SEANCE DU 30 NOVEMBRE 2002
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le ministère des sports.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Michel Sergent,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Permettez-moi, monsieur le
président, de me réjouir à mon tour de la victoire de l'équipe française de
tennis cet après-midi, en double.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Très bien !
M. Michel Sergent,
rapporteur spécial.
Certes, tout n'est pas gagné, mais une tradition
vieille de plus de vingt ans veut que l'équipe qui remporte le double gagne la
Coupe Davis. Espérons que nous verrons demain la concrétisation de cet espoir
et une belle victoire de l'équipe de France de tennis.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Allez la France !
M. Michel Sergent,
rapporteur spécial.
Le ministère des sports constitue, dans cette
nouvelle législature, un ministère de plein exercice, mais il conserve encore,
de manière transitoire, des compétences budgétaires au titre de la jeunesse,
les crédits de la direction de la jeunesse et de l'éducation populaire étant
maintenus dans le périmètre du ministère.
Les crédits budgétaires des sports s'élèvent à 400,6 millions d'euros dans le
projet de loi de finances pour 2003, en hausse de 1,3 % par rapport à l'année
2002. Les moyens consacrés aux sports comprennent également un compte spécial
du Trésor, le Fonds national pour le développement du sport, ou FNDS, dont les
prévisions de recettes s'élèvent à 218,4 millions d'euros, soit plus de la
moitié du budget du ministère. Les moyens globaux consacrés aux sports sont
ainsi de 619 millions d'euros, soit une progression appréciable de 2,9 % par
rapport à 2002.
Au sein du budget du ministère, la stabilité des dépenses ordinaires recouvre
une baisse de 6,35 % des dépenses d'intervention. Les dépenses en capital
connaissent en revanche un sort beaucoup plus favorable puisqu'elles doublent
pour s'établir à 11 millions d'euros. Ces montants témoignent cependant de la
modestie des moyens de ce ministère, qui représentent 0,2 % du budget de
l'Etat.
Le FNDS bénéficie de recettes dynamiques, puisque leur augmentation est
évaluée à 6,1 % pour l'année prochaine, l'augmentation s'étant élevée à 47 %
entre 1997 et 2002.
Ces recettes sont cependant régulièrement sous-évaluées, tendance qui
s'accompagne d'une sous-exécution chronique des dépenses qui se traduit par des
reports importants : pas moins de 133 millions d'euros en 2001. Cette situation
est préjudiciable à la sincérité des comptes et au contrôle parlementaire, mais
surtout aux bénéficiaires potentiels des crédits du FNDS, alors que les besoins
en matière de mise aux normes des équipements sont élevés.
Le Gouvernement entend cependant améliorer la programmation des
investissements, qui est, il est vrai, entravée par un processus décisionnel
complexe.
L'avenir du FNDS est également au centre des préoccupations du mouvement
sportif, car nous savons que la loi organique relative aux lois de finances
implique de modifier la configuration de ce fonds d'ici à 2005. Vous avez
récemment évoqué, monsieur le ministre, plusieurs pistes d'évolution, et je
souhaite vous demander si la budgétisation est, de votre point de vue,
clairement exclue. Quelles seraient les modalités de financement et
d'organisation de la « fondation du sport » et de l'établissement public que
vous envisagez ?
Le précédent gouvernement avait privilégié certaines orientations, notamment
la dimension sociale du sport et la lutte contre le dopage, qui sont maintenues
dans le nouveau projet. Ce dernier comprend ainsi trois axes majeurs : la
sécurité de la pratique sportive et de l'environnement des sports, le
renforcement de la cohésion sociale par le sport et le maintien de la France
parmi les grandes nations sportives.
Le sport constitue un vecteur majeur de socialisation et d'éducation, et il
était conçu comme tel par les pères du sport moderne. Ce rôle social connaît
trois grandes expressions : l'accès de tous à la pratique sportive, le soutien
à l'emploi et aux associations, et le maintien de la solidarité financière
entre les milieux professionnel et amateur.
Plusieurs mesures sont à cet égard maintenues ou amplifiées. Les « coupons
sport », dont le succès est réel auprès des familles défavorisées, sont ainsi
pérennisés. Le dispositif « plan sport emploi », qui vise à structurer et à
professionnaliser l'encadrement dans les associations, bénéficie quant à lui
d'une mesure nouvelle de 750 000 euros, et cent postes soutenus par le fonds de
coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire, dits postes FONJEP «
sport », devraient également être créés. Les aides accordées aux fédérations en
charge des personnes handicapées devraient en outre passer de 1 million d'euros
à 2 millions d'euros.
De nombreuses incertitudes demeurent cependant sur le sort des 20 000
emplois-jeunes qui ont été créés au cours des dernières années, parfois,
certes, pour profiter d'un effet d'aubaine, mais il n'en reste pas moins que de
nombreux contrats arriveront à échéance en 2003-2004 et je vous pose donc,
monsieur le ministre, la question suivante : le futur contrat d'insertion dans
la vie sociale, le CIVIS, dont on semble attendre beaucoup, permettra-t-il de
sauvegarder la majorité de ces emplois, le plus souvent très utiles aux
associations sportives ?
Je constate également que la pratique sportive de nos concitoyens ne se situe
pas à un très bon niveau par rapport à nos voisins, notamment les pays
scandinaves et la Grande-Bretagne. Si la diffusion du sport au sein de la
population dépend en partie de l'effet d'entraînement suscité par les succès
des équipes professionnelles, il me semble qu'elle dépend également de la
qualité et de la densité des installations, de la reconnaissance des nouvelles
pratiques urbaines et de plein air, et de la sensibilisation des jeunes à la
nécessité d'une pratique régulière.
La deuxième grande orientation, la sécurité dans le sport, comporte deux
aspects principaux.
Le premier de ces aspects est la lutte contre le dopage, qui fut un des grands
chantiers de Mme Buffet. L'actuel gouvernement entend à juste raison poursuivre
ce combat.
Le dopage est en effet le révélateur d'une certaine perte de repères dans
notre société en même temps qu'il représente un risque majeur de banalisation
de la triche et de non-respect de l'intégrité du corps. Je me félicite que la
France fasse preuve de pugnacité et de constance sur ce terrain, grâce à des
moyens qui ont connu une forte hausse depuis trois ans et qui, après une hausse
plus modérée, s'établiront à 500 000 euros en 2003, grâce aussi à une action
internationale ambitieuse, à une politique de prévention étoffée et à des
contrôles plus nombreux.
Le laboratoire national de dépistage du dopage a également retrouvé un rythme
soutenu, en matière d'analyses, mais le chemin est encore long à parcourir, car
le dopage ne sévit pas que dans les disciplines les plus médiatisées et
commence de plus en plus tôt chez les amateurs.
L'application effective des contrôles se révèle également difficile pour
certaines fédérations, de telle sorte que l'on peut se demander s'il ne
convient pas aujourd'hui de simplifier le suivi médical ou d'assurer un
véritable service public intégré de lutte contre le dopage pour les fédérations
moins structurées.
Le second volet de la sécurisation de la pratique sportive concerne la
sécurité publique dans et autour des enceintes. La violence dans le sport
participe, dans une certaine mesure, des mêmes tendances sociales que le
dopage, lorsque l'enjeu prime sur le jeu. A ce titre, une mesure nouvelle de
2,36 millions d'euros vise à intégrer des avenants « sport » dans les contrats
locaux de sécurité.
La commission nationale de prévention et de lutte contre la violence dans le
sport, mise en place dans vingt-six départements, joue également un rôle
important dans le traitement de l'information et l'anticipation des événements
à risque.
La lutte contre la violence requiert également la formation des arbitres, pour
inciter ceux-ci à la fermeté, et la sensibilisation des pratiquants, pour que
ceux-ci respectent le corps arbitral.
Le maintien de la France au rang de grande nation sportive suppose une
participation importante du pôle France aux compétitions internationales ainsi
que l'organisation de grandes manifestations sur notre sol. L'année 2003 verra
ainsi divers championnats du monde se dérouler en France, en particulier les
championnats du monde d'athlétisme, que l'Etat finance pour moitié.
La préparation aux jeux Olympiques d'Athènes fait également l'objet d'une
mesure nouvelle de 250 000 euros. Mais, au-delà de 2004, il convient de se
poser d'ores et déjà la question d'une éventuelle candidature de Paris aux jeux
de 2012. Si la France faisait à nouveau acte de candidature, il lui faudrait
bien analyser les raisons de son précédent échec et affiner sa stratégie de
communication à l'égard du CIO.
Le rayonnement de la France passe aussi par la qualité des équipements au
service des sportifs. Si je me réjouis de ce que la rénovation de ce précieux
outil qu'est l'Institut national du sport et de l'éducation physique, l'INSEP,
soit poursuivie, je déplore le déséquilibre des clauses du contrat de gestion
du Stade de France. L'Etat a manifestement mal négocié ce contrat, qui a
engendré un coût moyen annuel de près de 9 millions d'euros, soit un montant
approchant les dépenses d'investissement du ministère pour 2003. Je crains
malheureusement que la récente renégociation du contrat n'apporte guère de
modifications substantielles à son économie.
Je souhaite conclure, monsieur le ministre, mes chers collègues, par quelques
observations sur notre organisation sportive. La France a mis en oeuvre un
modèle original et à de nombreux égard efficace, mais qui mérite aujourd'hui
d'être rénové. L'enjeu comporte de multiples aspects : il s'agit de mieux
préciser les contours du service public du sport, de garantir les principes de
l'éthique sportive tout en accordant davantage de souplesse au milieu
professionnel, de préserver la solidarité intrinsèque du mouvement sportif et
d'en clarifier la gestion, enfin, de faire de l'Etat un coordonnateur et un
incitateur, en partenariat avec les acteurs privés.
Je souhaite que les conclusions des états généraux du sport apportent, dès la
semaine prochaine, une confirmation des principes du sport et des pistes
concrètes d'évolution. J'ai bon espoir.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose,
mes chers collègues, d'adopter les crédits du ministère de la jeunesse et des
sports pour 2003.
Néanmoins, monsieur le ministre, je tiens à préciser que nous aurions pu,
comme pour les autres budgets, être amenés à présenter, au nom de la commission
des finances, un amendement de réduction de vos crédits. Ce n'est pas le cas,
et je m'en réjouis. La commission entend cependant insister sur l'absolue
nécessité d'un suivi précis de l'exécution des dépenses et d'une gestion très
rigoureuse des crédits, en particulier ceux du FNDS.
Il est en effet à craindre que les prévisions de moins-values fiscales pour
2003 ne contraignent le Gouvernement à une sévère régulation budgétaire qui
n'épargnerait aucun ministère.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Bernard Murat,
rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Monsieur
le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai aussi
par féliciter notre équipe de tennis. Alors qu'aujourd'hui le Sénat a rendu
hommage à Alexandre Dumas, à l'occasion du transfert de ses cendres au
Panthéon, je dirai, si vous me permettez ce raccourci, que, peut-être, nous
assistons à l'émergence d'une nouvelle équipe de Mousquetaires !
(Applaudissements.)
M. Jean-François Lamour,
ministre des sports.
Bien joué !
M. Bernard Murat,
rapporteur pour avis.
Le projet de budget pour 2003 du ministère des
sports est, pour la première fois, uniquement et totalement dédié aux
politiques des sports.
Cette réorganisation gouvernementale témoigne de la volonté du Gouvernement de
prendre pleinement acte de la spécificité et du rôle croissant du sport dans
notre société.
M. le rapporteur spécial a donné les chiffres : c'est un budget de 400
millions d'euros, en hausse de 1,3 %, soit, avec l'apport du Fonds national
pour le développement du sport, une enveloppe financière globale de 618
millions d'euros, en hausse de 3 %. Dans le contexte budgétaire contraint que
nous connaissons, c'est un traitement privilégié !
Je constate, monsieur le ministre, que les crédits du titre III, consacrés aux
moyens des services, s'élèvent à 300 millions d'euros et ont un poids
significatif dans le budget de votre ministère. Vous conservez sous votre
autorité l'essentiel des services de l'ancien ministère de la jeunesse et des
sports. Les crédits des personnels de la direction de la jeunesse et de
l'éducation populaire, pourtant placée sous l'autorité du ministre chargé de la
jeunesse, restent, à titre transitoire, inscrits dans votre budget. La hausse
modérée de ces crédits - 1,9 % - vous permet notamment de créer dix-neuf
emplois et trois contrats de préparation olympique et de haut niveau.
Dans le même temps, la suppression de vingt-cinq emplois d'ouvrier devrait
permettre d'expérimenter l'externalisation de certaines fonctions d'entretien
et de maintenance.
Les crédits d'intervention du titre IV s'élèvent, après le partage opéré avec
le ministère de la jeunesse, à 89 millions d'euros. Ils vous permettent,
moyennant un réaménagement de vos dépenses conforme à vos priorités, de
consacrer 2,6 millions d'euros au programme que vous lancez pour lutter contre
la violence et les incivilités dans le sport, 750 000 euros à la création de
cent postes FONJEP, spécialement destinés aux associations sportives, et 750
000 euros à la relance du plan sport emploi.
Ces deux mesures en faveur de l'emploi sportif n'apporteront pas à elles
seules une solution au problème des emplois-jeunes, mais elles constituent des
dispositifs spécifiques au secteur sportif qui méritent d'être développés, en
complément du contrat d'insertion dans la vie sociale actuellement en
préparation.
A ce propos, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous indiquiez comment
le CIVIS s'appliquera au secteur sportif associatif.
D'une façon générale, il me paraît utile de procéder à une simplification et à
une harmonisation des différents dispositifs d'aide à l'emploi dans le sport,
car leur variété est actuellement un peu déroutante, pour les usagers, bien
sûr, mais aussi pour les collectivités locales. Il serait utile de pouvoir
s'appuyer, dans cette perspective, sur une observation continue de l'emploi
sportif afin de mesurer l'impact des politiques de l'emploi dans ce secteur.
Quelques pistes pourraient être explorées avec intérêt, par exemple le
développement des services aux petits employeurs, ce qui permettrait de réduire
la précarité de ces petites structures, ou encore le soutien, grâce à des
dispositifs du type coupon sport, à la demande des services sportifs.
Je note enfin que les dépenses en capital connaissent de fortes progressions,
mais celles-ci ne portent que sur des montants limités du fait de la propension
de vos prédécesseurs à confier le financement des dépenses d'investissement au
Fonds national pour le développement du sport.
Avec des recettes évaluées à 218,37 millions d'euros pour 2003, ce fonds
représente à lui seul plus du tiers des moyens financiers dont vous disposez.
Le monde sportif s'inquiète de sa disparition annoncée. Il me semble
indispensable de conserver au bénéfice du sport les moyens financiers du fonds
et de conserver une participation du mouvement sportif à leur gestion.
Devant l'Assemblée nationale, vous évoquiez, monsieur le ministre, l'hypothèse
d'une solution mixte, associant un établissement public doté des ressources
actuelles et des entreprises privées capables de participer en complément aux
efforts d'investissement, pour remplacer le fonds.
Cette formule est séduisante, mais offrira-t-elle aux entreprises les retours
en termes d'images, qu'elles attendent d'un investissement dans le sport ? Son
succès - et cette question ne vous surprendra pas de la part du maire de l'une
des villes les plus sportives de France - ne portera-t-il pas préjudice aux
clubs sportifs qui reçoivent aujourd'hui localement l'appui de ces mêmes
entreprises ?
Monsieur le ministre, je souhaite enfin évoquer brièvement le déroulement et
le succès des Etats généraux du sport que vous avez souhaités. Ceux-ci ont
permis une véritable concertation avec les acteurs du sport, tant à l'échelon
national qu'à l'échelon local. Cette nouvelle approche, je vous le dis très
officiellement ce soir, a été très appréciée par tous les participants.
C'est d'ailleurs pour répondre immédiatement à une vive inquiétude qui s'était
exprimée à l'occasion des Etats généraux que le Sénat a adopté la proposition
de loi que j'avais déposée et qui garantit sans équivoque aux éducateurs
sportifs titulaires de diplômes homologués le droit d'exercer leur métier.
La commission des affaires culturelles sera, bien entendu, très attentive à la
synthèse de ces travaux et aux propositions qu'elles vous inspireront,
propositions sur lesquelles vous pourrez peut-être par anticipation nous donner
quelques indications.
Cette nouvelle approche des questions du sport et l'évolution favorable des
crédits consacrés à la politique des sports conduisent la commission à
recommander au Sénat d'adopter les crédits du sport pour 2003.
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 15 minutes ;
Groupe socialiste, 13 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 8 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Je vous rappelle que, en application des décisions de la conférence des
présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix
minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Si les crédits du projet de budget des sports pour 2003, atteignant 410
millions d'euros, enregistrent une hausse de 1,29 %, la plus faible depuis
1997, l'incidence de l'inflation fera, monsieur le ministre, que vous
disposerez de moyens en baisse. Il convient, heureusement, de compter avec le
FNDS, dont les crédits, en augmentation d'environ 6 % par rapport à 2002 grâce
aux dispositions prises par le précédent gouvernement, vous permettent de
disposer de 218 millions d'euros supplémentaires. Au passage, sachez, monsieur
le ministre, que nous resterons vigilants, afin que la réforme du FNDS ne
remette en cause ni sa gestion paritaire par l'Etat et le mouvement sportif ni
le montant de sa part régionale, même si l'idée que vous avez avancée devant la
commission de créer un établissement public nous séduit
a priori.
En termes de chiffres, ce projet de budget est donc loin de correspondre à
l'ambition affichée par le Gouvernement et réaffirmée à l'occasion de multiples
déclarations.
Par exemple, les crédits visant à financer le dispositif des coupons sport,
créé en 1998 en faveur des jeunes de dix à dix-huit ans issus de familles
défavorisées souhaitant s'inscrire à un club sportif, seront amputés de 1,8
million d'euros. J'ajoute que votre souhait d'en supprimer le plafonnement,
s'il peut paraître légitime au regard du coût élevé de l'inscription à certains
clubs sportifs, aura pour effet d'interdire à de nombreux jeunes l'accès à ce
dispositif.
Par ailleurs, les crédits alloués aux contrats éducatifs locaux, dispositif
instauré par Mme Marie-George Buffet qui permet le développement d'actions
éducatives au profit d'enfants et de jeunes scolarisés dans des zones
sensibles, connaîtront une baisse de 880 000 euros. Le succès de ce dispositif
n'est pourtant plus à prouver, car près de 3 millions d'enfants en ont
bénéficié en 2002.
J'ai le sentiment, monsieur le ministre, que l'orientation budgétaire que vous
avez retenue, suivant la même logique, va à l'encontre de la solidarité entre
les niveaux de pratique sportive et marque, une nouvelle fois, une rupture par
rapport aux efforts importants fournis précédemment.
2383A l'heure où cette solidarité mériterait avant tout d'être réaffirmée,
compte tenu des dérives vers lesquelles tend le sport d'élite, votre projet de
budget prévoit une diminution des crédits destinés à financer le développement
de la pratique sportive, élargissant ainsi le fossé entre sport amateur et
sport professionnel.
Je relève toutefois avec satisfaction, monsieur le ministre, les rattrapages
qui ont été consentis par voie d'amendements à l'Assemblée nationale. Les 2,8
millions d'euros supplémentaires alloués au chapitre 43-91 du titre IV,
répartis entre les crédits déconcentrés pour les jeux Olympiques et les grandes
manifestations sportives, les crédits déconcentrés pour la promotion du sport
et le développement de la pratique sportive pour le plus grand nombre, la
formation des animateurs et l'accompagnement de l'emploi, auxquels s'ajoutent
150 000 euros en autorisations de programme et en crédits de paiement pour les
équipements sportifs, demeurent cependant très insuffisants.
Comment comptez-vous, monsieur le ministre, poursuivre le développement du
sport féminin et du sport en entreprise, que le gouvernement précédent avait
soutenus ? Vous nous répondez que les crédits pour la pratique sportive
féminine seront transférés aux services déconcentrés, pour satisfaire les
attentes locales. Je ne vois pas là une mesure budgétaire prioritaire visant à
stimuler cette politique.
Par ailleurs, en matière d'emploi, la création de cent postes FONJEP et les
750 000 euros destinés au plan sport emploi ne pourront compenser, loin de là,
la disparition des 20 000 emplois-jeunes du secteur sportif, dont vous n'êtes
pas sans savoir, monsieur le ministre, qu'ils se sont révélés indispensables,
tant pour la formation des jeunes concernés que pour les petits clubs et les
collectivités locales. A la question de notre rapporteur pour avis, M. Bernard
Murat, sur les aides que le ministère pourrait éventuellement envisager
d'accorder pour assurer la relève de ces emplois, vous avez répondu que la
seule solution était de procéder à une évaluation au cas par cas, ce qui risque
de donner un travail considérable à vos services.
Mais, plus sérieusement, vous répondez aux clubs de s'arranger avec les
collectivités locales, dans le cadre d'une décentralisation à la façon de M.
Raffarin. Où est l'impulsion de l'Etat, qui ne doit pas se défausser de sa
responsabilité, tant financière que sociale, sur les collectivités, dont la
situation est déjà difficile et sur lesquelles les projets de décentralisation
laissent planer bon nombre d'incertitudes ?
De même, vos propositions en faveur des bénévoles vont certes dans le bon
sens, mais elles n'en demeurent pas moins insuffisantes au regard des attentes
de ces derniers, attentes que le gouvernement précédent avait commencé à
satisfaire, notamment par la validation des acquis, les déductions fiscales ou
le droit au congé-formation. A l'instar, me semble-t-il, du rapporteur pour
avis de la commission des affaires culturelles, je déplore, monsieur le
ministre, votre opposition à la création d'un vrai statut du bénévole. Ce
serait pourtant une étape décisive vers la reconnaissance de leur travail et de
la nécessité de continuer à susciter des vocations pour cette forme de
citoyenneté active.
En matière de protection de la santé des sportifs, votre projet de budget nous
semble, là encore, davantage de rupture que de transition. Vous voulez
réactiver la médecine du sport, mais laquelle ? Alors que la France a été, sous
le gouvernement précédent, pionnière en matière de lutte contre le dopage,
grâce à des efforts considérables, et alors que ce combat fait prétendument
partie, monsieur le ministre, de vos priorités, les crédits qui y sont
consacrés n'augmentent que de 2 % par rapport à 2002, contre une hausse de 17,8
% lors du dernier exercice.
Le Laboratoire national de dépistage de Châtenay-Malabry ne bénéficiera que de
100 000 euros supplémentaires et de deux nouveaux emplois ; les crédits alloués
au suivi médical des sportifs et à l'extension des contrôles font l'objet d'une
mesure nouvelle de 400 000 euros, bien insuffisante ; quant aux centres
médico-sportifs, ils ne recevront plus aucune aide de la part de l'Etat. Cela
n'est pas acceptable.
Pour faire face aux pratiques de dopage, notamment chez les jeunes sportifs,
l'Etat doit continuer à afficher son refus de ce fléau en renforçant, d'une
part, les moyens de prévention et d'information, et, d'autre part, les
contrôles, en particulier inopinés, dans tous les sports et à tous les niveaux
de pratique.
Quant aux crédits affectés au soutien au sport de haut niveau, à la
préparation et à l'accompagnement des équipes de France aux prochains jeux
Olympiques et autres grandes compétitions internationales, je note avec
satisfaction les efforts de votre ministère. J'espère toutefois que vous ne
recherchez pas uniquement un effet d'affichage politique, et qu'il s'agit
plutôt d'inviter les jeunes, et même les moins jeunes, à la pratique
sportive.
Je m'attarderai quelques instants sur la question des équipements sportifs,
dont le récent rapport de mon ami Laurent Cathala, député-maire de Créteil, a
rappelé l'insuffisance et la vétusté.
Le Conseil européen des ministres des sports a adopté, en septembre dernier,
un plan de relance du sport à l'école. Pour relayer ce plan, notre pays devra
fournir de nombreux efforts. En effet, le parc d'équipements sportifs ne permet
pas d'assurer, actuellement, les enseignements d'éducation physique et sportive
conformément aux programmes fixés par l'Etat. En outre, la mise aux normes de
sécurité des équipements et leur adaptation à l'évolution de la demande sociale
exigent des financements de plus en plus importants.
Or, alors que les collectivités territoriales rencontrent beaucoup de
difficultés pour faire face à ces dépenses, le soutien financier de l'Etat
demeure bien insuffisant au regard de ce projet de budget et très incertain
compte tenu des craintes suscitées par la décentralisation à venir.
Monsieur le ministre, quelles suites entendez-vous donner aux propositions
avancées dans le rapport de M. Cathala, parmi lesquelles je citerai la
participation de l'Etat à hauteur de 30 % pour la création d'équipements, le
rôle accru que doivent jouer les structures intercommunales, ou encore la
fixation des participations de chaque collectivité à l'investissement et au
fonctionnement des installations sportives ? Ce rapport évoque également
l'indispensable réalisation du recensement et de l'évaluation des équipements.
Comme l'a proposé le président de la commission des affaires culturelles, une
mission d'information pourrait en fournir le cadre et constituer la première
étape avant la mise en place d'un dispositif de financement entre l'Etat et les
collectivités territoriales, pour un maillage d'équipements sportifs modernes
au sein de nos régions.
Le versement de 12,4 millions d'euros prévu dans le projet de budget afin
d'indemniser le consortium du Stade de France pour absence de club résidant,
alors même que ce consortium dégage des bénéfices, demeure inacceptable, année
après année. Qu'envisagez-vous de faire, monsieur le ministre, pour qu'une
solution soit rapidement trouvée ? Ce sujet intéresse l'ensemble de mes
collègues.
Enfin, concernant les états généraux du sport, on peut tout de même regretter
que beaucoup de départements et de communes n'aient pu, dans le cadre des
consultations régionales, s'exprimer comme ils l'auraient souhaité. Or ces
collectivités sont les premières à financer le sport en France, et vous-même,
monsieur le ministre, reconnaissez le très important travail qu'elles
accomplissent. Peut-être serait-il nécessaire qu'une réelle concertation ait
lieu.
En conclusion, votre projet de budget, monsieur le ministre, donne clairement
la priorité au sport professionnel. Il sacrifie, en contrepartie, la pratique
amateur et le sport de masse.
Votre projet politique va malheureusement dans le même sens, s'agissant, par
exemple, de l'appropriation par les sections professionnelles des droits de
télévision et du numéro d'affiliation du club ou de votre position peu claire
sur la cotation en bourse des clubs professionnels.
A l'heure où nous reconnaissons tous les fonctions sociales, éducatives et
culturelles du sport, ainsi que l'importance des valeurs qu'il véhicule, à
l'heure où l'Union européenne confirme ce rôle en choisissant 2004 comme année
européenne de l'éducation par le sport, le groupe socialiste du Sénat ne peut
accepter la remise en cause de la cohésion, déjà fragile, du monde sportif, que
votre projet de budget et votre politique ne manqueront pas, monsieur le
ministre, d'entraîner. En conséquence, il ne votera pas le projet de budget
pour 2003 du ministère des sports.
