SEANCE DU 7 DECEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement.
Madame la ministre, je souhaite vous poser une question sur les derniers
rebondissements du feuilleton Natura 2000, une vieille histoire qui remonte à
1992.
(Ah ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
En 1998, prétextant que c'était trop tôt, vous aviez refusé que soit inscrite
à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale une proposition de loi de notre
collègue et ami Jean-François Le Grand
(Oh ! sur les mêmes travées),
adoptée par le Sénat, et qui aurait permis
la transposition de cette directive en droit français. Vous aviez déclaré que
c'était « une initiative prématurée ».
Aujourd'hui, selon vous, c'est trop tard, puisque vous avez noyé cette
directive dans un projet de loi fourre-tout
(Marques d'approbation sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants. - Et exclamations sur les travées socialistes)
autorisant le
Gouvernement à transposer par ordonnances et dans l'urgence plus de soixante
directives.
M. Paul Raoult.
Et vous, vous ne l'avez jamais fait ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Jamais !
M. Aymeri de Montesquiou.
Le 25 octobre, le Sénat avait refusé que ce texte à caractère législatif soit
examiné « à la sauvette », vous offrant ainsi la possibilité d'un véritable
débat. Or, l'Assemblée nationale l'a malheureusement réintégré, avec votre
assentiment.
M. Alain Gournac.
Hélas !
M. Aymeri de Montesquiou.
Je ne parviens pas à suivre la cohérence de votre position.
M. Jean Chérioux.
Il n'y en a pas !
M. Aymeri de Montesquiou.
Un jour, c'est trop tôt, le lendemain, c'est trop tard ! Cette directive
touche un point sensible puisqu'elle affecte le droit de propriété. Elle est de
première importance pour nos concitoyens des zones rurales, et en particulier
pour les chasseurs.
Vous vous plaignez des tensions qui existent avec eux. Vous aviez
l'opportunité d'ouvrir un dialogue et d'apaiser ces tensions, vous l'avez
refusée.
M. le président.
Mon cher collègue, veuillez poser votre question, car vous avez déjà épuisé le
temps de parole qui vous était imparti.
M. Aymeri de Montesquiou.
Madame la ministre, pouvez-vous nous expliquer votre attitude ?
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
ministre des relations avec le Parlement.
Monsieur le sénateur,
s'agissant de Natura 2000, je peux vous confirmer que l'Assemblée nationale a
adopté mardi, en première lecture, le principe d'une transposition de cette
directive par voie d'ordonnance, mais en l'assortissant d'un certain nombre de
garanties. Il y a d'ailleurs eu un débat intéressant, long et constructif, au
cours duquel des points de vues de droite et de gauche se sont rejoints sur
cette question
(Exclamations sur les travées du RPR),
débat qui a permis d'encadrer
l'habilitation législative donnée au Gouvernement en ce qui concerne Natura
2000.
Je voudrais d'abord rappeler que la proposition de loi de M. Le Grand était
incomplète
(Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR)
puisqu'elle concernait seulement les sites, et non la transposition de
l'ensemble de la directive. Depuis, Mme Voynet a constitué une commission
nationale, elle a mis en place des comités régionaux qui ont permis d'associer
toutes les parties intéressées : les défenseurs de la nature, les élus locaux,
mais aussi les associations de chasse.
Le texte reviendra devant le Sénat puisqu'une commission mixte paritaire se
réunira mardi prochain pour examiner si une convergence peut être trouvée sur
Natura 2000. En tout cas, je peux vous dire que le texte qui a été adopté par
l'Assemblée nationale ne fait pas des zones Natura 2000, comme on a voulu
parfois le dire, de véritables sanctuaires où toute activité humaine serait
prohibée, bien au contraire. En effet, il a été précisé, dans le texte du
projet de loi, que des activités humaines compatibles avec l'objectif de
classement en zone naturelle seront maintenues dans ces zones. Par ailleurs,
les conseils municipaux ou les conseils des établissements publics de
coopération intercommunale compétents, syndicats ou communautés de communes,
seront plus directement associés, puisqu'ils rendront un avis motivé sur les
décisions de classement. De plus, le préfet, qui prendra les décisions de
classement au nom de l'Etat, le fera aussi sur une base motivée.
Cette disposition sera encadrée. Il y aura des garanties suffisantes. Le Sénat
pourra donc, dans sa grande sagesse, adopter ce dispositif. Ainsi, notre pays
pourra remplir ses obligations européennes. Je rappelle que nous sommes menacés
de non-versement des fonds structurels par le commissaire européen chargé de ce
dossier. Sur ce plan, la représentation nationale doit s'efforcer de concilier
protection de la nature et maintien des activités humaines.
(Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Gérard Delfau applaudit
également.)
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