers.
J'en viens à l'amendement n° 213. Nous acceptons de tenir informés l'auteur de cet amendement ainsi que la Haute Assemblée de l'état d'avancement précis des discussions qui sont en cours à l'heure actuelle entre le ministère, la MSA et les professionnels. Nous sommes en train de progresser pour trouver une solution qui convienne à tous. Je crains que le présent amendement, s'il était adopté, ne vienne en définitive contrecarrer cet effort de concertation.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement, même s'il partage les préoccupations de son auteur.
M. le président. Monsieur Vanlerenberghe, les amendements n°s 213 et 215 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je retire l'amendement n° 215 ; en revanche, je maintiens l'amendement n° 213.
M. le président. L'amendement n° 215 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 213.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
L'amendement n° 216, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
A compter de 2005, le Gouvernement déposera sur le bureau de l'Assemblée nationale et sur celui du Sénat un rapport sur la lutte contre la toxicomanie afin d'évaluer les actions nécessaires afin d'obtenir une diminution concrète de la consommation de stupéfiants et une prise en charge thérapeutique adaptée aux consommateurs de stupéfiants.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Il est prévu, par cet amendement, que le Gouvernement dépose sur le bureau de l'Assemblée nationale et sur celui du Sénat un rapport sur la lutte contre la toxicomanie.
La France détient aujourd'hui le record d'Europe pour la consommation de cannabis chez les adolescents. Les investigations menées par la commission d'enquête du Sénat sur la politique nationale de lutte contre les drogues illicites ont mis en évidence, depuis une dizaine d'années, une augmentation très importante de la consommation des drogues illicites, avec des produits de plus en plus diversifiés, ainsi qu'une production et un trafic multiforme en progression.
La lutte contre la toxicomanie est donc devenue un grave enjeu de santé publique. Cette politique doit être axée sur une prévention qui soit ciblée, efficace et la plus large possible, ainsi que sur le développement d'une offre de soins permettant aux victimes de la drogue de sortir de l'accoutumance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Les dispositions de cet amendement relèvent d'un texte de santé publique et ne peuvent donc être examinées que dans ce cadre-là. Même si nous ne mettons pas en cause leur bien-fondé, elles n'ont malheureusement pas leur place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Sinon, cet amendement s'apparenterait à un cavalier que le Conseil constitutionnel, s'il était saisi, pourrait sanctionner.
C'est la raison pour laquelle la commission sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Je comprends la motivation de l'auteur de l'amendement, mais j'ai aussi écouté l'argumentation de M. le rapporteur. Je rappelle qu'un plan quinquennal 2004-2008 a été présenté cet été par la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT. Les objectifs ont été assortis d'indicateurs quantitatifs qui sont élaborés de façon à être mesurés année après année.
Monsieur le sénateur, je veux bien prendre l'engagement devant vous que ces indicateurs seront bel et bien transmis annuellement à l'ensemble des parlementaires.
M. le président. Monsieur Vanlerenberghe, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 216 est retiré.
Article 5 bis
I. - Dans l'avant-dernier alinéa (1°) de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21,42 % » est remplacé par le taux : « 32,50 % ».
II. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux sommes à percevoir à compter du 1er janvier 2005.
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'article 5 bis est supprimé.
Article additionnel après l'article 5 bis
M. le président. L'amendement n° 100, présenté par M. Autain, est ainsi libellé :
Après l'article 5 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Après les mots : « et pour ceux qui sont en activité une cotisation », la fin du premier alinéa de l'article L. 712-9 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : « de l'Etat dont le taux est fixé à 11,9% ».
II. Les charges résultant, pour l'Etat, des dispositions du présent article sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Il s'agit, par cet amendement, de mettre fin à une anomalie dont bénéficie l'Etat au détriment de la sécurité sociale.
En effet, l'Etat n'est pas soumis, dans ses obligations d'employeur, à un taux de cotisation d'assurance maladie-maternité équivalent à celui des employeurs du privé.