M. le président.
La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je
m'associe, bien sûr, aux félicitations que mes collègues ont adressées à nos
tennismen pour leur victoire de ce jour en coupe Davis, qui fait naître de
grands espoirs.
Le projet de budget du ministère des sports ne marque pas de véritable rupture
avec les années précédentes, puisqu'il accentue l'action engagée en faveur du
développement de la sécurité, du renforcement de la cohésion sociale et de
l'ouverture de la pratique sportive au plus grand nombre.
On connaît la valeur de socialisation du sport. Qui n'apprécie de voir des
jeunes face à face sur un terrain de sport plutôt que désoeuvrés et en proie à
toutes les dérives ?
Grâce à la pérennisation des actions en faveur du développement du sport de
masse, telles que le dispositif « coupon sport », les contrats éducatifs
locaux, le plan handisport, ce projet de budget pour 2003 réaffirme, une fois
de plus, que le secteur sportif s'inscrit dans un véritable projet de société :
une société saine, affrontant des défis dans des règles de respect et de
responsabilité.
Cette fonction sociale du sport est reconnue par tous. C'est pourquoi le
dispositif des emplois-jeunes mis en place en 1997 a profité tout
particulièrement au secteur sportif. Au total, quelque 20 000 emplois-jeunes
ont été créés, et les objectifs ont été largement dépassés.
Il s'agit, de manière générale, de professionnels, le plus souvent bien
formés, avec parfois quelques lacunes. Néanmoins, ce dispositif a permis
d'offrir un meilleur encadrement et un meilleur accueil dans les clubs - cela
est indéniable et reconnu par tous.
Je pense, notamment, aux petits clubs amateurs, mais les emplois-jeunes ont
également permis, au-delà du football, sport roi, d'élargir le champ de l'offre
à des activités sportives émergentes moins médiatiques. C'est là une ouverture
indispensable en vue d'un enrichissement des activités sportives, chacun
pouvant choisir le domaine dans lequel il compte s'épanouir.
Enfin, je tiens à rappeler que les associations ont été les principales
bénéficiaires de ce dispositif, qui leur a permis de développer efficacement
leurs activités en organisant le recrutement, en harmonisant l'accueil et en
faisant découvrir l'esprit sportif : esprit de challenge, esprit d'équipe et
esprit des règles du jeu. Le sport est donc une véritable école de la maîtrise
de soi.
Si le dispositif « nouveaux services emplois-jeunes » a montré tous ses
avantages, comme je viens de le souligner, il n'est pas aujourd'hui sans poser,
monsieur le ministre, de lourds problèmes.
D'une part, compte tenu du nombre très élevé des emplois-jeunes, les
associations n'ont pu tenir leurs engagements en matière de formation et de
pérennisation de ces emplois, qu'elles devaient assurer en contrepartie des
aides accordées par l'Etat.
D'autre part, comme Mme Aubry l'avait décidé, la majorité de ces emplois
arrivent à échéance en 2003, au terme des cinq ans prévus par la loi.
Comment atténuer les conséquences de la sortie du dispositif emplois-jeunes
sans que cela se fasse au détriment des associations ni des jeunes, qui verront
leur avenir remis en question et dont la recherche d'emploi devra être
accompagnée de façon dynamique par l'ANPE et par les services de l'emploi ?
Leur âge les rendant, pour la grande majorité d'entre eux, inéligibles au
dispositif CIVIS - contrat d'insertion dans la vie sociale - censé succéder en
partie aux emplois-jeunes, il y a là, monsieur le ministre, matière à
réflexion, et je compte sur le Gouvernement pour trouver une réponse
appropriée, qui est attendue par tous.
Le projet de budget que vous présentez, monsieur le ministre, tend à remédier
à toutes ces difficultés.
En effet, vous proposez de créer cent emplois dans le cadre du « plan sport
emploi », ce qui représente, pour 2003, un budget de 750 000 euros. Par
ailleurs, pour un même montant, cent postes FONJEP « sport » seront créés.
Je salue bien évidemment ces deux mesures, mais sont-elles vraiment
suffisantes ? Il sera nécessaire de les renforcer.
Comment comptez-vous, monsieur le ministre, sortir de ce dispositif qui a
montré tous ses avantages, mais aussi ses limites ? Quelle aventure pour tous
ces jeunes qui risquent aujourd'hui d'être les naufragés d'un capitaine
imprévoyant, qui les a fait rêver sans assurer leur avenir ! Il vous revient
maintenant, comme l'a très bien dit M. le rapporteur pour avis, de procéder à
une évaluation au cas par cas de ces emplois, afin de répondre de façon
efficace aux attentes.
Cette situation m'inquiète d'autant plus qu'elle touche tout particulièrement
le monde associatif, qui est un acteur essentiel du secteur sportif. Ainsi, 730
000 associations ont une vocation sportive, ce qui représente 14 millions de
licenciés. Ils méritent notre attention, car ils ont grand besoin d'être
encadrés pour progresser.
Comme vous l'avez annoncé, monsieur le ministre, vos services entendent
continuer à favoriser le développement de la vie associative. Sur ce point, je
tiens à dire à M. le rapporteur spécial que, comme lui, nous sommes favorables
au renforcement de la sécurité et au soutien aux associations.
L'exécution des conventions pluriannuelles d'objectifs, qui permettent
d'engager un partenariat entre le ministère et les associations ou les
fédérations, sera poursuivie en 2003, et la part régionale du FNDS, qui est un
outil de soutien à la vie associative, devrait dépasser 80 millions d'euros en
2003. C'est bien, mais veillons à ce que les moyens soient suffisants pour
garantir le succès des associations, lesquelles sont le coeur du système
sportif français. Nous vous aiderons, monsieur le ministre, ici à la Haute
Assemblée, mais aussi dans nos départements, auprès des acteurs de terrain.
Il est donc urgent de prévoir un mécanisme de sortie du dispositif
emplois-jeunes, mais ce n'est pas tout. N'oublions pas le bénévolat assuré dans
les clubs par de nombreuses personnes : les parents, les jeunes, mais aussi les
grands-parents, de plus en plus nombreux à s'engager dans l'accompagnement de
leurs petits-enfants. Ils garantissent à eux seuls la pérennisation de la
valeur éducative et sociale du sport. Sans eux, le sport serait-il ce qu'il est
?
Votre message doit être fort et encourageant. Du fait de votre qualité
d'ancien sportif de haut niveau, je ne doute pas de votre attachement à cet
objectif premier de la politique du sport en France.
Enfin, monsieur le ministre, je terminerai par deux observations plus
brèves.
A la suite de notre collègue Michel Sergent, rapporteur spécial, j'évoquerai
tout d'abord la rénovation des équipements.
L'urgence réside en effet dans la mise aux normes des équipements des
collectivités territoriales. La moitié d'entre eux datent de plus de vingt ans.
Les petites communes, que l'on a chargées de tant de compétences sans leur
donner les capacités financières de les assumer, n'ont, le plus souvent, pas de
moyens suffisants pour garantir une offre d'équipements totalement
sécurisés.
On connaît la responsabilité de plus en plus lourde qui pèse sur les maires en
cas d'accidents, tels que les chutes de panneau de basket ou de cage de but de
football. A chaque instant, nos élus locaux risquent d'encourir de lourdes
peines, alors qu'ils n'ont pas toujours les moyens d'entretenir comme il le
faudrait les équipements sportifs de leurs communes. Heureusement, notre
collègue Pierre Fauchon a su élaborer et faire adopter sa loi tendant à
préciser la définition des délits non intentionnels. Mais la programmation des
investissements est trop irrégulière et les moyens budgétaires sont trop
modestes pour que les maires puissent assurer pleinement une sécurité totale à
leurs administrés. Il faudra encourager et établir les partenariats de
financement nécessaires, tant avec les régions qu'avec les départements, par le
biais de l'intercommunalité.
Je voudrais maintenant saluer l'initiative des Etats généraux du sport, qui
ont débuté le 16 septembre dernier et qui doivent se conclure le 8 décembre à
la cité de La Villette.
Je me souviens de nos échanges à Rennes, monsieur le ministre, sur la
responsabilité, qui ne doit pas être partagée entre fédérations et clubs. La
démocratie, pour survivre et être respectée, doit être organisée. Dans tous les
domaines, il faut un chef de file identifié de par son autorité. Vos éclairages
ont satisfait, en région Bretagne, un bon nombre de ceux qui étaient venus
participer à ces échanges dans les locaux de l'Ecole normale supérieure
Kerlann, en Ille-et-Vilaine.
L'organisation de ces consultations décentralisées illustre parfaitement la
nouvelle approche que l'on peut avoir de la politique. C'est une manière
d'associer l'ensemble des représentants du monde sportif à la prise de décision
et d'étudier au plus près les attentes des uns et des autres, afin de pouvoir
décider en toute connaissance de cause.
Sachez, monsieur le ministre, que le groupe de l'Union centriste vous apporte
son soutien, car les orientations que vous avez retenues nous donnent
satisfaction. Nous voterons le projet de budget que nous nous avez présenté.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
M. le président.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, je voudrais à
mon tour, en préambule, féliciter nos brillants tennismen pour leur magnifique
victoire de ce jour.
Avec la création d'un ministère plein, entièrement consacré au sport et aux
sportifs, et la nomination à la tête de ce ministère d'un ancien sportif de
haut niveau, on nous avait fait miroiter un projet de budget important.
La réalité est tout autre.
L'augmentation est la plus faible depuis 1997, puisqu'elle est d'à peine 1,3 %
par rapport à l'an dernier.
En outre, comme tous les budgets, celui du sport est annoncé comme transitoire
puisqu'il dépend à la fois de la loi constitutionnelle relative à
l'organisation décentralisée de la République et de l'avenir du FNDS.
Pour ce qui est de la décentralisation, je rappelle que 80 % des
investissements, en matière sportive, sont d'origine locale, et pas même
régionale : cela devrait légitimer la participation très large de tous les
intervenants locaux et départementaux aux Etats généraux du sport si ceux-ci
devaient devenir une véritable consultation nationale. Mais cela ne semble pas
être le cas.
Quant au FNDS, il a vu sa part régionale progresser constamment depuis cinq
ans. Son avenir est aujourd'hui incertain, et l'idée d'une fondation du sport
nous fait craindre une perte d'indépendance des sportifs.
De plus, dois-je mentionner la « régulation budgétaire » drastique, qui
s'élève à 10 % des crédits pour 2002 ? La ligne budgétaire « sport et femmes »
est supprimée. Ouverte en 1999, cette ligne permettait de renforcer l'action
gouvernementale s'agissant de la parité en général.
La ligne budgétaire « sport en entreprise » est également supprimée, Elle
concerne deux millions de sportifs, sans compter les différentes compétitions
organisées dans ce secteur et à une échelle internationale. L'expression
sportive doit-elle passer exclusivement par les fédérations ?
Les crédits consacrés aux contrats éducatifs locaux, qui permettent aux élèves
de la maternelle au collège de pratiquer des activités sportives, subissent une
baisse de 880 000 euros.
Enfin, une diminution de 1,8 million d'euros intervient au titre des coupons
sport, qui participaient de la loi de lutte contre les exclusions et qui
permettaient à des milliers de jeunes de milieux défavorisés de payer leur
licence sportive.
Et que faites-vous des emplois-jeunes des clubs et des associations sportives
? Les ferez-vous disparaître au profit de 100 postes FONJEP sport et de
quelques dizaines de créations de postes dans le cadre du plan sport-emploi
?
En outre, aucun des nouveaux emplois au titre du CIVIS, le contrat d'insertion
dans la vie sociale, annoncés par M. Fillon ne concerne le sport. Pourtant,
aujourd'hui, le mouvement associatif, qu'il soit sportif, culturel, humanitaire
ou caritatif, ne peut plus se passer d'emplois salariés permanents, car le
bénévolat ne peut suffire à remplir toutes les missions.
Le sport populaire, à l'échelle d'une nation, a une fonction sociale et
éducative : il participe de la prévention médicale et de l'hygiène, et il
permet la révélation et la mise en valeur d'une élite d'amateurs et de
professionnels.
Quelque 83 % des Français affirment pratiquer une activité physique ou
sportive, c'est-à-dire qu'ils ont intégré la pratique physique et sportive dans
leurs loisirs ; 20 % à 25 % disent et savent pratiquer un sport.
Si le Gouvernement affaiblit, ici aussi, le rôle de l'Etat et son
intervention, le sport amateur disparaîtra nécessairement et, avec lui, le
vivier du sport professionnel.
La coupure entre le sport d'élite professionnel et le sport amateur est
accentuée, alors que votre majorité défend la thèse selon laquelle « l'Etat
doit recentrer son action sur l'éthique sportive et le sport de haut niveau,
qui permet d'attirer les jeunes vers la pratique sportive, creuset de cohésion
sociale ». Comment cependant parler de cohésion sociale et des jeunes si votre
budget ne prévoit pas de passerelles fortes et cohérentes entre le sport
populaire et le sport d'élite ?
Bercy investit 2 millions d'euros dans le maintien du niveau d'excellence du
sport français et de la place de la France parmi les grandes nations sportives.
C'est bien, et même très bien !
Certes, l'élite renvoie au dépassement des limites individuelles et au
perfectionnement collectif d'une nation, mais encore faut-il que les individus,
issus du vivier des amateurs, disposent des infrastructures sportives et des
réseaux d'accès aux sports pour se perfectionner.
Par ailleurs, vous octroyez 2 % supplémentaires aux crédits ministériels
consacrés à la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage. C'est peu,
mais, surtout, la part effective des moyens consacrés à la lutte contre le
dopage n'augmente que de 0,5 million d'euros.
Or la France a un rôle actif important à tenir dans le cadre national et
européen concernant ce phénomène : il s'agit de développer, avec tous les
partenaires du sport, l'éthique qui doit régir la pratique sportive.
La loi sur le sport et ses décrets adoptés en 2001 ont rempli le vide
juridique préexistant. Ils ont donné aux fédérations le pouvoir des règles
sportives, de l'éthique, des sélections nationales, de l'organisation des
compétitions et de la vente des droits télévisés.
L'Etat a dorénavant un outil de régulation active des domaines sportifs et de
partenariat avec tous les acteurs du sport.
La France doit maintenant se donner les moyens d'une politique dynamique et
visionnaire « d'adhésion à un idéal de vie supérieure, d'aspiration au
perfectionnement et de participation aux jeux des arts et de la pensée », selon
Pierre de Coubertin.
Or le présent projet de budget ne répond pas à cette ambition, et mon groupe
ne peut s'en satisfaire. Aussi, nous ne le voterons pas, monsieur le
ministre.
M. le président.
La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l'an
dernier, quasiment à la même date à un jour près - c'était le 1er décembre,
mais déjà un samedi -, quelques sénateurs passionnés de sport se retrouvent en
compagnie des rapporteurs MM. Michel Sergent et Bernard Murat, pour débattre
avec le ministre des sports de son budget.
Monsieur le ministre, le seul fait que ce débat ait lieu deux ans de suite un
samedi, dans un hémicycle forcément clairsemé, montre le chemin qui reste à
parcourir et le peu de cas qui est fait du sport dans le budget de la nation.
Tout cela pour vous dire combien votre tâche est immense, pour inverser la
tendance et faire du sport, comme nous le souhaitons tous, une vraie priorité
nationale. Je sais que vous en avez la volonté.
Année après année, les orateurs qui, à cette tribune, s'expriment sur les
crédits du sport regrettent de ne pas constater d'évolution sensible des moyens
alloués à ce secteur, et personnellement, depuis quinze ans, j'interviens
quasiment chaque année sur ce point. Je ne vous cache pas que, cette année
encore, j'aurai quelques difficultés pour déroger à la règle, même si je sais
qu'il est difficile de corriger, en quelques mois, la fâcheuse tendance de vos
prédécesseurs à favoriser les mouvements dits d'éducation populaire au
détriment des sports.
De ce point de vue, je ne suis pas persuadé que la séparation de ces deux
domaines, la jeunesse et la vie associative étant désormais rattachées au
ministère de l'éducation nationale, constitue la garantie absolue de la mise en
oeuvre d'une politique sportive ambitieuse.
A cet égard, je ferai plutôt confiance à votre passion du sport, à votre passé
de sportif de haut niveau, à votre détermination totale pour valoriser la
pratique sportive dans notre pays et aux récentes déclarations du Premier
ministre, Jean-Pierre Raffarin, dans le cadre des états généraux du sport,
visant à la nécessité de « mettre le sport au rang des priorités nationales
».
Nous placerons donc nos espoirs dans l'élaboration des prochains budgets, en
espérant que le contexte économique permettra de dégager des marges de
manoeuvre nettement supérieures à celles de cette année que je qualifierai de
transitoire. Le gouvernement précédent n'avait pas su, ou pas voulu, lui,
utiliser les moyens que lui donnait une conjoncture favorable pour faire preuve
d'ambition dans ce domaine. Gageons, monsieur le ministre, que vous sauvez
prochainement saisir toutes les opportunités, en bon « sabreur » que vous êtes
!
En attendant de constater une traduction plus concrète de cet espoir, je
souhaiterais centrer mon intervention sur les problèmes posés par l'examen
détaillé de ce budget.
Je me permets d'entrer un peu dans le détail des chiffres.
En fonctionnement, par rapport à la loi de finances initiale pour 2002, ce
projet de budget pour 2003 marque certes une rupture avec les budgets
antérieurs résultant - cela a été dit - des transferts des crédits consacrés à
la jeunesse, ce qui provoque un basculement de 25 %, c'est-à-dire 140 millions
d'euros, sur le ministère de l'éducation nationale. Ces 140 millions d'euros se
répartissent ainsi : quelque 32 millions d'euros au titre III pour les moyens
des services et environ 105 millions d'euros au titre IV pour les crédits
d'intervention, qui ne font donc plus partie de votre budget.
Ces deux transferts engendrent effectivement un déséquilibre entre les coûts
de fonctionnement et les réelles capacités d'intervention financière du
ministère des sports.
Un constat découle de cet éclatement en deux des crédits : les coûts de
fonctionnement du ministère des sports pour 300,6 millions d'euros sur un total
de 400,6 millions d'euros représentent, il faut le reconnaître, les trois
quarts du budget du ministère. Comme un des rapporteurs l'a dit, c'est beaucoup
trop. Pourquoi ? Parce que ce déséquilibre flagrant est dû essentiellement au
règlement des salaires et des charges afférents aux directions régionales et
départementales de la jeunesse et des sports par le ministère des sports, alors
que ces mêmes directions dans les régions et les départements assurent la
promotion des activités du secteur jeunesse.
Dès lors, on se trouve face à un budget des sports qu'il convient de
relativiser. Et l'on est en droit de se demander si le plus petit budget de
l'Etat doit régler les dépenses de la partie jeunesse du ministère de
l'éducation nationale, ce dernier disposant tout de même de moyens plus
importants. Il faudra, je crois, revoir cette anomalie l'an prochain.
Dès lors, il ne reste que le FNDS pour assurer le fonctionnement des comités
olympiques et des fédérations sportives, et la part régionale pour le soutien
aux structures fédérales déconcentrées et pour nos clubs.
Fort de ce constat et après le vote en 2001 de la loi organique relative aux
lois de finances, il est donc urgent de trouver des réponses. Premièrement,
pour maintenir le niveau des ressources du FNDS, dont l'accroissement n'est dû
qu'à l'engouement des parieurs. Deuxièmement, pour garantir les crédits du FNDS
afin de conduire l'accès aux pratiques sportives et le développement de
celles-ci sur l'ensemble du territoire.
Enfin, dans l'hypothèse du maintien de l'illustre Ecole interarmées des sports
à Fontainebleau - on ne peut que vous remercier, monsieur le ministre, de
vouloir sauver ce magnifique outil, qui est partie intégrante du patrimoine
sportif de notre pays - je n'ai discerné, dans le budget, aucune ligne qui
puisse assurer, en 2003, une éventuelle synergie de partenariat entre le
mouvement sportif civil et le mouvement sportif des armées.
En investissement, y compris les financements de l'enveloppe FNDS, j'ai noté à
plusieurs reprises à cette tribune l'insuffisance du taux de consommation des
crédits d'investissement du ministère - je vous en avais parlé, monsieur le
ministre, lors de votre audition devant la commission des affaires culturelles
du Sénat, le 5 novembre dernier. Cette sous-consommation des crédits
s'explique, nous avez-vous dit, par la lourdeur des procédures d'engagement de
ces crédits, ce qui a incité, comme nous l'avons constaté, d'ailleurs, les
gouvernements successifs à parfois considérer ce budget comme une variable
d'ajustement du budget de l'Etat. Je me permets d'insister sur ce point afin
qu'il soit corrigé, compte tenu de la vétusté de nos infrastructures sportives,
qui a été rappelée. Je sais que vous en avez la volonté et que vous serez
vigilant sur ce problème, qui était devenu récurrent avec vos prédécesseurs.
J'en viens aux équipements sportifs de proximité. Nous souffrons d'un manque
d'équipements sportifs, en particulier en milieu rural, car les petites
communes n'ont pas la capacité d'investissement pour réaliser des
investissements sportifs lourds, comme des piscines ou des gymnases.
Mme Hélène Luc.
Eh oui !
M. Alain Dufaut.
Eh bien ! faisons preuve d'imagination et profitons de l'explosion des EPCI
pour favoriser, par une politique adaptée, par des incitations financières de
l'Etat, la création d'équipements sportifs à vocation intercommunale. Je suis
convaincu que c'est une bonne solution en milieu rural. Si l'Etat peut
déclencher, par une contribution modique, le mouvement, la structure
intercommunale - maître d'ouvrage - pourra à l'évidence bénéficier en plus de
l'aide du conseil général, voire du conseil régional, sur de tels projets.
L'expérimentation sur un conseil général d'une telle politique volontariste
d'aménagement sportif du territoire départemental pourrait peut-être se
justifier. Ce serait, je crois, une expérience intéressante.
En conclusion, je vous donne acte, monsieur le ministre, malgré l'ampleur du
chantier qui vous attend, de votre volonté affirmée de rénover et de faire
progresser la politique sportive du pays, en vous appuyant sur une vision
globale des différents problèmes qui se posent.
La traduction concrète de cette volonté apparaît dans l'organisation
exemplaire des états généraux du sport, mais, c'est vrai, encore trop
timidement dans le présent budget. J'espère donc que votre action - notre
action, car nous sommes là pour vous aider, monsieur le ministre, et nous
sommes tous mobilisés derrière vous - permettra, dans les prochains mois,
d'améliorer sensiblement la situation.
C'est dans cet esprit volontariste, au-delà des clivages politiques, que
s'inscrit mon intervention, à l'instar de celle de l'an dernier, avec comme
principal objectif de défendre une vision toujours plus ambitieuse du sport en
France. Monsieur le ministre, je suis convaincu qu'avec vous, et certainement
grâce à vous, nous pourrons y parvenir.
(Applaudissements sur les travées du
RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Lamour,
ministre des sports.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, je m'associerai tout d'abord aux propos de MM. les rapporteurs et
des orateurs concernant l'équipe de France de tennis, qui a marqué aujourd'hui
un point très important. Mais au-delà de cet enjeu, la Coupe Davis, qu'est-ce
qu'une équipe de France ? C'est l'émanation d'une fédération qui organise le
sport dans notre pays. C'est une émanation des meilleurs éléments des clubs, de
ces fameux petits clubs que vous évoquiez tout à l'heure, madame la sénatrice,
et dont je suis issu. Vous avez rappelé mon passé d'athlète de haut niveau,
mais, avant de l'avoir été, j'ai commencé à m'entraîner dans un grenier avec un
maître d'armes et j'ai pratiqué longtemps dans ce club avant d'atteindre
l'INSEP et de faire partie de l'équipe de France, pour défendre les couleurs de
notre pays partout dans le monde.
Il est important de rappeler la cohésion entre le club, le très haut niveau et
l'outil remarquable qu'est la fédération, et de faire en sorte que cet outil
perdure. C'est, vous vous en doutez, dans cette voie que je conduirai mon
action.
Je tiens à remercier les rapporteurs et les orateurs d'avoir aussi bien parlé
de la pratique sportive dans notre pays.
Comme je l'ai fait le 5 novembre devant votre commission des affaires
culturelles, c'est avec plaisir que je viens à nouveau aujourd'hui au sein de
la Haute Assemblée pour évoquer les priorités du ministère des sports pour les
années à venir. Cette ligne d'action amorcée dès 2003 aura vocation, bien sûr,
à se développer ensuite en tenant compte d'autres échéances essentielles à
venir, parmi lesquelles figure notamment la mise en oeuvre des conclusions des
Etats généraux du sport, en particulier la réforme du FNDS.
Le projet de loi de finances pour 2003, vous l'avez rappelé tout à l'heure,
porte les crédits budgétaires consacrés aux politiques de développement du
sport à 400,6 millions d'euros, soit une augmentation de 1,3 %. J'ai voulu,
pour ce budget de transition, maintenir un certain nombre de dispositifs,
lorsque les circonstances le justifiaient, tout en apportant des perspectives
nouvelles au mouvement sportif, et ce dans un contexte de responsabilisation de
l'ensemble des services, par le biais - j'y tiens beaucoup - d'une
déconcentration et d'une globalisation accrues des crédits.
C'est ainsi que j'ai reconduit les crédits consacrés aux coupons sport et aux
contrats éducatifs locaux à la hauteur des crédits consommés en 2002. J'ai
toutefois souhaité que ces crédits fassent l'objet d'une réelle mesure de
déconcentration, et donc soient globalisés. Ainsi, les services déconcentrés
pourront, en fonction des besoins locaux spécifiques, adapter les politiques
conduites par le ministère en redevenant de vrais interlocuteurs décisionnels
des collectivités locales. J'ai également demandé la suppression, par exemple,
du plafonnement du nombre de coupons par jeune, de façon à permettre à chaque
jeune d'accéder véritablement au sport de son choix.
Je tiens maintenant à aborder un sujet que vous avez toutes et tous évoqué :
il s'agit de gérer les conséquences des emplois-jeunes, dont près de 20 000
relèvent du domaine des sports. C'est d'ailleurs dans cette perspective que
travaille l'ensemble de l'équipe gouvernementale.
Le Gouvernement a hérité d'une situation politiquement difficile,
économiquement délicate et socialement douloureuse pour tous ces jeunes qui ont
cru pouvoir intégrer des structures alors qu'aucune solution pérenne n'était
envisagée pour leur avenir et qu'intentionnellement était entretenue une
confusion entre un dispositif d'insertion professionnelle ciblé sur un public
et inscrit dans le temps et une politique de soutien à l'emploi associatif qui
n'a, en réalité, jamais été mise en oeuvre et réfléchie dans la durée. Ce
programme mal conçu n'a donc pas vocation à être prolongé ; il sera arrêté
progressivement, à l'issue de son échéance.
