SEANCE DU 3 AVRIL 2001


M. le président. La parole est à M. Signé, auteur de la question n° 1026, adressée à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.
M. René-Pierre Signé. Madame la secrétaire d'Etat, nous allons beaucoup parler d'Internet et des nouvelles technologies de l'information et de la communication, les NTIC !
Je voulais attirer votre attention sur les nouvelles technologies, domaine dans lequel il semble que le discours soit sensiblement en avance sur la mise en oeuvre des technologies elles-mêmes. Est-il besoin de préciser que cet état de fait est plus vrai encore en zone rurale ? Loin de moi, cependant, l'idée de nier les changements radicaux entraînés par l'introduction des nouvelles technologies de l'information dans nos sociétés.
Internet, notamment et surtout, mais aussi les autoroutes de l'information permettent en effet de modifier en profondeur les méthodes de productivité, puisqu'ils abaissent fortement le coût de l'échange de l'information entre les acteurs économiques.
Les changements ne se limitent cependant pas à la sphère marchande, puisque les citoyens voient, eux aussi, leurs rapports avec les administrations évoluer vers plus de transparence et d'accessibilité. Internet est donc le vecteur d'une transformation essentielle de l'organisation de notre économie et de notre société. C'est précisément ce qui doit nous inciter à fournir cette technologie à l'ensemble de la population, donc sur tout notre territoire.
Or, les opérateurs n'investissent pas là où il n'y a pas de réseau dense d'entreprises, pas assez de population : il s'agit avant tout, évidemment, des zones rurales. Les nouvelles technologies sont donc loin de constituer la panacée pour le désenclavement de nos campagnes. La responsabilité des pouvoirs publics est ici clairement engagée.
En somme, quelles actions peuvent être menées afin d'éviter l'affaiblissement annoncé des zones rurales, puisqu'elles semblent exclues de la dernière révolution technologique ? Moins radicalement, n'y a-t-il pas des mesures qui pourraient inciter les opérateurs à investir dans nos campagnes ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage, bien entendu, votre analyse sur les bouleversements considérables liés au développement des services de télécommunications en général, et d'Internet en particulier.
Le Gouvernement a toujours considéré que l'accès dans de bonnes conditions aux réseaux et aux services de télécommunications était un enjeu majeur en termes de développement économique et d'intégration de tous à la société de l'information.
A cet égard, je tiens d'abord à rappeler que l'accès à Internet est disponible sur l'ensemble du territoire français par le réseau téléphonique commuté à un tarif faisant l'objet d'une péréquation.
En matière de services de télécommunications à haut débit, le Gouvernement a toujours mené une politique favorisant l'aménagement du territoire, tout en maintenant un souci de neutralité technologique, seule garante d'une concurrence équitable et d'une couverture maximale du territoire.
Aujourd'hui, cinq technologies permettent d'accéder à Internet à haut débit : la fibre optique, l'ADSL, la boucle locale radio, les réseaux câblés et le satellite. L'ADSL couvrira plus de 60 % de la population à la fin de l'année 2001 et 80 % dans quelques années. Les technologies de la boucle locale radio, qui sont plus particulièrement destinées aux petites et moyennes entreprises, sont aujourd'hui en cours de déploiement par les opérateurs qui se sont engagés à couvrir une part significative de la population française. Potentiellement, tout le territoire peut être atteint par le satellite, mais, compte tenu de la présence d'autres systèmes sur certains segments de marché, le satellite devrait plutôt s'adresser à des besoins spécifiques et en particulier ceux des zones non couvertes par l'ADSL, la boucle locale radio ou le câble.
Le Gouvernement compte sur la complémentarité qui existe entre ces cinq technologies pour assurer une couverture complète du territoire et pour offrir des services à l'ensemble des utilisateurs. Cependant, il est à craindre que le seul jeu de la concurrence ne soit pas suffisant pour donner à tous les bassins de vie l'accès à ces réseaux à haut débit. C'est pourquoi le Gouvernement continuera d'étudier avec la plus grande attention toutes les solutions permettant de favoriser « l'irrigation numérique » des zones rurales.
A cet égard, la modification du code des collectivités territoriales qui est intervenue en 1999 permet aux collectivités locales d'investir dans des infrastructures de communication en cas de déficience de la part du marché. Les conditions de cette intervention seront assouplies dans le cadre du projet de loi sur la société de l'information.
Par ailleurs, le développement de la couverture du territoire par les réseaux de mobiles GSM est, bien sûr, un des facteurs favorisant le développement économique et participant au désenclavement des zones défavorisées ; nous en avons parlé. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement prépare un rapport au Parlement sur l'état de la couverture de la téléphonie mobile et sur les différentes solutions pouvant être mises en oeuvre pour remédier aux problèmes résiduels de couverture.
M. René-Pierre Signé. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Signé.
M. René-Pierre Signé. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse. Vous avez développé de justes raisons, que j'apprécie.
Toutefois je me permets d'insister sur ce que je signalais tout à l'heure, à savoir le fait que nous devons faire face à une véritable aporie : les opérateurs disent qu'Internet se développera quand l'usage se sera répandu ; les opérateurs viendront d'eux-mêmes, en quelque sorte.
Mais que répondre quand on nous demande si les nouvelles technologies permettront d'enrayer le déclin des zones rurales ? Les investissements technologiques portent avant tout, je le répète, sur les zones déjà développées, donc équipées et bien dotées en capital humain. On achoppe ici sur la limite principale de l'allocation des ressources dans un système qui fait de la compétitivité des territoires le principal critère de répartition : seuls les territoires les mieux dotés - pour l'instant tout au moins ; mais, à cet égard, votre réponse est encourageante - peuvent espérer attirer les richesses. D'où une véritable inquiétude, que j'ai essayé de vous exprimer, et je vous remercie de l'avoir écoutée.

CONSÉQUENCES
DE LA PROFESSIONNALISATION DE L'ARMÉE