SEANCE DU 19 février 2002


COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le président. M. le président a reçu de M. le ministre des relations avec le Parlement une lettre en date du 18 février 2002 par laquelle le Gouvernement modifie l'ordre du jour prioritaire des prochaines séances du Sénat, qui s'établit désormais comme suit :

Mercredi 20 février :

A 15 heures :

Séance exceptionnelle pour le bicentenaire de la naissance de Victor Hugo.

A 17 h 30 et le soir :

Nouvelle lecture de la proposition de loi complétant la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence.

Proposition de loi relative au nom patronymique.

Jeudi 21 février :

A 9 h 30 :

Deuxième lecture de la proposition de loi relative à la publicité foncière dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Proposition de loi portant réforme du divorce.

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

Questions d'actualité au Gouvernement.

Onze conventions internationales.

Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin.

Navettes diverses.

Eventuellement, vendredi 22 février :

A 9 h 30 et à 15 heures :

Suite éventuelle de l'ordre du jour de la veille.

Acte est donné de cette communication.

L'ordre du jour du Sénat est modifié en conséquence.

3

DÉPÔT D'UN RAPPORT

DU GOUVERNEMENT

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre le premier rapport d'évaluation de la couverture maladie universelle, établi en application de l'article 34 de la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

4

QUESTIONS ORALES

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

FERMETURE DES SERVICES DU TRÉSOR

DANS LES ZONES RURALES

DÉCIDÉE PENDANT LA TRÊVE DES CONFISEURS

M. le président. La parole est à M. Darcos, auteur de la question n° 1248, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Xavier Darcos. Ma question s'adressait à Mme Parly, qui m'avait déjà répondu précédemment sur le même sujet, mais c'est avec plaisir que je la pose aujourd'hui à M. Pierret, qui connaît bien la Dordogne.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite attirer votre attention sur la suppression des perceptions en zone rurale, notamment dans le département de la Dordogne. Les Périgourdins sont, en effet, particulièrement attachés au maintien de ce service public, que justifie plus particulièrement l'enclavement de notre département.

Le 8 février 2000, lors d'une précédente séance de questions orales au Sénat, j'avais déjà appelé l'attention du Gouvernement sur les conséquences néfastes de la suppression prévisible de certaines perceptions en Dordogne. Mme Florence Parly m'avait alors répondu : « Si l'objet d'une réforme des services du Trésor s'impose, il n'est absolument pas question de fermer ces services dans les cantons ruraux. » Et d'ajouter : « Christian Sautter et moi l'avons dit, et je le répète de la manière la plus ferme, il n'y aura pas de fermeture de trésorerie liée à la réforme des services du Trésor. Quand je vois certains documents qui circulent pour annoncer la fermeture de postes dans votre département, je me mets en colère, parce que, de mon point de vue, c'est de la désinformation. »

Monsieur le secrétaire d'Etat, la réponse du Gouvernement était en tous points conforme aux leçons de sagesse qu'il avait lui-même données au Sénat sur la méthode qu'il faut utiliser pour établir le dialogue social, à savoir diagnostic, discussion et décision.

Le Gouvernement a régulièrement répété devant la Haute Assemblée qu'il fallait utiliser cette méthode pour régler les problèmes des retraites, des professions de santé ou des services publics en zone rurale.

Qu'est-il advenu de ces intentions louables ?

Le 19 février 2001, j'ai reçu une première lettre du conseiller général maire de Sainte-Alvère me faisant connaître le départ du percepteur en titre dans dix communes, sans la moindre concertation avec les élus, qui ont été mis devant le fait accompli, ce qui a entraîné une gêne mal ressentie par les usagers.

Puis, lors de la dernière trêve des confiseurs, pendant l'hiver, j'ai pris connaissance d'un arrêté du directeur de la comptabilité publique, publié au Journal officiel du 28 décembre 2001 et décidant la suppression de la trésorerie d'Issigeac, complétée par le regroupement des services du Trésor dans d'autres communes, alors même que, le 27 juin, le trésorier-payeur général de la Dordogne avait été interrogé par le maire de Sainte-Alvère - qui venait de dépenser 500 000 francs de travaux pour sa perception - sur les raisons d'une réorganisation de ce service public sans la moindre concertation.

Franchement, monsieur le secrétaire d'Etat, est-ce cela la méthode que le Gouvernement préconise pour établir le dialogue social ?

Enfin, le 25 janvier dernier, j'ai reçu pour information une lettre du président du conseil communautaire des communes du pays Vernois m'informant du vif mécontentement exprimé par les trente-six représentants de ce conseil à la suite de la réorganisation de la trésorerie de Vergt. Depuis le 1er janvier 2002, cette trésorerie, avec la mise en place des 35 heures - je m'abstiendrai de tout commentaire à cet égard - est fermée deux demi-journées par semaine et fonctionne toujours sans chef de poste, alors que le remplacement du précédent titulaire du poste était attendu pour le 1er février. « Le souci du maintien du service public en milieu rural, dont nous sommes abreuvés en permanence, ne correspond absolument pas, insistait ce président, aux promesses entendues ici ou là ! »

Telles sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les doléances légitimes de certains élus et des administrés de mon département, qui ont le sentiment d'avoir été lésés, voire sciemment trompés.

Je vous demande donc de bien vouloir me faire connaître, depuis le 8 février 2002, date des engagements solennels du Gouvernement devant le Sénat, le nombre de perceptions ou de services du Trésor supprimés en Dordogne, le nombre de suppressions de postes de catégories A intervenues dans ces services pour l'ensemble du département, ainsi que le nom de toutes les communes ayant fait l'objet d'un regroupement de trésoreries en gestion commune.

L'enjeu des questions posées mérite qu'il y soit répondu avec précision, et, cette fois-ci, j'espère que le Gouvernement tiendra sa parole et répondra en vérité.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, je vais vous répondre, en effet, en vérité, au nom de M. Fabius, à qui s'adressait cette question et qui, ne pouvant pas se rendre au Sénat ce matin, m'a prié de le remplacer.

Première vérité - et c'est une évidence que vous défendrez certainement avec moi, monsieur le sénateur - le réseau du Trésor public doit s'adapter de manière pragmatique aux besoins des partenaires locaux, mais aussi aux évolutions de son environnement. Dans ce cadre, il doit veiller à toujours donner le meilleur service de proximité possible.

L'ensemble de ces opérations fait l'objet d'une concertation et d'un accompagnement, vis-à-vis tant des partenaires locaux que, naturellement, des personnels concernés.

Le département de la Dordogne se caractérise par un réseau très dense de trésoreries, pour une grande part de taille très modeste. Le trésorier-payeur général a engagé, dans le cadre de ses attributions déconcentrées, une réflexion visant à adapter ce réseau en conciliant un service de proximité et une taille de structure permettant de continuer à apporter un service de qualité.

Ainsi, les trésoreries de Montpon et de Ribérac ont fusionné respectivement avec les trésoreries de Villefranche-de-Lonchat - un agent - et de Verteillac - deux agents - à la fin de l'année 2001.

En ce qui concerne la trésorerie d'Issigeac, dont deux des trois agents sont partis à la retraite l'été dernier, les dix-huit communes concernées ont été consultées, conformément à l'engagement de Mme Parly. Une seule collectivité n'a pas adhéré au projet de fermeture de ce poste comptable et de transfert de ses attributions aux deux trésoreries spécialisées de Bergerac à compter du 1er janvier 2002. Le préfet de la Dordogne a émis un avis favorable à cette opération le 18 décembre 2001, après consultation de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics. L'inspecteur général des finances territorialement compétent a été régulièrement informé de ce dossier.

Par ailleurs, six regroupements de douze trésoreries, dans le cadre du dispositif de gestion conjointe de postes comptables, ont été réalisés au cours des deux dernières années. Voilà la vérité.

Ce mode de gestion permet de pallier la fragilité des très petits postes comptables sans remettre en cause leur existence juridique et leur fonctionnement, tant à l'égard des citoyens que dans l'accomplissement des missions du Trésor public en faveur des collectivités locales.

Les trésoreries concernées, dont celle de Sainte-Alvère, conservent chacune leur existence, leurs attributions propres et leurs personnels, sous l'autorité commune d'un comptable public.

Les emplois de cadres A rendus ainsi disponibles ont été redéployés, pour partie au niveau local, sur des missions d'expertise et de conseil réalisées au profit de l'ensemble du réseau du Trésor public et de ses partenaires, et pour partie au niveau national, vers des pôles de compétence tels que la « cellule d'information juridique des acheteurs publics locaux ».

Ainsi que vos le souhaitiez, M. Fabius a demandé au trésorier-payeur général de vous faire parvenir la liste exhaustive des communes concernées par ces dispositifs qui doivent permettre de dynamiser un réseau territorial au maillage extrêmement fin de cinquante trésoreries dans le département de la Dordogne.

M. Xavier Darcos. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Darcos.

M. Xavier Darcos. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de cette réponse.

Qu'il soit bien clair que nous comprenons la nécessité de ces regroupements dans un département comme le nôtre. Mais qu'il soit bien clair aussi que les engagements qui ont été pris l'an dernier devant les parlementaires sur le fait qu'aucune fermeture d'un service de proximité n'aurait lieu étaient imprudentes. La plupart des maires ont eu le sentiment d'avoir été abusés, car un regroupement n'est pas une absence de fermeture.

PRIME DE PERTE D'EMPLOI VERSÉE AUX SALARIÉS

DES BUREAUX DE CHANGE FERMÉS

EN RAISON DU PASSAGE À L'EURO

M. le président. La parole est à M. Cléach, en remplacement de M. Balarello, auteur de la question n° 1249, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Marcel-Pierre Cléach. Le passage à l'euro a des conséquences heureuses et d'autres moins. M. Balarello s'intéresse en particulier aux difficultés rencontrées par les bureaux de change, notamment dans les zones transfrontalières.

Il existe environ 1 000 à 1 200 bureaux de change, où travaillent un patron et deux ou trois employés en moyenne, soit - les statistiques ne donnent pas de chiffres très précis - au maximum 5 000 personnes.

Ces personnels ayant une activité spécifique, leur reconversion est difficile. M. Balarello demande donc, monsieur le secrétaire d'Etat, si M. le ministre de l'économie et des finances et Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité envisagent de prendre des mesures spécifiques en matière de formation, bien sûr, mais aussi de reconversion, de reclassement et, surtout, de prime pour perte d'emploi.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, vous vous interrogez sur l'opportunité d'accorder un dédommagement spécifique aux personnes qui travaillent dans les bureaux de change en raison de la baisse d'activité entraînée par le passage à l'euro dans ces établissements.

De nombreuses entreprises de ce secteur ont anticipé depuis longtemps cette baisse d'activité - le passage à l'euro n'a pas vraiment été une surprise ! - en utilisant tous les moyens d'aide à la reconversion gérés, comme vous le savez par le ministère de l'emploi. Le calendrier, annoncé depuis longtemps, des différentes étapes du passage à l'euro permettait effectivement avec précision d'élaborer et de programmer la baisse d'activité des bureaux de change.

Il n'en demeure pas moins qu'une partie significative des établissements de change n'a pas voulu ou pas su prendre les mesures adaptées à une gestion programmée de la reconversion des salariés dont le poste de travail sera supprimé ou de celle des bureaux de change frontaliers au sein de l'Union européenne.

Comme vous le signalez, le ministère de l'emploi et de la solidarité a examiné la situation des entreprises touchées par le passage à l'euro. Toutes les mesures d'aide au reclassement professionnel des salariés peuvent être d'ores et déjà mobilisées dans chacun des départementss concernés.

Toutefois, si des difficultés spécifiques persistaient, il conviendrait que les responsables des entreprises examinent avec les services du ministère de l'emploi et de la solidarité, au cas par cas, les mesures qui permettraient de les résoudre.

Des discussions entre le syndicat professionnel des changeurs manuels et la direction des entreprises commerciales, artisanales et de services ont eu lieu à l'automne pour déterminer l'ensemble des outils pouvant être mis la disposition des entreprises pour accompagner leur diminution d'activité.

Enfin, comme c'est le cas vis-à-vis de toutes les entreprises qui connaissent des difficultés, les services locaux de recouvrement fiscal examinent avec bienveillance - et votre intervention de ce matin permet d'en souligner encore l'importance - les demandes spécifiques qui peuvent leur être transmises par les changeurs manuels afin d'adapter, dans le respect des textes, les conditions de recouvrement de l'impôt à la situation de ces entreprises.

Le passage à l'euro est un succès, chacun en convient. Notre pays en est fier et il en percevra les bénéfices. Il est juste que la solidarité nationale s'exprime en faveur de ceux dont l'emploi a disparu du fait même de ce passage à l'euro.

M. Marcel-Pierre Cléach. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Cléach.

M. Marcel-Pierre Cléach. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de cette déclaration et de ces bonnes intentions. J'ai pris note qu'une circulaire ministérielle sera adressée aux services déconcentrés.

SEUIL DE CONSULTATION OBLIGATOIRE

DES SERVICES DU DOMAINE

M. le président. La parole est à M. Biwer, auteur de la question n° 1267, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Claude Biwer. Un arrêté paru au Journal officiel le 1er janvier dernier a rehaussé le seuil de consultation obligatoire des services des domaines de 30 490 euros à 76 225 euros. Cette mesure aura pour conséquence de priver des milliers de communes, notamment rurales, d'une expertise fiable et objective lorsqu'elles réalisent une opération immobilière. Jusqu'alors, les services des domaines livraient leur expertise pour toute opération immobilière dont le coût dépassait 30 490 euros. Ce ne sera malheureusement plus le cas et des milliers de communes seront désormais privées de ce relais.

Compte tenu du relèvement de ce seuil, près de 30 000 opérations immobilières échapperaient désormais au contrôle des services des domaines.

Les raisons qui ont motivé cette mesure sont pour le moins surprenantes : il s'agirait « d'adapter le seuil d'intervention aux réalités du marché immobilier » et « de répondre à la demande d'autonomie exprimée par les collectivités locales ».

D'autres explications moins « reluisantes » ont été avancées : il s'agirait de « rationaliser le fonctionnement des administrations », en d'autres termes d'ajuster les effectifs de la direction générale des impôts au passage aux 35 heures.

Ainsi, l'application de la réduction du temps de travail dans cette administration aboutit, en fin de compte, à un recul de ses missions de service public, dont les conséquences sont supportées in fine, en l'occurrence, par les collectivités locales, notamment les communes rurales.

Les collectivités importantes, qui ont leurs propres capacités de contrôle, ne souffriront guère de cette mesure. Il en ira différemment pour les milliers de petites communes dépourvues de moyens et de personnels.

Le Sénat s'est d'ores et déjà ému de cette situation. Ainsi, lors de l'examen du projet de loi relatif à la démocratie de proximité, sur proposition du rapporteur de ce texte, notre excellent collègue et ami Daniel Hoeffel, avions-nous adopté un amendement abaissant les seuils d'intervention obligatoire des agents des domaines afin de rétablir le statu quo ante. Cette disposition n'a pas été retenue par la commission mixte paritaire, dans la mesure où elle était manifestement d'ordre réglementaire.

Cependant, il me paraîtrait souhaitable que, malgré le relèvement des seuils, les petites communes, dépourvues de moyens techniques pour réaliser les évaluations en question, puissent continuer, de manière facultative, à faire appel aux services des domaines pour les opérations immobilières qu'elles envisagent de réaliser.

Tel est, monsieur le secrétaire d'Etat, le sens de l'appel que je lance aujourd'hui à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'espère qu'il sera entendu.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, voici la réponse que m'a demandé de vous communiquer M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Les collectivités locales et leurs établissements publics doivent consulter le service des domaines sur la valeur des biens qu'ils envisagent d'acquérir ou sur la valeur locative des locaux qu'ils se proposent de prendre à bail.

Cette obligation a essentiellement pour objet non pas de procurer une expertise gratuite à ces collectivités, mais de renforcer la transparence de leurs acquisitions immobilières et donc le contrôle du conseil municipal sur ces opérations.

Ce système de contrôle vient récemment d'être doublement modernisé.

D'une part, la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier a, par son article 23, considérablement simplifié les procédures.

D'autre part, l'arrêté du 17 décembre 2001, que vous citez, publié au Journal officiel du 1er janvier 2002, a relevé les seuils de consultation, qui n'avaient pas été actualisés depuis 1986, pour les porter à 75 000 euros - environ 500 000 francs - pour les acquisitions et à 12 000 euros - environ 80 000 francs - pour les prises à bail.

Il résulte de ces deux mesures un réel allégement du contrôle des collectivités territoriales. Ce contrôle y gagne en pertinence en étant concentré sur les opérations d'un montant significatif, ce qui permet d'accélérer la conclusion des affaires de faible montant.

Vous souhaitez légitimement savoir, monsieur le sénateur, ce qu'il adviendra, dans ce nouveau contexte, de la pratique actuelle et fréquente des évaluations officieuses, par lesquelles les collectivités territoriales, notamment les plus modestes, peuvent obtenir du service des domaines, même en dessous de ces seuils, une expertise de la valeur des biens qu'elles envisagent d'acquérir.

Il est parfaitement clair, ainsi que l'a précisé le Gouvernement le 24 janvier dernier lors de l'examen au Sénat du projet de loi relatif à la démocratie de proximité, en réponse à M. Daniel Hoeffel, que cette pratique répandue des consultations facultatives, notamment pour les petites collectivités, n'est absolument pas remise en cause. Je vous rassure sur ce point.

Je pense que cette réponse apaisera vos craintes. Les collectivités territoriales peuvent continuer comme auparavant de faire appel - il est très compétent pour cela - au service des domaines, service que, je pense, l'ensemble du Sénat remercie pour sa célérité et pour la qualité de son expertise.

M. Claude Biwer. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Biwer.

M. Claude Biwer. J'ai bien noté, monsieur le secrétaire d'Etat, que deux mesures venaient d'être prises afin d'améliorer la situation. Toutefois, les expertises du service des domaines ne sont pas gratuites. Dans les Vosges comme dans la Meuse, les communes rurales éprouvent des difficultés à financer ce qu'il reste de services publics : elles doivent financer les bureaux de poste pour les conserver ; elles doivent financer les relais pour bénéficier du téléphone mobile. Il faudra prévoir un financement différent pour les avis émis sur telle ou telle question.

Je prends note de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, et j'espère que des solutions intelligentes seront trouvées.

APPLICATION DE LA LOI SRU

DANS LES PETITES COMMUNES

M. le président. La parole et à M. Demerliat, auteur de la question n° 1201, transmise à Mme le secrétaire d'Etat au logement.

M. Jean-Pierre Demerliat. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, du 13 décembre 2000, a profondément rénové le code de l'urbanisme, afin de promouvoir sur l'ensemble du territoire un développement durable et cohérent. Elle apporte des réponses aux évolutions de ces dernières années et à certains problèmes qui en sont résulté.

Si, sur le fond, il ne fait aucun doute que les dispositions nouvelles simplifient des procédures qui étaient parfois très lourdes, dans la pratique, il arrive que les choses soient plus compliquées que nous ne le pensions lorsque nous avons voté ce texte.

Ainsi, l'instauration éventuelle par le conseil municipal de la participation pour le financement des voies nouvelles et de leurs réseaux, qui remplace l'ancien système de participation au financement de services publics industriels et commerciaux, n'est pas sans induire des difficultés qui n'ont pas été identifiées au moment de l'élaboration du texte.

Avant la loi SRU, le certificat d'urbanisme et le permis de construire ne pouvaient être attribués à un pétitionnaire que si celui-ci s'engageait à prendre à sa charge l'ensemble des frais d'extension des réseaux divers.

Maintenant, la participation du premier constructeur n'est due qu'au prorata du nombre de ses terrains viabilisés, la collectivité faisant en quelque sorte l'avance du reste du financement, y compris pour des terrains qui ne seront jamais construits, voire jamais constructibles, ne serait-ce que pour des raisons physiques : étangs, bois, etc.

Théoriquement, cette mesure introduit une amélioration importante, mais, dans la pratique, sa mise en oeuvre est parfois délicate, plus particulièrement dans les petites communes rurales. En effet, lorsqu'une commune envisage une importante opération d'urbanisation comprenant de nombreuses constructions, elle ne devrait avoir aucun problème pour récupérer la participation auprès des propriétaires. Mais les choses se compliquent lorsqu'une petite commune souhaite autoriser des constructions à la limite et en continuité d'un bourg ou d'un hameau.

Les projets de construction, qui concernent le plus souvent des maisons individuelles, se font au coup par coup. Dans ce cas, madame la secrétaire d'Etat, l'extension des voies et réseaux viabilisera aussi, de fait, plusieurs parcelles voisines, qui deviendront ainsi constructibles.

Mais, comme je viens de le dire, l'expérience montre que, dans les petites communes rurales, les constructions nouvelles s'échelonnent dans le temps, l'une après l'autre. En outre, les propriétaires, souvent des exploitants agricoles de ces parcelles nouvellement viabilisées, ne souhaitent pas toujours les destiner immédiatement à la construction, préférant les conserver dans le périmètre de leurs exploitations.

Dès lors, la participation demandée au premier constructeur est loin de correspondre à la totalité des investissements exposés par la collectivité. Souvent même, l'investissement à la charge de la commune ne sera pas compensé par les avantages financiers que celle-ci retirera d'une ou deux constructions nouvelles.

De plus, dans de nombreux cas, seule une extension des réseaux serait nécessaire pour permettre des constructions nouvelles. Or, d'après les nouveaux textes, il n'est pas permis de dissocier voirie et réseaux dans la demande de participation adressée au pétitionnaire. Les communes sont donc obligées de faire effectuer des travaux qui sont loin d'être indispensables dans leur totalité. Par conséquent, d'une part, elles financent un investissement superflu ; d'autre part, elles demanderont aux constructeurs une participation à des travaux qui n'ajouteront rien à la viabilité du terrain, ce qui ne participe pas d'une très saine économie.

Madame la secrétaire d'Etat, tels sont les problèmes auxquels sont confrontées nombre de communes, en particulier les petites communes rurales. Bien évidemment, je ne vous demande pas de leur trouver une solution aujourd'hui même, puisqu'il faudra nécessairement les étudier avant de tenter de les régler par voie réglementaire ou législative. Mais votre engagement et celui du Gouvernement d'examiner et de résoudre ces difficultés dans un délai relativement court seraient de nature à rassurer l'élu rural que je suis et, bien évidemment, l'ensemble des élus ruraux de notre pays.

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, la question que vous posez est délicate parce que les habitudes changent. Il est donc nécessaire de bien s'expliquer sur les termes de la loi et sur sa mise en oeuvre.

Tout d'abord, je vous rappelle que si, par le passé, certaines collectivités locales mettaient à la charge du premier propriétaire bénéficiaire le coût de l'aménagement d'un réseau d'électricité ou d'eau, c'était totalement illégal. Du reste, chaque fois que l'un des propriétaires intentait une action contre le maire, celui-ci était systématiquement condamné, car, aux termes de la loi, les communes ne pouvaient demander une participation qu'au prorata des terrains concernés par l'aménagement. C'est d'ailleurs ce qui nous a conduits à clarifier les termes de la loi. A cette fin, nous avons utilisé une méthode qui existe en Alsace-Lorraine et qui semble donner entière satisfaction. Il ne paraît donc pas difficile de l'étendre à l'ensemble du territoire. Il importe néanmoins de bien s'expliquer sur la méthode retenue afin que les difficultés que vous dénoncez ne se retrouvent pas dans les faits.

Le principe est de permettre à chacune des communes de prévoir, par une délibération du conseil municipal, quels seront les aménagements en matière de voirie, de réseaux et d'assainissement rendant constructibles un ou plusieurs terrains. Avant de délivrer le permis de construire, le conseil municipal délibère pour préciser l'ensemble des mécanismes qui permettront une insertion normale de la nouvelle construction dans le village concerné. Ce système s'inspire des procédures des zones d'aménagement concerté, ou ZAC, et des programmes d'aménagement d'ensemble, ou PAE, qui existent en zones urbaines. Après avoir déterminé les aménagements, la commune demande à chaque propriétaire une contribution calculée au prorata desdits aménagements. Les propriétaires qui le souhaite peuvent apporter leur contribution dès le début de l'opération. Sinon, ils ne seront sollicités qu'au moment du permis de construire ou de la réalisation de l'aménagement.

Peut-être pourriez-vous craindre, monsieur le sénateur, d'avoir à financer d'emblée l'ensemble des aménagements envisagés, même s'ils ne sont pas tous nécessaires immédiatement, par exemple s'il s'agit simplement d'une maison ou d'une réalisation. La loi ne prévoit pas l'obligation de réaliser l'intégralité des travaux tout de suite. Vous pouvez simplement élaborer un plan de financement qui englobe l'ensemble des aménagements de voirie et d'assainissement. D'ailleurs, les problèmes d'assainissement imposent souvent une réfection de la voirie. En fait, c'est comme pour les droits à construire dans les zones d'aménagement concerté : l'ensemble des travaux doit être achevé lorsque la commune a touché toutes les participations, mais rien ne l'empêche de prévoir une participation sur un équipement d'ensemble pour financer les réseaux d'eau et d'électricité.

Par conséquent, les communes ne sont pas obligées de préfinancer des équipements de voirie et de réseaux sur-dimensionnés, qui ne seraient pas indispensables au démarrage de la première opération.

Je vous rappelle par ailleurs, monsieur le sénateur, que les collectivités peuvent bénéficier de nombreuses subventions, notamment du fonds national pour le développement des adductions d'eau, le FNDAE, et du fonds d'amortissement des charges d'électrification, le FACE, qui permet d'apporter une aide pour l'ensemble des réseaux.

Cette méthode présente l'immense avantage de remettre la procédure dans un cadre légal, puisque le législateur ne pouvait pas imposer au premier propriétaire des charges supérieures à ce qu'il était légitime de lui demander. En outre, elle place les communes rurales en situation de pouvoir véritablement prendre en compte les aménagements nécessaires, car vous conviendrez que leur développement doit s'effectuer conformément à la qualité attendue en termes à la fois de dessertes, d'assainissement et de réseaux.

Les directions départementales de l'équipement doivent s'attacher à rendre plus clair aux yeux des élus locaux le mécanisme que je vous ai décrit. Ce sera le premier effort à accomplir.

Enfin, je me tiens à votre disposition, monsieur le sénateur, si, en dépit de ces explications, vous éprouviez des difficultés à mettre en oeuvre un aménagement durable dans un certain nombre de communes.

M. le président. C'est bigrement compliqué, et Mme le secrétaire d'Etat vient de nous faire une démonstration éclatante de sa technicité ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Demerliat. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Demerliat.

M. Jean-Pierre Demerliat. A l'évidence, la loi SRU constitue une avancée par rapport au dispositif antérieur. Toutefois, dans les petites communes rurales, s'agissant des travaux nécessaires à la viabilisation d'un terrain - terrain qui avait souvent au préalable une vocation agricole et qui devient constructible -, certains propriétaires bénéficient d'un effet d'aubaine, car le paysan qui possède un terrain au milieu du plateau de Millevaches aura peu d'occasions de le transformer en terrain à construire et d'alimenter ainsi son compte au Crédit agricole ! Il n'empêche que la commune fait l'avance des fonds. Elle sert, en quelque sorte, de banquier à des personnes qui ont déjà bénéficié d'un effet d'aubaine.

Cette loi représente, certes, une avancée, mais il faudra en évaluer les conséquences dans quelque temps. Il n'y a aucune honte, bien au contraire, à modifier un texte, soit par voie réglementaire, soit par voie législative.

Les grandes communes ou les communes moyennes ne rencontrent pas ces problèmes. Mais les petites communes doivent nécessairement augmenter leur population en périphérie du bourg, du village ou du hameau. Cette loi permet de réduire le mitage, mais, là, il s'agit d'accroître la zone habitée en périphérie de bourg.

Je vous remercie des précisions que vous m'avez apportées, madame la secrétaire d'Etat. Je prendrai contact avec vos services dès que des difficultés apparaîtront dans les communes de mon département. Mais il faudra que nous reparlions de ces problèmes dans quelques mois - j'espère que ce sera avec vous - à la prochaine rentrée parlementaire.

CRISE DE LA FILIÈRE AGRICOLE DUE À L'EMPLOI

D'INSECTICIDES SYSTÉMIQUES

M. le président. La parole est à M. Oudin, auteur de la question n° 1236, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jacques Oudin. Monsieur le ministre, je veux attirer votre attention sur la crise de la filière apicole due à l'emploi d'insecticides systémiques. Je dresserai tout d'abord un constat.

L'utilisation de deux insecticides appelés le Gaucho et le Régent entraîne, depuis plusieurs années, des phénomènes de disparitions massives d'abeilles, tant en France qu'à l'étranger.

En réponse à notre ancien collègue Charles Descours, le 5 avril 2001, vous déclariez que « les nombreuses études n'ont pas permis de confirmer ou d'infirmer l'éventuelle responsabilité du produit incriminé ». Néanmoins, contrairement à ce que vous affirmiez, il apparaît clairement, d'abord, que ces phénomènes ne se produisent pas dans les zones de culture non traitées, ensuite, qu'ils cessent dès la fin de la floraison des cultures traitées.

De surcroît, les multiples contrôles effectués par les services vétérinaires départementaux, que ce soit dans les Deux-Sèvres, dans l'Indre ou dans mon département, en Vendée, n'ont jamais permis d'expliquer ce phénomène autrement que par une intoxication due aux produits phytosanitaires insecticides. Partant de là, je poserai deux questions.

En premier lieu, compte tenu des conclusions de multiples rapports scientifiques français et étrangers qui attestent de l'extrême toxicité du Gaucho, même à très faible dose, vis-à-vis de l'entomofaune et de l'environnement, comptez-vous enfin interdire, monsieur le ministre, l'emploi d'imidaclopride sur toutes les cultures traitées par ce produit ?

En second lieu, en application du principe de précaution, je souhaiterais savoir si vous pensez également interdire l'usage du Régent, dont l'agent actif est le Fipronil, lors du traitement des semences de tournesol, et ce sur le territoire français.

L'ensemble de la filière apicole a rejeté le projet d'une éventuelle étude multifactorielle qui lui était proposée, dont les conclusions ne pourraient être pertinentes qu'en l'absence totale de cultures traitées par le Gaucho ou par le Régent et qu'après disparition complète des effets dus à la persistance de ces produits dans le sol.

Comme l'a manifesté le Parlement européen de façon unanime, le 13 décembre dernier, en votant le rapport du député Dominique Souchet, les apiculteurs demandent non pas la multiplication des études ou la mise en place d'un quelconque institut technique, mais avant tout le retrait définitif et immédiat de toutes les formes d'imidaclopride sur l'ensemble des cultures.

