SEANCE DU 30 NOVEMBRE 2002


La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de revenir sur quelques questions qui n'ont peut-être pas été assez explicites.
Le Gouvernement aurait dû, selon nous, profiter de la baisse, que nous déplorons, bien entendu, du nombre des anciens combattants, pour faire droit aux demandes anciennes, voire très anciennes, de celles et de ceux qui ont souffert dans leur chair pour que les générations suivantes vivent en démocratie.
Ces contentieux, vous les connaissez comme nous tous, monsieur le secrétaire d'Etat. De nombreuses associations unissent leurs actions et ne ménagent pas leurs efforts pour défendre les anciens combattants et leur famille. Leur mobilisation, celle de leurs dirigeants, parfois âgés et malades, sont sans faille et nous devons les remercier de leur constance et parfois même de leur opiniâtreté. Nul ne peut ignorer les dossiers en instance. Certains sont plus importants que d'autres. J'en évoquerai trois.
Nous avons attiré l'attention de ceux qui vous ont précédé et la vôtre, dans la dernière période, sur la légitime demande des grands invalides et blessés s'agissant du respect des articles L. 115 et L. 128 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre.
La loi est claire, monsieur le secrétaire d'Etat, et prévoit la prise en charge intégrale des prestations médicales, paramédicales, chirurgicales et pharmaceutiques nécessitées par les infirmités qui ouvrent droit à pension. Or, dans de nombreux cas, l'Etat n'assure plus la prise en charge intégrale des frais de déplacement et de soins nécessités par les infirmités pensionnées. Le plus souvent, d'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, vos services font référence aux dispositions propres à la sécurité sociale, toujours plus restrictives dans la prise en charge des soins, des médicaments et du petit ou du gros appareillage, pour se dispenser ainsi d'appliquer les textes dans leur rigueur, notamment les dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre précitées.
Monsieur le secrétaire d'Etat, comme les associations, je dénonce avec la plus vive énergie la tendance générale à l'abandon de la prise en charge totale par l'Etat des soins et de l'appareillage des pensionnés de guerre, y compris par le secrétaire d'Etat chargé de les défendre et de représenter leurs droits reconnus par la loi.
Il est manifeste que ces mutilés sont considérés progressivement comme des assurés sociaux de droit commun, auxquels sont appliquées des règles de solidarité entre citoyens, et de moins en moins comme créanciers d'une dette sur la nation contractée à la guerre. Je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, d'examiner de très près ce dossier, car cette réclamation n'est que trop justifiée.
En ce qui concerne la bonification de campagne double pour les travailleurs de l'Etat, fonctionnaires et assimilés, je veux rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, que la loi du 14 avril 1924 a accordé à toutes les générations du feu, que ce soit celles de 1914-1918 et de 1939-1945, que ce soit celles de la Corée, de l'Indochine et de Suez, le bénéfice de la campagne double en temps de guerre. Seuls les anciens combattants en Algérie, en Tunisie et au Maroc n'ont bénéficié que de la campagne simple, sous prétexte, je veux vous le rappeler, qu'il ne s'agissait pas d'une guerre. Aujourd'hui, tel n'est plus le cas, la guerre a été officiellement reconnue comme telle, et il importe de permettre aux anciens combattants fonctionnaires de bénéficier de la campagne double. D'ailleurs, je me permets de rappeler, sans vouloir faire de polémique, que cette mesure était comprise dans une proposition de loi qui avait été déposée en 1993 par le groupe du RPR et apparentés à l'Assemblée nationale, sous la signature de MM. Mazeau et Cabrol.
Donc, maintenant que la guerre d'Algérie a été reconnue comme telle, toutes les générations de feu sont concernées.
J'aborderai en dernier lieu un problème moins bien connu, celui de la reconnaissance du droit aux soins et à réparation des anciens militaires et personnels civils qui ont été victimes d'irradiation lors d'essais nucléaires au Sahara et en Polynésie.
Nous nous inquiétons tous de la dégradation de l'état de santé de certains anciens militaires qui ont séjourné sur des aires de tirs d'essais nucléaires français aériens ou souterrains français au Sahara ou en Polynésie, de 1960 à 1974. Ce problème touche aussi les militaires et les civils ayant travaillé auprès des équipements nucléaires et qui sont susceptibles d'avoir été irradiés.
Au Sahara, je le rappelle, la France a procédé à dix-sept essais nucléaires et à de nombreux autres en Polynésie, dont quarante et un en atmosphère et cent trente-sept souterrains, à Mururoa.
Une association de vétérans des essais nucléaires français regroupe actuellement près de quatre cents membres, qui ont participé aux différents essais.
J'insiste d'autant plus, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'un certain nombre d'anciens combattants en Algérie ont, sur leur livret militaire, j'ai pu le constater, la mention « présent à Reggane » ou « présent à In Ekker, premières expérimentations atomiques françaises le 13 février 1960 ». Pour que ces mentions figurent sur leur livret militaire, il y a, bien évidemment, une raison.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite que vous fassiez droit à cette demande claire. Il faudrait maintenant recenser les personnels civils et militaires et de sous-traitance qui ont travaillé sur les centres d'expérimentations nucléaires au Sahara et en Polynésie. Il faudrait aussi que l'on puisse avoir accès aux dossiers médicaux des personnels des essais en levant le secret défense qui les frappe sans raison maintenant ; que l'on reconnaisse la présomption d'origine des maladies radio-induites et que vous créiez une commission paritaire du suivi des essais nucléaires dotée des crédits de fonctionnement et de recherche nécessaires pour permettre d'effectuer toutes les enquêtes.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il s'agit là d'une question nouvelle parce que la maladie apparaît tardivement. Vous ne pouvez plus garder le silence sur cette question.
M. le président. Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.

(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre IV : 16 319 500 euros. »