SEANCE DU 5 OCTOBRE 2000
M. le président.
« Art. 2. - Les diagnostics et opérations de fouille d'archéologie préventive
sont confiés à un établissement public national à caractère administratif.
« Celui-ci les exécute conformément aux décisions et aux prescriptions
imposées par l'Etat et sous la surveillance de ses représentants, en
application des dispositions de la loi du 27 septembre 1941 portant
réglementation des fouilles archéologiques et de la présente loi. Pour
l'exécution de sa mission, l'établissement public associe les services
archéologiques des collectivités territoriales et des autres personnes morales
de droit public ; il peut faire appel, par voie de convention, à d'autres
personnes morales, françaises ou étrangères, dotées de services de recherche
archéologique.
« L'établissement public assure dans les mêmes conditions l'exploitation
scientifique de ses activités et la diffusion de leurs résultats, notamment
dans le cadre de conventions de coopération conclues avec les établissements
publics de recherche ou d'enseignement supérieur. Il concourt à l'enseignement,
à la diffusion culturelle et à la valorisation de l'archéologie.
« L'établissement public est administré par un conseil d'administration et
dirigé par le président du conseil d'administration nommé par décret.
« Le conseil d'administration comprend, outre son président, des représentants
de l'Etat, des personnalités qualifiées, des représentants des organismes et
établissements publics de recherche et d'enseignement supérieur dans le domaine
de la recherche archéologique, des représentants des collectivités
territoriales et des personnes publiques et privées concernées par
l'archéologie préventive, ainsi que des représentants élus du personnel. Les
attributions et le mode de fonctionnement de l'établissement public ainsi que
la composition de son conseil d'administration sont précisés par décret.
« Le conseil d'administration est assisté par un conseil scientifique.
« Les emplois permanents de l'établissement public sont pourvus par des agents
contractuels. Le statut des personnels de l'établissement public est régi par
le décret en Conseil d'Etat pris en application de l'article 7 de la loi n°
84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique de l'Etat et par un décret particulier. Les biens, droits et
obligations de l'association dénommée "Association pour les fouilles
archéologiques nationales" sont dévolus à l'établissement public dans des
conditions fixées par décret. »
Sur cet article, je suis d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire
l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 6, présenté par M. Legendre, au nom de la commission, a pour
objet de remplacer les deux premiers alinéas de cet article par un alinéa ainsi
rédigé :
« Il est créé un établissement public national à caractère industriel et
commercial, chargé de la recherche en archéologie préventive. Cet établissement
exécute des sondages, diagnostics et opérations de fouilles archéologiques
conformément aux décisions et aux prescriptions imposées par l'Etat et sous la
surveillance de ses services en application de la loi du 27 septembre 1941
portant réglementation des fouilles archéologiques et de la présente loi. Pour
l'exécution de sa mission, il peut s'associer par voie de convention à d'autres
personnes morales dotées de services de recherche archéologique. »
L'amendement n° 24 rectifié, proposé par le Gouvernement, vise, dans la
dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 2, à remplacer les mots : « ;
il peut faire appel » par les dispositions suivantes : « . Lorsqu'une
collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales est
maître d'ouvrage de travaux entrant dans le champ d'application de la présente
loi et que cette collectivité ou ce groupement est doté d'un service
archéologique agréé par l'Etat dans des conditions définies par décret en
Conseil d'Etat, l'établissement public doit faire appel à ce service.
L'établissement public peut en outre faire appel. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Jacques Legendre,
rapporteur.
Nous sommes bien là au coeur du débat. Cet amendement vise à
rétablir le texte adopté par le Sénat en supprimant les droits exclusifs
reconnus à l'établissement public et en substituant au statut d'établissement
public à caractère administratif un statut d'établissement public à caractère
industriel et commercial.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour défendre l'amendement n° 24
rectifié.
M. Michel Duffour,
secrétaire d'Etat.
J'en viens aux enrichissements du texte tels que nous
les concevons.
Notre amendement vise à donner une place plus importante aux collectivités
territoriales dans le dispositif. Cependant, pour atteindre cet objectif, il
n'est pas nécessaire de supprimer les droits exclusifs de l'établissement
public ou de l'ériger en établissement public à caractère industriel et
commercial, ce que propose la commission.
Il suffit de prévoir - ce à quoi tend l'amendement du Gouvernement - que
l'établissement public fera obligatoirement appel aux services d'archéologie
des collectivités territoriales, ou de leurs groupements, agréés par l'Etat
pour les travaux que ces collectivités conduisent elles-mêmes.