Au-delà du rôle essentiel joué par les abeilles dans le maintien de la biodiversité - je rappelle que 20 000 espèces végétales doivent leur survie à la pollinisation des abeilles - c'est la sauvegarde de l'apiculture française qui est en jeu.

Enfin, considérant l'urgence de la situation pour le monde apicole, quelle aide financière entendez-vous mettre en place, monsieur le ministre, en faveur des apiculteurs, qui subissent chaque été, depuis plusieurs années, des pertes considérables de cheptel et de récoltes ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la situation de la filière apicole, en particulier sur les conséquences de l'utilisation en agriculture d'insecticides tels que le Gaucho ou le Régent.

Je rappelle que j'ai décidé en janvier 1999, en vertu du principe de précaution que vous évoquez à juste titre, monsieur Oudin, et compte tenu de la responsabilité supposée du Gaucho dans les troubles observés dans les ruchers, de suspendre pour deux ans l'utilisation de cet insecticide dans le traitement du tournesol. J'ai été le seul en Europe à aller dans ce sens.

Vous savez que les résultats des différentes études conduites depuis lors n'ont pas apporté d'éléments véritablement nouveaux. Par conséquent, j'ai décidé, au début de l'année 2001, de reconduire pour deux années supplémentaires la suspension du Gaucho sur le tournesol.

L'étude multifactorielle que vous citez, monsieur le sénateur, me paraît tout à fait indispensable pour faire enfin toute la lumière sur ce dossier et obtenir, je l'espère, les certitudes scientifiques qui font cruellement défaut aujourd'hui. Cette étude est multifactorielle, car les insecticides ne sont peut-être pas seuls en cause dans les dépopulations des ruchers et les baisses de miellées. D'autres facteurs, notamment sanitaires et environnementaux, peuvent intervenir.

Par ailleurs, nous avons besoin de la collaboration des apiculteurs pour que cette étude se déroule dans les meilleures conditions. Il faut bien comprendre, monsieur le sénateur, que, dans un Etat de droit comme la France - et, m'adressant au législateur, je sais que je suis écouté - un ministre ne peut, ainsi, « au doigt mouillé », décider d'interdire tel ou tel produit. Seule la rigueur scientifique nous permettra de prendre les mesures de gestion du risque les plus adaptées.

Vous me dites que les apiculteurs en ont assez des études et qu'ils réclament dorénavant l'interdiction. Mais pourquoi aller au-delà des mesures que j'ai déjà prises, c'est-à-dire la suspension du Gaucho pour quatre ans au total, si la décision prise sans fondement scientifique risque d'être annulée par le premier tribunal saisi ? Car c'est bien de cela qu'il s'agit ici : l'entreprise industrielle concernée nous menace de recours - je suis en négociation permanente avec elle - et je suis donc dans la nécessité de pouvoir prouver que ma décision est fondée scientifiquement, le cas échéant devant un tribunal.

C'est pourquoi j'appelle vraiment à la sagesse sur cette affaire. Je suis très sensible au problème posé, mais la rigueur scientifique s'impose pour que notre décision politique ne puisse faire l'objet d'un quelconque recours.

Vous citez aussi, monsieur le sénateur, la résolution adoptée par le Parlement européen le 13 décembre 2001. A cet égard, le rapporteur n'était pas Dominique Souchet, comme vous l'avez indiqué, mais la Luxembourgeoise Astrid Lulling. Tout comme vous, monsieur le sénateur, je n'ai pas manqué de saluer cette initiative des députés européens, et j'ai eu l'occasion hier encore, lors du Conseil agricole de Bruxelles, où ce dossier était à l'ordre du jour, d'inviter la Commission européenne à répondre très concrètement à leurs demandes et à leurs suggestions.

En somme, monsieur le sénateur, je suis confronté à deux difficultés.

D'une part, pour prendre une décision, il faut que je sois scientifiquement fondé à le faire, sinon je vais, certes, ravir les apiculteurs pendant quelques mois, mais très vite ma décision sera annulée par un tribunal.

D'autre part, étant le seul, en Europe, à prendre une initiative à cet égard, je suis susceptible de faire l'objet de plaintes de la Commission au motif que la France irait à l'encontre des règles du marché unique.

J'ai donc demandé à la Commission européenne de répondre aux sollicitations du Parlement européen. J'ai également demandé à mes services de travailler sur un certain nombre de pistes visant à améliorer, au-delà du simple problème du Gaucho et du Régent, la situation de la filière apicole. Je pense ici à la mise en place d'un contrat territorial d'exploitation, à la création d'un institut technique apicole ou à la mise en place d'un réseau de surveillance sanitaire. Dans certains cas particuliers difficiles, des aides pourraient être versées aux apiculteurs si cela est nécessaire. La réflexion se poursuit, en concertation avec les représentants des apiculteurs.

Pour en revenir au problème des pesticides, je vous précise, monsieur Oudin, que mon ministère a déjà bien avancé dans la révision des procédures d'évaluation des effets éventuels des produits phytosanitaires sur les abeilles, comme le demande d'ailleurs le Parlement européen. Hier, j'ai demandé au commissaire David Byrne de modifier dans le même sens la directive communautaire.

J'ajoute que le Gouvernement déposera, dans les prochaines semaines, le rapport prévu par la loi du 4 janvier 2001 sur les connaissances acquises en matière d'incidence des insecticides systémiques sur les populations d'abeilles.

Sachez, pour terminer, monsieur le sénateur, que je suis très attentif aux préoccupations du secteur de l'apiculture, dont je sais la contribution éminente non seulement à l'activité agricole, grâce à la pollinisation, mais aussi au développement rural, à l'environnement, à l'aménagement du territoire et à la biodiversité.

Nous devons donc continuer à travailler sur ce dossier pour rassurer la profession apicole et, au-delà, assurer son avenir, monsieur le sénateur.

M. Jacques Oudin. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Oudin.

M. Jacques Oudin. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse, mais elle me laisse un peu sur ma faim !

Si je vous ai bien compris, l'étude multifactorielle dont vous aviez évoqué le lancement en avril 2001 va incessamment être mise en oeuvre ?

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Non, elle est lancée !

M. Jacques Oudin. Elle a été lancée ? Mais, depuis avril 2001, que s'est-il passé ?

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Si les apiculteurs ne veulent pas y participer, monsieur Oudin, rien n'est possible : on ne peut pas réaliser l'étude sans eux !

M. Jacques Oudin. Vous mettez en cause les apiculteurs ?

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Non, je ne les mets pas en cause !

M. Jacques Oudin. Nous verrons bien ce qu'ils répondent !

Ensuite, vous nous dites qu'il n'existe aucun rapport établissant la toxicité du Gaucho. Moi, j'ai les rapports de l'INRA, du CNRS, de l'AFSSA, j'ai le rapport de M. L'Hostis, notamment, et tous concluent à la toxicité. Alors, nous aimerions savoir ce qu'il en est vraiment.

Vous prenez beaucoup de précautions pour, en fait, nous dire que vous ne pouvez pas interdire ce produit. Mais a-t-on pris autant de précautions s'agissant de son autorisation de mise sur le marché ?

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Ce n'est certainement pas moi qui ai autorisé le Gaucho, monsieur Oudin !

M. Jacques Oudin. Il est patent que le dossier Bayer, pour le Gaucho, contient des irrégularités, des incohérences, voire des tromperies et que, de surcroît, l'imidaclopride n'est pas conforme aux normes européennes.

Je ne veux pas évoquer le dossier Aventis - il est vrai que Bayer et Aventis sont de puissants groupes - mais il ne faut pas recommencer l'erreur des farines animales !

M. Paul Blanc. Il faut se méfier du « gaucho » ! (Sourires.)

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Oudin, qu'il n'y ait pas de malentendu entre nous.

Vous dites que des études dont vous avez eu connaissance établissent la toxicité de ce produit. Je connais ces études ; elles n'ont été validées par aucun comité scientifique.

Des organisations d'apiculteurs m'ont effectivement transmis l'étude d'un scientifique de l'INRA, qui conclut à la dangerosité du Gaucho, mais cela n'a été validé par aucun comité scientifique, pas même par l'INRA lui-même.

Je le répète, j'ai été le seul en Europe à suspendre l'utilisation du Gaucho sur le tournesol ; je suis donc plutôt convaincu moi-même ; mais je sais aussi que, pour avancer, il nous faut prouver ce que nous disons. Or j'ai besoin de preuves pour ce faire.

M. Jacques Oudin. Mais personne n'a prouvé l'inverse, la non-toxicité !

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Pour le reste, il est inutile de tenter de me convaincre que l'on utilise en agriculture trop de pesticides et trop d'insecticides : j'en suis tout à fait d'accord.

D'ailleurs, cette agriculture productiviste à l'extrême qui utilise trop d'intrants, ce n'est pas moi qui l'ai préconisée pendant des années, monsieur Oudin !

DIFFICULTÉS DE LA VITICULTURE MÉRIDIONALE

M. le président. La parole est à M. Courteau, auteur de la question n° 1265, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Roland Courteau. Cette fois encore, monsieur le ministre, mon intervention portera sur les graves difficultés que connaît la viticulture méridionale.

M. Paul Blanc. Eh oui !

M. Roland Courteau. Je parlerai donc aujourd'hui au nom de la plupart des parlementaires du Languedoc-Roussillon ainsi que des présidents de conseils généraux.

Je crois vous avoir déjà dit combien nous avions apprécié la mise en oeuvre d'un plan dont l'effet est bien à la mesure des défis qui nous sont lancés.

Je veux saluer ici votre engagement total et résolu pour sortir de cette crise. C'est un engagement responsable, comme vous l'avez vous-même dit, qui passe par la poursuite des investissements dans le savoir-faire humain, technologique, commercial, mais également dans la restructuration du vignoble et dans cette marche en avant pour la modernisation des caves et des pratiques oenologiques.

Cela dit, et au-delà des nécessaires mesures structurelles qui conditionnent l'avenir de la viticulture, je souhaite surtout aujourd'hui insister sur l'urgence qui s'attache au traitement de la situation particulièrement préoccupante d'un grand nombre de viticulteurs.

Face à la spirale à la baisse des prix, monsieur le ministre, vous avez sollicité des instances européennes une mesure d'assainissement par le retrait des excédents avec complément national de prix. Pouvez-vous, au lendemain du conseil européen des ministres de l'agriculture, nous faire un point précis sur une demande dont je sais qu'elle ne se situait pas dans un contexte européen des plus faciles ?

Cette mesure reste cependant indispensable pour favoriser la remontée des cours. Nombre de viticulteurs ont vu, en effet, leurs recettes mensuelles diminuer de 15 %, de 30 %, voire de 40 %, selon les cas, et connaissent actuellement de graves difficultés.

Monsieur le ministre - je sais que vous en êtes personnellement convaincu - le temps presse ! Je sais - nous l'avons tous perçu lors des réunions de travail qui se sont tenues à votre ministère - que vous avez la volonté de répondre à l'urgence de la situation, comme vous l'avez tout dernièrement démontré en révisant les critères d'attribution des aides aux jeunes viticulteurs afin qu'une plus large proportion des demandes présentées puisse être acceptée.

Oui, le temps presse, et il importe qu'un certain nombre de dispositions soient prises dans des délais très courts ! Je pense tout particulièrement à des mesures de soutien direct de trésorerie soit par subventions à l'hectare, soit par prêts à 1,5 % remboursables en 2005. Je pense également à des dispositifs complémentaires en faveur des caves particulières les plus endettées ou à des prêts de trésorerie aux coopératives.

Les représentants de la profession, que nous avons rencontrés voilà une semaine, proposent, également en accord avec l'ensemble des responsables du Languedoc-Roussillon, la prise en charge des cotisations sociales et de l'impôt foncier et renouvellent leur demande d'ouverture de contingents de préretraites qu'ils souhaitent voir arrêter à mille par an pour le Languedoc-Roussillon.

Enfin, ils insistent sur la nécessité d'ouvrir tout de suite, à Bruxelles, le débat sur la réforme de l'organisation commune des marchés, l'OCM, non seulement pour les mécanismes de marché mais aussi pour la reconversion différée, avec possibilité de cession de droits pour des raisons d'âge.

Conjugué avec un dispositif de préretraite, cet ensemble de mesures permettrait d'arriver à un mécanisme efficace pour la campagne 2002-2003.

Telles sont quelques-unes des mesures susceptibles d'aider les vignerons du Midi à passer ce cap difficile. Peut-on espérer les voir rapidement mises en oeuvre, monsieur le ministre ? Je vous fais confiance, car vous avez toujours su répondre rapidement et concrètement aux propositions qui vous étaient faites.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Courteau, je réponds avec d'autant plus de plaisir à votre question que je vous sais défenseur inlassable de la viticulture du Languedoc-Roussillon et homme à dire clairement les choses - il faut parfois du courage - sans jamais céder à la démagogie.

Il est vrai que la situation de la viticulture dans le Midi réclame notre attention. J'ai proposé, au mois de septembre, aux termes d'une très longue concertation, un plan que je crois complet et qui, justement, comprend les mesures de court terme nécessaires pour réguler le marché mais aussi les engagements à long terme indispensables pour achever la restructuration de ce vignoble. Ce plan avait été bien accueilli par tous les professionnels, et j'ai indiqué, à plusieurs reprises, à la représentation nationale dans quelles conditions il devait se mettre en place : les récentes dispositions ne font que confirmer mes propos d'alors.

Mon premier objectif, avec ce plan, était de rétablir l'équilibre du marché.

Au terme d'intenses négociations avec la Commission européenne, j'ai obtenu, après la distillation « alcool de bouche », une distillation de crise lors du dernier comité de gestion des vins qui s'est tenu le 8 février dernier à Bruxelles, avec l'octroi à la France d'un contingent de distillation de crise de 4 millions d'hectolitres. Notre objectif est de détruire 20 % de la production française de vin de table - ce n'est pas rien -, afin d'assainir le marché et de lui permettre de redémarrer.

Comme vous l'avez dit, nous nous heurtions à une difficulté liée aux prix, puisque nous voulions porter le prix d'achat de ces vins de 1,9 euro par degré hectolitre à 2,74 euros par degré hectolitre.

C'est pourquoi j'ai demandé au conseil « agriculture » l'octroi d'une aide nationale exceptionnelle. Cependant, une telle décision étant d'ordre budgétaire, elle doit être prise à l'unanimité. Or, une réserve a été émise par le Parlement danois. Hier, comme les jours précédents, je me suis donc efforcé de convaincre tant la ministre danoise de l'agriculture que les parlementaires danois de lever cette réserve.

Sans un vote favorable de la ministre danoise, notre proposition était vouée à l'échec, et c'est la raison pour laquelle nous avons estimé préférable, hier, de repousser le vote de quelques jours. J'ai maintenant l'assurance du Gouvernement et du Parlement danois que cette réserve pourra être levée vendredi, de sorte que nous avons la quasi-certitude d'obtenir satisfaction lors du Conseil européen qui se tiendra la semaine prochaine.

Grâce à nos efforts d'hier, une aide nationale pour la distillation de quatre millions d'hectolitres devrait donc être actée dans quelques jours.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. J'en viens à vos questions concernant les difficultés des vignerons.

Je suis tout à fait prêt, en plus des actions déjà engagées, à examiner les conditions de mise en place d'aides exceptionnelles afin de remédier aux situations les plus délicates. C'est ainsi que j'envisage de proposer, dans les tout prochains jours, des instruments très diversifiés, adaptés aux cas les plus divers, et je pense notamment aux prêts à taux bonifié que vous avez évoqués.

Pour être efficaces et, surtout, équitables, ces mesures devront être ciblées et plafonnées. Elles devront également tenir compte des efforts réalisés par les vignerons pour s'adapter au marché. Outre les instruments traditionnels, des aides ciblées comparables à celles qui ont été mises en place pour les éleveurs bovins sont, à ma demande, étudiées par mes services.

Enfin, je note que dans les Pyrénées-Orientales le couplage entre préretraite et arrachage est envisagé à titre expérimental. Je souhaite que, dans le cadre de la concertation qui se poursuit avec les professionnels, des propositions sérieuses et réalistes soient faites en ce sens, afin que les vignerons qui en ont le plus besoin puissent rapidement bénéficier de mesures concrètes.

Ces aspects conjoncturels ne doivent pas faire oublier le volet structurel du plan que nous avons annoncé le 25 septembre. Or, je tiens à le dire clairement à un parlementaire qui m'interroge lucidement, ce volet structurel n'a pas, à ce jour, suffisamment mobilisé les énergies à l'échelon local.

Je le rappelle, 100 millions de francs sont disponibles pour encourager - c'est essentiel - l'émergence de structures permettant de faciliter la commercialisation de notre offre de vins de pays et de vins de table. En outre, 15 millions de francs doivent permettre d'aider les coopératives à resserrer leurs liens avec ces structures de commercialisation.

J'insiste sur le fait que ces aides, qui avaient été demandées par la profession, doivent être utilisées. Or elle ne le sont pas assez, voire pas du tout !

Enfin, pour accélérer la reconversion du vignoble méridional et encourager le remplacement des cépages qui n'ont plus de marché, la reconversion progressive peut désormais être mise en oeuvre. Je souhaite aussi qu'elle soit appliquée de façon significative dès cette année pour éviter que l'an prochain nous nous retrouvions dans la même situation de surproduction.

En conclusion, je tiens à condamner l'attentat à la bombe dont a été victime la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de Montpellier hier matin. Ce type d'action, qui ne peut que nuire à l'image de la région Languedoc-Roussillon et de ses vins, rendra surtout plus difficile la mise en oeuvre de mesures pourtant indispensables étant donné la gravité de la situation.

M. Roland Courteau. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Courteau.

M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, message reçu ! Ce sont d'excellentes nouvelles, et je tiens à vous remercier, simplement et sincèrement, de votre énorme investissement en faveur de la viticulture et, plus généralement, du monde agricole au cours de ces dernières années.

DIFFICULTÉS DU LYCÉE LE MAS-BLANC

À BOURG-MADAME

M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, auteur de la question n° 1271, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Paul Blanc. Monsieur le ministre, vous avez évoqué l'arrachage des vignes dans le département des Pyrénées-Orientales. Je ne vous cache pas que j'ai, à ce sujet, quelques inquiétudes ! J'espère que nous aurons l'occasion de revenir sur cette question ultérieurement.

Mais, aujourd'hui, je tiens à attirer votre attention sur les très grandes difficultés auxquelles est confronté l'enseignement agricole privé, plus particulièrement le lycée Le Mas-Blanc, à Bourg-Madame.

Cet établissement, situé en zone de montagne, voit peu à peu ses ressources financières diminuer, ce qui met en péril son fonctionnement normal. L'établissement privé de Céret connaît les mêmes difficultés.

La suppression envisagée des filières « services aux personnes » dans le domaine sanitaire et social serait extrêmement préjudiciable dans cette zone défavorisée.

En outre, les enseignants de ce secteur acceptent mal, pour ne pas dire très mal, la discrimination statutaire dont ils sont victimes par rapport à leurs collègues sous contrat de l'enseignement général.

Monsieur le ministre, quelles mesures financières envisagez-vous pour remédier à cet état de fait et pour sauvegarder l'enseignement agricole privé dans le département des Pyrénées-Orientales ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, si j'ai évoqué l'arrachage lié aux préretraites dans les Pyrénées-Orientales, ce n'était pas pour semer l'inquiétude, mais, bien au contraire, pour faire l'éloge de cette mesure expérimentale et volontariste très positive, qui constitue un bon moyen de restructurer le vignoble.

J'en viens à votre question, qui a retenu toute mon attention.

L'année dernière, le lycée agricole privé Le Mas-Blanc avait perdu treize élèves et sa subvention de fonctionnement avait donc été réduite au prorata de cette baisse d'effectifs. En revanche, lors de la rentrée du mois de septembre dernier, il a été constaté que cet établissement avait retrouvé ses effectifs, et même plus puisqu'il compte désormais 144 élèves contre 142 avant la baisse de l'année précédente. De ce fait, sa subvention de fonctionnement sera augmentée de 25 000 euros, et je peux vous confirmer qu'il n'est pas question de fermer la moindre classe.

M. Paul Blanc. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Paul Blanc.

M. Paul Blanc. Monsieur le ministre, vous ne m'avez pas répondu s'agissant de l'éventuel abandon des filières sociales,...

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Si !

M. Paul Blanc. ... lesquelles me paraissent indispensables, surtout à l'heure de la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie. Dispenser une formation dans ce secteur répond à une nécessité.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Bien sûr !

M. Paul Blanc. Or, aucun autre établissement de la zone n'assure cet enseignement. Je souhaite donc que les filières sociales soient maintenues au lycée Le Mas-Blanc.

CRITÈRES D'IMPLANTATION D'UN CENTRE D'ACCUEIL

DES DEMANDEURS D'ASILE DANS LES YVELINES

M. le président. La parole est à M. Larcher, auteur de la question n° 1266, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. Gérard Larcher. En juillet dernier, par hasard, Mme le maire d'Emancé apprenait qu'était préparé au ministère de l'emploi et de la solidarité, en quelque sorte dans le secret, un projet d'installation, dans ce village de 650 habitants situé au fond des bois, d'un centre de premier accueil des demandeurs d'asile. Le député et le sénateur des Yvelines ayant été avertis par cette élue - je constate avec plaisir que Mme Boutin, députée, se trouve dans la tribune de la présidence du Sénat - nous avons obtenu d'être reçus - pour ainsi dire en catastrophe - au ministère à la fin du mois de juillet.

Ce projet, qui portait à l'origine sur 500 places d'accueil, risque, bien sûr, de déstructurer ce village, qui a pourtant une longue tradition d'accueil et de tolérance.

Il a ainsi accueilli des dizaines de familles - polygames - de Maliens, dont les enfants ont été scolarisés au sein même du village, alors que, parallèlement, l'Etat se désengageait et ne tenait pas ses promesses : plus d'assistante sociale, aucun enseignant supplémentaire en renfort, etc.

Ce même village a aussi accueilli 150 Albanais, qui ont d'ailleurs dû partir parce que les conditions de sécurité n'étaient pas assurées.

Quels ont donc été les critères retenus pour l'implantation de ce centre d'accueil des demandeurs d'asile ? Pourquoi cette implantation est-elle envisagée dans un village dépourvu de transports collectifs, situé à trois kilomètres de la première gare et à dix kilomètres du premier commerce ?

J'ajoute que ce village n'est pas en mesure d'assurer le traitement des eaux supplémentaires. Même la distribution d'eau potable pose problème puisque, dans une partie du village, elle n'est pas assurée au-delà du premier étage.

Le choix a ainsi été opéré en fonction de critères que même l'association Forum des réfugiés considère comme déraisonnables.

Cette manière de procéder appelle, madame la secrétaire d'Etat, quelques éclaircissements, et je vous dis d'emblée que je n'accepterai pas que le débat soit porté sur le terrain de la xénophobie. La tradition d'accueil que je viens de rappeler démontre que c'est tout le contraire !

Accueillir des demandeurs d'asile nécessite que certaines conditions soient réunies pour que soit respectée leur dignité. Il ne faut pas que ces demandeurs d'asile soient abandonnés, comme l'ont été les familles maliennes - quatre sont encore sur le site - sans assistante sociale et alors que le gestionnaire, la SONACOTRA, ne paie pas depuis trois ans sa taxe sur les ordures ménagères au syndicat intercommunal, lequel connaît, d'ailleurs, mais pour d'autres raisons, de grandes difficultés !

Nous avons besoin de comprendre et, surtout, nous ne voulons pas, sur ce sujet délicat et douloureux, d'une politique de l'approximation, du secret et, finalement, du n'importe quoi. Les demandeurs d'asile sont des êtres humains et on ne peut les traiter ainsi.

Voilà pourquoi, madame la secrétaire d'Etat, je souhaite connaître les conditions dans lesquelles ce choix a été opéré. Il n'y a pas de clivage politique sur cette question puisque des conseillers généraux socialistes partagent notre sentiment ; il s'agit non pas d'une affaire droite-gauche mais de la vie quotidienne des habitants d'Emancé et de l'avenir des demandeurs d'asile.

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, il n'y a pas de secret, ma réponse en apportera la preuve.

Mais, avant d'en venir au cas précis que vous évoquez, permettez-moi de rappeler le contexte national, parce qu'il me paraît important de bien situer le problème.

La France connaît une forte demande d'hébergement liée à l'augmentation du nombre de demandes d'asile conventionnel. Cette croissance intervient dans un contexte de saturation des capacités d'hébergement en centres d'accueil des demandeurs d'asile. Les capacités d'accueil totales - hors nuitées d'hôtel - sont en effet aujourd'hui insuffisantes. Ainsi, près de 11 500 demandeurs d'asile sont actuellement hébergés hors de ce dispositif spécifique. Par exemple, en Ile-de-France, 3 500 personnes sont hébergées dans des structures de droit commun, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale. Cette situation conduit à priver d'hébergement les populations accueillies habituellement dans le cadre du dispositif d'urgence, et de nombreuses personnes isolées sont aujourd'hui dans une situation de grande précarité.

C'est dans ce contexte qu'avec d'autres sites celui de Montlieu, sur la commune d'Emancé, dans les Yvelines, a été choisi afin d'accueillir 300 demandeurs d'asile conventionnels, et non 350, voire 500.

Ce choix se justifie, d'une part, parce que le centre d'hébergement de Montlieu est un bien qui appartient à l'Etat et, d'autre part, parce qu'il est situé en région Ile-de-France où, vous le savez, monsieur le sénateur, la question de l'hébergement des demandeurs d'asile est particulièrement préoccupante.

Ce site est, en effet, situé en zone rurale.

Je vous indique par ailleurs, mais vous le savez probablement, que le site de Montlieu a été affecté par le passé à la protection judiciaire de la jeunesse - c'est ce à quoi vous faisiez allusion en disant que cette commune avait une tradition d'accueil - et qu'il avait accueilli alors plusieurs centaines de personnes. Je ne vois donc pas en quoi le changement d'activité de ce site constitue un problème. C'est, bien au contraire, l'occasion pour l'Etat, avec le concours de la SONACOTRA, de rénover ce site vieillissant et de régler certaines difficultés liées notamment à l'écoulement des eaux usées, dont vous venez de faire état. Une collaboration existe d'ailleurs entre le préfet des Yvelines et le maire d'Emancé dans ce domaine.

Je voudrais également vous rassurer sur les moyens humains mis en oeuvre sur ce site puisqu'une trentaine de personnes y travailleront, dont deux infirmières, six travailleurs sociaux, six animateurs, plusieurs gardiens et des agents de maintenance.

Deux classes seront ouvertes à l'intérieur du centre pour accueillir les mineurs des familles de demandeurs d'asile. Une convention avec le rectorat est en cours de préparation sur ce point.

Enfin, s'agissant des moyens médicaux mis en oeuvre, depuis le 19 décembre dernier, le préfet des Yvelines prépare, à la demande d'Elisabeth Guigou et en liaison avec la DDASS, une convention avec un établissement hospitalier.

Monsieur le sénateur, je tiens à vous rassurer : Emancé n'est pas Sangatte. Il n'est pas question d'y accueillir plus de 300 personnes. Il n'est pas davantage question d'y accueillir des personnes en situation irrégulière ou d'établir de manière permanente les demandeurs d'asile à Emancé puisqu'il ne s'agit que d'un centre de préaccueil.

M. Gérard Larcher. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Larcher.

M. Gérard Larcher. Madame la secrétaire d'Etat, vos propos ne m'ont pas rassuré. Je me doutais bien que des animateurs, des infirmières et des enseignants seraient affectés à ce centre !

Permettez-moi de rappeler que le chiffre de cinq cents demandeurs d'asile à héberger émanait du ministère, qui, lors d'une réunion en septembre à la mairie d'Emancé, l'a ramené à trois cents ; le chiffre de cent vingt correspond quant à lui au nombre de jeunes qui étaient accueillis au titre de la protection judiciaire de la jeunesse. Mme le maire d'Emancé a fixé, à la lumière de ce qui se pratique ailleurs, à cinquante personnes la capacité d'accueil de sa commune, comme elle l'a rappelé hier dans la presse. Il ne s'agit donc pas d'un refus total !

En fait, le chiffre de trois cents personnes à accueillir correspond à l'équilibre financier de la SONACOTRA. Mais on ne conduit pas une politique, en matière de centres de premier accueil, au nom des équilibres financiers de la SONACOTRA ! Aujourd'hui, c'est donc un calcul strictement capitaliste qui amène à fixer à trois cents le nombre des demandeurs d'asile devant être hébergés sur le territoire de la commune d'Emancé. Outre que la SONACOTRA devra régler ses dettes liées à la gestion déliquescente qui a été la sienne antérieurement, je ne peux accepter que ses objectifs d'équilibre financier déterminent la politique d'accueil !

Comprenez-le bien, madame la secrétaire d'Etat, nous ne tournons pas le dos aux problèmes, nous les regardons en face. Je pourrais évoquer aussi le cas des Roumains qui ont été installés à Saint-Cyr-l'Ecole, commune en grande difficulté, au prétexte de l'existence d'un terrain militaire. Dans un premier temps, il avait été question de les établir aux Mureaux, où la situation est déjà très délicate !

A l'heure actuelle, c'est l'approximation qui prévaut s'agissant de l'accueil des demandeurs d'asile, conséquence d'une politique nationale qui me paraît d'ailleurs devoir être revue.

En tout cas, je peux affirmer, au nom des élus de ma région, que nous ne refusons pas d'affronter les problèmes, mais que nous n'accepterons pas qu'une commune soit en quelque sorte sacrifiée pour des motifs économiques, alors qu'elle a déjà, me semble-t-il, honoré de manière exceptionnelle sa tradition d'accueil.

M. Paul Blanc. Très bien !

PLAFOND DE RECOUVREMENT SUR LA SUCCESSION

DES ALLOCATAIRES DU FONDS NATIONAL DE SOLIDARITÉ

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 1273, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. Jean Boyer. Le décret n° 82-116 du 1er février 1982 fixe à 250 000 francs le plafond de recouvrement sur la succession des allocataires du Fonds de solidarité vieillesse.

Depuis cette date, il semble qu'aucune actualisation de ce montant ne soit intervenue. De ce fait, les bénéficiaires de successions se trouvent placés dans des situations difficiles, voire conflictuelles. Leurs parents étaient, le plus souvent, de petits agriculteurs retraités, aux revenus très modestes. Doit-on les obliger à vendre un petit patrimoine familial acquis à grand-peine ?

Une actualisation rapide de la référence du seuil de remboursement me paraît s'imposer, car la valeur immobilière retenue n'est plus du tout, en 2002, ce qu'elle était en 1982.

Il est également très important de souligner la nécessité, pour les personnes âgées, de posséder une certaine somme d'argent. Il s'agit pour eux d'une question de sécurité et de tranquillité en cas d'hospitalisation ou d'hébergement en maison de retraite.

