M. le président. Sur le texte proposé pour l'article L. 355-33 du code de la santé publique, je suis d'abord saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Jolibois, au nom de la commission.
L'amendement n° 33 est déposé par MM. Dreyfus-Schmidt, Allouche et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent, dans le premier alinéa du texte proposé par le paragraphe I de l'article 6 pour l'article L. 355-33 du code de la santé publique, à remplacer les mots : « établie et mise à jour annuellement par arrêté du représentant de l'Etat dans le département, le territoire ou la collectivité, pris après avis du procureur de la République » par les mots « établie par le procureur de la République ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Nos distingués collègues du groupe socialiste ayant déposé un amendement identique, je pense que nous allons parvenir, sur ce point, à un consensus.
Nous proposons en fait de revenir au texte adopté en première lecture en prévoyant que la liste des médecins coordonnateurs est établie par le procureur de la République et non par le préfet. Nous reprenons là ce qui est prévu à l'article 493-1 du code civil pour les médecins appelés à intervenir en matière de majeurs protégés.
M. le président. La parole est à M. Allouche, pour défendre l'amendement n° 33.
M. Guy Allouche. Cet amendement, comme celui de la commission des lois, a pour objet de confier au procureur de la République le soin d'établir la liste sur laquelle sera choisi le médecin coordonnateur.
Cette disposition avait été adopté par le Sénat en première lecture mais elle a été remise en cause par nos collègues de l'Assemblée nationale en deuxième lecture.
Un système identique a déjà doublement fait ses preuves.
En effet, le législateur de 1967 a décidé que l'altération des facultés mentales ou corporelles d'un malade devait être constatée, lorsqu'il s'agit de prononcer l'ouverture d'une tutelle, par un médecin spécialiste choisi sur une liste établie par le procureur de la République ; c'est l'article 493-1 du code civil.
Par ailleurs, l'article L. 348-1 du code de la santé publique dispose qu'« il ne peut être mis fin aux hospitalisations d'office intervenues en application de l'article L. 348 que sur les décisions conformes de deux pyschiatres n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le préfet sur une liste établie par le procureur de la République ».
Ce dernier ayant l'habitude d'arrêter des listes de spécialistes désignés pour l'ouverture des tutelles et pour la fin des hospitalisations d'office, il nous paraît tout à fait logique qu'il arrête également la liste des médecins coordonnateurs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 11 et 33 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je n'y suis pas favorable, monsieur le président.
Je pense tout d'abord qu'il n'y a pas lieu de comparer cette liste avec celle des médecins habilités à constater l'altération des facultés mentales ou avec celle des psychiatres pouvant autoriser la mainlevée d'un internement. Dans ces deux cas, les médecins interviennent de façon ponctuelle et leur rôle s'apparente à celui d'un expert.
Dans le cas qui nous occupe, l'action du médecin coordonateur s'inscrira dans la durée et aura une véritable dimension de santé publique. Il me paraît donc préférable que ce médecin figure sur une liste établie par les autorités sanitaires compétentes après, bien sûr, avoir recueilli l'avis du procureur de la République.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 11 et 33, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 12, M. Jolibois, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit la seconde phrase du deuxième alinéa (1°) du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 355-33 du code de la santé publique : « En cas de désaccord persistant sur le choix effectué, le médecin est désigné par le juge de l'application des peines. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. L'article 6 prévoit la désignation par le juge de l'application des peines d'un médecin coordonnateur, lequel est chargé d'inviter le condamné à choisir un médecin traitant. Ce choix est soumis à l'accord du médecin coordonnateur. Il importe, en effet, que le médecin coordonnateur ait un droit de regard. Si le condamné qui est soumis au suivi socio-judiciaire choisit un médecin traitant qui n'est pas du tout compétent pour le guérir, ou du moins essayer de le soigner, le médecin coordonnateur doit pouvoir intervenir.
Cela étant, les médecins et surtout le Conseil national de l'ordre des médecins et les organisations de psychiatres se sont inquiétés du problème posé par le droit d'opposition que l'on veut donner au médecin coordonnateur.
Nous proposons donc de revenir à la solution qui avait été proposée par la commission des lois en première lecture, à savoir que, « en cas de désaccord persistant sur le choix effectué, le médecin est désigné par le juge de l'application des peines. »
Cette solution conduira en effet à un dialogue en cas de désaccord entre le patient et le médecin coordonnateur, le juge de l'application des peines n'intervenant qu'en dernier recours. Elle supprime le « droit de veto » du médecin coordonnateur, qui a tant inquiété les médecins, sans pour autant permettre au condamné de choisir n'importe qui.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je comprends tout à fait la préoccupation de la commission et de son rapporteur. Toutefois, comme je l'ai indiqué en première lecture, il ne me semble pas possible de toucher à la liberté de choix du médecin traitant.
Il ne faut pas perdre de vue, bien entendu, qu'en cas de désaccord entre le médecin coordonnateur et le condamné sur le choix du médecin traitant, le juge de l'application des peines devra de toute façon intervenir. Mais son intervention est de l'ordre du rappel à la loi et ne peut concerner que la mesure judiciaire elle-même.
Ainsi, si le désaccord devait persister dans des conditions qui remettent en cause le principe même du suivi socio-judiciaire, la solution consisterait alors soit à mettre à exécution, en tout ou partie, la sanction pénale, soit, le cas échéant, à désaisir le médecin coordonnateur s'il était avéré que le blocage lui est imputable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 355-33 du code de la santé publique.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 355-34 DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE