SEANCE DU 17 DECEMBRE 2002
M. le président.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 84,
adressée à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes
handicapées.
Mme Marie-France Beaufils.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'allocation
compensatrice versée par les conseils généraux et destinée à couvrir les
dépenses liées au recours à une tierce personne pour les personnes handicapées
qui ont besoin de se faire aider pour les actes essentiels de l'existence perd
régulièrement de sa valeur par rapport au SMIC. Cette baisse du montant de
l'aide se traduit par une diminution d'intervention par tierce personne :
l'allocation, lorsqu'elle est accordée à son taux maximal, ne permet plus
aujourd'hui de rémunérer qu'environ trois heures par jour, contre quatre heures
trente en 1982.
Comme l'Association des paralysés de France le revendique, la compensation
intégrale des surcoûts liés au handicap, et notamment ceux qui se rattachent au
recours à une tierce personne, devrait être calculée sur la base d'une
évaluation individuelle des besoins.
A l'heure actuelle, force est de constater que la situation des personnes
fortement dépendantes reste inchangée. Pourtant, un plan d'action devait être
mis en place à partir de mars 2002, à la suite de la réunion qui a eu lieu le
11 mars dernier, avec des personnes très dépendantes, au ministère de l'emploi
et de la solidarité.
Les axes de ce plan envisageaient les mesures suivantes : le triplement de la
subvention de l'Etat aux services d'auxiliaires de vie, la publication du
décret permettant l'ouverture des soins infirmiers aux personnes handicapées,
la généralisation du déplafonnement de l'allocation compensatrice pour tierce
personne sur l'ensemble des départements et la prise en charge ambulatoire par
des établissements d'hébergement.
Qu'est-il advenu de ces mesures ? Où en est leur évaluation et leur suivi,
sujets sur lesquels devaient se réunir les acteurs concernés ?
Aujourd'hui, le budget pour 2003 prévoit la création de postes d'auxiliaires
de vie pour le maintien à domicile de 103 personnes lourdement handicapées.
C'est dérisoire par rapport aux besoins : la France compte en effet 600
nouveaux tétraplégiques par an et environ 15 000 personnes lourdement
handicapées à la suite d'un accident.
Nous demandons le financement de l'aide humaine à hauteur des besoins des
personnes handicapées.
Dans le cadre du plan triennal 2001-2003, la création de 3 150 postes
supplémentaires d'auxiliaires de vie était prévue. Qu'en est-il aujourd'hui,
monsieur le ministre ? Ce sont généralement les familles qui assument avec
beaucoup de dévouement l'aide aux personnes handicapées, mais nombre de ces
familles finissent par s'épuiser.
En France, on dénombre 4 000 ergothérapeutes, contre 40 000 en Grande-Bretagne
pour une population quasi identique.
Par ailleurs, les personnes handicapées qui vivent actuellement à domicile -
elles représentent 90 % des personnes handicapées - soit par choix, soit parce
qu'elles sont sur une liste d'attente depuis des années pour accéder à un
établissement adapté, rencontrent des problèmes financiers pour acquérir les
moyens matériels et faire réaliser les aménagements spécifiques dont elles ont
besoin dans leur vie quotidienne. Qui finance les sommes restant à charge une
fois que les prestations du régime obligatoire, légales et supplémentaires,
sont versées ? Ce problème est, pour elles, difficile à résoudre.
La prise en charge intégrale des aides techniques doit être assurée par la
sécurité sociale. Il faut impérativement que les progrès techniques profitent
aux personnes handicapées et que le taux réduit de TVA soit appliqué à toutes
les aides techniques et d'appareillage qui leur sont attribuées. C'est
d'ailleurs ce que préconisait le rapport présenté au Sénat en juillet 2002.
Tout cela doit se faire en concertation avec les intéressés eux-mêmes, afin de
définir la liste d'inscription au tarif interministériel des prestations
sanitaires.
Un handicapé de notre département menace actuellement de faire une grève de la
faim s'il n'obtient pas une aide personnalisée suffisante pour continuer à
vivre chez lui. Il a malheureusement fallu les grèves de la faim de l'écrivain
Marcel Nuss, les coups de gueule médiatisés de Philippe Streiff, ancien pilote
de Formule 1, tétraplégique à la suite d'un accident survenulors du Grand Prix
du Brésil en 1989, et ceux de personnes moins connues pour que ceux-ci soient
écoutés. Faudra-t-il d'autres grèves de la faim pouir que ces personnes
lourdement dépendantes se fassent enfin entendre ?