Bien que des abattements sur la valeur de référence du foncier non bâti et des bâtiments d'exploitation soient intervenus, il me semble nécessaire d'étudier la possibilité d'une actualisation. Cela permettrait en effet de rassurer nos retraités, s'agissant de successions le plus souvent modestes.

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, l'allocation supplémentaire du Fonds de solidarité vieillesse, c'est-à-dire le « second étage » du minimum vieillesse, est une prestation non contributive, servie sans contrepartie de cotisations et sous conditions de ressources. Complétant le « premier étage » du minimum vieillesse, elle est destinée à procurer un minimum de ressources, à hauteur de 569,38 euros par mois, aux personnes âgées de plus de soixante-cinq ans, ou de soixante ans en cas d'inaptitude au travail.

La récupération sur la succession de l'allocataire décédé constitue l'expression légitime, me semble-t-il, de la solidarité familiale.

Ce principe connaît toutefois des assouplissements importants, notamment en ce qui concerne le seuil de recouvrement. Ainsi, la récupération opérée ne peut pas amener le montant de l'actif net successoral au-dessous de 38 112,25 euros, soit 250 000 francs.

Par ailleurs, la récupération sur succession peut être différée, et ce jusqu'au décès des héritiers qui étaient à la charge de l'allocataire à la date de son décès et qui, à cette date, étaient soit âgés d'au moins soixante-cinq ans, ou d'au moins soixante ans en cas d'inaptitude au travail, soit plus jeunes mais atteints d'une invalidité réduisant d'au moins des deux tiers leur capacité de travail ou de gain.

En outre, les biens ayant fait l'objet d'une donation sont considérés comme définitivement sortis du patrimoine, quelles que soient la forme et la date de la donation. Ce dispositif est bien connu des agriculteurs.

Au demeurant, sensible aux difficultés financières rencontrées par certaines familles et pour tenir compte notamment de l'évolution de la valeur immobilière que vous avez évoquée dans votre question, monsieur le sénateur, le Gouvernement étudie la possibilité de relever le seuil de recouvrement.

MISE EN PLACE DES CENTRES LOCAUX D'INFORMATION

ET DE COORDINATION GÉRONTOLOGIQUES

M. le président. La parole est à M. Mouly, auteur de la question n° 1260, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. Georges Mouly. A l'occasion d'une séance de questions orales, au mois de novembre 2000, j'avais interrogé le Gouvernement à propos du nouveau dispositif instauré dans le cadre de sa politique de maintien à domicile des personnes âgées et de la suite réservée à l'expérimentation mise en oeuvre en 2000. Mme Gillot avait alors souligné la volonté du Gouvernement d'engager une réforme de grande envergure, avec notamment la création de centres locaux d'information et de coordination, les CLIC, « destinés à mailler le territoire au niveau des bassins de vie pour assurer la coordination gérontologique des services qui sont utiles à nos concitoyens âgés ».

Le cahier des charges national, établi en 2001 à la suite des expérimentations menées en 2000, précise que ce dispositif est « enrichi au fil de la programmation pluriannuelle et destiné à structurer d'ici à 2005 un réseau bien identifié et donne un cadre de référence ». Mme Gillot, dans sa conclusion, évoquait la mise en place du maillage des CLIC dans chaque département d'ici à cinq ans, et donc la nécessité, pour les acteurs locaux, d'engager une réflexion dans une logique de partenariat et de cofinancement.

Par ailleurs, la circulaire d'application du 18 mai 2001 évoque un réseau national « correctement implanté, parfaitement identifié, éprouvé et pérenne organisant un maillage cohérent du territoire national à partir des échelons locaux et départementaux ».

Aujourd'hui, outre les sites pilotes déjà installés, des structures ont obtenu le « label CLIC » - je suis ainsi président d'une association intercantonale dont le service de coordination a obtenu ce label à son niveau maximal - et d'autres le sollicitent.

Or, cette année, les crédits inscrits en 2001 au budget de l'Etat pour le chapitre 46-31, article 50, du ministère de l'emploi et de la solidarité n'auraient pas été reconduits, ce qui compromet la poursuite de cette action et amène les partenaires qui oeuvrent sur le terrain « pour une politique publique répondant aux attentes concrètes des personnes âgées » - je cite encore ici la circulaire du 18 mai 2001 - à s'interroger sur la pérennité des CLIC.

Parallèlement, à la mi-janvier, vous avez présenté, madame la secrétaire d'Etat, le plan gériatrique. Centré sur l'hôpital, il doit permettre une prise en charge en liaison avec la médecine de ville. J'ai pris connaissance avec intérêt de cette annonce, d'autant que j'avais déjà eu l'occasion d'appeler l'attention du Gouvernement sur la nécessité de renforcer les moyens des services de gériatrie au sein des hôpitaux, plus particulièrement pour ce qui concerne celui de Tulle, chef-lieu de mon département. L'association que je préside travaille d'aillleurs en partenariat étroit avec l'hôpital et les médecins de ville à la mise en oeuvre d'une coordination autour de la personne âgée, afin de favoriser le maintien de celle-ci à domicile ; ce partenariat se formalise aujourd'hui au travers du « label CLIC ».

Le plan de gériatrie est lui aussi prévu pour une période de cinq ans et est annoncé comme un élément clé de la politique du Gouvernement en direction des personnes âgées, aux côtés du « plan Alzheimer » et de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA. Cependant, au nombre des actions déclinées dans le plan de gériatrie ne figure pas le dispositif des CLIC : seul un voeu, peut-être, est émis, celui de s'appuyer sur une « chaîne coordonnée » associant tous les professionnels, sans pour autant que les CLIC soient légitimés.

Ma question, madame la secrétaire d'Etat, est donc double : envisagez-vous de préciser l'articulation des CLIC avec le plan de gériatrie, dans la logique de la politique développée par le Gouvernement en faveur des personnes âgées, et comment comptez-vous financer, pour cette année et pour les suivantes, les structures qui se sont engagées ou qui s'engagent dans une démarche de labellisation au titre des CLIC ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, vous connaissez mon attachement au dispositif des centres locaux d'information et de coordination gérontologiques. En tant que parlementaire, j'avais rédigé un rapport pour le Premier ministre, et deux choses m'avaient beaucoup surprise à cette occasion.

J'avais été, d'une part, très frappée de la situation dans laquelle se trouvaient placés les familles, les professionnels et les personnes âgées s'agissant de l'accès aux droits. En effet, il n'existait pas de dispositif cohérent et coordonné permettant d'informer les intéressés et d'aider les personnes âgées et leurs familles à prendre la bonne décision en matière de prise en charge.

J'avais été, d'autre part, très impressionnée par les solutions qui avaient été apportées à ce problème en Europe du Nord, aux Pays-Bas ou en Angleterre, ou même en France : je pense en particulier ici au dispositif de grande qualité qui avait été mis en place au sein de l'hôpital local de Lunel. C'est en fonction de ces expériences que j'avais formulé une proposition qui avait été reprise par M. le Premier ministre et par Mme Gillot.

A cet égard, je vous remercie, monsieur le sénateur, d'avoir souligné combien il était important d'élaborer des politiques complètes et globales au profit des personnes âgées. A ce titre, différents dispositifs ont été mis en oeuvre, tels que l'allocation personnalisée d'autonomie, les mesures nouvelles visant à garantir la qualité de la prise en charge des personnes âgées en établissement, le plan de financement pour les maisons de retraite, la reconnaissance de la nécessité de la gériatrie dans les hôpitaux, le plan Alzheimer et les centres locaux d'information et de coordination gérontologiques.

Cela étant, monsieur le sénateur, je voudrais vous rassurer quant au financement des CLIC.

En effet, en 2002, les moyens pérennes inscrits au budget de l'Etat à ce titre seront portés à 22,87 millions d'euros, grâce à 12,2 millions d'euros de crédits supplémentaires. Cette mesure devrait permettre de labelliser cent soixante nouveaux CLIC et de porter le nombre de ceux-ci à plus de trois cent vingt à la fin de 2002. La semaine dernière, j'ai participé, avec Mme Guigou, à une rencontre avec les responsables des centres locaux d'information et de coordination gérontologiques, et je puis vous assurer, monsieur le sénateur, que le mouvement est lancé et que le maillage du territoire annoncé par Mme Gillot est en bonne voie.

En ce qui concerne la question, elle aussi très importante, du lien entre les CLIC et les services de gériatrie, nous aurons dès cette année la possibilité de mettre en place ou de soutenir trente-cinq services de gériatrie dans les hôpitaux. Lors de ma rencontre avec les responsables des CLIC, la semaine dernière, j'ai insisté sur le fait qu'un CLIC gérontologique ne pouvait être efficace qu'à la condition de travailler en liaison avec les services de gériatrie. A cet égard, la circulaire n'est pas complètement rédigée, mais je demanderai qu'un tel lien soit systématiquement prévu.

M. Georges Mouly. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Mouly.

M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'Etat, à l'occasion de la mise en place de plusieurs volets d'une politique en faveur des personnes âgées, je vous ai fait part de ce que je connaissais sur le terrain et je vous ai posé une double question. Sur ces deux points, votre réponse me donne satisfaction et je vous en remercie.

ÉTABLISSEMENTS D'ACCUEIL

DES PERSONNES HANDICAPÉES

M. le président. La parole est à M. Vanlerenberghe, auteur de la question n° 1264, adressée à Mme le ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la secrétaire d'Etat, je voudrais attirer votre attention, ainsi d'ailleurs que mon collègue Yves Coquelle du Pas-de-Calais, sur la situation de près de 3 000 enfants, adolescents et adultes handicapés du département du Pas-de-Calais, qui attendent de pouvoir être accueillis dans des structures médico-sociales adaptées à leurs besoins. Ainsi, 2 000 adultes attendent une place en CAT, centre d'aide par le travail, 500 enfants attendent d'être accueillis, 280 adultes sont en attente d'une place en maison d'accueil spécialisée et 150 sont en attente d'un foyer à double tarification.

Certes, il existe des établissements, mais force est de constater qu'ils sont en nombre insuffisant et que, bien souvent, ils ne correspondent pas aux situations recensées, sans parler des moyens financiers nécessaires à la gestion de ces structures, qui demeurent tout à fait dérisoires !

Permettez-moi de citer quelques exemples. Il existe un seul IRP, institut de rééducation psychothérapeutique, de quarante-cinq places dans le Pas-de-Calais, contre six dans le Nord et trois en moyenne par département en France. On pallie donc dans l'urgence des insuffisances par du sureffectif, des maintiens en IME, institut médico-éducatif, ou tout simplement l'envoi en Belgique.

Autre exemple : la délégation du groupement des organismes gestionnaires des établissements médico-sociaux du Pas-de-Calais a entrepris plusieurs démarches auprès du ministère, sans que le problème ait avancé sur le fond. On lui a répondu qu'il n'était pas possible de créer de nouveaux CAT, alors que l'on apprend, dans le même temps, qu'en Haute-Normandie - pourquoi la Haute-Normandie et pas le Pas-de-Calais ? - 270 places de CAT ont été débloquées.

Madame la secrétaire d'Etat, le situation est préoccupante et elle s'aggrave chaque jour. Je vous demande de mettre en place un plan de rattrapage, un plan d'urgence, qui est réclamé par le Pas-de-Calais. Vous connaissez parfaitement la situation des organismes concernés. Aujourd'hui, les handicapés attendent des décisions de votre part.

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, vous appelez l'attention de Mme Ségolène Royal sur la situation des structures qui accueillent des personnes handicapées dans le département du Pas-de-Calais, comme le fera d'ailleurs, dans quelques instants, votre collègue M. Yves Coquelle.

Ma réponse portera sur les établissements financés par l'assurance maladie et par l'Etat, sachant que les foyers de vie, les foyers occupationnels et les foyers d'hébergement relèvent des conseils généraux.

Afin d'inscrire l'effort d'augmentation des capacités d'accueil en faveur des personnes handicapées dans la durée et de fixer les perspectives pour le secteur, le Gouvernement a engagé un plan pluriannuel de création de places pour adultes handicapés pour la période 1999-2003. Ce programme aura permis, d'ici à l'an prochain, un développement important des capacités d'accueil d'établissements grâce à la création de 8 500 places de centres d'aide par le travail, de 5 500 places nouvelles de maisons d'accueil spécialisées et de foyers à double tarification ainsi que de 2 500 places d'ateliers protégés.

Dans ce cadre, le département du Pas-de-Calais a déjà bénéficié, à ce jour, de la création de soixante-huit places en centres d'aide par le travail : vingt-six en 1999, vingt-quatre en 2000 et dix-huit en 2001. Cet effort sera poursuivi en 2002 et 2003.

S'agissant des maisons d'accueil spécialisées et des foyers à double tarification, 2,2 millions d'euros ont été attribués au département, permettant la création de 113 places entre 1999 et 2002.

Ce programme a été complété et renforcé par les mesures nouvelles du plan triennal en faveur des personnes les plus lourdement handicapées et du développement de la vie autonome.

Ainsi les crédits attribués au département du Pas-de-Calais permettent-ils la création de 277 places pour les autistes, les traumatisés crâniens, les enfants et les adolescents polyhandicapés ainsi que pour les services d'éducation spéciale et de soins à domicile, les SESSAD.

De plus, vingt postes supplémentaires d'auxiliaires de vie et quinze postes d'auxiliaires de vie scolaire sont attribués au département au titre de l'année 2002.

Enfin, une enveloppe supplémentaire de 20 millions d'euros de crédits d'assurance maladie est prévue en 2002 dans le cadre de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Ces crédits seront consacrés à la création de places supplémentaires destinées aux personnes autistes, aux polyhandicapés et aux traumatisés crâniens. On le sait, l'effort doit surtout porter sur ces trois secteurs. La répartition de l'enveloppe sera réalisée sur la base d'un appel d'offres national, dans le cadre duquel les propositions de la région Nord - Pas-de-Calais seront naturellement examinées.

Le Gouvernement est bien conscient que la situation sociale du Pas-de-Calais en général et l'importance des listes d'attente pour l'accès aux établissements pour personnes handicapées en particulier justifient la poursuite des efforts déjà menés en matière de création de places dans ce département. Notre volonté est de procéder progressivement à un rééquilibrage des taux d'équipements médico-sociaux en veillant prioritairement à améliorer l'offre de places des départements les moins bien équipés. Contrairement à ce que laisse entendre votre question, monsieur le sénateur, le Gouvernement se montre particulièrement attentif aux besoins de votre département.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la secrétaire d'Etat, compte tenu des besoins que j'ai exprimés tout à l'heure, comment être satisfait par l'avalanche de chiffres que vous avez cités ?

Nous attendons, dans notre département, un plan de rattrapage. Il ne s'agit pas d'un plan normal. Un plan de rattrapage, c'est une mesure certes inégalitaire, mais qui est indispensable pour notre département au regard des besoins que j'ai mentionnés voilà quelques instants.

Vous avez fait des propositions concernant les handicapés moteurs, notamment, mais le nombre de places en CAT reste insuffisant.

Sur les 8 500 places qui ont été créées au cours des dernières années dans notre pays, une centaine ont concerné le Pas-de-Calais. Or je rappelle, madame la secrétaire d'Etat, que le Pas-de-Calais est le cinquième département français, avec 1 400 000 habitants.

MANQUE DE STRUCTURES D'ACCUEIL

ADAPTÉES AUX DIFFÉRENTS HANDICAPS

DANS LE DÉPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS

M. le président. La parole est à M. Coquelle, auteur de la question n° 1268, adressée à Mme le ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées.

M. Yves Coquelle. Le hasard a voulu que je pose une question similaire à celle que vient de formuler mon collègue maire d'Arras.

Nous ne le nions pas, des choses ont été réalisées dans le département, mais, eu égard aux besoins, c'est nettement insuffisant. Mon collègue l'a dit : 2 000 adultes handicapés espèrent avoir une place en CAT et ils attendent depuis des années. Ces inscriptions prolongées sur les listes d'attente rendent obligatoires le maintien en famille, ce qui est parfois dramatique, ou l'accueil au sein d'établissements qui ne sont pas adaptées aux besoins de la personne handicapée, ce qui entraîne, madame la secrétaire d'Etat, la perte des acquis et des apprentissages qui ont été obtenus après de longues années en institut médico-éducatif. Au rythme des programmations actuelles, il faudrait quarante-cinq ans pour que le département du Pas-de-Calais soit mis à niveau et puisse accueillir toutes ces personnes en CAT.

En ce qui concerne le secteur de l'enfance inadaptée, la situation n'est pas meilleure ; mon collègue a donné les chiffres. Il n'existe ainsi, dans notre département, qu'un seul institut de rééducation psychothérapeutique, alors que l'on en dénombre effectivement six dans le département voisin, le Nord.

Enfin, il convient de constater que, dans les domaines de l'autisme et du polyhandicap, aucun des projets envisagés par le département n'a été retenu sur le plan national pour 2001.

Il est donc nécessaire, et j'insiste sur ce point après mon collègue, de procéder à un rattrapage. Madame la secrétaire d'Etat, actuellement beaucoup de jeunes sont placés par leurs parents en Belgique. La France est un grand pays, le département du Pas-de-Calais est un grand département qui devrait pouvoir donner satisfaction à toutes ces personnes.

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, votre question rejoint tout à fait celle de votre collègue M. Vanlerenberghe.

Sans rappeler l'ensemble des chiffres, permettez-moi d'en citer quelques-uns : création de soixante-huit places en CAT et de deux cent soixante-dix-sept places pour les autistes, les traumatisés crâniens, les enfants et adolescents polyhandicapés ainsi que pour les services d'éducation spéciale et de soins à domicile. De plus, création, en 2002, de vingt postes supplémentaires d'auxiliaires de vie et quinze postes d'auxiliaires de vie scolaire.

J'ai bien entendu ce que vous venez de dire en ce qui concerne la situation particulière du Pas-de-Calais, et le fait, qui peut apparaître comme une des raisons du problème, qu'un certain nombre de familles placent leur enfant en Belgique. On voit bien qu'il y a là un travail particulier.

Je ne peux que répéter ce que j'ai dit tout à l'heure à votre collègue. Le Gouvernement est très conscient que la situation sociale du Pas-de-Calais justifie la poursuite de l'accentuation des efforts menés. Sur l'ensemble du territoire, nous devons réduire les inégalités, en procédant progressivement à un rééquilibrage des taux des équipements médico-sociaux, en veillant prioritairement, en concertation avec les départements et les gestionnaires d'établissements et de services, à améliorer l'offre de places ou de services dans les départements les moins dotés.

Ecoutant tout à l'heure vos propos, j'ai bien perçu les situations de recul par rapport aux acquis dans lesquelles un certain nombre d'adultes ou d'adolescents handicapés peuvent se retrouver. Mais vous êtes, comme partout en France, parfois confrontés à des situations où les familles, parce qu'il y a un investissement très important de leur part, que l'on connaît tous, ont fait le choix de garder les personnes handicapées auprès d'elles. Le vieillissement fait que nous devons aussi travailler sur ce point. Il y a des inégalités entre les départements sur la problématique de l'accompagnement de ceux que l'on appelle les « handicapés vieillissants ». Les schémas départementaux en faveur des handicapés, qui ont été intégrés dans le cadre de la loi de 1975, deviendront un outil de négociation entre l'Etat, les institutions de gestion et les départements.

AIDES FINANCIÈRES À LA RÉALISATION DES TRAVAUX DE SÉCURITÉ DANS LES COLLÈGES PRIVÉS

M. le président. La parole est à M. Lardeux, auteur de la question n° 1263, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, ministre qui n'honore pas souvent de sa présence les questions orales au Sénat,...

M. Didier Boulaud. Il est puni ! (Sourires.)

M. le président. ... ce qui n'est pas très convenable, et on pourra le lui dire !

Vous avez la parole, monsieur Lardeux.

M. André Lardeux. Comme vous, monsieur le président, je regrette que M. le ministre de l'éducation nationale ne soit pas présent, mais cela me donne le plaisir de voir M. le secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Peut-être existe-t-il des vases communicants entre les anciens combattants et l'éducation nationale ? (Sourires.)

Je veux évoquer à nouveau les problèmes soulevés par l'application de la loi Falloux, c'est-à-dire l'article L. 151-4 du code de l'éducation.

Les établissements privés sous contrat concourent au service public de l'éducation, mais manquent de moyens, alors qu'ils sont soumis aux mêmes obligations que les établissements publics. Cela concerne notamment la sécurité. Les normes sont de plus en plus contraignantes, et, en tout état de cause, elles n'existaient pas lors du vote de la loi Falloux en 1850.

La commission de sécurité exige la mise aux normes des établissements, en particulier pour les collèges. Pour les collèges publics, les travaux sont pris en charge par les départements, comme il se doit, et plutôt bien depuis les lois de décentralisation ; mais, pour les collèges privés, la loi Falloux limite le montant de la subvention à 10 % du budget global de ces établissements. Or, le coût des travaux est très élevé, alors que les organismes de gestion ont déjà des difficultés à faire face aux dépenses courantes.

Aussi, comme ce fut le cas en Maine-et-Loire et dans d'autres départements, ces collèges se sont tout naturellement tournés ves les départements. En Maine-et-Loire, le conseil général, à l'unanimité de ses membres, groupe socialiste compris - cela prouve bien qu'il ne s'agit pas d'un débat opposant la droite et la gauche - a voté le principe d'une aide substantielle pour les seuls travaux de sécurité. La délibération a été annulée par le tribunal administratif de Nantes avec une célérité que je ne lui connaissais d'ailleurs pas, et l'appel est en cours. Les familles considèrent cette situation comme inéquitable, ce qui semble justifié dans la mesure où tous les jeunes de ce pays ont droit aux mêmes garanties de sécurité.

Ce sentiment est accentué par le manque de logique de notre législation, qui permet de subventionner une entreprise privée ou un établissement social même congréganiste.

Dans ces conditions, ne faut-il pas dépasser les vieilles oppositions ? N'est-il pas temps de repenser la laïcité à la lumière des attentes de la société du xxie siècle ? Aussi, j'aimerais savoir quelles initiatives M. le ministre de l'éducation nationale est prêt à prendre pour remédier à cette situation d'un autre âge. Je suis convaincu que le responsable de l'Etat qui débloquera ce problème fera oeuvre utile en permettant, dans des limites que la loi doit fixer, de mieux prendre en compte les attentes des familles. En effet, ces établissements n'ont rien d'élitiste quand on observe le niveau social moyen des élèves accueillis. De plus, cette aide aux travaux de sécurité n'entraînerait aucun accroissement d'un patrimoine privé puisqu'il s'agit d'intervenir sur des bâtiments existants et non de procéder à l'extension de surfaces déjà construites.

J'ajoute à ma question un élément sur lequel j'attends une réponse précise que les services du ministère de l'éducation nationale s'obstinent à ne pas donner. Sans doute vais-je m'entendre répondre que les organismes de gestion peuvent obtenir des garanties d'emprunt des collectivités locales, ce qui est exact. Mais si la situation financière de l'établissement le contraint à la mise en jeu de la garantie, les sommes versées dans ce cas par la collectivité doivent-elles être limitées aux 10 % fixés par la loi Falloux ? Que peut-on faire si leur montant excède les 10 % en question du fait du volume de l'emprunt garanti ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Jacques Floch, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, sans doute avez-vous remarqué que, du fait de la douceur angevine, le sectarisme est absent du conseil général de Maine-et-Loire, ce dont je me félicite. (Sourires.)

La sécurité dans les établissements scolaires est évidemment une question d'intérêt majeur. Les établissements d'enseignement privés sont soumis aux mêmes normes de sécurité que les établissements publics. Les élèves, qu'ils soient scolarisés dans le secteur public ou dans le secteur privé, ont le même droit à bénéficier des conditions de sécurité maximales. Ainsi, toute ouverture d'un établissement privé est soumise au contrôle préalable des inspecteurs d'hygiène et de sécurité.

Les travaux de mise aux normes de sécurité des établissements scolaires, notamment des collèges publics et privés sous contrat, sont des opérations d'investissement qui doivent s'inscrire dans le cadre de la législation existante. Cette législation diffère selon qu'il s'agit de l'enseignement public ou de l'enseignement privé.

Dans l'enseignement public, c'est le département qui a la charge des collèges publics et, en conséquence, en assure la construction, la reconstruction, l'extension, les grosses réparations et l'équipement, ainsi que le fonctionnement, à l'exception des dépenses pédagoqiques à la charge de l'Etat.

Quant aux collèges privés, ils sont fondés et entretenus par des particuliers ou des associations. Il appartient donc aux propriétaires privés de financer les travaux nécessaires à la mise aux normes de sécurité.

La législation permet aux collectivités locales d'intervenir sous différentes formes et sous certaines conditions.

Tout d'abord, le département a la faculté d'attribuer aux collèges privés des locaux et une subvention, sans que cette dernière puisse excéder le dixième des dépenses annuelles de l'établissement.

Cette participation financière autorisée peut être affectée, entre autres, à la réalisation d'investissements, notamment dans le domaine de la sécurité.

L'attribution d'une subvention ou d'un local est soumise à l'avis préalable du conseil académique de l'éducation nationale. Cet avis porte sur l'opportunité des subventions proposées.

Par ailleurs, l'Etat et les collectivités territoriales peuvent garantir les emprunts auxquels recourent les établissements d'enseignement privés.

Depuis 1964, l'Etat peut accorder sa garantie aux emprunts émis par des groupements ou associations à caractère national pour financer la construction, l'acquisition et l'aménagement de locaux d'enseignement utilisés par les établissements privés. Plus précisément, les travaux financés au moyen d'emprunts garantis par l'Etat doivent avoir pour objet soit l'extension, le premier équipement ou les grosses réparations de locaux d'enseignement existants, soit la construction et l'aménagement de nouveaux locaux d'enseignement. Les demandes de garantie de l'Etat sont soumises à l'instruction d'une commission interministérielle, et la garantie de l'Etat est accordée par arrêté du ministre chargé des finances.

Cette faculté de garantir les emprunts a été étendue en 1986, aux communes pour les écoles, aux départements pour les collèges et aux régions pour les lycées, au profit des groupements ou associations à caractère local. Depuis 1986, les collectivités territoriales peuvent donc garantir les emprunts contractés par les organismes de gestion, notamment pour le financement de travaux de mise aux normes de sécurité. Les garanties d'emprunts qui sont allouées peuvent couvrir tout ou partie des emprunts. Cette forme d'aide présente des avantages incontestables : elle est autorisée sans ambiguïté par la loi ; c'est une procédure simple, et elle n'implique aucun décaissement pour la collectivité locale.

Enfin - et je répondrai ainsi à votre question précise, monsieur le sénateur - en cas de défaillance de l'organisme gestionnaire de l'établissement privé pour rembourser le prêt, la collectivité territoriale qui a accordé la garantie doit rembourser à l'établissement emprunteur la partie de l'emprunt qui a été couverte par la garantie. En effet, la loi Falloux ne s'appliquant qu'aux subventions et non aux garanties d'emprunt, il n'y a pas lieu d'appliquer ici la règle du plafonnement au « dixième des dépenses annuelles de l'établissement ».

Il n'est pas envisagé, pour l'instant, de modifier la législation en vigueur.

M. le président. La loi Astier permet davantage, heureusement d'ailleurs !

M. André Lardeux. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Lardeux.

M. André Lardeux. On peut effectivement citer la loi Astier pour l'enseignement technique, ou même la loi Rocard pour l'enseignement agricole. Il faudrait bien, d'ailleurs, que les trois ordres d'enseignement soient mis sur le même plan.

Le propos de M. le secrétaire d'Etat ne me satisfait guère, car il ne portait que sur la législation existante. Je note toutefois que, pour la première fois, une réponse précise est apportée quant à l'application des 10 % dans le cadre de la mise en jeu des garanties d'emprunt. Je ne sais pas s'il s'agit là d'une évolution de la position du ministère de l'éducation nationale. Mais, si tel est le cas, il faut aller encore plus loin. En effet, l'immobilisme et le refus de voir les problèmes ne peuvent résoudre les difficultés qui ne manqueront pas de se poser à nous. Nous n'échapperons donc pas à un grand débat sur l'éducation nationale et, au sein de ce dernier, à une discussion sur la place respective des différents ordres d'enseignement que sont l'enseignement public et l'enseignement associé au service public, c'est-à-dire l'enseignement privé sous contrat.

RÉFORME DES ÉTUDES MÉDICALES

M. le président. La parole est à M. Cléach, auteur de la question n° 1272, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Marcel-Pierre Cléach. Ma question, qui s'adresse aussi à M. le ministre de l'éducation nationale - et je tiens à féliciter M. Floch pour la brillante promotion qui est la sienne ce matin (sourires) - concerne le projet de réforme des études médicales.

Au regard des informations dont disposent les présidents d'université, il semblerait que les étudiants puissent, à l'avenir, accéder à plusieurs filières formant aux métiers médicaux et péri-médicaux à partir de l'obtention du certificat sanctionnant la première année du premier cycle des études médicales, ou PCEM1. Ainsi, en s'inscrivant en première année de médecine, les étudiants auront le choix, par un jeu de coefficient, entre plusieurs débouchés possibles : la médecine, la pharmacie, l'ergothérapie, le métier de sage-femme, etc. Les concours de recrutement des sages-femmes commencent d'ailleurs à se mettre en place selon cette configuration.

L'effet de la réforme sera de rendre le premier cycle des études médicales particulièrement attractif, puisque ce sera l'un des seuls débuts d'études supérieures universitaires ouvrant l'accès à plusieurs filières réglementées par le biais d'un concours unique aux coefficients variés. On peut raisonnablement supposer que cela entraînera un afflux d'étudiants vers cette filière, hélas ! au détriment des autres formations scientifiques ou techniques. En détournant des étudiants ayant un esprit scientifique de filières où ils font déjà défaut, cette réforme, qui a par ailleurs ses mérites, pose un premier problème.

Cette réforme aura, en outre, très vraisemblablement d'importantes répercussions sur les universités et les villes universitaires dans lesquelles cette formation ne sera pas offerte. Cette situation serait, par exemple, particulièrement préjudiciable pour l'université du Maine, qui n'a pas de formation médicale, mais dispose de laboratoires scientifiques de très bonne réputation.

Nous risquons donc de pénaliser involontairement certaines universités tout en suscitant à l'inverse des goulets d'étranglement, par exemple en matière de logements estudiantins, dans d'autres villes. Pour y remédier, serait-il possible de permettre la formation de première année dans toutes les villes universitaires et de répartir les formations péri-médicales sur l'ensemble des sites, tout en conservant la formation des médecins, pharmaciens et odontologues aux seules universités liées à un centre hospitalier universitaire ?

Je souhaiterais connaître l'appréciation du ministre de l'éducation nationale sur ces quelques réflexions et surtout l'avenir réservé à cette proposition, avant que ne soit définitivement arrêté le projet de réforme des études médicales.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Jacques Floch, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, je vous remercie de m'avoir promu... (Sourires.)

Depuis les années quatre-vingt où l'épidémie du sida a imposé de trouver de nouvelles réponses médicales puis sociales, nous savons que la prise en charge des problèmes de santé individuels et collectifs ne peut maintenant reposer que sur la meilleure coopération possible entre de nombreux professionnels.

De là, s'est renforcée l'idée des réseaux de soins ou de santé. Ceux-ci, c'est évident, ne peuvent fonctionner que si l'information circule bien entre les différents acteurs qui y concourent et si chacun, dans son rôle propre, est reconnu comme tel par ses partenaires, bref, si chacun tire les meilleures synergies du groupe pour servir le malade ou la collectivité concernée. Comme vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, cela est plus facile à dire qu'à faire.

La réalité montre que des progrès sont indispensables pour décloisonner, voire pacifier. Une façon d'y parvenir serait de donner très tôt à tous les jeunes qui exerceront un jour l'un de ces métiers la notion déterminante qu'ils partagent une culture commune.

C'est là le fondement de la réforme de cette première année des études de santé que, avec M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé, M. le ministre de l'éducation nationale veut faire aboutir.

La première conséquence de ce choix sera d'ouvrir l'accès de ces études à des bacheliers qui n'auront pas obligatoirement une formation préférentiellement scientifique. Tous les métiers de la santé n'ont pas en ce domaine les mêmes exigences. Il faudra donc rééquilibrer la répartition des enseignements entre les sciences biologiques et fondamentales, d'une part, et les sciences humaines et sociales, d'autre part, du moins pour ce qui concernera les enseignements communs à toutes les filières.

En effet, année commune ne signifie pas que, chemin faisant, les étudiants ne puissent exprimer leurs choix. Pour les y aider, un enseignement sur les métiers de la santé, y compris ceux de la recherche clinique ou fondamentale, devra être construit de telle sorte qu'il ira bien au-delà de la simple information et fera naître une réflexion en profondeur. Ainsi, les étudiants, en toute connaissance, choisiront mieux les enseignements optionnels qui définiront les accès aux futurs métiers.

Chaque filière sera sanctionnée par un concours propre et non, comme vous le pensiez, monsieur le sénateur, par un concours unique. En revanche, chaque étudiant pourra opter pour un ou plusieurs concours, dont les modalités, à ce jour, ne sont pas arrêtées. Il n'y a là rien qui puisse entraîner une attractivité plus grande que celle qui existe aujourd'hui sur les bacheliers scientifiques, bien au contraire sans doute.

En revanche, il est exact que cette réforme concernera un nombre important d'étudiants qui, aujourd'hui, se forment dans les écoles de santé mais qui, demain, demanderont à accéder à des formations universitaires. Ce prolongement normal de la réforme nécessite que cette dernière soit effectuée par étapes. Ces étapes seront mises à profit pour élaborer les objectifs pédagogiques nouveaux qui s'imposent afin d'étudier les meilleurs moyens à mettre en oeuvre pour les atteindre.

En collaboration avec M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé, M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale, a souhaité confier cette mission décisive à une commission pédagogique nationale où, sous l'autorité du représentant de la conférence des présidents d'université, les enseignants et les étudiants des différentes filières, à parité, formaliseront le travail de réflexion accompli depuis maintenant dix-huit mois.

Cette commission devra s'entourer, autant que de besoin, de tous les experts nécessaires, et ce compte tenu de l'ampleur de cette réforme ambitieuse, dans de nombreux domaines, tant pédagogique, docimologique que logistique. A ce propos, elle devra prendre en compte votre remarque portant sur les lieux de formation, sur les universités et sur les écoles susceptibles d'être concernées. Il faut pallier tout autant le risque de pléthore locale, entraînant les conséquences que vous avez décrites, que celui d'une excessive dispersion loin du milieu professionnel qui fait l'originalité de ces formations, c'est-à-dire des centres hospitaliers universitaires.

Pour conclure, sachez, monsieur le sénateur, que, sur l'ensemble de cette réforme et sur son avancement à partir de maintenant, M. le ministre de l'éducation nationale a saisi M. Belloc, premier vice-président de la conférence des présidents d'université. Cela devrait achever de vous rassurer.

Il nous faut désormais aller résolument de l'avant afin de ne pas décevoir ceux - et ils sont très nombreux - qui espèrent cette réforme, en particulier les professeurs et les étudiants de l'université du Maine.

LIEU D'IMPLANTATION DE LA BRIGADE AFFECTÉE

À LA SÉCURITÉ DU TUNNEL DU SOMPORT

M. le président. La parole est à M. Cazalet, auteur de la question n° 1274, adressée à M. le ministre de la défense.

M. Auguste Cazalet. Monsieur le secrétaire d'Etat, l'ouverture du tunnel routier franco-espagnol du Somport va s'accompagner de la création d'un groupe spécialisé d'une trentaine de gendarmes chargés d'en assurer la sécurité ainsi que celle de l'itinéraire reliant Oloron-Sainte-Marie à la vallée d'Aspe. On est en droit de penser que pour d'évidentes raisons d'efficacité ces personnels doivent être logés à proximité du tunnel.

La commune d'Urdos, qui est située à 7 kilomètres du tunnel, est déjà dotée d'une brigade de gendarmerie et abrite sur son territoire un immeuble de douze logements appartenant aux douanes : elle a donc, tout naturellement, proposé de loger une bonne partie des gendarmes et de leurs familles.

Cette solution semblait convenir à toutes les parties puisque, au terme de plusieurs réunions de concertation auxquelles avaient activement participé l'administration et les élus de la vallée - dont moi-même - la gendarmerie accepta d'assumer la gestion de l'immeuble des douanes et de prendre les travaux de remise aux normes à sa charge.

Or nous apprenons aujourd'hui que c'est à Oloron-Sainte-Marie, sous-préfecture située à 50 kilomètres du tunnel et ne disposant pas de bâtiment d'accueil immédiatement disponible, que le peloton spécialisé serait implanté, la gendarmerie d'Urdos risquant alors de disparaître.

La surprise, vous le comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, fait place à l'incompréhension, voire à la colère. Il semblerait que ce choix n'ait été guidé que par le souci de ne pas déplaire aux familles des gendarmes. L'opportunisme est-il compatible avec la sécurité de nos concitoyens ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Jacques Floch, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, la direction générale de la gendarmerie nationale envisage de modifier son dispositif territorial dans la vallée d'Aspe afin de prendre en charge la sécurité du tunnel transfrontalier franco-espagnol du Somport, mission qui lui incombe aux termes du décret n° 96-828 du 19 septembre 1996. Elle a présenté, à cet égard, deux hypothèses de travail.

La première consiste essentiellement à implanter à Urdos, localité la plus proche du tunnel, une brigade motorisée, c'est-à-dire une BMA, dédiée à la sécurité du tunnel du Somport. Cette unité de vingt-trois militaires remplacerait l'actuelle brigade territoriale, « seconde du canton », de six militaires, qui fait double emploi avec la brigade de Bedous, commune située 10 kilomètres plus loin dans la vallée. Son action serait complétée par la création d'une autre brigade motorisée, une BMO, de huit militaires, à Oloron-Sainte-Marie, qui se trouve à 50 kilomètres du tunnel et à l'entrée de la vallée ; cette BMO prendrait en charge l'axe routier menant au tunnel.

Plusieurs obstacles pourraient néanmoins s'opposer à ce schéma : les bâtiments que la gendarmerie serait susceptible d'utiliser à Urdos, qui sont les locaux de l'actuelle brigade territoriale, et, éventuellement, le bâtiment désaffecté des douanes sont situés dans des couloirs d'avalanche. Ils n'offrent pas, de toute façon, une capacité suffisante pour héberger vingt-trois militaires et leurs familles.

Une deuxième hypothèse prévoit la création d'une unique brigade motorisée autoroutière de vingt-huit militaires à Oloron-Sainte-Marie, la dissolution de la brigade territoriale d'Urdos et le renforcement de celle de Bedous, l'utilisation du bâtiment de la brigade d'Urdos comme locaux de service de la BMA, en attendant la construction de locaux de service et techniques sur le site même du tunnel.

Quatre éléments d'appréciation doivent être principalement pris en compte.

Compte tenu des besoins globaux de la gendarmerie en termes d'effectifs, la création d'une nouvelle unité dédiée au tunnel passe par la rationalisation de l'organisation des unités territoriales de la gendarmerie dans le secteur du Somport.

Il convient, par ailleurs, de relativiser le problème représenté par l'éloignement des logements pour le fonctionnement opérationnel de l'unité. Il s'agit là non d'une unité territoriale en charge de la sécurité publique mais d'une brigade spécialisée dans la sécurité routière, qui a vocation à être présente et mobile vingt-quatre heures sur vingt-quatre sur le site du tunnel et sur sa voie d'accès.

A titre de comparaison, dans le cas du tunnel du Mont-Blanc, l'unité compétente est implantée à 18 kilomètres de l'entrée du tunnel, et à 38 kilomètres dans celui du tunnel de Fréjus.

En termes d'attractivité de la résidence et de possibilités locatives, il est difficile de comparer les communes d'Urdos, située à 7 kilomètres du tunnel et comptant 108 habitants selon le recensement de 1999, et de Bedous, située à 17 kilomètres du tunnel et comptant 578 habitants, à celle d'Oloron-Sainte-Marie, située à 50 kilomètres du tunnel et comptant 10 992 habitants.

La police aux frontières et les douanes exercent d'ailleurs leurs activités frontalières depuis cette dernière ville.

Dans une situation comparable, celle de l'implantation d'un peloton d'autoroute en Corrèze, le ministre de la défense a déjà eu l'occasion, l'an dernier, de trancher en faveur de la résidence d'Ussel, plus attractive pour les familles que celles d'Aix, a intérêt opérationnel égal.

En conclusion, je vous indique, monsieur le sénateur, que le ministre de la défense a demandé, en préalable à toute décision, l'avis du préfet des Pyrénées-Atlantiques, qui a lui-même entrepris une consultation des élus à ce sujet. Vous pourrez donc faire valoir votre point de vue. En tout cas, pour l'heure, aucune décision n'est encore prise.

M. Auguste Cazalet. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Cazalet.

M. Auguste Cazalet. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, d'autant que vous n'êtes pas directement en charge de ce dossier. Les élus de la vallée d'Aspe vont, soyez-en sûr, lire et relire cette réponse, mais je doute qu'elle les convainque.

Par ailleurs, j'ai noté dans votre réponse que, à Urdos, les locaux de l'actuelle brigade territoriale et l'ancien bâtiment des douanes étaient situés dans un couloir d'avalanches ! Il y a de quoi être effrayé quand on pense aux pauvres douaniers qui ont passé plusieurs années dans ce bâtiment ! Ils vont sans doute faire des cauchemars ! (Sourires.)

M. Bernard Piras. Des cauchemars « rétroactifs » ! (Nouveaux sourires.)

M. Didier Boulaud. C'est moins grave !

DÉLAIS D'EXÉCUTION DES JUGEMENTS

DES TRIBUNAUX DE COMMERCE

M. le président. La parole est à M. Courtois, auteur de la question n° 1270, transmise à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Jean-Patrick Courtois. Je vous remercie de votre présence, madame le garde des sceaux.

Ma question est relative aux conséquences, pour les entreprises françaises, des délais d'exécution des jugements rendus par les tribunaux de commerce.

C'est ainsi qu'une entreprise française risque le dépôt de bilan à cause du délai d'exécution de vingt-six mois d'un jugement du tribunal de commerce de Mâcon.

En 1997, une petite scierie française fait l'acquisition d'une machine d'un montant de 722 500 francs, soit 110 144 euros, auprès d'une société italienne. Or cette nouvelle installation n'a jamais fonctionné correctement. Après rapport d'expertise, la scierie française a assigné la société italienne devant le tribunal de commerce de Mâcon qui, en juillet 1999, condamne celle-ci à payer 506 000 francs, soit 77 139 euros, à la scierie française pour préjudice commercial.

La société italienne faisant appel, la cour d'appel de Dijon annule, en mars 2001, le jugement du tribunal de commerce de Mâcon pour vice de procédure : le signataire de l'acte du jugement n'avait pas qualité pour le faire, n'ayant pas participé au délibéré.

Après évocation de l'affaire devant la cour d'appel de Dijon en juin, celle-ci rend sa décision en septembre 2001 et condamne la société italienne à verser 1,354 million de francs, soit 206 415 euros, à la scierie française.

Mais, entre-temps, la société italienne a été mise en liquidation judiciaire par le tribunal de Parme. La scierie française ne sera donc jamais indemnisée et elle connaît aujourd'hui de très graves difficultés financières.

En conséquence, je vous demande, madame le garde des sceaux, de bien vouloir m'indiquer comment l'Etat peut compenser financièrement la faute commise par l'administration judiciaire lors du jugement du tribunal de commerce de Mâcon et quels sont les moyens de recours dans le cadre du droit européen.

M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur la situation d'une entreprise française dont l'activité serait compromise en raison de l'importance du délai d'exécution d'un jugement du tribunal de commerce de Mâcon.

Vous comprendrez que je ne peux, sur la seule base des éléments portés à ma connaissance, me prononcer sur le fond de l'affaire particulière que vous évoquez.

Il m'apparaît en revanche nécessaire de rappeler les principes qui régissent la responsabilité de l'Etat dans de telles circonstances.

La loi, par l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire, pose le principe selon lequel l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice. Le même texte précise les conditions de la mise en oeuvre de ce principe, en indiquant que cette responsabilité n'est engagée qu'à la suite d'une faute lourde ou d'un déni de justice.

La Cour de cassation, dans un arrêt d'assemblée plénière du 23 février 2001, a d'ailleurs élargi la définition de la faute lourde, qui consiste désormais en « toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ».

Dans ce cadre juridique, il va de soi que le non-respect du « délai raisonnable » dans lequel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal, au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, peut être de nature à engager la responsabilité de l'Etat.

Naturellement, conformément aux principes généraux de la responsabilité, seul peut être indemnisé le préjudice dont il est justifié par le requérant et qui résulte directement de la faute commise.

A défaut d'accord amiable entre l'Etat et le requérant sur le montant de l'indemnisation, les tribunaux de l'ordre judiciaire sont compétents pour connaître de telles demandes, la Cour européenne des droits de l'homme n'ayant pour sa part compétence qu'après épuisement des voies de recours internes. Ainsi, la Cour européenne ne pourrait se prononcer, au mieux, qu'après l'indemnisation mettant un terme à cette affaire, au pis, qu'après que les tribunaux de l'ordre judiciaire auront, en l'espèce, dit le droit. C'est seulement si le requérant n'était pas satisfait, par l'une ou l'autre de ces décisions, qu'il pourrait introduire un recours devant la Cour européenne des droits de l'homme.

Pour ma part, je pense que la justice est un service public. Autant il faut respecter l'indépendance des magistrats, critère fondamental de l'équilibre de la démocratie, autant le service public de la justice doit considérer qu'il est au service, justement, des usagers, ce qui implique aussi de faire preuve de célérité, en particulier dans une affaire comme celle que vous évoquez, monsieur le sénateur. Il est évident que se posent actuellement des problèmes de moyens. Nous nous employons à les résoudre, mais cela implique, année après année des efforts importants. Dans le cas précis, on peut considérer que, faute d'avoir prévu les moyens adéquats, c'est effectivement l'Etat qui est responsable.

Depuis 1997, Elisabeth Guigou puis moi-même avons en tout cas tenu à ce que la responsabilité du service public de la justice soit engagée dès lors que cette responsabilité était avérée. C'est ainsi que le service public de la justice peut progresser et recueillir la confiance de nos concitoyens.

M. Jean-Patrick Courtois. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Courtois.

M. Jean-Patrick Courtois. Je vous remercie, madame le garde des sceaux, de votre réponse.

Bien entendu, je souhaite que, dans ce dossier, un accord amiable puisse intervenir rapidement. En effet, le malheureux industriel a dû hypothéquer sa maison pour obtenir le prêt. Il risque donc maintenant, sans avoir commis la moindre faute, de voir sa propre maison d'habitation vendue aux enchères.

J'espère qu'un minimum de décence conduira l'administration à accepter un accord amiable.

M. le président. Je tiens, quant à moi, madame le garde des sceaux, à vous remercier d'avoir fait l'effort de venir ce matin au Sénat pour répondre vous-même à une seule question. La Haute Assemblée y est toujours sensible, et il faudrait que cela serve d'exemple à d'autres ministres ! (Applaudissements.)

OBLIGATIONS DES COMMUNES

EN MATIÈRE D'ASSAINISSEMENT

M. le président. La parole est à M. Piras, auteur de la question n° 1242, adressée à M. le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, que je remercie également d'honorer la Haute Assemblée de sa présence. (Applaudissements.)

M. Bernard Piras. Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur les obligations des communes en matière d'assainissement au regard des dispositions de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau.

Avant cette loi, il n'existait pas d'obligation générale pour les communes en matière de mise en place de réseaux d'assainissement et de traitement des effluents, mais ce texte leur a donné des compétences et des obligations nouvelles dans ce domaine. Ainsi, l'article L. 2224 du code général des collectivités locales dispose que « les communes prennent obligatoirement en charge les dépenses liées aux systèmes d'assainissement collectif, notamment aux stations d'épuration des eaux usées et à l'élimination des boues qu'elles produisent, et les dépenses de contrôle des systèmes d'assainissement non collectifs ».

La mise aux normes imposera, à partir de 2005, des travaux importants engendrant des coûts financiers très élevés. Même si des subventions publiques sont accordées aux collectivités, les communes, notamment les plus petites d'entre elles, dont le territoire accueille un habitat fort dispersé, n'ont pas la capacité financière suffisante pour financer ces travaux sans remettre en cause leur avenir.

En outre, ces communes rurales de petite taille - et le problème est aggravé lorsqu'elles sont situées en zone de montagne - sont soumises à des contraintes géographiques, physiques et humaines qui exigent une approche particulière du dossier.

Ce service d'assainissement étant de nature industrielle et commerciale, les dépenses engagées pourraient - et devraient, même - être répercutées sur l'usager. Toutefois, une telle solution n'est bien évidemment pas envisageable, car le prix de l'eau deviendrait alors prohibitif pour bon nombre de nos concitoyens.

Les maires sont très inquiets face à cette obligation qui leur incombe, car elle risque, en l'état actuel des aides accordées, de mobiliser la totalité des moyens financiers communaux et de remettre ainsi en cause les autres projets d'aménagement et de développement.

Pour remédier à cette situation, deux solutions pourraient être envisagées : soit une augmentation notable des aides publiques, en déplafonnant le seuil de 80 % et en relevant le plafond actuel de 5 millions de francs, soit un allongement des délais d'application de la loi sur l'eau.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, de m'indiquer les mesures que vous comptez prendre pour rassurer l'ensemble des élus locaux et des maires des petites communes.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, la construction de réseaux d'assainissement et de stations d'épuration ne constitue pas une obligation légale pour l'ensemble des communes.

La directive du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux résiduaires urbaines et les textes français pris pour sa transposition, notamment la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau et le décret n° 94-469 du 3 juin 1994 relatif à la collecte et au traitement des eaux usées, n'imposent, en effet, aucunement aux communes appartenant à des agglomérations d'assainissement de moins de 2 000 équivalents habitants de collecter tout ou partie des eaux usées domestiques produites sur leur territoire.

En matière d'assainissement collectif, ces communes ont seulement l'obligation d'assurer le traitement en station d'épuration des effluents collectés par les réseaux existants. Les immeubles non raccordés doivent alors être assainis par des dispositifs d'assainissement non collectif, à la charge de leurs propriétaires.

La loi sur l'eau du 3 janvier 1992 a modifié le code de la santé publique et le code général des collectivités territoriales pour faire de l'assainissement non collectif un mode de traitement des eaux usées à part entière. En effet, lorsque les conditions techniques requises sont mises en oeuvre, l'assainissement non collectif garantit des performances comparables, voire supérieures, à celles de l'assainissement collectif, et permet de disposer de solutions plus économiques pour l'habitat dispersé : il doit, en conséquence, constituer la solution de référence en milieu rural.

La nécessaire modération des dépenses publiques implique une responsabilisation des communes dans les réflexions qu'elles conduisent sur les modalités d'assainissement de leur territoire. Ces réflexions doivent être soutenues par des comparaisons très exactes du coût et des contraintes techniques des différentes solutions envisageables. Or l'extension des réseaux de collecte est trop fréquemment privilégiée, et l'aide à l'assainissement non collectif doit aussi, à mon avis, être développée.

Par ailleurs, les communes rurales bénéficient, pour les travaux d'assainissement, de nombreuses aides qui, au-delà de celles qui sont distribuées par les agences de l'eau, leur permettent de réduire considérablement la part de financement restant à leur charge : je pense aux subventions du Fonds national pour le développement des adductions d'eau, le FNDAE, qui dépendent du ministère de l'agriculture et qui sont distribuées par les conseils généraux, auxquelles s'ajoutent les aides directement prises en charge par ces derniers ainsi que, selon les priorités définies par les préfets et les sous-préfets, les subventions accordées au titre de la dotation globale d'équipement.

Il convient également de rappeler que l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales prévoit des possibilités d'abondement du budget du service d'assainissement par le budget général : c'est le cas, pour l'ensemble des communes, en cas d'investissements lourds qui entraîneraient une augmentation excessive des tarifs, mais aussi, de manière générale, pour les communes de moins de 3 000 habitants et pour les groupements composés de communes de moins de 3 000 habitants.

Ces dispositions permettent donc à l'ensemble des communes rurales ainsi qu'aux communes de plus grande taille devant réaliser d'importants travaux d'assainissement d'éviter une augmentation insupportable du prix de l'eau pour les usagers de leur service d'assainissement. Il leur appartient, toutefois, de répartir équitablement la charge entre les bénéficiaires du service et les autres administrés.

Enfin, je vous précise que les délais d'application des obligations d'assainissement prévues par la directive de 1991 sont fixés par cette dernière, et qu'ils ne peuvent donc être modifiés par voie législative.

Au demeurant, sur un terrain de quelques milliers de mètres carrés, on peut installer une fosse sceptique, par exemple, ce qui peut suffire pour réaliser un assainissement dans de bonnes conditions. Certains vendeurs assurent même que l'eau est quasiment potable à la sortie de la fosse, grâce aux différents charbons, drains et filtres utilisés. (Sourires.)

M. Didier Boulaud. Qu'ils la boivent ! (Rires.)

M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. En tout cas, la floraison végétale y est luxuriante !

M. Bernard Piras. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Piras.

M. Bernard Piras. Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas sur la dernière partie de votre réponse, dont je vous laisse la responsabilité : moi, je ne m'y engagerais pas ! (Sourires.)

Cela dit, je connais bien les dispositions que vous avez évoquées dans votre réponse. J'attire cependant votre attention sur les petites communes à faible densité de population. Si l'on ne déplafonne pas le seuil de 80 %, certains investissements ne pourront pas être réalisés.

Quant aux systèmes d'assainissement individuels, effectivement, ils coûtent beaucoup moins cher, mais, lorsqu'il s'agit de rassembler quelques hameaux pour les raccorder, de faire une petite station d'épuration, quels que soient la forme de l'épuration et le mode technique choisi, cela pose un problème aux communes intéressées si l'on s'en tient au seuil actuel de 80 %. Dans la Drôme, où soixante à quatre-vingts communes doivent être dans ce cas, nous étudions avec le préfet des moyens permettant aux communes de ne pas trop grever leurs budgets.

REDÉPLOIEMENT DES FORCES DE POLICE

DANS LA NIÈVRE

M. le président. La parole est à M. Boulaud, auteur de la question n° 1275, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Didier Boulaud. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur, mais, le redéploiement des forces de police étant bien un problème d'aménagement du territoire, la présence de M. Cochet répond aussi à mon attente.

Je souhaitais interroger M. le ministre de l'intérieur sur les effectifs de la police nationale dans le département de la Nièvre - notamment après la publication des chiffres de la délinquance -, et plus particulièrement sur les effectifs du commissariat de police de Nevers.

C'est un sujet que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer auprès des services du ministère de l'intérieur voilà deux ou trois ans. Je leur ai alors montré l'inadéquation flagrante entre les effectifs du commissariat de Nevers et les chiffres de la délinquance dans cette même circonscription, la Nièvre souffrant ainsi d'une iniquité lourde de conséquences. En effet, les effectifs de police de la circonscription voisine de Cosne-Cours-sur-Loire représentent près de la moitié de ceux de la circonscription de Nevers, alors que la population y est quatre fois inférieure : Cosne dispose de trente-trois agents et Nevers de soixante-quatorze - officiers, sous-officiers, gradés et gardiens - alors que l'effectif théorique y est de quatre-vingt-quatre. Et, la nuit, cet effectif est très insuffisant. Je rappelle d'ailleurs que, le 1er janvier 1990, nous disposons de quatre-vingt-trois agents ! Autrement dit, nous en avons perdu neuf pour ce seul commissariat.

Les chiffres qui ont été rendus publics par les services du ministère de l'intérieur font apparaître que la délinquance aurait baissé de 8,7 % dans la circonscription de Cosnes-Cours-sur-Loire - je m'en réjouis ! - alors qu'elle aurait, dans le même temps, augmenté de 23 % dans la circonscription de Nevers.

Certes, il faut prendre ces statistiques avec beaucoup de précaution. Je citerai un seul exemple : à Nevers, un seul individu - un peu dérangé, il est vrai - a crevé les pneus de 120 voitures dans la même soirée. Cela a donc donné lieu à 120 dépôts de plaintes et, une fois que le délinquant a été arrêté, cela a permis au commissariat de constater l'élucidation de 120 faits. Vous constatez donc la relativité des chiffres qui sont transmis à nos concitoyens !

Dans ces conditions, monsieur le ministre, et en fonction de ces résultats, je vous demande - sans, bien entendu, remettre en cause l'existence de l'un ou l'autre des deux commissariats, mais en prenant en compte la réalité de la délinquance et de la démographie dans ces deux circonscriptions de police - s'il vous serait possible d'envisager un réexamen des effectifs de la police nationale dans le département de la Nièvre, notamment en accroissant de façon sensible et réelle les effectifs du commissariat de Nevers, qui en a bien besoin.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, dans le département de la Nièvre, l'examen de l'évolution de la délinquance en 2001 par rapport à l'année 2000 laisse effectivement apparaître une hausse de la délinquance générale de 23 % dans la circonscription de Nevers et une baisse de 8,7 % dans celle de Cosne-Cours-sur-Loire, ce qui pourrait être paradoxal pour qui ne connaît pas le terrain comme vous.

La situation de ces deux circonscriptions de sécurité publique n'est cependant pas comparable en termes de population et de formes de délinquance. En effet, à Nevers, la délinquance est essentiellement due à la présence de délinquants itinérants auteurs de cambriolages, de vols à la roulotte et de dégradations - tels que le crevage de pneus - ainsi qu'à des phénomènes de violences urbaines tels que ceux qui sont survenus en novembre 2001.

Face à cette situation, l'activité déployée par les fonctionnaires de police s'est traduite, en 2001 par rapport à 2000, par une progression des faits élucidés (694 en 2000 et 1 143 en 2001, soit + 64,7 %), des personnes mises en cause (598 en 2000 et 882 en 2001, soit + 47,4 %) et des gardes à vue, qui sont passées de 209 en 2000 à 259 en 2001, soit + 23,9 %.

Par ailleurs, une attention particulière a été portée à l'évolution des effectifs du commissariat de Nevers. En effet, dans cette circonscription, qui disposait, au 1er janvier 2002, de cent fonctionnaires de tous grades, dont soixante-quatorze gradés et gardiens de la paix assistés de vingt et un adjoints de sécurité, la mise en place de la police de proximité, en septembre 2001, au titre de la deuxième vague de généralisation, s'est notamment accompagnée, par rapport au 1er janvier 2001, d'un gain de douze éléments, dont six agents du corps de maîtrise et d'application.

En ce qui concerne Cosne-Cours-sur-Loire, retenue dans la troisième vague de généralisation, il est prévu de porter ses effectifs, après les prochains mouvements de mutation et les sorties d'école, à trente-trois fonctionnaires du corps de maîtrise et d'application, ce qui représente le seuil minimum de fonctionnement pour cette circonscription.

Vous pouvez être assuré, monsieur le sénateur, que les efforts déjà engagés - dans une conjoncture difficile liée au fort renouvellement démographique des personnels - seront poursuivis, en particulier dans la circonscription de Nevers, pour compenser les futurs départs à la retraite et assurer le bon fonctionnement de la police de proximité.

Les dispositions prises par le Gouvernement en termes de recrutement de personnels supplémentaires et de pérennisation des adjoints de sécurité ainsi que les mesures budgétaires décidées au titre de la loi de finances permettront de renforcer la présence policière dans les circonscriptions de la Nièvre.

Enfin, l'adoption de la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne ainsi que les orientations décidées dans le cadre du contrat local de sécurité signé à Nevers le 19 décembre 1998 - les Nivernais étaient des précurseurs - et relatives à la lutte contre la délinquance commise par des jeunes marginaux, des personnes sans domicile fixe et des gens du voyage, apporteront, j'en suis convaincu, une meilleure réponse aux attentes de la population.

M. Didier Boulaud. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Boulaud.

M. Didier Boulaud. Bien évidemment, je remercie M. le ministre de cette réponse, et j'espère que le commissariat de Nevers retrouvera d'ici à quelques années le niveau d'effectifs qui aurait toujours dû rester le sien.

Mais je voudrais que le ministère de l'intérieur soit bien conscient des disparités qui existent entre les différentes circonscriptions, notamment celles de Cosne-Cours-sur-Loire et de Nevers.

J'insiste à cet égard tout particulièrement sur le fait que Nevers dispose d'une maison d'arrêt et que la présence d'un tel établissement a un certain nombre de conséquences sur l'activité des commissariats de police. Les transferts de prévenus vers le tribunal pendant l'instruction ou pour les audiences mobilisent en général trois agents et un fourgon de police.

On pourrait sans doute inverser le processus et demander au juge d'instruction, voire au procureur, de se déplacer de leurs tribunaux vers la maison d'arrêt, ce qui permettrait, à l'évidence, de diminuer les engagements des forces de police. Cette suggestion a déjà été faite par un certain nombre de ministres, par Laurent Fabius notamment. Pour ma part, je l'ai évoquée à plusieurs reprises avec Marylise Lebranchu.

Peut-être suffirait-il de réaliser quelques modifications pour que le juge et le procureur puissent trouver dans les maisons d'arrêt les conditions de confidentialité et de confort qui leur sont nécessaires pour travailler. Cette inversion du sens du transfert permettrait à nos commissariats de déployer plus de forces de police, en particulier la nuit.

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)