Séance du 17 février 1999
M. le président. Par amendement n° 31, le Gouvernement propose d'ajouter, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au début de l'article L. 121-2 du code du service national, sont ajoutés les mots : "Les jeunes femmes nées avant le 31 décembre 1982, ainsi que". »
La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. La loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national prévoit, à l'article L. 112-1, que le livre Ier du code du service national, qui régit les nouvelles obligations liées à la défense, s'applique aux jeunes femmes nées après le 31 décembre 1982.
En effet, pour assurer la montée en puissance du parcours de citoyenneté, il avait été retenu, lors de l'élaboration de cette loi, qu'il s'appliquerait pleinement aux Françaises à partir du 1er janvier 1999, avec le recensement à l'âge de seize ans. Cela permettait à la direction du service national de préparer méthodiquement l'entrée des jeunes filles, jusqu'ici exemptes de toute obligation, dans le nouveau dispositif.
Ainsi, ce sont les Françaises nées à partir du 1er janvier 1983 qui entrent les premières dans le champ d'application du livre Ier du code du service national et qui pourront, en vertu de son article L. 121-1, déposer à l'âge de dix-huit ans une demande pour servir comme volontaires, c'est-à-dire à partir du 1er janvier 2001.
Les emplois de volontaires, ouverts à des jeunes de dix-huit à vingt-six ans sur diverses fonctions exercées jusque-là par des appelés, constituent une des composantes de l'armée professionnelle ; harmonisés en termes de rémunération et de durée avec les emplois-jeunes, ils représentent une voie d'insertion et de promotion pour de nombreux jeunes à la recherche d'un premier emploi durable.
Or, depuis l'adoption de la loi du 28 octobre 1987, la volonté du Gouvernement de placer au coeur de ses actions prioritaires la sécurité publique à conduit à envisager un recrutement renforcé des volontaires en faveur de la gendarmerie.
La gendarmerie nationale, qui doit employer 16 232 volontaires en 2002, a été autorisée à réaliser 800 recrutements à la fin de 1998 et 3 000 recrutements au cours de l'année 1999. A cet égard, un élargissement aux jeunes femmes de l'accès à ces postes dès 1999 est un gage de qualité et de diversité.
En outre, le recrutement de femmes parmi les sous-officiers de gendarmerie ne progresse que lentement - 9,14 % pour l'année 1998, alors que la progression était de 8,14 % en 1992 - et la présence féminine parmi les premiers jeunes volontaires, dont beaucoup chercheront à entrer ultérieurement dans la gendarmerie nationale, contribuera à mieux réaliser la mixité effective de cette arme au contact quotidien des Français.
L'ouverture de ce recrutement aux jeunes femmes nées avant le 31 décembre 1982 apparaît donc nécessaire et répondra à l'attente des jeunes citoyennes qui ont déjà manifesté un intérêt pour servir dans la gendarmerie en qualité de volontaires.
Tel est l'objet du présent amendement qui vise donc à compléter l'article L. 121-2, lequel prévoit déjà l'accès des jeunes hommes aux emplois de volontaires pendant la phase transitoire de la réforme du service national.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je l'ai dit dans la discussion générale, j'ai émis personnellement en commission un avis favorable sur cet amendement, tout en mettant le Gouvernement face à ses responsabilités puisqu'il s'agit d'un cavalier qui n'a rien à voir avec la police municipale, comme l'ont d'ailleurs souligné les amis mêmes de M. le ministre : les membres du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen ont considéré que, si cet amendement était intéressant sur le fond, il n'avait rien à voir avec le présent projet de loi.
Cela étant, il faut reconnaître que le Gouvernement ne dispose pas d'autre texte sur lequel « raccrocher » cet amendement et considérer avec un peu d'humour que les services de l'Etat ont sans doute besoin de s'appuyer sur la police municipale pour pouvoir faire progresser le recrutement féminin ! (Sourires.)
Il convient donc que nous adoptions cet amendement, qui permettra à la gendarmerie de recruter des volontaires, et notamment, en l'espèce, des jeunes femmes nées avant le 31 décembre 1982, qui, jusqu'à aujourd'hui, se voyaient écartées tout à fait injustement de cette possibilité.
Je demande au Gouvernement, qui reproche parfois aux parlementaires de proposer des cavaliers et qui se sert de cet argument pour en demander le rejet, de prendre acte que le Sénat fait aujourd'hui preuve de complaisance et de raison.
Je souhaite que vos propres amis, monsieur le ministre, soutiennent également cet amendement, qui permet aux jeunes femmes qui le désirent d'enter dans la gendarmerie.
Une question subsidiaire a d'ailleurs été posée par M. Badinter : appellerez-vous ces futures recrues « officiers » ou « officières » ? (Sourires.)
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je remercie M. le rapporteur de son adhésion finale à cet amendement, dont le rattachement au texte dont nous discutons peut, certes, soulever des interrogations. Le Gouvernement n'abuse cependant pas de la formule, s'agissant surtout, en l'occurrence, d'une mesure de caractère transitoire qui ne bouleverse pas les institutions et qui participe de la préoccupation du Gouvernement, révélée par maints aspects, de parfaire la sécurité.
Quant à la dénomination de ces jeunes femmes, vous accepterez sans doute, monsieur le rapporteur, que je laisse au ministre de la défense le soin de trancher cette question ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 31.
M. Daniel Hoeffel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Il me paraît opportun et souhaitable, en l'occurrence, de surmonter nos scrupules de procédure...
M. Claude Estier. Très bien !
M. Daniel Hoeffel. ... et d'apporter notre soutien à cet amendement, pour des raisons à la fois quantitatives et qualitatives.
Quantitatives parce que la montée de l'insécurité exige une montée des effectifs de la gendarmerie, et le souci exprimé par le Gouvernement est, à cet égard, tout à fait légitime.
Des raisons qualitatives parce que nous savons par expérience, les uns et les autres, que, dans les brigades de gendarmerie où l'élément féminin est représenté, celui-ci fait preuve de beaucoup d'éfficacité sur le terrain.
Cet amendement ne peut donc que valoriser une arme qui nous est chère.
M. Claude Estier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Certes, on peut comprendre que certains de nos collègues de la commission des lois aient fait valoir qu'il s'agissait d'un cavalier, mais après tout il y a aussi la gendarmerie à cheval ! (Rires.)
M. le président. M. le ministre de l'intérieur l'a lui-même dit tout à l'heure.
M. Claude Estier. Même si, du strict point de vue de la procédure, il s'agit peut-être d'un cavalier, l'intérêt de cet amendement est tel que le groupe socialiste le votera.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 20.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.
Vote sur l'ensemble