La Cour des comptes a calculé, dans son dernier rapport sur la sécurité sociale, que le taux de parité devrait s'élever à 11,9 % et non à 9,7 % comme c'est le cas actuellement. Elle note d'ailleurs qu'un taux voisin de 11,5 % est appliqué aux agents hospitaliers et au personnel des collectivités locales.
Le manque de recettes pour le régime général, dû à une moindre contribution de l'Etat employeur, s'élève à plus de 2 milliards d'euros chaque année.
L'objet de cet amendement est donc de remédier à cette situation. S'il était adopté, il donnerait l'occasion de faire rentrer dans les caisses de la sécurité sociale des sommes dont elle a effectivement bien besoin pour combler le déficit très important auquel nous sommes confrontés aujourd'hui.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Autain pose une question qui a été déjà soumise à la Cour des comptes. Le ministère des finances a avancé des éléments de justification et la Cour a jugé que ses arguments n'étaient pas recevables.
On peut s'interroger sur la divergence du taux de cotisation qui existe entre l'Etat - il est de 9,7 %, comme l'a rappelé M. Autain -, les hôpitaux et les collectivités territoriales - il est fixé pour eux à 11,5 %. Mais le coût de l'amendement de M. Autain est, malgré tout, de 2 milliards d'euros pour l'Etat. Une telle initiative ne peut qu'émaner du Gouvernement. La commission souhaiterait donc connaître son avis.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Si l'objectif qui est affiché par M. Autain est la transparence, nous ne pouvons qu'y souscrire.
La détermination du juste taux est délicate et, comme vient de le rappeler M. le rapporteur à l'instant, on s'aperçoit qu'entre l'Etat et les collectivités locales les taux ne sont pas les mêmes en dépit de l'apparente similitude des régimes.
Il faut avoir des éléments fiables. Le dispositif doit être véritablement stabilisé économiquement et juridiquement afin de savoir quel est le niveau du taux qui peut être appliqué. Je crois aussi que l'on doit tenir compte du fait que l'assiette des cotisations dues par l'Etat n'est pas celle du droit commun puisqu'elle est limitée au traitement brut indiciaire, à l'exception de toute prime ou indemnité.
Monsieur le sénateur, les enjeux financiers sont trop lourds pour qu'une question aussi sensible soit réglée au détour d'un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Pour l'ensemble de ces raisons, je ne suis pas favorable à votre amendement.
M. le président. Monsieur Autain, l'amendement n° 100 est-il maintenu ?
M. François Autain. L'argumentation de M. le secrétaire d'Etat ne m'a absolument pas convaincu et ne m'a pas laissé le moindre espoir.
Il ne m'est même pas apparu que l'intention du Gouvernement était d'étudier la question. M. le rapporteur a fait état de la réponse du ministère de l'économie et des finances. Il ne semble pas que la disparité que j'ai dénoncée soit contestable. Ce serait la première fois qu'un ministère prendrait des mesures pour éviter à la caisse d'assurance maladie d'avoir trop à payer si jamais un autre taux était appliqué. Ce sont des arguments qui ne tiennent pas.
Aujourd'hui, la situation est claire. Le Gouvernement profite de la situation pour faire chaque année une économie de 2 milliards d'euros, ce qui est particulièrement injuste à un moment où l'assurance maladie présente une situation financière très difficile. Donc, je demande à M. le secrétaire d'Etat quand il va mettre fin à cette injustice par rapport aux autres employeurs privés, ou publics, comme les établissements hospitaliers.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Nous reviendrons demain sur ce point lors du débat sur l'assurance maladie. M. le secrétaire d'Etat a déployé beaucoup de qualités pour expliquer l'inexplicable.
Politiquement, je ne voterai pas cet amendement. Il faut rappeler qu'il y a d'autres charges indues qui pèsent sur la sécurité sociale. La politique de santé coûte très cher, mais ce n'est pas pour autant que l'Etat ne doit pas se comporter normalement et de façon transparente vis-à-vis de ses concitoyens.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Je voudrais indiquer à M. Autain qu'il n'est pas question de fermer définitivement la porte à la proposition qui est faite. Mais il ne me semble ni souhaitable ni possible d'engager ce débat au détour d'un amendement sur un article du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Si l'on se dirige vers l'uniformisation du taux de cotisation d'assurance maladie pour l'employeur, il faudra en étudier les implications à tous les niveaux.
J'ai été particulièrement sensible à l'argumentation du rapporteur pour avis. Les incidences financières de cette mesure sont importantes et nécessitent une véritable réflexion. En effet, cette question n'est pas déconnectée du sujet des prélèvements obligatoires, évoqué la semaine dernière par la Haute Assemblée. Pour ces raisons de fond et de forme, je n'invoquerai pas l'article 40 de la Constitution. Néanmoins, je confirme l'avis défavorable du Gouvernement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 100.
(L'amendement n'est pas adopté.)
TITRE V
OBJECTIFS DE DÉPENSES RÉVISÉS POUR 2004
Article 31
Pour 2004, les objectifs révisés de dépenses par branche de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres sont fixés aux montants suivants :
(En milliards d'euros) |
|
Maladie, maternité, invalidité et décès |
145,1 |
Vieillesse et veuvage |
146,8 |
Accidents du travail |
10,1 |
Famille |
45,0 |
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. L'article 31 du projet de loi porte sur la douloureuse question de la dérive des comptes sociaux. Il établit le montant global des dépenses ordonnancées pour les différentes branches de la protection sociale et doit être comparé au montant des objectifs inscrits dans le cadre de la loi de financement pour 2004.
Les dépenses d'assurance maladie sont évaluées à 145,1 milliards d'euros, pour un objectif de 143,6 milliards d'euros en loi de financement.
Les dépenses d'assurance vieillesse sont établies à 146,8 milliards d'euros, pour un objectif initial de 146,6 milliards d'euros.
Les dépenses de la branche accidents du travail s'établissent à 10,1 milliards d'euros pour un objectif initial de 9,7 milliards d'euros.
Pour l'ensemble de ces trois branches, le dépassement global est de 2,1 milliards d'euros et il est réduit de 0,5 milliard d'euros grâce aux moindres dépenses observées sur la branche famille.
Au final, on se retrouve avec 347 milliards d'euros de dépenses révisées.
Dans les faits, le décalage est donc pour le moins limité, ce qui ne peut que prouver, une fois encore, que c'est l'insuffisance de ressources qui provoque la dérive des comptes sociaux.
L'encadrement de la dépense sociale montre que, dès cette année 2004, nous pouvons constater l'incidence des mesures induites par la réforme des retraites, comme, en apparence par paradoxe, celle des mesures prises en matière de politique familiale.
Nous ne voterons pas cet article.
M. le président. Je mets aux voix l'article 31.
(L'article 31 est adopté.)
TITRE VI
MESURES DIVERSES ET DISPOSITIONS RELATIVES À LA TRÉSORERIE
Article 32
I. - L'intitulé du chapitre VIII bis du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé : « Dispositions communes aux contributions recouvrées par les organismes de recouvrement du régime général ».
II. - L'article L. 138-20 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 138-20. - Les contributions instituées aux articles L. 138-1, L. 138-10, L. 245-1, L. 245-5-1 et L. 245-6 sont recouvrées et contrôlées, selon les règles et sous les sanctions et garanties applicables au recouvrement des cotisations du régime général assises sur les rémunérations, par des organismes mentionnés à l'article L. 213-1 désignés par le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
« La contribution instituée à l'article L. 137-6 est recouvrée et contrôlée par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, dans les conditions prévues au 3° de l'article L. 225-1-1. L'agence peut recueillir l'assistance des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et des caisses générales de sécurité sociale des départements d'outre-mer, notamment par la mise à disposition d'agents de ces organismes, chargés du contrôle.
« Les agents chargés du contrôle sont habilités à recueillir auprès des assujettis tous les renseignements de nature à permettre le contrôle de l'assiette et du champ d'application des contributions. »
III. - L'article L. 138-21 du même code est abrogé.
IV. - Aux articles L. 138-7, L. 138-17, L. 245-3 et L. 245-5-5 du même code, les mots : « au 3° de l'article L. 225-1-1 et des articles L. 138-20 à L. 138-23 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 138-20 à L. 138-23 ». A l'article L. 138-19 du même code, les mots : « l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale » sont remplacés par les mots : « l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales désignée à cet effet ».
