SEANCE DU 7 JUIN 2001
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 220 rectifié
bis
est présenté par MM. Vinçon, Le
Grand, Valade, Tregouët, Murat, Cornu, Darcos, Neuwirth et Schosteck.
L'amendement n° 241 est déposé par MM. Humbert et Carle.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Les taxes parafiscales perçues dans un intérêt économique ou social au
profit d'une personne morale de droit public ou privé autre que l'Etat, les
collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs sont
établies par décret en Conseil d'Etat, pris sur le rapport du ministre des
finances et du ministre intéressé. La perception de ces taxes au-delà du 31
décembre de l'année de leur établissement doit être autorisée chaque année par
une loi de finances. »
Par amendement n° 278, MM. Badré et Monory proposent d'insérer, après
l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les taxes parafiscales perçues dans un intérêt économique ou social au
profit d'une personne morale de droit public ou privé autre que l'Etat, les
collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs sont
établies par décret en Conseil d'Etat, pris sur le rapport du ministre de
l'économie et des finances et du ministre intéressé. La perception de ces taxes
au-delà du 31 décembre de l'année de leur établissement doit être autorisée
chaque année par une loi de finances. »
La parole est à M. Schosteck, pour présenter l'amendement n° 220 rectifié
bis.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Cet amendement reprend les dispositions de l'article 4 de l'ordonnance
organique de 1959 pour ce qui est des taxes parafiscales.
De nombreux professionnels exerçant leurs activités dans divers secteurs ont
manifesté, à juste raison, leur opposition à la disparition des taxes
parafiscales comme source de financement des actions de formation, de promotion
ou de représentation et leur refus de voir ces actions financées sur dotations
budgétaires, par trop dépendantes de la conjoncture.
Il faut rappeler que les organismes bénéficiant d'une taxe parafiscale
délibèrent en présence d'un commissaire du Gouvernement et d'un contrôleur
d'Etat, et qu'ils sont soumis au contrôle de la Cour des comptes. De plus,
l'assiette, le taux et les produits concernés sont définis par décret pris
après avis du Conseil d'Etat pour une durée de cinq ans renouvelable. Les taxes
parafiscales doivent figurer, enfin, à l'état E annexé à la loi de finances,
avec estimation de la recette prévisible. L'autorisation du Parlement est donc
demandée chaque année.
Il ne saurait y avoir substitution entre taxe parafiscale et imposition de
toute nature établie par le législateur dans d'autres cas qu'un établissement
public à caractère industriel et commercial ou d'une personne morale de droit
privé. Cette position exprimée par le Conseil d'Etat le 21 décembre dernier se
poursuit en précisant qu'une telle imposition de toute nature établie par le
législateur ne saurait être perçue par une personne privée qui ne poursuit,
conformément à son objet, qu'un intérêt propre à un secteur d'activité ou à une
profession.
Pour toutes ces raisons, il nous semble tout à fait souhaitable de maintenir
le dispositif des taxes parafiscales.
M. le président.
L'amendement n° 241 est-il soutenu ?...
L'amendement n° 278 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 220 rectifié
bis
?
M. Alain Lambert,
rapporteur.
C'est l'article 52 qui traite des dispositions transitoires
relatives à ces taxes parafiscales, qui, c'est vrai, suscitent
incontestablement un certain émoi.
Je dirai aux auteurs de cet amendement qu'il faut être conscient de la
démarche entreprise à l'occasion de cette réforme, qui vise - on l'a souligné à
de nombreuses reprises sur toutes les travées - à restaurer le rôle du
Parlement dans des domaines qu'il n'aurait jamais dû abandonner, et dont la
parafiscalité fait partie.
M. Michel Charasse.
Tout à fait !
M. Alain Lambert,
rapporteur.
La doctrine de la commission des finances est en tout point
équivalente à celle de l'Assemblée nationale : soit une taxe parafiscale est
régulièrement affectée en raison de missions d'intérêt général, auquel cas elle
doit être traitée comme telle, devenir une imposition de toute nature et, par
conséquent, voir son régime figurer dans la loi, soit elle n'est pas
régulièrement affectée en raison de missions d'intérêt général, et elle ne peut
alors subsister.
Comme vous, monsieur Schosteck, j'ai été alerté de la légitime inquiétude
d'organismes bénéficiaires du produit de taxes parafiscales affectées souvent
depuis très longtemps et fonctionnant bien, en tout cas à la satisfaction des
professionnels.
Mais il faut que les professionnels comprennent également le fond de la
question. Il s'agit non pas de les mettre en difficulté, mais de rendre au
Parlement et à la représentation nationale le rôle qui n'aurait jamais dû leur
échapper.
Pour les organismes qui ne pourraient pas bénéficier d'une taxe affectée, des
difficultés risquent en effet d'apparaître. J'en suis bien conscient.
Toutefois, plusieurs solutions sont envisageables, solutions que je développe
d'ailleurs dans mon rapport écrit.
Elles nécessiteront à chaque fois une négociation, qu'il s'agisse, selon les
cas, de subventions budgétaires ou de cotisations volontaires. C'est pourquoi,
pour permettre au Parlement de faire son travail de législateur dans les
meilleures conditions possibles, je proposerai, à l'article 52, de ne faire
entrer en vigueur le nouveau régime qu'au 1er janvier 2004, ce qui devrait
laisser à chaque organisme le temps de s'organiser.
Prenons garde de ne pas oublier non plus que nous devons agir en législateurs
organiques : un commissaire du Gouvernement ou un décret en Conseil d'Etat
n'ont jamais remplacé l'intervention de la représentation nationale. Nous
l'avons dit à de nombreuses reprises, en évoquant - cela résonne encore dans
nos oreilles - la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et notre
Constitution. Il ne faut pas confondre, d'une part, l'autorisation de
prélèvement et l'état E annexé et, d'autre part, la fixation du régime des
taxes parafiscales, qui échappe aujourd'hui au Parlement, alors même que les
sommes en jeu sont, vous le savez, parfois très importantes.
Il s'agit, encore une fois, de redonner au Parlement la mission qui lui a été
confiée par le peuple français de fixation du régime des taxes parafiscales et
de la retirer, en quelque sorte, à l'exécutif, qui jusqu'alors l'exerçait. Il
s'agit donc de faire oeuvre de démocratie : rien de plus, rien de moins, mais
c'est déjà beaucoup !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je souscris aux propos qui viennent d'être tenus par
M. le rapporteur.
Un point m'était apparu important lors du débat de première lecture à
l'Assemblée nationale, qui tenait, en effet, à la difficulté d'assurer dans un
délai très court la substitution entre des dispositions de nature fiscale et
des dispositions de nature parafiscale.
De ce point de vue, je me félicite du délai supplémentaire d'un an qui a été
proposé par la commission des finances et dont nous reparlerons à l'article 52.
Voilà une mesure excellente qui permettra de faciliter ce passage de la
parafiscalité vers la fiscalité, dont on sait qu'il pose des difficultés à
certains organismes. Je pense que ce délai est de bon aloi.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 220 rectifié
bis,
repoussé par la
commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3