SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 3. - Après l'article 20 du code de procédure pénale, il est créé un
article 20-1 ainsi rédigé :
«
Art. 20-1
. - Les fonctionnaires de la police nationale et les
militaires de la gendarmerie nationale à la retraite, ayant eu durant leur
activité la qualité d'officier ou d'agent de police judiciaire, peuvent
bénéficier de la qualité d'agent de police judiciaire lorsqu'ils sont appelés
au titre de la réserve civile de police nationale ou au titre d'un engagement
spécial dans les réserves de la gendarmerie nationale. Un décret en Conseil
d'Etat fixe les conditions d'application du présent article ; il précise en
particulier les exigences requises des intéressés en considération de leur
manière de servir pendant leur période d'activité et l'âge au-delà duquel ils
ne pourront plus exercer leurs fonctions. »
L'amendement n° 130, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Beaudeau, Beaufils et
Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer,
Foucaud et Le Cam, Mmes Luc et Mathon, MM. Muzeau, Ralite et Renar et Mme
Terrade, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'opposent au fait
que des retraités de la police nationale puissent être appelés au titre de la
réserve civile.
En ce qui concerne les personnels susceptibles d'être réservistes, nous
souhaitons en rester à l'état actuel du droit, qui ne prévoit cette possibilité
que pour les gendarmes. D'autant plus que la loi nous renvoie à un décret
concernant les conditions requises des intéressés, notamment en matière de
déroulement de carrière et de limite d'âge. Cela n'est pas satisfaisant.
Vous n'êtes pas sans savoir que les gendarmes ne bénéficient pas des mêmes
conditions de mise à la retraite que les policiers. En effet, comme tous les
militaires, ils ont la possibilité de prendre leur retraite après quinze ans de
service. Il n'est donc pas choquant qu'un gendarme soit appelé en tant que
réserviste, alors qu'il en va autrement pour les policiers, qui ont un régime
de retraite semblable à celui de n'importe quel autre fonctionnaire.
M. Jean-Jacques Hyest.
Pas tout à fait !
M. Robert Bret.
Par ailleurs, nous nous opposons vivement au fait que les policiers à la
retraite puissent être appelés au titre de la réserve civile, et ce pour
plusieurs raisons.
La première : les policiers à la retraite considèrent que la retraite est un
droit acquis. La réserve civile sera ainsi considérée comme une remise en cause
de ce droit, ce qui n'est pas acceptable après une vie professionnelle
consacrée le plus souvent à un travail difficile.
Deuxième raison : si nous entrons dans la logique qui consiste à recourir à
des réservistes pour assurer des missions de police judiciaire, nous
assisterons à la mise en place d'un service précaire. En effet, nous risquons
d'entrer dans un systèmee pervers qui conduira à substituer à d'éventuelles
embauches supplémentaires de jeunes policiers des policiers à la retraite
appelés au titre de la réserve civile. Le danger existe que l'on finisse par se
retrouver avec un nombre de retraités trop important.
Enfin, troisième et dernière raison : nous nous opposons à ce que les
policiers à la retraite, s'ils étaient appelés au titre de la réserve civile,
bénéficient de la qualité d'agent de police judiciaire. Il ne serait pas
normal, en effet, que des retraités assurent des missions judiciaires. En
raison de la nature même de la fonction d'officier ou d'agent de police
judiciaire, des responsabilités qu'elle implique et de l'investissement qu'elle
demande, l'action publique doit être menée par des fonctionnaires titulaires,
et non par des retraités.
Nous ne pouvons accepter l'idée que des retraités exercent des missions de
police judiciaire. C'est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, de
voter notre amendement de suppression, afin d'en rester à l'état actuel du
droit.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
La commission approuve le principe de cet article, qui tend à
restituer des pouvoirs de police judiciaire à des retraités réservistes de la
police ou de la gendarmerie nationale qui en ont bénéficié quand ils étaient en
activité.
S'agissant de la police nationale, la mise en oeuvre effective de cet article
suppose que soit créée une réserve civile de la police nationale. Votre
commission en approuve le principe car elle estime que le recours à des
réservistes peut constituer un apport efficace à la marche des services en
permettant de bénéficier de l'expérience des personnes retraitées.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Défavorable.
M. le président.
La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas.
Les auteurs de cet amendement s'opposent à ce que la qualification d'agent de
police judiciaire soit donnée à des retraités appelés au titre de la réserve
civile.
Dans le rapport écrit, M. le rapporteur lui-même s'interrogeait sur ce point,
et c'est pourquoi je souhaiterais obtenir quelques précisions.
En effet, on peut y lire : « Votre rapporteur s'est demandé s'il était
justifié de réserver l'attribution de cette qualité aux retraités. Aux termes
de la loi d'orientation, la réserve de la police nationale semble destinée à ne
s'adresser qu'aux retraités mais ce n'est pas le cas pour la gendarmerie. »
D'où ma question, qui, contrairement aux apparences, n'est pas subsidiaire :
ces réservistes seront-ils en tenue ? Je souhaiterais obtenir une réponse avant
que nous nous prononcions sur l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Quand on me pose une question, je m'efforce d'y répondre. Oui,
dans notre esprit, et c'est évident, ces réservistes seraient en tenue, et pour
faire un véritable travail. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire hier soir,
il serait en effet contradictoire de pointer, à juste raison, le retard de la
France en matière de défense civile - reconnaissons-le : notre pays n'a pas
fait, au cours des dernières années, les efforts nécessaires dans ce domaine ;
dès lors que l'on met en place une réserve civile, et on peut être pour ou on
peut être contre, c'est un vrai débat, en cas de catastrophe d'origine
terroriste ou naturelle, on serait content de disposer d'une réserve - et de ne
pas accepter que les réservistes effectuent un vrai travail. Donc, il faut
qu'ils soient en uniforme.
M. Jacques Mahéas.
Alors, reculez l'âge de la retraite !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Ce n'est faire injure à personne que de dire que, dans la
police, on ne part pas à la retraite si tard que l'on ne puisse pas être
employé en cas de catastrophe importante.
M. Jean-Pierre Vial.
C'est évident !
M. Jean Chérioux.
C'est une misérable querelle, monsieur Mahéas !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 130.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4