V. - Les dispositions du présent article s'appliquent pour le recouvrement des contributions exigibles à compter du 1er janvier 2005, à l'exception du solde de la contribution prévue au VII de l'article 12 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n° 2003-1199 du 18 décembre 2003) ainsi que de la régularisation de la contribution prévue à l'article L. 138-4 du code de la sécurité sociale intervenant le 31 mars 2005, dont le recouvrement et le contrôle relèvent de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 138-20 du code de la sécurité sociale.
Les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 138-20 reprennent les droits et obligations, actions et poursuites, dettes et créances de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, nés des opérations de recouvrement et de contrôle intervenues jusqu'au 31 décembre 2004, à l'exception de ceux relatifs au solde et à la régularisation mentionnés à l'alinéa précédent. - (Adopté.)
Article 32 bis
I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au début de l'article L. 212-3, il est inséré un I ainsi rédigé :
« I. - La Caisse maritime d'allocations familiales assure en faveur des personnes affiliées au régime spécial de sécurité sociale des gens de mer le service des prestations familiales.
« Elle assure également pour ces personnes :
« 1° Le recouvrement des cotisations d'allocations familiales dues par les employeurs et les travailleurs indépendants selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables à ce recouvrement par les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et les caisses générales de sécurité sociale ;
« 2° Le recouvrement de la contribution sociale généralisée selon les dispositions des articles L. 136-1 et suivants ;
« 3° Le recouvrement de la contribution pour le remboursement de la dette sociale instituée par l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale ;
« 4° Le contrôle et le contentieux du recouvrement prévu aux 1°, 2° et 3°. » ;
2° Le 6° de l'article L. 752-4 est complété par les mots : « à l'exception des compétences mentionnées aux 1°, 2°, 3° et 4° de l'article L. 212-3 du présent code qui sont exercées dans les départements d'outre-mer par la Caisse maritime d'allocations familiales ».
II. - Sous réserve des décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée, sont validées à compter du 1er janvier 1999 les actions de recouvrement des cotisations d'allocations familiales, de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale dues par les personnes affiliées au régime spécial de sécurité sociale des gens de mer, dès lors qu'elles ont été effectuées en métropole ou dans les départements d'outre-mer, en leur nom ou pour le compte des caisses générales de sécurité sociale, par la Caisse maritime d'allocations familiales à compter du 1er janvier 2002, et antérieurement, par la Caisse nationale des marins pêcheurs et par la Caisse nationale d'allocations familiales des marins du commerce. - (Adopté.)
Article 33
I. - A l'article L. 174-2 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 2005, les mots : « prestations d'hospitalisation mentionnées au 1° de l'article L. 162-22-6 des établissements de santé mentionnés aux a, b et c du même article et les » sont supprimés.
II. - Après l'article L. 174-2 du même code, il est inséré un article L. 174-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 174-2-1. - La part prise en charge par l'assurance maladie pour les prestations d'hospitalisation prévues au 1° de l'article L. 162-22-6 et réalisées dans les établissements de santé mentionnés aux a, b et c du même article, les médicaments et produits et prestations mentionnés à l'article L. 162-22-7 ainsi que les actes et consultations mentionnés à l'article L. 162-26 est remboursée aux établissements pour le compte de l'ensemble des régimes par la caisse mentionnée à l'article L. 174-2.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article, notamment les responsabilités respectives de cette caisse et de l'organisme dont dépend le bénéficiaire des soins, en particulier les conditions et les délais dans lesquels cet organisme peut assurer la vérification des sommes à rembourser et autoriser leur paiement. »
III. - L'article L. 174-18 du même code est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :
« Les frais d'hospitalisation afférents aux soins dispensés dans les établissements de santé privés mentionnés aux d et e de l'article L. 162-22-6, pris en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie, sont remboursés, pour le compte de l'ensemble des régimes d'assurance maladie, par la caisse primaire d'assurance maladie dans la circonscription de laquelle est implanté l'établissement. » ;
2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'Etat, après avis des organisations représentatives des établissements de santé, détermine les modalités d'application du présent article, notamment les responsabilités respectives de cette caisse et de l'organisme dont dépend le bénéficiaire des soins, en particulier les conditions et les délais dans lesquels la caisse mentionnée au premier alinéa peut assurer la vérification des sommes à rembourser et autoriser leur paiement. »
IV. - Le D du V de l'article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n° 2003-1199 du 18 décembre 2003) est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les dotations annuelles complémentaires mentionnées au 2° du A du V du présent article sont versées par douzième par la caisse mentionnée à l'article L. 174-2 du code de la sécurité sociale.
