Séance du 22 février 2000







M. le président. La parole est à M. Delfau, auteur de la question n° 708, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur la situation préoccupante des communes incluses contre leur gré dans le périmètre préfectoral d'une communauté d'agglomération.
Parmi elles, je distinguerai les communes jusque-là isolées que la démarche du préfet conduit à insérer dans la future communauté d'agglomération. Dans ce cas, la proposition du représentant de l'Etat me semble conforme à la volonté du Parlement qui, depuis 1982, notamment en 1992 et en 1999, n'a cessé d'inciter les collectivités locales à la coopération intercommunale.
Plus litigieux, en revanche, me semble être le cas des communes appartenant à un établissement public de coopération intercommunale ancien, doté de compétences étendues et que le découpage préfectoral, dans sa première version, tente d'inclure dans le périmètre de la communauté d'agglomération contre la volonté clairement exprimée des conseils municipaux, voire de la population consultée, par le biais d'un référendum d'initiative locale.
N'y a-t-il pas là une entorse grave à l'esprit des lois Defferre selon lesquelles la coopération intercommunale ne peut être contrainte ? Le volontariat est la règle en ce domaine.
Plus précisément, l'article 41 de la loi du 12 juillet 1999 prévoit qu'un établissement à fiscalité propre en voie d'extension, en l'occurrence la future communauté d'agglomération, ne peut inclure « sans leur accord, les communes membres d'une communauté de communes dont l'égibilité à la DGF bonifiée a été constatée dans les conditions fixées par le code des communes ».
Que penser, dès lors, du cas dans lequel le représentant de l'Etat ne tiendrait pas compte de cette volonté expresse du conseil syndical d'une communauté de communes antérieure à la loi du 12 juillet 1999 et refuserait son agrément à leur demande de se doter de la TPU à partir d'un dossier pourtant complet et valide ?
Monsieur le ministre, je me permets de vous poser deux questions. A quoi sert dans ce cas l'article 41 précité de la loi du 12 juillet 1999 ? Si, par hypothèse, l'autorité préfectorale passait outre, ne pourrait-on y voir une violation de l'esprit de la loi du 12 juillet 1999, tout particulièrement de son article 41 ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je suis sensible aux problèmes qui sont posés pour la constitution d'une communauté d'agglomération montpelliéraine.
La loi du 12 juillet 1999 a connu à ce jour un très grand succès. J'en veux pour preuve le fait que 51 communautés d'agglomération se sont constituées, que deux communautés urbaines ont choisi le régime de la taxe professionnelle unique et qu'au 1er janvier de cette année 136 communautés de communes à taxe professionnelle unique s'étaient également constituées.
On peut donc dire que le succès de cette loi a ratifié la conception à laquelle le Sénat a pris toute sa part. Je rappelle que c'est en effet après une commission mixte paritaire que cette loi a été adoptée.
Le problème est naturellement qu'il faut définir des périmètres pertinents. Pour cela, la loi a prévu une double initiative : celle des élus et celle des préfets. En l'occurrence, un élu, le maire de Montpellier, a fait une proposition. Le préfet doit maintenant consulter la commission départementale de la coopération intercommunale. Je rappelle enfin que, en dernier ressort, ce sont les élus qui ont le dernier mot, selon des règles de majorité qualifiée qui remontent à plus de trente ans : ce n'est pas moi qui les ai inventées !
La loi prévoit des mécanismes qui interdisent d'intégrer contre leur gré des communes déjà impliquées dans des organismes de coopération intercommunale qui ont d'ores et déjà choisi la taxe professionnelle unique. Néanmoins, le simple bon sens conduit à ne pas oeuvrer contre les élus du suffrage universel lorsque ceux-ci ont des arguments légitimes à produire.
En définitive, nous sommes là au niveau de la définition de l'intérêt général, dont le préfet se doit d'être le garant. Il doit conduire l'analyse, en concertation avec les élus locaux, en veillant au respect de la volonté du législateur et à la mise en place de structures intercommunales pertinentes au regard des nécessités économiques et sociales ainsi que des perspectives de l'agglomération montpelliéraine.
