SEANCE DU 27 NOVEMBRE 2001
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-114 rectifié, présenté par MM. Oudin, Besse, Demuynck,
Cazalet et Calmejane, Mme Michaux-Chevry, MM. Dufaut, Gournac, Lardeux,
Gruillot, Lassourd, César, Doublet, Goulet, Murat, François, Ostermann,
Fournier, Ginésy, Leclerc, Rispat, Vasselle, Trillard, Braye et Doligé, est
ainsi libellé.
« Après l'article 11
sexies,
insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Le II de l'article 1641 du code général des impôts est complété
in
fine
par une phrase ainsi rédigée : "A compter de l'année 2002, ce taux est
réduit à 4,2 % pour la taxe d'habitation, 2,1 % pour les taxes foncières et 1 %
pour la taxe professionnelle."
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat est compensée, à due
concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-198, déposé par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 11
sexies,
insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Dans la seconde phrase du II de l'article 1641 du code général des
impôts, le taux : "4,4 % ", est remplacé par le taux : "4 % ".
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° I-114 rectifié.
M. Jacques Oudin.
Pour financer la révision des bases locatives, l'Etat opère un prélèvement sur
le produit des impôts locaux. Notre amendement prévoit de supprimer ce
prélèvement. En effet, les frais engagés par l'Etat à cette fin doivent
maintenant être amortis, étant donné le temps écoulé depuis les premières
études !
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Plus qu'amortis !
M. Jacques Oudin.
Ça, c'est vrai !
Si d'autres études ou d'autres travaux doivent être menés, le financement
pourra être opéré par le budget de l'Etat sans qu'il y ait lieu de ponctionner
à nouveau les collectivités locales et les contribuables.
M. le président.
La parole est à M. Foucaud, pour présenter l'amendement n° I-198.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement vise à supprimer le prélèvement de 0,4 % opéré pour financer la
mise en oeuvre de la révision des valeurs locatives. Ce prélèvement est devenu
sans objet, le coût de la révision des valeurs locatives étant en effet
largement couvert. Ce serait donc une première étape avant de procéder à la
révision proprement dite.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est partagée entre plusieurs sentiments
: d'une part, bien sûr, le sentiment d'adhésion à la proposition qui est faite
par Jacques Oudin, mais, d'autre part, le sentiment de nos responsabilités à
l'égard du solde de la première partie de la loi de finances.
Sur le fond des choses, madame le secrétaire d'Etat, vous vous souvenez qu'un
rapport de l'inspection générale des finances, signé de Jean-Luc Lépine,
indiquait, en 1998, que le coût de gestion des impôts en France était, sur la
base de l'année 1997, de 4,17 % pour la taxe d'habitation, de 2,03 % pour la
taxe foncière et de 1 % pour la taxe professionnelle.
L'amendement présenté par Jacques Oudin prévoit que les frais perçus par
l'Etat correspondent au coût réellement supporté par lui, ce qui ne peut pas
être contesté : c'est la vérité économique !
Par ailleurs, il convient de rappeler que l'Etat perçoit toujours un
prélèvement de 0,4 % pour financer la révision des bases locatives, ce qui,
chacun le sait, a manifestement perdu toute justification depuis plusieurs
années.
L'an dernier, si je ne me trompe, nous avions voté un amendement semblable à
cet amendement n° I-114 rectifié.
S'agissant de l'effet financier de telles mesures, il est de mon devoir de
dire qu'elles représentent un certain nombre de milliards de francs. Comme vous
le savez, mes chers collègues, la commission a souhaité que, pour l'examen de
la première partie de la loi de finances, nous modérions nos amendements pour
éviter de faire apparaître une photo que Mme le secrétaire d'Etat utiliserait
certainement lors de la reddition des comptes de la première partie pour nous
culpabiliser, en nous expliquant que le prix de la cigarette est passé à un
chiffre prohibitif. Face à cette contradiction, je formulerai les positions
suivantes.
En ce qui concerne l'amendement n° I-198 du groupe communiste républicain et
citoyen, outre le fait que nous ne pouvons pas accepter le gage tel qu'il se
présente, cet amendement ne traitant que les 0,4 % de révision des bases
locatives, il ne nous semble pas aller assez loin pour une position de
principe.
S'agissant d'une position de principe, il faut soutenir la thèse de Jacques
Oudin et de ses collègues. Mais le voeu que nous émettrions aurait davantage sa
place dans la deuxième partie de la loi de finances. En effet, il ne faut pas
se faire d'illusion, sauf à attendre que Mme le secrétaire d'Etat nous donne
l'assurance que ces charges indues seront résorbées au cours des prochaines
années, ce qui est peu probable.
Je souhaite donc le retrait de cet amendement ce soir afin de le faire
figurer, en deuxième partie, au nombre des positions de principe que le Sénat
souhaitera réaffirmer solennellement, tout en sachant que les conditions de
l'équilibre budgétaire de 2002 rendraient difficile, compte tenu des choix qui
ont été faits, le financement d'une charge aussi importante.
Bref, la commission est défavorable à l'amendement n° I-198 et demande le
retrait de l'amendement n° I-114 rectifié et son report en deuxième partie.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
L'amendement n° I-114 rectifié vise purement et
simplement à supprimer un prélèvement perçu par l'Etat au titre des frais
d'assiette et de recouvrement en matière de taxe d'habitation.
Au risque de me répéter, je rappelle qu'à l'occasion de notre débat sur le
projet de loi de finances rectificative pour 2000 j'avais notamment expliqué
les raisons pour lesquelles je n'étais pas favorable à cette mesure. En effet,
les frais de gestion de la taxe d'habitation demeurent et, compte tenu du poids
de ces impôts, la part qui reste à la charge de l'Etat au titre des admissions
en non-valeur a considérablement augmenté, bien plus rapidement que les
recettes qui sont perçues par l'Etat en contrepartie.
S'agissant de la taxe d'habitation, chacun ici pourra en convenir, c'est un
impôt qui se caractérise en effet par des coûts de gestion élevés, monsieur
Oudin.
Par ailleurs, vous le savez, dans le collectif de printemps de l'année 2000,
le Gouvernement a proposé une réforme importante en matière de taxe
d'habitation qui a consisté à regrouper sous un seul et unique dispositif les
dégrèvements existants et à supprimer la part régionale de taxe d'habitation,
ce qui a représenté un allégement très substantiel pour les contribuables,
beaucoup plus substantiel qu'une suppression des frais de gestion, qui ne
représenterait que quelques dizaines de francs par contribuable. Pour cette
raison, je ne suis pas favorable à l'amendement n° I-114 rectifié.
Je ne suis pas plus favorable à l'amendement n° I-198, et j'aimerais profiter
de l'occasion qui m'est donnée pour rappeler à M. le rapporteur général, qui ne
l'a, d'ailleurs, certainement pas oublié, que la majoration de 0,4 point n'est
plus destinée à compenser le coût de la révision des bases. M. le rapporteur
général sait mieux que personne, en effet, que c'est une loi de finances pour
1996 qui a pérennisé ce prélèvement, de sorte que, aujourd'hui, ce prélèvement,
avec un taux de 4,4 %, est sans affectation.
M. Michel Mercier.
Il ne faut pas persévérer dans l'erreur !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
C'est une charge sans contrepartie !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-114 rectifié.
M. Jacques Oudin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin.
M. le rapporteur général nous conseille d'être sans illusions. Voilà son appel
entendu : que ce soit sur la réforme de l'Etat ou sur la réforme des impôts
locaux, nous sommes, en effet, sans illusions...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Sans illusions, oui !
M. Jacques Oudin.
... et même, pour tout dire, un peu désespérés.
Année après année, ce sont les mêmes amendements, les mêmes arguments, les
mêmes réponses, et chaque année on s'en retourne en promettant de reprendre le
même débat l'année suivante. Avouez que, au bout d'un certain nombre d'années,
cela devient un peu lassant !
(Sourires.)
Cela étant, Mme le secrétaire d'Etat a eu une explication tout à fait
intéressante, qui éclaire d'un jour particulier certains agissements de la
puissance publique, de l'Etat. On commence par mettre en place un impôt pour
une raison particulière. Ici, il s'agit de réviser les bases ; comme cela va
coûter, il est nécessaire de prévoir un dispositif, et on décide le 0,4 %. Au
bout de quelques années, ce 0,4 % n'a plus de justification. Mais, loin de le
supprimer, on le pérennise. Eh bien ! je trouve, moi, ce genre de pratique
profondément détestable.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est une tromperie !
M. Jacques Oudin.
Et certains se demandent ensuite pourquoi nos prélèvements atteignent des
niveaux excessifs ! C'est qu'ils ont augmenté peu à peu pour atteindre les
niveaux que nous connaissons. Et je pourrais citer bien d'autres exemples.
Ainsi, madame le secrétaire d'Etat, je me suis battu pendant des années pour
supprimer la redevance audiovisuelle : elle ne sert plus à rien ! Autrefois, on
poursuivait les redevables parce que 20 % seulement des Français possédaient un
poste de télévision et 80 % n'en avaient pas. Aujourd'hui, tous les Français -
à 98 % - sont détenteurs d'un poste de télévision, et il suffit de majorer la
taxe d'habitation pour obtenir le même résultat. On en profitera pour supprimer
un service public qui ne sert à rien. Les 1 400 personnes qui travaillent à
Rennes, combien de milliards de francs coûtent-elles ? N'est-ce pas une somme
comprise entre 1,5 et 2 milliards de francs par an ?
Non, vraiment, nous sommes, en France, incapables de réformer l'Etat. C'est
donc sans illusions, monsieur le rapporteur général, que je retire cet
amendement. Mais même des illusions perdues valent bien que l'on se batte pour
elles !
M. le président.
L'amendement n° I-114 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° I-198, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-225 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M.
Loridant, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi
libellé :
« Après l'article 11
sexies
, insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« L'article 1648 AB du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Dans le premier alinéa, les mots : "ou ultimes" sont remplacés par les
mots : ", ultimes ou de matériels à risques spécifiés".
« 2. Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "industriels spéciaux" sont
supprimés. »
La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam.
Je me sens particulièrement bien placé pour évoquer le problème du stockage
des farines animales puisque la commune dont je suis l'élu compte un
établissement de stockage de 60 000 tonnes.
La question du stockage et de l'élimination des farines animales est
aujourd'hui d'autant plus importante qu'il faut régler définitivement les
problèmes nés du développement de l'encéphalopathie spongiforme bovine et de
l'incapacité technique actuelle d'éliminer ces farines au fur et à mesure de
leur production.
Compte tenu des capacités d'élimination effective des produits concernés se
pose, dans un premier temps, la question du stockage. Ainsi, un peu partout
dans le pays, des sites ont été choisis et désignés par arrêté préfectoral sans
que les collectivités puissent s'y opposer.
C'est pourquoi, par cet amendement, nous proposons que cette démarche, rendue
nécessaire par la situation actuelle, ne puisse apparaître, pour les
collectivités territoriales concernées, comme un facteur de pénalisation.
L'existence de ces centres de stockage semble, en effet, laisser peser le
risque d'une forme de désaffection pour les communes concernées compte tenu,
notamment, de l'emsemble des gênes occasionnées par la présence de ces centres,
notamment en termes d'image dans les zones artisanales ou industrielles
concernées. On pense, par exemple, aux nuisances olfactives et aux problèmes de
la rotation des véhicules de transport.
C'est pourquoi nous proposons de majorer la dotation globale forfaitaire de
six millions d'euros, somme proche du cinquième de celles qui seront mobilisées
pour l'ensemble du dispositif, et de répartir ensuite ces sommes entre les
communes abritant les centres de stockage.
Les collectivités concernées, souvent sollicitées par des entreprises privées
ou des coopératives pour un marché plutôt intéressant, d'ailleurs, puisqu'il
s'agit d'une base de 145 francs par tonne et par an, n'ont pas eu le loisir de
refuser ou d'accepter. Ce qui est certain, c'est qu'elles rendent service à
toutes les autres, qui évitent ainsi ce type de stockage peu envié et peu
enviable. Il me semble donc normal que ces collectivités-là soient
dédommagées.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission souhaite entendre le Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
L'amendement vise à offrir aux communes où sont
stockés des matériaux à risques spécifiés, en particulier des farines, une
compensation financière, par le biais d'une péréquation de la taxe
professionnelle à la charge des communes où sont implantées les entreprises qui
produisent ces matériaux.
Est proposée à cette fin une extension aux matériaux à risques spécifiés du
dispositif des fonds départementaux de solidarité pour l'environnement, prévu
par l'article 1648 AB du code général des impôts.
Ce dispositif avait pour objet d'instituer, au sein d'un département, une
solidarité entre les communes qui accueillent des entreprises produisant des
déchets industriels spéciaux et les communes où ces déchets sont stockés.
Je me dois de rappeler que ce dispositif n'a pas été mis en place, notamment
parce que le cadre départemental s'est avéré inadapté. Depuis, la TGAP
applicable aux déchets industriels spéciaux a permis de répondre au
problème.
S'agissant de la préoccupation que vous exprimez, monsieur Le Cam, qui
concerne les matériaux à risques spécifiés, vous comprendrez qu'elle ne peut
trouver de réponse dans une extension de ce dispositif, en particulier parce
que les producteurs de ces déchets sont des éleveurs et souvent des abattoirs
gérés par les collectivités locales, qui sont exonérées de taxe
professionnelle.
Toutefois, et je crois comprendre que c'est déjà une réponse à votre
préoccupation, je peux vous indiquer que de nouveaux cahiers des charges
viennent d'être adressés aux préfets, prévoyant la possibilité de stocker les
farines dans des conteneurs, ce qui permettra de diminuer considérablement les
gênes occasionnées par le dispositif de stockage qui, je le répète, a vocation
à être transitoire.
Les capacités d'élimination des farines comme des déchets crus, que nous avons
suscitées dans le cadre d'appels à propositions lancés par la mission
interministérielle pour l'élimination des farines animales, nous permettront, à
l'avenir, de réduire le stockage au strict minimum.
Compte tenu de ces observations, j'espère, monsieur le sénateur, que vous
retirerez votre amendement.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission pense que, compte tenu des arguments
développés par Mme le secrétaire d'Etat, cet amendement pourrait effectivement
être retiré.
M. Gérard Le Cam.
Il est maintenu !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-225 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-79, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« Après l'article 11
sexies
, insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Après le troisième alinéa (2°) du I de l'article 1648 B
bis
du
code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3° du produit résultant à compter de 2001 des dispositions des troisième et
quatrième alinéas du III de l'article 9 de la loi de finances pour 1993 (n°
92-1316 du 30 décembre 1992), du I de l'article 54 de la loi de finances pour
1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) et des troisième et onzième alinéas du IV
bis
de l'article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30
décembre 1987). »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I
ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. Mercier.
M. Michel Mercier.
Cet amendement, très technique, est relatif aux réfactions des compensations
d'exonérations d'impôts locaux. Mme le secrétaire d'Etat nous a expliqué que
les concours de l'Etat devaient avoir deux grandes vocations : la solidarité
entre l'Etat et les collectivités territoriales et, surtout, une péréquation
affirmée.
Cet amendement a précisément pour objet de proposer que soient affectées au
fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, le FNPTP, les
réfactions des compensations d'exonérations d'impôts locaux qui, aujourd'hui,
sont perçues par l'Etat au profit du budget général. En affectant le montant de
ces réfactions au FNPTP, on renforcerait la vocation péréquatrice de ce
fonds.
Le principal argument que Mme le secrétaire d'Etat avait avancé l'année
dernière pour refuser cet amendement était que les dotations de l'Etat au FNPTP
et au FNP, le fonds national de péréquation, ne diminuaient pas en loi de
finances pour 2001. Or la situation change complètement puisque, dans le projet
de loi de finances pour 2002, ces fonds diminuent de 1,29 % et, surtout, le
produit de la taxe professionnelle de France Télécom diminue de 30 millions
d'euros.
Compte tenu de vos déclarations en fin d'après-midi, je suis sûr, madame le
secrétaire d'Etat, que vous aurez à coeur de faire en sorte que le FNPTP puisse
remplir son rôle.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est une importante question de principe qui est ici
soulevée.
L'amendement de M. Mercier vise à affecter le produit des réfactions des
compensations d'exonérations d'impôts locaux au fonds national de péréquation
de la taxe professionnelle plutôt qu'au budget de l'Etat.
Les réfactions sont contestables dans leur principe, puisqu'elles rompent le
contrat moral, en quelque sorte, que constitue l'engagement de l'Etat de
compenser les pertes de recettes supportées par les collectivités locales. Pour
donner un ordre de grandeur et fixer les idées, en 2000, le montant total de la
DGF a augmenté de 343 millions d'euros ; la même année, les économies pour
l'Etat résultant de l'existence de ces mécanismes de réfaction s'élevaient à
450 millions d'euros ! Ces deux sommes méritent d'être comparées.
Notre collègue propose que ces sommes servent à financer la péréquation par le
biais d'une affectation au fonds national de péréquation de la taxe
professionnelle, le FNPTP.
Madame le secrétaire d'Etat, nous avons écouté avec attention, tout à l'heure,
votre intervention dans le débat sur les recettes des collectivités
territoriales. Vous avez fait état de votre engagement en faveur de la
péréquation, terme qui revient souvent dans vos propos. Or, lorsque l'on
totalise l'effort financier de l'Etat en faveur de la péréquation en 2001, on
constate que les différents dispositifs représentent un peu plus de 25
milliards de francs, soit environ 15 % du total des dotations de l'Etat aux
collectivités territoriales.
Michel Mercier souhaite revenir à une certaine logique et affecter des sommes
complémentaires à la péréquation. Une telle démarche, manifestement, n'est pas
sans fondement. Cet amendement de principe nous semble donc intéressant. C'est
la raison pour laquelle, de manière un peu exceptionnelle, la commission des
finances a émis un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Certaines compensations d'allégements de fiscalité
locale aux collectivités locales font l'objet d'une réfaction qui varie en
fonction du niveau ou de la progression des recettes fiscales dont bénéficient
les collectivités concernées.
Vous proposez d'abonder le fonds national de péréquation d'un montant
équivalent à celui des mécanismes de réfaction qui ont été identifiés dans les
projets de loi de finances pour 1987, 1993 et 1994. Pour 2000, le montant
correspondant s'élève à 450 millions d'euros.
Ces réfactions, je le rappelle, visent avant tout à tenir compte de la
richesse des collectivités locales les plus prospères dans le calcul de
certaines compensations d'impôts locaux qui leur sont versées par l'Etat.
Je soulignerai également que le fonds national de péréquation de la taxe
professionnelle voit ses recettes diminuer ; cependant, monsieur le sénateur,
cette diminution est largement optique. Pourquoi ?
En 2002, le FNPTP se verra « soulagé » d'un certain nombre de charges qui
permettent de soutenir les moyens du fonds national de péréquation, le FNP. En
effet, l'Etat prendra à sa charge l'abondement de la DSR, la dotation de
solidarité rurale, ainsi que la totalité du coût des exonérations de taxe
professionnelle liées au pacte de relance pour la ville, qui étaient jusqu'à
présent financées par la fiscalité locale acquittée par France Télécom. Ce
transfert de charges devrait donc globalement compenser la baisse du produit de
cette dernière fiscalité.
Par ailleurs, la montée en puissance de la suppression de la part salaires de
la taxe professionnelle devrait aussi se traduire par une diminution du coût de
la garantie des pertes de base, qui sont à la charge du FNPTP.
Le Gouvernement a par ailleurs émis un avis favorable sur la proposition que
lui a faite la commission des finances de l'Assemblée nationale de reconduire
en 2002 l'abondement exceptionnel de 22,9 millions d'euros du fonds national de
péréquation afin de conforter les moyens d'action de celui-ci en faveur des
communes défavorisées.
Pour toutes ces raisons, monsieur le sénateur, vous comprendrez que je sois
amenée à émettre un avis défavorable sur votre amendement, ce qui ne remet pas
en cause mes propos sur la péréquation, que M. le rapporteur général a relevés
: le pourcentage de 15 % au sein de nos concours des dotations véritablement
péréquatrices qu'il a mentionné, et qui est exact, est un appel à faire mieux
!
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous vous invitions à faire mieux, et nous vous
donnions une idée en ce sens !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-79, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 11
sexies
.
L'amendement n° I-65, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« Après l'article 11
sexies
, insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Le III de l'article 31 de la loi de finances pour 1989 (n° 88-1149 du
23 décembre 1988) est supprimé. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I est
compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux
droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Mercier.
M. Michel Mercier.
Comme le précédent, cet amendement a notamment pour objet de permettre à Mme
la secrétaire d'Etat de voir son discours en faveur de la péréquation
immédiatement mis en oeuvre grâce à la suppression de dispositions anciennes et
à l'augmentation du montant de la dotation du FNPTP prévu par le
Gouvernement.
L'amendement a également pour objet de doter un peu plus fortement le fonds
national de péréquation, qui est le principal instrument de péréquation en
faveur du monde rural.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le Sénat avait adopté cet amendement l'année
dernière. Pour différentes raisons de principe, la commission est favorable à
ce que cette position soit confirmée ce soir et à ce que soient soulignées les
incertitudes et les contradictions dans les propos du Gouvernement.
Si l'on voulait faire davantage pour la péréquation...
M. Patrick Lassourd.
Il y a de quoi !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... et lui apporter quelques ressources
supplémentaires sans mettre en cause les différents mécanismes qui y
contribuent, il faudrait déjà faire ce que propose Michel Mercier, rapporteur
spécial chargé des finances locales.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Comme le sait M. Mercier, la loi de finances pour 1989
a institué une cotisation nationale de péréquation dont le produit est reversé
à l'Etat. C'est précisément ce produit que vous souhaitez désormais laisser au
bénéfice du fonds de péréquation de la taxe professionnelle.
La majoration de la cotisation nationale de péréquation n'était pas une mesure
isolée au moment où elle a été instituée, en 1989, puisqu'elle venait en
compensation du surcoût induit pour l'Etat par le resserrement, la même année,
du plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle des entreprises en
fonction de la valeur ajoutée, qui fait l'objet d'un dégrèvement à la charge de
l'Etat.
Le reversement à l'Etat du produit de cette majoration de la cotisation de
péréquation doit être mis en regard de la charge des dégrèvements de taxe
professionnelle supportée par l'Etat. En outre, j'ai indiqué de quelle manière
les recettes du FNPTP évoluaient en 2002.
Pour ces raisons, je ne suis pas favorable à cet amendement.
Au demeurant, monsieur le rapporteur général, il faut être précis quand on
cherche à me placer dans une situation de contradiction ! Nous avons eu un
débat sur la péréquation, et la conception que vous défendez est celle d'une
péréquation accrue en faveur des collectivités locales qui soit entièrement à
la charge de l'Etat.
Si nous voulons avoir un débat clair et transparent, nous devons aller au-delà
de cette conception, qui fait reposer la péréquation en faveur des
collectivités locales sur le seul contribuable national.
Par ailleurs, au sein des concours de l'Etat, la part péréquatrice est de 15 %
; je n'en tire aucune satisfaction particulière, parce que ces pourcentages ne
sont pas nécessairement très éclairants, mais je souhaite rappeler que cette
même part péréquatrice était à peine supérieure à 10 % en 1997.