« Pour les années 2005 et 2006, la répartition des sommes versées, au titre de l'alinéa précédent aux établissements mentionnés aux a, b et c de l'article L. 162-22-6 du même code, entre les différents régimes obligatoires d'assurance maladie, est effectuée dans les conditions prévues à l'article L. 174-2 susmentionné. De même, par dérogation à l'article L. 162-22-15 du même code, les sommes versées au titre des forfaits annuels mentionnés à l'article L. 162-22-8 du même code et des dotations annuelles de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation mentionnées à l'article L. 162-22-13, sont également réparties selon les modalités prévues à l'article L. 174-2.
« Pour les années 2007 à 2012, la répartition, entre les régimes obligatoires d'assurance maladie, des sommes versées au titre de la dotation annuelle complémentaire aux établissements mentionnés aux a, b et c de l'article L. 162-22-6 est effectuée chaque année au prorata des charges afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés l'année précédente et supportées par chacun de ces régimes dans le cadre des activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie de ces établissements.
« Les modalités d'application des trois alinéas précédents sont précisées par décret en Conseil d'Etat. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 200, présenté par MM. Fischer, Muzeau, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement de notre groupe, visant à la suppression de l'article 33 du présent projet de loi, présente un caractère logique, au regard de notre position de fond.
Je déplore le « saucissonnage » de la discussion, qui nous empêche de nous exprimer sur les articles les plus signifiants de ce point de vue. L'article 33 consacre la séparation comptable entre dotation globale et tarification à l'activité dans les établissements hospitaliers publics et privés.
En quelque sorte, il fait des hôpitaux publics et des cliniques privées, des prestataires de services assimilables à des restaurateurs, qui proposeraient, d'un côté, des services hôteliers financés sur dotation globale et, de l'autre, des spécialités à la carte, financées par la tarification à l'activité.
On mesure aisément ce que la dérive comptable ainsi organisée va induire concrètement pour les assurés : c'est la mise en place d'un service public hospitalier à plusieurs vitesses qui se profile, rompant avec l'égalité de traitement des patients selon leur lieu de résidence et mettant à mal, en dernière instance, l'égalité tout court entre assurés sociaux.
Il est donc tout à fait naturel que nous vous proposions la suppression de l'article 33.
M. le président. L'amendement n° 65, présenté par M. P. Blanc, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L.174-2-1 du code de la sécurité sociale, après les mots :
Un décret en conseil d'Etat
insérer les mots :
, pris après avis consultatif des organisations représentatives des établissements de santé,
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission reprend cet amendement, qui se justifie par son texte même et qui apporte une précision importante.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 65 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 27, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du 2° du III de cet article, remplacer les mots :
la caisse mentionnée au premier alinéa
par les mots :
cet organisme
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Il s'agit de la correction d'une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 200 ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Sur l'amendement n° 200, défendu par M. Fischer, le Gouvernement émet un avis défavorable. Il s'agit de supprimer un article qui crée une caisse pivot, assurant des flux de trésorerie aux établissements, et dont tout le monde est demandeur.
Concernant les amendements nos 65 rectifié et 27, le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 33, modifié.
(L'article 33 est adopté.)
Article 34
Le chapitre IV bis du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par un article L. 114-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 114-6. - Les comptes des régimes et organismes de sécurité sociale doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle de leur patrimoine et de leur situation financière.