Cette avancée, si vous nous suivez, monsieur le rapporteur, est importante. En
effet, elle permet aux collectivités territoriales qui le souhaitent de
pouvoir, d'une part, être associées à certaines opérations de fouilles liées
aux chantiers de travaux conduits par des tiers, ce que prévoyait déjà le texte
de l'Assemblée nationale, et, d'autre part, conduire elles-mêmes les fouilles
liées à leurs propres travaux, ce que prévoit le présent amendement. Voilà qui
constitue, loin de toute idéologie, une avancée pragmatique essentielle. Je
souhaite, bien sûr, que cet amendement ne devienne pas sans objet du fait même
de l'adoption de l'amendement n° 6.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 24 rectifié ?
M. Jacques Legendre,
rapporteur.
Je n'étonnerai pas M. le secrétaire d'Etat, dans la mesure où
il y a fait allusion, en lui disant qu'il existe quelques contradictions entre
l'amendement n° 6 et l'amendement n° 24 rectifié. Je suis également surpris,
monsieur le secrétaire d'Etat, par la comparaison entre l'amendement n° 5 de la
commission, dont vous aviez demandé le rejet voilà quelques instants, et
l'amendement n° 24 rectifié que vous avez déposé.
Tout à l'heure, vous vous êtes opposé à l'amendement n° 5 aux termes duquel «
lorsqu'une collectivité territoriale dispose d'un service archéologique, ce
service participe de plein droit, si elle en fait la demande, aux opérations
archéologiques réalisées sur son territoire ». Un droit était reconnu aux
services archéologiques des collectivités territoriales et la liberté desdites
collectivités était respectées puisqu'elles pouvaient décider d'engager ou non
leur service archéologique.
Maintenant, vous nous expliquez que lorsqu'une collectivité territoriale, ou
un groupement de collectivtés, est maître d'ouvrage, l'établissement public
doit faire appel à ce service. On pourrait déjà faire remarquer que
l'expression « doit faire appel » est impérative. On ne se préoccupe plus de
savoir si la collectivité le désire, on décrète que c'est une obligation.
Bien que nos points de vue soient assez proches, une différence notable
existe. En effet, selon notre dispositif, le service archéologique de la
collectivité territoriale peut être l'élément moteur, faisant appel,
éventuellement, à un établissement public que vous entendez créer. En revanche,
aux termes de votre dispositif, le monopople est toujours l'élément essentiel
et il doit simplement, à titre auxiliaire, se tourner vers le service
archéologique de la collectivité territoriale.
Sur le fond, vous ne répondez donc pas à la demande du Sénat selon laquelle
quand les collectivités territoriales le souhaitent et lorsqu'elles ont fait
l'effort de créer un service archéologique sur leur territoire, celui-ci
peut-être considéré comme intervenant à titre principal dans les fouilles
archéologiques.
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 24
rectifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 6 ?
M. Michel Duffour,
secrétaire d'Etat.
Je vais poursuivre très brièvement la joute oratoire
qui m'oppose à M. le rapporteur revenant, après lui, sur l'amendement n° 5 :
monsieur Legendre, il n'y avait aucune contradiction dans mes propos, puisque
cette question est liée à celle des droits exclusifs. Le dispositif que vous
proposez ne pourrait se faire qu'au détriment du service public national créé
et de son équilibre financier. L'établissement public lui-même serait
disqualifié, ce qui n'est pas tout à fait la même démarche que celle que j'ai
présentée au travers de l'amendement n° 24 rectifié.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 6,
regrettant par avance le sort qui va sans doute être réservé à l'amendement n°
24 rectifié...
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 24 rectifié n'a plus d'objet.
Par amendement n° 32, MM. Renar, Ralite, Mme Luc et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le quatrième
alinéa de cet article :
« L'établissement public est administré par un conseil d'administration. Le
président du conseil d'administration est nommé par décret. »
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar.
L'amendement que nous proposons au Sénat d'adopter vise à aménager au mieux
des intérêts de l'archéologie l'organisation du futur conseil d'administration
de l'établissement public.
Dans sa rédaction actuelle et compte tenu de la diversité des acteurs appelés
à participer au conseil d'administration de l'établissement, nous proposons de
transférer, en le disant clairement, au pouvoir réglementaire la question de
l'exacte répartition des compétences au sein de ce conseil. Ainsi que je l'ai
précédemment indiqué, nous entendons en particulier opérer une clarification
entre la responsabilité du président et celle du directeur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Legendre,
rapporteur.
Cet amendement est de nature à permettre plus de souplesse
dans l'organisation interne de l'établissement. Par conséquent, la commission
émet un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Michel Duffour,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. Ivan Renar.
Ma joie est complète ! C'est tellement rare !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
Par amendement n° 7, M. Legendre, au nom de la commission, propose de
supprimer les deux premières phrases du dernier alinéa de l'article 2.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Legendre,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Michel Duffour,
secrétaire d'Etat.
Défavorable, par coordination.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 2 bis