Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 36, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le cadre de leur mission, La Poste et France Télécom participent aux instances nationales, régionales et départementales chargées de l'aménagement du territoire.
« Ils s'efforcent, notamment, de mettre en place les conditions du maintien d'un service de proximité sur l'ensemble du territoire, grâce au développement de la diversification et de la polyvalence de leurs activités.
« Dans cette perspective, les fermetures de bureaux de poste sont suspendues jusqu'au 30 juin 2006. »
L'amendement n° 37, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le cadre de leur mission, La Poste et France Télécom participent aux instances nationales, régionales et départementales chargées de l'aménagement du territoire.
« Ils s'efforcent, notamment, de mettre en place les conditions du maintien d'un service de proximité sur l'ensemble du territoire, grâce au développement de la diversification et de la polyvalence de leurs activités.
« Dans cette perspective, les fermetures de bureaux de poste en milieu rural sont suspendues jusqu'au 30 juin 2006. »
La parole est à Mme Evelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 36.
Mme Evelyne Didier. La lecture du texte de l'amendement peut expliquer, à elle seule, le sens de la démarche que nous vous proposons.
Vous remarquerez d'emblée que nous associons à cette occasion deux grandes institutions : un exploitant public, La Poste, et une société anonyme, France Télécom, majoritairement détenue par l'Etat.
Nous souhaitons rappeler, à cette occasion, la complémentarité qui devrait être préservée entre ces deux grands services publics.
Vous me répondrez que tel élément de notre proposition est présent dans telle ou telle disposition législative ; je pense notamment à la définition du service universel postal, adoptée par l'Assemblée nationale et par le Sénat en 1999.
J'estime cependant nécessaire, avec mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen, de rappeler en préalable certains objectifs fondamentaux.
Tout d'abord, l'aménagement du territoire : La Poste et France Télécom doivent, selon nous, participer aux instances régionales et départementales chargées de l'aménagement du territoire.
Vous le noterez, nous insistons, par notre amendement, sur la proximité et sur la diversification des activités.
Enfin, nous proposons de poser le principe, pour permettre la réalisation de ces objectifs, d'un moratoire préconisant la suspension des fermetures de bureaux de poste jusqu'au 30 juin 2006.
Je me permets d'insister sur notre proposition, d'autant plus qu'elle reprend l'esprit et la lettre d'une autre proposition exposée ici même le 6 juin 1990 par le rapporteur de la commission des affaires économiques sur le projet de loi relatif à l'organisation du service public de La Poste et des télécommunications.
M. Jean Faure défendait, en effet, un tel amendement, à la différence près qu'il demandait une suspension des fermetures des bureaux en milieu rural jusqu'au 30 juin 1992.
Le rapporteur d'alors indiquait : « La commission des affaires économiques ne peut que souscrire à cette intention de mieux associer les deux exploitants à la politique d'aménagement du territoire. »
Cette préoccupation, pourtant essentielle, n'est plus qu'un souvenir quatorze ans après !
Comment ne pas voir que le dogme de la mise en concurrence, la privatisation de France Télécom, le démantèlement de La Poste, tournent le dos à une conception solidaire de cet aménagement du territoire ?
C'est pourquoi nous vous proposons d'adopter cet amendement, qui permettra à la majorité sénatoriale d'afficher clairement son évolution.
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour défendre l'amendement n° 37.
Mme Odette Terrade. Cet amendement reprend plus précisément une disposition proposée par la commission des affaires économiques en 1990, puisqu'il y est fait référence expressément aux bureaux de poste en milieu rural.
La suspension de la fermeture de ces bureaux est une nécessité et même une urgence pour de nombreuses communes.
Les bureaux de poste, en milieu rural tout particulièrement, sont un lieu irremplaçable d'échange et de vie pour la collectivité. Il ne suffit pas de dire, comme chacun dans cet hémicycle, qu'il ne faut pas les fermer ; encore faut-il se donner les moyens de les préserver.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission n'est pas insensible aux préoccupations des auteurs des deux amendements : son propre amendement n° 97, qui tend à garantir l'accessibilité au service postal, va dans le même sens. Nous sommes également favorables à la polyvalence et à la diversification des services de proximité, notamment à l'ouverture de points de contact postaux.
En revanche, en ce qui concerne le nouveau moratoire qui est ici proposé, la commission considère que geler l'évolution du réseau pendant deux ans équivaut à signer l'arrêt de mort de La Poste. Je voudrais, madame la ministre, vous remercier des propos que vous avez tenu, à l'instant pour rappeler le sens de notre combat. Or ce n'est pas en prenant des dispositions conservatoires sur un vieux schéma que nous ferons en sorte que La Poste puisse vivre demain.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 36.
Sur l'amendement n° 37, qui a presque le même objet, l'avis de la commission est également défavorable, pour les mêmes raisons.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement estime que ces deux amendements ne sont pas utiles. En effet, la participation de La Poste à l'aménagement du territoire est d'ores et déjà prévue dans ses textes constitutifs, notamment dans la loi de 1990 qui crée l'établissement public.
L'entreprise est engagée dans une concertation intense dans le cadre des commissions départementales de la présence postale territoriale présidées par des élus. De plus, le président Jean-Paul Bailly a engagé une vaste concertation territoriale sur les enjeux postaux.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les services publics postaux sont essentiels au développement économique et social comme à l'aménagement du territoire. »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Inscrit dans la continuité du processus de déréglementation et de libéralisation engagé depuis 1997 par la Commission européenne, ce projet de loi tourne résolument le dos au principe de service public postal, lui préférant les dogmes de la rentabilité financière.
Ce démantèlement du service public que nous ne pouvons tolérer va s'accompagner, au nom de la logique lucrative, de nombreuses disparitions d'emplois aux implications sociales et économiques évidentes sur le terrain. Pour preuve, dans mon département des Bouches-du-Rhône, la direction départementale de La Poste vient d'annoncer que, en raison des contraintes imposées par les lois du marché, l'établissement public se devait d'adapter ses moyens de production à ladite concurrence. Est ainsi justifiée la délocalisation, en mars 2004, à Roissy, de l'activité marseillaise de traitement du courrier international.
Sous couvert de délocalisation, il ne s'agit de rien d'autre que d'une fermeture provoquant la perte de quelque soixante-quatorze emplois directs et de centaines d'emplois indirects. Officiellement, La Poste n'annonce aucun licenciement, les salariés devant bénéficier de mesures de reclassement, voire de réorientation professionnelle ou de départs en préretraite.
Madame la ministre, c'est très certainement de gaieté de coeur que le personnel, à qui la direction avait demandé il y a quelques mois de faire des efforts, apprend soudainement la fermeture de MCI ! C'est également tout sourire que l'employé de cinquante ans se voit dans l'obligation de changer de métier... Enfin, avec le nouveau calcul des retraites, combien sont ceux qui, demain, voudront partir à la retraite ?
Chers collègues, La Poste est un bien commun qui appartient à la population. Cette position est apparemment très consensuelle. A ce titre, son devenir nécessite une réflexion à long terme sur les bases d'un développement durable de qualité. Alors que nous avons passé l'année 2003 à débattre au Parlement et avec les élus locaux de décentralisation, de proximité de service, de redynamisation des départements et des régions, nous ne pouvons accepter la fermeture d'un équipement qui a fait la preuve de son efficacité ni les conséquences prévisibles, sur le plan tant social qu'économique, qui vont en découler.
En effet, les liaisons vers les Etats-Unis et le Canada représentent des flux importants sur Marseille. Ce sont quelque 1 000 containers de trente mètres cubes vers ces destinations qui ne seront plus acheminés, ce qui aura des conséquences sur les liaisons maritimes et l'économie locale, puisque, désormais, il n'y aura plus qu'une relation maritime entre la France et le Maghreb.
Comment comprendre, alors que La Poste fait un choix économique en privilégiant le service marchand, que le courrier à destination du Maghreb doive d'abord passer par la région parisienne, pour ensuite être renvoyé à Marseille avant d'arriver à destination ? Nous ne comprenons pas l'incohérence d'un tel choix.
Enfin, comment expliquer cette précipitation à fermer le centre, alors qu'il est évident que le site de Roissy ne sera pas opérationnel avant un an ? Et le sera-t-il un jour ?
Plus largement, ce sont vingt-quatre sites en France qui traitent le courrier international : dix-huit bureaux d'échange, cinq centres en région parisienne et MCI à Marseille, lequel traite à lui seul 26 000 objets par jour.
Tous ces centres sont aujourd'hui directement menacés, car il est envisagé de concentrer l'ensemble de cette activité sur deux uniques sites : Roissy Hub courrier international, qui traitera de 1,8 million d'objets par jour et Mitry-Mory dans la Seine-et-Marne qui, lui, en traitera quelque 430 000.
Au total, combien d'emplois menacés de disparaître cela représente-t-il, madame la ministre ? De plus, cette centralisation du tri international va immanquablement entraîner une baisse qualitative de la prestation.
Aussi, je vous demande, madame la ministre, de surseoir à la fermeture de MCI. De nombreuses questions restent en suspens et les enjeux sont trop importants pour accepter cette délocalisation sans autre débat.
Madame la ministre, mes chers collègues, je souhaitais illustrer, au travers du cas de Marseille courrier international, la philosophie de notre amendement et démontrer que les services publics postaux sont essentiels au développement économique et social, comme à l'aménagement du territoire.
Mme la ministre aura à coeur, j'en suis certain, d'apporter des éléments de réponse aux questions que je viens d'évoquer. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur Bret, restons-en aux termes de votre amendement : je ne crois pas qu'il porte sur la fermeture du site de Marseille.
Tout à l'heure, j'ai fait référence à l'amendement n° 97, déposé par la commission, qui souligne l'importance de l'accessibilité du réseau postal pour l'aménagement du territoire.
Par ailleurs, on ne peut pas invoquer le rapport de la Cour des comptes quand cela nous arrange et ne pas en tenir compte quand cela ne nous convient plus.
Quoi qu'il en soit, la question que vous posez, monsieur Bret, dépasse les limites de l'amendement. Vous évoquez le problème des 128 centres de tri qui vont être regroupés sur 50 sites régionaux. A pousser la logique jusqu'au bout, il vous faudra poser la question à soixante-dix-huit reprises ! Notre logique est de s'engager dans la modernisation et de fixer le cadre qui permettra à La Poste française d'exister demain.
Votre amendement est, pour partie, satisfait par l'amendement n° 97 et la commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je pense, comme M. le rapporteur, que nous devons nous en tenir à l'amendement tel qu'il a été déposé.
Aux termes exacts de l'article L. 1 du code des postes et télécommunications, le service universel concourt à la cohésion sociale et au développement équilibré du territoire. Ces dispositions ne sont pas modifiées par le projet de loi et rendent donc inutiles, à mon sens, le rappel qui est proposé par cet amendement.
Le Gouvernement n'y est donc pas favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le 1er mai 2005, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport sur le bilan de la déréglementation dans le secteur postal. Ce rapport examine l'impact en termes d'emploi et d'aménagement du territoire de la transposition des directives européennes. Il comporte une étude prospective à horizon 2009 sur ces différents aspects. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Le Parlement européen vient de refuser l'idée d'une directive-cadre permettant de préserver à l'échelle européenne des services dits d'intérêt général qui, de par leur nature, pourraient être exclus de la gestion marchande.
Nous savons tous que l'organisation de services publics est le résultat, dans la plupart des pays membres de l'Union européenne, d'un réel volontarisme politique et qu'elle est issue d'une lente prise de conscience de l'incapacité du marché à « produire du lien social ». Il a fallu une longue et souvent douloureuse maturation historique pour aboutir à rendre accessibles à la majorité de la population un certain nombre de biens publics qui, en raison de leur caractère d'intérêt social et global exorbitant du marché, ont été organisés par la puissance publique.
C'est l'accès à de tels biens garantissant des droits fondamentaux à tout un chacun que la construction européenne condamne aujourd'hui !
En refusant une directive-cadre, en adoptant une orientation purement libérale dans le projet de constitution européenne, l'Union européenne témoigne aujourd'hui qu'elle ne porte pas les valeurs de progrès social et qu'elle ne vise plus que la réalisation d'un grand marché. Ce dernier a par ailleurs, sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce, tendance à se mondialiser. Bref, c'est l'Union européenne, incapable de construire un véritable espace social européen, qui porte la régression sociale en tirant vers le bas les normes et réglementations nationales et qui, se faisant, se condamne elle-même.