« Les comptes annuels et infra-annuels des organismes de base de sécurité sociale sont présentés par l'agent comptable, établis sous sa responsabilité et visés par le directeur, sont transmis à l'organisme national de la branche ou du régime qui les valide et établit le compte combiné de la branche ou du régime.
« Les organismes nationaux de sécurité sociale qui gèrent un régime obligatoire de base transmettent leurs comptes annuels au ministre chargé de la sécurité sociale et à la Cour des comptes.
« Les organismes nationaux de sécurité sociale qui gèrent un régime obligatoire de base comportant un réseau de caisses locales ou régionales transmettent les comptes combinés annuels au ministre chargé de la sécurité sociale et à la Cour des comptes.
« Les comptes des régimes de protection sociale agricole sont également transmis au ministre de l'agriculture.
« Les comptes annuels et infra-annuels des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales présentés par l'agent comptable, établis sous sa responsabilité et visés par le directeur, sont transmis à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale qui les valide et établit annuellement le compte combiné de l'activité de recouvrement. L'agence transmet ce compte combiné annuel au ministre chargé de la sécurité sociale et à la Cour des comptes.
« Les modalités d'application du présent article sont définies par décret. »
M. le président. L'amendement n° 46, présenté par MM. Gournac et Murat, est ainsi libellé :
I - Rédiger ainsi le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1146 du code de la sécurité sociale :
« Les comptes annuels et infra-annuels des organismes de base de sécurité sociale, présentés par l'agent comptable, établis sous sa responsabilité et visés par le directeur, sont transmis à l'organisme national chargé de leur centralisation. Ce dernier valide ces comptes et établit le compte combiné de la branche ou de l'activité de recouvrement, ou du régime.
II - En conséquence, supprimer l'avant-dernier alinéa du même texte.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission reprend cet amendement, qui procède à une modification de l'article pour le clarifier.
M. le président. Il s'agit de l'amendement n° 46 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 34, modifié.
(L'article 34 est adopté.)
Article 34 bis
Après le chapitre IV bis du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est inséré un chapitre IV ter ainsi rédigé :
« CHAPITRE IV TER
« Alerte sur l'évolution des dépenses de sécurité sociale
« Art. L. 114-7. - Les organismes nationaux visés au deuxième alinéa de l'article L. 114-6 sont chargés d'alerter le Gouvernement en cas d'évolution des dépenses de la branche ou du régime manifestement incompatible avec le respect des objectifs votés par le Parlement en loi de financement de la sécurité sociale.
« Le Gouvernement en informe les commissions compétentes des assemblées ainsi que des mesures prises ou envisagées pour y remédier. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 28, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous demandons la suppression de l'article 34 bis, qui provient d'un ajout de l'Assemblée nationale.
L'introduction de modalités d'alerte en cas de dérapage des dépenses sociales doit être débattue dans le cadre de la réforme de la loi organique relative aux lois de financement. Il est souhaitable d'attendre ce moment.
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 114-7 du code de la sécurité sociale :
« Art. L. 114-7. - Les organismes nationaux visés au deuxième alinéa de l'article L. 114-6 sont chargés d'alerter le Gouvernement et le Parlement en cas d'évolution des dépenses de la branche ou du régime manifestement incompatible avec le respect des objectifs votés par le Parlement en loi de financement de la sécurité sociale.
« Le Gouvernement informe les commissions compétentes des deux assemblées des mesures prises ou envisagées pour y remédier. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Ma position est un peu différente de celle du rapporteur. Très modestement, je propose que le mécanisme d'alerte émis par les organismes de sécurité sociale en cas d'évolution de dépenses de sécurité sociale - manifestement incompatible avec les objectifs votés par le Parlement en loi de financement pour la sécurité sociale - s'adresse à la fois au Gouvernement et au Parlement, car il me paraît important que ce dernier en soit informé, au même titre que le pouvoir exécutif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous partageons l'objectif de M. Jégou. Mais, comme nous allons examiner en 2005 la réforme de la loi organique relative aux lois de financement, nous règlerons ce problème à cette occasion. Nous lui demandons de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° 39 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Non, je le retire
M. le président. L'amendement n° 39 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 28 ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Initialement, le Gouvernement voulait s'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces deux amendements. En vertu d'une jurisprudence que j'ai eu l'occasion de pratiquer, quand il y a des positions quelque peu divergentes entre l'Assemblée nationale et le Sénat sur le même sujet et qui ont trait aux rapports entre les assemblées parlementaires, le Gouvernement s'étant remis à la sagesse de l'Assemblée nationale, il doit s'en remettre à la sagesse du Sénat.
