Séance du 21 décembre 1999
DOTATIONS DE L'ÉTAT
AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
Adoption des conclusions modifiées
d'une commission mixte paritaire
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 130,
1999-2000) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur
les dispositions restant en discussion du projet de loi modifiant le code
général des collectivités territoriales et relatif à la prise en compte du
recensement général de population de 1999 pour la répartition des dotations de
l'Etat aux collectivités locales.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Mercier,
rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Monsieur le
président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la commission
mixte paritaire qui s'est réunie sur le projet de loi modifiant le code général
des collectivités territoriales et relatif à la prise en compte des
conséquences du recensement général de la population sur la dotation globale de
fonctionnement, la DGF, a abouti à un accord entre l'Assemblée nationale et le
Sénat. Je voudrais en rappeler brièvement les termes.
Compte tenu de l'échec prévisible de la commission mixte paritaire sur le
projet de loi de finances pour 2000, la commission mixte paritaire a souhaité
retenir le délai de trois ans pour la prise en compte des conséquences du
recensement pour la DGF et pour les divers concours que l'Etat accorde aux
collectivités locales.
Toutefois, la commission mixte paritaire a retenu un amendement du Sénat, qui
avait été déposé sur l'initiative de notre collègue Paul Girod et qui visait à
une prise en compte proportionnelle et non plus brutale de la baisse de la
population. Auparavant, une commune se voyait en quelque sorte infliger la même
sanction qu'elle perde un habitant ou qu'elle en perde 10 000. Grâce à cet
amendement, les conséquences de la prise en compte de l'évolution de la
population connaîtront une certaine proportionnalité.
C'est bien entendu surtout la seconde partie de ce texte qui avait retenu
l'attention du Sénat au cours de la discussion. Sur cette seconde partie, un
accord général s'est fait sur les positions arrêtées par le Sénat. C'est donc
notre texte qui a été retenu par le Gouvernement, par la commission mixte
paritaire et par l'Assemblée nationale. Aussi, nous vous recommandons, mes
chers collègues, d'adopter les conclusions de la commission mixte paritaire. Un
amendement est présenté par le Gouvernement. Il s'agit d'un simple amendement
de correction, sur lequel nous ne pouvons qu'émettre un avis favorable.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, je vous remercie d'avoir souligné l'excellent travail
réalisé - cela ne surprendra personne - par le Sénat, ce que confirmera sans
doute dans un instant M. le secrétaire d'Etat.
Je lui donne la parole.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, le Gouvernement souhaite, lui aussi, que la Haute
Assemblée adopte le projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré
par la commission mixte paritaire. Je veux saluer l'excellent travail qui a été
conduit par les deux assemblées, afin de lisser les effets du recensement. Le
texte est équilibré entre la stabilité des ressources, la nécessité de la
péréquation et la capacité de l'Etat à soutenir financièrement les
collectivités locales.
La commission mixte paritaire, comme l'a indiqué M. le rapporteur, a introduit
des améliorations. Les communes qui perdent de la population ne subiront les
effets du dépeuplement que progressivement. Les communes qui n'enregistrent que
de faibles diminutions pourront tabler sur une croissance modeste mais positive
de leur dotation forfaitaire - je crois que nous préservons les finances
locales. Quant aux collectivités dont la population croît, elles connaîtront,
dès l'année prochaine, une hausse significative de leur dotation.
Le texte s'est enrichi d'un certain nombre de dispositions relatives à
l'intercommunalité. Le Sénat a beaucoup oeuvré dans ce sens et l'Assemblée
nationale n'y a pas été insensible puisque nombre des initiatives de la Haute
Assemblée ont été retenues. Je crois que ces améliorations permettront de
soutenir la démarche intercommunale.
Enfin, le texte qui vous est proposé reprend l'amendement qui avaient été
présenté par le Gouvernement devant le Sénat et qui concerne le financement des
services départementaux d'incendie et de secours. J'ai d'ailleurs eu
l'occasion, tout à l'heure, de répondre à deux questions orales sans débat
relatives à ce sujet, posées par Mme Durrieu et par M. Ostermann.
