SEANCE DU 17 OCTOBRE 2002
M. le président.
La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation
nationale et de la recherche.
Après une rentrée scolaire réussie parce que préparée par l'ancien ministre de
l'éducation nationale Jack Lang
(Applaudissements sur les travées
socialistes. - Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et
indépendants et de l'Union centriste)
, vous avez suscité des inquiétudes
dans la communauté éducative avec des annonces intempestives et contradictoires
à propos des emplois-jeunes et des surveillants.
Maintenant que votre projet de budget pour 2003 et vos orientations sont
connus, monsieur le ministre, vous devez faire face aujourd'hui même à une
grève unitaire des personnels de l'éducation nationale, dont les inquiétudes
sont justifiées, et qui fait office d'avertissement. La réalité de votre
budget, c'est qu'après cinq ans de hausse continue sous le gouvernement de M.
Jospin, l'éducation n'est plus un domaine prioritaire.
M. René-Pierre Signé.
C'est vrai !
M. Serge Lagauche.
Cela se traduit, notamment, par l'abandon de la création de deux mille emplois
dans le second degré prévus pour 2003 dans le plan plurianuel de recrutement du
précédent gouvernement. A la suppression des cent quarante postes de chercheurs
prévus dans le plan décennal s'ajoutent cent cinquante autres postes. Vingt
mille emplois d'aides éducateurs et cinq mille six cents postes de
surveillants, pourtant essentiels à l'encadrement des élèves et au
fonctionnement des établissements, disparaissent.
Ces personnels sont tellement essentiels que vous proposez de remplacer une
partie de ces surveillants par des retraités et des mères de famille
(Exclamations amusées sur les travées socialistes)...
M. René-Pierre Signé.
Ridicule !
M. Serge Lagauche.
... allant jusqu'à tenter de faire porter aux collectivités locales la charge
de votre désengagement, comme le prouve votre récente note aux recteurs et
inspecteurs d'académie, dans laquelle vous limitez en plus l'accueil des
enfants de moins de trois ans. Où est la logique, monsieur le ministre ?
Vous prônez le dialogue social, mais vos arbitrages budgétaires ont été rendus
sans la moindre discussion sur les missions et les besoins du système éducatif
et de la recherche publique. Or ce n'est pas en réduisant l'encadrement des
élèves que vous réussirez à diminuer la violence dans les établissements ou
l'échec scolaire.
M. Alain Gournac.
La question !
M. Serge Lagauche.
Votre approche de l'illettrisme, certes intéressante, ne masquera pas vos
nombreuses insuffisances : le déchiffrage de la prochaine carte scolaire en
sera le révélateur. Ce dont notre service public de l'éducation et de la
recherche a besoin, c'est d'une politique volontariste qui se donne les moyens
de ses ambitions, et non d'une politique de régression !
Qu'allez-vous répondre alors, dans le cadre du dialogue social, à toutes ces
questions, essentielles pour l'éducation de notre jeunesse, que posent les
enseignants, les parents et les étudiants, qui craignent que ces premières
mesures ne soient le début du démantèlement de notre service public d'éducation
et de recherche ?
Plusieurs sénateurs du RPR.
La question ! La question !
M. René-Pierre Signé.
Elle coule de source !
M. le président.
Qui préside ici ? C'est vous ? Non ! Alors, laissez-lui terminer son
intervention ! Un peu de silence, s'il vous plaît !
M. René-Pierre Signé.
Bravo, monsieur le président !
M. Serge Lagauche.
Ne croyez-vous pas, monsieur le ministre - et cette question s'adresse tout
particulièrement à M. Luc Ferry - que réussir sa vie pour un jeune, c'est déjà
vivre dans un pays dont la première priorité est l'éducation ?
(Très bien !
et applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Xavier Darcos
ministre délégué à l'enseignement scolaire.
Monsieur Lagauche, je veux
d'abord vous présenter les excuses de Luc Ferry, qui reçoit en ce moment les
syndicats.
M. Bernard Piras.
Ils sont dans la rue !
M. Xavier Darcos
ministre délégué.
Je tiens à répondre à votre question aussi clairement
que possible et ne pas tourner autour du pot. Effectivement, en ce moment, des
enseignants manifestent dans la rue, moins nombreux que nous ne le
pensions,...
M. Didier Boulaud.
Selon la police !
M. Xavier Darcos
ministre délégué.
... et ils expriment une certaine inquiétude. Je
relativise cette inquiétude sachant, pour bien connaître cette maison, que,
dans les périodes qui précèdent les élections professionnelles, il est
nécessaire que les syndicats se mobilisent.
(Exclamations sur les travées
socialistes.)
M. Jacques Mahéas.
Ne nous prenez pas pour des enfants !
M. Xavier Darcos
ministre délégué.
Je relativise aussi cette manifestation, parce que je
crois que les slogans dont elle est porteuse ne correspondent pas vraiment à la
réalité.
On nous parle d'un budget d'abandon, d'un budget de régression : il n'en est
rien !
M. René-Pierre Signé.
Oui, pour les surveillants de prison !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
Je voudrais simplement vous donner quelques
chiffres.
D'abord, le budget de l'éducation nationale doit progresser, l'an prochain, de
2,2 %, ce qui est, me semble-t-il, très supérieur au taux d'inflation que l'on
peut envisager même en retenant les estimations les moins optimistes.
M. Didier Boulaud.
Nous verrons !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
Ensuite, nous avons ciblé nos actions pour nous
consacrer aux domaines qui nous paraissaient essentiels. Ainsi, alors que le
plan pluriannuel de recrutement que vous évoquiez ne prévoyait que huit cents
postes dans le premier degré, nous avons décidé, sachant que nous avions à
anticiper une évolution à la hausse de la démographie, donc de l'effectif des
cohortes d'élèves, de dépasser le chiffre prévu par mon prédécesseur : ce sont
non pas huit cents mais mille postes qui seront créés dans le premier degré.
M. Bernard Piras.
Vous en supprimez deux mille ici pour en créer mille là !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
En ce qui concerne maintenant la dignité de la
fonction, nous avons décidé d'inscrire 133 millions d'euros pour revaloriser la
fonction enseignante et pour aider les carrières. Nous pensons, en effet, qu'il
faut, en ce domaine, de la qualité et pas seulement de la quantité.
M. Didier Boulaud.
C'est pour cela que vous voulez que les mères de famille gardent les élèves
dans les collèges !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
Cette revalorisation, je le signale, représente un
progrès de 40 % par rapport à ce qui avait été envisagé par nos
prédécesseurs.
Mme Nicole Borvo.
Ce n'est pas ce que pensent les enseignants !
M. Didier Boulaud.
Les mères de famille dans les collèges !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
Toujours au titre des actions qui nous paraissent
essentielles, comme la lutte contre l'illettrisme ou la lutte contre la
violence scolaire, nous avons décidé d'inscrire des lignes budgétaires dont
l'importance corresponde à nos priorités. Par exemple, 14 millions d'euros sont
prévus pour les dispositifs relais qui permettront de lutter contre la violence
scolaire.
M. René-Pierre Signé.
Coupez le micro, monsieur le président ! Le reste est connu !
M. Didier Boulaud.
Oui, il faut le débrancher !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
De même, nous étions confrontés à une difficulté qui
n'avait pas été réglée par nos prédécesseurs, la grève des directeurs d'école.
Nous avons décidé de verser, en janvier 2003, à tous les directeurs d'école,
uniformément, quelle que soit la dimension de l'école, une prime de 925 euros.
(Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Didier Boulaud.
C'est du caporalisme !
Mme Nicole Borvo.
Si vous supprimez des surveillants, votre action ne sert à rien !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
On ne peut donc pas dire que nous avons abandonné ce
budget, pas plus que l'on ne peut dire que nous ne réfléchissons pas à un
nouveau dispositif destiné à se substituer à celui des MI-SE, les maîtres
d'internat et surveillants d'externat ; je rappelle qu'un rapport commandé par
M. Allègre et Mme Royal le qualifiait expressément d'obsolète et de calamiteux.
(Exclamations sur les travées socialistes.)
Mme Nicole Borvo.
Vous ne le remplacez par rien !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
Je cite mes prédécesseurs ! Ce dispositif a été
institué en 1937, et il n'est pas absurde de penser qu'il puisse évoluer...
Concernant les emplois-jeunes, je signale également que nous avons mis en
place une commission qui, sous la responsabilité d'un recteur, travaille sur un
nouveau dispositif. Ce matin même, MM. Ferry et Fillon envisageaient de
nouvelles mesures qui permettent d'assurer l'encadrement des élèves.
Mme Nicole Borvo.
Les mères de famille et les retraités !
M. Paul Raoult.
Que deviennent les aides-éducateurs ?
M. René-Pierre Signé.
Ils vont à l'ANPE !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
De toute façon, il faut cesser de s'inscrire dans une
logique d'augmentation continuelle du nombre des postes.
(Exclamations
ironiques sur les travées socialistes. - Bravo ! et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
D'autant que, dans le même temps, le nombre d'élèves diminue et que, plus
grave, les résultats obtenus stagnent, voire marquent un recul.
M. Paul Raoult.
Et vous supprimez des postes ?
M. René-Pierre Signé.
C'est un enseignant qui parle, en plus !
Mme Nicole Borvo.
Les surveillants des collèges remplacés par des surveillants de prison, ce
n'est pas très judicieux !
M. Xavier Darcos,
ministre délégué.
Ce que nous voulons, ce sont des résultats et pas
seulement des effets d'annonce pour des mesures, d'ailleurs, non financées.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
Mme Nicole Borvo.
Les parents et les enseignants vous répondront !
M. Alain Gournac.
Au placard, les démagos !
CONTRATS D'INTÉGRATION POUR LES IMMIGRÉS