SEANCE DU 18 JANVIER 2001
M. le président.
Par amendement n° 9 rectifié, M. Karoutchi propose d'insérer, après l'article
6, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le I de l'article L. 2123-20 du code général des collectivités
territoriales, les mots : "100 000 habitants et plus" sont remplacés par les
mots : "40 000 habitants et plus".
« II. - En conséquence, l'article L. 2123-24 du même code est ainsi modifié
:
«
a)
Le troisième alinéa est abrogé ;
«
b)
Dans le quatrième alinéa, les mots : "100 000 habitants" sont
remplacés par les mots : "40 000 habitants".
« III. - La perte de recettes résultant pour les communes de l'application du
I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation
globale de fonctionnement.
« IV. - La perte de recette pour l'Etat de la majoration de la dotation
globale de fonctionnement destinée à compenser l'application du I ci-dessus est
compensée à due concurrence par une augmentation des droits de timbre visés aux
articles 919, 919 A et 919 C du code général des impôts. »
La parole est à M. Karoutchi.
M. Roger Karoutchi.
Il s'agit d'abaisser le seuil prévu à l'article L. 2123-20 du code général des
collectivités territoriales pour permettre l'indemnisation de l'ensemble des
conseillers municipaux des communes dont la population est supérieure à 40 000
habitants.
Bien entendu, cette mesure peut sembler quelque peu arbitraire. Pourquoi 40
000 et non pas 20 000 ou 30 000 ?
En réalité, c'est un premier pas vers la reconnaissance du travail de
l'ensemble des élus, y compris les conseillers municipaux.
Tout à l'heure, M. le ministre de l'intérieur nous a dit que, dans son projet,
il était envisagé, s'agissant des villes moyennes, c'est-à-dire ayant entre 40
000 et 100 000 habitants, de faire des conseils municipaux les véritables
gestionnaires des futurs conseils de quartier. Autrement dit, dans la pratique,
les conseils municipaux des villes de plus de 40 000 habitants auront, outre la
totalité des charges qui pèsent déjà sur eux, la charge de la gestion
décentralisée de la commune dans l'ensemble des quartiers.
Il faut donc, dès aujourd'hui, prévoir l'indemnisation des conseillers, une
indemnisation certes légère, mais qui correspondra à leur charge réelle de
travail.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
La commission comprend bien l'esprit de cet amendement, qui
tend à étendre aux communes de plus de 40 000 habitants le dispositif qui
s'applique aujourd'hui aux communes de plus de 100 000 habitants.
Elle a toutefois émis un avis défavorable, car le code général des
collectivités territoriales permet déjà, dans l'enveloppe globale, d'indemniser
les conseillers qui exercent des missions ou des fonctions particulières. La
souplesse ainsi offerte lui paraît suffisante.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Que la situation des conseillers municipaux non
indemnisés doive être améliorée, nous pourrions en convenir.
Ce qui est gênant dans la mesure proposée, c'est qu'elle est globale, uniforme
et, au fond, sans discrimination positive, alors que celle-ci serait
certainement nécessaire.
En outre, la mesure représenterait un coût moyen par commune de plus de 580
000 francs.
Elle ne paraît pas répondre de façon appropriée à la réalité et à la diversité
des fonctions et des missions exercées par les conseillers municipaux.
Il serait préférable - c'est sans doute la voie que proposera le Gouvernement
prochainement - de réfléchir à des mesures qui soient véritablement
différenciées, pour mieux prendre en compte la participation effective des
conseillers municipaux à l'activité de la commune, qu'il s'agisse de la
suppléance du maire ou de l'attribution d'un certain nombre de délégations de
responsabilité. C'est en tout cas en ce sens que le Gouvernement souhaite faire
évoluer la loi.
Par ailleurs - je crois rejoindre en cela la position de la commission - le
renvoi à un financement par l'Etat soulève une objection de fond. La démocratie
locale a un coût - nous en convenons tous - et il est souhaitable que les
collectivités locales l'assument, exerçant ainsi leur pouvoir de libre
administration pour définir leurs priorités et allouer des ressources à ces
priorités. La prise en charge de dépenses de base essentielles au
fonctionnement des institutions locales doit relever de la responsabilité
première des collectivités locales et ne pas dépendre d'une aide spécifique
supplémentaire de l'Etat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9 rectifié.
M. Pierre Hérisson.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson
Je comprends parfaitement l'esprit de cet amendement, qui traduit une
préoccupation légitime.
Il m'apparaît cependant qu'il faut éviter les traitements particuliers.
Lorsque l'on a augmenté l'indemnité des maires, les adjoints, les présidents et
les vice-présidents des structures intercommunales ont eu l'impression d'être
des laissés-pour-compte. De même, toute nouvelle disposition particulière
serait, de toute manière, considérée comme injuste par ceux qui n'auraient pas
été visés.
C'est vrai, la charge de travail d'un élu d'une ville de plus de 40 000
habitants peut être comparée à celle d'un élu d'une commune de plus de 100 000
habitants. Mais nous devons revoir globalement le problème, en commençant, dans
un premier temps, par redéfinir les indemnités des membres de l'exécutif, puis,
ensuite, celles des conseillers municipaux, qui ne sont pas membres des
exécutifs. Ce serait plus logique.
Ne commettons plus l'erreur que nous avons commise pour les maires et les
adjoints, notamment. Si nous abaissons le seuil à 40 000 habitants, il faut
s'attendre à de fortes réclamations des élus des villes de 30 000, 20 000 ou 10
000 habitants, qui comptent le plus grand nombre d'élus locaux. Je rappelle que
80 % des communes de France ont moins de 2 000 habitants.
Je suis donc d'accord sur le principe énoncé dans l'amendement de M.
Karoutchi, mais j'estime que le problème est celui de l'indemnité de fonction
de l'ensemble des élus locaux et pas seulement de ceux de telle ou telle strate
de population.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Après avoir remercié M. Hérisson du travail qu'il accomplit à
l'Association des maires de France, je souhaite attirer l'attention de l'auteur
de l'amendement sur deux points qui, me semble-t-il, méritent une réflexion
complémentaire.
Est prévue dans l'amendement la suppression du troisième alinéa de l'article
L. 2123-24 du code général des collectivités territoriales, qui énonce que,
dans les communes de moins de 100 000 habitants, il peut être versé une
indemnité aux conseillers municipaux exerçant des mandats spéciaux. Si donc
l'amendement était adopté, les communes de moins de 40 000 habitants perdraient
une grande souplesse d'action.
Le problème posé est réel. Il me semble trouver sa solution dans la souplesse
qu'a permise l'adoption de l'amendement précédent, plutôt que dans la mise en
place d'une contrainte dont nous ne mesurons pas assez les conséquences.
M. Roger Karoutchi.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Karoutchi.
M. Roger Karoutchi.
Pour être tout à fait franc, j'ai déposé cet amendement plus pour ouvrir le
débat que dans l'espoir qu'il serait adopté.
M. Pierre Hérisson.
Très bien !
M. Roger Karoutchi.
Cela étant, à la faveur des explications de notre rapporteur, par ailleurs
président de l'Association des maires de France, je maintiens qu'un vrai
problème se pose.
M. Pierre Hérisson.
C'est clair !
M. Roger Karoutchi.
En effet, dans les villes dites moyennes, souvent en expansion, tous les
conseillers municipaux, et pas seulement ceux qui ont une délégation ou qui
sont chargés d'une mission particulière, ont de plus en plus de réunions,
d'obligations liées à la concertation, à la tenue de jurys, etc. Ces organismes
et instances divers, nous le savons, « mangent » de plus en plus le temps des
élus.
Cela étant dit, puisque la réflexion est engagée, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 9 rectifié est retiré.
Article 7