SEANCE DU 26 NOVEMBRE 2001


M. le président. L'amendement n° I-215, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 200 sexies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - I. - Les contribuables résidant en France qui, entre le 1er novembre 2001 et le 31 décembre 2003, acquièrent des équipements électroménagers de classe A peuvent bénéficier à ce titre d'un crédit d'impôt.
« Ce crédit d'impôt égal au plus à 15 % du montant des dépenses est accordé sur présentation des factures. »
« II. - Pour un même contribuable, le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt ne peut excéder au cours de la période définie au premier alinéa du I la somme de 200 euros.
« Le crédit d'impôt est imputé sur le montant de l'impôt dû au titre de l'impôt sur le revenu de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été payées, après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200, de l'avoir fiscal, des crédits d'impôts et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué.
« III. - La liste des équipements pouvant bénéficier de ce crédit d'impôt est fixée par arrêté. »
« II. - La perte de recettes résultant de l'application des dispositions du paragraphe I ci-dessus est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement tend à compléter les dispositifs fiscaux existants pour faciliter une utilisation rationnelle et économe des sources d'énergie.
Ces dernières années, nous avons déjà débattu de mesures diverses et pour le moins productrices d'effets non négligeables quant au niveau de pollution atteint dans notre pays.
Comme nous avons eu l'occasion de le dire, nous n'avons pas adhéré à l'opération de modification des règles de calcul de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, pas plus que nous n'avons tout à fait approuvé le transfert de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, vers le Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC, transfert qui nuit quelque peu à sa lisibilité.
Reconnaissons cependant que la préoccupation légitime de la protection de l'environnement est aujourd'hui au centre de la réflexion sur l'évolution de notre système fiscal, ce qui n'est finalement pas un mal.
Dans le cadre de cet amendement, nous préconisons l'instauration d'un crédit d'impôt lié à l'achat d'appareils électroménagers économes en énergie, appareils dont le coût est aujourd'hui plus élevé que celui des autres plus traditionnels.
On peut évidemment gloser sur la portée de la mesure que nous recommandons. Du moins présente-t-elle l'intérêt de favoriser au mieux un comportement des consommateurs plus soucieux du respect de l'environnement, dans le cadre d'une consommation d'énergie individuelle plus directement maîtrisée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission estime que cette initiative est originale et intéressante. En d'autres termes, il s'agit d'un crédit d'impôt qui permettrait d'acquérir des fers à repasser, des grille-pain, des armoires à sécher le linge... autant d'appareils extrêmement utiles à la vie quotidienne. (Sourires.)
Après avoir entendu l'exposé de M. Foucaud, j'avoue être un peu surpris que le Gouvernement n'y ait pas songé. Après tout cette mesure serait tout à fait opportune au moment des cadeaux de fin d'année. Elle serait venue appuyer une logique, si j'ose dire clientéliste, qui peut, à certains moments, présenter des avantages, à condition d'être lisible et compréhensible.
M. Jacques Oudin. Excellent !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Sérieusement, je ne crois franchement pas que tout doive faire l'objet d'une incitation fiscale.
Mme Marie-Claude Beaudeau. On vous le redira !
M. Thierry Foucaud. On vous ressortira cet argument !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous aurez raison de le ressortir.
Que l'impôt soit simple, qu'il soit autant que possible neutre et que l'on évite de demander à l'Etat de se substituer sans cesse à nos libres décisions !
Quand on s'apprête à acheter un grille-pain ou un appareil figurant dans la liste de ceux que j'ai cités, il n'est pas indispensable que l'Etat soit dans notre dos pour nous inciter à le faire ou non, selon les moments ou en fonction de je ne sais quelle considération.
Mes chers collègues, bien que le gage soit tout à fait usuel, je ne peux que donner un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Cet amendement n° I-215 fait suite à l'article 6, dont nous venons de débattre et qui prévoyait un certain nombre d'extensions de crédits d'impôt pour l'acquisition de véhicules propres et pour certaines dépenses d'équipement de l'habitation principale relatives aux matériaux d'isolation thermique et aux appareils de régulation de chauffage.
Si je fais ce rappel, c'est pour que les choses soient bien claires entre nous. Le Gouvernement partage l'objectif qui consiste à appliquer les crédits d'impôt, c'est-à-dire des dispositifs incitatifs sur des actions ou des projets qui sont particulièrement importants et encadrés.