Qu'observons-nous face à cette vague de déréglementation et de libéralisation qui concerne, après les autres secteurs d'activité, ceux de nos services publics, depuis environ une quinzaine d'années ?
La généralisation des rapports marchands, la soumission des services publics à des critères privés de rentabilité détruisent les solidarités sociales et territoriales nationales.
En outre, notre société se fractionne sur fond d'accroissement des inégalités sociales et l'emploi dans le processus concurrentiel devient en fait, nous le savons bien, la variable d'ajustement.
Malgré ses déclarations, la Commission européenne ne s'est jamais réellement préoccupée des conséquences de la libéralisation des services publics en termes d'emplois et d'aménagement du territoire.
Dans le secteur postal, elle considère que les implications en termes d'emplois devraient être marginales. En effet, elle estime que « l'ouverture du marché contribuera à l'expansion des marchés postaux, de sorte que les contractions éventuelles de l'effectif des prestataires du service universel dues à ces mesures, ou à leur anticipation, seront vraisemblablement compensées par un accroissement de l'emploi chez les opérateurs privés et les nouveaux arrivants sur le marché ».
Les exemples des pays pionniers de la libéralisation dans le domaine postal sont en porte-à-faux avec de telles prédictions ! Je pourrais citer d'autres exemples.
D'ici à 2012, environ 140 000 départs sont prévus à La Poste. Du point de vue macroéconomique, à l'heure où les suppressions d'emplois sont massives dans le secteur privé, nous assisterons à une forte récession !
Enfin, en admettant que des effets compensatoires puissent jouer, nous devrons également examiner les conséquences d'un point de vue qualitatif.
L'ouverture à la concurrence se traduit la plupart du temps par une précarisation accrue des statuts et une détérioration des conditions de travail. De toute évidence, les compétences en pâtiront.
Nous pouvons déjà observer de tels phénomènes dans le domaine de la distribution où se constitue autour d'Indrexo et de Médiapost un deuxième réseau de distribution.
Mme Hélène Luc. Exactement !
M. Guy Fischer. Dans ce secteur d'activité, ce ne sont pas moins de 62 000 départs à la retraite qui sont programmés à La Poste. C'est aussi dans ce secteur qu'une convention collective vient d'être signée, afin de mieux protéger les salariés, et c'est peu dire !
Pour toutes ces raisons, nous demandons qu'un réel bilan de la déréglementation dans le secteur postal soit réalisé. Nous souhaiterions qu'un rapport traitant de l'impact de la transposition des directives en termes d'emploi et d'aménagement du territoire à l'horizon de 2009 soit réalisé. (Très bien ! sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission pourrait contredire certains éléments qui viennent d'être avancés par notre collègue Guy Fischer.
Aux termes de l'article 7 du projet de loi, il est déjà prévu que le Gouvernement adresse au Parlement un rapport sur l'équilibre et les modalités de financement du service universel postal. Nous avons démontré les uns et les autres, notamment au cours de la discussion générale, ce qu'était le service universel, quel était son rôle, et nous avons rappelé l'obligation incombant à l'entreprise historique d'assurer ce service universel. Pour le reste, il s'agit d'un marché de la concurrence.
Permettez-moi d'évoquer les statistiques catastrophiques des bilans qui ont été demandés ces dix dernières années : seulement 43 % d'entre eux ont été rédigés et déposés, à peu près 30 % ont été examinés, ce qui prouve qu'aucune amélioration n'a été apportée par le biais de ce genre d'outil. Il ne sert souvent qu'à dresser le constat a posteriori de situations qui auraient dû être redressées beaucoup plus tôt.
Il s'agit, à travers ce texte de loi, non pas de déréglementation, mais bien de régulation - nous en avons beaucoup parlé - afin d'instaurer un système susceptible de remplacer une réglementation obsolète dont La Poste réclame d'urgence la modernisation.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
M. Guy Fischer. Nous en reparlerons !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le cadre européen des services postaux est maintenant stabilisé jusqu'en 2009, année durant laquelle une majorité du chiffre d'affaires des envois de correspondances sera encore couverte par le monopole postal. La responsabilité des pouvoirs publics est aujourd'hui de construire un cadre national qui permettra d'assurer efficacement, d'une part, une meilleure garantie de fiabilité des services postaux et, d'autre part, une concurrence loyale sur les marchés ouverts.
Telle est l'ambition du Gouvernement, qui est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote.
M. Pierre-Yvon Trémel. Cet amendement nous paraît intéressant, bien que la date du 1er mai 2005 nous gêne un peu : en effet, 2005, c'est quasiment demain, et je ne suis pas sûr que nous ayons le recul suffisant pour atteindre les objectifs visés par les auteurs de l'amendement.
Pour autant, le rapport en question peut présenter le grand avantage d'apporter un éclairage intéressant sur les conséquences pour l'emploi de l'ouverture à la concurrence. Dans tous les pays qui ont permis cette ouverture, on a constaté, en général, un double phénomène de baisse des effectifs chez l'opérateur historique et de précarisation des emplois créés.
La Commission européenne doit également rendre un rapport en décembre 2004 sur les aspects économiques, sociaux et technologiques de l'ouverture, ainsi que sur ses conséquences en termes d'emplois. Nous aurions ainsi une comparaison intéressante entre la situation de la France et celle des autres pays européens.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les principes qui organisent l'activité du service public de la poste sont l'universalité, l'égalité, la neutralité, la confidentialité, la continuité et l'adaptabilité. »
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous entendons inscrire en tête du présent projet de loi un certain nombre de principes tels que l'universalité, l'égalité, la neutralité, la confidentialité, la continuité et l'adaptabilité, qui sont à nos yeux des éléments indissociables du service public.
A ce propos, je me permets de signaler que cette disposition correspond à un paragraphe d'une résolution adoptée ici même sur la proposition de directive relative au développement des services postaux communautaires et l'amélioration de la qualité du service, proposition n° E-474.
Le rapporteur de cette résolution était déjà notre collègue Pierre Hérisson.
La majorité sénatoriale souhaitait donc en 1996 que le Gouvernement d'alors, - M. Fillon était le ministre compétent -, soit porteur au Conseil des ministres européen de ces exigences.
Cette position sera-t-elle confirmée aujourd'hui par l'inscription dans le projet de loi de la liste que je viens d'évoquer ? Permettez-moi d'en douter lorsque j'entends les propos que tient maintenant M. Hérisson. Je demande néanmoins au Sénat d'adopter notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Eh bien, cet avis est défavorable, non pas en contradiction avec ce que j'ai pu dire en 1996 (Exclamations sur les travées du groupe CRC), mais tout simplement parce que cet amendement est d'ores et déjà largement satisfait par l'article L. 1 du code des postes et télécommunications, qui prévoit que « le service universel est assuré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité ».
Il n'est pas souhaitable, d'un point de vue juridique, de superposer des principes identiques. Tel est l'unique motif pour lequel l'avis de la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Avis défavorable, pour les raisons que vient d'exposer M. le rapporteur.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote.
M. Pierre-Yvon Trémel. Ce qu'a dit notre rapporteur est parfaitement exact, à ceci près que, dans l'article L. 1 tel qu'il résulte de la loi de 1999, il n'est pas question d'universalité, notion que proposent d'introduire nos collègues du groupe CRC, dont nous voterons par conséquent l'amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 40.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 1 du code des postes et télécommunications est abrogé. »
L'amendement n° 42, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 2 du code des postes et télécommunications est abrogé. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous souhaitons, par ces deux amendements, la suppression de la référence au service universel postal dans la législation.
En effet, la notion de service universel telle qu'elle est développée dans différentes directives européennes n'est pas conforme à ce que nous souhaitons en termes de service public. En acceptant cette formulation, nous accepterions en fait des services a minima.
D'ailleurs, M. le président Larcher, intervenant ici même le 25 mars 1999, expliquait que la loi d'orientation, que tout le monde semblait appeler de ses voeux, désignait La Poste comme unique prestataire du service public postal et que cette loi devait lui confier toutes les missions qui lui avaient été attribuées jusqu'alors. Il ajoutait que La Poste devait, au-delà du périmètre défini pour le service universel européen, continuer à satisfaire à ses obligations en termes d'aménagement du territoire.
Nous avons, nous, conservé cette notion plus large du service public. C'est pourquoi nous vous proposons d'adopter ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 41 est contraire à l'orientation de la politique du Gouvernement, qui vise à conforter le service universel.
Je ferai simplement remarquer à notre collègue Pierre-Yvon Trémel que l'objet de cet amendement est de supprimer la référence au service universel postal alors qu'il vient de voter un amendement qui tendait au contraire à ajouter la mention de l'universalité.
Je me permets donc d'inviter notre collègue à bien lire les amendements successifs et à adopter à leur sujet une position cohérente.
Cela étant, cet amendement est, en outre, contraire à l'article 3 de la directive de 1997, qui fixe les exigences minimales du service universel, et par là même aux engagements internationaux de la France ; contraire aussi à la logique du service public, car le service universel constitue l'essentiel du service public postal.
Quant à l'amendement n° 42, il est contraire aux directives de 1997 et de 2002 que nous devons transposer. L'adopter, ce serait en quelque sorte jeter le bébé avec l'eau du bain, car le premier alinéa de l'article L. 2 désigne La Poste comme le prestataire du service universel postal.
Ces deux amendements font donc l'objet d'un avis défavorable de la commission.
M. Jean-Claude Carle. Excellente réponse !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendements.
S'agissant de l'amendement n° 41, je dirai que l'article L. 1 est rédigé dans des termes qui ne prêtent pas à équivoque. Il prévoit notamment que le service universel concourt à la cohésion sociale et au développement équilibré du territoire.
S'agissant de l'amendement n° 42, je rappelle que l'article L. 2 institue notamment le monopole postal, que le Gouvernement n'entend pas supprimer.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote sur l'amendement n° 41.
M. Pierre-Yvon Trémel. Je crois nécessaire d'expliquer notre vote après l'interpellation de M. le rapporteur.
Ces deux amendements, s'ils étaient adoptés, supprimeraient ce que nous avons voté en 1999. Par conséquent, notre groupe votera contre. Je crois, monsieur le rapporteur, que cette position est parfaitement cohérente avec celle que j'ai défendue précédemment.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code des postes et télécommunications est ainsi modifié :
I. - Le chapitre Ier est intitulé : « Le service universel postal et les obligations du service postal » et comprend les articles L. 1 à L. 3-2.
II. - Au début de l'article L. 1 sont ajoutées les dispositions suivantes :
« Pour l'application du présent code, les services postaux sont la levée, le tri, l'acheminement et la distribution des envois postaux.
« Constitue un envoi postal tout objet destiné à être remis à l'adresse indiquée par l'expéditeur sur l'objet lui-même ou sur son conditionnement et présenté dans la forme définitive dans laquelle il doit être acheminé.
« L'envoi de correspondance est un envoi postal ne dépassant pas deux kilogrammes et comportant une communication écrite sur un support matériel, à l'exclusion des livres, catalogues, journaux ou périodiques. Le publipostage fait partie des envois de correspondance. »
III. - Les trois derniers alinéas de l'article L. 2 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de l'Autorité de régulation des télécommunications et des postes et de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, précise les caractéristiques de l'offre de service universel que La Poste est tenue d'assurer.
« Les services postaux relatifs aux envois de correspondance intérieure ou en provenance de l'étranger, assurés même par courrier accéléré, sont réservés à La Poste lorsque ces envois sont d'un poids ne dépassant pas cent grammes et d'un prix inférieur à trois fois le tarif de base, sans que ce tarif de base puisse excéder un euro. A compter du 1er janvier 2006, les services réservés portent sur les envois de correspondance d'un poids ne dépassant pas cinquante grammes et d'un prix inférieur à deux fois et demi le tarif de base.
« Les envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives ou juridictionnelles font partie du secteur réservé. Les envois de livres, catalogues, journaux ou périodiques en sont exclus.
« Le tarif de base mentionné ci-dessus est le tarif applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie normalisée la plus rapide.