Dans la mesure où M. Jégou a accepté de retirer son amendement, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 28.
M. le président. En conséquence, l'article 34 bis est supprimé.
Article 35
Les besoins de trésorerie des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres et des organismes ayant pour mission de concourir à leur financement peuvent être couverts par des ressources non permanentes dans les limites suivantes :
(En millions d'euros) |
|
Régime général |
13 000 |
Régime des exploitants agricoles |
6 200 |
Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales |
500 |
Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines |
200 |
Caisse nationale des industries électriques et gazières |
500 |
Les autres régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres, lorsqu'ils disposent d'une trésorerie autonome, ne sont pas autorisés à recourir à des ressources non permanentes.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'article 35 porte sur la question des avances de trésorerie des différents régimes obligatoires de base, dont le montant global s'élève à plus de 20 milliards d'euros pour les régimes autorisés à faire appel à ces ressources de caractère temporaire.
Cet article montre, en toute objectivité d'ailleurs, que certains régimes sociaux ont effectivement besoin, à plus d'un titre, de ressources temporaires.
S'agissant du régime général, la cause de ses difficultés provient non seulement de la situation économique générale, notamment des insuffisances de ressources liées au chômage et aux bas salaires, mais aussi de la moindre fluidité des rentrées de cotisations dues par les entreprises.
Pour le régime des exploitants agricoles, l'on observe que l'autorisation d'avance porte sur pratiquement 40% des prestations servies, c'est-à-dire près de cinq mois de prestations.
En ce qui concerne la CNRACL, le problème tient à sa contribution à la surcompensation entre régimes obligatoires, contribution qui consomme sa trésorerie disponible.
Il est probable également que la situation créée pour la Caisse des industries électriques et gazières soit directement liée aux mesures du projet de loi portant sur la soulte EDF.
In fine, ces avances de trésorerie accentuent les choix politiques qui président aujourd'hui à la politique sociale du pays.
M. le président. Je mets aux voix l'article 35.
(L'article 35 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 35
M. le président. L'amendement n° 233, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 35 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- A la fin de la Section 01 du Chapitre premier du Titre III de la deuxième partie du code général des impôts, il est inséré un V ainsi rédigé :
« V. Restitution des contributions et prélèvements précomptés sur les revenus de placement exonérés d'impôt sur le revenu pour les titulaires de pension de réversion ayant un revenu imposable inférieur au minimum vieillesse
« Art.1600-0 N.- Les contributions et prélèvements précomptés sur les revenus de placement visés au II de l'article 16000 D dans les conditions prévues aux articles 16000 D, 16000 F bis et 16000 J sont restitués aux personnes physiques bénéficiaires d'une pension de réversion prévue à l'article L. 3531 du code de la Sécurité sociale et dont le revenu imposable ne dépasse pas la somme des allocations prévues aux articles L. 8111 et 8152 du même code. »
II- les pertes de recettes résultant pour les régimes sociaux des dispositions du I sont compensées, à due concurrence, par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 234, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 35 insérer un article additionnel ainsi rédigé:
L'article L. 41331 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour améliorer la qualité des soins, il est nécessaire de mettre en oeuvre une réelle formation médicale continue.
« La formation continue des professions de santé et des paramédicaux sera : obligatoire, évaluée et financée dès 2005. »
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. En premier lieu, monsieur le président, je retire l'amendement n° 234.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Quant à l'amendement n°233, il vise à prévoir la restitution de la CSG, de la CRDS et du prélèvement social de 2 % précomptés sur les revenus de placement qui sont déjà exonérés d'impôt sur le revenu pour les titulaires de pension de réversion dont le revenu imposable est inférieur au minimum vieillesse, soit 587 euros par mois.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je comprends fort bien le souci de notre collègue M. Vanlerenberghe concernant les titulaires de pension de réversion dont le revenu imposable est inférieur au minimum vieillesse.