En revanche, je ne crois pas que l'on puisse appliquer de manière très pertinente le dispositif du crédit d'impôt aux appareils dont il est question dans l'amendement. J'ajoute, même si cela ne sera certainement pas considéré comme un argument en soi par Mme Beaudeau et MM. Foucaud et Loridant, qu'il faut être très attentif à la manière dont on manie le crédit d'impôt, qu'il ne peut pas servir à tout, et, qu'appliqué à un secteur donné, il faut bien mesurer les conséquences qui s'ensuivent lorsqu'on cesse d'en bénéficier.
Pour toutes ces raisons, le retrait de cet amendement me paraît préférable.
M. le président. Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-215 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Cet amendement est légitime. Je ne reviendrai pas sur son contenu ni sur les explications que j'ai données tout à l'heure, mais je dirai à M. le rapporteur général que d'autres amendements déposés, notamment, par la commission des finances, sont non pas des cadeaux de Noël, mais, très franchement, des cadeaux de roi !
M. Michel Charasse. Très juste !
M. Thierry Foucaud. Ce sont des cadeaux très, très importants,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au grand capital !
M. Thierry Foucaud. ... des cadeaux qui sont très loin des besoins populaires ! Pourquoi ne pas aider un certain nombre de personnes dans notre pays à acheter des appareils électroménagers qui se veulent non seulement modernes, mais aussi - excusez-moi ce jeu de mots - « branchés » sur l'avenir puisque économes en énergie ?
Mme la secrétaire d'Etat a dit que le Gouvernement souhaiterait peut-être aller dans le sens de cet amendement, mais, étant donné la situation actuelle, elle m'a demandé de le retirer. J'accepte de le retirer, mais j'indique d'ores et déjà que nous reviendrons sur ce sujet.
M. le président. L'amendement n° I-215 est retiré.
M. Michel Charasse. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-215 rectifié.
La parole est à M. Charasse, pour le défendre.
M. Michel Charasse. Je voudrais signaler que la proposition faite par nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen n'est pas si anachronique que ça ! Après tout, on a voté en 1995-1996 le plan de relance de la consommation de M. Juppé, qui comportait des déductions fiscales pour l'achat de casseroles ! Par conséquent, ce que fait M. Foucaud aujourd'hui n'est pas plus contestable que ce qu'a fait M. Juppé hier, ou inversement. (M. le rapporteur général s'exclame.)
Le Sénat a voté cela, et notre rapporteur général a dû être extrêmement élogieux à l'égard de cette proposition Juppé, qui concernait des batteries de casseroles, je le rappelle ! (Sourires.)
J'ajoute qu'aujourd'hui, lorsqu'on équipe la cuisine du bureau d'un P-DG avec du matériel ménager pour lui permettre de faire un peu de cuisine et de recevoir des copains à côté de son bureau, tout cela est déductible.
Enfin, à partir du moment où les incidents provoqués par tous ces matériels sont pris en charge par la sécurité sociale, quand on se brûle, quand on se coupe, quand on se blesse - je pense au Belge qui, croyant toucher son téléphone, décroche son fer à repasser bouillant et se brûle tout le côté du visage ! (Rires.) - il n'y a pas de raison de ne pas aller plus loin !
Cela dit, compte tenu des explications du Gouvernement, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° I-215 rectifié est retiré.
Je tiens à vous remercier, monsieur Charasse, de contribuer à donner à cette séance le tour convivial qui lui avait fait défaut au départ !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais simplement dire à M. Michel Charasse : bis repetita non placent. L'avenir, nous l'espérons, ne ressemblera pas nécessairement au passé. (Sourires.)
M. Michel Charasse. C'est donc plutôt perseverare diatolicum ! (Nouveaux sourires.)
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Pour compléter les propos de M. Charasse et aller dans le sens de nos amis du groupe communiste républicain et citoyen, je rappelle que, dans le dispositif Juppé, il fallait que la casserole vaille au moins mille francs pièce !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Belles casseroles !
M. Michel Charasse. Certains tribunaux sont pleins de « casseroles » valant beaucoup plus cher ! (Rires.)

Article 7