SEANCE DU 19 AVRIL 2001


M. le président. La parole est à M. de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. M. le Premier ministre avait pensé - du moins la presse s'en était-elle fait l'écho - qu'en confiant le ministère des transports à M. Jean-Claude Gayssot tout souci concernant les grèves à la SNCF lui serait épargné ! (Rires sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste - M. le Premier ministre sourit en faisant un signe de dénégation.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cela a failli !
M. Henri de Raincourt. Hélas ! il n'en a rien été et la « gréviculture » se porte très bien dans une entreprise nationale dont les performances techniques sont remarquables mais le coût élevé. Nous sommes là au coeur du concept fameux et fumeux de l'entreprise citoyenne.
Il est vrai que mardi soir, lors de votre causerie pédagogique, monsieur le Premier ministre, vous avez dit que la SNCF allait bien.
M. Gérard Larcher. Pas en Ile-de-France en tout cas !
M. René-Pierre Signé. Il a été élevé chez les bons pères !
M. Henri de Raincourt. Doit-on comprendre que, dans cette quête de sens, cela correspond à une nouvelle définition d'une entreprise en grève ?
M. René-Pierre Signé. Il a été élevé à Neuilly !
M. le président. Monsieur Signé, je vous en prie.
Veuillez poursuivre, monsieur de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Ce qu'une inversion, non pas de calendrier électoral mais de terminologie, cette fois, qualifie de « mouvement social » vient de pourrir la vie quotidienne de millions de Français, travailleurs, clients ou vacanciers.
En premier lieu, le programme « Cap clients » a été annoncé comme suspendu par le président Gallois, mais considéré comme retiré par les syndicats.
En deuxième lieu, des concessions importantes ont été faites par l'entreprise et des pertes lourdes dues à la paralysie du fret et aux perturbations du trafic voyageurs ont été enregistrées.
En troisième lieu, enfin, les voyageurs et les entreprises qui ont été les victimes de ces dysfonctionnements de notre service public « à la Française » sont aussi des contribuables.
M. Dominique Braye. C'est dramatique !
M. René-Pierre Signé. M. de Raincourt ne prend jamais le train : il a toujours un chauffeur !
M. Henri de Raincourt. Les textes sont clairs : ni les fonctionnaires ni les agents des services publics n'ont droit au paiement des jours de grève. Or, dans la pratique, sous le vocable merveilleux de « récupérateurs », des compensations à due concurrence viennent neutraliser les retenues en question : heures supplémentaires fictives, primes spéciales, jours chômés, etc. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Trois questions se posent, sur lesquelles nous sommes en droit d'attendre des réponses précises, monsieur le ministre.
La première : le programme « Cap clients » est-il maintenu ou abandonné ?
Deuxième question : quel est le coût cumulé de la grève ? On parle de 1,5 milliard de francs. Est-ce exact ?
Troisième question : pouvez-vous nous assurer que les jours de grève ne seront pas payés « en douce » à cette très petite minorité de cheminots qui ont pris en otage des millions de Français ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je me doutais que la question allait tourner autour de ce point, et je me suis renseigné pour savoir quelle avait été votre attitude au moment de la grande grève des cheminots de la RATP en 1995, alors que sénateur, vous souteniez le Gouvernement. (Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Dominique Braye. Ce n'est pas la question !
M. Gérard Larcher. Et pour la grève de 1934 ? (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je vais vous raconter... (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Dominique Braye. Georges Marchais est de retour !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie. Ecoutons en silence M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je me suis donc renseigné sur ce que vous aviez dit. Vous étiez effectivement intervenu. Cependant, je n'ai trouvé trace ni de proposition de service minimum,...
M. Henri de Raincourt. Je n'en ai pas parlé !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. En effet, vous n'en avez pas parlé. Donc, vous avez l'esprit de continuité !
M. Lamassoure, qui vous avait répondu, n'avait pas parlé de service minimum, mais de limiter le droit de grève. (Exclamations sur plusieurs travées du RPR.) Or, c'est l'année qui avait connu le plus de grèves à la SNCF, et c'était quand vos amis étaient au Gouvernement !
M. Dominique Braye. Pouvez-vous répondre à la question, monsieur le ministre ?
M. Paul Masson. Aux trois questions !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'en viens à vos trois questions précises. (Ah ! sur les mêmes travées.)
Premièrement, la SNCF, aujourd'hui, se développe, M. le Premier ministre l'a rappelé l'autre soir à la télévision.
M. Dominique Braye. C'est le programme « Cap clients », la première question !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Depuis 1997, c'est-à-dire depuis l'arrivée du nouveau Gouvernement, le trafic voyageurs a augmenté de près de 20 %,...
M. Dominique Braye. Et « Cap clients » ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... le trafic de marchandises de plus de 16 %, non sans reprendre quelques parts de marché à la route, ce qui est l'objectif de la nouvelle politique des transports.
M. Jean-Pierre Raffarin. Vous vous trompez de question !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, contrairement à l'époque où vos amis et vous-même étiez aux responsabilités (Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)...
M. Dominique Braye. Ce n'est pas la question, monsieur le ministre !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... la SNCF développe son activité,...
M. Dominique Braye. Et « Cap clients » ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... et c'est par souci de développement que la direction de la SNCF recherche une plus grande efficacité de son organisation interne.
M. Charles Descours. Langue de bois !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le problème, c'est que...
M. Dominique Braye. Et « Cap clients » ?...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... les syndicats craignaient que cela ne présente des risques de privatisation si vous reveniez au pouvoir.
M. Charles Descours. C'est scandaleux !
M. Dominique Braye. Ce n'est pas la question !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. La direction de la SNCF a accepté de discuter avec les cheminots pour trouver les moyens d'augmenter l'efficacité de l'entreprise.
M. Dominique Braye. Monsieur le ministre, on vous a posé des questions, répondez-y !
Mme Hélène Luc. Laissez parler M. le ministre !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je termine sur le coût de la grève, car beaucoup de chiffres ont été donnés et je suppose que vous voulez connaître la réalité.
M. Dominique Braye. Et « Cap clients » ?
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je conclus, monsieur le président.
La perte de recettes liée aux arrêts de travail qui se sont prolongés par la décision de deux syndicats, l'un catégoriel, l'autre minoritaire, est de l'ordre de 400 millions de francs.
M. Dominique Braye. Ce n'est pas ce qui a été dit !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Pour le reste, il s'agit du résultat de négociations salariales qui étaient de toute façon prévues et dont le coût se chiffre à environ 800 millions de francs, y compris les 1 000 emplois supplémentaires dont la SNCF a besoin pour accroître son efficacité, notamment en ce qui concerne le développement du transport marchandises. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes. Exclamations sur les travées du RPR et les Républicains et Indépendants.)
M. Jean Chérioux. Il n'a pas répondu aux questions !
M. Dominique Braye. Merci Georges !
M. Christian Bonnet. Et la grève ?
M. Ivan Renar. Avec vous, c'est le service maximum !

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