SEANCE DU 15 NOVEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 20. - Le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal est ainsi
rédigé :
« Est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende la menace
de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens proférée à
l'encontre d'un magistrat, d'un juré, d'un avocat, d'un officier public ou
ministériel, d'un militaire de la gendarmerie, d'un fonctionnaire de la police
nationale, des douanes, de l'administration pénitentiaire, de toute autre
personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service
public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, ou à
l'encontre, et du fait de ces fonctions, du conjoint, des ascendants et des
enfants de cette personne, ou de toute autre personne vivant habituellement à
son domicile. La peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros
d'amende lorsqu'il s'agit d'une menace de mort ou d'une menace d'atteinte aux
biens dangereuse pour les personnes.
« Les mêmes dispositions sont applicables aux mêmes menaces proférées à
l'encontre des gardiens assermentés d'immeubles ou de groupes d'immeubles. »
La parole est à M. Louis Mermaz, sur l'article.
M. Louis Mermaz.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 20
est relatif aux agressions verbales et menaces à l'encontre des agents qui
incarnent l'autorité publique ou des agents qui assument des missions de
service public. Il modifie l'alinéa 1er de l'article 433-3 du code pénal qui
sanctionne précisément les menaces et actes d'intimidations commis contre les
personnes exerçant une fonction publique et adopté par la loi du 22 juillet
1996, dans son article 16.
Actuellement, est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros
d'amende la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou
les biens proférée à l'encontre d'un magistrat, d'un juré, d'un avocat, d'un
officier public ou ministériel, d'un militaire de la gendarmerie, d'un
fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l'administration
pénitentiaire ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou
chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de
l'exercice de ses fonctions, lorsqu'elle est soit réitérée - c'est le point
important -, soit matérialisée par un écrit, une image ou tout autre objet.
La peine est portée à cinq d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende
lorsqu'il s'agit, plus gravement, d'une menace de mort ou d'une menace
d'atteinte aux biens dangereuse pour les personnes.
Le fait d'user de menaces, de violences, ou de commettre tout autre acte
d'intimidation pour obtenir d'une personne soit qu'elle accomplisse ou
s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat
ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat, soit qu'elle abuse de
son autorité vraie ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une
administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute
autre décision favorable, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000
euros d'amende. Ce rappel a pour objet de montrer que les infractions sont
sévèrement, et à juste titre, encadrées.
Ainsi, l'article 433-3 du code pénal est précis sur le caractère de la menace,
et là, effectivement, il faut éviter toute interprétation qui pourrait être
prématurée, trop rapide ou subjective, car la subjectivité en ces matières peut
être considérable.
L'article 433-3 du code pénal exige la menace soit réitérée ou matérialisée
par un écrit, une image ou tout autre objet.
Pour vous, monsieur le ministre, cette exigence prive l'incrimination d'une
portée réelle et empêche en fait de réprimer cette forme d'agression ; aussi
proposez-vous de supprimer cette disposition.
Mais est-ce bien nécessaire ? En effet, la jurisprudence entend au sens large
la notion de menaces. Par exemple, la chambre criminelle de la Cour de
cassation a estimé que le délit était constitué lorsque « les paroles ou les
écrits, même sous une forme voilée » - il n'y a pas de laxisme ici - « sont de
nature à faire naître dans l'esprit de celui à qui ils sont adressés, la
crainte... » ; on peut difficilement être moins précis et moins rigoureux.
Tout aussi sérieusement, l'article 20 étend le champ d'application de
l'incrimination au conjoint, aux ascendants, aux enfants et à toute autre
personne vivant habituellement au domicile de la personne à l'encontre de
laquelle ont été proférées les menaces ainsi qu'aux gardiens assermentés
d'immeubles ou de groupes d'immeubles. Nous aurons d'ailleurs l'occasion de
revenir sur ce point lors de la discussion des amendements.
Je réitère donc le propos que je tenais en défendant la motion tendant à
opposer la question préalable : toutes ces nouvelles dispositions ne sont-elles
pas, dans le fond, inutiles ?
M. le président.
Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 209, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes André et Blandin,
MM. Badinter, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et les
membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 210, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes André et Blandin,
MM. Badinter, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et les
membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé ;
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article
pour remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal, remplacer
les mots : "deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende" par les mots :
"un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende". »
L'amendement n° 114, présenté par M. Peyrat, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article
pour l'article 433-3 du code pénal, après le mot : "proférée", insérer le mot :
"notamment". »
L'amendement n° 93 rectifié, présenté par M. Charasse et les membres du groupe
socialiste apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article
pour remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal, après les
mots : "proférée à l'encontre d'un", insérer les mots : "maire, d'un adjoint au
maire ou d'un élu municipal qui les remplace, d'un". »
L'amendement n° 23 rectifié
bis
, présenté par M. Courtois, au nom de la
commission, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet
article pour remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal,
après les mots : "de l'administration pénitentiaire", insérer les mots : ",
d'un gardien assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles, d'un gardien
d'immeubles ou de groupes d'immeubles mentionnés au livre IV du code de la
construction et de l'habitation."
« II. - Supprimer le second alinéa du texte proposé par cet article pour
remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal. »
L'amendement n° 155, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Beaudeau, Beaufils et
Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer,
Foucaud et Le Cam, Mmes Luc et Mathon, MM. Muzeau, Ralite et Renar et Mme
Terrade, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 433-3
du code pénal, après les mots : "à l'occasion de l'exercice de ses fonctions,",
insérer les mots : "lorsqu'elle est soit réitérée, soit matérialisée par un
écrit, une image ou tout autre objet". »
L'amendement n° 212, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes M. André et
Blandin, MM. Badinter, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et
les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet
article pour remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal,
après les mots : "dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses
fonctions", insérer les mots : "d'un gardien assermenté d'immeubles ou de
groupe d'immeubles".
« II. - Supprimer le second alinéa du texte proposé par cet article pour
remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal. »
L'amendement n° 213 rectifié, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes M. André
et Blandin, MM. Badinter, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur
et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article
pour remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal, remplacer
les mots : "des enfants" par les mots : "des descendants en ligne directe".
»
L'amendement n° 211, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes M. André et
Blandin, MM. Badinter, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et
les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article
pour remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal, remplacer
les mots : "cinq ans d'emprisonnement et 75 000 EUR d'amende" par les mots :
"trois ans d'emprisonnement et 45 000 EUR d'amende". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n°
209.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
L'objet de cet amendement vient d'être exposé par Louis Mermaz, dans son
intervention sur l'article 20.
Pourquoi changer la loi, alors que les personnes menacées sont toujours les
mêmes et que, de surcroît, l'article 433-3 du code pénal vise depuis longtemps
« toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une
mission de service public... » Cela suffit pour beaucoup ! Par conséquent, à
quoi bon ajouter des éléments tombant déjà sous cette dénomination ?
Par ailleurs, j'aimerais qu'on nous donne de la jurisprudence ! Qu'on nous
dise quelles plaintes - combien et devant quels tribunaux -, ont été déposées
au cours des six derniers mois par exemple, pour savoir de quoi on parle ! On
s'expose en effet au risque d'une inflation de plaintes, surtout si l'on ne
s'entoure plus des précautions jusqu'à présent acceptées par tout le monde : il
fallait en effet que la demande soit réitérée pour s'assurer qu'elle pouvait
être prise au sérieux.
En quoi l'article 433-3 du code pénal, tel qu'il est actuellement rédigé,
a-t-il gêné la poursuite de faits dont vous auriez eu connaissance ? Ce n'est
pas sérieux de nous dire qu'il faut qu'il en soit ainsi sans nous donner
d'étude d'impact à l'appui ! Nous n'avons pas la moindre donnée statistique, et
nous vous proposons de gagner du temps en votant notre amendement de
suppression de l'article.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Quel formidable débat ! Depuis quarante-huit heures, les
membres du groupe socialiste s'évertuent à nous expliquer que tout va bien et
qu'il n'y a aucun problème ! « Pourquoi donc changer ce qui fonctionne
parfaitement ? », se demandent-ils.
Sur les dispositions relatives à la prostitution, ils déposent un amendement
de suppression ! Sur celles qui concernent les gens du voyage, nouvel
amendement de suppression ! Et, alors que le Gouvernement vient, en toute bonne
foi, attirer l'attention sur la recrudescence - plus 135 % ces dernières années
- des agressions contre les policiers, contre les gendarmes, contre les
pompiers, M. Dreyfus-Schmidt défend un amendement de suppression...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ah ! Non ! Non !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
... puisqu'il n'y a besoin de rien.
Il vient de nous réclamer de la jurisprudence. A croire que nous sommes des
intellectuels, discutant doctement en chambre, pendant qu'à Strasbourg, dans le
quartier de Hautepierre, voilà quinze jours, des pompiers ont été pris à
partie, frappés, injuriés, blessés dans un véritable guet-apens !
MM. Gérard Cornu et Robert Del Picchia.
Eh oui !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ce n'est pas de cela qu'il s'agit !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Tous les jours, les organisations syndicales de la police me
transmettent le témoignage de gardiens de la paix, gagnant un petit salaire de
la fonction publique, qui n'en peuvent plus !
Il est temps d'envoyer un signal fort : ceux qui s'attaqueront aux forces de
l'ordre devront en assumer l'entière responsabilité !
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il ne s'agit pas de cela !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Et je souhaiterais que, de toutes les travées de l'assemblée,
nous puissions adresser aux gendarmes, aux pompiers, aux policiers le message
que la représentation nationale, unanime, est décidée à les défendre.
MM. Gérard Cornu et M. Robert Del Picchia.
Très bien !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
J'ajoute, monsieur Dreyfus-Schmidt,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est une menace !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
... que nous élargissons cette protection aux familles. Nous
avons en effet une grande ambition : que ce qui s'est passé voilà quinze jours
au domicile d'un policier, où des voyous sont venus avec un fusil pour tirer au
travers de la porte, soit considéré comme inadmissible. Il faut que l'on sache
que, lorsqu'on s'attaquera à l'épouse d'un policier, à celle d'un gendarme ou à
la famille d'un pompier, cela coûtera cher, car nous ne sommes pas décidés à
accepter de tels agissements !
MM. Gérard Cornu et M. Robert Del Picchia.
Très bien !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Tel est le message que nous voulons clairement envoyer !
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
Et plus nombreux nous serons à défendre cette position, mieux cela sera !
Monsieur Dreyfus-Schmidt, vous m'avez interrogé et je vous ai répondu !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Mais il s'agit de menaces !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Permettez-moi de vous dire que je n'accepte pas que des menaces
soient proférées à l'encontre d'un gardien de la paix, d'un gendarme ou de qui
que ce soit, et ce pour une raison simple : ma conception du rôle du ministre
de l'intérieur est telle que, quand je donne l'ordre à des gens d'intervenir,
je m'en sens responsable. Et notre devoir à nous tous, c'est de faire en sorte
que ceux qui, en notre nom, appliquent la loi et la font respecter soient
protégés, y compris des menaces de la part des voyous.
(M. Robert Del Picchia applaudit.)
Voilà ce que nous voulons faire avec
cet amendement.
J'avais cru naïvement qu'il nous était possible de nous rassembler sur un
objectif réunissant, au-delà de la droite, l'ensemble de la représentation
nationale. Je suis désolé de voir que, malheureusement, c'est un autre
raisonnement que vous avez choisi de tenir.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 210.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Evidemment, il est dommage que nos collègues Georges Othily et Alain Vasselle,
ce dernier ayant accepté d'ajouter son nom aux signataires des amendements,
n'aient pas été là pour défendre leurs très nombreux textes tendant à doubler
les peines de ce projet de loi.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Mais contentez-vous du texte ! Pourquoi critiquer ainsi ? Cela
suffit !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Vous permettez que nous nous expliquions ?
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Alors, de ce côté-là, il n'y a pas de problème !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Et, précisément, vous y venez ! Parce que laisser croire qu'il puisse y avoir
qui que ce soit dans cette assemblée, comme dans l'autre, qui ne demande pas
que soient poursuivis et punis ceux qui s'en prennent sans raison aucune aux
policiers
(Vives exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)...
Vous permettez que je poursuive, mes chers collègues ?
M. Gérard Cornu.
Qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Permettez ! Les exemples de ceux qui se font attaquer - les pompiers, les
médecins et vous en oubliez - sont évidemment inadmissibles !
M. Gérard Cornu.
Qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Voulez-vous bien m'écouter ? Tout cela se développe sous M. Sarkozy !
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
Il vient d'arriver !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Cela se voit de plus en plus !
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Je suis obligé de le constater !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
C'est de ma faute !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je ne dis pas que c'est de votre faute ! Je le constate ! Et nous ne vous
avons absolument pas critiqué ! Et nous n'avons évidemment pas demandé la
suppression des nombreux articles du code pénal qui visent à poursuivre ceux
qui s'en prennent, de la manière que vous avez dénoncée et que nous dénonçons
avec vous, à des gens qui viennent leur porter secours ! Il ne s'agit pas du
tout de cela ici ! Il s'agit de la menace et de rien d'autre !
Le procédé qui consiste à nous faire dire autre chose que ce que nous avons
dit est parfaitement inadmissible !
M. Jean-Claude Carle.
Vous êtes une victime !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous vous demandons, simplement, monsieur le ministre, de nous fournir des
statistiques en ce qui concerne les menaces !
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
Il n'y a qu'à lire le journal !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous vous demandons quelle est la jurisprudence en cette matière, de manière
que nous sachions s'il y a lieu ou non de modifier les textes.
Or vous ne dites rien à ce propos ! Vous nous parlez des attaques et des voies
de fait, c'est-à-dire des points sur lesquels nous ne sommes absolument pas en
désaccord avec vous ! Aucunement !
Soyez gentil, monsieur le ministre, lorsque nous vous interogeons sur un
problème précis, ne nous répondez pas sur un autre pour conclure que nous ne
sommes pas de votre avis...
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
C'est une noyade !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
... alors que, justement, sur cet autre problème, nous ne sommes pas en
désaccord !
M. le président.
Monsieur Dreyfus-Schmidt, veuillez défendre l'amendement n° 210.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
L'amendement n° 210 est un amendement de repli.
Les peines d'emprisonnement qui sont prévues - deux ans, puis cinq ans - sont,
de toute façon, des maximums. Là encore, si on nous disait quelle est la
jurisprudence, nous pourrions savoir...
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur Dreyfus-Schmidt
?
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Bien sûr ! Nous sommes des libéraux !
M. le président.
La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Je suis confus de vous interrompre, monsieur Dreyfus-Schmidt,
mais je tiens à vous donner les éléments que vous me demandez !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Très bien !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Les statistiques d'outrages - on est bien dans la menace -
...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ah non !
(M. le ministre et les sénateurs du RPR s'esclaffent.)
L'outrage et la
menace, ce n'est pas la même chose, vous le savez bien !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
C'était une noyade ; cela va devenir un naufrage !
(Rires sur les travées du RPR.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Mais enfin, est-ce que l'outrage et la menace, c'est la même chose ?
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Bien sûr !
Les faits d'outrage ont augmenté, de 1996 à 1997, de 16 %, de 1998 à 1999, de
13 %, de 1999 à 2000, de 15 %, de 2000 à 2001, de 7 %. Voilà les faits, voilà
les chiffres !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Alors, ça va mieux !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Ça va mieux ?
(Rires sur les mêmes travées.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Eh bien oui, d'après ce que vous dites, ça baisse !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Noyade, naufrage, désastre, monsieur Dreyfus-Schmidt !
(Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Gérard Cornu.
C'est le
Titanic
!
M. le président.
Veuillez poursuivre, monsieur Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Tout le monde sait ici, je pense, que l'outrage et la menace sont deux choses
différentes.
M. Robert Bret.
Un avocat devrait le savoir !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il me semble !
Là, nous parlons de la menace. Monsieur le ministre, je vous ai demandé les
chiffres en ce qui concerne les menaces.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
C'est trop triste !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Dans le cas qui nous occupe, nous trouvons que deux ans d'emprisonnement
suffisent. Dans l'autre cas, il y a lieu de réduire l'amende en conséquence. Il
faut que les peines soient proportionnées. En quoi ne le sont-elles pas
actuellement ?
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Drefyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous aimerions savoir quelle est la jurisprudence, quelles sont aujourd'hui
les peines effectivement prononcées. Si elles étaient rappelées, chacun
pourrait constater que les peines actuellement prévues sont amplement
suffisantes !
M. le président.
L'amendement n° 114 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Michel Charasse, pour défendre l'amendement n° 93
rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Qui est présenté par M. Charasse seul !
M. Michel Charasse.
Non, cet amendement est cosigné par les membres du groupe socialiste.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Non ! C'est une erreur !
M. Michel Charasse.
Ah bon ? Eh bien, soit : j'en suis le seul signataire.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° 93 rectifié
bis.
Veuillez poursuivre, monsieur Charasse.
M. Michel Charasse.
C'est également un amendement de repli, comme celui que vient de présenter M.
Dreyfus-Schmidt.
Monsieur le ministre, à partir du moment où vous énumérez à l'article 20 toute
une série d'agents publics qui sont en charge de l'ordre public, il me
paraîtrait normal de mentionner également les maires et les adjoints, qui sont
officiers de police judiciaire et qui sont chargés de l'ordre et de la sécurité
dans leur commune.
Mon collègue M. Dreyfus-Schmidt m'a répondu tout à l'heure à propos de la
ville de Paris ; je voudrais lui communiquer quelques éléments en ce qui
concerne mon département.
Depuis cinq ans ou six ans, l'association des maires du Puy-de-Dôme a décidé,
grâce au texte que nous avons voté, après que nous l'avons d'ailleurs
nous-mêmes proposé, de se porter systématiquement partie civile dans tous les
cas de plainte déposée par un maire ou un adjoint du département pour outrages,
menaces ou violences.
Dans mon département, l'association des maires prend tout en charge, alors
que, M. Fauchon s'en souvient, nous avons voté, dans la loi qui porte son nom,
une disposition, dont nous avions également pris l'initiative, prévoyant que
c'était l'Etat qui devait prendre en charge les frais pour les maires et les
adjoints puisqu'ils sont, comme les fonctionnaires, des agents de l'Etat.
Cependant, l'Etat ne s'est jamais manifesté jusqu'à présent, en tout cas dans
mon département.
Bref, dans le Puy-de-Dôme, il y a, chaque année, dix ou douze affaires
judiciaires pour menaces, outrages ou violences ; il y en a ainsi eu six entre
le 1er janvier et le 1er juillet de cette année. Pour chaque semestre, on en
compte en moyenne deux pour menaces. Cela prouve, au passage, que nous avons
déjà la possibilité de poursuivre !
Les peines prononcées sont généralement, pour l'association des maires, le
franc symbolique et, pour le maire ou l'adjoint concerné, des
dommages-intérêts.
Dans une affaire récemment jugée, le tribunal a accordé 6 000 euros de
dommages-intérêts, ce qui n'est quand même pas mal.
Je dois dire à M. Dreyfus-Schmidt qu'on s'est aperçu que, souvent, quand des
maires qui ont été menacés minimisent les choses ou cherchent l'apaisement et
ne portent pas plainte, la menace est renouvelée et la violence physique suit à
plus ou moins brève échéance.
M. Maurice Ulrich.
Evidemment !
M. Michel Charasse.
En ce qui concerne le Puy-de-Dôme, l'association des maires a gagné toutes les
instances qu'elle a engagées depuis cinq ou six ans, et, je vous l'ai dit, elle
se porte systématiquement partie civile.
Tout cela tend à montrer que nous disposons déjà des textes nécessaires. Mais
le ministre veut aller plus loin. Le groupe socialiste considère que les textes
existants suffisent. Cependant, dans l'hypothèse où cet article 20 serait
maintenu, qu'au moins on n'oublie pas de citer les maires et les adjoints, qui
sont en charge de l'ordre public et qui courent dans leur commune - c'est
particulièrement vrai pour les petites communes - les mêmes risques que les
policiers, les gendarmes et autres agents de l'autorité publique.
Je conclus en indiquant simplement que, juste avant le congrès des maires de
France, il est important que l'on sache que les sénateurs socialistes n'ont pas
signé cet amendement !
(M. le ministre et M. le rapporteur sourient.)
M. Jacques Mahéas.
Et si c'était parce qu'il est inutile ?
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 23 rectifié
bis
.
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
L'article 20 du projet de loi inscrit les gardiens
assermentés d'immeubles parmi les personnes protégées en cas de menace de
commettre un crime ou un délit contre elles.
Cette disposition me paraît insuffisante. En effet, les gardiens assermentés,
c'est-à-dire ceux qui peuvent dresser procès-verbal pour certaines
contraventions, sont devenus très rares. Il convient donc de protéger également
les gardiens d'immeubles sociaux, qui ont des conditions de travail extrêmement
difficiles.
M. le président.
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 155.
M. Robert Bret.
Nous souhaitons réintégrer dans la nouvelle rédaction de l'article 433-3 du
code pénal les éléments constitutifs de l'infraction présentes dans la
rédaction actuelle.
En effet, dans la rédaction actuelle, l'article 433-3 prévoit que la menace
doit être soit réitérée soit matérialisée par un écrit, une image ou tout autre
objet. La nouvelle rédaction proposée ne ferait plus référence qu'à une simple
menace proférée à l'encontre de toute personne dépositaire de l'autorité
publique ou de sa famille.
Nous regrettons encore une fois que les éléments objectifs nécessaires pour
caractériser une infraction soient absents de ce projet de loi. Le seul fait de
proférer une menace à l'encontre de quelqu'un ne doit pas suffire à punir une
personne de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
Ce que nous redoutons, monsieur le ministre, c'est l'arbitraire que permet
cette suppression d'éléments objectifs qui sont indiscutablement nécessaires à
la qualification de l'infraction.
C'est pourquoi, si nous sommes en accord avec le fait d'étendre la protection
de personnes exerçant une fonction publique à leurs proches, nous souhaitons,
par notre amendement, réintégrer les éléments objectifs caractérisant la menace
proférée à l'encontre de ces personnes.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour présenter les amendements n°s 212,
213 rectifié et 211.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il faut tout de même que nous nous expliquions sur cette question de la
menace.
La menace de commettre un crime ou un délit, c'est en soi un délit, quelle que
soit la personne menacée. Or, ici, monsieur le ministre, vous recherchez une
protection particulière pour toute une série de personnes que vous ajoutez à la
liste qui existe déjà.
Je profite d'ailleurs de l'occasion qui m'est ici donnée pour m'expliquer sur
l'amendement de notre ami Michel Charasse. Les maires figurent bien évidemment
déjà sur cette liste ! Ils font partie, comme leurs adjoints ou ceux qui les
remplacent, des personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargés d'une
mission de service public. Alors, pourquoi les ajouter à cette liste ? Parce
qu'il va y avoir le congrès des maires ? Franchement, laissons cela à la droite
! Nous n'avons pas besoin, nous, de chercher des applaudissements qui ne sont
pas mérités.
(Exclamations amusées sur les travées du RPR.)
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Merci ! Quelle habilité ! Il faut vraiment que les socialistes
gardent M. Dreyfus-Schmidt !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Si l'amendement tendant à la suppression de la nouvelle liste n'est pas
adopté, nous ne voyons pas d'inconvénient à y ajouter, à titre subsidiaire «
les gardiens d'immeubles ». C'est vrai, il peut y avoir des problèmes. Je ne
suis d'ailleurs pas sûr que, même s'il n'y a pas de réitération, ce soit le
meilleur moyen d'arranger les choses. En tout cas, nous vous demandons de ne
pas leur faire un sort spécial et de les inclure dans la liste elle-même. La
commission en était d'accord, si mes souvenirs sont exacts, et je n'ai donc pas
besoin de donner d'autres explications.
Avec l'amendement n° 213 rectifié, nous voulons vous faire remarquer que vous
avez oublié les petits-enfants et les arrière-petits-enfants. Il n'y a pas de
raison de ne pas faire figurer les descendants en ligne directe, de manière à
n'oublier personne.
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission.
Et les ascendants ?
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Les familles des gendarmes - et l'on sait combien l'ancienne
majorité a eu affaire à eux puisqu'ils sont descendus dans la rue ! -
apprécieront beaucoup l'humour de M. Dreyfus-Schmidt.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Jacques Mahéas.
Quel humour ? Il ne s'agit pas du tout de faire de l'humour !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Et la réserve civile ?
M. le président.
Veuillez présenter l'amendement n° 211, monsieur Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
S'agissant de l'amendement n° 211, je me suis expliqué tout à l'heure sur un
amendement qui avait un objet similaire.
Nous pensons que, là où sont prévus cinq ans d'emprisonnement, trois ans
paraissent suffisants, en tout cas proportionnés à ce qui ne sont tout de même
que des menaces, sans passage à l'acte.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
L'amendement n° 209 vise à supprimer l'article 20, qui étend
le champ d'application de l'article 433-3 du code pénal, lequel punit les
menaces proférées à l'encontre de certaines personnes.
Le projet de loi étend la protection aux familles des personnes chargées d'une
mission de service public. Il est tout à fait inopportun de supprimer cette
extension, comme l'a remarqué M. le ministre, et la commission émet donc un
avis défavorable.
Dans l'amendement n° 210, il s'agit de limiter les peines encourues en cas de
menaces proférées contre certaines personnes chargées d'une mission de service
public. Le texte du projet de loi ne fait que reprendre les peines actuellement
prévues, et l'on ne perçoit pas la raison pour laquelle les auteurs de
l'amendement veulent réduire les peines. La commission est donc très
défavorable à cet amendement. L'amendement n° 93 rectifié
bis
me paraît
très intéressant, et je voudrais m'associer à l'hommage que M. le ministre de
l'intérieur a rendu aux élus !
Je me permets simplement de suggérer à M. Charasse de rectifier son amendement
de manière à écrire : « une personne investie d'un mandat électif public », ce
qui permettrait de viser tous les élus qui sont menacés dans leurs fonctions et
qui méritent effectivement d'être défendus.
MM. Roger Karoutchi et Gérard Cornu.
Très bien !
M. Michel Charasse.
Tout à fait d'accord avec cette rectification !
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° 93 rectifié
ter
, qui est ainsi
libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article
pour remplacer le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal, après les
mots : "proférée à l'encontre" insérer les mots : "d'une personne investie d'un
mandat électif public". »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
L'amendement n° 155 vise à rétablir l'obligation de
réitération ou de manifestation par un écrit dans l'article punissant les
menaces proférées contre certaines personnes.
Tout montre que l'infraction n'est aujourd'hui jamais punie tant les éléments
constitutifs sont difficiles à réunir. Pourtant, certaines personnes, notamment
les policiers, sont soumises à des menaces qui justifieraient une sanction
ferme. La commission a donc émis un avis très défavorable.
L'amendement n° 212 sera satisfait par l'adoption de l'amendement n° 23
rectifié
bis
de la commission.
L'amendement n° 213 rectifié vise à protéger non seulement les enfants, mais
également les petits-enfants ; on ne peut qu'y être favorable mais je souscris
tout à fait aux propos du ministre de l'intérieur.
L'amendement n° 211 a pour objet de limiter les peines encourues en cas de
menaces proférées contre certaines personnes chargées d'une mission de service
public. Le texte du projet de loi ne fait que reprendre les peines actuellement
prévues et l'on ne perçoit pas les raisons pour lesquelles les auteurs de
l'amendement veulent réduire les peines. La commission est donc très
défavorable à cet amendement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il y aura du monde en prison !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Je partage l'avis de la commission sur l'ensemble des
amendements.
M. le président.
La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'amendement
n° 209.
M. Jacques Mahéas.
Je suis surpris de la tournure des débats. Monsieur le ministre, voilà
quelques années, vous avez écrit un livre intitulé,
Au bout de la passion,
l'équilibre.
Aujourd'hui, son titre serait :
Au bout de la passion, le
déséquilibre.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Quel talent, vous avez vraiment le sens de la formule !
M. Jacques Mahéas.
Je vous remercie de reconnaître le talent de l'opposition, laquelle a le don
parfois de vous exaspérer. Mais, dans un débat démocratique, il est logique
qu'une opposition s'exprime.
Par ailleurs, vous avez pris cette fâcheuse habitude de nous faire dire ce que
l'on n'a pas dit.
M. Roger Karoutchi.
Et que vous pourriez dire !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Et que vous pensez !
M. Jacques Mahéas.
Plutôt que d'essayer de lire dans nos pensées, écoutez plutôt nos propos sans
les interpréter.
Bien évidemment, nous reconnaissons tout à fait que, lorsqu'un dépositaire de
l'ordre public est agressé, blessé ou soumis à quelque difficulté
relationnelle, des sanctions importantes, sans être disproportionnées, sont
nécessaires. Mais est-il bien raisonnable de vouloir punir de sanctions
extrêmement sévères des excès de langage ?
Dans nos banlieues, vous le savez fort bien, peut-être faut-il s'opposer à
certains excès de langage, mais deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros
d'amende constituent déjà une sanction excessive et irrationnelle.
Je souhaiterais donc que l'on revienne à des propositions beaucoup plus
équilibrées, qui seraient par là même plus efficaces. Comme vous-même et votre
directeur adjoint de cabinet l'avez dit à propos des nomades, il s'agit moins
d'appliquer les mesures contenues dans la loi que de s'en servir comme d'une
épée de Damoclès.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le sénateur
?
M. Jacques Mahéas.
Je vous en prie, monsieur le ministre.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
J'ai trop de considération pour vous, monsieur Mahéas, pour
vous laisser persévérer dans l'erreur.
Permettez-moi de vous citer le code pénal actuel : « Est punie de deux ans
d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende la menace... »
M. Jacques Mahéas.
Oui !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Il s'agit, je le répète, du code pénal en vigueur.
Le seul changement qu'apporte mon texte de loi actuellement - si vous vous
étiez donné la peine de le lire et donc de le comprendre -, concerne la
réitération et non l'échelle des sanctions.
(Rires sur les travées du RPR,
des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
Veuillez poursuivre, monsieur Mahéas.
M. Jacques Mahéas.
Il convient de modifier cette échelle de sanctions parce qu'elle n'est jamais
réellement appliquée, vous le savez quand même fort bien !
M. Gérard Cornu.
C'est la même chose !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Ça ne change rien !
M. Jacques Mahéas.
A vouloir trop faire en prévoyant de punir effectivement, comme vous l'avez
indiqué, les auteurs de ces infractions de deux ans d'emprisonnement et de 30
000 euros d'amende, vous rendez impossible l'application de la mesure.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Reconnaissez que vous vous êtes trompé !
M. Jacques Mahéas.
Quand un jeune menace un policier avec une formule du type « Je vais te crever
! », la sanction est-elle appliquée ? Evidemment non.
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
Ce sont les peines maximales que l'on veut changer.
M. le président.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. le ministre, quand il avait en main le code pénal, parlait de la menace
simple, que j'ai évoquée tout à l'heure.
Je constate que, s'agissant de la menace simple, vous ne proposez pas de
supprimer la réitération ou la matérialisation par un écrit, une image ou par
tout autre objet. Là, la menace de commettre un crime ou un délit contre les
personnes dont la tentative est punissable, c'est-à-dire contre M.
Tout-le-Monde, est punie de six mois d'emprisonnement.
La peine est portée à trois ans s'il s'agit d'une menace de mort, étant
entendu qu'une telle menace doit être proférée avec ordre de remplir une
condition. Ça, vous n'y touchez pas : on protège certains particulièrement
mais, pour le tout-venant, c'est-à-dire les gens d'en bas, vous laissez les
choses comme elles sont.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 209.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 210.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 93 rectifié
ter.
M. Robert Bret.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 23 rectifié
bis.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 212 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 155.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'amendement
n° 213 rectifié.
M. Jacques Mahéas.
Sur la forme, monsieur le ministre, je n'ai pas du tout apprécié votre
intervention vis-à-vis de mon camarade M. Dreyfus-Schmidt. Je le connais mieux
que vous, il ne faisait pas preuve d'ironie.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Si !
M. Jacques Mahéas.
Non, il ne s'agissait pas d'ironie. Les petits-enfants doivent aussi être
protégés. Je vous demande d'en prendre note.
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission.
Et les grands-parents ?
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 213 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 211.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 20, modifié.
M. Robert Bret.
Le groupe CRC s'abstient.
(L'article 20 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 20