« Par dérogation au troisième alinéa, la personne qui est à l'origine des envois de correspondance ou une personne agissant exclusivement en son nom peut assurer le service de ses propres envois. »
IV. - Après l'article L. 2, il est inséré un article L. 2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2-1. - Le prestataire du service universel peut conclure avec les expéditeurs d'envois de correspondance en nombre, les intermédiaires groupant les envois de correspondance de plusieurs clients ou les titulaires d'une autorisation prévue à l'article L. 3, des contrats dérogeant aux conditions générales de l'offre du service universel et incluant des tarifs spéciaux pour des services aux entreprises. Les tarifs tiennent compte des coûts évités par rapport aux conditions des services comprenant la totalité des prestations proposées.
« Le prestataire détermine les tarifs et les conditions de ces prestations selon des règles objectives et non discriminatoires.
« Ces contrats sont communiqués à l'Autorité de régulation des télécommunications et des postes à sa demande. »
V. - L'article L. 3 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 3. - Les prestataires de services postaux, autres que les services réservés, portant sur des envois de correspondance intérieure, dès lors qu'ils comprennent la distribution, et l'offre de services transfrontaliers au départ du territoire national portant sur des envois de correspondance doivent être titulaires d'une autorisation délivrée dans les conditions prévues à l'article L. 5-1. »
VI. - Après l'article L. 3, sont insérés les articles L. 3-1 et L. 3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 3-1. - Les prestataires des services postaux mentionnés à l'article L. 3 ont accès aux installations et informations détenues par le prestataire du service universel qui sont indispensables à l'exercice de leurs activités postales. Ces installations et informations comprennent les boîtes postales installées dans les bureaux de poste, le répertoire des codes postaux, les informations collectées par La Poste sur les changements d'adresse et le service des réexpéditions.
« Art. L. 3-2. - Toute offre de services postaux est soumise aux exigences suivantes :
« a) Garantir la sécurité des usagers, des personnels et des installations du prestataire de service ;
« b) Garantir la confidentialité des envois de correspondance et l'intégrité de leur contenu ;
« c) Assurer la protection des données à caractère personnel dont peuvent être dépositaires le prestataire du service universel ou les titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3, ainsi que la protection de la vie privée des usagers de ces services ;
« d) Exercer ses activités dans des conditions techniques respectant l'objectif de préservation de l'environnement. »
M. le président. A la demande de M. le président de la commission des affaires économiques et du Plan, la conférence des présidents réunie ce matin a décidé, en application de l'article 49, alinéa 2, du règlement du Sénat, que seraient examinés séparément les deux amendements de suppression déposés sur l'article 1er afin d'éviter une discussion commune portant sur quarante-cinq amendements.
La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Par cette intervention, je veux me faire l'écho des multiples observations et propositions des usagers, des élus et des salariés de Rhône-Alpes qui ont participé aux débats organisés à l'automne dernier par l'Union régionale Rhône-Alpes CGT des postes et télécommunications.
Je précise que, tout au long de l'année, j'ai travaillé avec eux.
Que constatent nos concitoyens ?
Dans l'Ardèche, 166 communes rassemblant près de 50 000 habitants n'ont pas de bureau de poste. On réduit les heures d'ouverture des bureaux à Aubenas, Annonay, Privas. Les tournées ne sont plus assurées tous les jours.
Dans la Drôme, on signale des irrégularités dans la distribution des quotidiens nationaux : il n'est pas rare de recevoir le lundi les journaux du vendredi et du samedi. Les horaires des levées ont été avancées de deux heures, empêchant la réponse par retour du courrier.
Dans l'Isère s'amorce un processus de regroupement de bureaux au niveau de la distribution, et donc de délocalisation. Les grandes villes ne sont pas épargnées : à Grenoble, la mise en place d'un tri de groupe entraînera des suppressions de tournées et des suppressions d'emplois.
M. le rapporteur ne nous a-t-il pas annoncé le passage de 128 à 50 centres de tri ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Et même 20, selon la Cour des comptes, que vous citez souvent.
M. Guy Fischer. C'est plutôt vous qui vous servez de la Cour des comptes comme alibi !
Dans la Loire, c'est la qualité de la distribution qui est mise en cause par l'absence de qualification des employés, la précarisation du personnel.
En Savoie - on se rapproche de chez vous, monsieur le rapporteur -, la distribution à J + 2 devient de plus en plus fréquente et la perspective de suppression des tournées des facteurs dans les zones isolées de montagne est insupportable.
Dans mon département, le Rhône, après les tentatives de fermeture des bureaux en période estivale, notamment en zone rurale, la population est très attachée au maintien des bureaux de poste de proximité et à une plus grande amplitude des horaires d'ouverture des bureaux.
J'ai bien conscience que ces observations ne sont pas spécifiques à la région Rhône-Alpes et qu'elles peuvent être faites partout en France. J'ai même l'impression d'enfoncer des portes ouvertes !
Quoi qu'il en soit, face à ce constat, la réponse des directions départementales de La Poste est toujours la même : économies, économies ! La mise en concurrence du service postal oblige à faire des économies !
Est-ce cela la modernisation ?
L'abandon de la notion de service public, qui transforme l'usager en client, conduira par ailleurs à des aberrations. Un exemple, dans le domaine du téléphone mobile, l'illustre parfaitement : dans le département de l'Ardèche, 49 % du territoire sont couverts par les trois opérateurs, y compris donc par celui qui dépend de France Télécom, et 51 % du territoire ne sont pas couverts du tout, précisément là où le mobile peut s'avérer vital.
Est-ce cela la modernisation ? Pourrait-on imaginer qu'EDF coupe l'électricité à certains utilisateurs pour insuffisance de consommation ?
De nombreux maires, pas seulement des maires de petits villages, se sont opposés à la fermeture du bureau de poste de leur commune. En effet, si la poste ferme, les commerces s'en vont, accentuant ainsi la désertification de zones entières de notre territoire.
A travers les inquiétudes qu'expriment les usagers et les élus, se dessine une exigence, celle d'un service public permanent. J'espère que notre débat permettra de poser véritablement ce problème.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Mon amie Marie-France Beaufils a clairement expliqué que, avec votre projet, madame la ministre, vous avanciez vers la libéralisation complète du service public postal, comme votre gouvernement le fait pour EDF, GDF, France Télécom.
Et pourtant, les exemples d'autres pays ne manquent pas, qui montrent que cette voie est erronée et dangereuse.
Madame la ministre, vous qui avez été présidente du Parlement européen, vous connaissez certainement les dégâts qu'a causés la réorganisation du service postal en Suède. En plein Stockholm, aucune poste ne subsiste, si bien que le courrier est acheminé par des petites entreprises. Les habitants doivent se rendre chez l'épicier ou dans une station-service pour acheter des timbres ou se voir offrir d'autres services qui étaient traditionnellement assurés par le service public postal tels que l'expédition des colis. La poste est devenue une banque, mais une mauvaise banque.
J'ai une amie suédoise...
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Ah !
Mme Hélène Luc. Eh oui, monsieur le rapporteur !
En arrivant en France, elle a été littéralement émerveillée par le service de La Poste, si bien qu'elle a photographié la première camionnette qu'elle a vue pour envoyer le cliché en Suède !
Madame la ministre, voulez-vous transformer la poste française en une banque et lui faire délaisser ses autres activités ?
Je sais, par exemple, que le courrier arrive à treize ou quatorze heures dans les boîtes aux lettres en région parisienne. Et en province, d'après mes informations, la situation est encore pire !
Dans nos campagnes, de nombreux bureaux de poste ont disparu, ce qui a entraîné la suppression de services, d'emplois, tout cela contribuant à « rabougrir » la vie des villages.
Un certain nombre de nos collègues sont absents ce soir, mais cela ne les empêchera pas de protester avec les habitants des communes qui verront leur bureau de poste supprimé ! Pourquoi ne sont-ils pas là ?
Mme Françoise Henneron. Mais nous, nous sommes là !
Mme Hélène Luc. Dans la région parisienne, il est fréquent que le courrier ait quatre ou cinq jours de retard ! J'en ai fait moi-même l'expérience, et je partage les inquiétudes exprimées à propos de la fiabilité de La Poste.
On évoque souvent la question de la rentabilité à l'hôpital ou à La Poste. Bien sûr, il faut sans cesse améliorer le service, et les facteurs, les employés, les agents des centres de tri sont les premiers à le dire. Mais on ne leur demande pas leur avis, on leur impose une certaine façon de travailler, au nom de la rentabilité, en vue d'un alignement des tarifs sur ceux des plus grands opérateurs européens, de manière à être compétitif en 2007-2010.
Dans ma propre commune, Choisy-le-Roi, les habitants s'accrochent à leur poste. Chacun le sait, c'est là, en particulier, que les personnes âgées vont percevoir leur retraite, qu'elles ont leur livret de caisse d'épargne. Elles apprécient énormément le service de proximité qui leur est ainsi offert, aussi imparfait soit-il.
Hélas, dans cette poste, dès le matin, il y a la queue jusque dans la rue. Et elle ferme désormais ses portes entre douze heures et quatorze heures ! Nous demandons d'ailleurs la réouverture du bureau à l'heure du déjeuner.
Il en est de même dans de nombreuses autres communes du Val-de-Marne. A Fontenay, par exemple, deux départs à la retraite ne sont pas remplacés, il manque deux facteurs de secteur, un facteur titulaire, un agent de cabine et deux employées en congé de maternité ne sont pas remplacées. On dénombre en outre une mise à disposition et deux démissions.
A Villecresnes, commune excentrée, il est question de délocaliser le centre d'approvisionnement en fournitures postales pour, dit-on, des « raisons structurelles et économiques ».
A Vitry-sur-Seine, des réunions ont eu lieu entre une élue municipale et les usagers : les représentants de La Poste ont voulu interdire la présence des représentants de la CGT et l'activité des militants syndicaux est de plus en plus surveillée.
A Orly, deux centres de tri sont restructurés en vertu d'un double objectif : réduire le nombre de ces centres et profiter de chaque transfert d'activité pour modifier en profondeur les régimes de travail, de travail de nuit en particulier.
L'activité de la publicité non adressée rend l'âme, car elle est l'oeuvre d'une fusion entre La Poste et Delta, avec la filiale Médiaposte : plus d'une centaine de salariés du Val-de-Marne sont concernés.
A Champigny, enfin, devant toutes les diminutions d'horaires, le manque de personnel, les fermetures entre douze heures et quatorze heures, un rassemblement est prévu, samedi matin, pour exiger que La Poste reste un véritable service public, au bénéfice de tous les Français, qu'ils habitent Paris, le Nord, l'Ardèche ou la Lozère. C'est cela, l'unicité de la République et l'égalité des Français devant la loi. Et cela, madame la ministre, date de 1848, quand a été scellé le tarif unique pour tous les Français. Il ne faut pas revenir en arrière !
Les Français et les Françaises ne laisseront pas, comme disent les postiers, « La Poste leur échapper ». Ils ne veulent pas qu'on démolisse ce qui fonctionne bien. Ils s'opposent à ce que La Poste décide de se séparer de ce qu'elle juge non rentable. Peut-être les 65 % de Français qui veulent sanctionner le Gouvernement lors des élections cantonales, régionales et européennes en profiteront-ils pour vous le dire.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen sont et seront à leurs côtés, car ils sont fiers de leur service public et ils veulent le conserver.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Madame Luc, vous pourriez continuer cette énumération très longtemps,...
Mme Hélène Luc. Eh oui, malheureusement !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. ... mais je pense que l'on n'a pas le droit de caricaturer La Poste comme vous venez de le faire. Il y a tout de même des limites à ne pas dépasser !
Mme Hélène Luc. Démontrez-moi que j'ai tort !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. En tout cas, je regrette que, lorsque Gérard Larcher et moi-même sommes allés en Suède, vous ne soyez pas venue avec nous. Car, n'ayant pas d'amie suédoise, nous nous sommes rendus sur place ! (Sourires.) Vous auriez vu que, en Suède, aujourd'hui, 95 % du courrier est distribué dans les vingt-quatre heures. Nous n'en sommes pas là ! C'est pourquoi nous voulons moderniser le service postal français.
Bien sûr, vous mettez en avant ce qui ne marche pas. Mais vous oubliez de dire qu'il y a aujourd'hui en France 17 000 points de présence postale sur le territoire, c'est-à-dire exactement le même nombre qu'en 1913. Il est nécessaire de réorganiser la poste sur le territoire parce que la densité de la population a changé, parce que l'organisation du service et les produits distribués ont changé.
Le conservatisme dont vous vous faites le défenseur est, en vérité, la raison principale de la dégradation du service du courrier.
Mme Hélène Luc. Croyez-vous que j'ai inventé ce que j'ai dit ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Certes non, mais je prétends que, si nous voulons moderniser la poste française,...
Mme Hélène Luc. Allez donc samedi à Champigny ! Vous verrez !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. ... c'est précisément pour mettre un terme à ce genre de situations. En tout cas, vous ne pouvez pas généraliser à partir des exemples que vous avez cités, parce que c'est, d'une certaine manière, faire injure aux 326 000 postiers ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. J'interviens sur l'article 1er non pas pour faire injure aux 326 000 postiers, mais pour continuer cette discussion en évoquant une nouvelle fois un exemple local, car c'est bien, à cet échelon, que cette large ouverture à la concurrence de La Poste se fera sentir de la manière la plus négative.
J'évoquerai l'exemple, très révélateur, de Pantin, ville dont Mme Danielle Bidard-Reydet est l'élue.
Voilà déjà plusieurs années que, sous couvert de restriction budgétaire, la direction de La Poste s'est engagée dans une réduction systématique du nombre de ses salariés. Cela a des conséquences directes dans tous les bureaux de poste et sur la distribution du courrier.
A Pantin, en particulier, les usagers en font malheureusement les frais, notamment au bureau principal. Les conditions d'accueil sont déplorables. Les temps d'attente sont très importants. Les personnes âgées, les familles accompagnées d'enfants en bas âge restent debout. Les handicapés eux-mêmes, n'osent pas, pour la plupart, faire valoir leur droit prioritaire. Même aux heures de pointe, les guichets ne sont pas tous ouverts.
Les habitants, mécontents, se sont organisés en comité pour exiger les moyens nécessaires afin que ce service public réponde à leurs besoins. Ils ont recueilli des centaines de pétitions en janvier 2003. Le directeur régional de La Poste, face à cette vaste mobilisation, les a reçus et leur a promis, dans le cadre de la politique de la ville, la création d'un agent d'accueil.
Ayant toujours agi pour un service public de qualité, ma collègue Danielle Bidard-Reydet a, en janvier 2003, posé une question écrite pour que le Gouvernement intervienne auprès de la direction de La Poste, dont il reste le principal actionnaire, afin que le bureau principal de Pantin ait les moyens d'assurer un réel service public.
De son côté, le ministre s'est lui aussi engagé à créer des postes, d'interprètes notamment, ainsi qu'une permanence sociale. Or, un an après, aucune promesse n'est tenue. Les usagers continuent à pâtir du manque de personnel.
La privatisation de ces services, la mise en concurrence, la soumission aux règles de la rentabilité prévues dans cet article 1er ne feront qu'aggraver les conditions d'accueil de l'ensemble des usagers et les conditions de travail des personnels.
J'ai cité l'exemple de Pantin, mais nous pourrions tous ici témoigner de situations similaires dans nos villes et dans nos communes, notamment en banlieue. J'aurais pu, comme on le fait en informatique, procéder à un « copier-coller » et mentionner le bureau de poste d'Orly principal qui connaît exactement les mêmes difficultés. Il ne s'agit donc pas d'exemples épars, ce sont bien des situations réelles et concrètes, hélas ! trop fréquentes.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Sans m'engager dans la polémique ni reprendre des exemples caricaturaux, j'exposerai simplement au Sénat les raisons pour lesquelles le Gouvernement n'est pas favorable à la suppression de l'article 1er.
Le code des postes et télécommunications est aujourd'hui un texte ancien, pas toujours suffisamment précis. Clarifier les principes fondamentaux du service universel, délimiter clairement le monopole postal, réglementer la concurrence qui peut aujourd'hui se développer sans limite, sans le contrôle d'aucune autorité, me semble relever de l'intérêt public.
L'article 1er du projet de loi réalise cette mise à jour, en pleine conformité d'ailleurs avec les engagements européens que nous avons contractés en 1997. Cet article est indispensable et le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement qui tend à sa suppression.
Mme Hélène Luc. Nous n'en sommes pas encore à la discussion des amendements, madame la ministre ! Cela dit, votre argumentation est bien pauvre !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 43 est présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 98 est présenté par MM. Trémel, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
La parole est à Mme Evelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 43.
Mme Evelyne Didier. Permettez-moi tout de même d'expliquer pourquoi nous proposons la suppression de l'article 1er, bien que Mme la ministre ait par avance exprimé un avis défavorable sur cette proposition.
Même si nous sommes ici aujourd'hui pour débattre du service public postal, je tiens d'abord à souligner que nous sommes parvenus à une étape décisive concernant l'avenir de l'ensemble de nos services publics. Il me semble donc nécessaire de rappeler un certain nombre de points avant de poursuivre la discussion de chacun des articles dont les conséquences seront lourdes, et pour notre service public postal et pour l'établissement public La Poste.
Aucun des grands services publics, qu'il s'agisse de la santé, de l'eau ou des services publics en réseau comme les transports, l'énergie, les télécommunications ne sont épargnés par la vague de libéralisation engagée à l'échelle internationale et européenne.
En vertu de l'Accord général sur le commerce des services, conclu en 1995, les pays membres de l'organisation mondiale du commerce, l'OMC, sont contraints d'ouvrir à la concurrence les secteurs des services, autrement dit de soumettre au marché et à ses règles concurrentielles des pans entiers de notre économie qui, depuis la Seconde Guerre mondiale, avaient été exclus d'une gestion strictement marchande.
Ce processus d'ouverture à la concurrence est relayé sur le plan européen par des directives visant la déréglementation de nos services publics. Nous en avons un exemple concret aujourd'hui. Il se traduit à l'échelon national par un désengagement de l'Etat face à l'emprise progressive du marché.
Nos services publics ont joué un rôle fondamental en matière d'intégration sociale, de correction des inégalités sociales et territoriales. Ils ont permis l'accès à des droits fondamentaux, l'énergie par exemple.
Les populations les plus fragilisées seront-elles bientôt obligées d'installer, comme en Angleterre, des compteurs électriques rechargeables ? En matière de télécommunications, seront-elles privées de l'accès aux nouvelles technologies ? La péréquation tarifaire sera-t-elle sacrifiée ? Toutes ces questions sont posées. Voilà, en tout cas, ce que nous pouvons craindre du désengagement de l'Etat.
Ce désengagement se traduira d'abord, sur le plan financier, par un report des charges sur les collectivités territoriales. C'est exactement la signification de la décentralisation que ce Gouvernement a engagée.
En ce qui concerne les services postaux, demain, il reviendra aussi aux collectivités territoriales d'assumer les charges financières afin de maintenir, ici, un bureau de poste, là, les services d'un facteur. Il s'agit bien aussi d'un désengagement de l'Etat sur le plan des responsabilités qu'il assumait en matière d'aménagement du territoire et d'intégration sociale.
Doit-on encore ajouter que ce désengagement se traduit également par un retrait de l'Etat du champ du politique, notamment en ce qui concerne la définition d'une politique industrielle ?
Reviendra-t-il, désormais, aux autorités de régulation le soin de prendre des décisions relevant du domaine réglementaire ? Sur ce point, ce texte est particulièrement ambigu, et pour cause ! L'autorité de régulation couvre un large domaine, regroupant les secteurs des télécommunications et des postes, et, bientôt, l'ensemble des communications électroniques, secteur-clé puisqu'il s'agit des nouvelles technologies de communication, secteur essentiel pour l'activité économique.
Voilà autant de questions auxquelles, nous l'espérons, le Gouvernement apportera des réponses précises !
Nous soutenons aussi les salariés qui se mobilisent pour défendre le service public postal et qui manifesteront d'ailleurs le 5 février prochain.
Madame la ministre, votre projet de loi s'articule clairement avec les dispositions du contrat de plan signé le 13 janvier dernier entre l'Etat et La Poste, contrat que les salariés et les représentants des associations de consommateurs ont refusé d'adopter !
Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour défendre l'amendement n° 98.
M. Pierre-Yvon Trémel. Comme nous avons eu l'occasion de le dire au cours de la discussion générale, nous ne contestons pas la nécessité d'achever la transposition des directives postales. En revanche, nous regrettons que le Gouvernement n'ait pas utilisé toutes les possibilités offertes par les directives pour procéder à une ouverture réellement progressive et maîtrisée du secteur postal à la concurrence, afin de préserver la qualité du service public postal.
En effet, la législation européenne présente l'avantage de laisser aux Etats membres une certaine marge d'appréciation, d'aller plus loin dans certains cas, moins loin dans d'autres : c'est ce qu'on appelle la subsidiarité.
Depuis la constitution du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, le Parlement a été saisi de plusieurs projets de loi visant à transposer en droit interne des directives ouvrant des secteurs industriels à la concurrence. Je pense, en particulier, à l'énergie et aux télécommunications, secteurs dans lesquels les missions de service public étaient fortes.
A chaque fois, le même scénario s'est reproduit : les projets de loi de transposition qui nous étaient présentés partaient d'une lecture libérale des directives. Aujourd'hui, nous en avons une nouvelle illustration, et nous le regrettons.
Je vais m'appuyer sur quelques exemples pour justifier notre demande de suppression de l'article 1er.
Cet article est important, car il définit le contenu et la qualité du service universel postal, c'est-à-dire l'ensemble des services qui doivent être offerts à tous, à un prix abordable. Il définit aussi les services qui peuvent rester sous monopole afin d'assurer le financement du service universel. Il définit enfin le régime d'autorisation applicable aux entreprises qui souhaiteront offrir une prestation de service universel.
Le périmètre des services réservés doit, à nos yeux, être le plus large possible. Il conditionne pour partie l'équilibre financier du service universel et, donc, indirectement, sa qualité et sa pérennité.
La directive autorise le maintien du publipostage dans le périmètre des services réservés, dans les limites de poids et de prix fixées par la directive.
La rédaction retenue par le projet de loi devrait permettre ce maintien puisqu'elle fait référence à la notion d'« envoi de correspondance » et que le publipostage est, aux termes du projet de loi et de la directive, un envoi de correspondance... Alors, pourquoi ne l'avoir pas mentionné expressément, madame la ministre ? Il y a là un risque de conflit d'interprétation.
Par ailleurs, le texte proposé pour l'article L. 2 du code des postes et télécommunications permet de contourner le monopole postal en organisant une dérogation non prévue par la directive. La rédaction de ce texte manque de clarté. Il prévoit qu'une personne à l'origine des envois de correspondance ou une personne agissant exclusivement en son nom peut assurer le service de ces envois. Dès lors, rien n'interdit qu'une personne morale, donc une entreprise, bénéficie de cette dérogation. Dans ce cas, on peut très bien imaginer que cette entreprise décide d'assurer elle-même l'envoi de son courrier ou qu'elle crée une filiale ad hoc. Ce serait un moyen pour « les grands comptes » de La Poste, les banques, les entreprises de vente par correspondance, de contourner le monopole postal.
Le régime d'autorisation a été conçu, il faut le rappeler, pour sauvegarder le service universel et les exigences essentielles, selon les termes de la directive. Or, vous avez souhaité faire un usage très restreint du recours à l'autorisation, ce qui montre bien le choix qui est le vôtre d'encadrer a minima l'ouverture à la concurrence et de ne pas mettre en place tous les moyens permettant de préserver le service universel.
L'autorisation ne porte que sur les envois de correspondance libéralisés - la correspondance intérieure, le courrier partant vers l'étranger. Elle ne porte pas sur les envois postaux hors correspondance - colis, livres, catalogues, journaux, périodiques -, qui font partie du service universel jusqu'à 10 kilogrammes pour les colis et jusqu'à 2 kilogrammes pour les autres. L'autorisation n'est pas non plus requise pour l'ensemble des services postaux - levée, tri, transport -, à l'exception de la distribution. L'autorisation n'est enfin pas exigée pour les recommandés, qui ne relèveraient pas du service réservé. Il n'a pas non plus été mis en place un régime déclaratif pour les activités hors service universel, ce que la directive appelle « les autorisations générales ».
Un autre motif d'inquiétude tient aux modalités d'accès aux installations et aux informations de La Poste par ses concurrents. Nous aurions vraiment souhaité que ces modalités soient mieux circonscrites, notamment que l'accès aux fichiers clients soit mieux encadré. L'accès à des données touchant à la vie privée des gens doit être strictement contrôlé. Ainsi aurions-nous souhaité, dans le souci d'assurer la fiabilité des envois, connaître leur « traçabilité ».
Comment seront identifiés les concurrents de La Poste ? Comment les usagers pourront-ils les connaître ? Comment, en cas de perte ou de vol, sera établie la responsabilité de La Poste et de ses concurrents ? Sur toutes ces questions, l'article ne dit mot. Il vise simplement à ouvrir le réseau de La Poste à ses concurrents.
Il existe d'autres raisons de demander la suppression de l'article 1er, nous y reviendrons lors de la présentation de prochains amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Les amendements n°s 43 et 98 sont contraires à l'esprit même du projet de loi et au respect de nos engagements internationaux.
La transposition des directives, que propose le Gouvernement, dans notre droit interne respecte les exigences européennes et met en place une régulation équilibrée qui permettra de préserver la qualité du service universel postal.
La commission est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 43 et 98.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 44, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le I de cet article. »
L'amendement n° 45, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Le chapitre Ier est intitulé : "Le monopole postal". »
L'amendement n° 46, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Le chapitre Ier est intitulé : "Le monopole postal et les obligations de service public". »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 44.
Mme Marie-France Beaufils. L'amendement n° 44 vise à revenir à la rédaction initiale de l'intitulé du chapitre 1er du livre 1er du code des postes et télécommunications, à savoir le monopole postal.
En effet, et j'y reviendrai dans quelques instants, nous nous opposons fermement à toute nouvelle réduction du domaine réservé de La Poste. Il y va de la préservation de nos services publics postaux.
Il n'y a, par ailleurs, aucune raison de supprimer a priori la référence au monopole postal, qui subsistera au-delà de 2006. En 2006, un bilan de la déréglementation devrait être effectué par la Commission européenne, afin de déterminer s'il convient, ou pas, d'envisager la poursuite du processus de déréglementation.
Certes, nous ne comptons pas sur la Commission européenne pour produire des études prenant réellement en compte, en termes d'emplois et de qualité de service public, les effets de l'ouverture à la concurrence des services postaux. Elle n'a jamais procédé à un examen sérieux des effets négatifs de la déréglementation. Il n'en demeure pas moins que diverses études, réalisées par plusieurs organisations syndicales et instituts de conjoncture, ont mesuré les conséquences sur l'emploi de la libéralisation européenne.
Quand je parle d'emplois, je me situe aussi sur le plan qualitatif. Le glissement progressif des activités réservées à l'opérateur historique vers le privé se traduit par une dégradation des conditions de travail, par une précarisation des statuts, par des salaires orientés à la baisse et, globalement, par une dégradation de la qualité des services publics.
Nous constatons une mobilisation, de plus en plus sensible, contre le processus de libéralisation de nos économies qui contribue à l'éclatement de nos services publics. Nous devrions d'ailleurs, aujourd'hui, nous interroger sur les raisons pour lesquelles la puissance publique a, voilà déjà un certain nombre d'années, extrait le secteur postal du marché. Ces raisons seraient-elles aujourd'hui caduques et condamnables ? Devrions-nous refaire le chemin de l'histoire à rebours ?
Le monopole postal est essentiel pour le financement des obligations de service public et pour la préservation de la péréquation tarifaire. Nous savons tous que la fin du monopole postal constitue aussi la fin du service public postal. La mise en place d'un fonds de compensation, préconisée par la Commission européenne, ne permettra pas de financer le service public postal. En effet, à quoi sert un tel fonds dit de compensation ? Il sert, en fait, à compenser, pour l'opérateur historique, les pertes résultant de la captation par les opérateurs privés des créneaux rentables de l'activité du secteur, autrement dit à compenser l'écrémage auquel ne manqueront pas de se livrer les opérateurs privés en s'installant sur des « niches » particulièrement rentables. Rien ne contraint, en effet, l'opérateur privé à respecter l'obligation de desservir l'ensemble du territoire. Il reviendra donc à La Poste d'assumer seule les obligations du service public, sans qu'aucune ressource pérenne ne lui soit pour autant garantie. En 2006, la part du domaine réservé ne représentera plus que 37 % de son chiffre d'affaires, contre près de 50 % aujourd'hui.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression du nouvel intitulé du chapitre 1er du titre 1er du livre 1er du code des postes et télécommunications.
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 45.
Mme Odette Terrade. Nous avons déjà eu l'occasion de souligner certaines des raisons pour lesquelles nous souhaitions maintenir le titre du chapitre 1er dans sa rédaction initiale. Il s'agit évidemment non pas de raisons purement formelles, mais bien de la nécessité d'assurer aux obligations de service public un financement pérenne. C'est la raison pour laquelle nous nous opposons à la transposition des directives qui réduisent le domaine réservé de La Poste.
Il convient d'éviter que des opérateurs privés ne s'emparent des segments, des « niches » les plus rentables du domaine réservé de La Poste. On devrait d'ailleurs s'interroger sur la question de la rentabilité d'activités qui faisaient autrefois partie du périmètre du service public !
Comme je le disais tout à l'heure, ce qui permet à La Poste de financer le service public, c'est, dans une certaine mesure, la captation de ressources - certains parlent de la rente du monopole public - au profit du financement du service public, une sorte de détournement, de réappropriation collective et publique permettant d'obtenir une péréquation tarifaire et la desserte de l'ensemble du territoire, y compris dans les zones rurales.
Une autre question se pose avec les dispositions prévues par ce projet de loi quel taux de rentabilité, car il s'agit bien de cela, allons-nous exiger de nos anciens services publics que nous aurons livrés à la concurrence ? S'agira-t-il des taux de rentabilité alignés sur les marchés financiers, de ceux qui sont exigés par les fonds de pension, avec, à la clé, des efforts de productivité, de rationalisation des coûts et de pression sur la masse salariale et l'emploi ? Il y a de quoi provoquer des enchaînements de type récessif sur le plan macroéconomique.
En contrepartie de la privatisation de ces créneaux rentables, un fonds de compensation alimenté par des opérateurs privés pourrait être créé. C'est du moins ce que préconise la Commission européenne, nous aurons l'occasion d'en reparler au cours du débat. Pour l'instant, j'observe que l'Europe s'élargit mais que, malheureusement, loin de consolider les progrès sociaux réalisés au siècle dernier, elle se dissout dans le marché mondialisé sans réelles autres règles que celles de la libre concurrence.
Au fond, c'est la notion même de service public qui perd progressivement de sa consistance au fur et à mesure de la réalisation d'un grand marché unique européen où toute entrave à la libre circulation des biens, des hommes et des services est bannie.
Elle se dilue au profit de la notion de service universel, un socle commun a minima pour l'ensemble de l'Union européenne, en deçà duquel on reconnaît qu'il ne faudrait pas descendre ! Autrement dit, pour les pays les plus développés, il s'agit d'une harmonisation vers le bas des normes et de la réglementation sociale ; pour les pays les moins avancés, le gain est bien faible sur le plan social.
La notion de service universel est très réductrice et ne permet pas de répondre de façon satisfaisante aux besoins des populations et aux exigences de notre modernité. Il est en ce sens vital de combattre l'orientation prise actuellement par la construction européenne en maintenant un monopole postal suffisant pour garantir le financement pérenne du service public.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons d'adopter l'amendement n° 45.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour présenter l'amendement n° 46.
Mme Hélène Luc. Je ne reviens pas sur les raisons pour lesquelles il est nécessaire de maintenir un important domaine réservé de La Poste. Vous le savez, il en va de la préservation de notre service public postal, qui a fait la preuve de son efficacité. Même si tout n'est pas parfait, remarquons qu'il est un puissant facteur de ciment social.
A l'heure où la cohésion sociale est remise en cause et où les inégalités sociales ne cessent de croître, il serait temps de consolider nos services publics en les modernisant et en les faisant évoluer en même temps que les besoins de nos populations, selon le principe de la mutabilité.
Nous ne devons pas suivre l'exemple suédois, et il est encore temps de changer le cours de l'orientation prise par la construction européenne. Certains diraient qu'elle a révélé son véritable visage. Ce serait sans doute figer le cours de l'histoire. Tout ce que l'on peut dire est que l'Union européenne est actuellement dominée par des forces ultralibérales. J'en veux pour preuve le refus du Parlement d'adopter une directive-cadre sur les services publics leur évitant d'être soumis aux seules règles de la concurrence.
La notion de service universel qui s'impose aujourd'hui constitue un véritable recul sur le plan social et en matière d'égalité d'accès à un certain nombre de droits. C'est aussi, sur le plan conceptuel, un véritable recul par rapport à notre propre vision du service public. Cette notion renvoie à celle d'intérêt économique général, sur laquelle nous devrions réfléchir. Le qualificatif « économique » mérite toute notre attention ; il restreint bien évidemment la portée même de la notion d'intérêt général.
Pour respecter le principe de subsidiarité, l'article 16 du traité d'Amsterdam de 1997 précise que « eu égard à la place qu'occupent les services d'intérêt économique général parmi les valeurs communes de l'Union ainsi qu'au rôle qu'ils jouent dans la promotion de la cohésion sociale et territoriale de l'Union, la Communauté et ses Etats membres, chacun dans les limites de leurs compétences respectives et dans les limites d'application du présent traité, veillent à ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions qui leur permettent d'accomplir leurs missions ».
Si le principe de subsidiarité peut s'appliquer en ce qui concerne les services dits « d'intérêt économique général », la conception même d'intérêt économique général est en retrait par rapport à notre propre conception de service public et d'intérêt général.
D'un côté, on veut bien admettre que des opérateurs privés puissent prendre en charge, sous l'oeil vigilant d'un régulateur indépendant, des obligations minimales correspondant au service universel. Une autorité de régulation ayant pour mission de veiller au respect des règles de la concurrence se met en place. Quelles sont exactement ses limites d'intervention ?
D'un autre côté, on reconnaît une incompatibilité irréductible entre les exigences de service public et le marché, obligeant à une appropriation publique des droits de propriété des entreprises chargées d'assurer le service public. On reconnaît ainsi que certaines activités répondant à des besoins collectifs fondamentaux ne peuvent être soumises aux critères de rentabilité du marché et doivent échapper à une régulation purement marchande.
Ce projet de loi, qui renvoie systématiquement à la notion de service universel, nous invite à un débat fondamental. Un tel débat sur le secteur postal, concernant les besoins concrets liés à ce type d'activité en matière d'aménagement du territoire, de présence postale, de péréquation tarifaire, de production de lien social dans les zones rurales et dans les banlieues, nous renvoie aussi à un débat dont nous avons jusqu'à maintenant été privés, à savoir une directive-cadre sur les services publics qui vient d'être rejetée par un parlement européen ultralibéral !
Rien ne doit donc échapper aux règles marchandes ! Nous n'oublions cependant pas, j'y insiste, l'échec de Cancún et les véritables oppositions qui se sont manifestées à l'encontre d'une constitution européenne ultralibérale !
Il serait donc dangereux de tout confier à des entreprises relevant de logiques purement privées - les affaires Enron, Vivendi, Parmalat tendent à le prouver - et c'est la raison pour laquelle la préservation du monopole postal est essentielle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 44 est contraire à la logique du projet de loi tendant à promouvoir le service universel et à ouvrir le marché.
L'amendement n° 45 est contraire à la logique d'ouverture des marchés instaurée par la directive européenne de 2002, dont les principes ont été approuvés en 2001 par le gouvernement français.
L'amendement n° 46 est contraire à l'orientation du projet de loi et aux engagements européens de la France d'ouvrir les marchés postaux.
Nous avons la volonté de transposer une directive qui a été approuvée et nous ne devons pas nous laisser guider par des dispositions qui n'ont pas d'assise législative et réglementaire. Telle est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur les trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 44. Au-delà des arguments de fond qui conduisent à moderniser le code des postes et télécommunications, le droit gagnera en lisibilité et en simplicité avec une première partie du code consacrée aux principes et aux définitions du service universel, suivie d'un chapitre sur les règles de la régulation des services postaux.