Comme vous le savez, il s'agit de préparer celle-ci à recevoir une population croissante. Je crois en effet savoir que Montpellier est la ville qui, en France, se développe le plus vite. Cette population sera amenée à résider à l'extérieur de Montpellier, qui continuera à offrir les services d'une grande ville centre.
Si l'on veut éviter la constitution d'une grande conurbation à l'américaine, dévoreuse d'espace et propice à la constitution de ghettos voisinant avec des espaces largement privatisés et protégés, il faut que les élus aient la volonté de bâtir en commun un projet d'intérêt général, à la hauteur des enjeux.
Je crois savoir que le préfet a arrêté un périmètre, qui est actuellement soumis à l'avis des élus et de la commission départementale de coopération intercommunale. Les communes qui sont réticentes pourront faire valoir leur point de vue au sein de cette commission, avant que les majorités qualifiées prévues par la loi puissent se dégager.
Je fais appel au bon sens de l'ensemble des élus pour dépasser les intérêts particuliers et pour s'entendre sur un projet d'intérêt commun, ce qui ne doit pas être impossible. Il faut évidemment respecter toutes sortes de considérations, dont certaines sont plus valables que d'autres.
Il appartient aux élus de trouver le bon chemin et au préfet d'y veiller en tant que gardien de l'intérêt général. Le problème est rendu difficile par des paramètres qui échappent à la géographie territoriale, qui tiennent à une histoire complexe qu'il vous appartient de faire progresser néanmoins en trouvant en vous-mêmes les ressources d'aller au devant de cet intérêt général qui doit s'imposer, à Montpellier comme ailleurs.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, j'ai beaucoup admiré l'équilibre de votre réponse. Dans le même temps, j'ai constaté, ce qui ne m'a pas surpris, votre parfaite connaissance des conséquences au plan local d'un texte de loi général.
Au fond, vous dites qu'il faut à la fois respecter le voeu des élus et aboutir à la meilleure formule possible pour l'intérêt général. A partir de là, vous lancez une sorte d'appel pour que le bon sens prévale. C'est parfois difficile - vous l'avez vous même sous-entendu - quand les contextes locaux ne s'y prêtent pas.
Sur un point très précis, vous dites - et je sais que c'est l'un des arguments majeurs non seulement pour le sud de la France, mais en général - qu'il faut éviter la mise en place de conurbations à l'américaine. Je remarque que c'est très exactement ce qu'est en train de mettre délibérément en place le maire de Montpellier avec un projet comme l'Odysseum. Par essaimage, morceau après morceau, la ville s'étend sans lui conserver l'unité et la cohérence nécessaires. C'est évidemment une opinion personnelle, mais elle est largement partagée.
Mais revenons au sujet général qui a justifié le dépôt de ma question. Au fond, si litige il devait y avoir, il reposerait sur le calendrier fixé unilatéralement par le préfet entre la réception d'une demande de transformation d'une communauté de communes soucieuse de se doter d'une taxe professionnelle unique en communauté d'agglomération et la fixation par ce même préfet du patrimoine de la future communauté d'agglomération.
Dans un certain nombre de cas, monsieur le ministre, permettez-moi de le dire en utilisant une formule familière, le sentiment prévaut que le représentant de l'Etat « joue la montre » et tend ainsi à contraindre des communes à intégrer le nouvel établissement public de coopération intercommunale, en l'occurrence une communauté d'agglomération.
Sur le fond, indépendamment des considérations locales, je me demande si cela est conforme à l'esprit de la loi du 12 juillet 1999, notamment à son article 41 et si vous y avez d'ailleurs largement fait allusion, c'est la meilleure façon d'assurer la qualité de fonctionnement de la structure intercommunale en voie de création.

RECRUTEMENT DES ENSEIGNANTS VACATAIRES
DES COLLÈGES SITUÉS EN ZONE RURALE