Séance du 27 juin 2000
M. le président. La parole est à Mme Borvo, auteur de la question n° 761, adressée à Mme le ministre de la culture et de la communication.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais attirer votre attention sur le devenir de la Maison des métallurgistes, située à Paris, dans le XIe arrondissement.
La Maison des métallurgistes est, depuis 1937, le siège de l'union fraternelle des métallurgistes CGT. Au-delà de cette propriété, ce lieu est chargé de mémoire ouvrière avec le souvenir vivace de Jean-Pierre Timbaud, de Suzanne Masson, d'Ambroise Croizat et de tant d'autres. Il y fut organisé la solidarité envers les républicains espagnols, puis les peuples vietnamien, algérien, palestinien, chilien et haïtien. Nous sommes attachés à ce lieu.
Depuis plusieurs années, l'union fraternelle des métallurgistes sollicite la mairie de Paris pour que la ville lui achète ce bâtiment de 4 000 mètres carrés - que, hélas ! elle ne peut conserver - pour le transformer en équipement culturel et social. Après avoir refusé pendant des années et jusqu'à une période très récente de s'y intéresser, la mairie de Paris a signé, en juin 1999, une promesse de vente avec un promoteur privé qui veut transformer ce lieu en projet immobilier.
Cette éventualité a été le point de départ d'une forte mobilisation du quartier et du mouvement associatif regroupé en comité pour une « maison des savoirs et des cultures » de l'Est parisien dans la maison des « métallos ».
Un projet sérieux a été élaboré par le mouvement associatif - il a pour ambition d'articuler les volets culturel, social, urbain, partenarial et patrimonial - qui souhaite l'intervention croisée de la mairie de Paris, de la région et de l'Etat.
Je constate que la mobilisation des habitants et des associations n'est pas sans résultat. Ainsi, l'inscription partielle à l'inventaire des monuments historiques a été décidée en février dernier, ce qui rendra impossible, semble-t-il, l'exécution du projet initial. La mairie elle-même, après avoir opposé un refus obstiné pendant des années à la perspective de préempter ce lieu, est obligée d'envisager de revoir sa position, si mes informations sont exactes.
Il faut dire que les habitants du quartier et, plus largement, tous ceux qui sont attachés à ce lieu de mémoire attendent des actes rapides et concrets.
Le conseil régional serait prêt à financer une partie du coût de l'acquisition. L'Etat s'est engagé, au niveau de la préfecture de région, à allouer à ce projet des fonds issus de la politique de la ville.
Mais il est fondamental que les associations soient partie prenante de la définition et de la mise en oeuvre du projet. Il me semble ainsi indispensable que, rapidement, avant les échéances municipales, une table ronde associant les financiers potentiels - ville, région, Etat - et les associations se réunisse pour lancer une étude de préfiguration des équipements à réaliser.
Par ailleurs - c'est la raison pour laquelle je m'adresse à vous - un engagement de votre ministère à participer au financement de cet équipement permettrait, j'en suis sûre, de faire avancer le dossier. Aussi, je vous demande de bien vouloir m'indiquer ce que vous entendez faire pour faire avancer les choses.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle. Madame la sénatrice, votre question me semble d'autant plus intéressante qu'elle porte sur un aspect de la politique que Catherine Tasca et moi-même nous attachons à promouvoir : la prévention d'un patrimoine industriel et ouvrier dont les vestiges sont malheureusement trop rares, notamment à Paris.
L'immeuble du 94, rue Jean-Pierre-Timbaud a été élevé en 1881-1882 en vue d'abriter les ateliers et les magasins de la fabrique d'instruments de musique Gautrot-Couesnon ainsi que des habitations. Les lieux, comme vous l'avez dit, furent achetés, en 1936, par la société La Maison du métallurgiste, émanation du syndicat CGT de la métallurgie du département de la Seine.
Je sais que plusieurs élus et des associations de sauvegarde se sont émus de la signature d'une promesse de vente, au profit d'un promoteur privé, de cet ensemble lié à la mémoire ouvrière et syndicale.
Certes, le ministère de la culture ne peut s'opposer au changement de propriété ni au changement d'affectation du bâtiment, mais il a engagé en revanche une procédure de protection au titre des monuments historiques.
La commission régionale du patrimoine et des sites d'Ile-de-France a examiné le dossier lors de sa séance du 7 décembre 1999. Suivant l'avis émis par la commission, la façade sur rue et la toiture correspondante du bâtiment sur rue, ainsi que la façade sur cour et la toiture correspondante du bâtiment commercial et administratif en fond de cour, ont été inscrites sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques par arrêté du préfet de région en date du 18 février 2000. En revanche, la grande halle, en mauvais état et trop transformée, n'a pas été retenue pour une protection.
Tout projet de travaux envisagé par l'acheteur devra donc prendre en considération la conservation et la restauration des éléments de l'ensemble immobilier ainsi inscrits.
J'en suis pour ma part très heureux. Nous avons ainsi permis que soit préservé ce haut lieu de la mémoire industrielle et ouvrière. Au-delà, s'agissant de la transformation du bâtiment en un équipement de proximité - ce qui constituait tout une partie de votre question - sachez, madame la sénatrice, que le ministère de la culture et de la communication reste bien évidemment à l'écoute des projets qui lui seront soumis, pour autant que des partenariats dynamiques se rassemblent autour d'objectifs communs et de financements réalistes.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat. Votre réponse montre que vous êtes attaché à ce lieu et à ce qu'il représente ; son architecture, typique de l'âge industriel, est le symbole des mémoires ouvrières, syndicales et populaires de ce quartier de Paris.
Je suis sensible à ce que vous m'avez dit de la préservation d'une partie du lieu. Il est en effet évident que le bâtiment doit être sauvé. Les milliers de signatures en faveur de cette solution ainsi que la très forte mobilisation des élus de gauche, dont, bien sûr, les communistes, rendront plus difficile à la mairie de Paris de ne pas faire valoir son droit de préemption sur ce lieu.
Au-delà - puisque vous avez ouvert une petite porte - j'insiste pour que vous-même et votre ministère encouragiez et souteniez ce partenariat qui permettrait non seulement de préserver une partie de l'architecture, ce qui est déjà très intéressant, mais aussi de faire vivre un lieu culturel et social pour les Parisiens.
Les équipements culturels ne sont pas légion dans le quartier et l'aménagement de ce lieu serait le bienvenu.
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