SEANCE DU 26 NOVEMBRE 2002
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-126 rectifié
bis,
présenté par MM. Valade,
Jean-Claude Gaudin, Souvet et Vanlerenberghe, est ainsi libellé :
« Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« A. 1. - A la fin du quatrième alinéa du 2° du b du 2 du I
ter
de
l'article 1648 A du code général des impôts, les mots : "dans la même
proportion" sont remplacés par les mots : "du montant de la diminution du
produit de taxe professionnelle correspondant à l'établissement constatée par
rapport à l'année précédente".
« 2. En 2003, pour l'application des dispositions du quatrième alinéa du 2° du
b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code général des impôts, il n'est
pas tenu compte de l'évolution du produit résultant de l'imposition des bases
mentionnées au b de l'article 1467 du code général des impôts.
« B. 1. - Le début du premier alinéa du 1° du IV
bis
dudit article est
ainsi rédigé :
« Sur la partie du fonds alimentée, d'une part, par le prélèvement prévu au b
du 2 du I
ter
ou l'écrêtement des bases des établissements publics de
coopération intercommunale soumis, de plein droit ou après option, aux
dispositions fiscales de l'article 1609
nonies
C et, d'autre part, par
la compensation mentionnée au II du D de l'article 44 de la loi de finances
pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998), le conseil général... (le reste
sans changement) ».
« 2. Le début du premier alinéa du 2° du IV
bis
dudit article est ainsi
rédigé :
« Sur la partie du fonds alimentée, d'une part, par le prélèvement prévu au b
du 2 du I
ter
ou l'écrêtement des bases des établissements publics de
coopération intercommunale à fiscalité additionnelle et, d'autre part, par la
compensation mentionnée au II du D de l'article 44 de la loi de finances pour
1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998), le conseil général... (le reste sans
changement) ».
« C. Après le II du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n°
98-1266 du 30 décembre 1998), il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« II
bis. -
A compter de 2003, les établissements publics de
coopération intercommunale soumis aux prélèvements mentionnés au b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code général des impôts perçoivent la
compensation résultant de la réduction de la fraction imposable des salaires et
rémunérations versés par un établissement exceptionnel situé sur leur
territoire, à l'exception de la fraction de cette compensation correspondant au
montant versé à un fonds départemental de péréquation de la taxe
professionnelle l'année précédant l'option pour le régime fiscal prévu au 1° du
I de l'article 1609
nonies
C du code général des impôts ou, pour les
établissements publics de coopération intercommunale ayant adopté ce régime
fiscal avant le 1er janvier 1999, en 1999. Cette fraction est conservée par le
fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle. »
« D. La perte de recettes pour les fonds départementaux de péréquation de la
taxe professionnelle résultant des A, B et C ci-dessus est compensée à due
concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
« E. La perte de recettes pour l'Etat résultant du D ci-dessus est compensée à
due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Le sous-amendement n° I-224, présenté par M. Fréville, est ainsi libellé :
« Supprimer le A du texte proposé par l'amendement n° I-126 rectifié
bis.
»
L'amendement n° I-223, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - 1. Après la première phrase du sixième alinéa du b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code général des impôts sont insérées les deux
phrases suivantes : "Pour 2003, le prélèvement est diminué d'une fraction de la
compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n°
98-1266 du 30 décembre 1998), calculée pour chaque établissement exceptionnel.
Cette fraction est égale à la différence entre le montant de la compensation
versé au fonds en 2003 et celui qu'il a reçu l'année précédant la première
année de mise en oeuvre du prélèvement."
« 2. Le dernier alinéa du b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code
général des impôts est complété par la phrase suivante : "Pour les
établissements publics de coopération intercommunale soumis aux dispositions du
présent b au plus tard en 2003, les produits de taxe professionnelle utilisés
pour la détermination de la variation à la baisse du prélèvement sont majorés
de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999
(n° 98-1266 du 30 décembre 1998) perçue au titre de ces années par le fonds
départemental de péréquation de la taxe professionnelle."
