Séance du 20 octobre 1999
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon
intervention est fondée sur l'article 36 du règlement du Sénat.
M. Papon a choisi la fuite, la fuite face à la justice de son pays, dont il
fut l'un des plus hauts fonctionnaires.
A l'heure de vérité, l'ancien préfet de Paris et secrétaire général de la
préfecture de la Gironde durant l'Occupation n'a pas osé affronter son passé,
son lourd passé !
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen sont indignés et
tiennent à vous faire part, madame la ministre, de leur colère, face au
comportement d'un homme qui, voilà plus de cinquante-cinq ans, a livré des
femmes et des hommes à un destin mortel.
M. Papon, lui, a été confronté non pas à la mort mais à la quête de la vérité.
Avec cynisme, il la refuse.
Madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement engage-t-il dès à présent
pour permettre, voire pour imposer, le retour dans les plus brefs délais de cet
homme qui, par son geste, bafoue l'honneur non seulement des familles
concernées mais aussi de son pays ?
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
et sur les travées socialistes.)
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, je souhaite apporter quelques précisions dans le cas où la Cour de
cassation serait conduite, demain, à constater la déchéance du pourvoi de M.
Papon, ce qui serait le cas si celui-ci ne se constituait pas prisonnier ce
soir.
D'abord, la décision de la cour d'assises deviendrait définitive et, par
conséquent, pourrait être mise à exécution.
Pour l'exécution de la décision de la cour d'assises, toutes les dispositions
seront prises afin que nous puissions nous assurer de la personne de M. Papon,
ce qui veut dire que, dès demain, si la déchéance du pourvoi est constatée par
la Cour de cassation, le procureur général près la Cour de cassation saisira
immédiatement le procureur général près la cour d'appel de Bordeaux, qui
lui-même demandera au procureur de Melun, lieu du domicile de M. Papon, d'aller
requérir, au besoin avec l'aide de la force publique, M. Papon.
Si M. Papon n'est pas chez lui, un ordre de recherche sera lancé sur le
territoire national et un mandat d'arrêt international sera envoyé
via
Interpol, l'Organisation internationale de police criminelle.
La décision de la cour d'assises condamnant M. Papon à dix ans de réclusion
criminelle pour complicité de crimes contre l'humanité doit en effet être
exécutée.
J'ajoute qu'il est, c'est vrai, particulièrement choquant de voir que M.
Papon, qui, tout au long de son procès, a invoqué comme argument pour sa
défense sa volonté - c'était sa présentation des choses - de servir l'Etat,
puisse décider de se soustraire à la justice de son pays.
En tout cas, les dispositions précises que je viens de vous indiquer seront
mises en oeuvre sans aucun délai dès que la cour de cassation aura pris sa
décision, et ce afin que la justice puisse faire exécuter la décision de la
cour d'assises de Bordeaux.
(Applaudissements sur les travées socialistes,
sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
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