Séance du 18 mai 1999
M. le président. La parole est à M. Leclerc, auteur de la question n° 476, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Dominique Leclerc. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite attirer votre attention sur les moyens octroyés aux hôpitaux de la région Centre au regard de la campagne budgétaire 1999 des établissements sanitaires.
En effet, pour cette campagne, une circulaire du 26 novembre 1998 a arrêté non seulement une orientation générale - la campagne doit s'inscrire dans le cadre de la révision des schémas régionaux d'organisation sanitaire, les SROS - mais aussi un objectif prioritaire : concentrer l'effort de réduction des inégalités sur les régions qui en ont le plus besoin.
Pour atteindre cet objectif, cette fameuse circulaire a fixé le taux d'évolution de la région Centre à 2,28 %, ce qui peut effectivement paraître assez favorable puisque le taux national est de 2,04 %. Toutefois, ce taux, établi à partir de différents critères, dont deux semblent inadéquats ou plus ou moins inéquitables, ne tient pas compte de la réalité qui est la nôtre.
Conséquemment, la dotation allouée à notre région semble insuffisante pour permettre à ses établissements de respecter l'orientation générale de la circulaire.
Les deux premiers critères, à savoir les dépenses hospitalières par habitant hospitalisable dans le secteur public et l'efficience économique mesurée en coût du point ISA, sont pertinents. Ils expriment bien les besoins de la population en matière de soins et l'efficience économique des professionnels pour répondre à ces besoins.
En revanche, tenir compte du coût des patients traités hors de leur région d'habitation, d'une part, et de l'indice comparatif de mortalité générale, d'autre part, semble plus critiquable.
En effet, prendre en considération le coût des patients traités hors de leur région d'habitation est, en premier lieu, totalement inéquitable. Cela conduit à doter une deuxième fois l'établissement qui reçoit le malade pour sa prestation. Est-ce bien normal ?
En second lieu, ce critère n'et pas porteur de changement du tissu hospitalier. Il entérine la fuite des patients pour se faire soigner et interdit ainsi toute politique d'aménagement du territoire en matière d'offre de soins.
Par ailleurs, que dire de l'indice comparatif de mortalité générale, si ce n'est que ce critère de répartition est inadéquat pour doter les établissements ? En effet, les sommes versées au titre de ce dernier critère ne modifient en rien l'évolution de son niveau.
Vous l'aurez compris, mon sentiment à l'égard de ces deux nouveaux critères qui ont présidé à la dernière répartition interrégionale est négatif, car ils ne permettent pas d'évaluer correctement la réalité du terrain, et plus spécialement celle de notre région.
Alors que notre région est sous-dotée si l'on tient compte des deux premiers critères, elle se rapproche de la moyenne nationale si l'on prend en considération les deux derniers.
C'est pourquoi il est, à mon sens, urgent de mettre un terme aux disparités entre régions - nous nous rejoignons - et de mettre en place un outil d'évaluation suffisamment performant et fiable qui couvrirait l'ensemble des structures et permettrait d'apprécier et de comparer la performance globale des dispositifs régionaux d'offre de soins.
Ma question est donc la suivante, monsieur le secrétaire d'Etat : êtes-vous prêt à mesurer et à prendre en compte l'efficience des structures d'offre ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour répondre à cette importante question.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le président, je réponds à cette importante question devant des orfèvres !
Monsieur le sénateur, à Poitiers, où j'étais hier, le centre hospitalier universitaire de la région Poitou-Charentes, qui n'est pas très éloignée de la vôtre, présente des caractéristiques qui ne sont pas très éloignées de celles de la région Centre.
Par le passé, les régions étaient pratiquement considérées de la même manière ; or il fallait bien réduire certaines inégalités. Nous essayons donc d'affiner la situation. C'est sans doute imparfait, j'en suis le premier convaincu, et votre président de séance sans doute aussi.
Je n'accepte pas de reconnaître l'importance que devraient avoir les deux critères que sont l'indice de mortalité et le flux de personnes extérieures à la région considérée, car ils sont encore trop approximatifs, alors que nous devons rechercher une plus juste répartition.
Avant de répondre précisément à votre question, je dirai qu'avoir retenu le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie, le Poitou-Charentes et l'Alsace comme étant des régions souffrant d'un manque de financement par rapport à d'autres me paraît légitime. En tout cas, c'est l'argument qu'hier, au CHU de Poitiers, on a très bien accepté parce qu'il est vrai que nous avons doté très légèrement plus la région Poitou-Charentes, et ce nécessairement aux dépens des autres régions.
Vous avez raison, monsieur le sénateur, de noter qu'en 1999 la dotation régionale de dépenses hospitalières de la région Centre a progressé de 2,28 % par rapport à une moyenne nationale de 2,04 %. Mais la progression a toujours été supérieure à la moyenne nationale, je connais les problèmes spécifiques de votre région. Nous avons, en effet, pris en compte, d'une part, le flux des patients habitant hors région - c'est un des arguments avancés par les grosses concentrations hospitalières - et, d'autre part, l'indice comparatif de mortalité.
Quels ont été les choix de l'agence régionale de l'hospitalisation de votre région pour la répartition de la dotation généralisée pour 1999 ?
C'est, d'abord, la création d'une enveloppe de 50 millions de francs pour le financement de mesures nouvelles prévues dans le cadre de contrats d'objectifs et de moyens ou justifiées par la mise en oeuvre des priorités ministérielles : avant tout l'amélioration de la sécurité des soins, les schémas des « urgences » et de la « psychiatrie ». Je serai très attentif - et je le suis déjà - à ce que la psychiatrie, qui est une spécialité qui s'interroge elle-même et qui ne trouve pas sa place dans l'ouverture vers l'hôpital général, ne soit pas sous-dotée.
C'est, ensuite, l'actualisation des dépenses de personnel ou des dépenses médicales et pharmaceutiques en fonction de la valeur du point d'indice synthétique d'activité, le fameux point ISA, qui, lui aussi, est imparfait mais qui correspond tout de même à ce que nous avons trouvé pour le moment de plus juste.
C'est, enfin, la poursuite de la correction des inégalités entre établissements surdotés et sous-dotés à l'intérieur même de la région, avec le souci de favoriser des complémentarités, voire des rapprochements.
Des dossiers d'investissement pour des établissements hospitaliers de la région ont été également constitués dans le cadre de la programmation du Fonds d'investissement et de modernisation des hôpitaux pour 1999, pour 500 millions de francs, monsieur le sénateur. Martine Aubry et moi-même examinerons ces demandes avec la plus grande attention pour tenir compte de l'ancienneté du patrimoine hospitalier de la région et de la nécessaire politique d'ajustement dans votre région Centre.
Par ailleurs, je vous rappelle, monsieur le sénateur, qu'un effort financier d'environ 20 millions de francs a été consenti par le Gouvernement en fin d'année 1998 et au début de cette année pour permettre à l'Agence régionale de l'hospitalisation un accroissement des activités, notamment pour les établissements dits référents. Je pense, par exemple, au CHU de Tours et au centre hospitalier régional d'Orléans qui est le plus grand centre hospitalier non-CHU de France.
Croyez bien, monsieur le sénateur, que nous continuons à suivre de près la politique hospitalière menée dans la région Centre, et ce pour une raison très précise. En effet, les efforts de rapprochement - la complémentarité doit exister dans ce domaine - entre les établissements publics et les établissements privés ont débouché sur des progrès considérables, que nous tenons à soutenir.
Je me suis rendu à plusieurs reprises dans cette région et je le ferai à nouveau volontiers.
M. Dominique Leclerc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre réponse. Corriger au moyen de critères que l'on peut discuter les inégalités entre régions est, il est vrai, chose difficile. Il faut par ailleurs - vous l'avez fait - souligner le travail énorme qu'a accompli notre agence régionale sous la houlette de M. Marrot.
Au-delà des critères de péréquation, il faudra entreprendre une réforme du mode de financement des hôpitaux afin de garantir le service public et la qualité des soins tout en accélérant cette recomposition du tissu hospitalier.
Cette réforme - vaste problème - ne doit cependant pas entraîner une régulation plus ou moins arbitraire et draconienne du système hospitalier qui viderait l'hôpital public d'une part importante de ses ressources humaines, au détriment de la qualité des soins et de la sécurité.
C'est pourquoi, pour répondre à ces attentes, il faudrait évoluer vers un système de financement fondé sur l'application d'un double mécanisme : d'une part, une dotation destinée à financer l'ensemble des missions de service public et sociales d'autre part, un système tarifaire fondé sur l'activité en fonction des pathologies des établissements en considération de leurs seules performances.
Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur le secrétaire d'Etat, je voulais poser cette question ce matin.
SITUATION DE LA CAISSE DE SÉCURITÉ SOCIALE
DES FRANÇAIS DE L'ÉTRANGER