S'agissant de l'amendement n° 45, le titre proposé ne correspond plus au contenu des dispositions à prévoir sur le service universel, et nous ne pouvons donc pas l'accepter.
Enfin, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 46. Je noterai simplement que La Poste peut être astreinte à des obligations de service public en matière d'aménagement du territoire, de défense et de sécurité, de normalisations techniques qui n'ont pas leur place dans le code des postes et télécommunications.
C'est bien des obligations de La Poste au titre de sa mission de service universel postal dont il est question et qui doit être reflété dans le titre de ce premier chapitre du code.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 47, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer les deuxième et troisième alinéas du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1 du code des postes et télécommunications. »
L'amendement n° 48, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après les mots : "support matériel", supprimer la fin de la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1 du code des postes et télécommunications. »
L'amendement n° 99, présenté par MM. Trémel, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le dernier alinéa du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :
« Sont notamment considérés comme des envois postaux les livres, les catalogues, les journaux, les périodiques et les colis postaux contenant des marchandises avec ou sans valeur commerciale. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 47.
Mme Marie-France Beaufils. Nous avons évoqué les raisons pour lesquelles nous n'étions pas favorables à la réduction du monopole postal de La Poste. Cet amendement va également dans ce sens. Nous nous interrogeons sur les opportunités que La Poste pourrait saisir pour développer des nouveaux métiers qui, parce qu'ils sont innovants, en phase avec les nouvelles technologies, devraient faire partie du domaine réservé de l'opérateur historique. Il s'agit, par exemple, d'une forme de courrier que l'on peut qualifier d'hybride consistant à imprimer pour le destinataire un courrier d'origine électronique. Cette forme de courrier de substitution au courrier classique est amenée à se développer et à contrecarrer le ralentissement du taux de croissance de l'activité courrier en général. Ce type de courrier se développe surtout chez les clients industriels.
La captation par les opérateurs privés des segments de l'activité postale dans un but purement lucratif prive La Poste des ressources essentielles au financement des obligations de service public. Il en est ainsi du courrier dit industriel, qui représente près de 30 % du volume du courrier.
En effet, il est bien évident que les marges dégagées par ce type de courrier permettent de compenser les pertes de La Poste liées à ses obligations de desserte de l'ensemble du territoire. Cette captation par les opérateurs privés des « niches » rentables aura pour conséquence à terme une augmentation des tarifs à destination des petits consommateurs, des usagers, mais aussi des petites et moyennes entreprises, des artisans, et ce d'autant plus que La Poste s'est engagée dans un plan d'investissement.
Les investissements pour l'automatisation des centres de traitement et des tâches de tri et l'ensemble des investissements de rationalisation des activités de La Poste pèseront également sur son déficit, alors qu'aucun soutien financier pour réaliser ces infrastructures n'a été prévu.
Cela aura bien évidemment des conséquences en termes d'emplois, puisque l'on sait que, si La Poste dispose aujourd'hui de cent trente centres de tri, les objectifs de nationalisation s'établiraient entre vingt-cinq et cinquante centres de tri, soit un processus de concentration avec la mise en place de plates-formes régionales. C'est bien, à travers cette concentration, la baisse des coûts qui est recherchée. Elle ne peut que s'accroître au fur et à mesure que le domaine réservé de La Poste sera réduit.
C'est pourquoi nous vous proposons cet amendement, afin que La Poste puisse assurer l'évolution de son activité.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 48.
Mme Evelyne Didier. Je défendrai ensemble les amendements n°s 48 et 54, dont les objets sont proches.
Nous avons avancé certaines des raisons pour lesquelles nous nous opposions à la restriction du domaine réservé de La Poste. Cet amendement a pour but d'élargir le domaine réservé aux envois de livres, journaux, catalogues et périodiques. En effet, il semble que l'ouverture du secteur postal à la concurrence se traduira par une pression très forte sur l'emploi et les conditions de travail.
Plus précisément, l'objectif de réduire ce que les dirigeants de La Poste considèrent être des sureffectifs, expression reprise par la Cour des comptes, devrait se traduire par l'absence de renouvellement des départs à la retraite. La Poste dispose de l'un des plus grands et des plus performants réseaux au niveau européen avec 17 000 bureaux de poste, dont 12 500 de plein exercice, 20 centres financiers régionaux, 5 centres financiers nationaux et 530 établissements situés en zones urbaines sensibles. Par ailleurs, les bureaux de poste reçoivent chaque jour 3,5 millions d'usagers et, chaque année, environ 26 milliards d'objets de correspondance sont triés et distribués. Dans le même temps, 21,5 millions de livrets A sont gérés par La Poste.
Cette activité suppose de disposer de personnels qualifiés en nombre pour répondre aux besoins des populations, en particulier celles qui sont fragilisées par la période actuelle.
En ce domaine, il est donc nécessaire de maintenir les effectifs de La Poste par une politique de recrutement. Nous avons déjà rappelé le rôle essentiel joué par cet établissement en matière de production de lien social et de développement équilibré du territoire.
Nous comprenons bien que, dans le cadre de la libéralisation, de nombreux bureaux de postes soient menacés, et que le réseau de proximité soit remis en cause. La Poste procède déjà à des fermetures partielles et diminue ses horaires d'ouverture. Les normes d'accessibilité définies au sein des bassins d'activité se traduiraient par une diminution de plus de six mille bureaux de poste de plein exercice. C'est bien la question de la présence postale sur l'ensemble du territoire qui est posée. Quant aux « points poste » dans les magasins, épiceries et petits commerces, cette solution n'est guère satisfaisante. A terme, c'est aux collectivités locales que l'on s'adressera pour financer les services postaux nécessaires à la vie quotidienne des Français et à l'activité économique.
En ce qui concerne l'emploi, du fait de la pyramide des âges des personnels de La Poste, plus d'un tiers des postiers partiront à la retraite d'ici à 2009.
Par ailleurs, dans le secteur de la distribution de la publicité non adressée, nous observons que La Poste met en place un second réseau de distribution à travers sa filiale Médiaposte, avec des salariés contractuels de droit privé. La pression à la baisse des coûts y est importante et la tendance à la précarisation des statuts s'y affirme fortement.
Nous voulons réaffirmer la nécessité que La Poste conserve des effectifs conséquents pour faire face aux missions qui lui sont confiées. Nous illustrons ce souhait en proposant de maintenir un domaine réservé large avec l'envoi des livres, des journaux, des catalogues et des périodiques.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 99.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement vise à bien préciser ce qu'est un envoi postal. C'est une question précise à laquelle il nous faut apporter une réponse claire. Vous savez que l'objectif de ce projet de loi - cela a été suffisamment dit - est de transposer la directive de 1997. Or, madame la ministre, monsieur le rapporteur, il ne vous a pas échappé que, au sixième alinéa de l'article 2 de cette directive, il est bien précisé ce qu'est un envoi postal au sens où l'entend l'Europe : « Un envoi portant une adresse sous la forme définitive dans laquelle il doit être acheminé par le prestataire du service universel. » Vous avez bien fait figurer cette précision dans le projet de loi, mais la directive prévoit aussi : « Il s'agit, en plus des envois de correspondance, par exemple de livres, de catalogues, de journaux, de périodiques et de colis postaux contenant des marchandises avec ou sans valeur commerciale. »
Puisque cela est écrit précisément dans la directive que nous avons la charge de transposer, nous vous proposons tout simplement de reprendre cette formulation extrêmement précise. Elle présente des garanties, puisque la définition est beaucoup plus précise et extensive par rapport à la rédaction que vous nous proposez.
C'est une liberté que nous donne le texte européen. Je ne comprendrais pas que nous n'en usions pas. Donc, j'espère vivement que cet amendement sera accepté et, s'il ne l'était pas, j'aimerais vraiment comprendre pourquoi.
Il convient par ailleurs, monsieur le président, de procéder à la rectification de notre amendement qui concerne l'envoi postal et de le rédiger ainsi : « Compléter l'avant-dernier alinéa du II de cet article par une phrase ainsi rédigée : (...) ! »
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 99 rectifié.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 47 a pour objet d'étendre le monopole, puisque les envois de correspondance sont inclus dans les services réservés en vertu du troisième alinéa du III de l'article 1er sous certaines limites de poids et de prix. Il est donc contraire à l'ouverture du marché organisée dans le cadre des directives européennes.
L'avis de la commission est par conséquent défavorable.
L'amendement n° 48, qui a pour effet d'étendre le champ du secteur réservé, est également contraire à la logique d'ouverture du marché postal imposée par les directives européennes.
La commission émet donc aussi un avis défavorable.
Sur l'amendement n° 99 rectifié, la commission s'est longuement interrogée. Il pourrait effectivement être utile de désigner explicitement comme étant des envois postaux tous les objets concernés, mais on peut craindre que cette modification d'apparence technique n'aboutisse à limiter l'ouverture et ne soit donc contraire aux directives.
La commission souhaite dès lors entendre l'avis du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Sueur. Je ne comprends pas !
M. Daniel Raoul. C'est la reprise intégrale de la directive !
M. Jean-Pierre Sueur. On ne peut pas nous dire que nous ne la respectons pas : nous la reprenons mot pour mot !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur Sueur, la commission s'est interrogée et elle s'en remettra à l'avis du Gouvernement. Elle penche donc dans un sens favorable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Sur l'amendement n° 47, le Gouvernement émet un avis défavorable.
En effet, pour les opérateurs économiques, de même que pour les usagers du service postal, ces définitions me semblent très importantes. Dès lors qu'une concurrence est introduite et qu'un régulateur est chargé de veiller à ce que cette concurrence soit équitable, il faut s'efforcer de tendre vers toute la transparence nécessaire dans la fixation des règles applicables. Tel est l'objet de ces définitions, et c'est la raison pour laquelle le Gouvernement ne peut pas accepter de les voir supprimer.
L'amendement n° 48 vise à inclure les livres, journaux et catalogues dans le monopole alors qu'ils n'en ont jamais fait partie. L'essor du portage de presse à domicile, sur lequel les éditeurs fondent de très grands espoirs pour redresser leur lectorat, le montre de façon évidente. La directive postale ne prévoit pas non plus de les inclure dans le monopole.
Par conséquent, le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement. La même réflexion vaudra d'ailleurs pour l'amendement n° 54.
S'agissant de l'amendement n° 99 rectifié, il reprend en effet de très près le texte de la directive. Après s'être, comme la commission, interrogé, le Gouvernement est tenté de s'en remettre à la « sagesse positive » de la Haute Assemblée. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 99 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 49, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le paragraphe II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... . - Après l'article L. 1 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L... . - Le maintien d'une réelle péréquation tarifaire qui assure l'égalité d'accès de tous les usagers, quels que soient leurs moyens et leur situation sur tout le territoire, est organisé par le présent code. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Je serai brève, puisque je suis déjà intervenue sur ce sujet dans mon intervention générale.
Nous souhaitons réintégrer dans le code la notion de péréquation tarifaire puisque, bien avant que la concurrence se soit engagée dans le secteur postal, c'est elle qui a permis de garantir l'accessibilité de tous les usagers aux services mis en place par La Poste, et cela sur tout le territoire.
La suppression de la péréquation risque de remettre en cause l'égalité d'accès de tous les usagers quelles que soient leurs ressources, bien évidemment, mais aussi quel que soit le lieu où ils habitent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Le 5° de l'article L. 5-2 prévoit que le prix du timbre est approuvé par l'autorité de régulation. L'unicité du prix du timbre est donc garantie, de même que la péréquation à laquelle elle contribue.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, qui lui semble redondant avec l'actuel article L. 1 du code des postes et télécommunications, dans lequel l'accent est mis sur l'objectif de cohésion sociale et de développement équilibré du territoire assigné au service universel postal.
Pour atteindre cet objectif, la péréquation tarifaire est, bien sûr, un élément important, mais ce n'est pas le seul ; elle figure, en outre, dans le cahier des charges de La Poste.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune. Toutefois, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 50, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le III de cet article. »
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Le paragraphe III de l'article 1er vise à transposer dans notre droit les nouvelles limites du secteur réservé de La Poste.
Nous avons déjà signalé notre inquiétude face à cette réduction supplémentaire du domaine de La Poste. Celle-ci étant considérée comme le seul prestataire ayant des obligations de service universel, nous nous demandons comment elle pourra assumer lesdites obligations, essentielles à la cohésion sociale et à l'aménagement de notre territoire, sans que lui soit assuré un financement pérenne.
En réalité, le processus de libéralisation et de déréglementation engagé par la Commission européenne aura pour conséquence, comme on peut l'observer depuis quelques années, une rationalisation des coûts de l'entreprise et une pression à la baisse sur les emplois.
Les objectifs fixés dans le cadre du contrat de plan semblent assez explicites, et nous ne pouvons pas comprendre ce contrat de plan sans y voir un désengagement de l'Etat dans le cadre du processus de libéralisation des économies et de la mondialisation actuelle.
Les objectifs de compétitivité sont désormais privilégiés et appliqués aux services publics comme aux autres domaines de l'activité.
On souhaite certes que « La Poste soit à armes égales avec ses concurrents ». Mais, évidemment, cette compétitivité n'est envisagée que sous l'angle des coûts !
Où se situe donc le handicap compétitif de La Poste ? Dans son réseau de proximité ? Dans ses emplois ? Dès lors, c'est une fois de plus la variable emploi qui est visée !
Cela signifie aussi que des bureaux de poste seront fermés, puisqu'ils représentent, au regard des critères de rentabilité exigés, des surcoûts, mais ce sont les surcoûts liés au service de proximité !
Vous avez l'intention, madame la ministre, de permettre une redéfinition des critères d'accessibilité en matière postale. La présence postale ne devrait plus être assurée que par des bureaux et des « points poste » concédés à des communes, ou à des commerçants.
La diminution drastique du nombre de bureaux de poste semble être confirmée par la Cour des comptes, qui précise : « Avec 6 013 bureaux d'un réseau plus développé dit d'accessibilité, qui permettrait à 80 % des ménages d'être à moins de deux kilomètres d'un bureau dans les villes de plus de 10 000 habitants et à moins de dix kilomètres dans les agglomérations inférieures à 10 000 habitants, La Poste ne subirait aucune perte de son chiffre d'affaires et améliorerait encore son résultat de 451 millions d'euros. »
Il ne s'agit donc pas d'un redéploiement de la présence postale : plus de 6 000 bureaux de poste seront fermés, tandis que les horaires d'ouverture seront eux aussi réduits. Et, s'il est prévu de créer environ 900 bureaux de poste dans les zones urbaines sensibles, nous assisterons dans le même temps à la réduction du nombre des guichets dans les postes centrales.
Quant aux zones rurales, elles seront évidemment les parents pauvres de cette logique de régression. Le maintien de la présence postale reposera sur la conclusion de partenariats avec des commerçants. Il s'agit bien là de la fin d'un véritable service postal de proximité dans les zones rurales.
A terme, comme l'a dit Marie-France Beaufils, c'est la péréquation tarifaire qui disparaîtra !
In fine, c'est bien le principe d'égalité d'accès de tous en tout point du territoire qui est remis en cause.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 52 est présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 100 est présenté par MM. Trémel, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour remplacer les trois derniers articles de l'article L. 2 du code des postes et télécommunications. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour défendre l'amendement n° 52.
Mme Marie-France Beaufils. Dans le même esprit que pour nos amendements précédents, nous tenons à ce que les services publics postaux soient maintenus sur l'ensemble du territoire.
C'est la raison pour laquelle nous nous opposons à la fixation par décret des caractéristiques de l'offre du service dit universel que La Poste est tenue d'assurer.
Tel est le sens de cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour défendre l'amendement n° 100.
M. Pierre-Yvon Trémel. J'invoquerai deux arguments à l'appui de cet amendement.
D'abord, un décret ne nous paraît pas nécessaire puisque les caractéristiques du service universel postal sont aujourd'hui précisées par deux documents : le cahier des charges de La Poste et le contrat de plan.
Ensuite et surtout, la définition du contenu du service universel doit rester de la seule compétence du politique, seul à même de juger de l'intérêt général, sur lequel l'ARTP n'a pas à se prononcer.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le paragraphe III de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et télécommunications, supprimer les mots : "de l'Autorité de régulation des télécommunications et des postes et". »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. J'ai été amenée à dire, dans mon intervention générale, que nous regrettions que l'Autorité de régulation des télécommunications et des postes prenne ainsi le pas sur le politique s'agissant de choix qui nous semblent essentiels.
Cet amendement s'inscrit donc dans la même logique que nos amendements précédents.
M. le président. L'amendement n° 20 rectifié, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article L. 2 du code des postes et télécommunications, remplacer les mots : "Autorité de régulation des télécommunications et des postes", par les mots : "Autorité de régulation des communications électroniques et des postes". »
« II. - En conséquence, procéder à la même modification dans l'ensemble des autres dispositions du projet de loi. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Après les mots : "de l'étranger", rédiger comme suit la fin de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article L. 2 du code des postes et télécommunications : ", y compris ceux assurés par courrier accéléré, sont réservés à La Poste lorsque leur poids ne dépasse pas cent grammes et leur prix est inférieur à trois fois le tarif de base, sans que ce tarif puisse excéder un euro". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement se justifie également par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 101, présenté par MM. Trémel, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et télécommunications, après les mots : "par courrier accéléré,", insérer les mots : "ainsi que le publipostage". »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Les leçons de l'expérience aidant, je m'inspire du même argument que celui qui a valu à l'amendement n° 99 rectifié d'être approuvé. (Sourires.)
Mme Marie-France Beaufils. Ça ne marchera pas !
M. Jean-Pierre Sueur. Cela va forcément marcher : le publipostage est une activité tout à fait essentielle au financement du service universel, et nous tenons donc à ce qu'il entre expressément dans le périmètre des services réservés. Or la fameuse directive de 1997, toujours dans son article 2 mais, cette fois, à l'alinéa 8, inclut le publipostage.
Il nous paraît donc parfaitement cohérent, puisque nous transposons cette directive, de mentionner le publipostage.
M. le président. L'amendement n° 102, présenté par MM. Trémel, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« A la fin de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas l'article L. 2 du code des postes et télécommunications, supprimer les mots : ", sans que ce tarif de base puisse excéder un euro". »
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Tous ceux et toutes celles qui ont pris soin de lire attentivement le texte du projet de loi n'auront pas manqué de s'interroger sur ce membre de phrase : « , sans que ce tarif de base puisse excéder un euro ». Pour ma part, je me suis longtemps demandé quel était le pourquoi de cette précision.
L'article 1er prévoit que le tarif de base servant à délimiter le périmètre des services réservés, tarif qui, il faut le préciser, sera en vigueur jusqu'au 1er janvier 2006, ne peut excéder un euro. S'agit-il d'encadrer par la loi le prix du timbre, qui est actuellement de 0,50 euro, jusqu'au 1er janvier 2006 ? Cela signifierait alors que ce prix pourrait doubler en deux ans, ce qui est difficilement admissible. Ou s'agit-il de réduire le domaine réservé puisque cette rédaction aboutirait à ce que les courriers, dès lors que le prix du timbre dépasserait un euro, ne soient plus réservés ?
Nous souhaitons que Mme la ministre nous apporte des précisions.
M. le président. L'amendement n° 53, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer la dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et télécommunications. »
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous souhaitons que des études mesurant l'impact en termes d'emplois et d'aménagement du territoire soient menées avant la nouvelle étape de restriction du domaine réservé de La Poste prévue le 1er janvier 2006.
Les organisations syndicales et les associations de consommateurs réclament depuis des années qu'un réel bilan de la déréglementation européenne dans le secteur postal soit entrepris avant toute nouvelle étape d'ouverture à la concurrence du secteur. Cette demande n'a pas été satisfaite.
Nous continuons de penser que la réduction du monopole postal sera dommageable pour nos services publics et pour l'aménagement du territoire.
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début de la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article L. 2 du code des postes et télécommunications :
« Constituent le secteur réservé, à compter du 1er janvier 2006, les services portant sur les envois... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel qui se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« I. - Compléter in fine le deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article L. 2 du code des postes et télécommunications par une phrase ainsi rédigée :
« Les envois de livres, catalogues, journaux et périodiques sont exclus du secteur réservé à La Poste.
« II. - Supprimer le troisième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article L. 2 du code des postes et télécommunications.
« III. - Compléter in fine le texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article L. 2 du code des postes et télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« Les envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives ou juridictionnelles sont réservés à La Poste. Un décret en Conseil d'Etat, pris dans les six mois suivant la publication de la loi n° du relative à la régulation des activités postales détermine les conditions administratives et techniques dans lesquelles La Poste est tenue d'assurer ce service, ainsi que les modalités de fixation des tarifs. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement se justifie lui aussi par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 103, présenté par MM. Trémel, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la première phrase du troisième alinéa du III du texte proposé par cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et télécommunications :
« Les envois recommandés dont l'utilisation est prescrite par un texte légal ou réglementaire sont réservés à La Poste. »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. M. le rapporteur vient d'expliquer qu'il était nécessaire que les envois recommandés prévus par les procédures administratives et juridictionnelles soient réservés à La Poste.
Nous proposons d'aller plus loin et de considérer que tous les envois recommandés doivent continuer à relever de La Poste.
En effet, écrire une lettre recommandée n'est pas toujours très gai, la situation et les choses à dire ne sont pas toujours très agréables ; mais nos concitoyens ont foi dans la lettre recommandée, ils ont un rapport de confiance avec une autorité publique qui, en l'espèce, est La Poste. Ils comprendraient donc très bien que la lettre recommandée, précisément parce qu'elle est recommandée, parce que son envoi est un acte important, continue de relever exclusivement de La Poste.
La lettre recommandée est de rigueur lorsqu'il s'agit de donner congé à un locataire, de résilier une police d'assurance, d'envoyer des documents si importants que l'on attend un accusé de réception, qu'il faut pouvoir attester que le destinataire de la lettre l'a bien reçue, que c'est bien lui qui l'a signée... Tout cela relève de procédures qui nécessitent véritablement ce rapport de confiance que La Poste a réussi à instaurer au cours de son histoire.
Il serait donc juste à l'égard de La Poste de continuer à lui confier la totalité des envois recommandés.
M. le président. L'amendement n° 129 rectifié, présenté par MM. Delfau et Fortassin, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article L. 2 du code des postes et télécommunications :
« Seule La Poste peut acheminer les envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives ou juridictionnelles. »
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Mon amendement, qui vise uniquement les procédures administratives et juridictionnelles, a pour objet de rappeler que, par son statut d'entreprise publique, par son histoire, par la confiance qu'elle a accumulée au fil des ans, La Poste est l'opérateur normal, j'allais dire obligatoire, pour l'acheminement des plis émanant de l'autorité publique. Il reprend, en le formulant de façon plus vigoureuse, le dernier alinéa de l'amendement n° 4 présenté par M. le rapporteur.
Il m'importe peu qu'il soit adopté dans sa rédaction ; en revanche, je tiens vivement à ce que l'idée soit retenue et inscrite dans la loi, si possible sous la forme que vient de proposer mon collègue M. Sueur.
M. le président. L'amendement n° 54, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, MM. Coquelle et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et télécommunications. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Il est déjà défendu.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 104 est présenté par MM. Trémel, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
L'amendement n° 125 rectifié est présenté par MM. Delfau et Fortassin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le dernier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des télécommunications. »
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour présenter l'amendement n° 104.
M. Pierre-Yvon Trémel. Le projet de loi organise une dérogation au régime général des services réservés pour les cas où une personne à l'origine des envois de correspondances ou une personne agissant exclusivement en son nom est en mesure d'assurer le service de ses propres envois. Or rien dans l'exposé des motifs ne justifie une telle dérogation.
Nous souhaiterions donc mieux connaître les motivations du Gouvernement, d'autant que la rédaction retenue est peu claire : il n'est pas exclu qu'il puisse s'agir d'une personne morale. Dans ce cas, une entreprise pourrait contourner le monopole postal dès lors qu'elle assure elle-même le service de ses envois ou qu'elle le confie à une autre « personne », une de ses filiales par exemple.
Le rapporteur, qui s'en est ému, indique à la page 36 de son rapport que cette dérogation, comme celle qui exclut les livres, catalogues, périodiques et journaux des services réservés, aurait pour objet d'autoriser la délivrance d'une lettre : à l'occasion du portage à domicile d'un journal.
Cette explication ne nous paraît guère plus éclairante, car il est toujours possible de faire porter une lettre : dans ce cas, la lettre n'est pas affranchie. Dès lors qu'elle est affranchie et qu'elle entre dans les limites fixées par la directive, il n'y a aucune raison qu'elle échappe à la distribution par les postiers.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour présenter l'amendement n° 125 rectifié.
M. Gérard Delfau. Mon amendement est identique à celui que vient de présenter M. Trémel. J'ajouterai aux arguments qu'il a exposés que, même si nous savons que, dans la pratique, une personne physique ou morale a déjà pu et pourra sans doute encore assurer le service d'envois en agissant au nom d'une autre personne, il me semble dangereux de rendre légale une telle possibilité qui peut permettre de contourner les services réservés.
C'est pour clarifier ce point important que je propose l'amendement n° 125 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La proposition contenue dans l'amendement n° 50 est totalement contraire à la directive de 2002, qui abaisse les seuils d'ouverture du marché. L'amendement ne peut pas être accepté, et l'avis de la commission est défavorable.
Avec l'amendement n° 52, analogue à l'amendement n° 100 du groupe socialiste, il s'agit de supprimer la procédure de fixation des caractéristiques de l'offre de service universel par décret. Or le recours au décret permet une plus grande souplesse. Nous devons en effet naviguer entre deux écueils dans la formulation de ces caractéristiques : être trop précis serait préjudiciable à la compétitivité de La Poste, qui doit maîtriser son offre de produits, mais il faut être assez normatif pour fixer le contenu d'un véritable service universel. L'avis de la commission est défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 100, qui vise à supprimer ce même décret, je rappelle que les caractéristiques de l'offre de service universel sont déjà fixées par le cahier des charges de La Poste et par le contrat de plan. Il revient donc au Gouvernement de prendre un décret en Conseil d'Etat afin d'en préciser les caractéristiques techniques, après avis du régulateur et de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications. Une telle procédure s'impose, étant donné la technicité requise. A défaut, il reviendrait au régulateur et au juge de préciser les règles législatives, au terme de longues procédures contentieuses ne pouvant que nuire à un fonctionnement harmonieux du marché postal. L'avis de la commission est donc défavorable.
L'amendement n° 51 a pour objet de supprimer l'avis du régulateur du marché postal sur les caractéristiques de l'offre de service universel. Pourquoi se priver de cette compétence technique, alors même que les amendements de la commission visent à renforcer les compétences du régulateur en ce domaine ?
C'est d'ailleurs l'autorité de régulation qui contrôlera la façon dont le service universel est dispensé : nul mieux qu'elle ne connaîtra les difficultés rencontrées en raison des termes de sa définition par le décret. La commission a donc émis un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 20 rectifié, proposé au nom de la commission, je tiens à apporter quelques précisions.
Le projet de loi relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, qui sera prochainement soumis au Parlement, prévoit en son article 1er de remplacer le mot : « télécommunications » par les mots : « communications électroniques » dans l'ensemble du code des postes et télécommunications, y compris dans l'intitulé même de ce code, qui deviendra le « code des communications électroniques et des postes ». Il serait logique de saisir l'occasion du changement de dénomination de l'ART, qu'impose l'extension de ses compétences au secteur postal, pour intégrer d'ores et déjà cette évolution.
L'amendement n° 101 vise à inclure le publipostage dans le périmètre des services réservés. Il est exact que la directive, dans son article 7, n'interdit pas de l'y conserver, mais si l'on suivait l'orientation proposée par les auteurs de cet amendement, on risquerait de favoriser le développement d'effets pervers pour La Poste. La commission émet un avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur. Quels effets pervers ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 102 tend à supprimer le plafond de 1 euro pour le tarif de base des services réservés. La question soulevée par les auteurs de l'amendement n'est pas sans intérêt. C'est pourquoi, sur ce sujet très technique, nous souhaitons, madame la ministre, connaître l'avis du Gouvernement.
L'amendement n° 53 a pour objet d'éviter le nouvel abaissement du seuil d'ouverture des marchés à compter du 1er janvier 2006. Il est donc contraire à la lettre de la directive et, par voie de conséquence, aux engagements européens pris par la France au Conseil de décembre 2001. La commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 103 tend à inclure dans le secteur des services réservés de La Poste tous les envois recommandés, alors que le projet de loi prévoit qu'il ne comporte que les envois recommandés utilisés dans le cadre administratif ou juridictionnel. Ce choix est justifié par le fait que seuls ces envois recommandés relèvent réellement d'une mission de service public. La commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 129 rectifié est satisfait par l'amendement n° 4 de la commission, qui clarifie le régime du service des envois par lettre recommandée. La commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 54 est contraire à la philosophie du projet de loi, qui exclut du secteur réservé les envois de catalogues. La commission émet un avis défavorable.
S'agissant des amendements identiques n°s 104 et 125 rectifié, il est déjà admis que toute personne puisse assurer elle-même le service de ses propres envois. Ces dérogations restent utiles pour permettre la délivrance d'une lettre à l'occasion du portage à domicile des journaux. L'inquiétude des auteurs des amendements sur le possible contournement de la loi par les services de portage semble pouvoir être apaisée par le fait que la filiale spécialisée d'une société ne pourrait intervenir que pour cette société, à l'exclusion de toute autre. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 50. Notre droit doit évoluer sur tous les points abordés au III de l'article 1er, compte tenu des engagements communautaires que nous avons pris de longue date, de 1997 à 2002. Naturellement, il faut adapter le champ du monopole postal, mais je souhaite rappeler que cet article rend au Gouvernement le pouvoir de fixer le contenu du service universel postal, compétence aujourd'hui détenue par La Poste, qui ne fait qu'en informer le ministre. Le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement, dont l'adoption pérenniserait une situation peu satisfaisante.
Le Gouvernement émet un avis également défavorable sur l'amendement n° 52, car le décret permettra à la fois d'être précis dans la détermination du contenu de la mission de service universel de La Poste et d'assurer une large consultation, puisque la CSSPPT sera naturellement saisie de ce projet.
Sur l'amendement n° 100, je rappelle que la procédure actuelle n'est guère satisfaisante, puisque c'est La Poste qui détermine seule les prestations qu'elle offre au titre du service universel et en informe simplement le ministre. Le projet de loi rend donc au Gouvernement le moyen de déterminer l'étendue et le contenu précis de la mission de service universel postal, ce qui nous semble convenir mieux. Une large consultation est prévue et la CSSPPT, en particulier, sera saisie de ces dispositions. Le III de l'article 1er nous semble donc constituer un acquis important, et le Gouvernement ne souhaite pas y renoncer.
En ce qui concerne l'amendement n° 51, le projet de loi, je viens de l'indiquer, rend au Gouvernement la compétence de fixer les caractéristiques du service universel, c'est-à-dire le contenu précis des obligations de La Poste, aujourd'hui, c'est La Poste elle-même qui définit sa gamme de services, le ministre n'étant qu'informé de ses choix. L'ARTP ne fera que rendre un avis, ce qui peut contribuer à éclairer le Gouvernement sur les conséquences de ses choix et à améliorer la clarté de ce texte essentiel, afin que les obligations soient réellement contrôlées et contrôlables. Le Gouvernement n'est donc pas favorable à cet amendement.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat pour l'amendement n° 20 rectifié. En effet, dans le langage des textes communautaires, l'appellation « communications électroniques » est venue remplacer l'appellation « télécommunications ». L'adoption de cet amendement mettrait donc notre droit en harmonie, pour ce qui est de la terminologie utilisée, avec les pratiques et le droit communautaires.
Le Gouvernement est favorable à la clarification rédactionnelle proposée à l'amendement n° 2.
Quant à l'amendement n° 101, je rappelle que l'intention du Gouvernement est de maintenir le publipostage dans le secteur réservé, ce qui est fait très explicitement au deuxième alinéa, in fine, de l'article L. 2 modifié. La précision n'est donc pas utile, et je demande à M. Trémel, compte tenu de notre parfaite concordance de vues, de bien vouloir retirer cet amendement.
S'agissant de l'amendement n° 102, sur lequel tant le rapporteur que MM. Trémel et Sueur m'ont demandé des explications, c'est très volontiers que je porte à la connaissance de la Haute Assemblée la raison juridique pour laquelle nous avons introduit ce plafond.
Il revient en effet à la loi seule de définir le champ du monopole postal. Le définir par référence à un tarif qui relève avant tout de La Poste, avec l'accord du seul ministre des postes et des télécommunications, aurait pu constituer, selon le Conseil d'Etat, un motif d'inconstitutionnalité. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 53. Le très grand mérite du projet de loi est d'offrir aux opérateurs économiques ainsi qu'aux usagers du service postal une visibilité à moyen terme sur le contexte du marché. Cette visibilité est très importante dans une période de mutations économiques et techniques. Il faut la préserver et s'attacher à éviter l'incertitude sur le cadre réglementaire.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 3, déposé par la commission, dont la rédaction semble plus claire. Il est important, en effet, que le champ du monopole postal soit défini avec précision et en parfaite conformité avec les obligations européennes. Tel est l'objet du nouvel article L. 2 du code des postes et télécommunications, qui définit le champ et les limites du secteur réservé aux prestataires du service universel.
Le Gouvernement est également favorable à l'amendement n° 4, présenté par la commission. Comme le permet la directive de 1997, le secteur réservé comprendra, outre les envois de correspondances, les envois recommandés utilisés dans le cadre des procédures administratives ou juridictionnelles. Ce recommandé devra répondre à des caractéristiques spécifiques qui le différencient du recommandé simple ; il devra notamment fournir l'assurance d'une remise en main propre. Ces caractéristiques devront être définies avec les services de la chancellerie pour satisfaire les besoins des institutions judiciaires et des professions juridiques. Le Gouvernement est donc favorable à ce qu'un texte particulier fixe les caractéristiques de ce service.
Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 103 de MM. Trémel et Sueur. En effet, il a été conduit à reprendre la rédaction de cet alinéa, notamment à la demande de La Poste, l'entreprise ayant souligné que le texte initialement prévu faisait peser sur elle la charge de déterminer si l'utilisation du recommandé administratif et judiciaire était prescrite ou non, ce qui la rendait coresponsable d'un choix qui était avant tout celui de l'usager. Il nous a donc paru préférable de retenir la formulation faisant référence aux recommandés prévus par les procédures en question, ce que la chancellerie ainsi que le Conseil d'Etat ont d'ailleurs jugé approprié.
Le Gouvernement n'est pas davantage favorable à l'amendement n° 129 rectifié, présenté par M. Delfau. Dans le projet de loi, nous avons entendu créer un régime particulier pour les recommandés prévus par les procédures administratives et judiciaires, comme c'est d'ailleurs le cas aujourd'hui. Ce produit, distinct des recommandés classiques, relève bien du service réservé à La Poste tel qu'il est défini à l'article L. 2. Nous estimons donc que la rédaction actuelle de cet article satisfait le souhait exprimé par l'auteur de l'amendement.
S'agissant de l'amendement n° 104, je ferai observer que le monopole postal n'interdit pas de porter soi-même son courrier. Les entreprises de tout type qui disposent de leur propre réseau de distribution délivrent elles-mêmes leurs factures ou les envois qui accompagnent leurs livraisons. Bien entendu, elles ne sauraient offrir cette possibilité à des tiers contre rémunération. En effet, ce serait une infraction au monopole postal. Le texte ne fait donc que préciser en toute clarté - vous souhaitiez, monsieur Trémel, que les choses soient claires et je crois qu'elles le sont - ce qui est licite, dans un objectif de transparence de droit. Je ne peux donc souscrire à cet amendement.
Pour les mêmes raisons, j'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 125 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 52 et 100.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote sur l'amendement n° 20 rectifié.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous avions l'ART. On commençait à parler de l'ARTP. Avec cet amendement, il s'agit maintenant de l'ARCEP. Le dictionnaire des sigles va s'enrichir ! Comme nous proposons, pour notre part, l'ARP dans des amendements qui seront examinés ultérieurement, nous ne pouvons souscrire à cette invention remarquable de notre commission des affaires économiques.
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques. C'est une transcription !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 101 et 102 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 53.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 103, 129 rectifié et 54 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 104 et 125 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.