Si je n'en tire aucun titre de gloire, c'est que, comme vous, je la trouve
assurément insuffisante. Toutefois, pour que le mouvement ainsi amorcé puisse
être amplifié, il faut que nous acceptions tous que le débat aille au-delà du
financement strictement national des questions de péréquation : la péréquation
est l'affaire de tous, y compris des collectivités locales elles-mêmes !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Puisque Mme le secrétaire d'Etat nous y invite, nous
allons tâcher d'aller au-delà des propos qui ont déjà été tenus.
De quoi parlons-nous ? Rappelons-nous l'histoire fiscale récente ! Nous
parlons d'une cotisation de péréquation. Qu'est-ce ? Une taxe additionnelle à
la taxe professionnelle, créée en 1980 pour alimenter la péréquation : ce sont
donc des ressources levées sur les contribuables locaux et destinées à
alimenter la péréquation entre les budgets locaux.
Que s'est-il passé ? En 1989, l'Etat a en quelque sorte confisqué à son profit
cette ressource locale payée par les contribuables locaux ; en 1999, lors de la
réforme de la taxe professionnelle, la cotisation a connu une majoration dont
le produit a été réservé au seul profit de l'Etat.
Madame le secrétaire d'Etat, si l'on veut que la fiscalité locale soit
lisible, si l'on veut que les relations financières entre l'Etat et les
collectivités locales soient compréhensibles, ne serait-il pas plus simple et
plus clair que les ressources issues des impôts locaux restent dans le circuit
des finances locales ? Quelle est la légitimité de la confiscation par l'Etat
d'une part de la taxe professionnelle ?
A l'origine, en 1980 - il y a plus de vingt ans -, dans l'esprit du
gouvernement de l'époque, ce dispositif, je le répète, était destiné à mettre
en place un début de répartition des ressources entre les collectivités ayant
des recettes de taxe professionnelle importantes et celles qui en avaient
moins.
Vous nous dites, madame le secrétaire d'Etat, que l'effort serait à la charge
de l'Etat. Oui, sans doute, puisque l'Etat s'est accaparé cette ressource !
Mais il n'aurait jamais dû le faire ! Comment peut-on défendre des dispositifs
d'une telle nature ? Lorsque nous abordons les questions de finances locales,
nous butons sans cesse sur des complexités excessives qui ne font que refléter
les contradictions multiples dans lesquelles nous sommes placés depuis déjà
très longtemps : il faut faire un effort pour simplifier tout ce dispositif.
Vous avez également fait allusion tout à l'heure, madame le secrétaire d'Etat,
aux réflexions en cours, et vous avez cité des principes qui vous sembleraient
de nature à guider les contributions intellectuelles à une future réforme des
finances locales. Si je ne me trompe, vous nous avez parlé de clarification et
de simplification.
Madame le secrétaire d'Etat, nous pouvons nous référer, jusqu'à un certain
point, aux mêmes principes que vous : péréquation et simplification ; nous
suggérons des moyens raisonnables d'y contribuer, et vous repoussez nos
propositions d'un revers de la main ! Pardonnez-moi, mais le Sénat ne peut
considérer comme constructif un dialogue mené sur de telles bases !
M. Patrick Lassourd.
Très bien !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-65, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 11
sexies
.
L'amendement n° I-78 rectifié, présenté par MM. Mercier, Charasse, du Luart et
Oudin, est ainsi libellé :
« Après l'article 11
sexies,
insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Après le neuvième alinéa (7°) de l'article L. 3332-1 du code général
des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 8° Les droits de mutation par décès acquittés au titre des successions des
bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie, à due concurrence des
sommes mentionnées à l'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des
familles. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat est compensée à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Le sous-amendement n° I-258, présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne,
Sergent, Demerliat, Lise, Haut, Marc, Angels et Auban, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le I de l'amendement n° I-78 rectifié pour
l'article L. 3332-1 du code général des collectivités territoriales, après le
mot : "acquittés", insérer les mots : "dans le département concerné ou non".
»
La parole est à M. Mercier, pour défendre l'amendement n° I-78 rectifié.
M. Michel Mercier.
Sur l'initiative du Parlement, la récente loi relative à l'allocation
personnalisée d'autonomie, l'APA, a supprimé la possibilité pour les
départements qui versent cette allocation de récupérer sur les successions des
bénéficiaires de l'allocation les sommes qui avaient été servies à ce titre.
L'amendement n° I-78 rectifié n'a pas pour objet de rétablir le recours sur
succession. Au contraire, il prend acte de cette position, qui est commune aux
deux chambres du Parlement et que le Gouvernement a reprise à son compte.
Néanmoins, nous entendons, en quelque sorte, moraliser cette question.
L'absence de recours sur succession en cas de versement de l'allocation
personnalisée d'autonomie a pour conséquence d'augmenter l'actif successoral
sur lequel porteront les droits perçus par l'Etat au décès du bénéficiaire de
l'APA.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Michel Mercier.
Il semble donc tout à fait logique que, dans ce cas, le département qui a
versé l'allocation se voie reverser par l'Etat les droits de succession que
celui-ci a perçus sur un actif successoral gonflé, notamment, par le versement
de l'APA.
Tel est l'objet de cet amendement, qui est signé par d'illustres sénateurs
dont je ne suis ici que le serviteur !
M. Patrick Lassourd.
Serviteur zélé !
M. Michel Mercier.
Madame le secrétaire d'Etat, comme le motif de cet amendement est très moral
et très solidaire, j'espère que j'aurai plus de chance auprès de vous que je
n'en ai eu depuis la reprise de la séance !
M. Gérard Braun.
L'espoir fait vivre !
M. le président.
La parole est à M. Miquel, pour défendre le sous-amendement n° I-258.
M. Gérard Miquel.
L'amendement n° I-78 rectifié a pour objet de faire bénéficier les
départements des droits de succession perçus sur les successions des personnes
qui ont été bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie, dans la
limite, bien sûr, des sommes versées au titre de ladite allocation.
De la sorte, l'Etat ne percevra plus le surplus de recettes qu'il perçoit
depuis que l'APA a remplacé la prestation spécifique dépendance, dont le
régime, qui prévoyait le recours sur succession, avait pour effet de réduire
les droits de succession puisque l'actif des successions était diminué du
montant du recours.
Le sous-amendement n° I-258 apporte une simple précision au dispositif de
l'amendement n° I-78 rectifié : il prévoit expressément que le département
bénéficiaire sera bien celui qui aura versé l'allocation et non celui où les
droits de succession seront payés.
M. Auguste Cazalet.
C'est juste !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° I-78 rectifié et sur le
sous-amendement n° I-258 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le sous-amendement n° I-258 apportant une utile
précision, nous y sommes favorables, comme nous sommes favorables à
l'amendement n° I-78 rectifié, qui est excellent.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement et ce sous-amendement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je crains qu'il ne soit défavorable.
(Exclamations
sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Michel Mercier.
Encore !
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
En effet, le choix, fait par la représentation
nationale, de mettre fin à la récupération sur succession des bénéficiaires de
l'APA est désormais inscrit dans la loi : dont acte.
Comme l'avait souligné M. Sueur dans son rapport, la suppression du recours
sur succession représente une très faible perte de ressources pour les
départements.
Il est maintenant proposé de compenser le manque à gagner subi par les
départements du fait de la suppression de la récupération sur succession,
laquelle, je le répète, ne résulte pas d'une initiative du Gouvernement. Vous
comprendrez donc que je ne puisse être favorable à l'amendement n° I-78
rectifié, non plus, par cohérence, qu'au sous-amendement n° I-258.
M. le président.
Je mets aux voix le sous-amendement n° I-258, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° I-78 rectifié, accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il a été adopté à l'unanimité !
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 11
sexies.
L'amendement n° I-199, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 11
sexies,
insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - A compter du 1er janvier 2002, le produit des impositions directes
locales acquittées par France Télécom est progressivement perçu au profit des
collectivités locales et des établissements publics de coopération
intercommunale, la part revenant à l'Etat étant réduite chaque année de 25 %. A
compter du 1er janvier 2006, France Télécom est assujettie au droit commun de
la fiscalité locale.
« II. - Les pertes de recettes sont compensées par un relèvement à due
concurrence de la cotisation minimale de taxe professionnelle prévue à
l'article 1647 E du code général des impôts et par un relèvement à due
concurrence de l'impôt sur les sociétés. »
La parole est à Mme Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils.
Cet amendement vise à assujettir France Télécom au droit commun en matière de
fiscalité locale.
C'est une demande que nous formulons régulièrement et qui, loin de perdre son
actualité, devient au contraire de plus en plus incontestablement légitime au
fil des ans.
Depuis le changement de statut de 1991, cet établissement adopte le
comportement d'une entreprise comme les autres, avec, par exemple, la création
de la filiale Orange.
France Télécom évolue dans un secteur fortement soumis à la concurrence. Les
autres entreprises de téléphonie ne manquent pas d'invoquer le lot de règles
concurrentielles devant la Cour de justice des Communautés européennes.
Rien ne justifie, de ce point de vue, le régime particulier de France Télécom
en matière d'impôts locaux.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission serait favorable à l'amendement si ses
auteurs acceptaient de substituer à un gage inacceptable un gage classique.
M. Michel Charasse.
Sur le tabac !
M. le président.
Le groupe communiste républicain et citoyen accepte-t-il de rectifier son
amendement dans le sens souhaité par M. le rapporteur général ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Tout à fait !
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° I-199 rectifié, présenté par M. Foucaud,
Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et
citoyen, et qui est ainsi libellé.
« Après l'article 11
sexies,
insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - A compter du 1er janvier 2002, le produit des impositions directes
locales acquittées par France Télécom est progressivement perçu au profit des
collectivités locales et des établissements publics de coopération
intercommunale, la part revenant à l'Etat étant réduite chaque année de 25 %. A
compter du 1er janvier 2006, France Télécom est assujettie au droit commun de
la fiscalité locale.
« II. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par la
création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575
A du code général des impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Conformément à l'article 90 de la loi de finances pour
2001, le Gouvernement doit remettre au Parlement un rapport sur l'état
d'avancement des négociations menées avec France Télécom pour la normalisation
de la fiscalité locale de cette entreprise et sur les réformes
envisageables.
Il s'agit de travaux complexes du fait de la diversité des solutions
possibles, des enjeux en cause, du nombre d'intervenants concernés. Je puis
cependant vous assurer que, contrairement à ce que j'ai pu entendre cet
après-midi, le Sénat disposera de ce rapport d'ici à l'examen du projet de loi
de finances rectificative pour 2001.
A partir des différentes pistes que ce rapport présentera, nous devrions
pouvoir opportunément débattre de la proposition que vous venez de faire,
madame Beaufils, car elle constitue l'un des scénarios étudiés.
Toutefois, sans préjuger les éléments qui figureront dans le rapport, je me
permets de souligner que la solution que vous préconisez aboutirait en 2006 à
une perte totale de recettes de l'ordre de 700 millions d'euros pour l'Etat et
de l'ordre de 320 millions d'euros pour le FNPTP. Vous conviendrez avec moi que
cette solution présente tout de même certains inconvénients, pour ne pas dire
des inconvénients certains !
Je ne veux pas préjuger, je le répète, les résultats du débat auquel donnera
lieu le rapport et, en attendant celui-ci, je souhaiterais que les auteurs de
l'amendement n° I-199 rectifié acceptent de le retirer.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat,
mes chers collègues, depuis plusieurs années, à partir d'initiatives largement
partagées au sein de cet hémicycle, nous avons l'habitude d'examiner, lors des
débats de la loi de finances, les modalités d'imposition de France Télécom.
Je rappelle que, l'année dernière, l'Assemblée nationale et le Sénat ont
obtenu l'insertion dans la loi de finances initiale pour 2001 d'un article 90
qui prévoyait la remise au Parlement du fameux rapport dont vous venez de
parler et qui devait nous être remis avant le 1er juin 2001.
Or ce rapport ne nous a pas encore été communiqué. Selon la rumeur, il serait
disponible, mais on ne s'empresserait de nous le remettre. Peut-être est-il
quelque peu gênant !
La question de la fiscalité de France Télécom est pourtant de plus en plus
pressante, car, depuis la filialisation d'Orange, les ressources du FNPTP se
sont déjà réduites.
En outre, la Commission européenne a demandé à la France, dans un courrier en
date du 28 juin 2001, de normaliser les conditions d'imposition de France
Télécom.
Une simple question, madame la secrétaire d'Etat : la Commission européenne
est-elle en passe d'obtenir ce que le Gouvernement promet plus ou moins tous
les ans au Parlement, sans que cette promesse soit suivie d'effets ?
En tout état de cause, France Télécom souhaite passer au droit commun. Les
dispositions actuelles sont, pour cette entreprise, un handicap dans la
compétition, nous ne cessons de le répéter depuis des années.
Par ailleurs, l'équité voudrait que les collectivités territoriales -
directement pour celles qui disposent sur leur sol d'implantations de France
Télécom, indirectement pour les autres par les mécanismes de la péréquation -
bénéficient de la présence et du développement de cette entreprise, redevable
comme les autres de la taxe professionnelle.
Pour l'ensemble de ces raisons, et compte tenu de notre attachement à la cause
qui est ici défendue - et qui, certaines années, l'a d'ailleurs été par
l'ensemble des sénateurs indépendamment de leur appartenance politique - la
commission ne peut pas partager votre position, madame le secrétaire d'Etat,
sachant que, sur le plan budgétaire, l'étalement de la mesure jusqu'en 2006
devrait rendre supportable les coûts - certes significatifs - qu'elle fera
peser sur le budget de l'Etat.
Parmi les questions relatives aux finances locales dont nous avons à débattre,
c'en est une, madame le secrétaire d'Etat, à laquelle nous attachons beaucoup
d'importance. Elle est symbolique de la bonne volonté, ou de l'absence de
volonté, de l'Etat en matière de clarification de ses relations financières
avec les collectivités territoriales. Pour notre part, nous voudrions que
l'Etat n'applique pas sur ces sujets deux poids et deux mesures.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-199 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 11
sexies.
Article 21