Séance du 16 juin 1998
M. le président. « Art. 68. - Au deuxième alinéa de l'article L. 553-4 du code de la sécurité sociale, après les mots : "Toutefois, peuvent être saisis", sont insérés les mots : "dans la limite d'un montant mensuel déterminé dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 553-2". »
Par amendement n° 318, Mmes Derycke, Dieulangard, Printz, MM. Huguet, Vezinhet, Autain et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par cet article pour modifier le deuxième alinéa de l'article L. 553-4 du code de la sécurité sociale, après les mots : « d'un montant mensuel », d'insérer les mots : « ne pouvant dépasser 20 % du montant des prestations familiales et ».
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Notre objectif, qui est voisin de celui visé par Mme Dusseau dans son amendement n° 284, est de limiter la saisie des prestations familiales.
Je rappelle que, selon le principe établi par l'article L. 553-4 du code de la sécurité sociale, les prestations familiales sont incessibles et insaisissables. Nous devons veiller à nous éloigner le moins possible de ce principe, sauf lorsqu'il apparaît que la saisie va dans le sens des intérêts de l'enfant lui-même, par exemple lorsqu'il s'agit de financer des frais d'éducation.
Mme Dusseau propose un « reste à vivre » au moins équivalent au RMI et tenant compte de la composition de la famille. Nous suggérons, quant à nous, que le montant saisi soit limité à 20 % des prestations familiales, tout en conservant l'application des conditions prévues à l'article L. 553-2 du code de la sécutiré sociale, qui ont trait à la composition de la famille, à ses ressources, à ses charges de logement et aux autres prestations servies.
Pourquoi avons-nous retenu cette proportion de 20 % ? Parce qu'elle correspond à la pratique le plus souvent observée aujourd'hui. En effet, de nombreux comptables des caisses d'allocations familiales limitent eux-mêmes à 20 % le montant des saisies.
Nous défendons notre amendement tout en approuvant celui de Mme Dusseau, très proche du nôtre, je le répète, l'important étant que, dans l'intérêt des familles et des enfants, l'un de ces deux amendements recueille l'assentiment du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Celui-ci aurait pu avoir un sens au regard du projet de loi initial, qui prévoyait que le taux maximal autorisé de la saisie sur prestations familiales ne pouvait excéder 50 %.
Mais la solution retenue par l'Assemblée nationale est nettement plus avantageuse puisqu'elle consiste à faire référence à la disposition qui a été incluse dans la « loi famille » du 25 juillet 1994 et, pour la fixation du taux maximal, à la composition de la famille, au niveau de ses ressources, à l'ampleur des charges de logement auxquelles elle doit faire face et au montant total des prestations qui lui sont servies par les caisses d'allocations familiales.
Dans certains cas, notamment s'il s'agit d'une famille nombreuse ayant de faibles ressources, le taux maximal de la saisie autorisée pourra donc être inférieur à 20 %. Dès lors, l'amendement est moins avantageux puisqu'il risque de conduire à appliquer systématiquement un taux de 20 %, alors que, par décret, il est permis de s'adapter à la situation de la famille et donc d'appliquer un taux bien moindre.
La commission approuve par conséquent le texte adopté par l'Assemblée nationale, qui rend hommage à la pertinence de la loi « famille », et est hostile à l'amendement n° 318, qui paraît plutôt restrictif.
En revanche, il devient essentiel que le décret qui est attendu maintenant depuis le 25 juillet 1994 puisse être publié le plus rapidement possible. La Caisse nationale d'allocations familiales a fait savoir qu'elle avait donné son accord sur un projet de décret sans qu'aucune suite y ait été donnée. Pouvez-vous vous engager, madame la ministre, sur la date de parution de ce décret, qui ne devrait plus poser de problèmes techniques insurmontables ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement est opposé à cet amendement pour des raisons identiques à celles que vient d'exprimer M. le rapporteur. En effet, si je comprends parfaitement l'objectif des signataires de l'amendement, je crains qu'il ne présente un certain nombre d'inconvénients par rapport à la rédaction actuelle de l'article 68 dans la mesure où, effectivement, nous pouvons dorénavant adapter la saisie à la situation familiale et pécuniaire réelle de la famille.
M. le président. Madame Derycke, l'amendement n° 318 est-il maintenu ?
Mme Dinah Derycke. Compte tenu des explications qui viennent d'être données, j'accepte de retirer mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 318 est retiré.
Par amendement n° 284, Mme Dusseau propose de compléter le texte présenté par l'article 68 pour compléter le deuxième alinéa de l'article L. 553-4 du code de la sécurité sociale par les mots : « et en garantissant un niveau de ressources au moins égal au montant du revenu minimum d'insertion correspondant à la composition de la famille. »
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Comparable à celle de Mme Derycke, ma démarche obéit toutefois à une logique légèrement différente puisque son amendement visait à instituer un pourcentage maximal de saisie, alors que le mien tend à faire en sorte que le montant saisi garantisse néanmoins un plancher de ressources à la famille.
J'ai bien entendu l'argumentation de M. le rapporteur et celle de Mme la ministre. S'il est vraiment acquis que, en tout état de cause, la saisie ne peut pas ramener les ressources de la famille à un niveau inférieur au RMI, compte tenu de la composition de la famille, je serai disposée à retirer mon amendement. Je souhaite donc que Mme la ministre veuille bien m'apporter des assurances sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission rejoint le souhait de Mme Dusseau d'entendre Mme la ministre sur cette question.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. La saisie des prestations familiales est aujourd'hui extrêmement encadrée, et cela dans le souci de prendre en compte les besoins des enfants. C'est ainsi qu'elle peut concerner le remboursement des frais de cantine scolaire non acquittés par les parents ; dans ce cas, il ne s'agit évidemment pas de soustraire purement et simplement telle somme à la famille.
Dès lors, il peut arriver que cette saisie effectuée dans le souci du bien-être des enfants ne permette pas de maintenir pour les personnes concernées des ressources équivalant au RMI.
En tout état de cause, dans la plupart des cas, la rédaction actuelle, puisqu'elle permet de prendre en compte la situation réelle de la famille, est plus avantageuse que le texte que vous proposez, madame Dusseau.
M. le président. Madame Dusseau, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Joëlle Dusseau. Oui, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 284, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 68.
(L'article 68 est adopté.)
Articles additionnels avant l'article 69