Les propositions qui ont été faites doivent être inscrites dans une loi, pour
une refonte globale afin d'en assurer la pérennisation ; les moyens budgétaires
à la hauteur des besoins doivent être dégagés.
Cette loi doit permettre de sortir de « la complexité, de l'incohérence, de
l'opacité et de l'injustice du maquis actuel des règles dans lequel ces
personnes et leurs familles doivent se frayer un difficile chemin », comme le
disait M. Royez, secrétaire général de la Fédération nationale des accidentés
du travail et handicapés, la FNATH, dans un article du
Monde.
Pourquoi
ne pas reprendre leur proposition visant à créer une nouvelle branche de la
sécurité sociale « handicap et dépendance » pour regrouper, harmoniser et
simplifier l'ensemble des dispositifs dans le cadre de la solidarité nationale
?
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob,
ministre délégué à la famille.
Madame le sénateur, je vous présente tout
d'abord les excuses de Mme Marie-Thérèse Boisseau, qui aurait souhaité vous
répondre directement mais qui m'a chargé de la représenter.
La situation des personnes lourdement handicapées qui expriment le choix de
rester à leur domicile retient tout particulièrement l'attention du
Gouvernement.
Un certain nombre d'entre elles se sont regroupées au sein d'une coordination
« handicap et autonomie », vous y avez fait allusion, dont le porte-parole,
Marcel Nuss, a été reçu à plusieurs reprises par les membres du cabinet du
ministre de la santé, Jean-François Mattei, et du cabinet de Marie-Thérèse
Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.
D'ores et déjà, à la suite de ces entretiens, des mesures d'urgence ont été
arrêtées par une circulaire qui a été adressée aux préfets le 10 octobre
dernier. Ces mesures concernent les aides humaines et techniques nécessaires au
maintien à domicile de ces personnes.
En premier lieu, 900 postes d'auxiliaires de vie ont été créés au titre de
l'année 2002, et doivent effectivement être en place avant le 31 décembre de
cette année. Dans ce cadre, les personnes lourdement handicapées peuvent
bénéficier du triplement de l'aide au regard de l'assistance permanente dont
ils ont besoin.
En deuxième lieu, l'intervention dérogatoire des services de soins infirmiers
à domicile reste possible jusqu'à la publication prochaine du décret qui
étendra la mission de ces services aux personnes handicapées, laquelle ne se
cantonnera plus aux seules personnes âgées.
Enfin, en troisième lieu, l'accompagnement à leur domicile de personnes
lourdement handicapées à partir d'équipes de maisons d'accueil spécialisées est
d'ores et déjà expérimenté dans trois départements.
Pour l'année 2003, cet effort sera accentué puisque la loi de finances
comporte une majoration de 30 % des crédits déconcentrés aux directions
départementales des affaires sanitaires et sociales, les DDASS, de façon à
répondre au moins aux trois objectifs suivants : achever la création dans
chaque département d'un site pour la vie autonome, destiné à simplifier et à
accélérer le recours aux aides techniques et humaines ; atteindre les 5 000
postes d'auxiliaires de vie ; développer des réseaux « santé-handicap » pour
réunir autour des personnes lourdement handicapées des praticiens libéraux, des
services de soins et des associations.
Enfin, parmi les axes de la réforme de la loi d'orientation de 1975, figurent
les conditions du libre choix entre la vie à domicile et l'accueil en
établissement. Un groupe de travail du Conseil national consultatif des
personnes handicapées, installé le 3 décembre dernier, y réfléchit déjà.
M. le président.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils.
Monsieur le ministre, j'ai entendu avec plaisir l'annonce des créations de
postes d'auxiliaires de vie. J'aurais aimé savoir - mais peut-être pourrais-je
obtenir l'information directement auprès du ministère ?
(M. le ministre
opine) -
où ces 900 postes seront ventilés. C'est tout de même un élément
important.
Par ailleurs, vous n'avez pas répondu sur le premier problème, qui me semble
très important, à savoir le niveau de l'aide apportée pour que la prise en
charge soit acceptable financièrement par les personnes handicapées
elles-mêmes. Le montant actuel de l'allocation compensatrice ne leur permet pas
de prendre en charge dans de bonnes conditions financières les auxiliaires de
vie. C'est sur ce problème que je souhaitais attirer encore plus fortement
votre attention. J'espère que le décret paraîtra très rapidement, car le régime
dérogatoire est source de difficultés.
SITUATION DU SERVICE DE DIABÉTOLOGIE
DU CHU HENRI-MONDOR DE CRÉTEIL