« II. - Le premier alinéa du 1° du IV
bis
de l'article 1648 A du code
général des impôts est complété par les mots suivants : ", majoré le cas
échéant du montant des compensations prévues au IV de l'article 6 de la loi de
finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) et au D de l'article 44 de
la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998)."
« III. - La première phrase du premier alinéa du 2° du IV
bis
de
l'article 1648 A du code général des impôts est complétée par les mots suivants
: "ou du prélèvement, majoré le cas échéant du montant des compensations
prévues au IV de l'article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30
décembre 1986) et au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n°
98-1266 du 30 décembre 1998) 99". »
La parole est à M. Vanlerenberghe, pour défendre l'amendement n° I-126
rectifié
bis.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Je défends cet amendement au nom de mes collègues, notamment de M. Valade, qui
en est l'auteur principal.
La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de
la coopération intercommunale a omis de mettre en adéquation les règles
d'alimentation du fonds départemental de la taxe professionnelle, le FDTP, avec
les dispositions de l'article 44 de la loi de finances pour 1999, portant
réforme de cette taxe.
Il s'ensuit une série d'anomalies qui affectent la prise en compte de la
compensation de la suppression de la part salariale de taxe professionnelle.
Celle-ci est intégralement versée par l'Etat au FDTP, alors que le produit
représentatif de cette compensation lui est déjà reversé pour la part que le
produit des bases « salaires » représente dans le montant du prélèvement versé
auparavant par l'EPCI.
Une autre anomalie se concrétise par le mode de calcul du prélèvement en cas
de diminution de produit de la taxe professionnelle puisque, en matière de taxe
professionnelle unique, la TPU, ledit prélèvement ne diminue pas d'un montant
similaire à celui de la diminution du produit payé par l'établissement
exceptionnel, comme c'est logiquement le cas en fiscalité additionnelle. La
neutralisation du passage en TPU exige une harmonisation du mode de calcul du
prélèvement.
Je pense que M. le ministre a compris ce dont il s'agissait et je me
dispenserai de donner lecture de tous les amendements prévus pour modifier cet
état de fait.
M. Michel Mercier.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Yves Fréville, pour défendre le sous-amendement n°
I-224.
M. Yves Fréville.
Je regrette très vivement que des amendements aussi importants que ceux de M.
Valade et du Gouvernement n'aient pas été examinés par la commission des
finances, dans leur version définitive.
L'amendement n° I-126 rectifié
bis,
défendu par M. le maire d'Arras,
qui n'est pas en cause...
M. Michel Mercier.
Il n'est pas à Bordeaux !
M. Yves Fréville.
En effet, il n'est ni à Bordeaux ni à Rennes !
Cet amendement, donc, envisage les conséquences d'une diminution des bases de
la taxe professionnelle d'un établissement exceptionnel localisé dans un EPCI
ayant opté pour la TPU. Jusqu'à présent, les pertes de recettes consécutives à
une diminution des bases de la taxe professionnelle étaient partagées entre,
d'une part, le fonds départemental de taxe professionnelle, destiné à
redistribuer les ressources d'établissements exceptionnels entre de nombreuses
communes - elles sont au nombre de quatre cents dans mon département - et,
d'autre part, la communauté d'agglomération ou la communauté urbaine ayant opté
pour le système fiscal de la taxe professionnelle unique.
Je rappelle, mes chers collègues, que lors du vote de la « loi Chevènement »
relative au renforcement et à la simplification de la coopération
intercommunale, il avait été décidé que la communauté urbaine ou la communauté
d'agglomération recevrait la totalité des ressources de l'établissement
anciennement exceptionnel, quitte à ce qu'elle reverse sous forme de
prélèvement un montant correspondant à ce que recevait le fonds départemental
de taxe professionnelle en 1999.
Vous voyez comme c'est simple !
Que se passe-t-il si les bases de la taxe professionnelle diminuent ? Dans
l'ancien système, le coût inhérent à la diminution des bases était partagé à
due proportion entre le fonds départemental de taxe professionnelle et la
communauté urbaine ou la communauté d'agglomération.
Pour ma part, je regrette vivement que cette disposition ait été abandonnée
dans le premier alinéa de l'amendement n° I-126 rectifié
bis
qui prévoit
que le fonds départemental de taxe professionnelle supporterait à lui seul la
perte de recettes due à la diminution des bases.
Mon sous-amendement n° I-124 vise donc à rétablir la situation antérieure. Si
les bases diminuent, chacun doit supporter une partie de la perte qui en
découle.
M. Michel Mercier.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué, pour défendre l'amendement n°
I-223.
Monsieur le ministre, je suis très heureux de saluer votre présence.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le président, je veux vous remercier de votre
salut amical et personnel et vous dire le plaisir que j'ai à m'exprimer au nom
du Gouvernement sous votre présidence.
Je commencerai par un amendement, qui est naturellement d'une très grande
simplicité, pour peu qu'on y prête un peu d'attention !
(Sourires.).
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Oui !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe a d'ailleurs bien préparé
la Haute Assemblée à « accueillir » en quelque sorte ce sujet encore une fois
d'une très grande simplicité !
(Nouveaux sourires.)
L'amendement n° I-126 rectifié
bis
vise en effet à modifier les règles
d'ajustement du prélèvement effectué sur les établissements publics de
coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, au profit des fonds
départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, et à permettre aux
même EPCI- je les appelle ainsi pour simplifier l'explication - de bénéficier
de la compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe
professionnelle afférente aux établissements dits « exceptionnels ».
Votre explication, que j'ai écoutée avec beaucoup d'attention, a failli me
convaincre car la mesure que vous proposez est justifiée du point de vue de
l'équité. Cependant, les solutions que vous retenez ne me semblent pas, à ce
stade, pouvoir être reprises complètement en l'état. On peut les améliorer et,
connaissant votre souci du dialogue, je suis sûr que nous allons pouvoir
progresser.
Plus particulièrement, la modification des règles relatives à la compensation
de la suppression de la part « salaires » conduirait à une diminution brutale
des ressources des fonds départementaux dont l'ampleur financière n'a pas
encore pu être estimée à ce jour, puisque ces sujets sont très compliqués. Or,
je vous rappelle que les fonds départementaux représentent un dispositif
important de péréquation horizontale décentralisée au sein du département.
Je souhaite souligner que les dispositions actuelles permettent d'ores et déjà
de tenir compte, dans une certaine mesure, de la diminution du produit de la
taxe professionnelle de l'établissement qualifié d'exceptionnel. Un
rapprochement des dispositifs d'écrêtement et de prélèvement nécessiterait une
remise à plat de l'ensemble des mécanismes de répartition du produit de la taxe
professionnelle en provenance de cet établissement exceptionnel.
Chacun aura compris qu'il s'agit d'une entreprise très importante qui produit
des recettes de taxe professionnelle très élevées.
Pour ces raisons, j'ai demandé à mes services et à ceux du ministère de
l'intérieur, dont je salue l'expertise, de mettre au point un dispositif qui
permettra de satisfaire votre demande sans déstabiliser, ce qui n'était
naturellement pas votre intention, les ressources des fonds départementaux de
péréquation de la taxe professionnelle.
Je vous demanderai donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir, après avoir
entendu mes explications, retirer votre amendement.
Je vous propose un amendement n° I-223 qui prévoit, tout d'abord, de diminuer
le prélèvement au profit du fonds départemental à due concurrence du montant de
la baisse du produit de la taxe professionnelle supportée par le groupement
ayant opté pour la taxe professionnelle unique, et consécutive à la réforme de
la part « salaires ».
Dès lors, il n'est pas nécessaire de modifier le régime actuel de versement de
compensation de la suppression de la part « salaires » de taxe professionnelle,
dont bénéficient actuellement les fonds départementaux.
Par ailleurs, le dispositif actuel de baisse proportionnelle du prélèvement en
cas de diminution du produit de taxe professionnelle est maintenu, quand cette
diminution est consécutive à une réduction d'effectivité économique.
Je vous remercie de l'attention que vous prêtez à mes propos. Je perçois dans
vos yeux toute la luminosité de la présentation que je vous fais !
(Sourires.)
Enfin, ainsi que vous le souhaitez, les montants de compensations reçues par
les fonds seront désormais inclus dans l'assiette du reversement prioritaire
dont les EPCI bénéficient, dès lors qu'ils font l'objet d'un écrêtement ou d'un
prélèvement.
Monsieur le président, j'ai fait ce que j'ai pu, mais vraiment je ne saurais
faire davantage !
(Sourires.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est lumineux !
M. Michel Mercier.
Ce n'est pas mal !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je vais m'efforcer de schématiser un peu les
choses.
M. Adrien Gouteyron.
Bravo !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Dans un premier temps, nous sommes saisis d'un
amendement n° I-126 rectifié
bis
. C'est un amendement important,...
M. Michel Mercier.
Absolument !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... qui a été présenté avec beaucoup de conviction
par notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe. Il tend à tirer les conséquences
du mode de compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe
professionnelle sur les modalités de prélèvement sur les bases des EPCI à taxe
professionnelle unique par les fonds départementaux de péréquation de la taxe
professionnelle.
(Sourires.)
Le texte en cause comporte trois paragraphes : A, B et C.
(Rires.)
M. Adrien Gouteyron.
Ça, c'est clair !
(Nouveaux rires.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le paragraphe A relève, selon nous, d'une volonté
politique de privilégier la péréquation dans le cadre intercommunal, au
détriment de la péréquation dans le cadre départemental. C'est le choix qui est
fait par les auteurs de cet amendement.
M. Michel Mercier.
C'est exact ! C'est le choix de l'agglomération !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est ce qu'il faut retenir et qui est important dans
le débat.
Le paragraphe B est un aménagement technique et le paragraphe C corrige, de
manière satisfaisante, une conséquence imprévue de la réforme de 1999 et va
dans le sens de l'équité.
Voilà l'analyse, très brièvement résumée, de ce que nous avons compris de cet
amendement.
Nous sommes saisis, par ailleurs, d'un sous-amendement de notre collègue Yves
Fréville, qui tend à supprimer le A du dispositif. Par conséquent, M. Fréville
ne souhaite pas que l'on fasse prévaloir la logique de péréquation
intercommunale sur la logique de péréquation départementale.
Pour sa part, le Gouvernement, qui a placé sur le sujet ses meilleurs experts,
nous propose de substituer à l'amendement, et éventuellement au
sous-amendement, une autre rédaction, qui a été complètement remaniée.
Cet amendement tend, premièrement, à supprimer, comme le sous-amendement de M.
Fréville, les dispositions du paragraphe A, faisant ainsi le choix de la
péréquation départementale.
Il vise, deuxièmement, à modifier, en les complétant, les dispositions
techniques proposées au paragraphe B, dans le sens, d'ailleurs, souhaité par
les auteurs de l'amendement ; c'est donc une rectification de nature
technique.
Enfin, troisièmement, il a pour objet de résoudre, de manière différente, le
problème de fond soulevé par les auteurs de l'amendement n° I-126 rectifié
bis
en matière de compensation aux communautés d'agglomération et aux
communautés urbaines de la suppression des bases « salaires » des
établissements exceptionnels.
Il faut rappeler que, dans la situation actuelle, les fonds départementaux de
péréquation perçoivent deux fois la compensation, alors que les communautés
urbaines et les communautés d'agglomération ne la perçoivent pas.
Les auteurs de l'amendement n° I-126 rectifié
bis
, présenté notamment
par MM. Gaudin et Valade, proposent, pour remédier à cette difficulté, de
majorer la compensation versée aux EPCI et de minorer celle qui est versée aux
fonds départementaux. De cette manière, c'est un montant plus élevé de
compensation qui serait intégré à la dotation globale de fonctionnement en
2004.
Le Gouvernement suggère à mon sens prudemment, de ne pas toucher à la
compensation, mais de minorer le montant prélevé par le fonds départemental sur
le produit de la taxe professionnelle perçue par les communautés
d'agglomération ou les communautés urbaines.
Les deux solutions ont leur logique, celle de MM. Gaudin et Valade comme celle
du Gouvernement. Elles sont toutes deux sans effet sur le solde du budget de
l'Etat. Par conséquent, du simple point de vue des finances publiques, la
commission est neutre dans le débat. Il semble toutefois que la solution
proposée par le Gouvernement soit de nature plus consensuelle que celle
qu'apporte l'amendement n° I-126 rectifié
bis
.
Voilà, mes chers collègues, ce que je peux vous dire en termes vraiment très
schématiques.
La commission des finances a examiné l'amendement de MM. Valade et Gaudin et
elle était convenue de se conformer à l'avis du Gouvernement.
Elle n'a pu examiner, en revanche, ni le sous-amendement de M. Fréville ni
l'amendement du Gouvernement. Elle s'en remet donc à la sagesse de notre Haute
Assemblée. J'insiste sur la rédaction sans doute techniquement plus achevée de
l'amendement du Gouvernement et souligne son caractère volontairement
consensuel. Il s'agit donc, monsieur le ministre, si je puis dire, d'une
sagesse tout à fait positive.
M. le président.
Monsieur Fréville, le sous-amendement est-il maintenu ?
M. Yves Fréville.
Vous avez tous compris, mes chers collègues, qu'il fallait connaître la carte
de l'industrie automobile en France, avec des usines qui comptent parfois une
dizaine de milliers d'ouvriers, pour saisir qu'il existe un problème de
répartition de la taxe professionnelle entre, d'une part, les communes où
habitent une grande partie des salariés de ces usines et, d'autre part, les
communautés d'agglomération où sont implantés ces établissements
exceptionnels.
L'enjeu est
a priori
important. Ce qui fausse toute la discussion -
c'est d'ailleurs la raison pour laquelle, finalement, sous les réserves que je
vais émettre, je comprends parfaitement que de tels amendements aient été
déposés, en particulier celui du Gouvernement - c'est, il faut le reconnaître
une erreur législative qui a été commise en 1999 : la part « salaires » a été
supprimée de la taxe professionnelle. Et, très logiquement, on a dit que les
compensations de l'exonération étaient versées au fonds départemental de la
taxe professionnelle.
C'est bien ce qui s'est produit en 1999 et, à tort, les années suivantes. En
2000, la loi Chevènement survient. Celle-ci prévoit que, dans les communautés
d'agglomération et les communautés urbaines qui perçoivent la TPU, la totalité
du produit fiscal est versée à la communauté et le fonds départemental reçoit
uniquement ce qu'il percevait en 1999. Mais on oublie la compensation de la
suppression des bases « salaires » ! On va donc continuer à verser au fonds
départemental une compensation qui n'a plus de raison d'être. Personne n'est
gêné par cette opération, car, à l'évidence, ce sont de petites compensations
qui sont versées. Puis, en 2003 - c'est la dernière étape de la suppression de
la part « salaires » - c'est le gros paquet ! Dans le cas de Rennes, c'est 9
millions d'euros qui s'ajoutent au prélèvement qui avait été institué en
1999.
Je reconnais, la mort dans l'âme, car je plaide contre les intérêts des
communes rurales de mon département en disant cela, qu'il y a là une erreur
juridique. Par conséquent, il est logique qu'elle soit corrigée.
Je ne vais donc pas m'opposer à l'amendement du Gouvernement, qui est
infiniment plus satisfaisant, pour différentes raisons que je ne vais pas
exposer, que celui qu'ont déposé - qu'ils veuillent bien m'excuser - mes
collègues Jacques Valade et Jean-Claude Gaudin.
Je formulerai toutefois une remarque. Le « contrat » de 1999, si je peux
m'exprimer ainsi en parlant d'une loi, prévoyait une possibilité d'accord :
lorsque des augmentations de base se produisaient - et Dieu sait que des
augmentations de base ont lieu dans les grandes usines d'automobiles
actuellement ! - le produit de ces augmentations de base pouvait faire l'objet
de négociations contractuelles entre, d'une part, le conseil général qui gère
les fonds départementaux et, d'autre part, la communauté d'agglomération ou la
communauté urbaine.
Cette affaire a empoisonné les négociations durant quatre ans. J'espère que si
l'on remet les compteurs à zéro, c'est-à-dire si l'on reconnaît l'erreur
juridique, on en tiendra compte. Je souhaite très vivement - je ne sais pas
sous quelle forme - qu'apparaisse à l'avenir un partage équitable des
accroissements de base très importants entre le fonds départemental et la
communauté considérée.
Sous cette réserve, qui est d'ordre politique et qui ne remet pas en cause le
fonctionnement juridique que nous propose le Gouvernement, finalement, la mort
dans l'âme, je le répète, je me rallierai à l'amendement du Gouvernement.
Bien entendu, je retire mon sous-amendement, monsieur le président, puisqu'il
est satisfait par le I de l'amendement du Gouvernement.
M. le président.
Le sous-amendement n° I-224 est retiré.
Monsieur Vanlerenberghe, l'amendement n° I-126 rectifié
bis
est-il
maintenu ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Après les brillantes explications de M. le ministre et de M. le rapporteur
général et à la faveur de l'excellente démonstration de notre collègue Yves
Fréville, qui accepte que tout rentre finalement dans le cadre juridique prévu,
je crois que je ne peux que retirer cet amendement. Je m'en remets, en effet, à
la proposition qui a été formulée par le ministre approuvée par le rapporteur
général. Elle devrait donner satisfaction à l'agglomération, ce qui était le
but de cet amendement. J'espère que cela ne desservira pas trop le souci de
solidarité manifesté par le département d'Ille-et-Vilaine.
M. le président.
L'amendement n° I-126 rectifié
bis
est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° I-223.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 13.
Les deux amendements suivants sont présentés par MM. Miquel, Massion,
Moreigne, Sergent, Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les
membres du groupe socialiste et rattachée.
L'amendement n° I-86 est ainsi libellé :
« Après l'article 13 insérer un article additionnel rédigé ainsi :
« I. - Après la troisième phrase du 2° du II de l'article 1648 A
bis
du
code général des impôts est insérée une phrase rédigée comme suit :
« A compter de 2003 cette dotation évolue chaque année comme la dotation
globale de fonctionnement.
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation
sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-87 est ainsi libellé :
« Après l'article 13, insérer un article additionnel rédigé ainsi :
« I. - Le 2° du I de l'article 1648 B
bis
du code général des impôts
est complété
in fine
par les phrases suivantes :
« A compter de 2003 ce montant évolue chaque année comme la dotation globale
de fonctionnement. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation
sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Michel Moreigne.
M. Michel Moreigne.
Ces deux amendements tendent, respectivement, à indexer l'évolution des
dotations de l'Etat au Fonds national de péréquation de la taxe
professionnelle, le FNPTP, et au Fonds national de péréquation, le FNP, sur
celle de la DGF. Ces dotations sont, en effet, actuellement indexées sur
l'évolution des recettes fiscales de l'Etat nettes des prélèvements en faveur
des collectivités locales. Or cette indexation est presque systématiquement
moins favorable que celle de la DGF.
Ainsi, les ressources du FNPTP inscrites dans le projet de loi de finances
pour 2003 diminuent par rapport à l'année précédente. Cette évolution résulte
de l'indexation sur les recettes fiscales de l'Etat qui conduit à retenir, en
2003, un taux d'évolution de moins 0,66 % contre 2,29 % pour la DGF.
En outre, cette situation ne peut que s'aggraver à l'avenir compte tenu du
transfert envisagé par le Gouvernement d'une partie de la fiscalité de l'Etat
aux collectivités locales. Ainsi, l'attribution de tout ou partie du produit de
la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, aux collectivités
locales aurait des conséquences défavorables sur les recettes fiscales de
l'Etat, donc sur les ressources du FNPTP.
Etant d'un naturel optimiste, vous me permettrez d'être persuadé que nous
sommes tous ici conscients de l'importance de la péréquation à l'aube d'un
accroissement des compétences des collectivités locales et que l'évocation de
la péréquation ne tient pas uniquement aux discours : elle touche également aux
réalités.
En outre, l'indexation sur la DGF harmoniserait et simplifierait les
dispositions applicables en matière d'évolution des dotations en les alignant
sur la règle de droit commun. Cette indexation permettrait aussi d'améliorer la
visibilité des élus locaux sur l'évolution de leurs dotations.
Nous proposons donc au Sénat d'adopter ces amendements, qui semblent défendre
raisonnablement les intérêts des collectivités locales et la péréquation, dont
on a beaucoup parlé ici et dont on continuera sans doute de parler.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nos collègues du groupe socialiste souhaitent indexer
sur la DGF la dotation versée par l'Etat au fonds national de péréquation de la
taxe professionnelle et au Fonds national de péréquation. C'est assurément une
bonne question !
Depuis plusieurs années, la commission des finances conteste le mode
d'indexation actuellement retenu des dotations de l'Etat au FNPTP et au FNP. Il
faut savoir que cette indexation se fait sur les recettes fiscales de l'Etat
nettes des dégrèvements et des prélèvements sur recettes.
Je me permets de vous renvoyer à la page 138 du rapport écrit de la commission
où figure la comparaison, année par année, depuis 1998, du taux d'évolution des
recettes fiscales brutes et du taux d'évolution des recettes fiscales nettes
corrigées des transferts. On voit que, systématiquement, le jeu de la formule,
compte tenu de la dynamique des prélèvements sur recettes, qui est plus rapide
que celle des recettes fiscales de l'Etat, est mécaniquement défavorable au
FNPTP et au FNP.
Ainsi, en 1998 - une belle année pour les recettes, notamment les recettes
fiscales brutes, qui augmentent de 5,3 %, de quoi faire rêver le ministre
délégué au budget, n'est-ce-pas ? - les recettes fiscales nettes corrigées des
transferts étaient en augmentation de 4,43 %.
A l'exception de la seule année 2000, le rapport a toujours été défavorable.
Pour 2002 - loi de finances initiale - les recettes fiscales brutes étaient
prévues en augmentation de 2,70 % et les recettes fiscales nettes corrigées des
transferts en diminution de 1,22 %. Heureusement, pour 2002, s'agissant de la
péréquation, on ne se livre pas à une régularisation. Je crois savoir que l'on
ne modifie pas les conditions initiales du calcul, on en reste au prévisionnel.
Sinon, ce serait peut-être encore pire...
Pour l'année 2003, on prévoit des recettes fiscales brutes en diminution de
0,44 % - chacun le sait, c'est le malheur des temps - et des recettes fiscales
nettes corrigées des transferts en diminution de 0,56 %.
En termes schématiques, plus la DGF et les compensations d'exonération
d'impôts locaux augmentent vite et plus l'indexation des dotations au FNPTP et
au FNP est réduite. Parmi les exonérations d'impôts locaux figure tout
particulièrement la compensation de la suppression de la part « salaires ».
Nos collègues du groupe socialiste proposent une indexation sur la DGF.
Peut-être serait-ce logique, la question peut se poser. Le taux d'évolution de
la DGF n'est-il pas devenu, en effet, une sorte de taux directeur qui
s'applique à l'évolution de nombreux concours de l'Etat aux collectivités
locales ? C'est ainsi qu'il s'applique à la dotation générale de
décentralisation, à la dotation destinée à compenser les charges de logement
des instituteurs, à la dotation élu local ainsi qu'aux compensations
d'exonération d'impôts et à plusieurs autres choses encore.
La question, monsieur le ministre, nous paraît donc avoir été opportunément
soulevée. Peut-être sera-t-elle traitée dans le cadre plus global de la réforme
des finances locales, à l'occasion de laquelle on cherchera à imaginer une
architecture plus rationnelle et plus compréhensible de l'ensemble des
dotations de l'Etat.
Notre commission, qui reste, bien entendu, attachée à la pérennité des
ressources affectées aux deux fonds nationaux de péréquation a cependant
décidé, sur cette question importante mais technique, de s'en remettre à l'avis
du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert
ministre délégué.
M. le rapporteur général vient, en toute simplicité, de
nous expliquer - qui d'autre que lui pourrait le faire ? - que l'Etat a
finalement davantage doté les collectivités territoriales que ses recettes
fiscales nettes n'ont évolué.
(Sourires.)
Cela rend ma situation de
ministre délégué au budget extraordinairement délicate !
Les autres des amendements doivent bien comprendre que la DGF est
l'arrière-petite-fille du VRTS, le versement représentatif de la taxe sur les
salaires, et qu'elle est représentative des charges de fonctionnement des
collectivités locales. En revanche, pour la péréquation de taxe
professionnelle, il s'agit de cotisations de taxe professionnelle qui sont
versées par des entreprises. Il ne faut pas mélanger les deux.
Je me tourne vers M. Michel Moreigne, dont je comprends et les objectifs et
les préoccupations, lui qui est soucieux d'assurer une certaine péréquation en
fonction des territoires et de leur richesse fiscale potentielle : mon cher
collègue, on ne peut pas demander en permanence à l'Etat d'être la variable
d'ajustement de ces différences entre les territoires. Et je ne peux pas vous
suivre dans le raisonnement qui viserait à indexer la dotation de l'Etat au
fonds national de péréquation de la taxe professionnelle sur le taux
d'évolution de la dotation globale de fonctionnement.
Cela étant, pour vous rassurer dès aujourd'hui et pour vous inciter à la
patience, je rappelle que nous sommes à la veille de revoir l'ensemble des
relations financières entre l'Etat et les collectivités locales ; l'année qui
précède cette réforme, il ne me paraît pas souhaitable de modifier de nouveau
les règles dont vous avez la gentillesse de ne pas vous lasser, mais dont je
sais l'aridité.
Donc, les amendements n°s I-86 et I-87 posent de vrais problèmes qui
trouveront naturellement leur solution avec l'aboutissement de la réforme
précitée.
Sous le bénéfice de ces explications, je propose à M. Michel Moreigne de
retirer ses amendements, assuré qu'il est maintenant que tout sera bientôt
remanié. A défaut, je serais contraint de demander au Sénat de les rejeter.
Monsieur le rapporteur général, vous avez souhaité entendre l'avis du
Gouvernement : vous avez bien compris que, s'agissant de péréquation de taxe
professionnelle, il n'est pas logique, du point de vue économique - or la
logique économique vous est familière ! - de prévoir une indexation sur la DGF.
Il me paraît préférable de choisir les recettes nettes de l'Etat.
M. le président.
Monsieur Moreigne, les amendements n°s I-86 et I-87 sont-ils maintenus ?
M. Michel Moreigne.
J'ai bien entendu M. le rapporteur général et M. le ministre. Il m'a semblé
que M. le rapporteur général faisait montre d'un esprit un plus ouvert, si je
puis dire, que M. le ministre.
Si toutefois M. le ministre m'affirme que ses propos valent engagement de
revoir la situation dans le sens que j'ai indiqué, et s'il veut bien admettre,
avec moi, que l'Etat est le plus grand et le meilleur péréquateur possible, je
pourrai envisager de retirer mes amendements.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je me fais un devoir moral de répondre très précisément
à la question de M. Michel Moreigne.
A l'occasion du débat sur les relations financières de l'Etat avec les
collectivités locales, j'ai évoqué l'éventualité du transfert de la TIPP comme
ressource, ce qui suppose un travail assez long.
Vous et moi entretenons des relations de confiance suffisamment anciennes,
même si nous ne partageons pas les mêmes idées, pour que je tienne à être le
plus loyal et le plus précis dans ma réponse. Franchement, cela ne serait pas
un bon signal de vous faire battre sur ces amendements, car cela reviendrait à
faire repousser par le Sénat un dispositif auquel il n'est pas hostile dans le
principe, mais dont les modalités ne sont pas appropriées.
M. le président.
Monsieur Moreigne, qu'en est-il des deux amendements ?
M. Michel Moreigne.
Si l'idée que nous avons semée peut croître et embellir, même sans avoir
obtenu d'engagement formel, je retire les amendements.
M. le président.
Les amendements n°s I-86 et I-87 sont retirés.
Article 14