Je remercie les rapporteurs, MM. Michel Mercier et Paul Girod, de l'excellent
travail qu'ils ont effectué pour clarifier les enjeux d'un texte de prime abord
mineur mais qui permettra à nos collectivités locales de voir le contrat de
croissance et de solidarité se poursuivre sans à-coup dans les prochaines
années.
Enfin, je précise que le Gouvernement ne présentera qu'un amendement, purement
technique.
M. le président.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, des compliments que vous
venez d'adresser au Sénat, ce qui me conforte dans l'idée que vous serez un
excellent avocat de l'institution sénatoriale.
(Sourires.)
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Après M. le rapporteur et M. le secrétaire
d'Etat, je veux dire à quel point en effet le Sénat s'est attaché à accomplir
son oeuvre législative pour que nos collectivités locales puissent assumer
leurs missions dans les meilleures conditions.
A mon tour, je veux remercier M. Paul Girod, rapporteur pour avis, et plus
spécialement M. Michel Mercier, rapporteur de notre commission des finances, de
la qualité du travail accompli. Je veux associer à ces remerciements le
Gouvernement, vous-même monsieur le secrétaire d'Etat, ainsi que vos services,
lesquels nous ont apporté une aide qui a été très précieuse sur ces sujets
techniques.
Je remercie également l'Assemblée nationale, car nous avons travaillé dans
d'excellentes conditions. Nous nous sommes retrouvés dans un paysage
parlementaire un peu particulier puisque, exceptionnellement, étaient saisies
au fond la commission des finances du Sénat et la commission des lois de
l'Assemblée nationale. Cette situation, qui n'est pas habituelle, nous a tout
de même permis de travailler dans de très bonnes conditions et d'aboutir à un
texte qui, je le répète, permettra à nos collectivités d'assumer leurs missions
dans les meilleures conditions.
Je saisis l'occasion pour rendre un hommage mérité au Sénat, qui est, en
effet, indispensable à la République,...
M. Claude Estier.
Nous n'avons jamais dit le contraire !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
... et nous attendons de vous,
monsieur le président, que vous le rappeliez à chaque instant.
M. le président.
Avec le concours de chacun !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous n'avons jamais prétendu supprimer le Sénat, nous !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est un sujet trop compliqué
pour moi, cher monsieur Dreyfus-Schmidt ! Restez à mon humble niveau : en
l'instant, il ne s'agit que des collectivités locales.
Quoi qu'il en soit, puisqu'il nous arrive, au Sénat, de critiquer le
Gouvernement, je veux pouvoir dire publiquement aujourd'hui que nous avons
entendu débattre très démocratiquement, dans le souci de l'intérêt général.
M. André Maman.
Très bien !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Certes, nous aurions espéré
obtenir, du point de vue financier, le lissage sur deux ans et non sur trois
ans, et il est vrai que la discussion du collectif hier soir nous a laissé une
amertume supplémentaire dans la mesure où nous nous sommes aperçus que la
croissance nous offrait des fruits qui étaient vraiment inespérés.
Cela étant, ne pleurons pas sur le lait renversé, considérons l'oeuvre
accomplie : je suis, encore une fois, convaincu que c'est ainsi que nous
pourrons élaborer l'administration dont les Français ont besoin pour faire
réussir notre pays.
(M. Pelchat applaudit.)
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
commission mixte paritaire a abouti à un texte qui ne prend en compte que pour
une très faible part les variations de population.
Les modalités de prise en compte du recensement concilient le dispositif voté
à l'Assemblée nationale et celui qu'a adopté le Sénat.
Ainsi, pour le calcul de la dotation d'aménagement, la rédaction de
l'Assemblée nationale a été retenue. Cette solution, qui vise à une prise en
compte progressive des variations de la population au moyen d'un lissage sur
trois ans, à la hausse comme à la baisse, permet d'éviter les ruptures trop
brutales dans les budgets des collectivités et de pallier les effets des
seuils.
Ce mécanisme satisfait les élus locaux, même s'ils savent que les variations
de population n'ont pas d'effet important sur les montants des dotations, eu
égard à la faible prise en compte de la population dans leur calcul.
En revanche, le facteur lié à la population joue un rôle primordial pour
l'éligibilité aux dotations de solidarité et pour le calcul du potentiel
fiscal.
C'est la première raison qui amène le groupe communiste républicain et citoyen
à préférer la solution qui vise à une prise en compte progressive.
En ce qui concerne l'interprétation du recensement pour la dotation
forfaitaire, on pourrait de prime abord se satisfaire du dispositif adopté par
le Sénat. En effet, contrairement au choix du Gouvernement de geler la dotation
forfaitaire au montant retenu en 1999 pour les communes qui perdent de la
population en allant jusqu'à les priver de l'évolution annuelle, le Sénat a
préféré conserver l'évolution normale et tenir compte de 50 % de la perte de
population.
Ce dispositif paraît plus satisfaisant pour l'ensemble des communes, mais il
est pénalisant pour les communes défavorisées qui, malgré l'augmentation des
dotations qui leur sont destinées, subiront, de fait, une forte diminution des
sommes qu'elles perçoivent au titre de la dotation de solidarité urbaine ou de
la dotation de solidarité rurale, d'autant plus que le mécanisme de lissage
adopté en contrepartie n'a pas été retenu.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'étaient félicités,
en première lecture, du choix fait par le Gouvernement de favoriser les
communes les plus pauvres, insistant ainsi sur les mécanismes de
péréquation.
En réalité, les finances locales doivent être réformées dans leur ensemble,
afin de rééquilibrer dans les budgets locaux la part des dotations et des
impôts pour que les principes de la décentralisation trouvent toute leur
efficacité et que l'ensemble des charges transférées et des nouvelles normes -
assainissement ou traitement des déchets - ou encore les défis que sont
l'application des 35 heures à la fonction publique territoriale ou la
pérennisation des emplois-jeunes soient financièrement assumables par les
collectivités.
Nous avons présenté une proposition qui permettrait de dégager des moyens
nouveaux, avec la taxation des actifs financiers : représentant 29 000
milliards de francs, ils ne sont assujettis à aucun titre alors que les
investissements autres que spéculatifs le sont.
Je voudrais également dire quelques mots sur la ribambelle d'articles ajoutés
au texte, tous relatifs à l'intercommunalité.
Ces articles viennent modifier la loi du 12 juillet 1999, qui a pourtant été
adoptée dans l'urgence. Vous essayez, par cavaliers législatifs, de régler de
nombreux cas d'espèce, montrant ainsi les difficultés du développement de
l'intercommunalité telle qu'elle est conçue.
Les sénateurs communistes, qui ont toujours été des promoteurs de la
coopération intercommunale, avaient regretté que la loi fixe de manière
beaucoup trop rigide les compétences transférées, réduisant ainsi la
souveraineté communale.
Nous avions été également extrêmement prudents sur les modes de
financement.
L'intercommunalité est, à notre avis, l'un des moyens les plus efficaces et
pertinents pour permettre aux collectivités de répondre aux besoins de nos
concitoyens. Or elle est conçue et utilisée comme moyen de rationaliser les
modes de gestion des compétences et les moyens.
La quasi-totalité des amendements que la Haute Assemblée a adoptés va dans le
sens d'une plus grande intégration fiscale des établissements intercommunaux,
anéantissant ainsi la libre administration des communes et leur pouvoir de
prélever l'impôt.
L'adoption de telles mesures contraint le groupe communiste républicain et
citoyen à s'abstenir sur l'ensemble de ce texte, malgré la nécessité de prendre
des mesures tenant compte du recensement pour le calcul des dotations d'Etat
aux collectivités territoriales.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement,
lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la
commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur
l'ensemble du texte, en ne retenant que les amendements ayant reçu l'accord du
Gouvernement.
Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :