SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2002
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 148, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Beaudeau, Beaufils et
Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer,
Foucaud et Le Cam, Mmes Luc et Mathon, MM. Muzeau, Ralite et Renar et Mme
Terrade, est ainsi libellé :
« Supprimer le texte proposé par l'article 15 pour l'article 706-56 du code de
procédure pénale. »
L'amendement n° 10 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la
commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par l'article 15 pour l'article 706-56
du code de procédure pénale :
«
Art. 706-56. -
I. - L'officier de police judiciaire peut procéder ou
faire procéder sous son contrôle, à l'égard des personnes mentionnées au
premier, au deuxième ou au troisième alinéa de l'article 706-54, à un
prélèvement biologique destiné à permettre l'analyse d'identification de son
empreinte génétique.
« Pour qu'il soit procédé à cette analyse, l'officier de police judiciaire
peut requérir toute personne habilitée dans les conditions fixées par l'article
16-12 du code civil, sans qu'il soit toutefois nécessaire que cette personne
soit inscrite sur une liste d'experts judiciaires ; dans ce cas, la personne
prête alors par écrit le serment prévu au deuxième alinéa de l'article 60.
« II. - Le fait de refuser de se soumettre au prélèvement biologique prévu au
premier alinéa du I du présent article est puni de six mois d'emprisonnement et
de 7 500 EUR d'amende.
« Lorsque ces faits sont commis par une personne condamnée pour crime, la
peine est de deux ans d'emprisonnement et 30 000 EUR d'amende.
« Nonobstant les dispositions des articles 132-2 à 132-5 du code pénal, les
peines prononcées pour les délits prévus au présent article se cumulent, sans
possibilité de confusion, avec celles que la personne subissait ou celles
prononcées pour l'infraction ayant fait l'objet de la procédure à l'occasion de
laquelle les prélèvements devaient être effectués. »
Le sous-amendement n° 272, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes André et
Blandin, MM. Badinter, Frimat, Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et les
membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début du premier alinéa du I du texte proposé par
l'amendement n° 10 rectifié pour l'article 706-56 du code de procédure pénale
:
« Le procureur de la République peut autoriser, d'office ou sur sa demande, un
officier de police judiciaire à faire procéder, à l'égard... »
Le sous-amendement n° 85, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le premier alinéa du II du texte proposé par l'amendement
n° 10 rectifié pour l'article 706-56 du code de procédure pénale :
« En cas de refus de se soumettre au prélèvement biologique prévu au premier
alinéa du I du présent article, il y est procédé d'office sur décision du juge
de la liberté et de la détention et la personne est punie de six mois
d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. »
L'amendement n° 84, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le premier alinéa de l'article 706-56 du code de
procédure pénale :
« En cas de refus de se soumettre à un prélèvement biologique destiné à
permettre l'analyse d'identification de son empreinte génétique, la personne
visée aux premier, deuxième ou troisième alinéas de l'article 706-54 y est
soumise d'office par ordonnance du juge des libertés et de la détention et est
punie de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. »
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 148.
M. Robert Bret.
Cet amendement vise à supprimer purement et simplement le texte que vous
proposez pour l'article 706-56 du code de procédure pénale, lequel tend à
sanctionner le refus de se soumettre à un prélèvement biologique par une peine
de six mois de prison et de 7 500 euros d'amende.
D'une part, nous estimons que cette disposition donne beaucoup trop de pouvoir
à la police. Je dis bien à la police, car la décision de procéder à un
prélèvement biologique sur une personne qui n'est que suspecte, à l'encontre de
laquelle il n'existe que des indices, relèvera uniquement, pour l'essentiel,
d'un officier de police judiciaire, pouvant agir d'office.
D'autre part, cette disposition contrevient au principe de la présomption
d'innocence.
M. Jean-Jacques Hyest.
Ah bon ?
M. Robert Bret.
En effet, l'officier de police judiciaire peut d'office ordonner le
prélèvement d'empreintes génétiques sur une personne encore présumée
innocente.
M. Jean-Jacques Hyest.
Et alors ?
M. Robert Bret.
Raison de plus pour exiger l'existence à son encontre, cher monsieur Hyest,
d'indices graves et concordants, le simple fait qu'il y ait une raison
plausible de la soupçonner d'avoir commis une infraction ne pouvant suffire.
Une personne innocente pourrait donc être génétiquement fichée sans que la loi
ait fixé la durée de conservation de ses empreintes génétiques.
Même si le décret en Conseil d'Etat qui doit fixer les modalités de
conservation des empreintes contenues dans le fichier sera pris après avis de
la CNIL, nous estimons que les garanties données par cet article, s'agissant de
personnes dont la culpalité n'a pas été encore prononcée, sont
insuffisantes.
Ces mêmes personnes, si elles refusent de se soumettre à un prélèvement
biologique, n'en risqueront pas moins six mois d'emprisonnement et 7 500 euros
d'amende !
Elles se trouveront sur le même plan que les personnes déjà condamnées, d'où
le risque que des erreurs judiciaires informatiques se produisent. La CNIL en a
d'ailleurs déjà relevé beaucoup trop depuis une dizaine d'années, ce qui est
loin de nous rassurer.
En résumé, nous estimons que la sanction du refus de se soumettre à des
prélèvements biologiques constitue une atteinte au principe de la présomption
d'innocence.
M. Hilaire Flandre.
Et la recherche du taux d'alcoolémie ?
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 10
rectifié.
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
Cet amendement, qui vise à compléter les dispositions du
projet de loi sur le fichier des empreintes génétiques, pose le principe de la
possibilité de procéder à un prélèvement biologique sur les personnes suspectes
ou condamnées.
Il prévoit que l'analyse n'est pas nécessairement réalisée par une personne
inscrite sur une liste d'experts judiciaires.
Cet amendement est nécessaire. Avec l'extension du fichier, 500 000 empreintes
par an pourraient théoriquement y être incluses, contre 10 000 au total
actuellement.
Le travail d'analyse d'une empreinte est, en fait, relativement simple puisque
l'essentiel est fait par une machine.
En tout état de cause, un agrément est exigé au préalable pour pouvoir
procéder à ce type d'analyses. Cet agrément est donné par une commission placée
auprès du garde des sceaux.
Pour bénéficier de l'agrément, il faut être titulaire d'un ou plusieurs
diplômes limitativement énumérés.
En outre, les laboratoires où sont effectuées les analyses doivent être dotés
d'équipements très spécifiques.
Lorsqu'elle l'estime utile, la commission d'agrément peut entendre les
personnes candidates.
Cet amendement prévoit donc d'importantes garanties.
M. le président.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter le sous-amendement
n° 272.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Selon M. le rapporteur, inutile de recourir à un expert, une persone habilitée
suffit. Il nous parle d'une « machine », et j'avoue ne pas très bien comprendre
ce qu'il veut dire.
Une personne habilitée - dommage que le premier alinéa du I du texte proposé
pour l'article 706-56 ne mentionne pas plutôt une personne compétente - peut
donc procéder à l'analyse.
M. Jean-Jacques Hyest.
Non, au prélèvement !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Au prélèvement, en effet, et je me permets de vous relire un texte que l'on
peut trouver sur le Web puisqu'on ne dispose d'aucun élément ici, sur les
risques d'erreur liés au test lui-même : « Vu la taille des échantillons
considérés, il suffirait que le laborantin éternue, perde un cil ou laisse une
goutte de sueur dans l'éprouvette pour fausser le résultat. »
MM. Jean Chérioux et Dominique Braye.
Allons !
Un sénateur du groupe du RPR.
Encore ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Savez-vous de quoi vous parlez ?
M. Dominique Braye.
Oui !
M. Bruno Sido.
Autant que vous !
C'est incroyable ! Toujours à donner des leçons, ces socialistes !
Mme Nicole Borvo.
Ce n'est pas un argument : cela vous disqualifie !
M. Jean Chérioux.
Qu'est-ce que c'est que cette façon de parler !
M. Bruno Sido.
C'est insensé !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Personnellement, je ne connaissais pas le problème et j'ai donc essayé de me
renseigner. A défaut de trouver quoi que ce soit dans le rapport de la
commission,...
M. Bruno Sido.
Faux !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Vous me laissez parler, monsieur ?
M. Bruno Sido.
Non !
Mme Nicole Borvo.
Mais enfin !
M. le président.
Poursuivez, monsieur Dreyfus-Schmidt, nous gagnerons du temps !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Monsieur le président, je ne connais pas ce monsieur qui m'interrompt tout le
temps. Il n'est pas là depuis longtemps, mais il se conduit mal !
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Bruno Sido.
J'ai le droit de parler, comme vous !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je parle parce que M. le président m'a donné la parole !
M. Robert Bret.
Il ne connaît pas les usages. Il faut demander la parole, monsieur Sido !
Mme Nicole Borvo.
Oui, éclairez-nous de vos lumières !
M. le président.
Poursuivez, monsieur Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je disais donc que le premier alinéa du I proposé par la commission dit...
M. Bruno Sido.
Et il se prend pour un bon démocrate !
M. Serge Lagauche.
Ça va !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Monsieur le président, je demande dix minutes de suspension : nous ne pouvons
pas travailler dans ces conditions.
Mme Nicole Borvo.
C'est insupportable !
M. le président.
Je vous en prie, continuez !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Non !
M. le président.
Ne faites pas de provocation !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Comment, monsieur le président ?
M. le président.
Je vous en prie, continuez, monsieur Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande une suspension de dix minutes, monsieur le président.
Mme Nicole Borvo.
Suspension !
M. Dominique Braye.
Non !
M. le président.
Je vous demande de continuer, monsieur Dreyfus-Schmidt. Je ne vois pas de
raison de suspendre.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Vous me laissez injurier !
Mme Nicole Borvo.
Parfaitement !
M. le président.
Non, vous n'êtes pas injurié !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Mais si !
M. Robert Bret.
Nous l'avons ressenti comme ça aussi...
M. le président.
Monsieur Dreyfus-Schmidt, si vous souhaitez prendre la parole pour fait
personnel, vous le ferez en fin de séance.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je le sais, monsieur le président, et c'est pourquoi je ne vous l'ai pas
demandée à cette fin. Je vais tenter de poursuivre, mais je vous remercierai de
bien vouloir décompter le temps de parole dont j'ai été privé.
Selon l'amendement de la commission, « l'officier de police judiciaire peut
procéder ou faire procéder sous son contrôle... à un prélèvement biologique
».
Le moins que l'on puisse demander, c'est que le procureur de la République
puisse autoriser, d'office ou sur demande, un officier de police judiciaire à
faire procéder au prélèvement biologique. On a le temps, il n'y a pas le feu,
l'intéressé est là !
En tout état de cause, il n'y a pas de raison d'autoriser l'officier de police
judiciaire à procéder lui-même à un prélèvement biologique. Vous avez dit que
des personnes habilitées pouvaient, sans être des experts, présenter toutes les
qualités requises. Recourez au moins à ces personnes qualifiées, monsieur le
rapporteur. Ne laissez pas un officier de police judiciaire procéder lui-même à
ce prélèvement, pour lequel il n'est absolument pas formé.
C'est l'objet de ce sous-amendement, qui nous paraît marqué au coin du bons
sens.
M. le président.
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter le sous-amendement n° 85
ainsi que l'amendement n° 84.
M. Michel Charasse.
Le sous-amendement n° 85 et l'amendement n° 84 sont identiques. J'avais pensé
suggérer une formule de prélèvement d'office en cas de refus, ce qui n'excluait
pas l'amende, mais je crois que la commission n'y est pas très favorable et,
après avoir réfléchi, je reconnais que l'on a d'autres moyens de le faire. Il
suffit de tirer un peu les cheveux du gars, de lui en arracher trois, et ça
marche, sans que cela puisse être qualifié de violence abominable !
(Rires.)
M. Dominique Braye.
Réagissez, monsieur Dreyfus-Schmidt !
M. Michel Charasse.
En conséquence, monsieur le président, et pour gagner du temps, je retire le
sous-amendement et l'amendement.
M. le président.
Le sous-amendement n° 85 et l'amendement n° 84 sont retirés.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 272 et sur
l'amendement n° 148 ?
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
Le sous-amendement n° 272 vise à interdire aux officiers de
police judiciaire de procéder d'office à des relevés d'empreintes
génétiques.
Prévoir une demande systématique au procureur de la République serait
ingérable. De toute façon, les insertions d'empreintes au fichier seront
mentionnées dans le dossier de la procédure, de sorte que le procureur de la
République pourra exercer un contrôle.
Aller plus loin reviendrait à faire perdre toute efficacité au dispositif.
La commission a donc émis un avis défavorable sur le sous-amendement n°
272.
L'amendement n° 148 tend, quant à lui, à supprimer purement et simplement la
sanction prévue en cas de refus de se soumettre à un prélèvement biologique.
Il convient de rappeler qu'une telle sanction est déjà prévue en cas de refus
de se soumettre à un prélèvement d'empreintes digitales, sans que cela ait
jamais été contesté.
La commission a donc également émis un avis défavorable sur l'amendement n°
148.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier,
secrétaire d'Etat.
S'agissant d'abord de l'amendement n° 148, j'espère
que MM. Fiterman et Gayssot ne liront pas nos débats. Imaginons un instant ce
qu'ils pourraient penser !
En effet, un automobiliste qui, après avoir provoqué un accident grave, refuse
de se soumettre à un contrôle - par éthylomètre ou prise de sang - peut être
puni de deux ans d'emprisonnement, et ces anciens ministres des transports
n'ont jamais vu à cela une quelconque atteinte aux libertés fondamentales.
Mme Nicole Borvo.
Cela n'a rien à voir !
M. Robert Bret.
Comparaison n'est pas raison !
M. Pierre Bédier,
secrétaire d'Etat.
Certes, encore que, en l'occurrence, nous sommes bien
dans la même logique.
Mme Nicole Borvo et M. Robert Bret.
Pas du tout, et vous le savez bien !
M. Pierre Bédier,
secrétaire d'Etat.
Donc, cet amendement ne peut être retenu. Il faut
savoir raison garder !
En revanche, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 10
rectifié. Celui-ci permet de clarifier la procédure, et même de la simplifier.
Il améliore donc le texte, et j'en remercie encore la commission.
S'agissant du sous-amendement n° 272, les arguments avancés par M. le
rapporteur sont tout à fait pertinents : ce sont les bons. Je n'y ajouterai
qu'une remarque, si vous voulez bien l'entendre. Il faut bien comprendre que
les tests génétiques sont au xxie siècle ce que la prise d'empreintes digitales
a été au xxe siècle.
M. Roger Karoutchi.
Exactement !
M. Pierre Bédier,
secrétaire d'Etat.
Aujourd'hui, pour prendre des empreintes digitales, il
n'y a pas un excès de précautions. Dans le présent texte, l'intervention du
procureur de la République, notamment, offre, comme vous l'avez dit, monsieur
le rapporteur, des garanties supplémentaires. Donc, vouloir en ajouter, ce
serait se condamner à l'inefficacité. Je ne doute pas que la Haute Assemblée ne
le voudra pas. Nous émettons donc un avis défavorable sur ce sous-amendement.
(
Très bien ! sur plusieurs travées du RPR.
)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 148.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote sur le
sous-amendement n° 272.
M. Robert Bret.
Comme je l'ai dit lorsque j'ai présenté notre amendement visant à supprimer le
texte proposé pour l'article 706-56 du code de procédure pénale, nous sommes
défavorables à la sanction du refus de se soumettre à des prélèvements
biologiques, qui, à nos yeux, monsieur le secrétaire d'Etat, constituent une
violation du principe de la présomption d'innocence, ce qui n'a rien à voir
avec les accidents de la route !
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est pareil !
M. Robert Bret.
Pour autant, nous souhaitons renforcer toutes les garanties nécessaires pour
une bonne utilisation de ce fichier. A cet effet, le fait que ce soit le
procureur de la République qui autorise d'office ou sur sa demande un officier
de police judiciaire à procéder à ces prélèvements relève des garanties dont
nous souhaitons entourer l'usage du fichier des empreintes génétiques. Ce que
nous demandons, ce sont des garanties.
C'est pourquoi nous voterons en faveur de ce sous-amendement, puisqu'il
améliore le texte du projet de loi initial et de l'amendement de la commission.
Cela ne signifie pas, bien sûr, que nous serons favorables à l'ensemble de
l'article.
M. le président.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous souhaitons, et nous vous prions de nous en excuser, rectifier notre
sous-amendement pour supprimer ce qu'il y a de plus incompréhensible dans
l'amendement, à savoir le fait que ce soit l'officier de police judiciaire qui
procède lui-même au prélèvement, point sur lequel je n'ai obtenu aucune
réponse. Aussi, nous proposons de rédiger ainsi le début du texte proposé : «
Le procureur de la République peut faire procéder, à l'égard... ».
Cela me permettra au moins d'avoir une réponse sur ce point, monsieur le
rapporteur. En effet, si l'officier de police judiciaire n'est pas lui-même une
personne habilitée, il n'y a aucune raison de l'autoriser à faire procéder au
prélèvement. D'ailleurs, il vaut mieux séparer les genres, afin que celui qui
ordonne le prélèvement ne soit pas celui qui le fait.
Voilà pourquoi nous avons rectifié notre sous-amendement, pour aller à
l'essentiel et pour obtenir au moins des explications sur ce point, en espérant
que, s'ils estiment être en droit de le faire, le Gouvernement et la commission
l'acceptent.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 272 rectifié, présenté par M.
Dreyfus-Schmidt, Mmes M. André et Blandin, MM. Badinter, Frimat, C. Gautier,
Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et les membres du groupe socialiste et
apparenté, et ainsi libellé ;
« Rédiger comme suit le début du premier alinéa du I du texte proposé par
l'amendement n° 10 rectifié pour l'article 706-56 du code de procédure pénale
:
« Le procureur de la République peut faire procéder, à l'égard... »
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
(M. Nicolas Sarkozy entre dans
l'hémicycle et gagne le banc du Gouvernement.)
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Défavorable !
(Sourires.)
M. Robert Bret.
Par principe !
(Nouveaux sourires.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous demandons un scrutin public sur ce sous-amendement, monsieur le
président.
M. le président.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 272 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du
règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 310 |
Nombre de suffrages exprimés | 309 |
Majorité absolue des suffrages | 155 |
Pour l'adoption | 108 |
Contre | 201 |
La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote sur l'amendement n° 10 rectifié.
M. Bruno Sido. J'ai l'impression qu'un très grand malentendu s'est instauré dans la discussion que nous venons d'avoir sur l'article 15. En effet, comme M. le secrétaire d'Etat l'a dit, si les empreintes digitales relèvent d'une procédure du xxe siècle, les empreintes génétiques, elles, sont la procédure du xxie siècle. Pardonnez-moi, je ne suis pas juriste et j'emploie le mot « procédure » qui n'est sûrement pas approprié, ne me le reprochez pas, monsieur Dreyfus-Schmidt.
Mais, pour le parallélisme des formes, je ne sache pas que l'on prenne beaucoup de précautions pour recueillir les empreintes digitales des personnes. Quand une personne fait une demande de carte d'identité, elle appose ses empreintes digitales ; on ne demande pas les empreintes génétiques mais, après tout, il n'y aurait rien de scandaleux à les demander, au xxie siècle s'entend.
Je n'ignore pas, bien entendu, les dérives possibles, et vous avez raison d'en parler, monsieur Dreyfus-Schmidt. Vous avez évoqué des dérives futurologues. Vous avez raison, mais nous n'en sommes pas encore là. Je ne doute pas qu'au moment où le problème se posera le législateur sera là pour encadrer ces dérives.
M. Michel Charasse. Nous serons tous morts !
M. Bruno Sido. Je ne méconnais pas non plus les dérives des usages que l'on pourrait faire de ce fichier-là en particulier, et de tous les fichiers en général. Mais, que je sache, nos juges, notre police et nos gendarmes ne sont pas suspects de dérives fascistes, qu'elles soient de droite ou de gauche.
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas le débat !
M. Bruno Sido. Dans notre pays démocratique, on peut penser que l'usage de ce fichier sera le bon. Je le répète, le législateur est là pour encadrer, si des dérives sont constatées.
Aujourd'hui, nous sommes tout de même confrontés, je voudrais le rappeler, à de terribles problèmes d'insécurité - le terrorisme, la délinquance -, et les Français ont dit sans appel ce qu'ils en pensaient. Il faut donc prendre des mesures. Je considère que celles que le Gouvernement nous présentent sont bonnes, sages et appropriées.
Au demeurant, je dirai à mes collègues d'en face qu'il ne faut pas confondre arguments - quelquefois ils sont bons - et arguties, car la démocratie n'en sort pas grandie.
Par ailleurs, je n'accepte pas ce qu'a dit tout à l'heure notre honorable collègue qui siège depuis longtemps au Sénat,...
M. Dominique Braye. Trop longtemps !
M. Bruno Sido. ... qui a beaucoup d'expérience et de nombreuses choses à dire. Certes, je suis élu depuis peu, mais, pour autant, ma légitimité démocratique est égale à la sienne. J'ai sans doute moins d'expérience que lui, je suis moins savant que lui, surtout en matière juridique, ce n'est peut-être pas le cas en d'autres domaines. Il n'en demeure pas moins que nous devons tous nous respecter. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Mahéas. Ça fait vraiment avancer le débat ! M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 706-56 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
Article 16