Il convient, dans le domaine du sport, de favoriser et de poursuivre la
professionnalisation des emplois-jeunes par le renforcement des actions de
formation. S'agissant des objectifs d'insertion professionnelle des jeunes, je
travaille en relation très étroite avec mon collègue François Fillon pour que
le volet des emplois d'utilité sociale du dispositif CIVIS intègre le champ
sportif. Cela permettra, entre autres dispositions, d'augmenter le champ
d'intervention jusqu'à vingt-cinq ans. Il en sera de même, d'ailleurs, pour le
volet du volontariat civil de cohésion sociale.
Enfin, j'ai souhaité - vous l'avez rappelé - faciliter les démarches
administratives des associations en créant pour la première fois cent postes
FONJEP dans le domaine des sports et relancer - alors que ce dispositif était
en chute libre - le plan sport-emploi également à hauteur de cent postes. Je
rappelle qu'aucune création nouvelle d'emplois au titre du plan sport-emploi
n'avait été proposée depuis 1998.
Après le domaine de l'insertion professionnelle, j'aborderai celui de l'aide à
l'emploi associatif. Il convient de mettre en place progressivement un
dispositif spécifique d'aide aux projets d'intérêt général, j'allais dire
d'utilité sociale, intégrant une exigence d'évaluation. Le Gouvernement y
travaille actuellement et j'espère que nous pourrons très bientôt vous proposer
un certain nombre de dispositifs.
Héritage difficile, convenons-en, surtout si l'on ajoute qu'au cours des cinq
dernières années les crédits d'intervention du ministère, monsieur Lagauche,
ont sans commune mesure plus profité à la jeunesse qu'aux sports. En effet, les
crédits consacrés à la jeunesse ont augmenté de 30 %, contre 3 % seulement pour
les sports. J'en suis heureux pour les politiques en faveur de la jeunesse qui
auraient cependant pu être plus efficaces si elles n'avaient pas été, comme je
viens de le souligner, si confuses ; c'est un point qui a été abordé par M.
Dufaut. Mais cela relativise l'argument de comparaison des pourcentages
d'augmentation du budget consacré aux sports par rapport aux années
précédentes, si l'on ne fait pas une distinction entre les deux secteurs.
Ainsi, les moyens budgétaires spécifiquement dédiés aux politiques de
développement du sport augmentent en 2003 plus que les années précédentes, et
ce dans un contexte budgétaire infiniment plus contraint : le budget du
ministère est en augmentation de 1,3 %, celui du FNDS de 6 %, soit des moyens
consolidés en hausse de 3 %.
Ces moyens sont mis au service d'objectifs clairement énoncés, au nombre de
trois : tout d'abord, le renforcement de la sécurité de la pratique sportive et
la promotion de la santé par le sport ; ensuite, le renforcement de la cohésion
sociale et l'ouverture d'une vraie pratique sportive au plus grand nombre ;
enfin, le maintien du niveau d'excellence du sport français et de la place de
la France parmi les grandes nations sportives.
Ces objectifs s'accompagnent d'une priorité fonctionnelle : la réorganisation
des services du ministère autour de leurs savoir-faire spécifiques et de leurs
domaines d'excellence.
Le renforcement de la sécurité et de la santé autour de la pratique sportive,
compte tenu des dérives enregistrées depuis plusieurs années, est une priorité
essentielle de l'action du ministère des sports. J'ai donc souhaité disposer de
nouveaux moyens, soit 400 000 euros supplémentaires, pour assurer aux sportifs
de haut niveau un suivi médical adapté.
Aujourd'hui, la loi qui régit ce suivi médical est inapplicable, comme les
fédérations me l'ont rappelé durant les Etats généraux du sport, et la
publication des décrets est suspendue dans l'attente d'une vraie concertation
avec les fédérations sportives. Il s'agit pour moi de replacer les sportifs au
coeur des politiques de prévention.
Parallèlement, une somme de 460 000 euros sera affectée à la rétribution des
médecins chargés du contrôle antidopage, et je vous propose d'accroître les
moyens du Laboratoire national de dépistage du dopage, qui passeront de 4
millions à 4,3 millions d'euros. La création de deux emplois supplémentaires au
sein de cette structure accompagnera cet effort. Il faut savoir que, voilà
encore quelques mois, il fallait attendre parfois plus d'un an avant de
connaître les résultats d'une analyse faisant suite à un contrôle qu'il soit
inopiné ou qu'il ait été effectué pendant une compétition. Je crois que nous
avons désormais réglé ce problème !
La lutte contre le dopage doit donc privilégier l'indispensable
complémentarité entre la prévention, le suivi, l'information et le contrôle, je
viens de les évoquer, mais également la répression des trafics. Sur ce dernier
point, j'attends avec une grande impatience la publication du décret qui
permettra la coordination de l'ensemble des services de l'Etat dans ce domaine
; elle devrait intervenir avant la fin de l'année.
Un autre aspect important de la lutte contre le dopage est sa dimension
européenne et mondiale. Je souhaite vivement qu'un article concernant le sport
et la lutte contre le dopage puisse être inséré dans le traité qui résultera
des travaux de la Convention présidée par M. Valéry Giscard d'Estaing.
La dimension éthique de la pratique sportive et le nécessaire respect des
règles de comportement doivent être rappelés. Soucieux de rendre au terrain sa
dimension la plus noble, nous avons décidé de consacrer 2,36 millions d'euros à
la lutte contre les incivilités, notamment - mais cela a été rappelé - en
formant les arbitres aux réponses adaptées à chaque type d'agression. Plus
encore que la culture du résultat, le sport doit devenir le respect librement
consenti de la règle.
Je partage votre volonté, mesdames, messieurs les sénateurs, de renforcer la
place du sport dans les actions d'insertion sociale. C'est d'ailleurs ma
deuxième priorité. Le sport doit demeurer un formidable vecteur de cohésion
sociale. Il représente également en France, ne l'oublions pas, environ 200 000
emplois dans les secteurs public et privé.
L'encadrement de l'activité sportive, notamment au sein des clubs et des
associations, en est un élément essentiel. C'est précisément cette fonction que
je vous propose de renforcer en créant cent postes au titre du plan
sport-emploi, que j'ai déjà évoqué, et de cent postes FONJEP dans le domaine
spécifique du sport. C'est la première fois que ce dispositif nous permettra de
bénéficier de postes exclusivement destinés au sport !
Ces facilités doivent être mises au service de la pratique sportive par tous
et pour tous. A cette fin, nous appliquerons les solutions que les expériences
récentes menées sur le terrain feront apparaître comme les meilleures. C'est
ainsi que certaines mesures seront redéployées et déconcentrées, notamment les
coupons sport.
La globalisation au sein des moyens déconcentrés fera ainsi des directions
départementales du ministère des interlocuteurs des collectivités locales
peut-être plus efficaces, en termes de conseil et d'expertise. Le budget pour
2003 du ministère des sports sera par conséquent celui d'une déconcentration
renforcée.
Mme David et M. Lagauche ont exprimé leurs préoccupations relatives au sport
en entreprise. Le budget pour 2002 lui consacrait environ 1,2 million d'euros.
Je peux vous assurer que les crédits pour 2003 seront au même niveau, puisque,
avec la répartition déconcentrée, ils comprendront les subventions à l'Union
fédérale du sport en entreprise - organisme dont j'ai reçu le président
récemment - et les différentes conventions d'objectifs signées avec les
fédérations sportives, mais également la mise à disposition de cadres
techniques et les crédits d'intervention, sans parler, bien évidemment, de la
part régionale du FNDS.
Un montant de 4,7 millions d'euros sera consacré, sur les crédits du FNDS, à
l'amélioration de la place des femmes dans le sport. Il y avait un véritable
affichage en 2002, mais, en 2003, ce sont près de 5 millions d'euros qui y
seront affectés dans le seul budget, notamment pour l'accueil d'une structure
itinérante concernant les pays européens et dont le nom, en anglais, est
European Women and Sport.
Son séjour en France sera financé en
collaboration étroite avec le Comité national olympique et sportif français.
Nous attendons que, à l'occasion d'un colloque qui se déroulera dans le courant
de l'année prochaine, cette organisation nous fasse des propositions. Elle est
donc incluse, je le répète, dans notre effort budgétaire en faveur de l'accès
des femmes à la pratique du sport.
Cette politique d'accès au sport du plus grand nombre sera complétée cette
année, en accord avec le mouvement sportif, grâce aux crédits du FNDS, et des
actions collectives seront conduites par les fédérations sportives organisant
en France les championnats du monde de leur discipline. Ainsi, et c'est là
aussi une priorité pour moi, sport de haut niveau et pratique élargie - que
l'on oppose souvent, à tort - seront développés de concert.
De même, les contrats éducatifs locaux seront poursuivis, en parfaite
concertation avec les autres ministères concernés : 20,5 millions d'euros leur
seront consacrés, sous forme de crédits eux aussi déconcentrés et globalisés
et, encore une fois, à hauteur des crédits consommés pour 2002. C'est au niveau
local que les ajustements les plus adaptés, en partenariat avec les
collectivités territoriales, devront et pourront être trouvés.
