SEANCE DU 28 NOVEMBRE 2000
M. le président.
Par amendement n° I-191 rectifié
bis
, MM. Murat, Ostermann, Besse,
Braun, Cazalet, Chaumont, Joyandet, Trégouët, Fournier, Schosteck, Lanier et
Mme Olin proposent d'insérer, après l'article 26
bis
, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du 1 du III de l'article 1521 du code général des
impôts, après les mots : "locaux à usage industriel ou commercial", sont
insérés les mots : "et les bâtiments servant de dépendance aux habitations".
»
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Le mode de calcul de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pénalise
nombre de nos concitoyens installés en zone rurale puisque cette taxe porte sur
l'ensemble du foncier bâti. Par conséquent, les garages, granges et hangars qui
ne servent pas aux exploitations agricoles sont pris en compte alors qu'ils
n'occasionnent pas de déchets.
Cet amendement vise donc à permettre aux organes délibérants d'exonérer de la
taxe les dépendances des habitations.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission partage le point de vue de nos
collègues et elle s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, cet amendement me paraît
étrange dans la mesure où son adoption conduirait, dans certaines conditions, à
la suppression de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, et ce sans
prévoir de compensation. Permettez-moi de m'interroger.
Cet amendement vise à étendre aux bâtiments servant de dépendances aux
habitations l'exonération de taxe d'enlèvement des ordures ménagères, sur
délibération des conseils municipaux. Cette proposition risquerait de provoquer
des inégalités de traitement entre les redevables, car les dépendances bâties,
dont la valeur locative cadastrale est commune à celle du local d'habitation,
seraient désavantagées par rapport aux dépendances bâties ayant fait l'objet
d'une évaluation distincte.
Par ailleurs, les communes ou les EPCI qui souhaitent que les habitants
rémunèrent le service assuré peuvent instituer la redevance d'enlèvement des
ordures ménagères, cette redevance étant calculée en fonction de l'importance
du service rendu.
Le choix entre les différents modes de financement du service d'enlèvement des
ordures ménagères appartient aux élus locaux. Je vous demande donc de bien
vouloir retirer cet amendement, d'autant que j'ai quelques doutes sur sa
philosophie générale.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-191 rectifié
bis
.
M. Jean-Paul Delevoye.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delevoye.
M. Jean-Paul Delevoye.
Madame le secrétaire d'Etat, vous semblez étonnée par l'absence de
compensation. En réalité, si j'ai bien compris, il n'y a pas besoin de
compensation, puisque l'amendement tend à définir un nouveau périmètre
d'assiette à l'intérieur d'un EPCI et qu'il s'agit de procéder à un
rééquilibrage au profit de certains contribuables.
Notre collègue M. Joseph Ostermann a soulevé une question de fond, je souhaite
pourtant qu'il ne maintienne pas son amendement.
Je vous demande en revanche, madame le secrétaire d'Etat, de prendre
l'engagement de mettre en chantier la modification de la loi Chevènement sur
l'obligation faite aux EPCI de se doter d'un système de perception qui coïncide
avec le périmètre de l'établissement public, le périmètre de la collecte et le
périmètre du traitement. Ce système de perception est quasiment impossible à
mettre en oeuvre.
Nous avons un grand chantier en perspective. Au-delà de la nécessaire
amélioration de la loi Chevènement, il nous faudra réfléchir aux modalités de
paiement des services de traitement et de collecte des ordures ménagères et à
la perception des impôts dans des cadres intercommunaux.
(« Très bien ! »
sur les travées du RPR.)
M. Gérard Miquel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel.
Je ne souhaite pas voter cet amendement en l'état, mais je reconnais qu'il
nous permet de débattre d'un sujet particulièrement préoccupant.
Le mode de calcul de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères est totalement
inadapté et constitue une entrave à l'intercommunalité.
Les bases de calcul sont très différentes selon que nous avons affaire à une
commune - centre ou aux communes de la périphérie, les différences allant de un
à trois.
L'enlèvement des ordures ménagères, nous ne le facturons pas au juste prix,
nous le facturons selon le système que je viens de décrire. C'était concevable
quand les tarifs étaient relativement bas, mais aujourd'hui le coût du
traitement et de la collecte des ordures ménagères a considérablement
augmenté.
Comme le rappelait M. Delevoye, il y a une autre difficulté : la prise en
compte, dans le calcul du coefficient d'intégration fiscale, du montant prélevé
au travers de la taxe sur les ordures ménagères quand se chevauchent plusieurs
structures intercommunales, quand des syndicats de collectes des ordures
ménagères regroupent plusieurs structures intercommunales.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
L'amendement de notre collègue M. Ostermann soulève un vrai problème de
fond.
Puisque l'assiette de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères correspond
exactement à l'assiette de la taxe foncière, tout contribuable qui paie la taxe
foncière doit payer une taxe d'ordures ménagères calquée sur la taxe foncière
alors que, pour une dépendance d'une habitation principale, il n'y a pas
nécessairement d'ordures ménagères.
Dans le même temps, il faut le savoir, la masse fiscale prélevée par la
structure, en général intercommunale, est répartie en fonction de décotes.
Si les propriétaires de garages et autres dépendances ne paient pas, cela se
répercutera inéluctablement sur d'autres contribuables. C'est un véritable
problème de fond.
Ce que M. Miquel a dit est parfaitement exact : autrefois, le coût du
traitement des ordures ménagères était relativement modeste, parce que
n'existaient pas toutes les normes imposées aujourd'hui, quant au traitement
des déchets, au traitement des résidus et des résidus des résidus. Ce n'est
plus le cas aujourd'hui, ce qui soulève bien des difficultés.
Mes chers collègues, si l'on accédait à la proposition de M. Ostermann, j'ai
le sentiment que l'on mettrait encore plus le « bazar » dans un système qui est
déjà très complexe.
Madame le secrétaire d'Etat, ce dossier mérite une étude très approfondie, car
il faut absolument revoir le système de coût et de mode de facturation du
traitement des ordures ménagères qui, sans cela, risque d'exploser. Nous ne
pourrions plus alors remplir nos obligations, qui sont fortes, pour préserver
l'environnement !
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Ce débat est très éclairant sur le problème des ordures ménagères. Qui doit
payer : le contribuable ou l'usager ?
Jusqu'ici, par le biais surtout de la redevance, mais également de la taxe,
notamment lorsqu'on exonère les locaux qui ne produisent pas de déchets, nous
avons privilégié le paiement par l'usager. Mais je me demande si nous
n'arrivons pas au bout d'un certain système, dans la mesure où les
infrastructures concernant la collecte des ordures ménagères et leur
élimination deviennent de plus en plus importantes, en raison du système de tri
sélectif, notamment.
Pour ma part, je me suis toujours efforcé, dans ma commune, de refuser les
exonérations, parce qu'elles entraînent, bien évidemment, un transfert vers les
particuliers, et j'ai toujours estimé qu'en définitive il fallait considérer
cette taxe sur les ordures ménagères comme un impôt sur l'environnement, d'une
façon générale.
Cela m'amène à dire, rebondissant sur les propos de M. Jean-Paul Delevoye,
qu'il va falloir s'attaquer au fond du problème, en particulier tenir compte de
l'intercommunalité dans la gestion de la collecte et de l'élimination des
ordures ménagères, les systèmes actuels n'étant pas entièrement
satisfaisants.
J'ai retiré un amendement que j'avais déposé et qui traitait de ce problème
très précis de l'articulation entre les communautés de communes et les
syndicats mixtes concernant les ordures ménagères pour le redéposer, peut-être
mieux formulé, à l'occasion de la discussion des articles de la deuxième
partie, car il faudra bien étudier ce problème.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je rappelle que l'amendement dont il s'agit est de
portée plus modeste, puisqu'il vise à permettre aux conseils municipaux
d'accorder, s'ils le souhaitent, une exonération, la contrepartie nécessaire
étant, bien entendu, le report de la charge sur le contribuable. Il s'agit donc
ni plus ni moins que d'ouvrir une marge de liberté aux conseils municipaux.
Mais cette souplesse, dont les communes peuvent faire preuve si elles le
désirent, ne préjuge en rien une éventuelle réforme des modalités de perception
de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-191 rectifié
bis
repoussé par le
Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 26
bis.
Article 26 ter