SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2000


M. le président. La parole est à M. Poirier, auteur de la question n° 918, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Marie Poirier. J'ai en effet souhaité attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur certaines difficultés apparues à l'occasion de la conclusion des conventions de coordination policière entre l'Etat et les communes telles qu'elles sont prévues par la loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales.
Le cadre de ces conventions a été précisé par un décret du 24 mars 2000 déterminant les clauses de la convention type.
Dans la circulaire du 16 avril 1999 relative à l'application de la loi, l'attention des préfets des départements est appelée sur la nécessité de faire prévaloir le caractère concret et pratique des conventions de coordination conclues. Il est recommandé de s'adapter tant à la situation initiale qu'à l'évolution des circonstances locales.
L'expérience m'a conduit à constater que, dans certains cas, l'interprétation trop rigide qui est faite de la loi en arrive à imposer une quasi-conformité de la convention de coordination conclue aux stipulations du décret du 24 mars 2000.
Ainsi, j'ai moi-même rencontré un certain nombre de difficultés en tant que maire d'une ville de 25 000 habitants, Sucy-en-Brie, une des premières communes du Val-de-Marne à avoir signé un contrat local de sécurité avec l'Etat, en 1998.
Récemment, alors que nous étions sur le point de conclure la convention de coordination policière, le préfet a refusé l'insertion de deux alinéas de précision à la convention type définie par le décret. Ces aménagements avaient pourtant pour seul but d'améliorer l'information réciproque entre les services municipaux et les services de l'Etat.
Le premier aménagement prévoyait une information périodique du maire par le commissaire de police nationale en ce qui concerne l'activité du commissariat sur le territoire communal et l'évolution des actes de délinquance.
Le second aménagement prévoyait d'étendre les mécanismes d'échange rapide et réciproque d'informations aux événements particulièrement importants, alors que la convention type ne mentionne que le cas des personnes signalées disparues et celui des véhicules volés.
La circulaire du 16 avril 1999 précise pourtant que « le législateur n'a pas entendu imposer un rapport de conformité des conventions conclues au niveau local avec les clauses de la convention type ».
On peut, dès lors, s'interroger sur la marge de manoeuvre laissée à la procédure conventionnelle dans un cas comme celui que je viens d'évoquer.
Je suis, pour ma part, convaincu que la coordination entre services de police et, au-delà, entre tous les acteurs de la prévention urbaine, dans le cadre des contrats locaux de sécurité notamment, est certainement le fondement et la condition de l'efficacité des nouvelles approches que les maires et les représentants de l'Etat essaient de mettre en place en matière de lutte contre l'insécurité dans nos villes.
A quoi sert-il de prévoir une convention aménageable en fonction des circonstances locales s'il n'est pas possible d'y ajouter des clauses qui reflètent les besoins locaux et consacrent les méthodes expérimentées avec succès sur le terrain, en marge des textes parfois, depuis de nombreuses années ?
Je souhaite donc savoir comment M. le ministre de l'intérieur conçoit la négociation des conventions de coordination policière entre l'Etat et les communes. A-t-il donné de nouvelles instructions aux préfets ? Dans quels domaines identifiés peut-on apporter des aménagements locaux à la convention type ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, vous interrogez mon collègue ministre de l'intérieur sur les adaptations qui peuvent être introduites dans la convention de coordination à signer entre le maire et le préfet par rapport à la convention type annexée au décret n° 2000-275 du 24 mars 2000, pris pour l'application de la loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales.
La convention de coordination avec la police ou la gendarmerie nationales fait état des missions effectivement remplies par la police municipale concernée. L'amplitude des missions des agents de police municipale variera donc d'une commune à l'autre suivant les effectifs du service de police municipal, le parc des bâtiments communaux à garder, le nombre d'établissements scolaires et de marchés à surveiller, l'existence ou non d'une brigade de nuit au sein de la police municipale. Ces particularités locales apparaîtront dans la convention de coordination.
Les échanges d'informations à prévoir dans la convention de coordination vous préoccupent particulièrement. Cette question est traitée dans les articles 1er à 5 de la convention type. Les conditions dans lesquelles les réunions se tiennent entre les deux chefs de service ainsi que les modalités de liaison entre les deux services de police peuvent donner lieu à des adaptions à la convenance des parties signataires. En tout état de cause, la convention de coordination doit rester un document à vocation opérationnelle.
Quant aux faits de délinquance commis dans la commune, il est légitime que le maire en soit tenu informé - et la préoccupation que vous avez exprimée est tout à fait partagée - en sa qualité d'autorité titulaire du pouvoir de police générale. Ces informations lui sont transmises par le canal des services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, indépendamment de la signature de la convention de coordination.
En ce qui concerne la délinquance dans le département du Val-de-Marne, le directeur départemental de la sécurité publique transmet à chacun des maires, chaque mois, un état détaillé de la délinquance constatée dans sa commune par les services de la police nationale. La signature des conventions de coordination, notamment celles de Sucy-en-Brie, ne remet pas en cause cette diffusion. Elle ne fait pas davantage obstacle au maintien des entretiens qui ont lieu ponctuellement entre le maire et le chef de la circonscription de police ou le directeur de cabinet du préfet, chaque fois qu'un fait d'ordre public survient dans la commune et justifie des rencontres.
D'une certaine manière, monsieur le sénateur, faire un ajout à la convention type pourrait donner à penser que les dispositions en question ne s'appliquent pas sur le territoire des communes dont la convention n'aurait pas fait l'objet de cet ajout. Or, ces conventions sont d'application générale : il ne faudrait pas donner à penser qu'il peut y avoir remise en cause de pratiques qui sont en vigueur sur l'ensemble du territoire national.
M. Jean-Marie Poirier. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Poirier.
M. Jean-Marie Poirier. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de ces précisions, qui me donnent globalement satisfaction, même si elles me paraissent quelque peu lénifiantes au regard de la situation réelle.
Je pense que l'ensemble des maires souhaitent une coopération entre police nationale et police municipale aussi étroite que possible. Or on constate à l'heure actuelle que, malgré toute la bonne volonté qui peut se manifester de tous côtés, il est extrêmement difficile d'établir une communication permanente entre l'une et l'autre.
Cette coopération, telle qu'elle est définie par la convention type, n'est qu'une coopération de principe : est certes évoquée la possibilité de rencontres régulières, mais rien n'est prévu pour institutionnaliser des rencontres quotidiennes, notamment dans les communes des banlieues confrontées aux difficultés que chacun sait, et à la montée de la délinquance et de la petite délinquance. Or une telle liaison quotidienne permettrait de maintenir une veille permanente, répondant, tout simplement, à un souci d'efficacité.
Nous ne sommes pas fondamentalement en contradiction, mais il eût été préférable que quelques dispositions clairement formulées insistent sur la nécessité d'une symbiose permanente d'action, bien entendu dans le respect de l'indépendance respective du pouvoir municipal et du pouvoir de l'Etat.
Il y va, encore une fois, de l'efficacité, à l'heure où, en matière de sécurité, la situation est bien loin de s'améliorer dans nos banlieues, comme les statistiques le font apparaître, hélas ! tous les jours que Dieu fait.

PETITE DÉLINQUANCE À VINCENNES ET SAINT-MANDÉ