Enfin, l'accès aux pratiques sportives nécessite un encadrement de qualité. Il
importe donc de renforcer les actions de formation, tout particulièrement dans
le domaine de la lutte contre les incivilités.
Au-delà de cette priorité, des moyens importants supplémentaires seront
consacrés à l'amélioration du niveau de qualification des intervenants dans le
domaine sportif. Dans ce secteur aussi, fait essentiel, la gestion d'une part
croissante des moyens sera déconcentrée.
C'est ainsi que 9 millions d'euros seront consacrés en 2003 à la formation des
animateurs et à l'accompagnement de l'emploi.
Toutes ces mesures doivent être mises au service du plus grand nombre. Dans le
même temps - c'est là ma troisième priorité -, il nous appartient de détecter,
de révéler et d'accompagner les jeunes sportifs ayant une volonté et des
qualités remarquables.
La France doit maintenir son niveau d'excellence sportive. C'est dans cette
perspective que je vous propose d'allouer des crédits spécifiques, à hauteur de
1,5 million d'euros, à la préparation et à l'accompagnement des équipes de
France aux prochains Jeux d'Athènes et aux autres grandes compétitions
internationales. Dans le même esprit, 500 000 euros seront consacrés à
l'amélioration de l'environnement des sportifs de haut niveau dans les
établissements du ministère, ce que l'on appelle les « pôles France ». Cette
mesure intégrera naturellement les objectifs d'insertion et de reconversion,
c'est très important, de ces sportifs.
Enfin, le ministère apporte son concours financier à l'organisation de
manifestations de dimension internationale qui auront lieu sur notre territoire
en 2003. La France accueillera ainsi plusieurs grands championnats : tennis de
table, tir à l'arc, lutte, parachutisme et, bien évidemment, athlétisme. Pour
ces derniers, près de deux mille athlètes représentant deux cents nations sont
attendus dans la région d'Ile-de-France. Il importe - et nous devons y parvenir
ensemble - de faire de ce moment exceptionnel non seulement une grande fête
pour la jeunesse, mais aussi l'occasion de valoriser le sport français et la
diversité de ses pratiques, et, surtout, de permettre l'accès de ses
disciplines à nos jeunes.
On m'a reproché il y a quelque temps l'insuffisance de l'effort consenti pour
le sport de haut niveau. Je rappellerai à Mme David que, lors de la
constitution du dossier de candidature à l'organisation des championnats du
monde d'athlétisme, le budget voté s'élevait à 200 millions de francs. Une fois
l'organisation attribuée, il est bizarrement passé, en trois mois, de 200 à 400
millions, dont la moitié à la charge de l'Etat.
Il nous a donc fallu - mais c'est tout à fait normal - faire un effort
considérable pour que les championnats puissent se dérouler dans les meilleures
conditions et nous donnent l'occasion de valoriser notre savoir-faire dans ce
domaine.
Ces trois objectifs ambitieux ne pourraient être pleinement atteints sans une
implication forte de l'ensemble des personnels. Cette mobilisation passe par
une revalorisation de leur situation et par un recentrage de leurs missions sur
leurs savoir-faire spécifiques. A cette fin sera expérimentée en 2003
l'externalisation de plusieurs fonctions d'entretien et de maintenance de nos
établissements, dont certaines pourraient être confiées à des entreprises
agissant dans le domaine de l'insertion.
Dans le même temps, le ministère des sports renforcera les métiers spécifiques
au service de ses objectifs opérationnels. Ainsi seront créés dix postes de
professeurs de sport ainsi que sept emplois dans les corps d'inspection.
L'effort portera parallèlement sur le cadre et les conditions de travail, que
MM. Dufaut et Sergent ont évoqués. Après plusieurs années de sous-consommation
des moyens prévus en autorisations de programme, il nous faut aujourd'hui mener
une politique ambitieuse de modernisation des équipements des établissements
publics de l'Etat. Il convient naturellement, dans un premier temps, de veiller
à la réalisation de travaux de maintenance et de sécurisation du patrimoine
immobilier. Cette année, ce sont 6,1 millions d'euros qui seront affectés à
cette action, dont 2,2 millions pour les seules actions de maintenance et de
mise en sécurité des centres régionaux d'éducation populaire et de sport, les
CREPS, et des établissements dépendant du ministère.
L'un d'entre vous a évoqué l'EIS, l'Ecole interarmées des sports. J'en dirai
un mot, car il s'agit d'un établissement que je porte dans mon coeur. Je vous
l'avais rappelé lorsque j'ai présenté les objectifs de mon ministère devant la
commission, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, et moi-même avons
lancé une inspection conjointe. Ses travaux se poursuivent, et elle devrait
formuler ses conclusions dans les semaines qui viennent. Il est d'ores et déjà
acquis que, sans avoir besoin de passer par le budget du ministère, les crédits
du FNDS pourront, par des conventions d'objectifs, être engagés en fonction des
demandes des fédérations, pour des utilisations ponctuelles de l'EIS et du camp
de Fontainebleau, afin, précisément, de développer la pratique sportive dans
l'une ou l'autre discipline.
Le déménagement en 2003 de l'administration centrale du ministère doit lui
permettre de retrouver des conditions décentes de travail tout en participant
au rééquilibrage des activités tertiaires à l'est de Paris.
Le Stade de France a été évoqué. Je parlerai en francs, je vous prie de m'en
excuser, pour vous rappeler que près de 30 millions de francs de produits sont
à déduire des 80 millions de francs d'indemnité, ce qui ramène le solde à 50
millions de francs. Certes, nous sommes toujours à la recherche d'un club
résident. Néanmoins, cet équipement - il suffit de le regarder pour pouvoir le
constater - n'a pas pris une ride. Il est toujours dans un état parfait et il a
redonné vie à un quartier en très grande difficulté. Demandez donc à Patrick
Braouezec, le député-maire de Saint-Denis, ce qu'il pense de l'implantation de
cet équipement, qui fait vivre un bassin de vie ! Il est à nos yeux le symbole
d'une réussite, celle de nos équipes nationales ; et si nous devons tous faire
des efforts pour trouver un club résident, je pense que le principe d'une «
construction-concession » a montré qu'il était un outil intéressant. Il
intéresse d'ailleurs nos amis chinois, qui, dans le cadre de la préparation des
jeux Olympiques de 2008, sont venus voilà quelques jours nous demander de leur
exposer le détail du mode de création et de fonctionnement de cet outil quelque
peu particulier.
S'agissant enfin de l'aide aux équipements sportifs dont la maîtrise d'ouvrage
est assurée par les collectivités locales, le projet de budget pour 2003
prévoit des crédits d'un montant de 4,9 millions d'euros, sous forme de
subventions d'investissement. C'est une augmentation de 71 % par rapport aux
crédits inscrits dans la loi de finances pour 2002.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le ministre des sports vous présente un
projet de budget pour 2003 qui répond à des objectifs clairement identifiés,
dans le souci de renforcer l'efficacité de ses services.
Cependant, il est indispensable de rétablir les conditions d'un véritable
dialogue et d'une large concertation avec tous les acteurs du sport.
Le 8 décembre aura lieu la clôture des états généraux du sport, clôture
formelle qui, loin d'être une fin, sera au contraire le point de départ des
évolutions qu'attendent tant le mouvement sportif que les collectivités
locales.
Quant au FNDS, ses crédits s'élèveront à 218 millions d'euros en 2003.
Plusieurs d'entre vous ont rappelé l'échéance de sa disparition, du moins sous
sa forme actuelle. Loin d'être une sentence, elle doit nous permettre, d'ici à
2005 - nous avons donc le temps ! -, de concevoir, dans la concertation, un
nouvel outil. Je vous ferai avant la fin de l'année des propositions qui
reprendront certaines des pistes évoquées par Bernard Murat. On pourra,
effectivement, faire appel à un établissement public, ou peut-être à une
fondation. Mais, monsieur Sergent, je défendrai un FNDS en dehors du budget du
ministère des sports. Il est essentiel que ce fonds, important pour le
mouvement sportif, puisse continuer de vivre sous une autre forme,
éventuellement, donc, adossé à une fondation.
Monsieur Murat, l'instauration d'une fondation ne visera pas, le cas échéant,
à faire concurrence aux sponsors régionaux, voire nationaux, qui aident les
structures professionnelles. Si elle était amenée à exister, elle ne serait
sollicitée que pour mener à bien des projets à caractère d'utilité sociale, par
exemple pour aider des sportifs de haut niveau à poursuivre leur carrière, pour
contribuer à aider l'implantation de tel ou tel équipement... En aucun cas elle
ne viendrait perturber les très bonnes relations qui existent entre les
partenaires financiers des clubs professionnels ni l'attention particulière que
portent les collectivités locales à leurs clubs phares.
Tels sont mes objectifs pour les années à venir. Ce premier budget est une
étape vers une ambition forte pour le sport dans notre pays. Pour ce faire,
j'ai besoin de votre soutien et de votre engagement.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le ministère
des sports et figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 5 332 766 euros. »