Cependant, il ne nous a pas paru souhaitable, dans la situation actuelle, de toucher aux assiettes des impositions affectées à la sécurité sociale. C'est pourquoi la commission aurait tendance à demander à M. Vanlerenberghe de bien vouloir retirer cet amendement. Cela dit, c'est avec intérêt que nous entendrons l'opinion du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, le Gouvernement ne peut être favorable à une telle mesure en ce qu'elle crée une sorte de « niche sociale » dans l'assiette du prélèvement, alors même que le principe d'acceptabilité du prélèvement suppose, au contraire, l'assiette la plus large possible et, surtout, une assiette homogène pour tous les types de revenus.
Il ne faudrait pas reproduire, en la matière, ce qui a été fait pour l'impôt sur le revenu dont le moins que l'on puisse dire est qu'il n'est tout de même pas d'une lisibilité totale !
C'est la raison pour laquelle, même si, évidemment, je comprends le souci que vous exprimez, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi je me verrais contraint d'en demander le rejet.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Vanlerenberghe ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 233 est retiré.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je tiens à vous remercier infiniment, monsieur le président, d'avoir permis que cette séance aille jusqu'à son terme, ainsi que le souhaitait la commission des affaires sociales. Nous pourrons ainsi, demain, nous atteler à une autre partie du texte en discussion.
M. le président. Le mérite, monsieur About, en revient à la commission, au Gouvernement et aux sénateurs qui ont siégé hier soir et ce matin.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2340/2002 et le règlement (CE) n° 2347/2002 en ce qui concerne les possibilités de pêche des espèces d'eau profonde pour les Etats membres ayant adhéré à l'Union en 2004.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2749 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil modifiant, d'une part, le règlement (CE) n° 1782/2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et, d'autre part, le règlement (CE) n° 1788/2003 établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2750 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Eurojust : accord de coopération avec le Royaume de Norvège.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2751 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- « Relever le défi. La stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi » : Rapport du groupe de haut niveau présidé par M. Wim KOK (novembre 2004).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2752 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Lettre rectificative n° 3 à l'avant-projet de budget 2005 - Volume 1 : Etat général des recettes et Volume 4 : Etat des recettes et des dépenses par section, Section III - Commission.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2753 et distribué.
6
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président. J'ai reçu de M. Yves Dauge un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires culturelles sur les métiers de l'architecture.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 64 et distribué.
7
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, mercredi 17 novembre 2004, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 53, 2004-2005) de financement de la sécurité sociale pour 2005, adopté par l'Assemblée nationale.
Rapport (n°57, 2004-2005) de MM. Alain Vasselle, André Lardeux, Dominique Leclerc et Gérard Deriot, fait au nom de la commission des affaires sociales
Avis (n°58, 2004-2005) de M. Jean-Jacques Jégou, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat sur l'assurance maladie est expiré.
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est expiré.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré
A quinze heures aura lieu un débat sur l'assurance maladie.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant création de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (n° 9, 2004-2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : Lundi 22 novembre 2004, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : Lundi 22 novembre 2004, à seize heures.
Question orale avec débat n° 7 de M. Philippe Leroy à M. le ministre délégué à l'industrie sur la gestion de « l'après-mines » ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : Mardi 23 novembre 2004, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de MM. Jean-Jacques Hyest, Christian Cointat et François Zocchetto relative aux compétences du tribunal d'instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance (n° 41, 2004-2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : Mardi 23 novembre 2004, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : Mardi 23 novembre 2004, à dix-sept heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives au sport professionnel (n° 29, 2004-2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : Mardi 23 novembre 2004, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : Mardi 23 novembre 2004, à 17 heures.
Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2005 (A.N., n° 1800) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : Mercredi 24 novembre 2004, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la première partie : Jeudi 25 novembre 2004, à dix heures trente.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 17 novembre 2004, à deux heures cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD